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ATAD 3 – Implémentation & Risques.

➢ Contexte.

Le 22 décembre 2021, la Commission Européenne a publié la proposition de Directive ATAD 3, dite


Unshell Directive, dont l’objectif est de limiter l’utilisation des sociétés écrans. En substance, la Directive se
propose de s’attaquer aux montages fiscaux agressifs au sein de l’UE, basés sur des entités démunies ou
manquant de substance économique.

L’instrument vise à titre principal les sociétés holdings, financières, détentrices de droits de propriété
intellectuelle et immobilière avec une activité, ou des actifs, transfrontaliers. Les entreprises financières
réglementées ou les sociétés bancaires sont exclues du champ d’application.

Les entreprises éligibles devront ainsi déclarer spontanément à l’administration si elles présentent ou non
un risque d’être considérées comme sociétés écrans à travers l’application de plusieurs critères. En cas de
caractérisation positive, la société sera fiscalement neutralisée : son actionnaire sera imposable par trans-
parence et le bénéfice par la société écran des dispositions favorables des directives et des conventions
sera écarté.

L’entrée en vigueur devrait être reportée au 1er janvier 2025, et ne concernera les entreprises qu’à partir
du 1er janvier 2023 puisque les mesures contenues dans la Directive s’apprécient sur une période de 2 ans
rétroactivement1.

➢ Risque pour le Groupe CMA CGM.

Un risque éventuel concerne le Groupe CMA CGM. Notamment en ce qui concerne le schéma de dé-
tention des agences maritimes à travers le monde, détenues indirectement par CMA CGM S.A (ci-après ;
CCSA). En effet, celles-ci sont détenues par la holding CMA CGM Agencies Worldwide (ci-après ;
CCAW) selon le schéma suivant :

1Projet de rapport sur la proposition de directive du Conseil établissant des règles pour empêcher l’utilisation abusive d’entités
écrans à des fins fiscales et modifiant la directive 2011/16/UE (COM(2021)0565 – C9-0041/2022 – 2021/0434(CNS), p.20.
CMA CGM Siège Social – Boulevard Jacques Saadé - 4 Quai d’Arenc – CS 30154 – 13235 Marseille Cedex 02 – France - Tél : +33 (0)4 88 91 90 00

Siret 562 024 422 00486 – CMA CGM Société Anonyme au capital de 249 985 429,74 euros – B 562 024 422 R.C.S. Marseille

www.cmacgm-group.com

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Il conviendra de déterminer si cette structure déclenche une obligation déclarative en application des
dispositions d’ATAD 3 et s’il existe, le cas échéant, un risque de neutralisation fiscale de CCAW ou de
CCSA.

➢ Définitions.

Le texte proposé définit à titre liminaire quelques termes inhérents au projet.

Parmi eux, « actionnaires de l’entreprise » est défini ainsi ;

« Les personnes physiques ou entités détenant directement des actions, des titres, des parts, des par-
ticipations, des droits d’actionnaire, un droit sur les bénéfices ou tout droit équivalent dans l’entre-
prise et, en cas de participations indirectes, les personnes physiques ou entités détenant des titres dans
l’entreprise par l’intermédiaire d’une entreprise ou d’une chaîne d’entreprises dont aucune d’entre
elles ne satisfait aux indicateurs de substance minimale énoncés à l’article 7, paragraphe 1, de la pré-
sente directive ».

De plus, « Etat membre de l’entreprise » est défini ainsi ;

« L’Etat membre dans lequel l’entreprise a sa résidence fiscale ».

➢ Champ d’application de la Directive.

La directive a délibérément un champ d’application vaste, et vise à englober toutes les entreprises qui
peuvent être considérées comme résidentes fiscales d’un Etat membre de l’Union Européenne2.

La structure se fonde sur 7 étapes :

1. Les entreprises étant soumises à une déclaration (parce qu’avérées « à risque ») ;


2. Les déclarations ;
3. La possibilité d’obtenir une exemption de déclaration en raison de l’absence de motivations de
nature fiscale ;
4. La présomption d’absence de substance minimale ;
5. La possibilité de renversement de la présomption ;
6. Les conséquences fiscales ;
7. L’échange automatique d’informations et le contrôle fiscal.

Le texte établit un test qui aidera les Etats membres à identifier les entreprises qui exercent une activité
économique, mais qui n’ont pas de substance minimale et qui sont utilisées de manière abusive aux fins
de l’obtention d’avantage fiscaux. Est ainsi mis en place un « test sur la substance », dont la première

2 Proposition de Directive du Conseil, établissant des règles pour empêcher l’utilisation abusive d’entités écrans à des fins
fiscales et modifiant la directive 2011/16/UE, n°2021/0434 (ci-après : ATAD 3) ; Article 2.

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étape vise à distinguer les différents types d’entreprises, entre celles présentant un risque de manquer de
substance et celles présentant un risque faible.

La première composante de la première étape est donc la résidence fiscale de l’entreprise étudiée, celle-
ci doit être au sein de l’UE.

➢ Identification des entreprises qui ne satisfont pas aux indicateurs de substance minimale
à des fins fiscales.

Sont par principe exclues du test sur la substance, les entreprises suivantes3 ;

- Les entreprises cotées sur un marché réglementé.


- Les entreprises financières réglementées4.
- Les entreprises holding exclues (point développé ultérieurement).
- Les entreprises employant au moins cinq salariés (ou équivalents) qui exercent exclusivement les
activités générant les revenus pertinents pour la Directive.

➔ Cas particulier des Holding exclues.

Cette catégorie est composée de deux sous-divisions :

- Les entreprises dont l’activité principale consiste à détenir des participations dans des sociétés
opérationnelles dans le même État membre tandis que leurs bénéficiaires effectifs ont également
leur résidence fiscale dans le même État membre ;
- Les entreprises poursuivant des activités de holding qui ont leur résidence fiscale dans le même
État membre que l’actionnaire ou les actionnaires de l’entreprise ou l’entité mère ultime au sens
de l’annexe III, section I, point 7, de la directive 2011/16/UE.

Il est précisé que l’entité mère ultime au sens de l’annexe III, section I, point 7, de la directive
2011/16/UE s’entend de l’entité :

« Constitutive d'un Groupe d'entreprises multinationales qui remplit les critères suivants :

• a) elle détient directement ou indirectement une participation suffisante dans une ou plusieurs
autres Entités constitutives de ce Groupe d'entreprises multinationales de sorte qu'elle est
tenue d'établir des États financiers consolidés selon les principes comptables généralement
appliqués dans sa juridiction de résidence fiscale, ou serait tenue de le faire si ses participations
étaient cotées en Bourse dans sa juridiction de résidence fiscale ;

3 Proposition de Directive du Conseil ATAD 3 ; Article 7, paragraphe 2.


4 Cela englobe, limitativement : les établissements de crédit, les entreprises d’investissement, les FIA & OPVCM, les entre-
prises d’assurance et de réassurance, les institutions de retraite, les entités de titrisation, les sociétés de gestion (de FIA, Eu-
VECA, EuSEF, ELTIF, OPVCM), les sociétés holding d’assurance, les prestataires de services de financement participatif,
les prestataires de services sur cryptoactifs, les établissements de paiement et de monnaie électronique.

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• b) aucune autre Entité constitutive d'un tel Groupe d'entreprises multinationales ne détient
directement ou indirectement une participation décrite au point a) dans l'Entité constitutive
susmentionnée ».

➢ Application au cas particulier de CCAW.

Ainsi qu’énoncé précédemment : les entreprises poursuivant des activités de holding qui ont leur rési-
dence fiscale dans le même État membre que l’actionnaire ou les actionnaires de l’entreprise ou l’entité
mère ultime au sens de l’annexe III, section I, point 7, de la directive 2011/16/UE sont exclues du
champ d’application de la directive.

Il convient, pour étudier le cas précis de CCAW, de rappeler qu’elle est détenue de manière directe à
100% par CCSA ; que sa résidence fiscale est en France, de même que la résidence fiscale de CCSA.

Les termes sujets à interprétation et permettant de placer CCAW à l’intérieur ou à l’extérieur des sociétés
exclues de principe sont : activités de holding / résidence fiscale / actionnaire.

Nous avons préalablement défini le terme actionnaire. En conséquence de la définition posée par la di-
rective il n’existe aucun flou quant à la qualité d’actionnaire unique de CCSA dans CCAW.

Il n’existe également aucun flou quant à la résidence fiscale française de CCSA et de CCAW, qui sont
ainsi résidentes fiscales du même Etat, Etat qui est un Etat membre de l’Union Européenne.

Enfin, CCAW étant une entité dont l’unique vocation est de détenir des participations dans les agences
maritimes du réseau CMA CGM, il n’existe pas de flou quant à sa qualité d’entreprise poursuivant des
activités de holding.

Il semble donc possible de conclure que CCAW, en elle-même, ne présente pas de risques eu égard aux
dispositions de la Directive ATAD 3.

➢ Application au cas particulier de CCSA.

Le risque concernant CCAW étudié, demeure celui concernant CCSA. Il apparait nécessaire de rappeler
à ce stade que sont exclues du champ d’application de la Directive, les entreprises employant au moins
cinq salariés ou membres du personnel équivalents temps plein qui exercent exclusivement les activités
générant les revenus pertinents.

Il est précisé que la Directive entend par revenus pertinents5 :

- Les intérêts ou tout autre revenu généré par des actifs financiers.
- Les redevances ou tout autre revenu provenant de la propriété intellectuelle.
- Les dividendes et revenues provenant de la cession d’actions.
- Les revenus provenant de crédits-bails.

5 Proposition de Directive du Conseil ATAD 3 ; Article 4.

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- Les revenus provenant de biens immobiliers.
- Les revenus provenant de biens mobiliers autres que les actions, espèces ou les titres détenus à
des fins privées et d’une valeur comptable supérieure à 1,000,000 EUR.
- Les revenus provenant d’activités d’assurance, d’activités bancaires ou d’autres activités finan-
cières.
- Les revenus provenant de services que l’entreprise a externalisés à d’autres entreprises associées.

Il n’existe ici pas de flou quant l’emploi, par CCSA, de cinq salariés au moins ou équivalents contribuant
exclusivement aux activités générant les revenus pertinents. Il semble donc possible de déduire que
CCSA, en elle-même, n’est pas susceptible de déclencher une obligation déclarative résultant des dispo-
sitions de la Directive ATAD 3.

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