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Les négociants marocains qui font fabriquer des tapis pour les besoins de la place,
des environs, des villes de l’intérieur ou de l’exportation, s’adressent à une femme
entrepreneur, une mâlema (maîtresse), qui dirige une sorte d’ouvroir où les femmes viennent
travailler en commun et reçoivent la nourriture et la modique somme de 0 fr.25 par jour .
Le statut des femmes au Maroc reste cependant assez précaire. Ainsi, les
statistiques montrent que le pourcentage d’analphabétisme est beaucoup plus élevé chez les
femmes (surtout rurales) que chez les hommes ; l’équité salariale entre femmes et hommes est
encore un vœu pieu ; l’accès au financement bancaire reste encore très difficile pour les
femmes, etc.
En outre, la réalité marocaine montre que, quel que soit son métier par ailleurs, la
femme doit d’abord s’occuper de son foyer. Cela veut dire que la femme-entrepreneure au
Maroc est d’abord dualiste dans la mesure où elle doit s’occuper de son affaire et de sa famille
en même temps. D’une manière générale, il est possible d’identifier les types suivants de
femmes-entrepreneures dans lesquels le dualisme précédemment évoqué est une constante :
Les femmes artisanes : ce type constitue le prolongement des femmes-
entrepreneures d’autrefois qui se spécialisaient dans des activités artisanales comme le tissage
et le nouage de tapis ;
Les femmes industrielles : cette catégorie recouvre toutes les femmes
s’adonnant à des activités industrielles et à des professions libérales modernes ;
Les femmes rurales : ce type renvoie à toutes les femmes qui travaillent dans
les champs mais s’adonnent également à des activités artisanales dont la production est
destinée à l’autoconsommation.
Les femmes militantes : cette catégorie correspond à la catégorie des femmes
radicales de Goffey et Scase évoquée dans l’étude de Cromie et Hayes (1988). Il s’agit de
femmes œuvrant dans des associations politiques et féministes en vue d’améliorer le sort des
femmes au Maroc.
Une particularité de l’entrepreneuriat féminin au Maroc mérite particulièrement
d’être notée. En effet, sous l’instigation des programmes étrangers d’aide au développement
(ACDI, USAID, etc.) ainsi que des organisations internationales (CNUCED, ITC, etc.), des
associations de femmes-entrepreneures ont pris naissance et ont connu un grand essor.
Plusieurs autres associations n’ont pas tardé à faire leur apparition dans le sillage de ces
premières initiatives et sont aujourd’hui très dynamiques dans la promotion de
l’entrepreneuriat féminin dans tous les domaines. Cependant, les activités les plus convoitées
par les femmes-entrepreneures restent le tapis, la décoration, l’ameublement, la pâtisserie, les
garderies, et les services.
Malgré ces avancées, les femmes entrepreneures continuent de faire face à des
obstacles importants, notamment en matière d'accès au financement. Les femmes ont souvent
du mal à obtenir des prêts pour leurs projets en raison de la réticence des prêteurs à accorder
des prêts aux femmes et de la nécessité de fournir des garanties supplémentaires.
Ces types et formes d'entrepreneuriat ne sont pas exhaustifs, mais ils offrent
une idée générale de la diversité de l'entrepreneuriat au Maroc.
Le Maroc est un pays où les femmes sont confrontées à des inégalités de genre
importantes, qui ont des répercussions négatives sur leur participation à la vie économique. La
discrimination de genre est ancrée dans les traditions culturelles, qui favorisent le rôle de la
femme au sein du foyer plutôt que dans le monde du travail. Par conséquent, l'accès des
femmes aux ressources économiques et financières est limité. Les femmes entrepreneurs au
Maroc font face à de nombreuses barrières, notamment le manque d'accès aux financements,
aux réseaux d'entreprises, aux marchés, aux technologies et à la formation professionnelle.
Les femmes marocaines en âge d’activité (15 ans et plus) représentent 12,3
millions d’individus, soit la moitié de la population totale. Elles résident pour la majeure
partie en milieu urbain (60,3 %). Leurs degrés de scolarisation restent très faibles, malgré les
efforts des pouvoirs publics depuis les années 1990. Moins d’un tiers de la population
féminine en âge de travailler possède un diplôme et plus de la moitié sont analphabètes. La
pauvreté, l’enclavement et la faible qualité des infrastructures entravent l’accès à l’éducation,
en particulier des femmes dans les milieux ruraux (Hachelouf, 1991 ; Haut-Commissariat au
Plan, 2012).
Le taux d’activité féminine (25,7 %) est un des plus faibles de la région MENA
(HautCommissariat au Plan, 2014 ; ministère de l’Emploi et des Affaires sociales, 2013-2014)
et reste nettement inférieur à celui des hommes (72,3 %). Les femmes sont plus touchées par
le chômage que les hommes, surtout dans les zones urbaines (20,6 % par rapport à 11,5 %
pour les hommes (Barkallil, 2006 ; Benradi, 2006 ; Lakhoua, 2010 ; Mejjati, 2001 ; Zirari,
2006). Les femmes diplômées sont particulièrement exposées, en raison notamment de la
baisse importante des créations d’emplois dans le secteur public (Haut-Commissariat au
Plan, 2013). Les femmes mariées sont également moins nombreuses sur le marché
du travail que les femmes célibataires ou divorcées (Ministère de l’Emploi et des Affaires
sociales, 2013-2014). Le faible taux d’activité féminin est lié à une répartition traditionnelle
des rôles familiaux qui poussent les femmes à donner la priorité à la vie familiale, mais aussi
à des pratiques discriminatoires dans les entreprises marocaines (Haut-Commissariat au Plan,
2013 ; Paterno, Gabrielli et D’Addato, 2008). Les femmes salariées ont un accès restreint aux
postes à responsabilités, des salaires moindres et un faible engagement syndical (Invest RH,
2015 ; ministère de l’Emploi et des Affaires sociales, 2013-2014 ; Naciri, 2002 ; Rapport
national Beijing, 2015 ; Soudi, 2002). Elles restent nombreuses dans le secteur informel, non
reconnu et précarisé (Akinboade, 2005 ; Mejjati, 2001, 2006 ; Paterno, Gabrielli et D’Addato,
2008 ; Rapport national Beijing, 2015 ; Zirari, 2006), surtout dans les milieux ruraux et
périurbains (Barkallil, 2005 ; Benradi, 2012 ; Mejjati, 2001, 2006).
Contexte familial
Contexte professionnel
Contexte institutionnel
Cependant, de fortes résistances subsistent sur le terrain pour rendre ces réformes
opérationnelles. D’une part, les textes juridiques revêtent un caractère sacré en raison du lien
existant entre les lois marocaines, le fiqh (droit musulman), le hadith (paroles et vécu du
Prophète) et le Coran (parole de Dieu) (Benradi, 2006). Les changements au niveau légal ont
bien sûr amélioré le statut de la femme, mais sans jamais enfreindre les lois de la Charia (lois
islamiques). Par exemple, le nouveau code de la Famille ne remet pas en question la priorité
des garçons en matière d’héritage familial (Bessis, 2007). D’autre part, la lourdeur des
procédures administratives, la complexité de la règlementation, les coûts de production
élevés, les difficultés d’accès au financement, et le manque d’accompagnement et de suivi
concret constituent des obstacles importants pour les femmes entrepreneures (Banque
mondiale, 2012 ; Hamdouch, Berrada et Mahmoudi, 2006).
Contexte socioculturel
Depuis le début des années 1990, ces jugements et pratiques ont commencé à
reculer progressivement (Lfarakh, 1998) et le travail des femmes est de plus en plus valorisé
(Nair, 2003). Un nombre croissant d’hommes acceptent aujourd’hui que leurs épouses
travaillent en dehors du foyer et voyagent pour leurs affaires (Haut-Commissariat du Plan,
2013), une situation inenvisageable il y a quelques années (Naciri, 2002). Ces évolutions sont
la conséquence de profondes mutations socioéconomiques, de la scolarisation des filles, de
l’avancée des droits des femmes, de l’entrée d’effectifs féminins sur le marché de l’emploi, de
l’apparition de la famille nucléaire et de réformes juridiques en faveur de l’égalité femmes-
hommes.
Celle-ci reste caractérisée par une culture patriarcale (Benradi, 2012 ; Enhaili,
2006). Des études soulignent que les représentations sociales restent dominées par la
suprématie du masculin et par une distinction radicale entre les genres, au détriment du
féminin (Benradi, 2006 ; Zirari, 2006). La participation des femmes à la prise de décision est
stigmatisée, notamment dans les milieux périurbains et ruraux, où un ménage identifié via la
mère est systématiquement perçu de façon négative (Benradi, 2006, 2012 ; Harrami, 2005).
Le monde politique est considéré comme un espace masculin (Harrami, 2005 ; Zirari, 2006) et
la participation politique de la femme marocaine reste faible (Enhaili, 2006). Le Maroc se
situe en queue de peloton dans les classements internationaux concernant l’égalité entre les
genres, la participation économique des femmes, et les politiques et mécanismes d’appui des
entreprises féminines (Rapport du Conseil économique, social et environnemental, 2014).