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CHAPITRE 8: Quels sont les caractéristiques contemporaines et les

facteurs de la mobilité sociale?


DOSSIER 1 : Comment définir et mesurer la mobilité sociale ?

I. Les formes de mobilité

- La mobilité sociale est le fait pour un individu de changer de statut social. Pour
l’Insee, la mobilité sociale est la mobilité intergénérationnelle, c’est-à-dire le fait
d’avoir un statut différent de la génération antérieure. On compare le plus souvent la
position du fils/fille par rapport à celle de son père. Si sa position est plus valorisée
socialement, on parlera d’ascension sociale (ou de mobilité verticale ascendante).
Si la position sociale est moins valorisée, de déclassement (ou de mobilité verticale
descendante).
La mobilité sociale n’est pas forcément ascendante : elle peut être horizontale
(quand on appartient à une autre catégorie que celle de ses parents, mais située au
même niveau hiérarchique. (Un professeur au Lycée dont le père est propriétaire
d’école / Elite) OU (un fils salarié dont le père était non salarié/ Indépendant)

- La mobilité géographique est un « déplacement physique » (« quitter sa région ou


son pays »). Elle s’appréhende le plus souvent à travers la mobilité résidentielle
définie comme le fait de déménager, y compris au sein de la même commune.

- La mobilité professionnelle consiste à « changer d’entreprise ou de type de travail ».


Elle désigne les changements de positions sociales en cours de carrière. la mobilité
professionnelle est la mobilité intragénérationnelle (au cours de sa carrière).

- Dans certains types de professions intermédiaires (santé et social surtout, les


infirmiers par exemple), la mobilité professionnelle est très faible : très peu
d’individus qui ont commencé leur carrière dans ce groupe deviennent cadres (2 %),
très peu aussi connaissent une démotion (4 %). Au contraire, chez les professions
administratives et commerciales, on a 15 % de chances de devenir cadre au cours de
sa carrière, mais aussi 12 % de chances de connaître une démotion.

- On peut changer de secteur d’activité sans changer de PCS, ni même de profession


(par exemple, une secrétaire qui travaillait pour une entreprise de construction
automobile, donc dans l’industrie, et qui travaille désormais dans une administration).
De même, on peut changer de lieu de travail ou d’entreprise en restant dans le
même secteur, en gardant la même profession. Enfin, on peut changer de fonction
sans changer de PCS : par exemple, un ingénieur qui devient enseignant continue à
faire partie des cadres et professions intellectuelles supérieures.

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- La mobilité observée se mesure par l’effectif total des individus qui sont mobiles.
Ainsi le taux absolu de mobilité :
Nombre total des individus mobiles / effectif total de la population étudiée.

II. La construction et l’interprétation des tables de mobilité.

- Une table de mobilité est un tableau à double entrée qui croise la position sociale et
l’origine sociale des individus, le plus souvent des hommes, déjà assez âgés pour
avoir une situation professionnelle stable.

- La table de destinée est un tableau à double entrée qui indique le devenir social des
individus qui ont une origine donnée.

- La table de recrutement est un tableau à double entrée qui indique l’origine sociale
des individus qui ont une position sociale donnée.

- Documents travaillés en classe

III. Les tables de mobilité : quels enjeux, quelles limites ?

- Mesurer la mobilité sociale permet de vérifier que la reproduction sociale n’est pas
trop forte, autrement dit de vérifier que la position sociale des individus ne dépend
pas de celle de leurs parents. En effet, dans le cas contraire, la position sociale reste
largement héréditaire, donc la société n’est pas réellement démocratique.

- Jusqu’à une période récente, le taux d’activité des femmes était beaucoup plus faible
que celui des hommes et, en tout cas, la plupart des femmes arrêtaient de travailler
pendant un temps plus ou moins long lorsque leurs enfants étaient très jeunes. Il était
donc très difficile de comparer la situation socioprofessionnelle des femmes à celle de
leur mère.

- Les limites des tables :


 La mobilité n’est vue que sous l’angle des groupes socio-professionnels alors
que la profession n’est pas le seul indicateur pertinent de position sociale :
avoir le même métier que son père ne signifie pas nécessairement avoir la
même position sociale car le statut des métiers évolue et que le statut dans
l’emploi est aussi un facteur important (être ouvrier qualifié en CDI à temps
plein ne renvoie pas à la même situation qu’un ouvrier non qualifié en intérim
ou à temps partiel).
 Deux PCS distinctes peuvent correspondre à une position sociale
comparable (par exemple, un ouvrier et un employé peuvent tous deux
appartenir aux classes populaires).
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 En troisième lieu, le prestige, les revenus, d’une catégorie, donc aussi sa
place sur l’échelle sociale, évoluent dans le temps : par exemple, la situation
actuelle d’un professeur de lycée est à peu près équivalente à celle d’un
instituteur d’il y a cinquante ans.

Les tables de mobilité mesurent la mobilité en ne tenant compte de la profession que


d’un seul parent. Pourtant, le fils d’un employé et d’une cadre qui devient cadre
connait une ascension sociale si on se réfère à la position du père mais pas par rapport
à celle de la mère.

DOSSIER 2 : Quelles sont les caractéristiques et les évolutions de la mobilité sociale ?

I. Les flux de mobilité observée

II. Mobilité sociale et fluidité sociale

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Interprétation :

- La mobilité observée peut s’expliquer par la mobilité structurelle désigne le


nombre de personnes dont la mobilité était rendue nécessaire par le changement de
structure socioprofessionnelle entre la génération des parents et celles des enfants.
En effet, avec le déclin du secteur agricole, les fils d’agriculteurs sont, pour partie,
contraints d’exercer une autre profession que celle de leur père car le secteur ne
permet pas à tous de travailler.

- Une grande partie des fils d’agriculteurs a connu une mobilité sociale parce que le
nombre d’agriculteurs en France a fortement baissé depuis cinquante ans.

- La mobilité observée peut aussi découler de la fluidité sociale (une situation où la


position sociale d’un individu ne dépend pas de son origine sociale). La fluidité
sociale est la mobilité que connaissent les individus par rapport à leurs parents,
indépendamment de l’évolution de la structure sociale entre les deux générations.
Autrement dit, la fluidité sociale désigne une situation où tous les individus ont la
même probabilité d’accéder à une position sociale donnée, quelle que soit la position
sociale de leur père.

- Une société plus mobile n’est pas nécessairement une société plus fluide. Un fils
d’ouvrier qui devient employé n’occupe pas la même position sociale que son père
mais il n’a pas connu d’ascension sociale pour autant. Un fils d’agriculteur qui

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devient ouvrier est mobile mais le fait que de nombreux fils d’agriculteurs occupent
un métier différent de celui de leur père du fait du déclin du secteur agricole ne nous
dit rien de l’évolution de la fluidité sociale.

III. Les spécificités de la mobilité sociale des hommes et des femmes

- Les femmes accèdent de plus en plus à des emplois qualifiés, donc quand on compare
leur situation à celle de leur mère, on mesure une forte importance de la mobilité
ascendante (plus forte que quand on la mesure par rapport à leur père, ou quand on
mesure celle des hommes par rapport à leur père).

- Jusqu’à une période récente, le taux d’activité des femmes était beaucoup plus faible
que celui des hommes, donc on estimait l’origine sociale d’une femme à partir de
celle de son seul père, et sa position sociale d’adulte à partir de celle de son conjoint.
Donc, pour une femme, avoir un père d’une certaine catégorie et avoir épousé un
homme occupant une position plus élevée était une forme d’ascension sociale
personnelle.

- On constate que, la plupart du temps, quand les couples ne sont pas homogames,
c’est l’homme qui occupe une position sociale plus élevée. Donc, si l’on admet que,
pour une femme, épouser un homme d’un milieu supérieur à celui de ses parents
était une forme d’ascension sociale, on peut dire qu’elle acceptait du même coup de
ne pas connaître d’ascension par son propre emploi.

DOSSIER 3 : Quelles sont les principaux déterminants de la mobilité sociale ?

I. L’évolution de la structure socioprofessionnelle

- La croissance de la mobilité observée provient, pour partie, des transformations


structurelles de la France, avec le passage d’une société agricole à une société
industrielle, puis post-industrielle. Depuis le milieu des années 1970, l’essor du
salariat, la poursuite du déclin de l’emploi agricole, le recul de l’emploi industriel,
la tertiarisation de l’économie et le développement de l’emploi qualifié ont
modifié la structure des emplois occupés.

- Le système productif s’est transformé pendant les Trente glorieuses, notamment sous
l’effet du progrès technique, provoquant une transformation de la structure des
emplois : le nombre d’agriculteurs a fortement baissé (hausse de la taille des
exploitations et mécanisation), puis celui des ouvriers d’industrie, ainsi que celui des
autres travailleurs indépendants (concentration des entreprises, développement des
grandes surfaces) ; à l’inverse, la hausse de la demande de services de la part des
ménages et des entreprises a créé des emplois de « cols blancs ».

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- Les premières expériences professionnelles sont déterminantes pour la suite de la
carrière ; donc, quand des individus entrent sur le marché du travail avec un contrat
stable, peu de risque de chômage, ils ont plus de chances de connaître une mobilité
professionnelle ascendante, donc aussi une ascension sociale par rapport à leurs
parents, surtout si de nombreux emplois qualifiés se créent sur cette période. Dans le
cas contraire, les jeunes actifs ont plus de chances de stagner dans leur carrière, donc
moins de chances de bénéficier d’une ascension sociale intergénérationnelle.

II. Le rôle des niveaux de formation (le rôle de l’école)

- L’essor de la mobilité observée a aussi son origine dans une lente augmentation de
la fluidité sociale. Les évolutions du système scolaire ont joué un rôle clé dans
l’accroissement de la fluidité sociale. La réduction de l’inégalité des chances
scolaires et la massification de l’enseignement sont des facteurs déterminants pour
expliquer la réduction de l’inégalité des chances sociales.

- La diminution de l’inégalité des chances scolaires ne suffit pas, néanmoins, à elle


seule à réduire l’inégalité des chances sociales. Le bénéfice, en termes de statut
professionnel, associé à un niveau donné d’éducation, varie aussi selon l’origine
sociale.

- Par ailleurs, la massification de l’enseignement a conduit à un déclin progressif des


rendements de l’éducation sur le marché du travail. Avec le baccalauréat, les
débouchés professionnels sont moindres que par le passé. On a pu parler d’un
phénomène d’inflation scolaire.

- La métaphore économique de « l’inflation des diplômes » est utilisée pour montrer le


risque de perte de valeur des titres scolaires, autrement dit le fait qu’avoir un niveau
de diplôme donné garantit moins qu’avant l’accès à un emploi qualifié, tout comme la
création monétaire, provoquant une hausse des prix, réduit le pouvoir d’achat de la
monnaie.

- A diplôme équivalent, la position sociale dépende de l’origine sociale car il est plus
facile de devenir travailleur indépendant si on bénéficie d’un patrimoine hérité de sa
famille, ou même carrément si on reprend l’entreprise familiale. Elles peuvent être
liées aux relations familiales, qui permettent plus ou moins facilement d’obtenir un
stage, ou un emploi. Par ailleurs, l’ambition, le goût pour la compétition, la confiance,
sont des qualités socialement construites par la socialisation, et ces différences
peuvent perdurer malgré l’équivalence de réussite scolaire.

III. L’impact des ressources et des configurations familiales

- La famille joue un rôle important dans la reproduction sociale. En lien avec


l’existence des socialisations différenciées, notamment selon le milieu social, certains

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individus bénéficient d’un contexte social plus propice à la réussite scolaire, en
particulier du fait d’une plus ou moins grande transmission de capital culturel,
ensemble des savoirs, savoir-faire, savoir être, socialement valorisés, transmis
notamment lors de la socialisation familiale, mais que l’on peut aussi acquérir, par
exemple grâce à l’école. Ce capital culturel joue un rôle essentiel dans la réussite
scolaire, puisque (voir Chapitre 7), comme le montre Pierre Bourdieu, l’école
reconnaît comme compétences scolaires des attitudes et des aptitudes inégalement
transmises selon l’origine sociale (sens de l’abstraction, culture littéraire, intérêt pour
l’actualité, maîtrise d’un langage soutenu, aisance orale…).

- Les deux autres capitaux qui agissent sur la mobilité sociale sont le capital
économique (revenu et patrimoine) et le capital social.

- Un travailleur indépendant doit disposer d’un patrimoine professionnel : des terres


et du matériel pour les agriculteurs, un fonds de commerce, une entreprise, pour les
artisans, commerçants, chefs d’entreprises, un cabinet pour un avocat ou un médecin.
Donc, un individu qui bénéficie de ressources économiques familiales peut plus
facilement acquérir ce patrimoine. Parfois, il peut même en hériter (un jeune diplômé
de la faculté de droit devient plus facilement avocat en reprenant le cabinet de son
père, donc aussi sa clientèle, qu’un autre diplômé dépourvu de telles ressources).

- Un salarié d’une entreprise dispose d’informations sur les emplois qui s’y créent, sur
les éventuels stages, mais aussi sur les compétences qui y sont particulièrement
valorisées. Il peut donc en informer ses enfants, voire essayé de les avantager ou de
leur accorder des passe-droits (« piston »). Le capital social peut donc se définir
comme l’ensemble des réseaux de relations socialement utiles, par exemple pour
trouver la meilleure formation scolaire, un stage, un emploi.

- Les inégalités de revenu entre les familles freinent la mobilité sociale car Les
ressources que les familles consacrent à aider leurs enfants représentent une part
d’autant plus lourde de leur budget que ces jeunes sont étudiants en logement
autonome. Donc, les inégalités de revenu se traduisent par des inégalités dans la
capacité à financer des études, et à permettre au jeune de les réussir (ce qu’il fera
moins facilement s’il ne peut disposer d’un logement proche de son lieu d’études). Or,
plus le niveau de diplôme est élevé, plus l’individu a de chances d’occuper un emploi
qualifié, et on a vu qu’il était aujourd’hui de plus en plus difficile d’y accéder avec un
diplôme du supérieur court.

- La PCS joue, à revenu équivalent, un rôle spécifique dans la somme que la famille
consacre à aider ses enfants jeunes adultes. Par exemple, un cadre aide davantage son
enfant qu’un artisan qui percevrait les mêmes revenus. C’est le signe que les
catégories les plus hauts placées (notamment en termes de diplôme) cherchent à
favoriser la réussite de leurs enfants.

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- Les familles monoparentales aident financièrement moins leurs enfants (30 % de
moins en moyenne pour les mères seules, « toutes choses égales par ailleurs », donc
en les comparant à d’autres personnes ayant pourtant les mêmes revenus, ou
appartenant à la même PCS). On constate aussi que plus le nombre d’enfants est
élevé, moins chaque enfant reçoit d’aide de sa famille.

- Les stratégies des familles permettent aussi de comprendre l’hérédité sociale, mais
également certaines ascensions sociales, en particulier pour les enfants issus de la
classe moyenne. Les stratégies portent sur les choix éducatifs (orientation scolaire,
paiement des cours particuliers…), le choix du lieu d’habitation (pour être proche
des bons établissements) ou sur la mobilisation de son réseau social pour obtenir des
informations utiles ou favoriser le parcours de son enfant (pour obtenir un stage).

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