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Sujets possibles :
Dissertation :
• Quels sont les facteurs explicatifs de la mobilité sociale ? (métropole, candidat libre 2)
EC1 :
• Distinguez la mobilité sociale intergénérationnelle de la mobilité sociale
professionnelle.
• Vous présenterez deux limites des tables de mobilité comme instrument de mesure de
la mobilité sociale.
EC2 :
• Analyse d’une table des destinées. Différence mobilité ascendante et reproduction
sociale (Asie 1, 2021).
• Comparaison mobilité sociale hommes/femmes (Centres étrangers 2 de 2021).
EC3 :
• À l'aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrerez que les
ressources et les configurations familiales jouent un rôle dans la mobilité sociale.
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1. Quelle est l’utilité de mesurer la mobilité sociale des individus ?
La mobilité sociale est un moyen d'évaluation de la société. S'agit-il d'une société de caste qui
ne permet pratiquement pas de mobilité sociale, qui fait que chaque individu est assigné à une
place définie, à sa naissance, par le groupe social de ses parents ? S'agit-il au contraire d'une
société « ouverte », qui fait que le destin d'un individu n'est pas lié à son groupe social
d'appartenance ? L'étude de la mobilité sociale qui peut nous aider à répondre à ces questions.
Enjeux politiques : si la mobilité sociale, par nature, se fait dans des sociétés stratifiées
connaissant des différences de statut social, il n'en demeure pas moins qu'elle est valorisée dans
des sociétés ouvertes aux changements sociaux. Dès lors, la mobilité sociale est très liée à la
question de l'inégalité des chances, de la démocratisation du système scolaire, et des moyens
de favoriser la fluidité sociale.
• La mobilité sociale descendante implique une régression sociale. Ces deux types de
mobilité font parties de la mobilité sociale verticale qui s’accompagne d’une
modification de la position sociale d’un individu dans la hiérarchie sociale.
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• La mobilité sociale horizontale implique une mobilité ne modifiant pas la position
sociale d’un individu dans la hiérarchie sociale.
• La mobilité sociale observée : mobilité sociale déduite à partir des tables de destinée.
• La mobilité nette : mobilité non contrainte qui correspond donc à une mobilité libre
liée à la promotion ou au déclassement des individus. Il faut bien la distinguer de la
fluidité sociale.
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• La fluidité sociale : rapport de chance relatif de rester ou de passer d’une catégorie
sociale à une autre (odd ratio). Par exemple : un fils de cadre a huit fois plus de chances
de devenir cadre qu’un fils d’ouvrier.
• La mobilité géographique (ou spatiale) désigne tout mouvement des individus dans
l’espace, aussi bien au niveau national (changement de villes, de régions, ...) qu’au
niveau international (immigration et émigration).
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1.2. Comment les tables de mobilité sociale sont-elles construites ?
Objectif : savoir expliquer les principes de construction, des tables de mobilité comme
instrument de mesure de la mobilité sociale.
À partir de la lecture des tables de mobilité, être capable de mettre en évidence des situations
de mobilité ascendante, de reproduction sociale et de déclassement.
La mobilité sociale est mesurée grâce aux tables de mobilité construite par l’INSEE. Ces tables
sont bâties sur le rapprochement professionnel d’hommes âgés de 40 à 59 ans, moment où ceux-
ci ont largement entamé leur carrière. Elles ne prennent en compte que les hommes actifs. les
inactifs, les chômeurs ou préretraités sont classés dans la dernière PCS qui était la leur. On parle
de table de mobilité brute lorsque les données sont exprimées avec les effectifs des personnes
interrogées.
Champ : hommes actifs ayant un emploi ou anciens actifs ayant eu un emploi, âgés de 40 à 59 ans en
2003.
Lecture : en 2003, 7 045 000 hommes âgés de 40 à 59 ans ont un emploi ou sont d'anciens actifs
occupés. Parmi eux, 2 364 000 sont ouvriers. Ils n’ont pas tous la même origine sociale : 1 373 000 ont
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un père qui était aussi ouvrier, 169 000 ont un père qui était employé, etc. Ainsi dans chaque case, le
chiffre indique l'effectif : 52 000 ouvriers sont fils de cadre.
Les lignes « ensemble » s’appellent les marges. Elles montrent que les effectifs des GSP
changent au fil des générations. Ainsi il y a 1 317 000 pères agriculteurs contre 285 000 fils en
2003. Certains ont baissé (GSP 1, 2 et 6) et d’autres ont progressé (GSP 3,4,5).
La table se lit de manière horizontale (attention !! ce n’est pas toujours le cas selon la table qui
vous est présentée). On part du statut/position acquis(e) par le fils vers l’origine
socioprofessionnelle du père. Par exemple, pour les fils qui sont agriculteurs :
Dans la marge, est indiquée la part relative des pères selon les différents GSP.
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Part relative des (1 143 000 / 7 045 000) × (870 000/ 7 045 000) × (591 000/7 045 000) ×
pères 100 = 16 % 100 = 12 % 100 = 8 %
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Lecture : 16% des pères des individus interrogés étaient agriculteurs, 12 % ACCE et 8% étaient
CPIS.
2. ACCE 12 29 6 10 7 36 100
3. CPIS 8 14 24 20 11 23 100
4. PI 11 12 9 16 11 41 100
5. Employés 13 10 5 9 14 49 100
6. Ouvriers 18 9 2 6 7 58 100
Ensemble 16 12 8 11 9 43 100
La diagonale montre l’autorecrutement social de chaque GSP : ce sont les pourcentage des
individus qui ont une position semblable à leur père. Ce sont les GSP des agriculteurs
exploitants (88%), des ouvriers (58%) et des ACCE (29%) dans lesquels l’autorecrutement
social est le plus élevé.
Ce sont dans les GSP des employés (14%) et des professions intermédiaires (16%) que le
recrutement des fils est moins lié à la position sociale du père. Le recrutement des fils issus
d’autres GSP ne se fait cependant pas au hasard et correspond à une mobilité sociale courte (ou
de proximité). Ainsi 49% des employés, 41 % des PI et 39% des ACCE ont un père ouvrier.
Ce sont les GSP dont la part d’emploi dans la population active a augmenté dans lesquels le
recrutement social est le plus divers. L’autorecrutement social est plus élevé dans les GSP dont
la part d’emploi dans la population active a baissé. En effet si par exemple une majorité
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d’agriculteurs ont un père agriculteur (88%), la baisse de la part de l’emploi agricole dans la
population active implique que tous les fils d’agriculteurs n’aient pas pu devenir agriculteurs
(mobilité structurelle). Ils ont alors été le plus recrutés dans la GSP des ouvriers (18%) et dans
une moindre mesure par ceux des employés (13%), des PI (11%) et enfin des CPIS (8%). On
peut aussi observer ce phénomène parmi les ouvriers et les ACCE. Ce sont les CPIS dont le
recrutement est le plus divers.
Dans la marge, est indiquée la part relative des pères selon les différentes catégories sociales.
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(285 000 / 7 045 (619 000/ (1 317 000 (1 690 000/ (770 000 / 7 (2 364 000/
Part
000) × 100 7 045 000) × /7 045 000) 7 045 000) 045 000) × 7 045 000) ×
relative
100 × 100 × 100 100 100
des fils
=4% =9% = 19 % = 24 % = 11 % = 43 %
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Pour 2003, cela donne la table suivante.
1. Agriculteurs exploitants 22 1 0 0 1 1 4
2. ACCE 6 21 6 8 7 8 9
3. CPIS 9 22 52 33 22 10 19
4.PI 17 24 26 33 28 23 24
5. Employés 9 9 6 9 17 12 11
6. Ouvriers 37 24 9 17 26 46 34
Les valeurs de la diagonale désignent la proportion de fils qui sont dans la même GSP que leur
père et qui ne connaissent pas de mobilité sociale. Plus les valeurs de cette diagonale sont
élevées, plus l’immobilité dans un GSP est importante et donc plus la mobilité faible.
Questions :
La mobilité ne se fait pas au hasard : c’est une mobilité de proximité c’est à dire que la mobilité
sociale s’effectue dans des GSP proches de leur origine sociale.
• 41% des fils de cadres connaissent une mobilité descendante : 26% des fils de CPIS
deviennent PI, cette proportion dans les autres GSP (sauf CPIS) est inférieure à 9 %.
6% connaissent un changement de statut en devenant ACCE.
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• 67% des fils de PI connaissent une mobilité sociale intergénérationnelle. 33% sont
CPIS et connaissent donc une mobilité ascendante et 15% connaissent une mobilité
descendante dont 9% sont employés et 15% ouvriers. Enfin 8% deviennent ACCE et
connaissent une mobilité de statut.
Question : continuer l’analyse de la table des destinées pour les GSP des employés et des
ouvriers.
2. L’analyse des tables de mobilité
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Ensemble (1 143/704
12 % 8% 11 % 9% 43 %
5) × 100 100 %
16 %
En 2003 il y a 35,5% d’hommes âgés de 40 à 59 ans qui ont une profession appartenant au
même GSP que celui de leur père.
En 2003, il y a 64,5% d’hommes âgés de 40 à 59 ans qui ont une position sociale différente de
celle de leurs pères.
La structure des emplois évolue dans le temps (tertiarisation, salarisation) : la répartition des
emplois des GSP est donc différente entre les pères et les fils (baisse de la part des emplois dans
les GSP des agriculteurs, ACCE et ouvriers et hausse dans les autres). Ainsi une part de la
mobilité sociale intergénérationnelle observée est contrainte du fait de l’évolution de la
structure des emplois dans le temps : cette part s’appelle le taux de mobilité structurel.
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GSP Gains Pertes
1. Agriculteurs exploitants 16 % – 4 % = 12 %
2. ACCE 12 % – 9 % = 3%
3. CPIS 19 % – 8 % = 11%
4. PI 24 % – 11 % = 13%
5. Employés 11% - 9% = 2 %
Attention : les totaux sont en principe égaux, la différence observée vient des erreurs liées à
l’arrondissement des chiffres.
La mobilité nette est la mobilité non contrainte qui correspond donc à une mobilité libre
liée à la promotion ou au déclassement des individus. Elle se calcule en faisant la différence
entre le taux de mobilité totale et le taux de mobilité structurelle :
Le taux de mobilité nette est donc égal à 41%. Ce taux correspond donc à une mobilité libre,
non conditionnée par l’évolution de la structure de l’emploi dans le temps.
Questions :
1. Comment calcule-ton la mobilité observée ?
2. À quoi correspond la mobilité structurelle ?
3. À quoi correspond la mobilité nette ?
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2.3. L’évolution de la mobilité sociale observée
Document 1 :
Questions :
1. Comparer l’évolution de la mobilité sociale observée des hommes par rapport à leur
père entre 1977 et en 2015.
2. La mobilité verticale s’est-elle accrue entre 1977 et 2015 ?
3. Comment la mobilité verticale a-t-elle évoluée sur cette même période ?
4. Comment la mobilité verticale ascendante a-t-elle évolué par rapport à la mobilité
verticale descendante entre 1977 et 2015 ?
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5. Comment la mobilité structurelle a-t-elle évolué entre 1977 et 2015 ?
6. Que pouvez-vous déduire de votre réponse à la question 2 au sujet de la mobilité
nette ?
Résumé :
Entre 1977 et 2015 le taux d’immobilité sociale est restée globalement stable à un niveau. Il
diminue de 36% à 32% entre 1977 et 1993 puis s’accroit jusqu’en 2015 pour atteindre 35%.
Le taux de mobilité de statut a globalement diminué de 30% environ à 20 % entre 1977 et 2015
ce qui explique que le taux de mobilité verticale se soit accrue sur cette période en passant
d’environ 31% à environ 43% soit une différence de 12 points de pourcentage. Sa progression
est cependant faible entre 2003 et 2015 avec des valeurs respectives de 41% et 42%.
Sur toute la période, le taux de mobilité ascendante est supérieure à celui de mobilité
descendante. Par exemple en 1993, le taux de mobilité ascendante (30%) est trois fois plus
important que le taux de mobilité descendante (10%). Ainsi la promotion sociale des fils par
rapport à leur père est majoritaire. Le taux de mobilité structurelle a globalement diminué entre
1977 et 2015 passant respectivement de 40% à 25 %. Cette baisse de 25 points de pourcentage
montre que la mobilité nette, non liée à l’évolution de la structure professionnelle, a progressé
et est d’environ 40% en 2015.
Objectif : Savoir expliquer que la mobilité peut aussi se mesurer de manière relative
indépendamment des différences de structure entre origine et position sociales (fluidité sociale)
et qu’une société plus mobile n’est pas nécessairement une société plus fluide.
La distinction entre mobilité structurelle et mobilité nette fait l’objet de critiques. La mobilité
nette ne mesure pas la part du statut des individus qui dépend de leurs efforts, mais elle mesure
la partie de la mobilité que le sociologue ne peut expliquer par les mutations de la structure des
emplois. Or une mobilité nette plus importante correspond-elle à plus d’égalité des chances ?
Autrement dit cela signifie-t-il que la mobilité des individus est moins dépendante de leur
origine sociale ? Pour répondre à cette question les sociologues ont recours à une nouvelle
mesure : la fluidité sociale (ou mobilité relative).
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Document 2 : Comment calculer la fluidité sociale ?
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4. Les limites des tables de mobilité
Objectif : Savoir expliquer les intérêts et les limites de l’analyse des tables de mobilité sociale.
Questions :
1. Déterminer les différentes limites des tables de mobilité présentées dans le document.
2. En fin de document sont présentées les limites principales des tables de mobilité. Les
lires et les apprendre.
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Résumé : il existe six grandes limites concernant l’analyse des tables de mobilité sociales :
Premièrement la mobilité sociale des femmes n’était pas mesurée avant très récemment
(2015). Pour quelles raisons ? Les femmes ne sont rentrées sur le marché du travail
massivement qu’à partir des années 1960 et se sont concentrées dans la catégorie « employés »
du fait de leur faible niveau de diplôme à l’époque. Cela n’est donc pas représentatif d’une
certaine mobilité sociale vis-à-vis de leurs pères.
Deuxièmement seuls les individus de 35 à 59 ans sont interrogés dans les études de 2015 et
seuls les hommes de 40 à 59 ans l’étaient dans les précédentes ce qui exclut les moins de 35 ou
40 ans selon les études. Ainsi un nombre significatif d’actifs sont laissés de côtés.
Troisièmement les tables de mobilités agrégés (GSP) tendent à surestimer l’immobilité du
fait de leur échelle de construction. Plus les catégories de références sont fines et plus la
mobilité s’accroit. Par exemple un fils d’ouvrier non qualifié peut être ouvrier qualifié. Cette
mobilité sociale ascendante intergénérationnelle n’apparaît pas avec l’utilisation des GSP qui
ne permettent donc pas de faire apparaitre des mobilités de proximité qui sont les plus
nombreuses.
Quatrièmement la mobilité que l’on calcule est une mobilité observée. Un cas de mobilité
ascendante mesurée ne l’est peut-être pas : un fils d’ouvrier devenant employé connaît-il
vraiment une mobilité ascendante ? De plus, un cas d’immobilité ne l’est peut-être pas : le
père est simple cheminot, le fils est conducteur de TGV, mais les deux sont ouvriers.
Cinquièmement les trajectoires socioprofessionnelles masquent les processus de
classement et de déclassement sociaux. Des professions ont perdu ou ont gagné en prestige
social, ce qui remet en cause la mesure de la mobilité sociale en termes de CSP : un professeur
des écoles dont le père était instituteur a-t-il réellement connu une mobilité sociale ascendante ?
Que dire du passage « d’agriculteur » à « chauffeur routier » ?
Sixièmement pour un individu particulier la mobilité est subjective, la mobilité brute
comme la mobilité structurelle n’ont pas de sens réel. La mobilité nette est calculée comme
un solde, une sorte de résidu. Les efforts de chacun, le fruit de son travail, ou de son énergie
seraient … résiduels. Or, pour un individu ce qui compte lui c’est seulement la mobilité ou
l'immobilité. L’accent est mis de façon excessive sur une mobilité calculée (observée =
apparente), pas assez sur la capacité qu’à l’individu de changer de statut.
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5. Spécificités de la mobilité sociale des hommes et des femmes
Objectif : savoir retrouver à partir de tables de mobilités les spécificités de la mobilité sociale
des hommes et des femmes.
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Document (vu en cours) :
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Résumé de l’analyse des spécificités de la mobilité sociale des hommes et des femmes :
• Les trajectoires ascendantes des hommes comparées à leur père sont plus
fréquentes que les trajectoires descendantes. En 2015, 65 % des hommes âgés de 35
à 59 ans relèvent d’une catégorie socioprofessionnelle différente de celle de leur père,
une proportion quasi stable depuis quarante ans. 28 % des hommes occupent une
position sociale plus élevée que celle de leur père et 15 % une position inférieure. Il y a
donc deux fois plus de trajectoires ascendantes que descendantes. Les trajectoires
ascendantes comme descendantes sont plus fréquentes qu’en 1977 (respectivement 24
% et 7 %).
• Les trajectoires des femmes comparées à leur mère sont globalement plus
favorables que celles des hommes comparés à leur père. En 2015, 71 % des femmes
âgées de 35 à 59 ans relèvent d’une catégorie socioprofessionnelle différente de celle
de leur mère, soit 12 points de plus qu’en 1977. 40 % des femmes occupent une position
sociale plus élevée que celle de leur mère et 12 % une position plus basse. Il y a donc 4
fois plus de fois de mobilité ascendante que descendante.
La mobilité intergénérationnelle est plus favorable pour les femmes que pour les
hommes. Cela s'explique en grande partie par le niveau socioprofessionnel des mères
nettement inférieur à celui des pères. Les mouvements ascendants sont en effet d’autant
plus fréquents que le parent occupe une position basse dans l’échelle sociale.
• Si les femmes occupent fréquemment une position sociale plus élevée que leur
mère, cela n’est pas le cas par rapport à leur père. 25 % des femmes ont connu une
trajectoire descendante par rapport à leur père et 22 % un parcours ascendant.
• Les mobilités sont pour les hommes et les femmes des mobilité courtes. Elles
s’effectuent généralement entre des GSP proches.
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6. Le niveau de formation, les ressources et les configurations familiales
contribuent à expliquer la mobilité sociale
Globalement, un niveau de diplôme élevé donne (plus souvent) accès à l’emploi supérieur.
L’élévation du niveau de diplôme de la population est donc favorable à la promotion
sociale. Mais, un même diplôme n’a pas le même rendement sur le marché du travail en
fonction du sexe et de l’origine sociale.
Pour l’expliquer on peut utiliser la notion de capital social (P.Bourdieu) dont hérite les individus
de leur milieu social. Il existe trois formes de capital :
Le capital social n’est pas indépendant des deux autres capitaux, il en est plutôt la conséquence
: un individu n’a du capital social que parce que les membres de son réseau sont dotés en capital
économique et en capital culturel. Ce sont en général ceux qui sont les mieux dotés en capital
économique et culturel qui bénéficient du capital social. Un exemple typique est le carnet
d’adresse obtenu par sa scolarité dans une Grande École. Les individus et les groupes ont des
stratégies d’accumulation du capital social. Dans les échanges sociaux, ils créent des
obligations mutuelles (cycles de don/contre-don selon le principe du « renvoi d’ascenseur ») et
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des signes de reconnaissance (les pratiques socialement sélectives rassemblent apparemment
de manière fortuite des personnes qui sont homogènes socialement).
L’élévation rapide du niveau de diplôme peut avoir un effet négatif sur le rendement des
diplômes en termes d’accès à telle ou telle profession. Le paradoxe d’Anderson montre qu’il
n’y a pas de lien mécanique entre l’écart de diplôme avec les parents et l’écart de statut social.
Le paradoxe réside donc dans le fait qu’un niveau de diplôme supérieur à celui des parents ne
garantit pas un statut social supérieur et peut même amener à un statut social inférieur.
Pourquoi ? Car la structure des qualifications et la structure des emplois n’évoluent pas au
même rythme. Ainsi le nombre de diplômés du supérieur augmente plus vite que le nombre de
postes de cadres. Les travaux de Raymond Boudon permettent d’expliquer le paradoxe
d’Anderson. Au niveau individuel chaque famille croit en l’utilité de l’école pour la promotion
sociale. Mais au niveau collectif si toutes les familles décident de prolonger les études alors le
nombre de diplômés du supérieur augmente plus vite que le nombre de postes de cadres. Dans
ce cas, tous les diplômés ne peuvent pas trouver un poste correspondant aux attentes liées à
leurs qualifications. Ce phénomène est appelé l’inflation des diplômes : lorsque le niveau de
qualification augmente plus vite que les besoins de la population active, un même diplôme
permet d’accéder à un niveau inférieur par rapport à la génération précédente. Ainsi cours du
temps, une baisse du rendement des diplômes en termes d’accès aux emplois supérieurs. Il y a
une forme de déclassement des diplômés.
Les familles sont inégalement dotées en capital économique, en capital culturel et en capital
social. Une partie de la mobilité sociale s’explique donc par l’interaction entre l’école, la famille
et le marché du travail. La cause principale de la reproduction sociale est que les diplômes
obtenus dépendent de l’origine sociale.
Il serait relativement aisé d’expliquer les différences de diplômes par les inégalités de revenu
entre les familles en invoquant le coût (direct et d’opportunité) des poursuites d’étude. Mais on
constate statistiquement que le revenu du ménage exerce une influence bien moindre sur les
parcours scolaires des enfants que les diplômes de parents. Et une fois sur le marché du travail,
à diplôme équivalent le rendement du diplôme est plus fort pour ceux qui sont d’origine
supérieure. Ce phénomène a un impact moins fort sur la reproduction sociale que le précèdent.
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Enfin, on peut souligner que le choix du conjoint participe à la reproduction sociale pour les
hommes comme pour les femmes. La comparaison des positions sociales des conjoints com-
me celle de leur origine sociale et de leurs diplômes laisse apparaître une forte tendance à
l’homogamie (proximité entre la position sociale des conjoints ou entre leur origine sociale ou
entre leur diplôme). L'homogamie tend à concentrer les ressources économiques, culturelles et
sociales dans certaines familles, qui pourront ensuite plus facilement les transmettre à leurs
enfants. Les inégalités entre familles peuvent à leur tour avoir de grandes conséquences sur
celles qui s’observeront au sein de la génération suivante.
Mais ces ressources transmises par les familles d’origine dépendent aussi des configurations
familiales et ne constituent pas un lien mécanique entre la profession des parents et celle des
enfants. La diversité des configurations familiale rend nécessaire de prendre en compte
finement le nombre d’enfants, le rang dans la fratrie, l’histoire conjugale des parents et leur
investissement effectif dans la réussite scolaire de l’enfant et ses modalités concrètes (en lien
avec le chapitre sur l’école).
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