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Chapitre 2 

: La fonction d’investissement
Introduction : l’investissement, définition et approche comptable

investissement = augmentation du stock de capital fixe (bâtiments/machines)

On peut rentrer dans le détail est distinguer différents types d’investissements : (selon leur nature,
l’objectif poursuivi, l’agent qui investi)

→ nature : distinguer ici investissement matériel et immatériel. Matériel : bâtiments, machines.


Immatériel : logiciels, dépenses de recherche et développement, dépenses de publicité-marketing, et
de formation du personnel. L’INSEE a pour indicateur l’FBCS (formation brut de capital fixe
(contient l’investissement de remplacement) pour mesurer l’investissement, et cela comprend tout
les investissements matériels, mais seulement une partie des investissements immatériels.
L’investissement mesuré par l’INSEE est donc un peu sous-estimé par rapport à tous les
investissements faits, surtout que la tendance récente est à l’augmentation des investissements
immatériels.
Le taux d’investissement d’une entreprise = (FBCS/valeur ajoutée) x100. Et au niveau du pays :
(somme de toutes les FBCS/PIB) x100

→ objectif de l’investissement : investissement de capacité (ajout de machines aux machines


existantes, pour produire davantage, ou de main d’œuvre), de productivité (être plus efficace, cas
de figure où l’entreprise remplace une machine par une autre plus performante), ou de
remplacement (on remplace une machine par une autre plus neuve → au sens strict, ce n’est pas
vraiment de l’investissement, et des fois on parle parfois d’investissement nette, c’est
investissement brut – investissement de remplacement)
Distinction théorique, car dans la réalité il est difficile de vraiment distinguer ce que fait
l’entreprise, et c’est souvent un mélange.
Quand on sépare par types d’investissements, cela permet de répondre à la question de la création
ou destruction d’emploi : l’investissement de capacité → crée de l’emploi, de productivité →
détruit plutôt de l’emploi.

→ nature de l’investisseur : il faut distinguer les investissement publics (réalisés par l’état et les
administrations), des investissements productifs (réalisé par des entreprises, mais aussi par les
ménages → les entreprises individuelles (appartenant à un seul propriétaire) étant classées dans les
ménages, ce qui gonfle ce chiffre, et l’achat de logement par un ménage est considérée comme un
investissement aussi, car trop importante pour être considéré comme une dépense)

Le but est de rappeler que si on a un sujet sur l’investissement, il ne faut pas trop vite réduire cela
aux entreprises, cela peut aussi être public, par exemple nous demander si les investissements
publics et productifs se cumulent, ou si l’un se substitue à l’autre.

En France, seulement la moitié des investissements sont réalisés par des entreprises, et les
investissements publics en sont 20 %. Donc il reste 30 % ménages, sachant que dans les ménages il
y a les entreprises individuelles.
I- Les déterminants de l’investissement

Rappelons d’abord que l’investissement, pour les économistes, joue un rôle très important comme
facteur de croissance, ce qui permet d’expliquer pourquoi il y a autant d’investissement, pourquoi
ça nous intéresse autant.

Pour les néo-classiques, cela permet d’accumuler du capital, donc d’augmenter la richesse du pays,
et d’augmenter l’offre, donc d’avoir de la croissance (économistes de l’offre).

Pour les Keynésiens, l’investissement est une composante de la demande, car quand l’entreprise
investit, elle demande des biens de production à une entreprise qui les produit, ce qui fait que si
j’augmente l’investissement, j’augmente la demande…
On peut même aller plus loin, en disant que c’est même la composante la + importante de la
demande, car l’investissement est beaucoup plus fluctuant que la consommation, qui elle reste
stable d’une année sur l’autre, car c’est une fonction stable du revenu. En revanche, on peut avoir +-
20-40 % d’investissement d’une année sur l’autre, et cela a des conséquences sur les variations de la
demande.
Dans les deux cas, même si c’est pour des raisons différentes, l’investissement est central et il est
intéressant de s’interroger sur ses déterminants.

Ces déterminants sont nombreux, ce qui d’emblée nous permet d’anticiper la difficulté à laquelle
sont confrontés les économistes : l’investissement de beaucoup de facteurs, et il y a plusieurs petites
théories, mais pas vraiment de globale.

A) La demande anticipée : le mécanisme de l’accélérateur

1- le principe de l’accélérateur

Le niveau de demande anticipé par les entreprises = premier grand déterminant : si le chef
d’entreprise anticipe que la demande des biens qu’il produit va augmenter dans le futur, et de façon
durable, il va vouloir augmenter sa production, et pour augmenter sa production, il va être amené à
investir.

Ce mécanisme est connu sous le nom d’accélérateur, car on peut montrer qu’une hausse de la
demande entraîne une hausse + que proportionnelle de l’investissement.
Il est mis en évidence dès 1909, par un économiste français, Aftalion, et puis en 1917, par Clark
(qui ne connaissait pas Aftalion).
Même si c’est avant Keynes, cela peut s’inscrire dans une logique Keynésienne, car on retrouve
l’idée que ce qui est essentiel pour l’entreprise est la demande, sont les débouchés.

Illustration : on suppose qu’une entreprise a un coefficient de capital = 10, ce qui veut dire que pour
produire un bien d’une valeur donnée, il faut disposer d’un capital à la valeur 10x supérieure. On
suppose aussi que l’entreprise a au départ un stock de capital de 10 000 euros. Et on suppose enfin
que si l’entreprise a trop de capital, elle revend le capital excessif, et l’investissement sera négatif.

Demande Capital disponible Capital nécessaire Investissement


1000 10 000 10 000 0
1100 10 000 11 000 1000
1400 11 000 14 000 3000
1400 14 000 14 000 0
1350 14 000 13 500 - 500
1100 13 500 11 000 - 2 500

On voit donc bien que c’est la demande qui déclenche l’investissement, et aussi on voit apparaître
l’effet accélérateur : quand je passe de 1100 à 1400 unités, la demande augmente de 27 %, alors que
l’investissement augmente de 200 %.
((chiffre d’arrivée – chiffre de départ/chiffre de départ)x100)

2- Limites de l’accélérateur

On a ici une version simplifiée de l’accélérateur qui repose sur des hypothèses très fortes et peu
réalistes :

→ le fait que la production suive mécaniquement l’évolution de la demande : si la demande


augmente, le producteur veut augmenter sa production. Or ça n’est pas si sur : cela suppose que
l’entreprise n’a pas fait de stocks, que l’entreprise réagit à une variation de la demande, sans trop se
questionner sur le caractère durable ou accidentel de cette augmentation (on voit dans notre
exemple que l’augmentation ne dure que 3 périodes, et qu’elle rebaisse, ce qui était prévisible), et
enfin cela suppose que l’entreprise réagit par un ajustement des quantités, mais on pourrait imaginer
un ajustement par les prix.

→ l’investissement lui-même suit mécaniquement l’évolution de la production. À nouveau ça n’est


vrai que sous certaines conditions : l’entreprise utilise déjà au maximum le capital dont elle dispose
(on dit qu’il y a un « taux d’utilisation des capacités productives élevés »), que le coefficient de
capital est constant (si je veux augmenter la production, la seule solution est d’augmenter le
capital), or on peut supposer que l’on pourrait augmenter le nombre de travailleur, et enfin, les
entreprises peuvent toujours investir si elles le souhaitent (sans problème de financement, et pas de
pénurie sur les biens de production).

→ il n’y a pas dans ce modèle la question de l’usure des machines, n’intègre pas l’investissement de
remplacement.

On a donc construit des modèles + complexes :

→ modèles d’accélérateur avec amortissement, caractérisés par une atténuation de l’effet


accélérateur
→ modèles d’accélérateur flexibles, et l’idée est ici que l’entreprise ajuste son stock en fonction de
la demande, mais de manière progressive, sur le long terme, pas de façon instantanée.
It = a(K*t (capital dont j’aurai besoin pour satisfaire la demande) – Kt-1 (capital disponible))
avec 0<a<1, qui représente la vitesse de l’ajustement : s’il est égal à 1 : l’entreprise ajuste
immédiatement, et s’il est inférieur, elle ajuste progressivement, et + ça baisse, + c’est long.
=> permet de faire sauter les 6 hypothèses précédentes, on peut tout à fait supposer que j’ai des
stocks, que je peux modifier le taux d’utilisation de mes capacités productives.
Et + on fait sauter les hypothèses, + le a se rapproche de 0.
Et par contre, inversement, si on rajoute les hypothèses, a se rapproche de 1.
=> L’effet accélérateur est atténué ici, ce qui fait que la demande est un peu moins déterminante de
l’investissement, et il est aussi décalé dans le temps, la demande bouge en période t, et l’effet
accélérateur peut se produire en t+1, t+2…
B) La profitabilité du capital

1- Le choix intertemporel du producteur : investissement et valeur actuelle nette (VAN)

Au moment d’investir, le producteur va comparer le coût de l’investissement (noté I 0, car on paye


tout de suite), et les recettes qu’il permettra d’obtenir, sachant que ces recettes vont s’étaler sur
plusieurs années. Elles sont notées R1, R2, …, Rn, en n+1, on jette la machine.
Et l’idée est que le producteur va investir que si les recettes sont supérieures au coût.

Le problème est que dans cette comparaison, on compare un coût immédiat, et des recettes qui ne
sont que futures, je dois donc faire un raisonnement intertemporel. Or en général, les agents ont une
préférence pour le présent.
Ce qui veut dire que pour renoncer à avoir 100 euros aujourd’hui, on attend à avoir plus que 100
euros plus tard.
Cela veut dire que 110 euros dans le futur est équivalent à 100 euros maintenant.
La valeur actualisée des 110 euros dans le futur est 100 euros.

La conséquence c’est que je ne peux pas directement comparer le coût de l’investissement présent
et les recettes futures. Je dois comparer le coût présent et les recette futures actualisées.
Il faut que je transforme les recette futures dans leur valeur actualisée, et c’est à ce moment là que je
peux faire une comparaison.

Partons d’un exemple, et supposons que le taux d’intérêt est de 20 %, l’agent qui place 100 euros,
obtient au bout d’1 an, 120 euros, et 144 euros au bout de 2 ans.
144 = 100(1+20/100)(1+20/100) = 100 (1+20/100)²
Au bout de n années j’aurai 100(1+20/100)n

Donc si on généralise : une somme perçue aujourd’hui, a la même valeur que la même somme
perçue à la période n, multipliée par (1+r)n avec r = le taux d’intérêt.
Une somme perçue à l’instant n a la même valeur que la même somme perçue aujourd’hui, divisée
par (1+r)n.

Et du coup, une somme perçue à la période n, a pour valeur actualisée : Sn/(1+r)n

Et donc, cela veut dire, que au moment d’investir, le producteur va comparer le coût de
l’investissement et la valeur actualisée des recettes futures, donc d’un côté I 0, et de l’autre R1/(1+r),
et etc avec toutes les autres valeurs.

Et il n’investira que si I0 est inférieure à cette somme des recettes actualisées.


Il n’investira que si somme actualisée des recettes – I0 > 0 => « valeur actualisée nette de
l’investissement » = VAN de l’investissement.

2- Efficacité marginale du capital et demande de capital

Dans la Théorie Générale, Keynes utilise le concept d’efficacité marginale du capital, et ce concept
est très proche de ce qu’on a appelé la VAN de l’investissement.
L’idée est que avant d’investir, le producteur doit calculer l’efficacité marginale du capital (notée e)
pour cet investissement.
Il va tenir compte à la fois du coût de l’investissement, et des recettes actualisées de cet
investissement, et pour chaque projet d’investissement on peut faire ce calcul.

Keynes nous dit assez logiquement que le producteur va privilégier le projet pour lequel l’e est la
plus forte.
Keynes ajoute une idée supplémentaire : il nuance en disant que avant d’investir, le producteur
procède à une dernière opération : il compare l’e, et le taux d’intérêt.
Si le taux d’intérêt est supérieur à l’e, alors le producteur ne va pas investir, il va préférer placer son
argent.

Projets d’investissement pour lesquels il calcule l’e, pour ensuite pouvoir les classer selon la valeur
de leur e, et enfin il compare e au taux d’intérêt :

I1 → e 1
I2 → e2 Si on suppose que e4>e1>e2>e3
I3 → e 3
I4 → e 4

Point crucial : voir que dans cette conception, l’investissement (ce que K appelle la « demande de
capital ») est une fonction décroissante du taux d’intérêt, parce que plus le taux d’intérêt, moins
d’investissements sont faits.

Cf graphique de noémie

3- Profitabilité et investissement

Ce concept de profitabilité a été forgé dans les années 60, par un économiste américain : James
Tobin, ce qui consiste simplement à reformuler l’analyse Keynésienne.
Ce qu’il appelle profitabilité de l’investissement est la différence entre ce que l’investissement
rapporte et ce que l’investissement coûte :
→ ce que rapporte l’investissement dépend de la rentabilité du capital, et il considère qu’on peut
mesurer cette rentabilité en regardant simplement l’EBE (profit réalisé par l’entreprise), ou mieux
encore ce qu’on appelle le taux de marge de l’entreprise : (EBE/VA) x100
→ ce que coûte l’investissement dépend du taux d’intérêt, car : l’entreprise pour financer son
investissement a eu recours à un emprunt et va devoir payer un taux d’intérêt, et si elle investit sans
emprunter après avoir accumulé, et en investissant, et en finançant elle même son investissement,
elle se prive du revenu qu’elle aurait pu obtenir si elle avait placé son argent, et donc elle se prive
du taux d’intérêt → donc quelque soit le cas de figure, le taux d’intérêt représente bien un facteur
déterminant dans l’investissement.

Dernier raffinement : proposé par Malinvaud, économiste français, qui a complété la théorie de
Tobin en précisant qu’il ne suffit pas que la profitabilité soit positive pour qu’il y ait investissement,
il faut qu’elle soit significativement positive. C’est à dire que si c’est juste un tout petit positif,
l’entreprise a de fortes chance de ne pas investir.

Ce qui explique cela sont 2 caractéristiques de l’investissement : il est toujours risqué, en univers
incertain, et les agents n’aiment pas le risque. Le risque quand j’investis est que cela ne serve à rien.
Et puis aussi, l’investissement est très largement irréversible, une fois que la décision a été prise,
cela engage pour de très nombreuses années, car il est très compliqué pour une entreprise de
revendre les machines dont elle voudrait se débarrasser, alors que pour les placements financiers,
l’entreprise peut les revendre facilement et sans trop de pertes.
Empiriquement, il y a eu des études, pour voir si on pouvait vraiment relier profitabilité et
investissement, dans différents pays :

ex : étude parue dans la revue économie et statistiques (revue de l’INSEE), qui essayait de chiffrer
l’évolution de la profitabilité entre 1965 et 1999. L’étude montrait que cette profitabilité était plus
faible en Europe qu’aux EU, notamment particulièrement faible en France, surtout sur la période fin
des années 80, début des années 90.

→ en France était menée une politique de désinflation compétitive, il faut réduire l’inflation, avec
l’idée que si on réduit l’inflation cela permettrait aux entreprises françaises d’avoir des prix moins
élevés et d’avoir des prix plus compétitifs. Et pour freiner l’inflation, il faut augmenter les taux
d’intérêts, et donc les années 80 sont marquées par une augmentation des taux d’intérêts. Pour la
profitabilité donc, cela valide la théorie exposée.

C) le coût relatif des facteurs de production

Idée est que, pour atteindre un niveau de production, comme on l’a vu en micro, l’entreprise a le
choix entre plusieurs combinaisons productives (ce qui permet de tracer des courbes d’isoquantes),
et elle va choisir la combinaison la moins coûteuse (droite d’isocoût).
L’idée est que si à un moment donné on a un coût du travail élevé, l’entreprise va avoir tout intérêt à
modifier sa combinaison productive et à remplacer du travail par du capital.
Ad, elle va devoir investir.
Inversement, si le coût du travail est très faible, l’entreprise n’est pas incitée à investir.

Donc le niveau d’investissement dépend du coût relatif (= comparé) des facteurs de production.

Ajoutons que ce raisonnement suppose qu’on est capable de mesurer le coût du travail et le coût du
capital. Pour le coût du travail : consensus entre les économistes, c’est le salaire nette + cotisations
sociales.
Pour le capital : pas de consensus entre les différents auteurs :
- Jorgenson, qui définit ce qu’il appelle le « coût d’usage du capital », mesure la plus
fréquemment retenue. Il dit qu’il faut prendre en compte des éléments : prix d’acquisition des biens
d’équipement, le taux de dépréciation de ces machines (= rapidité avec laquelle ces machines vont
s’user), et le taux d’intérêt réel.
- d’autres économistes ont considéré qu’il fallait ajouter d’autres éléments : Crépon et
Gianella, qui disent qu’il faut ajouter un élément sur la fiscalité qui pèse sur les entreprises : on peut
avoir parfois des impôts sur le capital, et parfois des remises fiscales pour les entreprises qui
investissent.

La théorie semble simple, mais dans la pratique c’est compliqué car cela reste difficile de mesurer le
coût du capital.

D) Les contraintes de financement

1- les différentes formes de financement

Une entreprise qui veut investir a plusieurs modes de financement :

→ le financement interne, qu’on appelle aussi « auto-financement », l’entreprise finance avec ses
fonds propres, son épargne brut.
→ mais souvent l’entreprise doit recourir à un financement externe, qui est soit direct soit indirect :
- indirect : emprunt à une banque, par l’intermédiaire d’un prêteur.
- direct : se finance directement sur le marché financier : émet des titres financiers (actions et
obligations), et les agents qui les achètent vont lui permettre d’investir.

Pour donner un ordre d’idée : en France, l’auto-financement est très important, c’est le mode de
financement privilégié (en 2020, pour les entreprises, 89 % de leurs investissements étaient auto-
financés), et le financement indirect reste fort aussi dans les 10 % qui reste. Donc il serait faux de
croire que les marchés financiers jouent beaucoup.
Mais depuis les années 80 on assiste malgré tout à une montée du financement externe direct.
On parle d’une désintermédiation financière, ce qui peut paraître un peu abusif, mais c’est un
terme qui s’est répandu, et on a même parfois utilisé l’expression pour dire qu’on était passés d’une
économie d’« endettement » à une économie de « marché ».
Ce qui est vrai c’est qu’il y a une légère montée.

Ce recours accru peut s’expliquer par :

→ des facteurs conjoncturels (désinflation compétitive → hausse des taux d’intérêts → emprunts
bancaires moins intéressants), ce qui fait que les actions sont + intéressantes
→ facteurs structurels : années de développement des marchés financiers autour du monde, ce qui
est favorisé par une déréglementation, un décloisonnement des marchés nationaux, mais aussi
l’utilisation des nouvelles technologies, ce qui rend tout plus rapide, facile et efficace.

L’approche néoclassique considère que la forme prise par le financement est neutre et n’a pas
d’impact, c’est ce que dit le « théorème de Modigliani-Miller », qui en 1958 a établi cela.
Mais ce théorème n’est valide que sous certaines hypothèses et des hypothèses très fortes,
notamment :
→ suppose un parfait fonctionnement des marchés financiers, avec notamment l’idée que les
entreprises peuvent s’endetter sans difficulté lorsqu’elles le souhaitent.

En réalité, les hypothèses ne sont pas remplies, et la forme de financement peut avoir un impact sur
l’investissement.

2- Le modèle du canal du crédit et la prime de financement externe

Idée de base : dans les faits, l’accès à l’emprunt peut être difficile pour les entreprises, et elles vont
faire face à ce qu’on appelle une contrainte de financement, et s’il y a une contrainte de
financement, et cela va avoir un effet négatif sur l’investissement.

Cette contrainte est plus ou moins forte selon les entreprises, et elle semble dépendre de 3
variables :

→ le niveau des profits réalisés par l’entreprise : une entreprise qui fait beaucoup de profits pourra
assez facilement faire face à ses obligations de remboursement, et si elle est sûre de rembourser, elle
aura un accès facile à l’emprunt.
→ le niveau d’endettement préalable de l’entreprise : une
→ la taille de l’entreprise

à partir de cela, a été établi le modèle du « canal du crédit », qui va permettre de retrouver ces
éléments de bon sens. Il part du principe qu’il y a asymétrie d’information entre le préteur et
l’emprunteur :

→ le prêteur est moins bien informé que l’emprunteur sur la situation économique réelle de
l’emprunteur => problème de sélection adverse
→ on peut craindre que l’emprunteur, une fois le prêt accordé, n’adopte pas le comportement
souhaité par le prêteur => problème d’aléa moral

Du coup le prêteur considère qu’il est risqué de prêter et va donc ajouter au taux d’intérêt habituel,
une sorte de prime de risque, qu’on appelle la prime de financement externe.
Et le modèle rajoute que cette prime de financement externe va être plus ou moins élevée selon les
caractéristiques de l’emprunteur : si l’entreprise est de petite taille, endettée et avec peu de profits.

L’idée essentielle ici est de voir que le niveau d’investissement va dépendre des contraintes de
financement qui pèsent sur les investisseurs.

E) Les facteurs psychologiques

L’investissement est toujours un pari, il repose sur des anticipations. C’est une décision qu’on prend
dans un contexte d’incertitude. Va intervenir dans la décision de l’investissement un certain nombre
de facteurs psychologique qui vont traduire la manière dont l’investisseur gère l’incertitude (s’il est
optimiste il sera plus poussé à investir, s’il a le goût du risque il fera plus d’investissement). S’il a
une faible préférence pour le présent il va davantage investir que celui qui a un fort intérêt pour le
présent.
Facteurs psychologique mis en évidence par Schumpeter : l’entrepreneur est quelqu’un qui a des
traits de caractères particuliers.
Keynes : A partir du moment ou les agents sont en incertitude, ils vont se laisser guider par leur
instinct animaux. Si on veut comprendre la décision il faut tenir compte du besoin d’agir plutôt que
de ne rien faire et des humeurs, des digestions et des réactions au climat (irrationnel d’un point de
vu économique). L’importance est que les agents agissent parfois de manière irrationnel, ce qui
compte c’est les instants, ce sont les Keynésiens fondamentalistes.

Akerlof et Schiller, 2009 un livre qui s’appelle les esprits animaux. Ils ont chercher a montrer
comment ces facteurs psychologiques déterminent en grande partie la fiance et l’économie.

II- La modélisation des comportements d’investissement : des résultats souvent décevant.

Il y a 5 grandes théories :
- l’accélérateur (hausse demande => hausse production => hausse investissement),
- coût relatif des facteurs de production (baisse coût relatif du k => hausse investissement)
- profitabilité de l’investissement (hausse profitabilité => hausse investissement)
- contraintes financières (baisse contraintes => hausse investissement)
- facteurs psychologiques (baisse de l’incertitude => hausse de l’investissement).
On va confronter ces théories aux faits et essayer de regarder si il existe une corrélation entre ces
variables et le niveau d’investissement :
Pour la théorie de l’accélérateur, on a testé le lien entre le niveau de la production et le niveau
des investissements (c’est plus compliqué à mesurer par rapport à la demande). On va donc tester
la variable taux de croissance.
Pour la théorie du coût relatif des facteurs de production, on va tester le lien entre le coût
d’usage du capital et le taux d’investissement. Le taux d’intérêt fait partie du coût d’usage du
capital, on peut donc le comparer aux taux d’investissement.
Pour la théorie de profitabilité de l’investissement, on prend un estimateur du profit donc on
regarde le taux de marge et l’investissement.
Pour les contraintes financières, on va vérifier les variables taux de marge, taille de l’entreprise,
taux d’endettement ou taux d’intérêt.
Pour les facteurs psychologiques, il existe des baromètres du niveau de confiance des chefs
d’entreprise. On peut également leur demander ce qu’ils pensent du niveau d’incertitude.
Il existe des études au niveau agrégé portant sur l’ensemble de l’économie nationale, mais aussi des
études à un niveau micro qui analysent seulement quelques entreprises.
Au niveau agrégé, les résultats sont décevants => il n’existe que deux variables corrélées au
niveau d’investissement :
Lien entre la demande (mesurée par le taux de croissance) et l’investissement
Lien entre le profit (mesuré par le taux de marge) et l’investissement
Pour les autres variables, il n’est pas dit qu’elles n’existent forcément pas : nous n’arrivons juste
pas à les démontrer grâce aux statistiques. Leurs effets pourraient être masqués par des effets
inverses = la théorie n’est pas forcément fausse.
Par exemple, dans les années 80 en France, le taux d’intérêt monte. Il devrait y avoir une baisse de
l’investissement, cependant on remarque une hausse. Inversement, dans les années 90, il y a une
baisse du taux d’intérêt : il devrait y avoir une hausse de l’investissement mais il va finalement
baisser (niveau le plus bas en France en 1995). Même si le taux d’intérêt est bas, la profitabilité est
faible. On a donc créé des modèles « accélérateur-profit ».
Cependant, même quand cela semble fonctionner, il faut rester prudent : il est difficile de les
interpréter. C’est le cas notamment du taux de profit et du sens de la corrélation : le taux de profit
et le taux d’investissement évoluent ensemble, mais on n’est pas sur de si le taux de profit influe sur
le taux d’investissement ou si ce n’est pas l’inverse.
Si l’on regarde les données individuelles d’entreprises (niveau micro), on va retrouver le taux de
marge, le taux de croissance mais également le coût d’usage du capital, la taille des entreprises et
l’incertitude. Le problème de ces études est que l’on ne peut pas généraliser les résultats.
On a donc des théories mais leur multiplicité montre la difficulté des économistes. Des causes
peuvent être masquées par d’autres déterminants…
Chapitre annexe 1 : L’égalité entre épargne et investissement
Chez les auteurs, il y a égalité entre épargne et investissement. Cependant les mécanismes de cette
égalité diffèrent selon les auteurs.
Pour les néo-classiques, l’épargne détermine le niveau d’investissement. On parle d’une égalité ex
ante = l’épargne détermine l’ « offre de fonds pretables ». Si il n’y a pas d’épargne, la demande de
fonds pretables (les emprunts) ne pourrait pas être satisfaite. Si l’offre de fonds pretables est faible,
la demande de fonds pretables est faible (demande investissement). D’après ces auteurs, à tous
moments, l’épargne et l’investissement vont être égaux et ce qui garantit cette égalité sont les
mouvements des prix (= le taux d’intérêt). (On part de l’épargne qui va fixer le niveau
d’investissement)
Pour les keynésiens, l’épargne s’ajuste sur le taux d’investissement : le niveau d’investissement
détermine le taux d’épargne. On parle d’une égalité ex post. Le niveau d’investissement
détermine le niveau de la demande, qui détermine ensuite le niveau de la production qui détermine
le niveau du revenu. Or, le revenu détermine également le niveau de l’épargne (plus il y a de
revenu, plus il y a d’épargne). Dans cette logique, le taux d’interêt ne garantit pas l’égalité entre
épargne et investissement.
Chapitre annexe 2 : Le multiplicateur d’investissement et ses limites
Quand une entreprise investit, elle demande des biens. Simplement, ces biens ne sont pas des biens
de consommation mais des biens de production. L’investissement est donc une demande. Cette
demande génère un revenu pour les producteurs de machine qui vont obtenir un revenu. Ils vont en
consommer une partie et réaliser une dépense de consommation, ce qui va générer un revenu pour
d’autres agents, qui vont également en consommer une partie… Il y a donc l’idée que
l’investissement créé des vagues successives de revenu et de consommation.
Cependant, les vagues sont d’ampleur de plus en plus faible car les individus ne consomment
qu’une partie de leur revenu. L’idée est qu’au total, si l’on additionne toutes ces vagues de revenu,
on obtient un montant plus élevé que le montant de l’investissement initial. On dit qu’il y a un
« effet multiplicateur » de l’investissement. Une variation de l’investissement entraîne par vagues
successives une variation plus que proportionnelle du revenu national. Donc delta(R) = k x
delta(I) (avec R revenu national).
On a : delta(I) => delta(R1) = I => delta(C1) = cR1 = cI => delta(R2) - cI => delta(C2) =
cdelta(R2) = c^2I => delta(R3) - c^2I => delta(C3) = cdelta(R3) = c^3I…
(Avec c = propension à consommer)
Somme des delta(R) = I + cI + c^2I + c^3I + … + c^nI = (1 - c^nI / 1 - c) = 1 / 1 - c

On va donc souvent axer des politiques keynésiennes de relance sur l’investissement dans le but
d’obtenir cet effet multiplicateur.

Supposons que la hausse de départ de l’investissement soit de 100 et que la propension à


consommer soit de 0,8. Le revenu national va augmenter de 100 x 0,8 à la deuxième vague donc de
80, troisième vague 80 x 0,8… = il y a donc une baisse des revenus jusqu’à ce que le phénomène
s’arrête, mais le revenu national augmente.
Dans ce modèle, on suppose qu’il n’y a pas d’échange avec d’autres économies (reste dans
l’économie nationale). Cependant, en réalité, une partie de la vague de consommation va aller sur
des biens étrangers => Somme des delta(R) devient 1 / 1 - c + m où m est la propension à
consommer des biens importés/étrangers. Plus m est important, plus le multiplicateur est faible.

Il y a cependant des limites au multiplicateur. On voit qu’une politique de relance sur


l’investissement n’est efficace que dans deux cas :
- Si les agents consomment une grande partie de leur revenu = si leur propension à consommer
est forte = si c est grand. Il faut également que la propension à consommer soit stable. Si elle est
instable, on a aucune garantie sur l’efficacité de la politique. Les politiques étant coûteuses, il
n’est pas prudent de les mettre en œuvre dans ce cas.
- Il faut que la propension à importer soit faible = il faudrait que les politiques de relance entre
partenaires commerciaux (différents pays) soient coordonnées.

Des auteurs vont contester l’idée que la propension à consommer doit être stable et élevée,
comme notamment Modigliani, Barro et Friedman. Ils considèrent que le revenu courant n’est
qu’un des revenus que l’on prend en compte et que le revenu important est le revenu permanent.

Augmenter le revenu présent n’a qu’un faible impact par rapport au revenu permanent = les
politiques sont inutiles. Barro considère même que cela n’a aucun impact : en augmentant le
revenu courant, on baisse le revenu futur et le revenu permanent ne se modifie pas. Pour ces
auteurs, les vagues de consommation n’existent pas car la consommation n’augmente pas avec le
revenu courant.
Quand la deuxième condition n’est pas respectée et que la propension à importer est élevée, la
politique échoue. Si l’on prend l’exemple des magnétoscopes dans les années 80 : les meilleurs à
l’époque étaient japonais. Les français se sont tellement précipités sur les magnétoscopes japonais
que le gouvernement a décidé qu’il fallait empêcher les importations. Comme cela est illégal, on a
décidé de mettre en place des mesures protectionnistes de contrôle autour de l’importation de ces
magnétoscopes. On a décidé d’importer tous les magnétoscopes à Poitiers et de les ré acheminer
vers les magasins = délais = les consommateurs ont préféré acheter des français plutôt que
d’attendre les japonais.

Certains économistes remarquent que ces politiques ont des effets pervers. Les néo-classiques vont
les critiquer en disant qu’elles entraînent une hausse de l’inflation (par la demande), qu’elles sont
inefficaces car elles augmentent la dette mais aussi qu’elles ont un « effet d’éviction ». Pour faire
des investissements, l’état est obligé d’emprunter sur des marchés financiers. Cependant, ces
emprunts de l’état vont assécher les marchés financiers = il n’y a plus de fonds pretables pour les
autres entreprises. En réalité, les investissement publics ne viennent pas s’ajouter aux
investissements privés mais viennent plutôt les remplacer (les évincer). Au total, l’investissement
n’augmente pas : seule la nature de l’investisseur change (il n’y a donc pas d’investissement
multiplicateur).
Dans les années 90, ces politiques de relance par la consommation et l’investissement vont être
progressivement abandonnées (vont revenir vers 2008). On voit même des économistes préconiser
des politiques inverses ou d’ « assainissement budgétaire » (opposé de Keynes) = il faut réduire le
déficit pour avoir une relance. Parmi eux, il y a notamment Giavazzi et Pagano qui considèrent que
les agents adoptent des comportements « anti-keynésiens ». En effet, si l’on augmente le revenu
des agents, le comportement keynésien serait de consommer. Dans comportement non-keynésien,
les agents ne modifient pas leur consommation. Selon Giavazzi et Pagano, ils vont diminuer leur
consommation (effet Barro amplifié). Si on admet cette hypothèse, en réduisant le revenu des
agents, les agents anti-keynésiens vont consommer plus car ils prévoient d’avoir plus plus tard.

Ces auteurs s’appuient sur quelques exemples empiriques : le cas de l’Irlande et du Danemark. Ces
deux pays ont subi un assainissement budgétaire et en même temps une hausse de la consommation
dans les années 80. En 1980, le Danemark est en déficit budgétaire et passe à un excédent
budgétaire en 1986. Le taux de croissance est passé de -20% en 1980 à 4% en 1986. Il y a
également une baisse sensible de l’épargne qui passe de 10% à 6% = les individus puisent dans
l’épargne. Cependant, cela ne marche que pour quelques pays, on ne peut donc pas généraliser au
reste du monde. Ces politiques d’assainissement budgétaire ont échoué dans plusieurs pays comme
en Grèce. D’autre part, en s’arrêtant sur le cas du Danemark, les résultats ne sont pas si probants. Il
se pose encore le problème du sens de la corrélation. Selon les auteurs, c’est l’assainissement
budgétaire qui a permis la croissance, mais il pourrait être considéré que d’autres éléments soient
responsables de cette réduction du déficit. On pourrait surtout penser que la croissance réduise le
déficit (=corrélation dans le sens inverse).

De manière générale, le débat sur l’efficacité des politiques de relance n’est pas clos. Si l’on
regarde l’exemple du FMI, cela se voit. Le FMI finance des programmes de développement pour
certains pays. Cependant, il n’est pas obligé de le faire : souvent, il va accepter les prêts seulement
si ces pays adoptent les politiques économiques que le FMI préconise (celles des pays
développés). Dans les années 70-80, avec le Consensus de Washington, le FMI et la Banque
Mondiale préconisent, voire forcent l’adoption de politiques économiques libérales. On va imposer
aux pays au développement une libéralisation du capital, une stabilisation (assainissement
budgétaire) et une privatisation. On s’oppose donc alors aux politiques de relance keynésiennes.
Cependant, pour les pays en développement qui ont adopté ces politiques, les effets constatés sont
néfastes : hausse de la mortalité infantile, baisse de l’éducation dans le primaire… Le FMI a donc
reconnu le problème et a arrêté d’imposer ces politiques au début des années 2000. En 2002,
Stiglitz, économiste en chef de la Banque Mondiale démissionne après leur échec et publie « La
Grande Désillusion » qui va contribuer au basculement vers des politiques plus keynésiennes.

Les débats vont se cristalliser autour du multiplicateur : pendant longtemps, le FMI a considéré
que le multiplicateur ne marchait pas (ils estimaient sa valeur dans leur modèle à 0,5 = les effets
d’une politique de relance sont plus faibles que l’investissement de départ). Il a cependant du
reconnaitre qu’il s’était trompé et qu’il avait sous-estimé la valeur du multiplicateur en révisant sa
valeur à la hausse (de 0,9 à 1,7) => les politiques de relance ont des effets plus importants que ce
que le FMI pensait et les politiques d’assainissement budgétaire ont des effets plus importants
également (=multiplicateur à la baisse). Ils ont donc admis que les politiques d’austérité avaient des
effets plus négatifs que ce qu’ils pensaient.

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