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Chapitre 1 

: La méthode des coûts cachés


Introduction
La méthode des coûts cachés ou « coûts de la performance cachés » a été développée par
Henri Savall, directeur de l'institut de socio-économique des entreprises et des organisations
(ISEOR). Ces travaux ont fait l'objet de nombreuses publications dont l'ouvrage, en
collaboration avec Véronique Zardet, Maîtriser les coûts et les performances cachés1.

I. Principes et concepts fondamentaux

La méthode des coûts cachés repose sur le constat qu'une organisation génère des
dysfonctionnements, anomalies ou perturbations lors de son fonctionnement correct, qui
engendrent une perte réelle trop souvent non évaluée. Pour Henri Savall, ces
dysfonctionnements qui impactent la performance globale de l'organisation sont liés à des
problèmes humains et organisationnels, qu'il convient de valoriser au travers des coûts cachés.
Les coûts cachés peuvent être définis comme des coûts réels ou à des manques à gagner
(coût d'opportunité) qui n'apparaissent pas ou sont mal repérés dans la comptabilité,
que celle-ci soit générale, de gestion ou budgétaire. Les coûts cachés s'opposent aux coûts
visibles, ces derniers pouvant être caractérisés par un nom précis et normalisé (par exemple,
nom et numéro de compte selon PCG), une mesure selon une règle d'évaluation (par exemple,
le coût d'acquisition ...) et un contrôle au travers de calculs d'écarts (par exemple, écarts sur
coûts ...). Deux catégories de coûts cachés peuvent être distinguées : d'une part, les coûts
incorporés dans les coûts visibles, et d'autre part, les coûts non incorporés dans les coûts
visibles.

 Les coûts incorporés dans les coûts visibles : ils correspondent à des coûts réels
dilués au sein du système de l'information comptable (le bilan, le compte de résultat)
mais non identifiés en tant que coûts cachés.

Exemple : le compte « achats de marchandise » inclut le montant des marchandises achetées


pour pallier les pertes et les vols.

 Les coûts non incorporés dans les coûts visibles : il s'agit de coûts d'opportunité
(manque à gagner) issus d'une absence de production.

1
H. Savall et V. Zardet, Maîtriser les coûts et les performances cachés, Economica, 2e édition, 201 O.
Exemple : la panne d'une machine résultant du manque de formation du salarié occasionne
l'arrêt de la production. Cette non-production aurait pu être vendue, il y a un manque à
gagner.

II. La méthode des coûts cachés

Les coûts cachés sont la traduction monétaire des actions de régulation des
dysfonctionnements observés.

1. Les causes des coûts cachés : les dysfonctionnements

L'origine des coûts cachés réside dans l'apparition de dysfonctionnements qui empêchent
l'organisation d'atteindre les objectifs de performance qu'elle s'était fixées préalablement. Ces
dysfonctionnements entraînent un gaspillage de ressources humaines et matérielles. À cet
effet, un ensemble d'indicateurs permet de classer et d'évaluer les différentes sources de
dysfonctionnements.

Cinq indicateurs peuvent être proposés :

 l'absentéisme ;
 les accidents de travail ;
 le mouvement de personnel ou « turnover » ;
 la non-qualité des produits ;
 l'insuffisance de productivité directe.

2. L'évaluation des actions de régulations : les coûts cachés

La réduction des dysfonctionnements nécessite la mise en place d'actions de régulation. Les


composantes des coûts cachés

 Les surconsommations : évaluation de la consommation de biens et de services


nécessaires à la régulation d'un problème (par exemple, la régulation des
dysfonctionnements liés aux vols, aux pertes, aux gaspillages).

 Les sursalaires : évaluation du temps passé par une personne dont l'indice de
rémunération est supérieur à la personne qui devrait normalement occuper le poste
(par exemple, le directeur comptable qui remplace la secrétaire absente pour prendre
les appels téléphoniques).

 Les surtemps : évaluation du temps supplémentaire consacré à réguler un problème


(par exemple, un mouvement important du personnel nécessite de réaliser de
nombreux entretiens de sélections d'embauche).

 Les non-productions : évaluation du manque à gagner lié à une non-production qui


aurait dû, dans des conditions normales, générer un chiffre d'affaires (par exemple,
l'arrêt d'une machine pour cause de panne induit une non production).

 Les non-créations de potentiel : évaluation du temps qui ne peut pas être consacré à la
réalisation d'une action stratégique pour l'entreprise à cause de la mise en œuvre de la
régulation des dysfonctionnements (par exemple, le temps perdu pour réguler un
problème au lieu de consacrer ce temps pour la réflexion de nouveaux domaines
d'activité stratégique).

Les surconsommations, les sursalaires et les surtemps sont des coûts réels intégrés dans le
système comptable de l'entité de manière diffuse, alors que les non-productions et les non-
créations de potentiel constituent un manque à gagner, un coût d'opportunité.

L'évaluation des coûts cachés

L'évaluation est la suivante pour chacune des actions de régulation.

 Les surconsommations : les surconsommations sont évaluées aux coûts réels des
matières, biens et services consommés.
 Les sursalaires : le sursalaire est estimé à partir de la différence de salaire perçu entre
le titulaire du poste et son remplaçant.
 Les surtemps : le surtemps est évalué selon la contribution horaire à la marge sur coût
variable (CHMCV). Cette contribution permet d'évaluer la perte de valeur liée à une
heure perdue de travail consacrée à réguler un problème. Le choix de cet indicateur est
plus juste que taux horaire salarial. Économiquement, une heure de travail crée plus de
valeur que son taux horaire.
 Les non-productions : les non-productions sont aussi évaluées selon la contribution
horaire à la marge sur coût variable (CHMCV).

 Les non-créations de potentiel : de même, les non-créations de potentiel peuvent être


valorisées à la contribution horaire à la marge sur coût variable (CHMCV) ou, dans le
cas de projets d'investissement stratégique, reportées à la valeur actuelle nette.

III. APPORTS ET LIMITES

Apports

 La détermination des coûts cachés permet le chiffrage des dysfonctionnements et de


faire apparaître les plus coûteux. Les coûts cachés constituent une aide à la décision
quant aux choix des régulations.
 La valorisation des coûts cachés permet de prendre en compte le potentiel de
performance non exploité.
 La détermination des coûts cachés permet le chiffrage des actions de régulation.
 La méthode constitue une aide à la décision et un outil de motivation des ressources
humaines.

Limites

 La contribution horaire à la marge sur coût variable est une moyenne.


 Chaque salarié, quel que soit son poste ou sa position hiérarchique, contribue à créer le
même potentiel de valeur.

Points clefs

 Les coûts cachés sont des coûts réels ou des manques à gagner qui n'apparaissent pas
en tant que tels dans le système d'information comptable de l'entreprise.
 Les coûts cachés sont la traduction monétaire des actions de régulations.
 Les coûts cachés sont des coûts de non-qualité.

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