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La symbolique de ramadan

Le jeûne est une tradition commune à toutes les civilisations qui prend des formes différentes. Nous
laisserons ça de côté.

En ce qui concerne Chahr Ramadan, Le mois de Ramadan retenons qu’ à l’origine, le mot chahr vient
du syriaque shahar qui veut dire veillée religieuse. En arabe chahr vient du verbe « cha ha rra » qui
veut dire faire connaître, connu (machhour). Pour le Ramadan, c’est le moins connu . C’est le seul
mois indiqué nominativement dans le Coran.

A l’origine, c’est le calendrier luni-solaire qui fixait Ramadan comme le neuvième mois du
calendrier, correspondant au mois de septembre, période encore chaude de l’année en Arabie. Le
verbe (ra ma da) veut dire les fortes chaleurs mais aussi les premières pluies d’automne. Ce
calendrier en vigueur dans la péninsule arabique pendant des siècles avant l’Islam correspondait
également au calendrier hébraïque. Il comportait des mois lunaires synchronisés avec le cycle solaire
(soit l’année tropique). Pour y arriver, les prêtres ajoutaient un mois intercalaire,  environ une fois
tous les 32 mois. Ce mois était nommé AL-NASÏ ( ‫ ;)النَّ ِسي ُء‬qui signifie le mois différé ou retardé. À
l’aide de l’intercalation, les noms des mois du calendrier étaient alignés avec les saisons.
L’interdiction de l’intercalation est intervenue longtemps après la mort du Prophète, ce qui a rendu
le calendrier hégirien strictement lunaire sans aucune correspondance entre le sens étymologique
premier des mois et leur arrivée par rapport au cycle naturel des saisons. Ainsi le mois de Rabia Al
Aoual,(mars) début du printemps peut arriver en plein été ou en plein hiver avec des incidences
extrêmement importantes. Ainsi par exemple, pendant ce mois il était interdit de chasser le gibier,
car c’est généralement la période de reproduction. Sur quelle période va porter l’interdiction ?

Revenons au Ramadan. Plusieurs versets coraniques l’évoquent comme le mois de la sacralité par
excellence. Ce mois est associé à quatre faits majeurs : les pratiques religieuses( prières, jeûne,
aumône), lailat al kadr ( la nuit du destin) ,le ftour (la rupture du jeûne) et l’aumône de fin de jeûne.
(Zakat al fitr)

a) La pratique des prières , du jeûne et de l’aumône a pour finalité la purification du corps et de


l’âme en vue de se préparer pour la grande nuit où l’homme doit réfléchir sur sa destinée. Par le
jeûne, les prières et l’amour des autres, l’homme trouve la paix en lui-même. Bien entendu il faut
voir dans ces pratiques religieuses sensées être pénibles et privatives de plaisirs des épreuves contre
sa volonté et ses désirs. Cette paix temporaire devrait trouver son prolongement tout au long de la
vie dans la compréhension de la notion de ftour qui n’est pas seulement une rupture du jeûne mais
une transformation de l’être.

b) Lailatou al kadr, que beaucoup traduisent à tort par la nuit du destin (et à ce niveau s’il fallait
évoquer cette notion de destin ça serait plutôt la destinée) est diversement fixée dans le mois de
Ramadan. Beaucoup s’accordent sur les dix derniers jours. Chez les chiites par exemple elle est
située soit le 15, 19 ou encore le 23 du mois.

Si nous prenons le texte de la sourate 97 du Coran, nous constatons qu’il y a confusion chez les
exégètes, entre al Kadar (le destin) liée au nom divin d’Al moukadir et al Kadr qui est en relation avec
la notion de capacité de faire, c’est-à-dire avec les noms divins d’ Al Kadir, Al Kâdir qui sont
directement liés à la notion de puissance.

Si pendant cette nuit le divin a fait descendre sa parole (ou le Verbe) sur le monde humain c’est qu’il
s’agit nécessairement d’un acte de miséricorde et de bienveillance. En effet, selon la tradition
musulmane, non seulement le Coran a été révélé pendant cette nuit, mais, son retour
annuel, inéluctable est l’occasion de la descente des anges (ou messagers) et surtout du
Souffle divin. Un des versets annonçant le Ramadan dit «  le mois de ramadan, pendant
lequel nous avons révélé le Coran, comme guidance avec les preuves de cette guidance et de
justice ». S 2/185. Cette nuit est celle de la paix interne et l’harmonie dans le monde jusqu’à
l’aurore. Ici il faut entendre aurore dans le sens symbolique, c’est-à-dire le moment où se
séparent le fil blanc et le fil noir selon l’expression coranique, rappelant notre pavé
mosaïque. IL est clair qu’il s’agit de la séparation de l’apparition de la lumière de la Vérité qui
devrait chasser les ténèbres.
c) Avec le verbe fatara (FTR) d’où, foutour (ftour), al fitra, nous touchons à une notion
centrale de l’ésotérisme en Islam. D’abord, chez l’initié, la notion de rupture se situe au
début du processus lorsqu’on meurt au profane et non pendant le processus. Le ftour
(rupture du jeûne) est donc un processus de transformation, de passage d’un état de
sollicitation de soi-même par les pratiques ascétiques à un état de gratitude de l’homme en
devenir de maîtrise de la connaissance pour arriver à l’homme initial. Comme l’avait avancé
Ibnou Rochd (Averroès) depuis le 12 ème siècle, al fitra renvoie à la capacité qu'aurait la raison
humaine d'atteindre, à elle seule, la vérité; c’est-à-dire, même sans intervention divine. Cette
idée correspond à la formule d’un autre ésotériste, Jaafar al-Sâdiq selon laquelle « il y a
d’abord une première connaissance (ma‘rifa) qui prend racine dans la fitra et qui
conditionne l’existence de l’homme comme nature ». Cette fitra est la religion immuable en
chaque homme, qu’ Ibn Arabi appelle la nature primordiale( ou l’état de pureté absolue)
que nous pouvons résumer par l’ensemble des questionnements que l’homme se pose pour
atteindre la Vérité métaphysique et qui est contraire à la négation du questionnement
(athée stupide). Or cette première connaissance « innée » en l’homme lui confère la capacité
de jugement de ses actes, et donc des multiples choix dans la vie. Ainsi cette liberté de choix
innée en l’homme lui permet également d’atteindre toute valeur morale sans référent
obligatoire à une quelconque religion. C’est exactement le sens que donne la franc-
maçonnerie à la morale. Nous voyons donc que cette notion de liberté innée est
contradictoire avec celle de prédestination.
d) Reste le dernier fait du Ramadan qui est la zakat al fitr, littéralement la purification de sa
nature primordiale par un don matériel dont la valeur matérielle est modique, mais dont la
valeur symbolique est immense. Au-delà du caractère charitable du partage, il s’agit en
réalité du don de soi même dans sa pureté absolue dont parle Ibn Arabi. La zakat al fitr est
une manière de se révéler à soi-même et aux autres dans le plus simple état d’esprit. Celui
de l’amour sans crainte ni attente de récompense. Le don de soi même pour l’amour.
Cette boucle permet de comprendre l’appel de l’intelligence naturelle et l’harmonie dans la
constitution initiale de l’homme qui doit être sauvegardée par la raison comme le dit
Averroès et l’écoute du cœur comme le conseille Al Hakim Tirmidhî.
J’ai dit VM. Nouri 16/03/2023

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