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La Guerre du Viêt Nam et les autres conflits en Asie du Sud-Est

Articles connexes : Guerre du Viêt Nam, Guerre civile laotienne, Guerre civile
cambodgienne (1967-1975) et Massacres de 1965 en Indonésie.
L'Asie du Sud-Est reste dans les années 1960 un foyer de tensions et de conflits meurtriers.
Après la guerre d'Indochine, le Viêt Nam a été divisé entre deux États autoritaires, la République
démocratique du Viêt Nam (Nord Viêt Nam) communiste et le République du Viêt Nam (Sud Viêt
Nam) ; au Laos, le Pathet lao, dirigé secrètement par le Parti du peuple lao communiste, cohabite
difficilement avec la droite pro-américaine et les neutralistes. Norodom Sihanouk s'efforce de
préserver la neutralité du Cambodge mais sa volonté d'échapper à l'influence américaine, de plus
en plus lourde dans la région, le conduit à se rapprocher des pays communistes ; il noue des
relations amicales avec la République populaire de Chine, tout en réprimant sur le plan intérieur
les communistes cambodgiens (surnommés « Khmers rouges »). Le Nord Viêt Nam soutient la
rébellion au Sud Viêt Nam, tandis que les États-Unis soutiennent financièrement le régime
de Ngô Đình Diệm et tentent en vain de lui faire amender ses pratiques autoritaires. La
répression anticommuniste s'intensifiant, les mouvements de guérilla sudistes forment
en 1960 le Front national de libération du Sud Viêt Nam (FNL, surnommé par ses
adversaires Việt Cộng, abréviation de communistes vietnamiens)497.
La guerre civile laotienne ayant repris et la contre-insurrection donnant peu de résultats au Sud
Viêt Nam, les États-Unis craignent un basculement de la région dans le camp communiste, selon
la logique de la théorie des dominos. L'impopularité de Diệm pousse des généraux de son armée
à organiser - avec la bénédiction de la CIA - un putsch contre lui : le président sud-vietnamien est
tué le 1er novembre 1963. Le chaos politique au Sud tandis que la piste Hô Chi Minh - voie de
communication passant le territoire laotien avec l'aide du Pathet Lao et par le territoire
cambodgien avec l'autorisation de Sihanouk qui espère préserver sa neutralité - permet au Nord
Viêt Nam de ravitailler le Việt Cộng. En 1964, la guerre du Viêt Nam est réellement lancée ;
l'incident du golfe du Tonkin permet au président Lyndon B. Johnson de faire passer
une résolution qui lui donne toute latitude pour régler la situation en Asie du Sud-Est. Les États-
Unis interviennent massivement au Viêt Nam498. Des bombardements intensifs du territoire nord-
vietnamien ne parviennent cependant pas à éviter l'enlisement du conflit, tandis que le Việt
Cộng et l'Armée populaire vietnamienne misent sur une guerre d'usure. Avec les années, la
guerre du Viêt Nam suscite dans le monde une contestation grandissante qui finit par s'étendre à
l'opinion publique américaine. Le conflit touche le reste de la péninsule indochinoise : le Pathet
lao, soutenu par le Nord Viêt Nam, poursuit sa lutte contre la monarchie et en 1967, les Khmers
rouges lancent une insurrection au Cambodge contre Sihanouk. En 1968, l'offensive du
Tết prend de court les Américains : si le FNL n'obtient que des résultats mitigés et sort décimé
des combats, l'ampleur de l'attaque inquiète les États-Unis qui perdent espoir de terminer
rapidement la guerre499,500.
La guerre froide a également des conséquences en Indonésie : le Parti communiste indonésien,
réconcilié avec le président Soekarno et qui participe désormais au gouvernement, demeure le
PC le plus important d'Asie du Sud-Est. L'Indonésie se rapproche de la Chine, préoccupant les
Américains, tandis que le poids des communistes suscite une tension croissante avec l'armée
indonésienne. Les communistes indonésiens craignent un coup d'État militaire, et tentent dès lors
de réaliser, le 30 septembre 1965, un soulèvement préventif. Le général Soeharto obtient alors
les pleins pouvoirs et mène, avec l'aide des groupes musulmans conservateurs et le soutien de
la CIA, une répression extrêmement sanglante : 700 000 personnes sont arrêtées, et plusieurs
centaines de milliers de communistes ou supposés tels massacrés en quelques mois. Le Parti
communiste indonésien, dont les principaux cadres sont assassinés ou exécutés, est
anéanti501,502,503.
La Révolution culturelle[modifier | modifier le code]
Article détaillé : Révolution culturelle.
Exemplaires du Petit Livre rouge.

En République populaire de Chine, après le désastre du Grand Bond en avant — dont l'étendue
demeure cachée durant des décennies — la Chine suit une politique de « réajustement
économique », sous l'égide de Liu Shaoqi et Deng Xiaoping. Mao Zedong, relativement mis à
l'écart, décide de récupérer son influence, en s'en prenant au Parti communiste chinois lui-même
et aux cadres qui discutent ses orientations473. À l'automne 1962, il pose le principe que
les classes et la lutte des classes subsistent à l'intérieur du socialisme, et désigne comme
ennemi le « révisionnisme chinois » ; le PCC lance dans les campagnes un « mouvement
d'éducation socialiste » afin d'éliminer les « pratiques capitalistes » réapparues depuis 1960. À
partir de 1964, Mao en appelle à une « guerre d'extermination » contre les « bourgeois » au sein
de la bureaucratie du PCC, dont des cadres sont contraints de faire leur autocritique publique504.

Slogan sur un mur à Pékin : « Vive l'invincible pensée Mao Zedong » !

S'étant assuré de l'appui de l'armée et des services de sécurité, Mao fait lancer de violentes
attaques contre les intellectuels. Il entretient sa propagande en diffusant par centaines de millions
d'exemplaires un recueil de ses citations, le « Petit Livre rouge ». En août 1966, il proclame
officiellement la « Grande Révolution Culturelle Prolétarienne », en jouant des frustrations de la
jeunesse - notamment étudiante et ouvrière - qu'il mobilise contre le Parti505. Mao entreprend
d'évincer Liu Shaoqi, Deng Xiaoping et leurs partisans ; des milliers de jeunes Chinois sont
embrigadés pour constituer les gardes rouges, encadrés par l'armée. Ces militants, qui se
présentent comme l'avant-garde de la révolution, font régner un climat de terreur et organisent de
nombreuses manifestations au cours desquels des « intellectuels droitiers » et des responsables
locaux du Parti sont publiquement humiliés. Les appareils du PCC sont démantelés, Mao se
servant de la Révolution culturelle pour épurer le régime. Face à un désordre dont il ne semblait
pas avoir prévu l'ampleur, il décide cependant de mettre le mouvement sous tutelle militaire :
l'aile la plus radicale doit se soumettre à l'Armée populaire de libération. Jiang Qing, l'épouse de
Mao, régente la culture chinoise durant cette période, tandis que le chef de l'armée, Lin Biao,
apparaît comme l'étoile montante du régime. Le Premier ministre Zhou Enlai doit quant à lui
assumer la charge des affaires de l'État, en pleine désorganisation. Les gardes rouges, devenus
trop indépendants, sont finalement démantelés et nombre d'entre eux sont envoyés dans les
campagnes pour être « rééduqués ». En 1969, au IXe congrès du PCC, la pensée du « Grand
Timonier » Mao est réintroduite dans les statuts du Parti. Destitué, le président de la
République Liu Shaoqi meurt en prison. Lin Biao fait un temps figure de successeur potentiel de
Mao, mais il tombe en disgrâce dès 1970 et meurt dans un accident d'avion, dans des
circonstances obscures. La Révolution culturelle se termine officiellement en 1969 ; le Parti
communiste chinois, épuré, revient ensuite au premier plan, et son rôle dirigeant est à nouveau
mis en avant473,506,461.
En Afrique et au Moyen-Orient[modifier | modifier le code]
En Afrique noire, la pénétration du communisme est laborieuse : l'URSS accroit après-guerre son
intérêt pour l'Afrique et joue dans la carte du soutien à la décolonisation. L'URSS fonde quelque
espoir sur ses alliances avec quelques pays comme la Guinée, le Ghana et le Mali mais ceux-ci,
bien que se réclamant du socialisme, ne revendiquent pas une identité strictement marxiste-
léniniste et montrent peu de cohérence idéologique. La Guinée s'éloigne de l'URSS
dès 1961507,508. Le communisme gagne cependant en influence en Afrique lusophone durant
les guerres coloniales portugaises : parmi les mouvements indépendantistes, le Front de
libération du Mozambique, le Mouvement populaire de libération de l'Angola et le Parti africain
pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert évoluent, à des degrés divers, vers le
marxisme509. En Afrique du Sud, le Parti communiste sud-africain, interdit depuis les années
1950, s'allie avec l'ANC dans la lutte contre l'Apartheid510.
L'alliance entre Israël et les États-Unis amène l'URSS à soutenir les pays arabes contre l'État
hébreu. Cependant, l'influence de l'URSS dans la région ne se traduit pas par des progrès
spectaculaires de l'idéologie communiste dans le monde arabo-musulman. Malgré les efforts
de Khrouchtchev et les alliances avec des pays comme l'Égypte de Nasser, aucun État arabe ne
rejoint le « camp socialiste ». Ce n'est qu'en 1967, après l'humiliation subie par les nationalistes
arabes lors de la guerre des Six Jours, que l'idéologie communiste fait de véritables progrès dans
les pays arabes, avec l'apparition de mouvements marxistes-léninistes comme le Front populaire
de libération de la Palestine et la proclamation au sud du Yémen de la République démocratique
populaire du Yémen (Yémen du Sud), seul régime communiste du Moyen-Orient. Bien que
gagnant du terrain, le communisme n'acquiert cependant aucune prééminence dans le monde
arabe. En Syrie, le Parti communiste est allié au Baas, mais lui demeure subordonné. En Irak,
après le retour au pouvoir du Baas en 1968, le Parti communiste irakien se rapproche du
nouveau régime, mais il est ensuite violemment réprimé sous la présidence de Saddam
Hussein511,512.
Le Printemps de Prague[modifier | modifier le code]
Article détaillé : Printemps de Prague.
En Europe, le bloc de l'Est connaît une nouvelle crise importante du fait de la situation
en République socialiste tchécoslovaque. La déstalinisation y a en effet conduit à un relâchement
du contrôle sur la vie intellectuelle. Au sein du Parti communiste tchécoslovaque, les
réformateurs gagnent en audace, grâce notamment à Alexander Dubček, chef de la
branche slovaque du Parti. À partir de 1967, Dubček s'oppose ouvertement au président Antonín
Novotný, que Léonid Brejnev s'abstient de soutenir513,514.
En janvier 1968, Dubček remplace Novotný à la tête du PCT. Le climat politique change alors
radicalement en Tchécoslovaquie, ouvrant la période dite du printemps de Prague : la censure se
relâche et les critiques du système s'expriment plus ouvertement dans les médias. Dubček, qui
prône un « socialisme à visage humain » mais n'envisage tout d'abord qu'une réforme modérée
du système, se trouve bientôt amené à soutenir les réformateurs les plus audacieux. Les autres
régimes du bloc de l'Est s'inquiètent et Brejnev lui-même doit intervenir : en août 1968, lors d'une
réunion du Pacte de Varsovie, est formulée la « doctrine Brejnev » qui interdit aux partis
communistes de s'écarter des « principes du marxisme-léninisme et du socialisme », limitant
explicitement la souveraineté des pays du bloc. Les armées du Pacte - à l'exception de la
Roumanie qui a refusé de participer - envahissent la Tchécoslovaquie, mettant un terme au
printemps de Prague. Dubček est maintenu un temps au pouvoir, puis doit céder son poste
à Gustáv Husák. La Tchécoslovaquie est soumise à une politique de « normalisation ».
L'opposition continue néanmoins d'exister malgré la censure et les pressions policières : c'est
notamment le cas du mouvement de la Charte 77, dont Václav Havel est l'un des principaux
animateurs514,513,515.
Apogée et crises du communisme[modifier | modifier le code]
Stagnation politique en URSS[modifier | modifier le code]

Léonid Brejnev en 1973.

En URSS, l'ère Brejnev se traduit par une certaine stagnation politique : Brejnev lui-même, qui
s'appuie sur un système de clientélisme, apparaît avant tout au sein du PCUS comme une figure
consensuelle et conservatrice. Les réformes économiques marquent progressivement le pas et
l'industrie comme l'agriculture s'essoufflent. Sur le plan international, l'URSS poursuit la politique
de détente avec l'Occident et tente une réconciliation avec la République populaire de Chine tout
en s'efforçant de consolider ses positions dans le tiers-monde. Des négociations sur la limitation
des armements stratégiques sont poursuivies avec les États-Unis : l'accord SALT-1 de 1972
consacre la reconnaissance de l'URSS comme grande puissance. Malgré ses succès
diplomatiques, l'URSS souffre en interne du faible taux de renouvellement de son élite dirigeante,
quasi immuable et de plus en plus vieillissante, comme de ses lourdeurs bureaucratiques. Des
dissidences se développent en URSS, à des degrés très divers : Alexandre Soljenitsyne, expulsé
d'Union soviétique après avoir publié en 1973 L'Archipel du Goulag, en est l'exemple le plus
célèbre. Au sein même de l'appareil soviétique, de nombreux cadres souhaitent des réformes,
sans pouvoir exprimer ouvertement leurs opinions516,517.
Politiques du régime castriste à Cuba[modifier | modifier le code]

Logo de l'Union des jeunes communistes, l'organisation de jeunesse du Parti communiste de Cuba.

L'URSS continue par ailleurs de bénéficier d'un allié en Amérique latine avec Cuba, qui intègre
en 1972 le Conseil d'assistance économique mutuelle et devient le fournisseur officiel en sucre
du bloc de l'Est. Massivement aidée par l'URSS, dont elle est très dépendante économiquement,
l'île accumule une importante dette extérieure518.
Le régime de Fidel Castro réalise des avancées sociales en créant un système de santé
performant et en améliorant l'éducation. Mais si les inégalités de niveau de vie ont été réduites,
les problèmes économiques demeurent profonds519. La population est encadrée par un ensemble
d'organisations et de lois répressives - visant entre autres les homosexuels ou les « hippies » - et
par une surveillance policière à grande échelle. Les compagnons de route de Castro rétifs au
virage marxiste tombent en disgrâce et sont souvent emprisonnés. Le Parti communiste de
Cuba reste parti unique520, les frères Castro et leur entourage refusant tout pluralisme519.
Sur le plan international, Cuba, qui se présente comme une tête de pont du combat tiers-
mondiste contre l'impérialisme américain, prône l'exportation de la révolution, jouant un jeu de
balancier entre son alliance étroite avec le bloc de l'Est et son appartenance au Mouvement des
non-alignés. De nombreux coopérants civils et militaires sont envoyés en Afrique : dans
les années 1970, les troupes cubaines viennent soutenir le MPLA dans la guerre civile
angolaise521,522. En septembre 1979, Castro est élu à la présidence du Mouvement des non-
alignés. Au sommet de son rayonnement international, il ambitionne de faire du Mouvement un
nouvel axe anti-américain et pro-soviétique : mais, quelques mois après son élection, sa position
est affaiblie par l'invasion soviétique de l'Afghanistan. Forcé de prendre position alors que l'URSS
attaque un pays non-aligné, Castro choisit de soutenir les Soviétiques, ce qui le décrédibilise
durant son mandat523.

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