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Basculements du Viêt Nam, du Laos et du Cambodge

Article connexe : Crimes du régime khmer rouge.

Boat-people vietnamiens en 1979.

En 1975, la fin de la guerre du Viêt Nam et des conflits annexes au Laos et au Cambodge
entraîne une avancée spectaculaire du communisme en Asie du Sud-Est. En 1969, l'enlisement
du conflit vietnamien contribue à la décision du président américain Lyndon B. Johnson de ne
pas se représenter. Le nouveau président, Richard Nixon, vise à mettre un terme à la guerre
mais, en attendant de pouvoir ouvrir des négociations, continue de vouloir contenir les
communistes dans la péninsule : les territoires laotien, puis cambodgien, sont massivement
bombardés pour tenter de couper la piste Hô Chi Minh. Au Cambodge, où l'insurrection
progresse, Sihanouk est renversé par un coup d'État avec l'approbation des États-Unis ; en
parallèle, les bombardements américains poussent de nombreux Cambodgiens à rejoindre
les Khmers rouges. Sihanouk, réfugié à Pékin, forme avec les Khmers rouges, sur le conseil des
Chinois, un « Front uni national » sans connaître réellement ses nouveaux alliés524,525. En
janvier 1973, les négociations entre Américains et Nord-Vietnamiens aboutissent à la signature
des accords de paix de Paris, qui prévoient le retrait des troupes américaines. Au Laos, le Pathet
lao obtient de former un gouvernement d'union nationale avec les monarchistes. Les Khmers
rouges, soutenus par la Chine, refusent en revanche de participer aux pourparlers. Au
printemps 1975, les communistes prennent le pouvoir au Viêt Nam, au Cambodge et au Laos.
Les Khmers rouges s'emparent de la capitale cambodgienne, tandis que les Nord-Vietnamiens
repassent à l'offensive contre le Sud Viêt Nam et prennent Saïgon. Au Laos, le Pathet Lao réalise
un coup d'État et abolit la monarchie. En 1976, le Gouvernement révolutionnaire
provisoire du FNL et le Nord Viêt Nam fusionnent : le Viêt Nam est réunifié sous le nom
de République socialiste du Viêt Nam et le Parti communiste vietnamien devient parti unique526,499.

Crânes des victimes des Khmers rouges dans la prison de Tuol Sleng.
Plusieurs centaines de milliers de « boat-people » fuient au fil des années le Viêt Nam527.
Au Laos, la prise de pouvoir par les communistes provoque la fuite à l'étranger, en quelques
années, d'environ 400 000 Laotiens, soit 10 % de la population528,529. Le Laos devient un satellite
du Viêt Nam et les deux pays s'alignent sur l'URSS530 ; le Viêt Nam rejoint en 1978 le Conseil
d'assistance économique mutuelle531.
Au Cambodge, dès leur victoire, les Khmers rouges appliquent une politique particulièrement
extrémiste : ils font évacuer toutes les villes du pays et obligent la population à s'installer dans les
campagnes, dans des conditions désastreuses qui causent la mort de milliers de personnes.
Norodom Sihanouk, officiellement chef de l'État, ne revient au pays qu'au bout de plusieurs
mois : il réalise tardivement la situation, puis est mis en résidence surveillée. Le pays est
rebaptisé Kampuchéa démocratique en janvier 1976 ; en avril, le secrétaire de l'Angkar, Saloth
Sâr alias « Pol Pot », véritable maître du pays depuis avril 1975, devient Premier ministre525,499,532.
Le régime, qui tente de faire passer directement le pays au stade du communisme intégral,
fonctionne dans l'arbitraire le plus total. La population, mise au travail forcé aux champs, survit
dans des conditions relevant de l'esclavage, sans droit à la propriété privée ni même à la vie
privée. L'incompétence des Khmers rouges contribue à provoquer au Cambodge une terrible
famine : s'y ajoutent les exécutions gratuites — tout peut devenir prétexte à l'application
immédiate de la peine de mort — les persécutions ethniques et religieuses et les purges
sanglantes de l'appareil, ce qui entraîne la mort entre 1975 et 1979, de centaines de milliers de
personnes. Les estimations du nombre de victimes varient beaucoup : le chiffre le plus crédible
se monte à 1,7 million, soit 21 % de la population cambodgienne de l'époque525,499,533.
Les mauvaises relations des Khmers rouges avec le Viêt Nam voisin tournent bientôt au conflit
ouvert : le 25 décembre 1978, l'Armée populaire vietnamienne envahit le Cambodge et
les Khmers rouges sont chassés du pouvoir en moins de deux semaines. Un nouveau régime
communiste cambodgien, la République populaire du Kampuchéa, est mis en place avec le
soutien du Viêt Nam et de l'URSS525,499,532.
Progrès du communisme dans le tiers-monde[modifier | modifier le code]

Premières armoiries de la République populaire du Mozambique.

Entre la fin des années 1960 et le milieu des années 1970, le communisme fait également
d'importants progrès en Afrique noire. La République démocratique somalie, présidée par le
général Mohamed Siad Barre, est proclamée en octobre 1969, et la République populaire du
Congo, le 31 décembre de la même année. En novembre 1974, Mathieu Kérékou, président
du Dahomey, proclame l'adhésion au marxisme-léninisme de son pays, rebaptisé l'année
suivante République populaire du Bénin. La monarchie éthiopienne est renversée en
septembre 1974 par la junte militaire du Derg, qui forme le Gouvernement militaire provisoire de
l'Éthiopie socialiste. Un vieux conflit territorial entre la Somalie et l'Éthiopie débouche, en 1977,
sur la guerre de l'Ogaden : l'URSS et Cuba choisissent de soutenir l'Éthiopie de Mengistu Haile
Mariam, pays plus développé et qui leur paraît un allié plus intéressant. La Somalie rompt alors
avec l'URSS : tout en continuant de se dire « marxiste-léniniste », elle se rapproche de l'Occident
et des monarchies arabes. Le soutien à l'Éthiopie cause cependant des problèmes aux
Soviétiques, le régime de Mengistu n'ayant ni institutions stables ni vraie idéologie. Le dirigeant
éthiopien mène par ailleurs une répression extrêmement meurtrière, tandis que le pays
est ravagé par une série de guerres534,535,536,537. En décembre 1975, Didier Ratsiraka devient le
président de la République démocratique de Madagascar, régime d'inspiration nettement
marxiste-léniniste538.
Dans les colonies portugaises, l'indépendance est accélérée par la révolution des Œillets en
métropole, elle-même provoquée en partie par les guerres coloniales. En 1975, la victoire des
indépendantistes marxistes est suivie de l'apparition de nouveaux régimes communistes :
le FRELIMO proclame l'indépendance de la République populaire du Mozambique mais doit par
la suite mener une guerre civile contre la RENAMO ; le MPLA proclame quant à lui la République
populaire d'Angola mais se trouve lui aussi en guerre civile avec l'UNITA, mouvement
indépendantiste concurrent. Le MPLA est soutenu par l'URSS et Cuba, tandis que l'UNITA reçoit
l'appui des États-Unis et de l'Afrique du Sud537,536,539,535. Les régimes communistes africains n'ont
guère de cohérence idéologique, le marxisme-léninisme professé par leurs dirigeants étant assez
superficiel536 : l'URSS a quelque difficulté à classer politiquement ses alliés africains, pour
lesquels elle crée l'appellation « États d'orientation socialiste »540,535.
En Inde, les deux PC locaux, le Parti communiste d'Inde et le Parti communiste d'Inde (marxiste),
s'implantent durablement, bien que leurs électorats restent concentrés dans certaines régions. Le
PCI oscille entre l'opposition au Congrès et l'alliance avec celui-ci. Le PCI(m), initialement proche
de la Chine, s'en éloigne au moment de la révolution culturelle. Les maoïstes radicaux, qui
multiplient les actions violentes, sont exclus en 1968 du PCI(m) : constituant la tendance
dite naxalite, ils se lancent dans la lutte armée contre le gouvernement. Le PCI(m) recentre quant
à lui ses positions et s'en tient, comme le PCI, à la voie parlementaire ; à partir des années 1970,
ses scores électoraux dépassent ceux du PC d'origine qui s'allie de plus en plus avec le Congrès.
À la même époque, le PCI(m) gagne les élections au Kerala et au Bengale-Occidental, où il
gouvernera ensuite durant plusieurs décennies. Les PC indiens adoptent cependant tous deux
des positions de plus en plus réformistes541,542,543.
Évolution politique en Chine[modifier | modifier le code]

Deng Xiaoping rencontrant le président américain Jimmy Carter en 1979.

En République populaire de Chine, Mao Zedong, vieillissant, délègue de plus en plus ses
responsabilités ; il se contente pour l'essentiel de tenir l'équilibre entre ses partisans, regroupés
autour de son épouse Jiang Qing, et les cadres plus modérés dirigés par Zhou Enlai et Deng
Xiaoping, ce dernier étant revenu sur le devant de la scène en 1973. Peu à peu, la balance
penche en faveur des modérés tandis que la Chine se remet lentement de la Révolution
culturelle. Les relations avec l'URSS demeurent très mauvaises et dégénèrent même, en 1969,
en un bref conflit frontalier. Zhou Enlai mène alors une politique d'ouverture en direction
des États-Unis : la République populaire peut sortir de l'isolement diplomatique et, en 1971,
récupère le siège de la Chine à l'ONU au détriment de Taïwan. En 1972, la visite en Chine du
président Nixon scelle le rapprochement sino-américain473,544.
Zhou Enlai meurt en janvier 1976, et Mao Zedong en septembre de la même année. Dès octobre,
le camp des radicaux est décapité avec l'arrestation de la « Bande des Quatre » (la veuve de
Mao, Jiang Qing, et trois de ses alliés). Deng Xiaoping, chef de file des réformateurs du Parti
communiste chinois, devient ensuite l'homme fort du régime, évinçant Hua Guofeng qui avait
succédé à Mao et Zhou Enlai. Tout en maintenant le caractère autoritaire du régime et la
domination du PCC, Deng réorganise l'économie chinoise. Recherchant avant tout l'efficacité, il
prône le passage à une « économie socialiste de marché ». Sur le plan international, la
République populaire de Chine cultive ses bons rapports avec l'Occident. Le communisme
chinois est progressivement vidé de sa substance idéologique et subsiste essentiellement en tant
que régime dictatorial545.
Dans le monde occidental[modifier | modifier le code]
Les principaux partis européens[modifier | modifier le code]

Siège historique de la section du Parti communiste italien, à Mineo (Sicile).

Dans la majorité des démocraties d'Europe de l'Ouest, les partis communistes sont des
mouvements très minoritaires, à l'influence limitée : ils demeurent cependant puissants dans
plusieurs pays. En Finlande, en vertu de la politique d'amitié avec l'URSS du
président Kekkonen, le Parti communiste de Finlande participe à plusieurs gouvernements de
coalition entre 1966 et 1983546.
En France, le Parti communiste français conserve, jusque dans les années 1970, une position
dominante à gauche. Il se rapproche du Parti socialiste avec lequel il signe en juin 1972
un programme commun de gouvernement : l'alliance PCF-PS frôle la victoire lors de
la présidentielle de 1974. Georges Marchais, chef du PCF, oscille cependant entre des influences
antagonistes, privilégiant selon le contexte son alliance avec le PS ou l'état des relations avec
l'URSS547.
En Italie, la nouvelle génération de cadres du Parti communiste italien, comme Enrico
Berlinguer ou Giorgio Napolitano, prône un recentrage. Tout en demeurant allié de l'URSS, le
PCI, qui conserve d'importants bastions et gagne même des électeurs, devient avec les années
l'un des partis communistes occidentaux les plus modérés et les plus indépendants, jusqu'à
s'apparenter dans les faits à un parti social-démocrate548. En 1972, Berlinguer devient secrétaire
général du PCI, dont il accentue l'évolution ; en 1973, il propose un « compromis historique » à
la Démocratie chrétienne pour parvenir à un accord de gouvernement460.
La chute de plusieurs dictatures durant les années 1970 permet à des divers PC de sortir de la
clandestinité, mais pas d'accéder au pouvoir. Après la chute, en 1974, de la dictature des
colonels, le Parti communiste de Grèce est autorisé. Toujours strictement aligné sur l'URSS, il
continue d'attirer environ 10 % de l'électorat mais n'est plus, comme avant-guerre, le parti
dominant de la gauche grecque : la place lui est ravie par le PASOK549. Au Portugal, la chute du
régime de l'Estado Novo en 1974 est favorisée par les guerres coloniales : après la révolution
des Œillets, le Parti communiste portugais dirigé par Álvaro Cunhal, est autorisé et rejoint la
coalition au pouvoir. Son activisme fait un temps croire à un possible basculement du Portugal
dans le camp communiste, mais le PCP est largement distancé par la gauche modérée lors
des élections constituantes de 1975 ; une nouvelle révolution au Portugal apparaît bientôt
improbable550. Le Parti communiste d'Espagne connaît une situation comparable : autorisé après
la fin du franquisme, le PCE ne parvient pas à prendre le leadership de la gauche espagnole, qui
revient aux socialistes551. Saint-Marin constitue à nouveau une exception : le Parti communiste
saint-marinais, qui avait déjà gouverné entre 1945 et 1957, revient en effet au pouvoir en 1978.
En 1986, ne disposant plus d'une majorité suffisante, il forme une coalition avec les démocrates-
chrétiens locaux362.
L'extrême-gauche en Occident[modifier | modifier le code]
Emblème des Brigades rouges.

Les années 1960-1970 sont marquées en Occident par le développement d'une


mouvance « gauchiste » hétéroclite, qui se réclame souvent à titres divers du communisme ou du
marxisme tout en s'opposant aux partis communistes pro-soviétiques et à l'URSS552. Che
Guevara, Hô Chi Minh, Léon Trotski et Mao Zedong font figure d'icônes, y compris chez ceux qui
critiquent les régimes communistes553 : la rhétorique « marxiste-léniniste » est un temps à la
mode chez des contestataires, souvent radicalisés par l'opposition à la guerre du Viêt Nam554.
De multiples mouvements d'extrême gauche apparaissent à l'époque. Des
partis maoïstes opposés à la déstalinisation naissent dans les années 1960 après la rupture sino-
soviétique555. Le maoïsme, par sa radicalité et son apparente nouveauté, attire de nombreux
militants, guère informés sur les réalités chinoises553 : il séduit certaines personnalités de
l'intelligentsia et du monde culturel comme Jean-Paul Sartre. Au début des années 1970, les
mouvements maoïstes ont une influence et une visibilité disproportionnée par rapport à leurs
modestes effectifs. Cependant, ils disparaissent pour la plupart avec le temps556. Dans les années
1980, des groupes radicaux opposés à la libéralisation du régime chinois continuent d'exister,
mais n'ont plus guère de visibilité en Occident557.
Les mouvements trotskistes français se renforcent à partir des années 1960, sans pour autant
sortir de la marginalité ni surmonter leurs divisions. La Ligue communiste révolutionnaire, dirigée
par Alain Krivine, subit ainsi la concurrence de Lutte ouvrière dont Arlette Laguiller est la porte-
parole. Les lambertistes détiennent quant à eux des positions dans divers appareils syndicaux.
Militants de la LCR et lambertistes essaiment dans les syndicats, les associations et les partis
socialistes modérés, où ils pratiquent l'entrisme ; cependant, de nombreux militants s'éloignent du
trotskisme pour intégrer les partis de la gauche modérée558,559. Diverses causes que les partis
communistes orthodoxes condamnent ou négligent à l'époque, comme le féminisme ou
le militantisme homosexuel, sont portées dans les années 1970 par des milieux d'extrême
gauche ou naissent en leur sein, et ne s'imposent que progressivement au reste de la gauche,
communistes compris560.
Au cours de la période des « années de plomb » qui se déroule principalement durant les années
1970, divers groupes d'extrême gauche passent, dans des pays occidentaux ou occidentalisés, à
l'action violente en commettant attentats et assassinats. C'est le cas des Brigades
rouges en Italie ou de la Fraction armée rouge en Allemagne de l'Ouest, mais aussi, hors
d'Europe, de l'Armée rouge japonaise qui participe au conflit israélo-palestinien en s'alliant avec
le Front populaire de libération de la Palestine554,561. Parmi ces groupes terroristes, certains
reçoivent l'aide des services secrets de l'Est, comme la Fraction armée rouge soutenue par
la Stasi est-allemande554,561.

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