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3 heures
Document autorisé : « La responsabilité personnelle du préposé »
Code civil
Mots clés Responsabilité - Pré-
posé - Commettant - Fait des
choses - Faute - Indemnisation
Victor Hugo a écrit que « tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité ».
Le premier paragraphe de La réciproque est-elle vraie ? Autrement dit, tout ce qui diminue la liberté doit-il
l’introduction constitue l’accroche diminuer la responsabilité ? En droit, lorsqu’une personne cause un dommage en
dont le but est de poser les enjeux
généraux de la réflexion, ici en des obéissant aux instructions d’un tiers, et donc avec un degré de liberté moindre
termes philosophiques. que si elle avait agi de son propre chef, cela peut-il conduire à une diminution de
sa responsabilité ? Telle est la question fondamentale qui se retrouve au centre de
l’appréhension de la responsabilité personnelle du préposé.
Cornu G. (dir.), Vocabulaire juridique,
13e éd., 2020, PUF, Quadrige, vo Selon le Vocabulaire juridique, le préposé est une personne « qui accomplit un acte
Préposé.
ou exerce une fonction sous la subordination d’une autre », cette autre personne étant
V. spéc. : Flour J. et Aubert J.-L., dénommée le commettant. La doctrine tend à considérer que c’est la possibilité
Les obligations, t. 2 : le fait juridique, de donner des ordres au préposé, d’exercer sur ce dernier une autorité, qui consti-
14e éd., 2011, Sirey, Université,
nos 209 et s. tue la marque la plus sûre du lien de préposition. Cela permet à cette relation
juridique de s’appliquer à des configurations variées, allant de la relation de travail
La définition des termes du sujet est aux simples directives occasionnelles données par une personne à une autre.
un passage très important.
La relation unissant le commettant et le préposé se retrouve au cœur d’un principe
de responsabilité du commettant du fait du préposé, consacré par le Code civil
en son article 1242, alinéa 5. Toutefois, la focalisation des textes sur le commettant
laisse entière la question de la responsabilité personnelle du préposé. À première
vue, conformément à la philosophie classique du droit de la responsabilité civile,
l’on pourrait penser qu’un préposé, à l’instar de toute autre personne, doit répondre
de sa faute. Cette idée orienta d’ailleurs le droit positif pendant la majeure partie
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du XXe siècle. Des préposés fautifs virent ainsi leur responsabilité engagée, soit par
leurs victimes soit par leurs commettants dans le cadre d’actions récursoires.
Cela étant, le lien de préposition, s’il constitue un facteur de responsabilisation du
commettant, peut aussi, à certains égards, apparaître comme un facteur d’atté-
V. notamment : G. Viney,
nuation de la responsabilité du préposé. Comme l’a fait observer une partie de la
« La responsabilité personnelle
doctrine, le préposé agit pour le compte et dans l’intérêt d’un autre. Ces considé- d’un préposé ne peut être recherchée
rations expliquent que le droit français ait progressivement infléchi sa rigueur quant s’il n’a pas outrepassé les limites de sa
à la responsabilité personnelle du préposé. mission », D. 1994, p. 124.
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D’autre part, réciproquement, lorsque le préposé a respecté sa mission, la neutra-
lisation de responsabilité joue de manière extensive. Dans deux arrêts rendus le
9 novembre 2004 à propos d’une sage-femme et d’un médecin salarié, la Cour
de cassation a abandonné sa jurisprudence suivant laquelle les préposés jouis- Cass. 1re civ., 9 nov. 2004,
sant d’une certaine indépendance devaient continuer de voir leur responsabilité nos 01-17168 et 01-17908,
engagée. En outre, la Cour de cassation permet au préposé de se prévaloir de son Bull. civ. 1, n° 262.
immunité même lorsque sa responsabilité est recherchée sur le fondement de la loi Cass. 2e civ., 28 mai 2009,
du 5 juillet 1985 sur les accidents de la circulation. n° 08-13310, Bull. civ. 2, n° 128.
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D’autre part, lorsque le préposé commet une faute civile mais de manière inten-
tionnelle, ne doit-il pas être tenu de réparer les conséquences de ses actes ? Si l’on
retenait une telle interprétation, le champ de l’immunité serait drastiquement réduit.
Seul le quasi-délit serait hors du champ de la responsabilité du préposé. Dans les
décisions précitées du 20 décembre 2007 et du 21 février 2008, la haute juridiction
a semblé aller dans ce sens puisqu’elle a précisé que le préposé pouvait être tenu
à réparation lorsque le préjudice résultait d’une faute intentionnelle. Le projet de
réforme de la responsabilité civile valide cette interprétation puisqu’il prévoit en son
article 1249 la restauration de la responsabilité civile du préposé en cas de « faute
Pour des propositions doctrinales intentionnelle ».
plus amples fondées sur ce critère :
Flour J. et Aubert J.-L., La restauration de la responsabilité personnelle du préposé est donc possible
Les obligations, t. 2 : le fait juridique, lorsque le comportement du préposé présente un certain degré de gravité. Il en va
14 éd., 2011, Sirey, Université,
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