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Les partages entre l'Empire russe et l'Empire d'Autriche

Articles connexes : Ukraine de la rive gauche et Ukraine de la rive droite.


Catherine la Grande, impératrice de Russie, supprime le Hetmanat au milieu du XVIIIe siècle et
détruit la Sitch dans le dernier quart du XVIIIe siècle. Le partage de la Pologne lui permet de
récupérer pratiquement toute la rive droite — du Dniepr — à l'exception de la Galicie, passée
sous administration de l'Autriche, laquelle deviendra en 1867 l'Empire austro-hongrois. Les
grandes steppes incultes du sud — en Nouvelle-Russie — sont colonisées par des paysans
venus de tout l'Empire, mais aussi d'Allemagne — notamment les mennonites — ou de Hollande,
appelés par l'impératrice en échange de privilèges fiscaux. Le port d'Odessa (dont le nom a été
choisi d’après celui d’Ulysse), gouverné au début par le duc de Richelieu, est fondé à cette
époque teintée de retour aux sources grecques (Tauride, Chersonèse).

La flotte russe de la mer Noire dans la rade de Sébastopol en 1846.

Comme d’autres peuples en Europe, un mouvement de renaissance nationale ukrainien se fait


jour à partir du milieu du XIXe siècle dans l’Empire russe. Mais Saint-Pétersbourg estime que ce
mouvement est manipulé par les Polonais12. Des cercles nationaux (hromady) sont supprimés et
il est prohibé d’imprimer en ukrainien12. Les élites russes considèrent les Ukrainiens comme des
« Petits-Russes »12.
La culture ukrainienne connaît une renaissance au milieu du XIXe siècle, en parallèle avec le
mouvement régionaliste à la même époque en Europe. Ce mouvement est concentré dans les
régions de la Ruthénie, de la Volynie ou de la Podolie et autour de Zaporojié. C'est alors
qu'apparaît de plus en plus le terme d'Ukraine — Oukraïna signifiant « à la marche », terme
employé surtout dans la langue ecclésiastique depuis le XVIe siècle — relancé par les intellectuels
à la fin du XIXe siècle. Le pouvoir impérial russe officiellement ne connaît pas ce terme d'Ukraine.
Il ne forme dans les territoires de l'actuelle Ukraine, comme partout ailleurs dans l'Empire — à
l'exception du grand-duché de Finlande traité différemment — que différents gouvernements ou
provinces — gouvernement de Kiev, gouvernement de Tchernigov, gouvernement
d'Ekaterinoslav, gouvernement de Kherson, etc. — au sein de plusieurs entités : Petite
Russie, Nouvelle-Russie (correspondant en partie aux territoires enlevés à l'Empire ottoman),
parties de la Bessarabie, etc. En 1876, l'Empire interdit la langue ukrainienne dans les écoles, et
la limite dans les journaux et la littérature. Cette limitation provoque en retour une revendication
idéologique qui permet de comprendre l'opposition linguistique actuelle. Les différentes formes
d'ukrainien ne sont plus parlées que par une frange de la paysannerie et certains cercles cultivés
de régionalistes : instituteurs, universitaires, ecclésiastiques.
De grandes villes sont fondées sous l'Empire russe, comme Odessa — port cosmopolite à forte
minorité juive — mentionné plus haut et Ekaterinoslav, Sébastopol, etc. qui accueillent des
migrants de tout l'Empire, et même d'Europe centrale : de la Pologne autrichienne ou
d’Allemagne. En 1892, Kiev compte près d'un demi-million d'habitants. En effet, après l'abolition
du servage en 1861, l'industrialisation provoque un exode rural de paysans russes, ukrainiens,
ruthènes, etc. dans les nouveaux centres industriels. Le négoce se développe parallèlement avec
l'extension du chemin de fer et cette « grande marche vers le sud » et l'ouest.

L’Ukraine indépendante (1917-1922)


Article détaillé : Guerre d'indépendance ukrainienne.
Édition spéciale du journal Lübeckische Anzeigen (« Feuille spéciale des Annonces de Lübeck »), no 139
du 9 février 1918, titrée Paix avec l'Ukraine.

Après la révolution de Février, qui met fin à l’Empire en 1917, l'Ukraine est brièvement
indépendante jusqu'en 1920, mais la Rada ne parvient pas à contrôler efficacement le territoire,
envahi d'abord par les Allemands puis, à leur retrait, devenu champ de bataille entre le Parti
bolchevique, les Russes blancs et les forces de la Triple-Entente.
Le 4 (17) mars 1917, la plupart des partis politiques s’accordent pour former la Rada centrale.
Le 17 mars, alors qu'il est toujours à Moscou, Mykhaïlo Hrouchevsky est élu président de la Rada
centrale. Sous son impulsion, l'Ukraine proclame son autonomie le 10 (23) juin 1917. En tant que
chef de l'USDRP, Volodymyr Vynnytchenko est choisi comme un des deux vice-présidents de
la Rada centrale puis comme le premier président du secrétariat général de la Rada centrale du
gouvernement autonome de l'Ukraine.
Le 20 novembre 1917 (3 décembre 1917 dans le calendrier grégorien), soit treize jours après que
le Parti bolchevique russe a renversé le gouvernement social-démocrate de Saint-
Pétersbourg — alors capitale de la Russie —, la Rada ukrainienne centrale proclame
la République populaire ukrainienne et sa séparation de la Russie. L'indépendance totale de
l'Ukraine est confirmée le 22 janvier 1918 et Mykhaïlo Hrouchevsky est élu officiellement
« président de la République populaire ukrainienne » le 29 avril.
Le traité de Brest-Litovsk est signé le 9 février 1918 entre les Bolcheviks russes, les
gouvernements des empires centraux menés par l'Empire allemand et la jeune République
populaire ukrainienne, issue de la révolution de Février, dans la ville du même nom,
aujourd’hui Brest en Biélorussie. Les 17-19 mars 1918, la république socialiste soviétique
d'Ukraine est fondée à l'Est du pays avec pour capitale Kharkov.
Pour combattre l'Armée rouge qui contrôle alors une partie de l’Ukraine, la Rada centrale cherche
le soutien des Allemands qui organisent un coup d’État et renversent le gouvernement
de Vynnytchenko, mettant à sa place Pavlo Skoropadsky qui, le 29 avril 1918 — soit, le jour
même de l'élection de Mykhaïlo Hrouchevsky à la présidence de la république —, est
proclamé hetman de l’« État ukrainien » : Ukrayinska Derjava. Mais l’Allemagne perd la Première
Guerre mondiale et Skoropadsky, resté sans soutien, est renversé par le mouvement populaire,
guidé par Simon Petlioura. Finalement, le 14 décembre 1918, la République populaire
ukrainienne est rétablie avec Vynnytchenko à sa tête.

Carte de l'Ukraine présentée par la délégation ukrainienne à la Conférence de paix de Paris, 1919
De 1918 à 1922, une partie importante du territoire ukrainien au sud est contrôlée par une armée
paysanne insurrectionnelle d'inspiration communiste libertaire surnommée Makhnovchtchina du
nom de son initiateur Nestor Makhno, ayant compté à son apogée près de 100 000 combattants.
Opposée aux armées blanches et rouges, l'armée noire essayera d'installer dans les territoires
contrôlés un système de collectivisation des terres et de démocratie directe et décentralisée13,14.

La période soviétique

La formation territoriale de l'Ukraine moderne.

Article détaillé : République socialiste soviétique d'Ukraine.

Le drapeau conational de la RSS d'Ukraine.

À la fin de 1918, les Alliés interviennent dans le sud de l'Ukraine pour soutenir
les Blancs de Dénikine dans la guerre civile russe. Odessa, Sébastopol et d'autres localités
côtières sont occupées par les Français, mais l'intervention tourne court en raison du manque de
moyens engagés et de l'hostilité de la population (mars-avril 1919). L'Ukraine est envahie par
l'Armée rouge et ramenée dans le giron soviétique. L'ancien « grenier » de l'Empire russe,
devenu une république socialiste soviétique, ravitaille les centres urbains soviétiques. Le 30
décembre 1922, l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) naît du traité qui réunit
la RSFSR, la Biélorussie, l'Ukraine et la Transcaucasie15. Dans le conflit qui oppose
les communistes du centre (Moscou) et les partis communistes nationaux, c'est le centre qui
l'emporte et impose une fédération.
Quand Staline déclenche sa révolution industrielle vers la fin des années 1920, l'Ukraine devient
l'une des sources indispensables de son financement. Les années d'industrialisation sont
marquées par la construction de ce qui est à l'époque la plus grande centrale hydraulique
d'Europe sur le Dniepr (le DnieproGuES), ce qui contribue à l'électrification de la République,
ainsi qu'une importante mise en valeur du grand bassin minier et métallurgique, le Donbass, déjà
exploité depuis la fin du XIXe siècle.
Après une brève période d'ukrainisation — politique dite d'indigénisation (korenizatsia) — dans
les années 1920, se traduisant par le retour à l'ukrainien dans les publications, la réouverture des
écoles et des universités avec un enseignement en ukrainien et la promotion des cadres
nationaux, Staline ne ménage pas les efforts pour réprimer le moindre signe d'un réveil
nationaliste ukrainien, interprété comme un rejet du pouvoir bolchevik et une menace à l'intégrité
de l'URSS. Pour contrer le nationalisme ukrainien, le pouvoir soviétique favorise la Biélorussie
limitrophe16. De plus des oblasts russes, comme celle de Kharkiv, sont intégrées à la RSS
d'Ukraine pour renforcer le poids des russophones. Moscou cherche à rattacher fermement
l'Ukraine et d'en faire une forteresse de l'URSS, selon les mots de Staline17. Toute forme de
déloyauté de la part des intellectuels, des communistes ou des paysans ukrainiens est
éradiquée17.
Entre 1931 et 1933, une série de famines et l'intensification de la « dékoulakisation » frappent
l'Union soviétique et ravagent particulièrement l'Ukraine, alors que cette région était la plus fertile
de toute l'URSS. Entre 2,618 et 5 millions19 de personnes meurent des suites de cette famine. Les
Ukrainiens l'appellent « Holodomor » ou « l'extermination par la faim ». Bien que le
gouvernement soviétique de Joseph Staline ait pris soin de ne jamais écrire qu'il faut
« exterminer par la faim » les paysans réticents, les documents déclassifiés montrent qu'il a pour
le moins utilisé ces famines, s'il ne les a pas sciemment provoquées, pour briser la paysannerie
et le nationalisme ukrainiens20, même si le peuple russe a lui aussi été victime des mêmes
famines. Le Parlement européen a reconnu dans une résolution de 2008 l'Holodomor comme un
« crime effroyable perpétré contre le peuple ukrainien et contre l'humanité »21.
Des exécutions et des déportations d'Ukrainiens accusés de nationalisme sont organisées durant
les purges staliniennes de 1937-1939 : plusieurs millions d'Ukrainiens sont exécutés ou envoyés
vers des camps de travail soviétiques, comme le sont aussi tous les suspects de nationalisme
dit « bourgeois », les Russes en premier. En outre, le marxisme-léninisme appliqué par le
Kremlin prône l'athéisme d'État et s'attaque aux symboles religieux, détruisant les églises et les
cathédrales de toute l'URSS et des millions de croyants en majorité orthodoxes, mais aussi
d'autres obédiences chrétiennes, sont envoyés au Goulag. Toutes les religions, même
minoritaires (juives, musulmanes), sont interdites.
En septembre et octobre 1939, après le partage de la Pologne entre l'Allemagne nazie et l'URSS
stalinienne, les régions polonaises à forte minorité ukrainienne (comme la Galicie et Lwow,
aujourd'hui Lviv) sont annexées par l'URSS et incorporées au sein de l'Ukraine occidentale,
conformément aux protocoles secrets du pacte germano-soviétique. Selon Sabine Dullin, « ces
protocoles secrets qui accompagnent, entre le 23 août et le 28 septembre 1939, le pacte signé
par Staline avec Hitler sont la matrice de la grande guerre patriotique. Ils resteront un véritable
tabou jusqu'à la fin de l'Union soviétique. Ce partage impérialiste avec l'Allemagne nazie
transgresse en effet le code d'honneur anti-impérialiste et antifasciste porté par le régime
[soviétique]22. » En juin 1940, c'est le tour de la Bucovine du Nord et du Boudjak, pris à
la Roumanie d'être pris par l'URSS.

Kiev en ruine à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

À l'été 1941, l'Ukraine est envahie par les armées allemandes. À leur arrivée, les Allemands sont
reçus en libérateurs par une partie de la population ukrainienne, surtout par la population de la
partie de la Pologne envahie par Staline en 1939 puis intégrée à l'Ukraine. Mais, au fur et à
mesure de leur progression vers l'est du pays, et notamment en raison des mauvais traitements
infligés à la population23, les occupants allemands rencontrent une forte résistance de la part de
la population locale, laquelle perdure jusqu'au retour des Soviétiques en 1944. En représailles,
les Allemands traquent les partisans, et brûlent des centaines de villages et des milliers de
maisons avec leurs habitants. La population juive d'Ukraine est anéantie par l'application de
la solution finale.
Le 28 avril 1943, le haut commandement de la Wehrmacht annonce la création de la division SS
Galicie constituée de volontaires ukrainiens ; les historiens estiment que plus de
220 000 Ukrainiens se sont engagés aux côtés des forces allemandes durant la Seconde Guerre
mondiale pour combattre le régime soviétique (Polizei, U.V.V., Hiwis ou Waffen-SS).
En 1944, l’Armée rouge libère la plus grande partie de l’Ukraine. En juin 1945, la Ruthénie
subcarpathique, prise à la Hongrie (qui l'avait acquise en 1939 sur la Slovaquie), rejoint à son
tour l’Ukraine soviétique, formant l’oblast de Transcarpatie.
À la fin du conflit, le bilan des pertes ukrainiennes est de huit millions de morts dont 1,377 million
étaient des militaires.
Quant aux indépendantistes — présents essentiellement dans les régions ouest —, ils continuent
une résistance locale armée contre l'URSS jusqu'en 1954.
Le 26 juin 1945, l’Ukraine devient l’un des membres fondateurs de l'ONU, en y obtenant, en
soulignement de son rôle dans la victoire sur le nazisme, avec la Biélorussie, une place distincte
de l'URSS. Cette disposition particulière permet à l'Union soviétique de bénéficier de voix
supplémentaires dans les votes de l'assemblée générale de l'ONU24.
En 1954, le 1er secrétaire du Parti communiste d'Union soviétique, Nikita Khrouchtchev qui a
passé sa jeunesse en Ukraine, transfère la péninsule de Crimée à la république soviétique
socialiste d'Ukraine pour marquer le 300e anniversaire du traité de Pereïaslav marquant l'union
entre la Russie et les provinces formant l'Ukraine d'alors. L'Ukraine est considérée comme un
modèle des républiques soviétiques. Notamment, Léonid Brejnev, le principal dirigeant de l'URSS
pendant 18 ans entre 1964 et 1982, est d'origine ukrainienne.
La fin de la période soviétique est marquée en 1986 par la catastrophe nucléaire de
Tchernobyl dont le coût humain et financier a été considérable. L'URSS a engagé un énorme
travail de décontamination pour atténuer les conséquences de la radioactivité.

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