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LE PIS, OU L’INVENTION DE LA MÉMOIRE IDENTITAIRE
Frédéric Zalewski
2020/1 N° 1 | pages 7 à 26
ISSN 0338-0599
ISBN 9782130823445
DOI 10.3917/receo1.511.0007
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-d-etudes-comparatives-est-ouest-2020-1-page-7.htm
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LE PIS, OU L’INVENTION
DE LA MÉMOIRE IDENTITAIRE
Frédéric Zalewski
Maître de conférences de science politique, université Paris Nanterre,
Institut des sciences sociales du politique (UMR CNRS 7220) ;
fzalewski@parisnanterre.fr
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Un an après l’arrivée au pouvoir du PiS (Prawo i Sprawiedliwość, Droit
et Justice) en novembre 2015 en Pologne, la Revue d’études comparatives
Est-Ouest consacrait un dossier aux transformations politiques occasion-
nées en Europe centrale par l’émergence de pouvoirs nationalistes et hos-
tiles à l’Europe communautaire depuis les années 2000. Centré sur la
Pologne et la Hongrie, ce dossier prenait le parti d’appréhender ces
régimes à travers la catégorie de « révolution conservatrice » (Zalewski,
2016). Il s’agissait d’envisager à nouveaux frais des processus que leur
catégorisation habituelle à travers les catégories canoniques et fatiguées
de « populisme » ou de « régime illibéral » conduit à réduire à quelques
propriétés élémentaires, sur une base empirique étroite (données électo-
rales agrégées et manifesto analysis), par ailleurs rarement travaillée de
manière critique. Cette catégorisation alternative n’était pas sans inconvé-
nient non plus, puisque les conservatismes classiques auxquels éventuelle-
ment adosser ces transformations sont, en Pologne comme en Hongrie,
fortement médiatisés par des enjeux locaux qui en modifient substantielle-
ment les contours. Mais au moins devenait-il possible de relever plus
finement ce que ces transformations impliquaient de restauration sociale
et d’hostilité solidement ancrée aux modalités libérales de construction de
la démocratie après 1989.
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pays. Catégorie de la pratique, la notion de politique historique s’est
imposée dans le lexique des politiques mémorielles polonaises au moment
de la création, en 2004, du musée de l’Insurrection de Varsovie, patronné
par Lech Kaczyński, alors maire de Varsovie, avant son élection à la prési-
dence de la République l’année suivante. Reprendre la notion, non pas à
des fins analytiques mais de façon descriptive, permet de mettre en
évidence l’émergence d’un récit victimaire, centré sur les souffrances
polonaises et fondé sur la thèse des « deux totalitarismes » selon laquelle
la séquence historique ouverte en 1939 ne s’est refermée qu’en 1989.
L’idéalisation de la Pologne de l’entre-deux-guerres comme seule
expérience d’indépendance authentique de l’État polonais depuis les
partages 1 apparaît comme le corollaire de cette transformation. Ce
dossier soutient donc que l’examen de la politique mémorielle du PiS
permet de voir la mémoire comme une catégorie régulatrice non
seulement de l’action publique mais aussi des luttes politiques, dans une
optique agonistique, et qui doit aux yeux de ses promoteurs contribuer à
une hégémonie culturelle conservatrice plus large (Hall, 2010 ; Bluhm,
Varga, 2019).
1. En référence au démembrement de l’État polonais entre les années 1770 et 1790, avant le
rétablissement de l’indépendance dans de nouvelles frontières en 1918.
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politique historique et poursuivent, peut-on supposer, les mêmes fins :
que l’on pense ici aux commémorations mensuelles de la catastrophe de
Smolensk, à la participation régulière des membres du gouvernement aux
célébrations géantes du média catholique radical Radio Maryja ou encore
à la constitution en 2018 (année de célébration du centenaire de l’indé-
pendance en 1918) d’un cortège officiel pour participer à la Marche de
l’Indépendance, événement nationaliste trouvant son origine dans les
manifestations de rue de l’extrême droite néo-fasciste. Peut-être davantage
qu’une politique de mémoire, la politique historique s’avère être, pourrait-
on oser non sans quelque provocation, une politique identitaire et particu-
lariste, en rupture avec les prémisses universalistes des politiques mémo-
rielles (Gensburger, Lefranc, 2017).
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années 1940 à l’encontre des représentants légaux de l’État polonais
d’avant 1939 et de la résistance qui lui était affiliée, ainsi que contre
l’opposition légale des années 1940, qui était représentée en majeure
partie par le parti paysan continuateur du radicalisme agraire de l’entre-
deux-guerres. Sur ce dernier point, par exemple, les historiens proches du
régime étaient cantonnés à l’évocation des luttes paysannes des années
1930 contre le régime « fasciste » de la Sanacja 3 ou, s’ils souhaitaient
davantage de liberté, à l’histoire de l’émergence des partis paysans dans
la Pologne d’avant 1914 (Zalewski, 2002). Les épisodes qui impliquaient
l’Union soviétique, comme le pacte Molotov-Ribbentrop ou le massacre
de Katyn, figuraient également dans ces non-dits de l’histoire officielle.
Ces pages blanches étaient cependant un peu différentes des épisodes que
le régime mobilisait à des fins de légitimation, mais dont il présentait une
version discutable (insurrection de Varsovie en 1944, relations polono-
juives pendant la Seconde Guerre mondiale, par exemple, qui furent après
1945 insérées dans le récit anti-fasciste dominant de la période).
3. Le régime de la Sanacja désigne le pouvoir autoritaire qui s’est imposé en 1926 à la suite du
coup d’État du maréchal Piłsudski. Ce régime fut marqué par une dérive droitière et fascisante
après la mort de Piłsudski en 1935.
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éditions clandestines Nowa, en 1977, fut De l’origine du système (Pochodzenie
systemu), du sociologue Jakub Karpiński, consacré aux crises politiques de la
Pologne populaire, qui remontaient selon lui aux origines soviétiques du régime
(Dudek, 2015). Ce fut surtout la publication de l’ouvrage de l’historienne Kry-
styna Kersten, en 1984, Les origines du système de pouvoir. La Pologne de 1943 à
1948 (Narodzenie systemu władzy. Polska 1943-1948) aux éditions clandestines
Krąg, traduit en langue anglaise, qui lança une nouvelle étude critique de la
prise du pouvoir par les communistes dans les années 1940 (Kersten, 1991).
L’opposition disposait en outre de moyens imaginatifs pour diffuser son contre-
récit historique, comme en atteste l’exemple de la poste de Solidarność, consis-
tant à diffuser des timbres officieux commémorant des épisodes non représen-
tés par le discours officiel (Panné, 1990). Ce processus, pris dans son ensemble,
a pu être qualifié par l’historien Andrzej Paczkowski de « guerre civile pour les
traditions », signalant ainsi une course à l’appropriation du passé récent par
deux camps politiques antagonistes (Paczkowski, 1993).
Ce processus avait cependant pris une telle ampleur qu’il est difficile
de s’en tenir à cette opposition schématique entre une historiographie
officielle, contrainte par les récits politiques du régime et une histoire,
abritée par l’opposition démocratique, ouvrant le chantier des pages
blanches. En réalité, cette opposition traversait le pouvoir comme l’oppo-
sition, quoique très différemment. On peut en prendre deux exemples,
pour illustrer notre propos. Au cours des années 1970, d’intenses polé-
miques opposaient entre eux les intellectuels de l’opposition, et l’histoire
pouvait en devenir l’un des enjeux dès lors qu’elle servait à légitimer des
positions politiques et des formes d’actions opératoires face au régime.
L’une des plus célèbre de ces controverses a mis aux prises Adam Michnik
à l’essayiste Piotr Wierzbicki, à propos du Traité des larves (Traktat o
gnidach), publié par ce dernier. La polémique portait ainsi sur le rôle des
intellectuels sous le communisme, mais Michnik s’y appuyait sur la figure
du maréchal Piłsudski pour définir un patriotisme « ouvert », conduisant
à récuser les postures nationalistes qui pointaient dans l’opposition démo-
cratique (Michnik, 1983) 4. Second exemple, concernant le régime cette
4. Le même Wierzbicki a créé dans les années 1990 le journal de droite anticommuniste Gazeta
Polska, qui est devenu dans les années 2010, grâce aux clubs de Gazeta Polska (Kluby Gazety
Polskiej), l’un des principaux espaces de mobilisation active d’un conservatisme populaire teinté
de religiosité. Très en pointe sur les enjeux mémoriels, les clubs de Gazeta Polska ont été l’un
des vecteurs des perturbations survenues à Paris en 2019 lors d’un colloque sur les travaux
d’historiens polonais de la Shoah dans le contexte très tendu ayant suivi la promulgation d’une
loi en Pologne qui pénalisait l’usage de la dénomination de « camps polonais » pour les camps
d’extermination nazis (Szurek, 2010, 2019).
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fois, celui des organisations de masse du régime des années 1970-1980,
pour lesquelles cette conjoncture de réexamen du passé récent constituait
un espace de ressources politiques inédites. Des figures du radicalisme
agraire de l’entre-deux-guerres furent ainsi réhabilitées par les organisa-
tions paysannes du régime, processus qui prit davantage d’intensité vers
1988 et suscita des réserves de la part des dirigeants communistes eux-
mêmes, qui y virent le spectre de « l’agrarisme » d’avant-guerre
(Paczkowski, 1993 ; Zalewski, 2002).
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l’opposition qu’il établit entre patriotisme et nationalisme, qui est devenue
par la suite canonique dans le débat intellectuel et politique polonais et
s’est trouvée contestée par les tenants de la politique historique.
5. Dans les années 1980, des religieuses de l’ordre des Carmélites s’installèrent dans un bâtiment
situé dans l’enceinte du camp, suscitant les protestations de nombreuses organisations juives
contre ce qui était perçu comme une tentative de « christianisation » des lieux. Le Carmel fut
finalement fermé en 1993.
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prendre place dans un espace élargi de prises de positions, sur l’histoire
et sur les premiers pas de la démocratie après 1989.
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politique historique, Andrzej Nowak, dans le groupe varsovien du WKKP
(Warszawski klub krytyki politycznej, Club varsovien de la critique poli-
tique) et enfin, à partir de 2003, autour de la revue Teologia polityczna
(Théologie politique), ainsi nommée en référence directe à Carl Schmitt.
Ce groupe, parmi lequel on retrouve Dariusz Gawin, Tomasz Merta,
Pawel Kowal ou encore Robert Kostro, s’avère le plus actif dans les années
2001-2005, période à l’issue de laquelle le PiS remporte les élections légis-
latives et présidentielle. Selon une acception restreinte communément
admise, la politique historique passe pour la politique de mémoire promue
et définie par ce groupe au tournant des années 2000.
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3. une réfutation de l’histoire critique, qui surexpose aux yeux du public
les pages les plus sombres du passé, cultive la « honte » et occulte l’entiè-
reté du passé national. Contre cette histoire critique, une histoire
« héroïque » est celle qui permet de mettre en regard les aspects glorieux
du passé et les épisodes devant être l’objet de réprobation et de condam-
nation (Wolff-Powęska, 2007 ; Traba, 2010 ; Tokarz, 2011, Łuczewski,
2016).
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La campagne de 2005 s’est avérée être l’un des moments où la pensée
des historiens conservateurs est sortie de leurs cercles de réflexion pour
circuler dans l’espace politique, en étant reprise par le PiS et mobilisée
pour construire les équivalences politiques qui fondent le discours du PiS.
Cette campagne, en effet, avait été menée par le PiS en opposant
« Pologne libérale » et « Pologne solidaire », mais cette opposition
n’avait pas que des aspects socio-économiques. Elle unifiait des représen-
tations plus larges sur le post-communisme comme période marquée par
des continuités avec le communisme, par la corruption politique et par
l’égoïsme social des élites (Mink, 2016). La promotion d’un changement
de régime (consistant à passer à la IVe République, à la suite de la
IIIe République instaurée en 1989) a permis d’inclure dans une critique
indifférenciée un ensemble de réalités très disparates, mais soudainement
liées entre elles par la dénonciation des « petites connivences » (układy)
de l’après 1989, trope qui s’est transformé au fil du temps en dénonciation
du « système » depuis des positions conservatrices.
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la mode identitaire, mais sur le terrain allemand, cf. Miller-Idriss, 2018).
Certaines de ces figures peuvent apparaître assez consensuelles, comme
celle de la jeune résistante Danuta Siedzikówna, pseudonyme Inka, une
infirmière de l’AK 6 arrêtée par le NKVD en 1945 et exécutée en 1946.
Mais la réhabilitation des soldats maudits a permis à l’extrême droite de
s’inscrire dans une narration dominante tout en promouvant des figures
contestées, comme celle du capitaine Romuald Rajs, pseudonyme Bury,
auteur d’exactions contre les populations civiles biélorusses en 1946.
L’usage régulier de sa mémoire dans des marches d’extrême droite, au
cours desquelles des banderoles le célèbrent parfois directement, a
conduit à des contre-mobilisations de groupes de défense de droits
civiques 7 polonais, donnant lieu à des face-à-face tendus avec la police,
comme dans la ville de Hajnówka en 2019 (Wójcik, 2019). En 2002, l’IPN
avait qualifié de crime de guerre les agissements de Bury en février 1946,
lorsque 79 habitants de la localité de Bielsk Podlaski perdirent la vie,
mais cette institution entretient dernièrement une certaine ambiguïté en
publiant à la suite de ces manifestations une note soulignant la nécessaire
requalification des faits (IPN, 2019). Dans son article, Valentin Berh
évoque ainsi le cas de Tomasz Panfil, l’un des historiens de l’IPN ouverte-
ment engagé dans des commémorations de la figure de Bury.
6. L’AK (Armia Krajowa, Armée de l’intérieur) était la résistance polonaise, organisée de façon
centralisée et dépendant hiérarchiquement du gouvernement polonais en exil à Londres.
7. Il s’agit en particulier du groupe militant Obywatele RP (les Citoyens de la République),
groupe né dans le sillage des manifestations de masse de l’année 2016 contre les premières
atteintes à l’État de droit du PiS.
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commémoration des Polonais ayant sauvé des Juifs sous l’occupation alle-
mande, instaurée en 2018 à la date du 24 mars, leur a accordé une place
symbolique. La construction de la mémoire passe ici autant par la création
d’un musée d’histoire que par la mise en avant de figures singulières et
fortement incarnées, dont le destin tragique peut émouvoir à juste raison
et ainsi toucher le public (Gensburger, Lefranc, 2017). Dans son article,
Ewa Tartakowsky évoque d’autres figures de ce récit sacrificiel et souligne
leur place dans les programmes et les manuels scolaires polonais, en mon-
trant également que cette promotion s’accompagne d’une relative reléga-
tion des figures féminines. Qu’il s’agisse des programmes scolaires ou de
la mode identitaire, cette nouvelle mémoire nationale déborde ainsi large-
ment la sphère des débats politiques et pourrait dès lors se laisser appré-
hender par la notion de « formation culturelle de transition », proposée
par Michael D. Kennedy pour mettre en évidence les trames de sens col-
lectives construites pour gérer la sortie du communisme (Kennedy, 2002).
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plus spécialement grâce à des « entrepreneurs de mémoire » multiposi-
tionnés, à l’instar du sénateur PiS Jan Żaryn, historien de profession et
chef dans les années 2000 du Bureau d’instruction publique de l’IPN.
Mais ce contexte de transnationalisation suscite la multiplication de profils
multipositionnés désormais à la charnière entre le national et le global,
comme peuvent le montrer divers exemples. En 2018, l’IPN a ainsi
décerné le prix « Témoin de l’histoire » (świadek historii) à un lycéen
franco-polonais, Jakub Vaugon, en le présentant comme s’étant insurgé
en classe contre son professeur d’histoire-géographie qui se serait appuyé
sur un manuel diffamant les Polonais pendant la Seconde Guerre mon-
diale (édité par Hatier, le manuel affirmait selon l’IPN que les Polonais
collaboraient avec les nazis à Treblinka). L’information a ensuite été
reprise par divers médias papier ou Internet (Ambroziak, 2018) 9. Ce prix
est décerné par l’IPN pour distinguer des particuliers ou des organisations
œuvrant à la mémoire de la Pologne à l’étranger. D’autres exemples
peuvent être cités. Ainsi, celui de Patrick Ney, un britannique établi en
Pologne et marié à une polonaise, que sa chaîne Youtube consacrée à son
choix de vie en Pologne a rendu visible sur les réseaux sociaux et auprès
des médias généralistes (Chin, 2019), mais aussi auprès des médias
d’extrême droite, pour lesquels il occupe ponctuellement une position de
commentateur. Un autre youtubeur, Stefan Thompson, également invité
occasionnel des médias d’extrême droite, met à profit sa connaissance de
l’anglais et des États-Unis pour diffuser des vidéos qui évoquent le rôle
historique des Polonais, les relations polono-juives, etc. Ces cas peuvent
être rapproché de celui, plus significatif, de l’entrepreneur de mémoire
Jonny Daniels, que traite Audrey Kichelewski dans ce numéro de la
RECEO.
9. Je remercie Valentin Behr d’avoir attiré mon attention sur cet épisode.
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marquant notamment les liens entre le développement de ce qui lui appa-
rait comme un concept et la découverte, par les conservateurs polonais
d’après 1989, de la pensée de Carl Schmitt. Même si le texte doit être mis
en perspective avec les positions de son auteur, il apporte une contribu-
tion substantielle à la compréhension de la rupture souhaitée par les intel-
lectuels promoteurs de la politique historique 10.
Dans son texte, Valentin Behr analyse l’inflexion donnée à l’IPN par
l’alternance politique de 2015. Si l’institution ne se voit pas nécessaire-
ment allouer de nouvelles missions, sa direction est en revanche fortement
politisée, ce qui se traduit par un regain de tension parmi les historiens
polonais, opposés quant à l’autonomie de leur champ par rapport au poli-
tique. Ewa Tartakowsky explore dans son texte la réorganisation de
l’enseignement secondaire en Pologne, qui concerne à la fois la question
des programmes en histoire, censés rompre avec la « pédagogie de la
honte », d’une part, et l’organisation du cycle secondaire, puisque les
collèges ont été supprimés avec l’arrivée au pouvoir du PiS. La figure de
Jonny Daniels, analysée par Audrey Kichelewski, permet de s’attarder sur
un entrepreneur de mémoire censé accréditer le discours officiel sur les
relations polono-juives.
10. Je remercie Arnault Skornicki, dont les précieux conseils ont contribué à clarifier la traduc-
tion française.
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