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Kolb Robert. L'interprétation de l'article 121, paragraphe 3, de la convention de Montego Bay sur le droit de la mer : les
«rochers qui ne se prêtent pas à l'habitation humaine ou à une vie économique propre... ». In: Annuaire français de droit
international, volume 40, 1994. pp. 876-909;
doi : https://doi.org/10.3406/afdi.1994.3227
https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1994_num_40_1_3227
Robert KOLB
SOMMAIRE
I. - Introduction
V. - Conclusion
(*) Robert Kolb, Diplômé en droit de l'Université de Berne, Diplômé en droit international
de l'Institut Universitaire de Hautes Etudes Internationales (Genève), LLM (Law of the Sea),
University College, Londres, Doctorant à l'IUHEI (thèse en préparation sur La bonne foi en droit
international public).
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 877
I. - Introduction
CD Dans la version anglaise : «Rocks which cannot sustain human habitation or economic
life of their own shall have no exclusive economic zone or continental shelf».
(2) Dig. 50, 17, 56. Voir aussi : Mabcellus, Dig. 34, 5, 24, et Paulus, Dig. 50, 17, 12.
(3) Ne soit à ce propos citée que la formule parlante de R.-J. Dupuy, dans R.-J. Dupuy/D.
Vignes, Traité du nouveau droit de la mer, Paris / Bruxelles, 1985, p. 219 : « vent de la terre vers
le large (...) porteur de souverainetés ». A un niveau plus général, cf. W. Friedmann, « Selden
Redivivus - Towards a Partition of the Seas», A.J.I.L, vol. 65, 1971, p. 763.
(4) Cf. J.M. Van Dyke/R.A. Brooks, « Uninhabited Islands : Their Impact on the Ownership
of Ocean Resources, Ocean Development and International Law (ci-après : O.D.I. L.), vol. 12, 1983,
p. 265 s.
(5) Voir Neptune, n° 5, 1975, p. 5 s., cité par J. Symonides, «The Legal Status of Islands in
the New Law of the Sea », Revue de droit international de sciences diplomatiques et politiques,
vol. 65, 1987, p. 162 (chiffres que de milles carrés j'ai converti en kilomètres carrés).
(6) Symonides (ibid.), p. 161.
(7) Sur ce régime, voir R. Lattion, L'archipel en droit international, Lausanne, 1984 ; P.E.J.
Rodgers, Midocean Archipelagos and International Law, New York, 1981, et sur l'évolution
historique en particulier : D.P. O'Connell, « Mid-Ocean Archipelogos in International Law »,
B.Y.B.I.L., vol. 45, 1971, p. 1 ss, et CF. Amerasinghe, «The Problem of Archipelogos in the
International Law of the Sea», International and Comparative Law Quarterly, (ci-après : I.C.L.Q.),
vol. 23, 1974, p. 539 ss.
(8) Sur Rockall : E.D. Brown, «Rockall and the Limits of National Jurisdiction of the United
Kingdom », Marine Policy, 1978, p. 202 ss ; C. Symmons, « The Rockall Dispute Deepens : An
Analysis of Recent Danish and Icelandic Actions», I.C.L.Q., vol. 35, 1986, p. 344 ss. Voir aussi :
R.G.D.I.P., vol. 81, 1977, p. 1173 et R.G.D.I.P., vol. 89, 1985, p. 762 s.
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comme pour la ZEE en général (15), ce soient une fois de plus les Etats
développés, ex-colonisateurs et puissances maritimes, qui s'assureront la part
du lion : d'un côté parce qu'ils disposent encore de nombreuses possessions
territoriales à travers le monde, notamment d'îlots océaniques, de l'autre
côté parce qu'ils possèdent les moyens techniques et financiers pour créer
sur l'îlot, selon l'interprétation choisie, les conditions requises pour qu'il soit
traité en île au sens des paragraphes 1 et 2 de l'article 121 et non en rocher
au sens du paragraphe 3(16).
(15) Par exemple R. Churchill/V. Lowe, The Law of the Sea, Manchester, 1991, p. 147 ss.,
particulièrement p. 149 in fine.
(16) Par exemple en y implantant des usines de dessalinisation d'eau pour rendre l'espace
habitable.
(17) II s'agit notamment de Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10) et de Van Dyke/Brooks
(op. cit., note 4).
(18) Brown (op. cit., note 8), p. 205.
(19) D.P. O'Connell, The International Law of the Sea, vol. II, Oxford, 1982, p. 731 s.
(20) H. Dipla, Le régime juridique des îles dans le droit international de la mer, Paris, 1984,
p. 41 : « les critères qui sont à la base de cette distinction sont arbitraires et vagues ».
(21) Churchill/Lowe (op. cit., note 15), p. 41, 127 et 135 s.
(22) Ibid.
(23) L.L. Herman, «The Modem Concept of Off-Lying Archipelago in International Law»,
Canadian Yearbook of International Law, (ci-après C.Y.I. L.), vol. 23, 1985, p. 194.
(24) J.R. Stevenson/B.H. Oxman, «The Third United Nations Conference on the Law of the
Sea: The 1975 Geneva Session», A.J.I.L., vol. 69, 1975, p. 786.
(25) D.P. O'Connell, op. cit., note 19, p. 732 : «is the test conjunctive or disjunctive? [human
habitation / economic life of its own]. Does sustain refer to natural sustainance (such as availability
of water) or survivability ? »
(26) J. Symonides, op. cit., note 6, p. 165 s. : « [Does it also cover] reefs, sandbanks or other
small land formations which are not rocks in a strict sense? (...) Does the exploitation of biological
resources in the surrounding waters amount to economic life, or does it not? Would it be possible
for the State to which the rock belongs to establish a contiguous zone ? ».
(27) R. Churchill, V. Lowe, op. cit., note 21, p. 42: «Cela veut-il dire qu'un rocher
inhabitable, mais ayant une vie économique du fait, par exemple, qu'on a découvert dans son
sous-sol des dépôts de minéraux, a droit à une zone économique et un plateau continental ? D'autre
part, est-ce que tout rocher habitable, mais pas nécessairement habité, et sans vie économique
propre, a droit à des espaces maritimes?».
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La question de savoir si des rochers ont une mer territoriale est ancienne.
Celle de savoir s'ils peuvent générer d'autres zones juridictionnelles, telles
qu'un plateau continental ou une ZEE, n'a surgi qu'à partir de l'émergence
de ces zones en droit international après la Deuxième Guerre mondiale (30).
D'une façon générale, et abstraction faite des Conférences de codification des
années 1930 et 1958, pratique et doctrine étaient divisées sur le point de
savoir si des îlots ou rochers devaient être traités en îles pour l'allocation
d'espaces maritimes ou si une distinction devait être établie. En cas de
réponse affirmative à cette dernière question, il fallait définir la differentia
specifica entre les deux catégories, tâche qui s'est toujours avérée
extrêmement ardue.
1. Il y a des cas où îlots et rochers se sont vus accorder les mêmes
espaces maritimes que des îles plus grandes.
a) Dans une série de cas soumis à des tribunaux nationaux, on s'est
demandé si la souveraineté étatique, donc la juridiction de l'Etat côtier,
s'étend à des zones autour d'îlots proches des côtes; plus précisément, il
s'agissait de savoir si l'Etat côtier pourrait revendiquer, autour de ces îlots,
une mer territoriale de trois milles. Cette revendication a été admise de
façon répétée notamment pour des raisons de sécurité.
Dans l'affaire de l'Anna (31) (1805), par exemple, devait être tranchée
la question de savoir si la capture d'un navire américain par un corsaire
britannique à moins de trois milles d'îlots de boue près de l'embouchure du
Mississippi, mais à près de cinq milles de la côte continentale, devait être
(28) Bureau des affaires maritimes et du droit de la mer, Régime des îles, Travaux
préparatoires concernant la Partie VIII (article 121) de la Convention des Nations Unies sur le droit
de la mer, Publication des Nations Unies, 1987, numéro de vente. F. 87 V. 11, p. 90.
(29) Politeia, livre I, chapitre. II, 1252 a, 25.
(30) La doctrine du plateau continental s'est établie à partir de la Déclaration Truman sur
le plateau continental du 28 septembre 1945 (voir par exemple M. Evans, Relevant Circumstances
and Maritime Delimitation, Oxford, 1989, p. 7, et affaire du Plateau continental de la mer du
Nord, C.I.J., Rec, 1969, p. 32 s.). Les premières revendications d'une zone exclusive de 200 milles,
que ce soit pour des pêcheries ou à titre d'entière souveraineté, sont celles des pays
latino-américains à partir de 1947 (voir par exemple F. Orrego Vicuna, La zone économique exclusive :
régime et nature juridique dans le droit international, R.C.A.D.I., vol. 200, 1986-V, p. 19 ss.). La
ZEE n'a été suffisamment reconnue et ne s'est généralisée que parallèlement à la troisième
Conférence sur le droit de la mer de 1974 à 1982 (voir par exemple Churchill/Lowe {op. cit., note
15), p. 144 ss. et affaire du Plateau continental Libye/Malte, C.I.J. Rec, 1985, p. 33).
(31) English Reports, vol. 165, p. 809 ss.
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(44) Voir infra, TV. 2 et 3. f. pour l'article 121, paragraphe 3. D.W. Bowett, The Legal Regime
of Islands in International Law, New York, 1978, p. 34, suggère d'interpréter les termes «of their
own » / « propre » de l'article 121, paragraphe 3, en faisant appel à la notion d'« artificial economic
life », l'injection de laquelle ne ferait pas d'un rocher une île à part entière.
(45) Cela est surtout vrai si l'on songe au « defence purpose », qui ne nécessite pas une
habitation effective. La sécurité militaire semble exclue par l'article 121, paragraphe 3, car elle
n'est guère rattachable à l'économie à défaut d'en donner une interprétation si large qui la viderait
de toute spécificité.
(46) Ann. IDI, vol. 33, 1927 - I, p. 79. Il a été soutenu par Diena. Sir Thomas Barclay et
W. Schucking se sont exprimés dans le sens inverse. Plus tôt déjà, F. De Martens (Ann. IDI, vol.
XIII, 1894, p. 298) disait « ...que les rochers, les îlots qui émergent toujours de la mer seront
assimilés au territoire » et généreront donc des eaux territoriales.
(46a) P. Fauchille, Traité de droit international public, 8e éd., Paris, 1925, p. 202 in fine.
(italiques de l'auteur).
(47) Voir G. Gidel, Le droit international public de la mer, t. III, Paris, 1934, p. 136 ss.
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(48) A.S. Bustamante y Sirven, La mer territoriale, Paris, 1930, p. 189 ss. J.G. Guerrero,
La codification du droit international, Paris, 1930, p. 80 ss. A. Raestad, « Le problème des eaux
territoriales à la Conférence pour la codification du droit international », Revue de droit
international, vol. 7, 1931-1, p. 140 s. ; J.S. Reeves, «The Codification of the Law of Territorial Waters»,
A.J.I.L., vol. 24, 1930, p. 486 ss.
(49) La Conférence tint ses séances sous les auspices de la Société des Nations à La Haye
du 13 mars au 12 avril 1930. Le régime des eaux territoriales, un des trois sujets retenus, fut
confié au Deuxième Comité, qui ne put arriver à un accord sur l'étendue de ces eaux malgré les
efforts de son Rapporteur J.P.A. François (qui devait se trouver face au même problème en 1958).
Un rapport fut adopté (voir B.Y.B.I.L., vol. 11, 1930, p. 177 ss.).
(50) Bases de Discussion, Conférence pour la codification du droit international de la Société
des Nations, vol. II, (Eaux territoriales), Doc. C. 74 M. 39. 1929 V, Genève, 1929.
(51) Op. cit., p. 52 : «Par île, il faut entendre une fraction de territoire entourée d'eau et
qui, dans les circonstances normales, se trouve d'une façon permanente au-dessus de la marée
haute. Il faut, en outre, que ce territoire puisse être occupé et utilisé.Rien ne permet de prétendre
établir une zone d'eaux territoriales autour d'un rocher ou d'un banc... ». Texte original anglais :
« An island is a piece of territory surrounded by water, permanently above high water in normal
circumstances and capable of occupation and use. There is no ground for claiming a belt of
territorial waters around a rock or bank...».
(52) Op. cit., p. 52 : «Seront seules considérées comme des îles, les parties de territoire qui
émergent d'une manière permanente à marée haute et qui peuvent être effectivement occupées
et utilisées. On ne considérera pas comme des îles les simples rochers ou bancs qui ne répondent
pas aux conditions indiquées ci-dessus ». Texte original anglais : « Only those pieces of territory
are to be considered islands which are permanently above high water and capable of effective use
and occupation. Mere rocks and banks not complying with the requisites laid down should not
be considered islands ».
(53) Op. cit., p. 53 (suivant le Royaume-Uni).
(54) Op. cit., p. 53 (suivant le Royaume-Uni).
(55) Op. cit., p. 53 : «On ne doit pas considérer comme une île une fraction de territoire
qu'il serait impossible d'occuper et d'utiliser effectivement. Le Gouvernement de Sa Majesté estime
qu'on n'est pas fondé à prétendre qu'il existe une zone d'eaux territoriales autour de rochers et
de bancs.... ». Texte original anglais : An island does not include «a piece of territory not capable
of effective occupation and use. His Majesty's Government considers that there is no ground for
claiming that a belt of territorial waters exists round rocks and banks... »
(55a) Ce qu'approuve G. Gidel (op. cit., note 47), p. 675.
(56) Voir l'affaire de Palmas, R.S.A., vol. II, p. 839 s.
n° 53,(57) p.46.Affaire de Clipperton, R.S.A., vol. II, p. 1110; Groenland Oriental, C.P.J.I., sér. A/B,
(58) Voir déjà le célèbre dictum de Max Huber dans l'affaire de Palmas (op. cit., note 56),
p. 839 : « Territorial sovereignty cannot limit itself to its negative side, i.e. to excluding the
activities of other states ; for it serves to divide between nations the space upon which human
activities are employed, in order to assure them at all points the minimum of protection of which
international law is the guardian » (italiques de nous).
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Quant à l'utilisation, elle est de peu de valeur pratique, parce que tout
rocher peut servir, si cela est souhaité, à des fins stratégiques, scientifiques,
etc. Qu'une conjonction (« et/and ») ait été utilisée à la place d'une disjonction
(«ou/or») entre les éléments d'utilisation et d'occupation apparaît dès lors
insignifiant : car quand ne reste qu'un seul critère opérationnel, l'utilisation,
toute définition de rapport devient impossible. Peut-être faudrait-il présumer
que les Etats du Commonweath, auteurs de la proposition, n'ont pas voulu
se départir de la définition précitée de YImperial Conference de 1923, ce qui
permettrait par exemple d'éliminer les objectifs scientifiques, puisqu'elle
parle de «definite commercial or defence purpose».
Face à ces Etats, il y en avait d'autres qui favorisaient un régime unique
pour toute élévation naturelle (59) ou qui rejetaient même explicitement toute
restriction basée sur l'habitabilité ou l'utilisation (60).
Au vu de ce désaccord, le Sous-Comité II du Deuxième Comité décida
de ne pas retenir les critères d'occupation ou d'utilisation. Ainsi toute île
devait avoir une mer territoriale (61). Cela étant, on a affirmé que le projet
exprimait l'état du droit coutumier en la matière (62).
(59) Finlande, Allemagne (« il convient donc de considérer comme île naturelle toute eminence
de la terre dans l'eau »), Estonie, Japon, Pays-Bas. (Bases de Discussion (op. cit., note 50), p. 52
s.).
(60) Bases de Discussion (op. cit., note 50), p. 52, en se référant à l'affaire de l'Anna, citée
sous II. A.l.a.
(61) Actes de la Conférence pour la codification du droit international, vol. I, Genève 1930,
p. 133. (Doc. C. 230. M. 117 1930 V, p. 13), Rapport de la Deuxième Commission. Voir aussi Bases
de Discussion, n° 12 (op. cit., note 50), p. 50 s.
(62) D.H.N. Johnson, «Artificial Islands», International Law Quarterly, vol. 4, 1951, p. 212
s. Van Dyke/Brooks (N 4), p. 271. Ceci peut paraître surprenant si l'on tient compte de la position
des pays du Commonwealth, grandes puissances maritimes.
(63) G. Gidel (op. cit., note 47), p. 684.
(63a) G. Gidel (op. cit., note 47), p. 674.
(64) Johnson (op. cit., note 62), p. 205.
(65) Sur ce type d'argument, voir V.D. Degan, L'interprétation des accords en droit
international, La Haye, 1963, p. 111 ss. ; C. Rousseau, Droit international public, t. I, Paris, 1970, p.
279 ; G. Dahm, Volkerrecht, t. III, Stuttgart, 1961, p. 50 ; et Panama Riot Claims (J.B. Moore,
History and Digest of the International Arbitrations to Which the United States Has Been a Party,
vol. II, Washington, 1898, p. 1376) ; C.P.J.I., sér. B, n° 1, p. 22.
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(66) (Italiques de l'auteur). Johnson s'appuie aussi sur le fait que l'invisibilité pour le marin
avait été utilisée par G. Gidel lors de la Conférence, pour exclure d'une mer territoriale les fonds
découvrants.
(67) En anglais : « Capable of effective occupation and control ».
(68) Yb. 1LC 1954, I, p. 92.
(69) Ibid., p. 93.
(70) Ibid., p. 94.
(71) Ibid., p. 94.
(72) Contra: L.F.E. Goldie, «The ICJ's 'Natural Prolongation' and the Continental Shelf
Problem of Islands », N.Y.I.L., vol. 4, 1973, p. 247.
(73) Voir l'article célèbre de R.-J. Dupuy intitulé : « Coutume sage et coutume sauvage »,
Mélanges Rousseau, Paris, 1974, p. 75 ss.
(74) Les moyens qu'énonce l'article 32 ne peuvent servir que pour confirmer le sens résultant
de l'application des règles générales de l'art 31 ou afin de déterminer le sens d'une clause qui
sera restée obscure ou ambiguë, voire qui aurait conduit à un résultat manifestement absurde ou
déraisonnable. Il s'inspire de l'ancienne formule du Digeste (Marcian) : «In ambiguis oratwnibus
maxime sententia spectanda est eius, qui eas protulisset » (Dig. 50, 17, 96).
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(75) Presque tous les arguments à l'encontre des travaux préparatoires reposent sur des
généralisations abusives ou des pétitions de principe (par exemple que les travaux préparatoires
seraient souvent vagues, incomplets, imprécis, témoignant trop peu du changement de positions
au cours des conférences, qu'ils tendraient à affaiblir le texte et sa sécurité juridique apparente),
et ils s'opposent au caractère flexible que la Commission du droit international voulait reconnaître
au processus d'interprétation tout comme à son unité herméneutique. (Voir J.P. Muller, Ver-
trauensschutz im Volkerrecht, Beitrage zum auslandischen offentlichen Recht und Volkerrecht, n° 56,
Cologne/Berlin, 1971, p. 123; J. Stone, «Fictional Elements in Treaty Interpretation - A Study
in the International Judicial Process », Sydney Law Review, vol. I, 1953/5, p. 364). Plus
généralement, un texte étant un produit finalisé, le point de départ de toute compréhension est l'intention
des auteurs, quitte à ne pas être nécessairement le point d'arrivée.
(76) Par exemple, Déclaration du Danemark, 39e séance (session de Caracas, 1974) : « If such
islets and rocks were to be given full ocean space, it might mean that the access of other countries
to the exploitation of the living ressources in what was at present the open sea would be curtailed,
and that the area of the sea-bed falling under the proposed International Sea-Bed Authority would
also be reduced» (dans la version anglaise qui est plus claire, Third United Nations Conference
on the Law of the Sea, Official Documents, vol. II, p. 279. Version française : Troisième Conférence
des Nations Unies sur le droit de la mer, Documents officiels, vol. II, p. 313. Voir aussi : Colombie
{ibid., p. 280, par. 17). Turquie (ibid., p. 284, par. 62), Singapore (ibid., p. 285 par. 72). Déjà lors
des sessions du Comité des fonds des mers A. Pardo (Malte) avait dit : « If a 200 mile limit of
jurisdiction could be founded on the possession of uninhabited, remote or very small islands, the
effectiveness of international administration of ocean beyond national jurisdiction would be gravely
impaired (UN. Comité des fonds marins, Doc. A/AC. 138/SR. 57, p. 167). En doctrine, voir J.
Symonides (op. cit., note 5), p. 162 ; H. Jayewardene, The Regime of Islands in International Law,
Dordrecht /Boston/Londres, 1990, p. 5 ; et A. Pardo, « An International Regime for the Deep
Sea-Bed : Developing Law or Developing Anarchy? », Texas International Law Forum, vol. 5, 1970,
p. 205 : « It is entirely unacceptable that the Continental Shelf doctrine should apply without
modification to rocks or remote and uninhabited islands (...) Where not only no state but no
population exists, basis for the doctrine is lacking ».
(77) Van Dyke/Morgan/Gurish, (op. cit., note 9), p. 442 (hors du contexte des travaux
préparatoires).
(78) Jayewardene (op. cit., note 76), p. 5. Sur cette question : Doc. A/CONF. 62/C.2/L.30,
partie B. Voir aussi la Déclaration de l'Argentine, Documents officiels (op. cit., note 76), p. 284,
paragraphe 66.
888 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
à l'énorme diversité des îles (79). Ainsi un débat devait s'instaurer entre ceux
qui ne désiraient aucun changement du droit (80) et ceux qui, au nom d'une
équité apte à refléter des différences factuelles par un traitement différencié,
voulaient son évolution (81). Les premiers étaient ceux qui désiraient
assimiler au territoire terrestre toute élévation permanente en mer sans
discrimination, les seconds ceux qui refusaient cette assimilation et proposaient
des critères de distinction. Cette opposition, qui devait marquer
fondamentalement tous les débats sur le sujet, est traduite par une fracture dans
l'article 121. Des « égalitaristes » émanent les paragraphes 1 et 2; pour une
fois ce sont eux les conservateurs. Les dispositions en question reproduisent
le droit reçu, coutumier, qui est formel et clair. Des « discriminateurs » émane
le paragraphe 3 ; ce sont eux les révisionnistes. Ce paragraphe renferme le
droit nouveau, conventionnel, qui est matériel et imprécis. Si on comprend
aisément les deux premier paragraphes, le sens du troisième est difficile à
établir. Voyons sa genèse et tâchons de lui donner un sens.
(79) Déclaration de la Roumanie, 39e séance (Caracas) : « ...Complexity of the problem for
which generalized solutions along the lines of those adopted at the 1958 Geneva Conference would
no longer be adequate » (Documents officiels (op. cit., note 76), p. 281, No. 29 m fine). Aussi :
Tunisie (ibid.., p. 288, paragraphe 25), etc. C. Symmons, The Maritime Zones of Islands in
International Law, La Haye, 1979, p. 12.
(80) Canada, Nouvelle Zélande, Madagascar, Trinité et Tobago, France, Chypre, Fiji,
Jamaïque, Tonga, Grèce, Venezuela, Samoa Occidental (Documents officiels (op. cit., note 76), p. 278 ss.).
(81) Roumanie, Turquie, Singapour, Royaume-Uni, Algérie, Mexique et une série de pays
africains (Guinée, Côte-d'Ivoire, Libéria, Mali, Mauritanie, etc.), ibid., p. 278 ss. et, pour les pays
africains, Doc. A/CONF.62/C.2/L.62/Rev.l.
(82) Comité dont les débuts remontent à 1967 (Résolution 2340 (XXII) du 18 décembre 1967),
voir Dupuy/Vignes (op. cit., note 13), p. 123 ss. ; A. De Marffy, La genèse du nouveau droit de la
mer, le Comité des fonds marins, Paris, 1980; J.R. Stevenson/B. Oxman, «The Preparations for
the Law of the Sea Conference », A.J.I. L., vol. 68, 1974, p. 1 ss.
(83) S.P. Jagota, Maritime Boundary, Dordrecht/Boston, 1985, p. 219 ss. ; Caflisch, in : R-J.
Dupuy/D. Vignes (op. cit., note 13), p. 418 s.
(84) Doc. A/AC. 138/SC II, L. 28 du 17 juillet 1973 (Avant-projet d'articles relatif à la
délimitation de la juridiction de l'Etat riverain sur l'espace marin et aux droits et obligations des
Etats riverains dans la zone soumise à leur juridiction : Titre I, Juridiction de l'Etat riverain sur
l'espace marin, Définitions, article 1). La Roumanie devait proposer une approche similaire à
l'ouverture de la Session de Caracas, voir Doc. A/CONF. 62/C.2/L.53. (Documents officiels (op. cit.,
note 76), vol. III, p. 264). Déjà avant (voir Documents officiels de l'Assemblée générale, 11e session,
Suppl. 9, A/3159, Doc. A/AC 138/53), Malte avait proposé un projet de traité sur l'espace marin
dans lequel l'idée qu'un Etat peut « transférer l'administration de récifs, bancs de sable, ou îles
ayant moins de 10 000 habitants permanents à des institutions internationales », en une espèce
de nouvelle tutelle internationale, était lancée (voir Titre V, article 90). On se souvient que Malte,
par les interventions de son Ambassadeur A. Pardo à l'Assemblée générale, était à la pointe de
la diplomatie à ce sujet et souhaitait une internationalisation poussée.
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 889
(85) R.D. Hodgson/R.W. Smith, « The Informai Single Negotiating Text (Committee II) : A.
Geographical Perspective », O.D.I.L., vol. 3, 1976, p. 230.
(86) R.D. Hodgson, « Islands : Normal and Special Circumstances », in : J.K. Gamble/G.
Pontecorvo, Law of the Sea ; Emerging Regime of the Oceans, Cambrigde/Massachussets, 1974, p.
150 s. Pour les « rochers », vu leur exiguïté, il tire les conséquences suivantes : « due to their
small size [they] would be unfit for human habitation. The value of rocks, as a result, would be
negligible or non-existent. They might [...] be used as sites for navigational lights, but this form
of occupation is both artificial and transitory, depending entirely on external support for its
continuance» (ibid., p. 151).
(87) Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 155 ss.
(88) Documents officiels (op. cit., note 76), vol. Ill, p. 63.
(89) Doc. A/AC. 138/SC 11/ L.40 et Corr. 1, 2 et 3 du 16 juillet 1973 (Algérie, Cameroun,
Côte d'Ivoire, Ghana, Kenya, Libéria, Madagascar et autres), article XII. Doc. A/AC. 138/ SC II/L.
43 (Cameroun, Kenya, Madagascar, Tunisie et Turquie).
(90) Doc. A/AC. 138/ SC. II./L.53. Le texte anglais parle de «uninhabited and without
economic life », alors que l'article 121, paragraphe 3, utilise la formule alternative.
(91) Bureau des affaires maritimes... (op. cit., note 28), p. 12.
(92) J.R. Stevenson/B. Oxman, « The Third United Nations Conference on the Law of the
Sea : The 1974 Caracas Session», A.J.I.L., vol. 69, 1975, p. 1 ss. La question des îles fut traitée
comme « item 19 ; Régime des îles ».
(93) Malgré cela quelques tentatives de maintenir une définition se rapportant à la superficie
furent maintenues, voir note 84 in fine (Roumanie).
(94) Trinité et Tobago, Documents officiels (op. cit., note 76), vol I, 23e séance, par. 4.
(95) Déclaration de la Micronésie, Documents officiels (op. cit., note 76), vol. III, p. 96, Doc.
A/CONF. 62/L.6.
890 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
ter les ressources maritimes situées autour d'elles (96), voire, dans une
curieuse façon de concevoir le processus conventionnel, qu'une telle
distinction ne serait pas conforme à l'article 10 de la Convention de Genève de
1958 précitée (97).
Ceux qui désiraient une distinction, en revanche, insistaient sur la
« grande diversité » (98) entre les îles et le danger qu'« une petite île pas plus
grosse qu'une tête d'épingle (...) pourrait annexer une grande partie de
l'Atlantique » (99). Pour les uns et les autres s'y ajoutaient des intérêts
particuliers (100). Dans le cadre de la thèse favorable à une pluralité de
régimes, on peut retenir trois propositions intéressant notre question.
Une proposition de la Roumanie commence par faire remarquer que,
dans le cadre des opérations de délimitation, les îlots inhabités ne méritent
pas la même considération que les îles (101). Par la suite, cette proposition
prend la forme d'un Projet d'articles sur la définition et le régime applicable
aux îlots et îles analogues aux îlots (102). Pour la délégation roumaine, «la
pratique des Etats, la jurisprudence et la doctrine du droit international
reconnaissent la nécessité de faire une nette distinction entre les îlots et
rochers d'une part et les îles proprement dites d'autre part. L'établissement
d'un régime unique (...) conduirait à des solutions inéquitables» (103). Quant
au critère matériel de distinction, c'est la «viabilité socio-économique» (en
anglais : «economic and social viability») qui est retenue (104). Ceci est d'une
importance non négligeable, car l'habitabilité et la vie économique sont
considérées comme formant un tout, un unum et non distinctum (105).
La Turquie s'est ralliée à ces vues. L'article 3, paragraphe 3, de son
Projet d'articles sur le régime des îles (106) dispose que «les îles sans vie
économique situées en dehors de la mer territoriale d'un Etat n'ont pas
d'espace marin propre », et le paragraphe 4 du même article ajoute : « Les
rochers et les hauts-fonds découvrants n'ont pas d'espace marin propre ». Les
(96) Dans le même sens : Fidji (ibid., vol. II, 39e séance, par 48 ss., p. 283) et Royaume-Uni
(ibid., vol. IL, 40e séance, par. 36, p. 288).
(97) Fidji, ibid., vol. II, 39e séance, par. 48 ss., p. 283 (sur l'habitabilité).
(98) Royaume-Uni, ibid., vol. II, 40e séance, par. 34, p. 288.
(99) Colombie, ibid., vol. II,
(37e séance, par. 11),
(39e 72), Danemark
etc. (39e39e
séance,
séance,
par.par.
5), Madagascar
17, p. 280. (22e
Dansséance,
le même
par. sens
51), Singapour
: Tunisie,
(100) Par exemple pour la Turquie les îles grecques et pour la Roumanie les îles du Serpent
situées à l'embouchure du Danube et qui appartenaient à l'URSS : Dipla, (op. cit., note 20), p.
38 ss.
(101) Documents officiels (op. cit., note 76) vol. L, 32e séance, paragraphe 13. Cela aboutit
au projet d'articles sur la délimitation dont l'article 2 ignore les îlots et les îles analogues aux
îlots - définis au Doc. A/CONF. 62 /C.2./L.53, Documents officiels, loc. cit., vol. III, p. 264 comme
étant « une élévation naturelle de terrain (...) d'une superficie supérieure à un kilomètre carré
mais inférieure à.. .kilomètres carrés, qui n'est pas ou ne peut pas être habité (de façon permanente)
ou qui n'a pas ou ne peut pas avoir sa propre vie économique » - aux fins de la délimitation.
(102) Doc. A/CONF. 62 / C.2/ L. 53 précité (op. cit., note 101). Sur la définition des deux
notions : (op. cit., note 101).
(103) Documents officiels (op. cit., note 76), vol. II, 39e séance, par. 30, p. 281.
(104) Ibid., paragraphe 31. S'y sont opposés formellement l'Italie : «inacceptable» (ibid., vol.
II, 25e séance, par. 15) et Trinité et Tobago: «tout à fait arbitraire» (ibid., vol. H, 39e séance,
par. 46).
(105) Dans le même sens : Symmons, (op. cit., note 79), p. 48., et déjà l'article 2 (3) du Projet
d'articles de la Roumanie sur la délimitation (op. cit., note 101) qui, dans la version anglaise,
plus claire, parle de « small size » d'un côté et de « uninhabited and without economic life », de
l'autre, comme deux aspects décrivant une même réalité et non une alternative ayant trait à deux
situations différentes.
(106) Doc. A/ CONF. 62/ C.2 / L. 55 (Documents officiels (op. cit., note 76), vol. III, p. 266).
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 891
commentaires précisent que s'il n'est pas simple de trouver des critères de
distinction, « il ne faut pas perdre de vue qu'il existe des îles n'ayant aucune
forme de vie économique, ni aucune forme de société («without any form of
economic or social life»). A ce propos (...) des droits à la navigation et
l'existence d'installations militaires ou de police ne suffisent pas à justifier
l'établissement d'une zone économique» (107). Notons deux choses : ici aussi
l'élément économique et l'élément social ne sont pas dissociés mais tributaires
d'une descriptio rei commune; ensuite, de simples installations de gestion
publique isolées ne suffisent pas à justifier une vie économique et sociale.
Enfin il y eut la proposition de quatorze pays africains, prolongement
naturel si l'on ose dire des positions que ces pays avaient défendues au
Comité des fonds marins, et ayant trait elle aussi au régime des îles en
général (108). Elle définit île, îlot et rocher («élévation rocheuse naturelle de
terrain qui est entourée par la mer et découverte à marée haute») à son
article premier et à son article 2, paragraphe 4, et dénie à un Etat la
juridiction « sur l'espace marin » en raison de sa souveraineté sur un îlot ou
rocher. Ne sont réservées que les zones de sécurité (109). Il s'agit là de la
première apparition officielle du terme «rocher», défini d'ailleurs un peu
malencontreusement, car partiellement per idem ; il apparaît qu'à ce stade,
un caractère particulier du sol («rocheux») était requis.
C'est de la jonction des propositions roumano-turques et africaines que
naîtra l'article 121, paragraphe 3. L'accent sera mis sur les éléments socio-
économiques, car de la proposition africaine seul le terme «rocher» sera
repris. L'on verra par la suite si la nécessité d'un caractère géologique
particulier du sol s'est maintenue.
(107) Documents officiels (op. cit., note 76), vol. II, 39e séance, par. 63, p. 284.
(108) Doc. A/CONF.62/C.2/L.62/Rev. 1.
(109) Article 2, paragraphe 5.
(110) Doc. A/CONF. 62/C.2/L.53. Formule A (Solution de la Convention de Genève 1958);
Formule B (pays africains) ; Formule C (Roumanie). Par la suite, le Bureau de la Commission
s'est attaché à établir une série de documents de travail officieux pour exprimer dans des formules
généralement acceptables les principales tendances qui s'étaient dégagées lors des observations
et des commentaires formulés au sein de la Commission. Ces documents furent ensuite regroupés
en un Document de travail unique (A/CONF. 62/C.2/WP 1). Dans sa disposition 239, Formule C,
paragraphe 2, ce dernier retient les proposition roumaines, dans sa disposition 242, Formule B,
paragraphe 6 il retient celles des pays africains.
(111) Voir, synoptiquement, Bureau des affaires maritimes... (op. cit., note 28), p. 21 ss.
(112) Documents officiels (op. cit., note 76), vol. IV, p. 20 ss. (55e séance, 18 avril 1975).
(113) Doc. A/CONF. 62/WP.8. Voir Dupuy/Vignes (op. cit., note 13), p. 163 ss.
(114) Doc. A/CONF.62/WP.8/Rev. 1; Dupuy/Vignes (op. cit., note 13), p. 179 ss. B. Oxman,
AJ.I.L, vol. 71, 1977, p. 247 ss.
892 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
(115) Doc. A/CONF.62/WP.10 ; Dupuy/Vignes (op. cit., note 13), p. 187 ss. ; B. Oxman, A.J.I.L.,
vol. 72, 1978, p. 57 ss.
(116) Doc. A/CONF. 62/WP 10/ Rev. 1 ; Dupuy/Vignes, (op. cit., note 13), p. 199 ss. B. Oxman,
A.J.I.L., vol. 74, 1980, p. 1 ss.
(117) Doc. A/CONF. 62/WP. 10/Rev. 3 ; Dupuy/Vignes (op. cit., note 13), p. 201 ss. ; B. Oxman,
A.J.I.L., vol. 76, 1982, p. 1 ss.
(118) Doc. A/CONF. 62/WP. 10/ Rev. 1 (1979), p. 19.
(119) Bureau des affaires maritimes... (op. cit., note 28), p. 82.
(120) Documents officiels (op. cit., note 76), vol. K, 103e séance, paragraphe 84, p. 72.
(121) L'Irlande, Documents officiels, vol. IX, 105e séance, par. 60, p. 86, estimant qu'il faut
encore réserver du temps à l'examen de l'article 121 (paragraphe 59).
(122) La Dominique, Documents officiels, vol. XIV, 140e séance, paragraphe 29, p. 88 :
«[l'article 121 paragraphe 3] est tout à fait clair et acceptable...», et le supprimer créerait un
précédent fâcheux de zones économiques exclusives excessives.
(123) Documents officiels, vol. IX, 103e séance, paragraphe 49, p. 69 : « critères arbitraires ».
(124) Documents officiels, vol. IX, 105e séance, paragraphe 34, p. 84 : «appuie sans réserve
la proposition japonaise ».
(125) Documents officiels, vol. XIV, 135e séance, paragraphe 18, p. 23 : «... graves objections
à l'encontre de la disposition contenue au paragraphe 3 de l'article 121, qui prévoit une exception
à la règle générale établie au paragraphe 2 dudit article. En conservant pareille formule, on
instituerait une discrimination entre les différentes parties — continentales et insulaires - du
territoire d'un Etat. De plus, cette norme exceptionnelle soulève de graves difficultés
d'interprétation. Le terme 'rochers' ne fait partie ni du vocabulaire juridique ni du vocabulaire scientifique
et pourrait viser toute formation insulaire. En outre, les deux critères qui détermineraient ce
traitement d'exception sont équivoques et très relatifs. Pour des raisons diverses, mais le plus
souvent économiques, des îles autrefois inhabitées le sont maintenant, et vice versa. Si cette
disposition devait être maintenue dans le texte final, la délégation vénézuélienne l'interpréterait
comme signifiant que l'aptitude d'une île à l'habitation humaine désigne non seulement la
possibilité abstraite d'habitation, mais encore la réalité concrète - le territoire continental ou
insulaire d'un Etat pouvant être aménagé pour répondre aux intérêts de l'Etat en question. De
même, le Venezuela considère que, par 'vie économique propre', il ne faut pas entendre l'autarcie
complète, mais l'existence de ressources naturelles pouvant être exploitées économiquement ou la
possibilité d'autres utilisations. Dans ces conditions, la suppression pure et simple du paragraphe
3 de l'article 121 au moment de la troisième révision serait, de l'avis de la délégation vénézuélienne,
la seule façon de résoudre ces problèmes et d'éviter les litiges. » Voir aussi : Documents officiels,
vol. XVI, 158e séance, paragraphes 14 s., p. 15 : «impossibilité d'établir des critères satisfaisants».
(126) Documents officiels, vol. XIV, 137e séance, paragraphe 86, p. 55 : « distinction
arbitraire ».
(127) Voir note 122.
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 893
(128) Doc. A/CONF. 62/RCNG/l (Rapport à la Plénière), par. Il, voir Documents officiels
(op. cit., note 76), vol. X, p. 97.
(129) Doc. A/CONF. 62 /L. 126, Documents officiels, vol. XVI, p. 248.
(130) Documents officiels, vol. XVI, 168e séance, paragraphe 41, p. 98.
(131) Ibid., 169e séance, paragraphe 43, p. 104 s : «éliminer le caractère illogique du texte».
(132) Ibid., 170e séance, paragraphe 49, p. 113 : «la proposition roumaine n'est pas claire».
(133) Ibid., 171e séance, paragraphe 99, p. 122 (indivisibilité de la souveraineté territoriale).
(134) Ibid, 172e séance, paragraphe 54, p. 128 (clarifier et préciser le texte).
(135) Ibid., 172e séance, paragraphe 38, p. 127 : «toute action visant à établir des distinctions
juridiques entre les îles [telles que proposées] ne peut qu'être source de difficultés ultérieures».
(136) Ibid., 173e séance, paragraphe 65, p. 135 («amélioration»).
(137) Lettre du 22 avril 1982 adressée au Président de la Conférence, Doc. A/CONF. 62/L.
135.
(138) Roumanie, (Doc. off., vol. XVI, 169e séance, paragraphe 52 s., p. 105); République
démocratique allemande (ibid., 170e séance, paragraphes 6 ss., p. 109) ; URSS (ibid., 170e séance,
paragraphe 27, p. 111) ; Algérie (ibid., 170e séance, paragraphe 56, p. 113) ; République de Corée
(ibid., 171e séance, paragraphe 4, p. 115); Trinité et Tobago : «il n'est absolument pas souhaitable
que la possession d'un récif désert situé en plein océan donne le droit d'établir une zone économique
exclusive...» (ibid., 171e séance, paragraphe 31, p. 118); Danemark : «Sans cette disposition, des
îlots constitués par des rochers arides, considérés jusque là comme de simples obstacles à la
navigation,
171e deviendraient du jour au lendemain la clef magique de vastes zones maritimes » (ibid.,
séance, paragraphe 8, p. 116) ; Tunisie (ibid., 171e séance, paragraphe 38, p. 118) ; Colombie
(ibid., 172e séance, paragraphe 29, p. 126) ; Uruguay (ibid., 172e séance, paragraphe 46, p. 127) ;
Mongolie (ibid., 173e séance, paragraphe 17, p. 131) ; République socialiste soviétique de
Biélorussie, (ibid., 173e séance, par. 27, p. 132); Pakistan (ibid., 173e séance, paragraphe 61, p. 135);
Déclaration de la Turquie (Doc. A/CONF. 62/WS/20, ibid., p. 274) et de la Colombie (Doc.
A/CONF.62/WS/21, ibid., p. 275).
(139) Par exemple la République démocratique allemande («dangereux de remettre en
question les solutions de compromis négociées à grand-peine...»); URSS; République de Corée;
Colombie (« équilibre exceptionnel et délicat ») ; Uruguay ; République socialiste et soviétique de
Biélorussie, loc. cit., (op. cit., note 138).
(140) Par exemple, la Roumanie, Trinité et Tobago, le Danemark et la Turquie, loc. cit.
(op. cit., note 138).
(141) Dipla (op. cit., note 20), p. 41.
894 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
other interpretation would distort the concept» (142). Cela démontre que
jusqu'à la fin, le paragraphe 3 a été vu comme poursuivant une finalité
précise : préserver la zone des libertés maritimes ou du patrimoine commun,
n'y faire exception que dans l'intérêt des populations locales (mais n'habitant
pas nécessairement l'îlot même). Telle est l'idée normative qui sous-tend
toute l'histoire «législative» d'une disposition qui, déjà, prenait des allures
de boîte de Pandore.
Ce sont donc le manque de temps de la Conférence et la nécessité d'un
«package deal», plutôt que des motifs de substance, qui ont permis à l'article
121, paragraphe 3, de survivre dans sa forme actuelle.
(142) Documents officiels (op. cit., note 76), vol. XVII, 189e séance, paragraphe 251. Dans le
même sens la déclaration interprétative de la Roumanie, principal auteur de l'article 121,
paragraphe 3, qui parle de « uninhabited islands and without economic life » comme d'un concept
unique (Law of the Sea Bulletin, septembre 1983, no. 1, p. 24 s.).
(143) Article 31, paragraphe 3, lettre b, de la Convention de Vienne sur le droit des traités
de 1969. Pour la jurisprudence voir l'affaire de l'Indemnité russe (R.S.A., vol. XI, p. 453) :
«l'exécution des engagements est (...) le plus sûr commentaire du sens de ces engagements», et
C.I.J. Détroit de Corfou, Rec. 1949, p. 25. Le principe était connu en droit romain sous l'adage
«optima legum interpres est consuetudo» (Digeste, lib. I., tit HI, 37). Tant que la Convention de
Montego Bay n'était pas en vigueur, il était plus correct de parler d'une « coutume antérieure »
à l'entrée en vigueur, mais postérieure à la signature (situation qui se multiplie lors de traités
codificatifs modernes dont l'entrée en vigueur est largement différée) qui, quel que soit son statut,
ne pourra manquer d'influencer l'interprétation de l'article 121, paragraphe 3.
(144) C.I.J., affaires du Plateau continental de la Mer du Nord, Rec. 1969, p. 42. Dans ce
sens, sans y donner une adhésion totale, Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 180.
(144a) C.I.J., Rec. 1969, p. 42.
(144b) Ibid.
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 895
(145) Elle se borne en règle générale à répéter le dictum de la Cour, voir par exemple D.P.
O'Connell, International Law, 2e éd., vol. I, Londres 1970, p. 24. Il s'agit d'une question d'espèce
et ce qui compte, c'est le résultat du processus et non la nature de la règle en question ; l'erreur
semble résider dans le divorce entre les termes « règle » et « généralisable », car toute règle pour
être telle couvre plus d'une situation et est donc ex defmitione plus ou moins généralisable (voir
pour une telle erreur A. D'Amato, The Concept of Custom in International Law, Londres, 1971,
p. 105). Dans notre sens : R. Baxter, «Treaties and Custom», R.C.A.D.I., vol. 129, 1970-1, p. 62
s. ; K. Marek, « Le problème des sources du droit international dans l'arrêt sur le plateau
continental de la mer du Nord», R.B.D.I., vol. 6, 1970, p. 58; M. Akehurst, «Custom as a Source
of International Law», B.Y.B.I.L., vol. 47, 1974/5, p. 50.
(146) Qu'on note que la définition d'une «norme» est déjà d'avoir une certaine généralité,
par opposition à une décision ou un règlement individuel. Marek (op. cit., note 145), p. 58.
(147) On ne saurait, bien entendu, prétendre que si une norme peut devenir coutumière,
elle est ipso facto fondamentalement normative. Ce serait pour le moins renoncer complètement
au critère discuté, en tant que condition limitative, et s'en remettre au résultat.
(148) En droit de la mer, par exemple, le patrimoine commun de l'humanité. Voir pour deux
opinions opposées sur l'exploitation des fonds marins : G. Jaenicke, « The Legal Status of the
International Seabed », Mélanges Mosler, Berlin, 1983, p. 429 ss. (en faveur de la liberté
d'exploitation) ; F. Orrego Vicuna, « Les législations nationales pour l'exploitation des fonds des mers et
leur incompatibilité avec le droit international », A.F.D.I., vol. 24, 1978, p. 810 ss. (contre la liberté
d'exploitation).
(149) Voir K. Larenz, Methodenlehre der Rechtswissenschaft, 2e éd., Berlin/New York, 1969,
p. 229, 471 ; K. Engisch, Logische Studien zur Gesetzesanwendung, 3e éd., 1963, Heidelberg, p. 15
ss. éd.,
4e Kaufmann/W.
Heidelberg,Hassemer,
1985, p. 116
Emfuehrung
s., etc. in Rechtsphilosophie und Rechtstheorie der Gegenwart,
896 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
(150) Churchill/Lowe (op. cit., note 15), p. 135 : «little impact on State practice».
(151) Dipla (op. cit., note 20), p. 42, 49, 100 ss. : «résultat d'un compromis conventionnel
difficile ».
(152) D.J. Attaed, The Exclusive Economie Zone in International Law, Oxford, 1987, p. 259 s.
(153) A. Marin Lopez, «El Regimen de las Islas en el actual derecho del mar», Revista
Espanola de Derecho Inter nacional, vol. 38, 1986, p. 156 : « Esta disposition no refleja (...) el
derecho consuetudinario ».
(154) M.S. Fusillo, «The Legal Regime of Uninhabited 'Rocks' Lacking an Economic Life of
Their Own», Italian Yearbook of International Law, vol. 4, 1978/9, p. 57: «[it would be]
venturesome at the present time to state that the general rule placing islands on the same footing as
the mainland in respect of continental shelf and economic zone, has actually been superseded ».
Il est à noter que Mlle Fusillo écrivait son article lors des négociations, il y a une quinzaine
d'années.
(155) W. Van Overbeek, «Article 121 (3) LOSC in Mexican State Practice in the Pacific»,
International Journal of Estuarine and Coastal Law, 1989, p. 265, 267 : «little evidence to suggest
that the text of Article 121 (3) has itself passed into customary international law ».
(156) Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 174 ss., particulièrement p. 175.
(157) C.A. Fleischer, «The New Régime of Maritime Fisheries », R.C.A.D.I., vol. 209, 1988-11,
p. 148 : « whether or not that exception is also part of general customary law may be open to
doubt ».
(158) Voir infra c.
(159) L.D.M. Nelson, «The Delimitation of Maritime Boundaries in the Caribbean», dans :
D.M. Johnston/P.M. Saunders (éds), Ocean Boundary Making : Regional Issues and Developments,
Londres, 1988, p. 174 s.
(160) Symmons (op. cit., note 79), p. 206 : « strong feelings (...) that insignificant insular
formations should be deprived, essentially for equitable reasons, of the right to generate such
zones [are] already to some extent reflected in State practice... », en se référant à la pratique
mexicaine (p. 125).
(161) D.W. Bowett, «Islands, Rocks, Reefs and Low- Tide Elevations in Maritime Boundary
Delimitations », dans : J.I. Charney/L.M. Alexander (éds), International Maritime Boundaries, vol.
I., Dordrecht/Boston/ Londres, 1993, p. 131, sans donner d'exemples. Il est probable que Bowett,
dans le contexte de son article, pense aux îles proches de côtes principales et intervenant dans
le processus de délimitation des espaces maritimes.
(162) Loi du 4 novembre 1975, article 3, O'Connell (op. cit., note 19), p. 732, note 217; Loi
du 13 février 1976 sur la ZEE, article 3, qui accorde une ZEE aux îles « with the exception of
those islands which cannot maintain human habitation or which do not have an economic life of
their own» (I.L.M., vol. XV, 1976, p. 382). Enfin, Federal Act Relating to the Sea, article 51 (ZEE)
et article 63 : « Islands shall have an EEZ ; however rocks that cannot sustain human habitation
or economic life of their own shall not... » (I.L.M., vol.XXV, 1986, p. 896). Voir Van Overbeek
(pp. cit., note 155), p. 252 ss.
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 897
(163) Birmanie (Territorial Sea and Maritime Zones Law No. 3, 1977), Canada (Fishing Zones
Order, 1976), Cuba (Legislative Decree No. 2 on the EEZ, 1977), Islande (Law 41 on the Territorial
Sea, the EEZ and the Continental Shelf, 1979), Brésil (Decree Law No. 68 459, 1971, voir I.L.M.,
vol. XX, 1971, p. 1226 ss), Nouvelle-Zélande (Territorial Sea and EEZ-Act, 1977), Sri Lanka
(Maritime Zones Law No. 22, 1976, article 2, paragraphe 2 et article 6, paragraphe l, lettre b,
qui revendique explicitement le droit à des zones maritimes pour toute île ou rocher, mais qui
est antérieure à la signature de la Convention, puis Law 31 and Enforcement Order of Law 31
on Provisional Measures Relating to the Fishing Zone, 1977), cités dans Office for the Law of the
Sea, National Legislation on the EEZ (Exclusive economic zone), the EZ (Economic zone) and the
Exclusive Fisheries Zone, UN. Sales No. 85.V. 10, New York, 1986. Voir aussi Attard (op. cit.,
note 152), p. 260 s., notes 423-427.
(164) La Birmanie, le Canada, le Japon et la Nouvelle-Zélande. Sur l'exclusion du contexte
des lignes de base, voir infra, TV) l.a.
(165) Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 176; Van Overbeek (op. cit., note 155), p. 262
s. ; Van Dyke/Morgan/Gurish, (op. cit., note 9), p. 458 s. Il s'agit par exemple de l'île Clarion ou
Cayo Arenas.
(166) Au sens de l'énoncé de la C.I.J. dans les affaires du Plateau continental de la mer du
Nord, C.I.J., Rec. 1969, p. 42.
(167) Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 177 s., par exemple Rockall (Royaume-Uni),
Okinotorishima (Japon), certaines îles de Hawaii (Etats-Unis), Clipperton (France), Aves
(Venezuela), Jan Mayen (Norvège), etc.
(168) Ibid., p. 178.
(169) Ibid., p. 179. Le Mexique ne protesta pas contre la proclamation française concernant
Clipperton et les Etats-Unis ne protestèrent pas contre la pratique mexicaine. Il s'agissait là
pourtant d'Etats immédiatement intéressés.
898 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
(170) Les Etats s'intéressent d'abord aux droits que leur accorde une convention ou une
coutume plutôt qu'aux devoirs qu'elle leur impose. Un exemple en est la réception de la notion
de juridiction sur 200 milles, extraite du cadre du « package deal » conventionnel, qui a donné
lieu à de longs débats. Voir par exemple B. Oxman, cité par F. Orrego Vicuna, « La zone économique
exclusive : régime et nature juridique dans le droit international», R.C.A.D.I., vol. 199, 1986-IV,
p. 134.
(171) Commission de conciliation, I.L.M., vol. XX, 1981, p. 803 s.
(172) « In the opinion of the Conciliation Commission this article [121] reflects the present
status of international law (...) it follows from the brief description of Jan Mayen, (...) that Jan
Mayen must be considered as an island. Paragraph 1 and 2 of article 121 are thus applicable to
it». Si Churchill/Lowe (op. cit., note 15), p. 127 semblent considérer que le paragraphe 3 était
couvert par l'affirmation générale de la première phrase, R.R. Churchill, « Maritime Delimitation
in the Jan Mayen Area», Marine Policy, vol. 9, 1985, p. 132 ss., affirme avec raison que la validité
du dictum ne s'étend qu'aux paragraphes 1 et 2. On voit bien le constat simple de la Commission
dans le contexte des paragraphes 1 et 2 qui ne prêtent à aucune controverse ; on le voit très mal
pour le paragraphe 3 considéré généralement comme nouveau (voir par exemple Bureau des affaires
maritimes... (op. cit., note 28), p. 2, «innovation importante»), et fortement discuté. On ne peut
présumer que cela ait échappé à d'éminents spécialistes du droit de la mer.
(173) Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 176.
(174) Voir supra, II 5.
(175) Ibid., note 10, p. 174 ss.
(176) Van Dyke, Morgan, Gurish, op. cit., note 9, p. 444 ss.
(177) Dans un raisonnement analogue à celui tenu par la C.I.J. dans l'affaire relative aux
Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Rec. 1986, p. 98 : « Si un Etat
agit d'une manière apparemment inconciliable avec une règle reconnue, mais défend sa conduite
en invoquant des exceptions ou justifications contenues dans la règle elle-même, il en résulte une
confirmation plutôt qu'un affaiblissement de la règle, et cela que l'attitude de cet Etat puisse ou
non se justifier en fait sur cette base ».
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 899
tive», qui aurait une valeur supérieure, serait celle qui consisterait en des
refus d'attribuer des espaces maritimes à des îlots sur la base de l'article
121, paragraphe 3, ou d'une législation nationale fondée sur cette exception.
Mis à part le Mexique - qui l'a fait, mais seulement pour une partie de ses
îlots - aucun Etat ne semble avoir ainsi agi. Ainsi, à défaut de pratique
suffisante, il ne peut être question d'attribuer force coutumière à l'article
121, paragraphe 3.
1. Avant de libérer, mot pour mot, les calamités de leur légendaire jarre,
il convient de préciser le cadre de l'analyse sur deux points :
a) En premier lieu, il faut en exclure la question de l'utilisation des
rochers situés en deçà des limites de la mer territoriale pour tracer des
lignes de base. Il s'agit de deux questions juridiquement bien séparées (178) :
d'un côté, il s'agit de déterminer le droit d'une élévation à des espaces
maritimes propres ; de l'autre, il s'agit de savoir si une élévation peut servir
de point d'appui pour mesurer les espaces maritimes de la côte principale
adjacente (179). Dans la pratique, la deuxième question est quantitativement
plus importante, puisque la majorité des rochers se trouvent à proximité de
terre ferme (180).
b) Est également à exclure l'utilisation des îles et des îlots lors de
délimitations maritimes (181) et lorsqu'il s'agit de déterminer les eaux archi-
pélagiques(182).
(178) Fusillo (op. cit., note 154), p. 50 s. Peu clairs : Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10),
p. 146 ss., spécialement points 2.2 et 2.4: «Article 121 (3) has in principle no bearing on the
determination of baselines » et «the distinction (...) is not a matter of applying different principles,
but rather a matter of different emphasis... », cette dernière phrase semblant refléter une confusion
regrettable.
(179) La confusion est fréquente. Ainsi Herman (op. cit., note 23), p. 194 s. constate qu'un
rocher peut être inclus dans un système archipélagique et peut dès lors générer les espaces
mentionnés à l'article 121, paragraphe 3. En réalité, il ne s'agira pas des espaces du rocher mais
de ceux de l'archipel, notion autonome en droit de la mer moderne. On pourrait soutenir aussi
que l'article 48 de la Convention de Montego Bay est une lex specialis, comme Herman le rappelle
en passant ; toutefois ceci présuppose un tertium communis auquel il serait fait exception alors
que, comme on l'a vu, conceptuellement les deux questions sont dans un rapport d'exclusion.
(180) O'Connell (op. cit., note 19), p. 732 ; Fusillo (op. cit., note 154), p. 55 ; Jayewardene
(op. cit., note 76), p. 16; Marin Lopez (op. cit., note 153), p. 156; Churchill/Lowe (op. cit., note
15), p. 42. Sur la question si des rochers tombant sous le coup de l'article 121, paragraphe 3,
peuvent être utilisés pour le tracé de la ligne de base : Kwiatowska/Soons (op. cit., note 10), p.
146 ss. (qui a tort ne retiennent pas les rochers pour le tracé de la ligne de base de la ZEE et
du plateau continental en invoquant l'article 121, paragraphe 3, mais l'admettent pour la mer
territoriale, ce qui représente une dichotomie et donc une complication inadmissibles pour la
mesuration d'espaces maritimes), et J.R.V. Prescott, The Maritime Political Boundaries of the
World, Londres, 1985, p. 74 (qui s'y déclare à juste titre favorable pour tous les espaces maritimes
vu la pratique des Etats et l'anomalie qui s'ensuivrait de pouvoir utiliser à cette fin des hauts
fonds découvrants - article 13 Montego Bay - mais pas le maiore, les rochers).De même : Fusillo
(op. cit., note 154), p. 50.
(181) Voir Bowett (op. cit., note 161) pour une étude très récente. Jayewardene (op. cit., note
76), p. 259-529.
(182) Voir les auteurs cités en note 7.
900 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
(183) Voir par exemple Rousseau (op. cit., note 65), p. 273.
N° 10,(184)
p. 18Affaire
(basés des
sur Forêts
la souveraineté
du Rhodopedontcentral
la limitation
(R.S.A., nevol.
se présume
Ill, p. 1400)
pas).et C.P.J.I., sér. A,
(185) Voir l'impressionnante et lucide critique de l'attitude qui consiste à nier l'existence de
lacunes dans l'ordre juridique international chez Ch. De Visscher, « Contribution à l'étude des
sources du droit international », Revue de droit international et de législation comparée, vol. 14,
1933, p. 418, particulièrement note 42.
(185a) Voir par exemple H. Kelsen, Principles of International Law, 2e éd., New York, 1967,
p. 438 ss. ; P. Guggenheim, Traité de droit international public, tome I, 2e éd., Genève, 1967, p.
139 ss.
(185b) Voir U. Fastenrath, Lucken im Vôlkerrecht, Schriften zum Vôlkerrecht, tome 93, Berlin,
1991, p. 241 s. ; L. Siorat, Le problème des lacunes en droit international, Paris, 1958, p. 31 ss.
(185c) Fastenrath, loc. cit., p. 242.
(185d) C.P.J.I, sér. A, no. 10 (Lotus), p. 18.
(185e) H. Lauterpacht, The Function of Law in the International Community, Oxford, 1933,
p. 97.
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 901
Quel serait le seuil minimum pour pouvoir parler d'habitation par des
communautés stables? Ces problèmes sont certes loin d'être insolubles.
L'interprétation proposée peut se fonder sur de sérieux atouts et
arguments. Les atouts sont ceux d'un paragraphe 3 objectivisé et plus facile à
appliquer, ainsi que le fait que ce texte, par cette interprétation extensive,
est à l'avantage de la comunitas (193a). L'argument principal est l'appui
qu'elle peut trouver dans de nombreux documents (surtout, il est vrai, dans
ceux du Comité des fonds marins, dans le contexte de la délimitation) et
déclarations de la Conférence (193b). En effet, les documents initiaux parlent
souvent d'îles «inhabitées». Il ne sera pas erroné de dire que souvent cette
pensée concrète aura guidé telle ou telle délégation.
Cette interprétation va au-delà du texte et des intentions « législatives ».
Qu'elle soit incompatible avec la lettre du texte qui parle de capacité
abstraite et non des faits (194) n'est pas déterminant. Comme on l'a vu, le
texte du paragraphe 3 est trop incertain pour former une limite à nos
réflexions; il ne peut former tout au plus qu'un point de départ. Or les
travaux préparatoires donnent une réponse claire. L'habitation effective
n'était qu'un primum movens prévalant surtout aux séances du Comité des
fonds marins. Au fil des réunions cependant, à mesure que les propositions
se cristallisaient et furent discutées, textes et opinions s'alignaient de plus
en plus sur le principe de capacité abstraite jusqu'à ne retenir plus
qu'elle (194a). Une majorité ne se serait pas trouvée pour exclure toute île
effectivement inhabitée de projection maritime économique. Trop d'Etats
(notamment du Tiers monde) possédaient et possèdent toute une série d'îlots
parfaitement habitables dont ils se promettaient des avantages. Certains
Etats sont allés jusqu'à faire une déclaration interprétative en ce sens. C'est
le cas de l'Iran : «Islets (...) which potentially can sustain human habitation
or economic life of their own, but due to climatic conditions, resource
restrictions (...) have not yet been put to development, fall within the provisions
of paragraph 2 of article 121... »(194b). La question devient alors un problème
de fonction judi- ciaire : le juge est-il appelé à modifier une volonté législative
(aussi) claire? Même si pour des raisons théoriques nous sommes enclins à
reconnaître d'importantes facultés prétoriennes au juge, force est de constater
que la position précaire du juge international limite sa puissance (194c). A
la vérité nous ne désirons pas prendre une position définitive sur
l'interprétation proposée. Si dans la pratique l'interprétation qui donne precedence
aux faits sur les possibilités s'impose, cela facilitera le maniement de la
disposition en lui donnant une assise plus objective; cela ira aussi dans le
sens d'une interprétation extensive telle que postulée. Nous nous bornons à
remarquer qu'une telle interprétation serait une modification significative
de la norme conventionnelle (comprise comme l'émanation d'une volonté
déterminée) par la pratique ultérieure (194d). Sur ce point, sans être
contraint par des considérations impérieuses d'effet utile (195), nous ne
pouvons ni ne voulons, sous couvert d'interprétation, devancer les faits. Nous
nous tiendrons donc à l'interprétation étayée par la volonté des parties
contractantes. Les positivistes savent : «Pro securo habetur quod ex voluntate
descendit ». Pour une fois je m'y associe.
e) II conviendra au contraire d'adopter l'interprétation la plus extensive
compatible avec le texte et surtout les travaux préparatoires. Suivant les
auteurs précités, on peut proposer un critère «tricéphale».
Premièrement, l'îlot doit permettre per se la résidence permanente de
groupes sociaux organisés, donc d'une certaine importance (196).
En deuxième lieu, il faut retenir la notion d'abus de droit qui, quel que
soit son statut controversé en droit international général (197), a été inséré
dans la Convention comme principe directeur de son interprétation et de
(194d) Voir à ce propos l'excellente étude de W. Karl, Vertrag und spatere Praxis im
Volkerrecht, Beitrâge zum auslândischen ôffentlichen Recht und Vôlkerrecht, tome 84, Berlin, 1983
et la doctrine qu'il cite.
(195) Voir par exemple l'affaire de Timor (1914), arbitre Lardy, R.G.D.I.P., vol. 23, 1916, p.
111 : « [dispositions] interprétées plutôt dans le sens avec lequel elles peuvent avoir effet que dans
un sens avec lequel elles n'en peuvent avoir aucun ». C'est là une perspective négative. Il existe
aussi une facette positive du principe, qui requiert de donner un maximum d'effet aux termes ;
elle est passablement controversée en doctrine, car jugée trop dynamique et téléologique. Voir
Rousseau (op. cit., note 65), p. 270 ss., et M.K. Yasseen, «L'interprétation des traités d'après la
Convention de Vienne sur le droit des traités», R.C.A.D.I., vol. 151, 1976-III, p. 71 ss.
(196) Voir infra, 3. d.
(197) Depuis le brillant plaidoyer de N. Politis, «Le problème des limitations de la
souveraineté et la théorie de l'abus du droit dans les rapports internationaux», R.C.A.D.I., vol. 6,
1925-1, p. 5 ss. Sur la notion d'abus de droit en droit international général : Bin Cheng, General
Principles of Law -As Applied by International Courts and Tribunals, Londres, 1953, p. 121 ss. ;
E.R.C. van Bogaert, Het rechtsmisbruik in het volkenrecht. Rechtstheoretische verhandeling, Ant-
werpen, 1948 ; M. Gestri « Considerazioni sulla teoria dell'abuso del diritto alia luce della prassi
internazionale », Rivista di diritto internazionale, vol. 77, 1994, p. 5 ss. ; B.O. Iluyomade « The
Scope and Content of Complaint of Abuse of Right in International Law, » Harvard International
Law Journal, vol. 16, 1975, pp. 47-92 ; B. Jankovic, « L'interdiction de l'abus de droit en droit
international public », Annuaire de l'association des anciens auditeurs de VAcadémie de La Haye,
vol. 29, 1959, pp. 5-13 ; A.-C. Kiss, L'abus de droit en droit international, Paris, 1953 ; G. Leibholz,
« Das Verbot der Willkur und des Ermessensmissbrauchs im vôlkerrechtlichen Verkehr der Staa-
ten », ZaoRV, vol. 1, 1929, pp. 77-125 ; G. van der Molen, Misbruik van recht in het volkenrecht,
Amsterdam, 1949 ; V. Paul, « The Abuse of Rights and Bona Fides in International Law »,
Osterreichische Zeitschrift fur offentliches Recht und Volkerrecht, vol. 28, 1977, pp. 107-130 ; H.
Schiedermair, Das Verbot des Rechtsmifibrauchs als allgememer Rechtsgrundsatz des Volkerrechts ,
Thèse, Freiburg, 1942 ; G.S. Taylor, « The Content of the Rule against Abuse of Rights in
International Law », British Yearbook of International Law, vol. 46, 1972/1973, pp. 323-352 ; S.
Trifu, La notion de l'abus de droit dans le droit international, Thèse, Paris, 1940 ; A. Voss,
RechtsmifSbrauch im Volkerrecht. Die Théorie der Gegenstandsbedingtheit der Rechtsnorm und das
Verhaltms des Rechtsmifibrauches zur clausula rebus sic stantibus, Thèse, Munster, 1940. Sont
restrictifs quant à la notion d'abus de droit en droit international des auteurs comme H.C.
Gutteridge, « Abuse of Rights», Cambridge Law Journal, vol. 5, 1933, pp. 22-45; M. Scerni,
L'abuso di diritto nei rapporti internazionali, Rome, 1930 ; G. Schwarzenberger, « Uses and Abuses
of the 'Abuses of Rights' in International Law », The Grotius Society, vol. 42, 1956, pp. 147-179 ;
J.H.W. Verzijl, International Law in Historical Perspective, vol. I, Leyden, 1968, p. 316 ss. Nient
l'existence d'une norme interdisant l'abus de droit en droit international R.K. Neuhaus, Das
Rechtsmissbrauchsverbot im heutigen Volkerrecht, Berlin, 1984 ; J.D. Roulet, Le caractère artificiel
de la théorie de l'abus de droit en droit international public, Neuchâtel, 1958.
904 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
son application (198). Il permettra par exemple d'éliminer les îlots où des
travaux sont entrepris mala fide pour les rendre habitables, où des colons
sont installés à la seule fin de détournement, ou à propos desquels toute
autre mesure artificielle est prise en vue de contourner l'effet du paragraphe
3(199).
Troisièmement, à un niveau encore plus formel, il conviendra de fixer
une règle résiduelle, découlant directement du postulat téléologique et d'une
interprétation extensive : dans tous les cas-limites et dans le doute,
l'interprétation se fera en faveur d'une application du paragraphe 3.
3. Arrivé au terme de l'analyse, il convient de concrétiser les propositions
générales présentées en considérant séparément les termes saillants utilisés
par l'article 121, paragraphe 3. Ceci est d'autant plus utile que chacun
d'entre eux est source de difficultés.
a) «Rocher». L'article 121, est-il besoin de le dire, forme une unité. Ainsi,
le paragraphe 3 doit être lu dans le contexte des paragraphes 1 et 2 auxquels
il fait exception. Les rochers sont une catégorie spéciale d'îles, ils ne sont
pas un aliud. De la définition de l'île comme étant «une étendue naturelle
de terre... (article 121, paragraphe premier)» il résulte que toute structure
artificielle est exclue (200).
Ensuite, aucune proposition fixant une surface minimale n'a été retenue
par la Conférence, malgré plusieurs démarches en ce sens (201). S'il est donc
indiscutable qu'un rocher représente une surface très restreinte (202), il n'y
a aucune limite précise.
Finalement, on arrive à la quaestio diabolica qui est de savoir si
l'élévation doit avoir une structure géologique particulière, c'est-à-dire être
formée de «solid parts of the continental crust (203)», à l'exclusion de bancs
de sable, d'atolls, etc. Une partie de la doctrine va dans ce sens : Pres-
cott(204), Dipla(205) et Jayewardene (206). D'autres, comme Kwiatkows-
ka/Soons (207) ou Van Dyke/Morgan/Gurish (208), rejettent ce critère à juste
titre. Deux arguments principaux militent en ce sens. Premièrement, le
résultat d'une telle interprétation est déraisonnable. Un minuscule atoll
serait une île et générerait des espaces maritimes, malgré le but primordial
poursuivi par l'article 121, paragraphe 3; une structure rocheuse, en
revanche, ne le ferait pas. On ne voit pas de raison à cette discrimination;
elle est contraire à l'objet et au but du paragraphe 3 et à l'interprétation
extensive retenue. Deuxièmement, les travaux préparatoires ne confortent
nullement cette interprétation. Le terme «rocher» a certes été repris de la
proposition africaine (209), qui le définissait comme structure «rocheuse».
(210) Van Dyke/Morgan/Gurish (op. cit., note 9), p. 473, avec une photographie
impressionnante.
(211) Dipla (op. cit., note 20), p. 84 (avec l'exemple qui suit dans le texte) ou l'intervention
40e
du déléguéséance, paragraphe
britannique 36,lorsp. de
288.la Même
sessionerreur
de Caracas,
chez Marin
Documents
Lopez (op.officiels
cit., note
(op. 153),
cit., p.
note
166.76),
(212) Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 161, avec une mise en garde à la p. 162 :
«...a present claim should be based on evidence that the past capacity continues to exist».
(213) Par exemple Necker ou Nihoa (Hawai), voir Van Dyke/Morgan/Gurish (op. cit., note
9), p. 468 ss., ainsi que le cas particulièrement dramatique et romanesque de l'île de Pâques dans
le Pacifique.
(214) Dans ce sens aussi : Kwiatkowska/Soons (op. cit., note 10), p. 162 s. ; E.D. Brown/R.
Churchill (éd.), The UN Convention on the Law of the Sea : Impact and Implementation, Londres,
1987, p. 358, citant le commentaire de Nelson lors de la Conférence : « 'Cannot sustain', I presume,
must mean that we are dealing with the present. Whatever may have happened centuries ago
would not be relevant to the notion of what a rock is not able to sustain today. So one has to
look what is happening today...».
906 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
(224) Formulation classique chez Van Dyke/Brooks (op. cit., note 4), p. 286 : « Islands should
not generate ocean space if they are claimed by some distant absentee landlord who now desires
the island primarily because of the ocean resources...». Voir II.D.2.
(225) Exemple chez Van Dyke/Morgan/Gurish (op. cit., note 9), p. 437 : base pour pêcheurs
de la région.
(226) S'expriment en sens contraire : Brown (op. cit., note 8), p. 207, Hodgson/Smith (op.
cit., note 85), p. 231 («value to shipping»), Prescott (op. cit., note 180), p. 73. Ils méconnaissent
que le critère du paragraphe 3 n'est pas la « vie économique », mais la « capacité de vie
économique » ; la question n'est donc pas seulement de savoir si un phare effectivement installé représente
de la vie économique. Dans l'affirmative, il faudrait admettre que tout rocher est capable de vie
économique, étant donné que tout rocher peut recevoir un phare ou d'autres installations
techniques. S'expriment dans notre sens : probablement Hodgson, (op. cit., note 86), p. 151 : « ...this
form of occupation [navigational lights] is both artificial and transitory, depending entirely on
external support for its continuance », et le délégué de la Turquie lors de la session de Caracas,
supra, II. D. 4, texte à la note 107.
(227) D.P. O'Connell, «The Juridical Nature of the Territorial Sea», B.Y.B.I.L., vol. 45, 1971,
p. 303 ss.
(228) Dans ce sens aussi Symmons (op. cit., note 79), p. 52 et Van Dyke/Morgan/Gurish (op.
cit., note 9), p. 438 : «post hoc justification». Question laissée sans réponse par Symonides (op.
cit., note 5), p. 165.
(229) Voir supra IV 3 b. in fine-.
(230) Facteurs avancés par Hodgson/Smith (op. cit., note 85), p. 230. Mais la construction
d'une usine de dessalinisation serait parfaitement légitime.
(231) D.W. Bowett, The Regime of Islands in International Law, New York, 1978, p. 34. Voir
aussi : Attard (op. cit., note 152), p. 260 : « No State may artificially create the necessary
conditions ». Cf. en outre la Résolution de la Conférence Impériale, supra, II.A.2.a.
(232) Lors de la Conférence, le Danemark a plaidé pour l'auto-suffisance (Kwiatkowska/Soons,
(op. cit., note 10), p. 168 s. La Commission de conciliation Jan Mayen permet d'affirmer que tout
support externe n'a pas été considéré incompatible avec la notion de vie économique propre (I.L.M.
vol. XX, 1981, p. 797 ss.).
908 LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY
la dépendance non plus. Les liens doivent être raisonnables dans les
circonstances; ils ne doivent pas paraître l'œuvre d'une habileté malicieuse à
des fins détournant la règle sur laquelle elles se fondent de son but social.
Cette idée a un autre nom : abus de droit. La limite de la dépendance
admissible d'un îlot sera là où l'action entreprise apparaîtra abusive, vu son
caractère destiné à tourner les effets du paragraphe 3 (Rechtsumge-
hung) (233). Le but envisagé de l'acte sera donc un facteur primordial. L'on
pourra regretter l'absence d'un critère plus précis. Mais l'on pourra aussi se
féliciter d'être allé aussi loin que le permet une norme imprécise. Comme
nous avons déjà pu le dire, ce n'est que la pratique (et des interprétations
particulièrement dynamiques) ou le «législateur» qui pourront préciser la
norme en la modifiant. Malheureusement l'interprète n'échappe pas souvent
à cette vérité qu'exprime l'adage élégant «ex ambiguitate lux ambigua ori-
tur ».
g) «Pas de zone économique exclusive ni de plateau continental» : Jamais,
au cours de la Conférence, le droit de toute élévation naturelle en mer d'avoir
des eaux territoriales n'a été mis en doute. Tout le débat cristallisé dans
l'article 121, paragraphe 3, portait non pas sur la sécurité et les 12 milles
de la mer territoriale, mais sur les droits économiques que confèrent les
zones maritimes qui s'étendent à 200 milles au plus des côtes (234).
L'argument a contrario par rapport au texte qui n'exclut que la zone économique
exclusive et le plateau continental sera donc admis : un rocher pourra avoir
une mer territoriale et aussi une zone contiguë (235).
V. - Conclusion
(233) II faudra ici renvoyer à la doctrine sur l'abus de droit, notamment en droit interne où
il s'agit d'une notion relativement précise et fort développée. L'idée se trouve cependant bien
exprimée par M.S. MC Dougal/W.T. Burke, The Public Order of the Oceans, New Haven, 1962,
p. 387 s : «The chief criterion for appraising the reasonableness of a claim (...) is whether it is
constructed for practical use or rather only as a disguised attempt... » d'obtenir un bénéfice.
(234) Symonides (op. cit., note 5), p. 166 ; Jayewardene (op. cit., note 76), p. 11 s.
(235) Question laissée ouverte par Symonides (op. cit., note 5), p. 166. En ce qui concerne
la zone contiguë l'on pourrait objecter qu'il est difficile de concevoir des intérêts fiscaux, douaniers,
d'immigration ou sanitaires pour une île inhabité. Cependant, et pour ne prendre qu'un exemple,
l'intérêt qu'il peut y avoir à empêcher qu'un ilôt devienne une plaque tournante de contrebande
peut rendre utiles des interventions depuis la zone contiguë.
LES « ROCHERS... », ART. 121, § 3, DE MONTEGO BAY 909