Vous êtes sur la page 1sur 4

La période de l'eurocommunisme

Article connexe : Eurocommunisme.


Plusieurs partis communistes occidentaux entreprennent en juillet 1975 de se recentrer, au sein
du courant de l'« eurocommunisme », lancée par le Parti communiste italien d'Enrico
Berlinguer et le Parti communiste d'Espagne de Santiago Carrillo : les dirigeants italien et
espagnol réfutent le concept d'idéologie officielle d'État et remettent en question l'orthodoxie
soviétique. Le Parti communiste français, pour des raisons essentiellement tactiques, se joint à
l'eurocommunisme88 : en 1976, il abandonne la notion de dictature du prolétariat562. Très critiqué
par les PC des pays de l'Est, l'eurocommunisme, auquel se joint également le Parti communiste
japonais, tourne finalement court : il contribue cependant à semer le trouble au sein de l'appareil
soviétique, où il influence des cadres aux idées réformatrices88.
En 1978, l'assassinat d'Aldo Moro par les Brigades rouges contribue à faire échouer le projet
de compromis historique de Berlinguer : le PCI doit rester dans l'opposition563. Le PCF est quant à
lui rejeté dans l'isolement par la fin, en 1977, de son alliance avec le PS564. Georges
Marchais revient à des positions pro-soviétiques plus orthodoxes, mais ce revirement stratégique
s'avère désastreux, du fait de la dégradation de l'image de l'URSS dans l'opinion française565.
La fausse victoire des Soviétiques à Helsinki[modifier | modifier le code]

Léonid Brejnev rencontrant en 1971 Erich Honecker, dirigeant de la RDA.

En 1975, dans un contexte international où les États-Unis sont affaiblis politiquement par
la guerre du Viêt Nam et l'affaire du Watergate et alors que le nombre de régimes communistes
dans le monde est plus élevé que jamais, l'URSS et ses alliés du bloc de l'Est remportent ce qui
apparaît alors comme un grand succès diplomatique. Les accords d'Helsinki reconnaissent en
effet de manière définitive les frontières européennes issues de la Seconde Guerre mondiale, les
signataires s'engageant à ne pas les modifier par la force. Les accords contiennent cependant en
germe des problèmes futurs pour le bloc de l'Est, et certains éléments de sa future dissolution :
les textes affirment en effet les principes des droits de l'homme et du droit à la libre information,
et précisent que les frontières peuvent être modifiées par des voies pacifiques, en accord avec la
loi internationale566.
Crises en Amérique latine[modifier | modifier le code]
En 1970, l'influence communiste semble s'accroître en Amérique latine quand le
socialiste Salvador Allende, candidat de la coalition de l'Unidad Popular qui comprend le Parti
socialiste et le Parti communiste, est élu président du Chili. Si Allende plaide pour une transition
démocratique vers le socialisme, le soutien que lui apporte Fidel Castro brouille l'image de son
gouvernement, tandis que sa politique de nationalisations contribue à causer une crise
économique dans le pays. Le général Augusto Pinochet, soutenu par la CIA, renverse le
gouvernement lors d'un coup d'État, au cours duquel Allende trouve la mort567.
Après cet échec d'une conquête démocratique du pouvoir, les mouvements de guérilla latino-
américains (d'inspiration castriste, guévariste, ou maoïste) connaissent un regain d'activité durant
le reste des années 1970, tout particulièrement en Amérique centrale. Le succès de la révolution
sandiniste au Nicaragua leur apporte un second souffle décisif568,569 : en 1979, le Front sandiniste
de libération nationale, d'inspiration castriste, parvient à renverser le régime en place. Soutenus
par les pays communistes et notamment par Cuba, les sandinistes entreprennent de mettre en
œuvre un projet « révolutionnaire » et connaissent une dérive autoritaire, mais sans pour autant
interdire l'opposition ni procéder à une étatisation totale de l'économie, n'allant pas au bout de la
transformation du Nicaragua en pays communiste. Ils doivent en outre affronter la guérilla
des Contras, soutenue par les États-Unis570,571. Au Pérou, la guérilla maoïste du Sentier lumineux,
à l'idéologie particulièrement extrémiste, se développe dans les années 1980 et fait régner la
terreur dans certaines régions572.
Tensions et divisions dans les pays communistes[modifier | modifier le code]
Le cas du Cambodge[modifier | modifier le code]
Article connexe : Conflit cambodgien (1978-1999).
En Asie, le Cambodge devient, après son invasion par le Viêt Nam, un théâtre de la rivalité sino-
soviétique en Asie du Sud-Est. En février 1979, peu après le renversement des Khmers
rouges avec lesquels elle était alliée, la République populaire de Chine attaque le Viêt Nam en
représailles : le bref conflit sino-vietnamien s'achève par le retrait des troupes chinoises. Dans les
années qui suivent, les Khmers rouges, qui ont reconstitué leurs forces en Thaïlande, reprennent
le combat contre les Vietnamiens. Le conflit au Cambodge, qui oppose d'une part les Khmers
rouges et les Sihanoukistes soutenus aussi bien par la Chine que par les États-Unis, et d'autre
part le Viêt Nam et la République populaire du Kampuchéa soutenus par l'URSS, s'enlise et pèse
sur les finances vietnamiennes et soviétiques573.
La Yougoslavie et l'Albanie[modifier | modifier le code]

L'un des 700 000 bunkers albanais construits sous le régime d'Enver Hoxha : l'Albanie
communiste fonctionnait selon une logique de fermeture et d'autarcie.

En Europe de l'Est, plusieurs régimes communistes suivent des voies particulières. En dehors
du bloc de l'Est, la République fédérative socialiste de Yougoslavie adopte une organisation de
plus en plus décentralisée — notamment après le mouvement de contestation du printemps
croate de 1971 - la personne du maréchal Tito, président à vie, demeurant le principal ciment
politique du pays. En 1979, l'économie du pays, jusque-là relativement prospère, est durement
touchée par le deuxième choc pétrolier574.
Après la mort de Tito en 1980, la Yougoslavie adopte un système de présidence fédérale
tournante, sans parvenir à résoudre ses problèmes de stabilité politique et d'équilibre entre
nationalités. Dans les années 1980, les tensions entre les républiques et les nationalités de la
fédération sont de plus en plus vives575.
Si la Yougoslavie, bien que demeurant un État autoritaire à parti unique, fait figure de régime
modéré, la République populaire socialiste d'Albanie demeure au contraire gouvernée de
manière stalinienne et professe un marxisme-léninisme dogmatique. Ayant rompu avec la
Chine par hostilité aux réformes de Deng Xiaoping, elle fait le choix de l'isolement à la fin
des années 1970 et demeure le pays le plus fermé d'Europe. Les dernières années d'Enver
Hoxha, qui meurt en 1985, sont accompagnées de purges politiques : en 1981, il fait éliminer le
premier ministre Mehmet Shehu et l'entourage de ce dernier576.
Le régime de Ceaușescu en Roumanie[modifier | modifier le code]
Wojciech Jaruzelski, dirigeant de la République populaire de Pologne et Nicolae Ceaușescu, dirigeant de
la République socialiste de Roumanie.

Au sein du bloc de l'Est, la Roumanie (rebaptisée République socialiste de Roumanie en 1965)


occupe une place particulière de par son autonomie. Nicolae Ceaușescu, successeur
de Gheorghe Gheorghiu-Dej, poursuit la politique d'ouverture diplomatique de ce dernier495,
conserve de bonnes relations avec les pays occidentaux et fait un temps figure de modéré. Mais,
avec les années, le président roumain adopte un style de gouvernement de plus en plus
autoritaire et autocratique : le « Conducator » Ceaușescu multiplie les mesures aberrantes,
ravage le paysage rural et urbain du pays en prétendant le remodeler, soumet sa population à
une surveillance policière constante et fait l'objet d'un culte de la personnalité aux accents parfois
délirants577.
Pologne : des émeutes de 1970 au mouvement de Solidarność[modifier | modifier le
code]
Article connexe : État de siège en Pologne (1981-1983).
Au partir de 1970, la population de la République populaire de Pologne exprime son
mécontentement de manière de plus en plus ouverte. En décembre 1970, un important
mouvement de grèves est lancé dans les ports de la mer Baltique : la répression contribue
à transformer la contestation en émeutes. Władysław Gomułka, dépassé par la situation, doit
quitter le pouvoir. Son successeur, Edward Gierek, entreprend de se concilier les ouvriers en
améliorant leurs conditions de vie, mais l'économie polonaise se dégrade à nouveau à partir
de 1976. Les opposants au régime communiste sont notamment galvanisés par l'élection du
pape polonais Jean-Paul II. En juillet 1980, la contestation s'accroît : fin août, le pouvoir cède et
autorise l'existence de syndicats indépendants. Solidarność est constitué dans la foulée, sous le
leadership de Lech Wałęsa, et se mue rapidement en mouvement de masse. Edward Gierek est
remplacé par Stanisław Kania, qui ne parvient pas davantage à ramener le calme. En 1981, le
général Wojciech Jaruzelski devient successivement chef du gouvernement, puis du Parti ouvrier
unifié polonais ; en décembre, il décrète l'état de siège et fait réprimer Solidarność. Jaruzelski
lève la loi martiale en 1983 mais, malgré ses efforts, le mécontentement demeure fort et
l'opposition ne désarme pas578.
Intervention soviétique en Afghanistan[modifier | modifier le code]
Article connexe : Guerre d'Afghanistan (1979-1989).
En 1978, les communistes du Parti démocratique populaire d'Afghanistan prennent le pouvoir
lors de la révolution de Saur et proclament la République démocratique d'Afghanistan. Mais le
nouveau régime dresse rapidement contre lui une partie de la population, tout en étant parcouru
de conflits internes. Hafizullah Amin, tenant de l'aile radicale, fait renverser et tuer le
président Nour Mohammad Taraki, plus modéré et proche des Soviétiques. La situation
chaotique, dans un pays à la frontière de l'URSS, pousse Moscou à intervenir : l'Armée
rouge envahit l'Afghanistan en décembre 1979. Hafizullah Amin est tué et remplacé par le pro-
soviétique Babrak Karmal. L'invasion amplifie la révolte contre le régime : de
nombreux moudjahidines afghans prennent les armes et reçoivent bientôt le renfort de
combattants islamiques étrangers. L'URSS se trouve dès lors impliquée dans une guerre
d'Afghanistan désastreuse pour son image dans le monde. Le conflit, qui devient bientôt un
gouffre financier et humain, suscite un mécontentement croissant au sein de la société
soviétique579 ; il a également pour conséquence d'aggraver brutalement les tensions avec
l'Occident, mettant un terme à la détente et favorisant l'élection à la présidence des États-Unis
de Ronald Reagan, candidat au discours vivement anticommuniste580.
Le contexte au tournant des années 1980[modifier | modifier le code]
Article connexe : Guerre fraîche.
L'URSS et les pays du bloc de l'Est abordent les années 1980 dans un contexte difficile, sous les
effets conjugués du conflit afghan, de la situation en Pologne, de la détérioration des relations
avec les États-Unis, et de problèmes intérieurs. L'économie soviétique stagne et ne parvient à
atteindre aucun des objectifs fixés par le pouvoir, notamment en termes agricoles581. Les
économies des pays du bloc, lourdement déficitaires, sont très endettés auprès du système
bancaire occidental582. L'appareil soviétique, handicapé par sa bureaucratie envahissante, est de
plus en plus sclérosé ; l'élite politique prend, sous Brejnev, l'allure d'une « gérontocratie »583.
Dans les pays occidentaux, les principaux PC déclinent. En France, le PCF est désormais
dépassé dans les urnes par le Parti socialiste. En 1981, après l'élection de François Mitterrand, il
participe au gouvernement d'union de la gauche mais ne parvient guère à peser sur les
décisions ; il rompt avec ses alliés socialistes en 1984 et, à nouveau dans l'opposition, poursuit
son déclin électoral565. En Italie, le PCI, très recentré, reste le principal parti à gauche mais
s'essouffle dans les années 1980, faute de rénovation en profondeur de son projet et du fait de la
concurrence du PSI460,584.
En 1979, un parti communiste prend le pouvoir à la Grenade, dans la Caraïbe : le New Jewel
Movement, parti pro-castriste dirigé par Maurice Bishop, prend le pouvoir et proclame
le Gouvernement révolutionnaire populaire de la Grenade. Soutenu par Cuba, le régime
grenadien se rapproche de l'URSS et des autres pays communistes. Mais, en 1983, Bishop est
renversé et tué par ses rivaux au sein du Parti. Les États-Unis saisissent l'occasion pour envahir
la Grenade, mettant un terme au gouvernement communiste585

Vous aimerez peut-être aussi