Vous êtes sur la page 1sur 140

Le monde en développement s’urbanise très rapidement et a donc besoin d’aide : bidonvilles, inévitable

pauvreté sans planification, financements

2006–Lorsqu’on compare les images satellites des villes dans le monde d’aujourd'hui avec celles d’il y a
quelques années, une expression vient immédiatement à l’esprit : expansion tentaculaire. Elle décrit bien cette
urbanisation galopante que l’on observe partout.

Mais il y a plus. D’Accra, au Ghana, à Bandung, en Indonésie, en passant par Alexandrie, en Égypte, la taille des
villes augmente plus rapidement que leur population. C’est ce que dit un groupe de chercheurs de la Banque
mondiale qui a étudié les changements dans 120 villes au cours de la dernière décennie.

L’urbanisation n’est plus seulement un phénomène des pays riches. L’année prochaine, elle va en ville.
Pratiquement, ce sont les projections de croissance des populations urbaines, surtout dans le monde en
développement, qui seront déterminantes pour la croissance démographique mondiale.

Au cours des 30 prochaines années, la population des villes des pays en développement va doubler, passant de
2 milliards à 4 milliards. Cette croissance est 5 fois plus rapide que celle des populations urbaines du monde
industrialisé.

En 2030, l’Afrique et la Chine auront chacune 400 millions de nouveaux résidents urbains en plus. En Inde, il y en
aura 300 millions de plus.

La surface des villes elles-mêmes va tripler, avec pour résultat une augmentation du coût de l’infrastructure
nécessaire, des ressources et autres coûts de l’urbanisation. C’est ce qu’explique Katherine Sierra, la Vice
Présidente de la Banque mondiale pour l’Infrastructure.

Madame Sierra s’est rendue au Forum urbain mondial à Vancouver, au Canada, du 19 au 23 juin 2006, pour y
faire part du message de la Banque mondiale sur la rapidité de l’urbanisation dans le monde.

« Les pays, et la communauté internationale ne peuvent faire que très peu pour inverser cette croissance de
l’urbanisation dans les pays en développement, » dit Madame Sierra.

Il est essentiel de prendre dès aujourd'hui des mesures pour préparer les villes à faire face à cette situation, si
l’on veut éviter que cette croissance débouche sur une expansion non planifiée du tissu urbain, avec « des zones
existantes de bidonvilles, mal situées, des ghettos non desservis, souvent en bordure des villes, » explique
Madame Sierra.

Il est temps, dit-elle,  « d’accepter la réalité de l’expansion urbaine, de mettre de côté la question de savoir si
c’est bon ou non, et de se préparer en conséquence pour y faire face. » 

La planification est indispensable

Pour le Groupe du développement urbain de la Banque mondiale, on en est plus aujourd'hui au stade où l’on
pourrait penser à réduire les problèmes des villes, tels les bidonvilles, les maladies, le manque d’eau potable et
d’assainissement, en arrêtant ou en inversant les migrations vers les villes. Comme le dit Robin Rajack, Spécialiste
principal du développement urbain : « Plutôt que de tenter de mettre en place des programmes incitatifs pour
encourager les gens à rester à la ferme, le Groupe urbain préfère se préparer à la nouvelle vague de population
urbaine ».

Les villes qui connaissent à la fois une croissance de la population et une croissance économique sont des zones
inévitables d’expansion. C’est ce que fait valoir une étude de 2005,The Dynamics of Global Urban Expansion (la
Dynamique de l’expansion urbaine mondiale), par Shlomo Angel, Stephen C. Sheppard, et Daniel L. Civco.

« Avec l’augmentation des revenus, les gens veulent plus d’espace, de sorte que la taille des villes augmente
plus rapidement que leur population, au fur et à mesure que les conditions de vie s’améliorent, » dit Patricia
Annez, Conseillère en matière urbaine pour le Département des transports et du développement urbain.

« Mais les pays ne devraient pas nécessairement essayer d’arrêter la croissance des villes,» dit Annez.

« La ville est un lieu de croissance économique rapide, » dit-elle. « Tous les pays dont la croissance par habitant
a dépassé celle des États-Unis au cours des 20 dernières années doivent leur croissance essentiellement à leurs
secteurs urbains, essentiellement dans les services et l’industrie manufacturière, et beaucoup moins à leur
secteur agricole. En Chine, la croissance de ces secteurs a dépassé de plus de deux fois celle de l’agriculture. »

« Les pays ne pourront pas sortir de la pauvreté sans croissance urbaine, » ajoute Annez. « En fin de compte, il
ne faut pas voir la croissance des villes comme étant nécessairement quelque chose de mauvais. Au contraire, il
s’agit d’un élément nécessaire à une économie dynamique mais cette croissance demande à être gérée. »

Les principales questions auxquelles auront à répondre les décisionnaires au niveau local, national et
international sont de savoir tout d’abord quelle sera la taille de l’expansion des villes, et que faudra-t-il faire pour
s’y préparer. C’est ce que rapporte l’étude Global Urban Expansionqui estime qu’au taux de croissance actuel, les
gouvernements des pays en développement auront à construire en moyenne « une nouvelle ville d’un million
d’habitants par semaine pendant les 40 prochaines années. »

Cependant, très peu de gouvernements se préparent activement pour cette croissance de la population urbaine.
Il y a à cela plusieurs raisons. Selon l’étude, d’une part, « l’horizon de planification des politiciens est à très court
terme, et ils sont mal à l’aise à l’idée d’une planification et d’une préparation à très long terme en vue d’une
expansion urbaine bien planifiée » ; d’autre part, les attitudes qui prévalent à l’heure actuelle s’opposent à la
croissance urbaine.

Les besoins existants et les besoins de l’avenir

L’étude accuse des organisations comme la Banque mondiale, les banques régionales et les Nations Unies de ne
pas encore avoir eu ce qu’elle appelle les « dialogues critiques » avec les pays, ni même conçu et mis en œuvre
des « programmes d’investissement efficaces pour relever ce défi. »

« Nous sommes confrontés aux erreurs du passé. Il s’agit de ne pas les répéter. Il faut donner à l’humanité une
seconde chance : nous avons besoin aujourd’hui de construire de nouvelles zones urbaines, qui seront au
minimum équivalentes en taille aux villes que nous avons déjà construites. Mais nous devons faire beaucoup
mieux que ce que nous avons fait, et nous devons le faire en très peu de temps. »

La perspective de devoir entreprendre des projets majeurs d’infrastructure et de mettre en place des plans
urbains angoisse les collectivités locales qui sont déjà confrontées à un nombre très élevé de personnes pauvres
qui ont besoin de service et de logement, dit Rajack.

« Comment peut-on persuader un maire, déjà confronté au défi de donner à ses administrés des services
essentiels avec des ressources très limitées, de prendre du recul par rapport aux besoins pressants immédiats, et
de se pencher sur les besoins des vagues de population de demain? » demande Rajack.

« C’est un peu la quadrature du cercle, mais la réalité est que si nous ne le faisons pas, nous serons confrontés à
tout jamais à cette situation de quadrature du cercle. »
Depuis que la Banque a créé un Groupe de développement urbain en 1972, elle a consenti des prêts pour un
montant total de 25 milliards de dollars EU destinés à des projets urbains.

Le programme de prêt de la Banque dans d’autres domaines, tels la santé, l’éducation, l’énergie, et les
transports, profite également aux zones urbaines. En 2005, le montant total des projets qui ont bénéficié à des
villes atteignait 7,1 milliards de dollars EU.

« Mais la Banque est un acteur de relativement petite importance dans le domaine du financement urbain, » dit
Larry Hannah, Économiste principal.

« Elle peut avoir de l’influence par ses idées, ses appels à l’action, et ses relations avec les Organismes non
gouvernementaux et les collectivités locales, » dit-il.

La Banque a également aidé les gouvernements à élaborer des politiques meilleures pour faire face aux
questions pressantes comme des logements à prix abordable, en « travaillant dans le sens des processus du
marché plutôt qu’à leur encontre, et en ciblant les ressources limitées des pouvoirs publics pour en faire des
subventions susceptibles d’atteindre un grand nombre d’habitants pauvres des villes » dit Annez.

« Des programmes efficaces sur le plan des coûts, comme l’amélioration des bidonvilles qui peut fournir des
infrastructures essentielles, plutôt que des programmes de logements subventionnés qui sont très onéreux et ne
peuvent pas être multipliés à grande échelle, ont permis d’aider des millions de gens » dit-elle.

Toujours selon Annez, le développement des bidonvilles s’explique en partie à cause du coût élevé des terrains
urbains dans les pays pauvres. A Dacca, la capitale du Bangladesh, dont le nombre d’habitants pourrait atteindre
22,8 millions  en 2015 selon les projections des Nations Unies, et où un tiers de la population vit dans des
bidonvilles, le prix du terrain approche celui des faubourgs de Manhattan, dit Annez (où commence la citation
pour mettre les guillemets ?).

« Mais souvent, malgré la médiocrité des conditions, les villes paraissent aux gens un endroit bien meilleur pour
y vivre que les campagnes d’où ils viennent, » dit-elle. Les familles qui émigrent à Dacca peuvent augmenter leurs
dépenses mensuelles de ménage d’environ 40 pour-cent en moyenne, selon une étude récente de la Banque
mondiale sur la pauvreté urbaine au Bangladesh. L’incidence de la pauvreté à Dacca a chuté de près de 15 points
de pourcentage, malgré la rapidité de la croissance démographique, » note Annez.

« Nous avons maintenant une occasion de prendre avantage de l’expansion urbaine au niveau mondial pour
réduire la pauvreté telle que nous la connaissons, et augmenter la qualité de la vie pour tous, » dit Madame
Sierra.

« Notre engagement va demander de mieux comprendre des systèmes complexes, mais notre approche à la
résolution des problèmes devra avant tout rester simple, » dit-elle.

(a) indique une page en anglais.


En 2015, nos gouvernements nationaux définiront une liste de 10-15 objectifs pour guider les politiques de
développement durable des 15 années à venir.
Metropolis, CGLU, ICLEI, l’Alliance des villes et ONU-Habitat demandent l’inclusion d’un objectif spécifique consacré
à « l’urbanisation durable » dans le programme de développement de l’ONU après 2015.
Les Nations Unies étudient de nouveaux objectifs de développement. Nous devons nous assurer que le rôle des
gouvernements locaux est bien pris en compte dans ce nouveau programme de développement. Metropolis fait
appel aux villes pour épauler l’initiative du Réseau de solutions de développement durable de l’ONU
intitulé « Pourquoi le monde a besoin d’un développement urbain durable ».
Cet objectif permettrait non seulement aux villes de renforcer leurs capacités, mais leur octroierait également les
moyens de relever le défi de l’urbanisation durable. Il s’agit de répondre au besoin urgent d’une croissance
économique pour les villes qui contribuent à améliorer la qualité de l’environnement et à renforcer la cohésion
sociale. Cet objectif de développement urbain durable, dédié et autonome, vise à :
▪       Informer et centrer l’attention sur les défis urbains urgents et les opportunités futures
▪       Mobiliser l’ensemble des acteurs urbains et les habiliter à résoudre les problèmes de manière pratique 
▪       Répondre aux défis spécifiques en matière de pauvreté urbaine et d’accès aux infrastructures :
▪       Promouvoir la conception d’infrastructures et la fourniture de services, de manière innovante et intégrée
▪       Promouvoir la planification de l’utilisation des sols, ainsi qu’une concentration efficace des espaces
▪       Assurer la résilience face au changement climatique et viser à réduire les risques de catastrophes naturelles :
Lisez ici le document dans son intégralité « Pourquoi le monde a besoin d’un objectif de développement urbain
durable ».(lien hypertexte)
Comment participer ?
Les villes sont invitées à participer à la campagne. Pour appuyer l’initiative et diffuser le message des autorités
locales auprès de la communauté internationale, il vous suffit de signer le formulaire et de l’envoyer à post-
2015@metropolis.org.

Alors que les populations urbaines continuent d’augmenter à des rythmes soutenus, les dynamiques foncières dans
les villes du Sud dessinent depuis trente ans un bilan préoccupant : une croissance urbaine considérable[1]  La
croissance urbaine est ici entendue comme un processus... [1] qui n’est pas suffisamment accompagnée des
équipements et des aménagements nécessaires pour assurer aux habitants un cadre de vie décent ; et, par ailleurs,
la progression importante de marchés fonciers non régulés, qui aggrave les inégalités face à l’accès aux ressources
urbaines (solidarités, services, emplois, marchés, etc.) – notamment en termes de distance (Bertrand, 2010a). Ces
marchés fonciers sont également volatils et très interdépendants, ce qu’ont montré les crises financières récentes
liées au crédit immobilier (Aveline, 2008). Les politiques publiques, urbaines, sociales ou de logement, à destination
des populations urbaines sont elles-mêmes fragilisées par les effets du marché et on assiste globalement à une
dégradation des conditions d’accès aux ressources, non seulement pour les catégories les plus pauvres mais aussi
pour les classes moyennes.
2
Face à ces deux grands enjeux – l’intégration des populations pauvres à l’économie métropolitaine et la maîtrise de
l’urbanisation –, les acteurs du développement s’inquiètent de l’« ingouvernabilité » des villes : des
communautés politiques urbaines floues dans leur périmètre comme dans leurs institutions, une informalité qui
pénalise les échanges et le développement des activités économiques, et des pouvoirs publics fragiles. Face à ces
dysfonctionnements, depuis les années 1980, les politiques gouvernementales et d’aide internationale au
développement s’alignent sur les thèses néolibérales. Celles-ci visent en théorie à assurer la sécurité foncière et le
droit des individus à la ville (au sens strict de participation légale à la ville). En formalisant et en libérant les échanges
fonciers urbains, elles espèrent créer un marché attractif qui assure la rentabilité des investissements en
équipements collectifs. Dans cette idée, les effets positifs de la sécurité foncière alimentent à la fois la sécurité
sociale et économique des habitants et l’attractivité des marchés fonciers justifiant l’investissement dans les
équipements et l’aménagement. Aussi, dans les villes du Sud, deux processus majeurs opèrent de plus en plus sur
leur structure foncière : la privatisation du foncier public (ou foncier protégé) et le transfert des responsabilités de
l’urbanisation (équipement, intégration, aménagement) à des acteurs privés. C’est dans ce contexte que les thèses
de Hernando de Soto ont été largement diffusées et sont devenues, en vingt ans, le principal instrument théorique et
opérationnel pour maîtriser les logiques foncières et impulser des logiques de développement à partir du foncier. Ces
thèses consistent, d’une part, à assurer la sécurité foncière des occupants illégaux pour les intégrer au marché
formel et ainsi ressusciter un « capital mort » et, d’autre part, à formaliser les transactions foncières afin d’ouvrir le
foncier au marché pour stimuler les investissements et inciter au financement public ou privé de l’urbanisation (De
Soto, 2005). Pour atteindre ces objectifs, il faut passer par la formalisation du foncier et donc le titrement des
parcelles. Des programmes de titrement ont ainsi été adoptés, de Delhi à Mexico en passant par Le Caire, conçus
comme préalable au développement urbain et à la « gouvernance ».
3
Pour autant, ces thèses ont montré rapidement leur faible efficacité (Miranda, 2002), voire leur inapplicabilité
(Payne, Durand-Lasserve, Rakodi, 2009). Pour expliquer cet échec, on peut d’abord évoquer la complexité des
fonctions et des usages du sol : celui-ci supporte à la fois l’économie du logement, les politiques d’aménagement
urbain, et constitue aussi le socle des finances publiques (par la fiscalité ou la promotion immobilière). Ces territoires
sont aussi ceux du maillage politique et des élections qui déterminent des redistributions de l’accès au sol et au
logement. Autrement dit, la complexité du foncier urbain n’est pas prise en compte par la recette simplificatrice de
De Soto qui suppose une remise à plat des logiques foncières locales et une simplification des formes de
possession, via la propriété privée et la digitalisation des cadastres. Deuxième élément d’explication, l’illisibilité des
communautés politiques et la difficulté à faire coïncider territoires métropolitains, communautés urbaines
(habitants, électeurs, usagers), institutions et pouvoirs politiques (Fourchard, 2007 ; Lorrain, 2011), ce qui limite la
« capacité » des acteurs chargés de mettre en œuvre les programmes de titrement. En effet, les programmes de
titrement, développés avec l’aide d’outils et d’acteurs extérieurs (aide au développement, coopération
internationale), ne se réfèrent pas à une légitimité « locale » qui se révèle pourtant essentielle pour établir la
légitmité juridique du titre foncier et sa valeur économique dans le cadre d’un marché foncier formel. Troisième
point, l’épaisseur historique des situations foncières qui conduit à une grande complexité et à une diversité de statut
des occupants du foncier, à une superposition des droits, des productions juridiques locales et à leur enchâssement
avec des logiques sociales (Soares-Gonçalves, 2010).
4
Or, bien loin des objectifs d’intégration par le marché de ces programmes, on constate au contraire des processus
dangereux pour l’équilibre métropolitain : « l’éviction par le marché » des catégories les plus vulnérables (Durand-
Lasserve, 2006), la prolifération de programmes de promotion privée exclusifs, du type « gated communities » (Denis
dans ce numéro ; Capron, 2006) qui, loin de profiter à la communauté métropolitaine, ponctionnent au contraire les
rares ressources disponibles (en espace, en eau, en énergie) au profit de quelques privilégiés. Enfin, la
désindustrialisation des centres et la désaffection des bâtiments de zones portuaires privatisent un espace central
auparavant en partage : celui-ci est l’objet d’appropriations par le corporate capital[2]  Nous désignons par ces
termes, les grands groupes capitalisés... [2] pour développer des Central Buisness District (CBD) rentables sur le plan
foncier, le plus souvent sous l’affichage d’un partenariat public-privé. Autrement dit, il est temps de dresser le bilan
des effets des politiques néolibérales, dont celles de titrement qui les accompagnent en général, sur les conditions de
développement des métropoles du Sud. Celles-ci peuvent se résumer à un double transfert du foncier et des
missions de l’urbanisation vers le secteur privé. Ce dossier réunit des analyses qui appréhendent ce transfert et ses
conséquences à trois échelles différentes :
5
 i) L’échelle macro ou globale : on parle, depuis la fin des années 1990, d’une uniformisation des marchés
fonciers à l’échelle globale, notamment lorsque le corporate capital investit massivement dans la promotion
immobilière et dans le capital foncier (Denis dans ce numéro). Si l’uniformisation est difficile à établir (fragmentation,
segmentation des marchés, notamment en raison de leur illégalité), il reste que les stratégies d’investissement au
niveau global, tout comme les politiques internationales d’aide au développement, qui sont censées favoriser cette
intégration du marché et par le marché, ont un impact comparable sur les formes de l’urbanisation récentes (Denis,
Deboulet) ;
 ii) L’échelle des politiques urbaines : observant les principaux projets d’aménagement, on peut voir se
mettre en place différents dispositifs d’acteurs qui, sous les vocables de gouvernance et de partenariat, lient
municipalités ou instances métropolitaines, programmes fonciers des États, investisseurs privés, « société civile »,
etc... Différents articles de ce numéro permettent de saisir les transformations portant sur ces dispositifs, avec
l’arrivée de nouveaux acteurs (Douay) ou les impacts des programmes à l’échelle métropolitaine (Bautès  et alii,
Soares-Gonçalves), ou encore avec les déclinaisons métropolitaines des réformes foncières nationales (Salazar) ;
 iii) L’échelle « locale » ou habitante : par l’observation des mutations et des stratégies d’acteurs au
niveau des quartiers, des articles mettent en évidence la complexité des logiques foncières au niveau micro et leur
prisme sur la fabrication des espaces urbains, des identités collectives et des logiques sociales urbaines qui impactent
directement les différents programmes de développement, les (re-) localisent (Bautès et alii, Soares-Gonçalves,
Benjamin et Raman, Douay). Ces analyses entretiennent l’idée d’un réformisme néolibéral par exceptions (Ong,
2006), forcément recodé par les forces et les contradictions locales.
6
Avant de décomposer plus explicitement les modalités de ce transfert selon les types d’acteurs impliqués en amont
et en aval, nous revenons ci-après sur deux caractéristiques des structures foncières des villes du Sud  : le séquençage
particulier entre urbanisation et industrialisation, et l’importance des réserves foncières publiques ou protégées dans
la constitution d’un habitat dit illégal.
INDUSTRIALISATION ET URBANISATION DANS LES VILLES DU SUD

7
Les structures foncières des villes du Sud s’expliquent en grande partie par la chronologie particulière qui relie
industrialisation et urbanisation. Dans l’urbanisation des villes sud-américaines, l’activité industrielle est
certainement motrice de la croissance urbaine, ce qui se traduit sur le plan social par la structuration de classes
ouvrières industrielles qui portent le conflit social au premier plan dès le début du XX e siècle. Prépondérantes sur les
scènes politiques, y compris nationales, elles prennent alors la tête des masses urbaines sur lesquelles les régimes
populistes des années 1930 s’appuient. Pourtant, les ouvriers ne sont pas numériquement majoritaires en ville,
puisque la croissance démographique, dès cette première urbanisation, est avant tout le fait d’une population active
dans le secteur des services, notamment domestiques, et dans les secteurs informels, qui attirent le gros des
migrations rurales. Autrement dit, à des rythmes qui peuvent s’étaler jusqu’aux années  1970 et 1980, les grands pics
de croissance urbaine ne créent pas, comme ce fut le cas en Europe et en Amérique du Nord, une classe de salariés,
d’ouvriers et d’employés de services, qui constituera le socle des classes moyennes ayant accès au crédit bancaire et
à la propriété immobilière fondée sur la stabilité de l’emploi (Castel, 1991).
8
À l’inverse, les « classes populaires » qui constituent une majorité des populations urbaines dans les villes du Sud se
caractérisent par une faible formalité, tant de l’emploi que de l’habitat (Santos, 1971). Les conditions de subsistances
n’y ont pas profité de la structuration sociale qui caractérise la trajectoire ascendante des classes ouvrières et
moyennes des démocraties industrielles du Nord. Le maintien, voire la massification, des conditions de précarité et
de pauvreté chronique associées à l’habitat informel sont même une condition indispensable pour le succès de cette
industrie dépendante, ouverte à la compétition internationale et désormais globale. La main-d’œuvre, principale
variable d’ajustement, doit rester la moins cher possible et flexible.
9
Sur le plan des configurations urbaines elles-mêmes, on retrouve ce court-circuit dans la séquence
d’industrialisation. L’espace industriel qui s’impose dans les villes du début du XIX e siècle en Europe, que ce soit dans
des villes déjà importantes comme Paris ou Londres, ou dans des foyers industriels comme Manchester, est le point
de départ d’une structuration des formes urbaines. La localisation des sites industriels (près des voies d’eau, des
carrefours routiers, etc.) amorce le développement d’une trame d’infrastructures, de circulations et d’espaces
d’interfaces directement connectés aux centres-villes (Pinol, 2000). Or, ces trames structurent encore aujourd’hui les
espaces urbains, par exemple à travers les voies ferrées intra et interurbaines ou leurs traces réappropriées. Plus
encore, les espaces industriels ont déterminé l’implantation des zones résidentielles. Comme on peut le constater
pour le cas de Paris, autour des grands centres de production le long des berges, se développent de manière fractale
des semis urbains constitués d’activités intermédiaires dépendant de l’industrie, de logements populaires et de
logements-activités (Rouleau, 1985), qui constituent toujours le tissu dense et structurant des grandes
agglomérations. Ces logiques morphologiques, qui répondent avant tout à une équation spatiale posée par
l’industrie (interface, connectivité et proximité d’une part, diversification des activités d’autre part), débouchent
dans les villes européennes sur une polycentralité et un pavage d’espace fonctionnels supportés par des
infrastructures publiques (voies ferrées, berges, places et gares, boulevards). D’une certaine manière, les espaces
urbains liés à l’industrialisation ont une fonction de médiation de la distance et des effets centripètes. Cette
complexité urbaine des villes industrielles du Nord, sensible y compris dans les villes de moyenne importance, n’a
pas pu s’élaborer dans la même séquence dans les villes du Sud, industrialisées plus tardivement, plus brutalement
et surtout le plus souvent après les premières vagues de forte croissance démographique.
10
Le séquençage historique reliant urbanisation et industrialisation est évidemment une trame de lecture très
générale qui s’applique de façon variée dans les grandes villes du Nord comme du Sud. L’intérêt d’en dégager une
chronologie contrastée sur la période 1850-1980, qui oppose schématiquementdeux types de villes, est de souligner
la fonction médiatrice et régulatrice de la phase industrielle de la première génération pour les villes du Nord  : en
termes sociologiques et économiques, la médiation des classes de propriétaires ou d’accédants au crédit est
relativement absente dans les villes du Sud ; en termes d’espaces urbains, les villes du Sud sont privées de la
médiation des infrastructures liées à ces anciennes activités industrielles. Les distances et les nécessités de leur
franchissement s’y révèlent ainsi d’autant plus discriminatoires qu’elles ne sont médiatisées ni par une
polycentralité, ni par une organisation urbaine fondée sur l’accessibilité des espaces centraux entre eux  : en
l’absence de régulation de la pression exercée par le centre qui organise l’accès à l’emploi et aux ressources, la loi du
plus proche soumet les populations urbaines à des tensions importantes tant sur leur habitat que leur mobilité
(Bertrand, 2010b). Par conséquent, le marché foncier des villes du Sud est grossièrement déterminé par une
équation simple sur un axe : « distance aux ressources (emplois et services) / moyens de franchir cette distance
(coût, fatigue, temps) ».
11
En outre, ce caractère brutal de la distance est à associer aux difficultés des pouvoirs publics à assurer, soit
directement, soit en appui sur le secteur privé, les « services urbains basiques » (SUB dans la terminologie du
programme UN-Habitat), notamment en termes de transport. Parmi les nombreuses analyses de l’aggravation de ces
difficultés (Pfielger, 2011), on peut insister ici sur l’accélération de l’expansion urbaine non planifiée, la faiblesse des
finances urbaines ou métropolitaines (peu ou pas de fiscalité foncière), ou encore des politiques de logement qui
sont volontairement ambiguës afin de maintenir les réservoirs de main-d’œuvre bon marché, en particulier pour les
activités industrielles (Soares Gonçalves, 2010). Enfin, il faut noter que les pouvoirs publics urbains sont eux-mêmes
affaiblis dans le contexte d’États peu solidifiés et qui n’ont pas toujours la maîtrise de l’énergie et des infrastructures
nécessaires à la mise en place de ces services.
RÉSERVES FONCIÈRES PUBLIQUES ET OCCUPATION ILLÉGALE

12
Paradoxalement, cette éventuelle faiblesse du secteur étatique ne doit pas faire oublier que les villes du Sud se
sont globalement développées sur la base d’un patrimoine foncier public très important, en tout cas sur lequel
l’acteur public avait la maîtrise. En ce qui concerne les villes postcoloniales, la phase d’urbanisation intense a souvent
été contemporaine d’une mainmise de l’État national de première génération, souvent monopolistique, et fondée
sur le contrôle du territoire et du foncier (réformes agraires et nationalisations des ressources). C’est le cas des
grandes métropoles coloniales anglaises (Le Caire, Mumbai, etc.) et de Mexico (même si, dans ce dernier cas, la
« décolonisation » s’est effectuée en deux temps : politique en 1810, socio-économique en 1910). Une deuxième
raison de ces importantes réserves foncières publiques est le développement de « friches » dans le péri-urbain qui,
du fait des invasions illégales et de l’absence de plan d’urbanisation, se révèlent non exploitables tant sur le plan
productif que sur le plan de la rente foncière et relèvent alors généralement du domaine éminent. Cette
configuration dans laquelle l’État est souvent majoritaire voire monopolistique sur le plan foncier, ou encore exerce
son contrôle à travers une législation spécifique (Hong Kong, Mexico), influe évidemment sur la manière dont les
marchés vont évoluer vers la « libéralisation » à partir de 1980. Ce foncier public, souvent le principal levier de
gouvernance pour les autorités politiques urbaines, n’a pas toujours été le signal d’une prospérité des pouvoirs
publics. Mais récemment, avec l’intensification des investissements privés sur les marchés fonciers, il constitue, par
privatisation et concession, une source de financement croissante (Denis).
13
En tout état de cause, le poids du foncier public est dénoncé par les thèses néolibérales comme une impossibilité à
dynamiser l’expansion urbaine par un marché intégrateur et régulateur qui pourrait susciter des investissements en
termes de développement urbain (aménagement et équipement). Elle explique effectivement en partie la part
importante de l’informalité de l’habitat et la faiblesse des aménagements face à l’étalement urbain. La présence d’un
habitat illégal est attestée depuis les débuts de l’industrialisation (fin du XIX e siècle pour les exemples plus anciens).
Malgré une vague de politiques publiques importantes pour le supprimer (éradication des bidonvilles et relogement
massif) dans les années 1960 pour certains États qui pouvaient économiquement se le permettre (États pétroliers et
industriels), l’habitat illégal a été la forme majoritaire de l’expansion urbaine, et plus encore à partir des années  1970
(Kasarda, Crenshaw, 1991 ; UNCHS, 1982). Cette illégalité peut intervenir à plusieurs niveaux (Deboulet) : sur les
parcelles foncières elles-mêmes, sur le statut des occupants (de la parcelle, d’un des logements sur cette parcelle, à
titre de résident ou de locataire), sur les normes d’urbanisation et l’intégration aux réseaux urbains, sur
l’enregistrement des parcelles et de leur usage auprès des autorités. Tous ces niveaux n’ont pas les mêmes
conséquences sur le marché et interdisent de simplifier, comme le fait de Soto, le «  titrement » à partir de la simple
occupation de la parcelle. En outre, ce processus d’installation illégale ou informelle est en cours depuis le début de
la croissance urbaine. Il a donc produit des situations stratifiées sur plusieurs générations qui ne peuvent trouver de
solution juridique univoque, ce que l’on retrouve dans les articles de Bautès et alii, de Soares-Gonçalves ou de
Benjamin et Raman. La transmission intergénérationnelle, les évolutions démographiques et les logiques sociales
sont incorporées aux situations foncières et créent des marchés locaux, débouchant sur des productions
institutionnelles ad hoc[3]  Le 23e Conseil d’UN-Habitat a adopté, en avril  2011,...[3]. Le second trait concerne
d’importantes proportions des métropoles du Sud qui se trouvent dépourvues des services urbains basiques, soit
parce que la croissance urbaine a pris un rythme très supérieur aux capacités de l’État à viabiliser et à équiper les
terrains, soit parce que le marché foncier n’étant pas suffisamment attractif  – notamment par manque de sécurité
foncière – le secteur privé n’a pas non plus investi dans l’aménagement et l’équipement de ces zones.
LE TRANSFERT DU FONCIER PUBLIC VERS LE SECTEUR PRIVÉ

14
À un premier niveau, des politiques publiques ont pu jouer sur la législation urbaine pour débloquer une partie du
foncier vers le marché sans transférer directement des biens publics, par exemple dans le contexte de législations sur
le locatif (Soares-Gonçalves). Mais globalement, on constate que, depuis les années 1980, d’immenses réserves
foncières publiques (étatiques, municipales ou autres, comme au Mexique avec la propriété sociale) sont transférées
au domaine privé sous plusieurs formes. Ce transfert a deux causes. La première est l’expansion urbaine : celle-ci est
à la fois le fait des investissements massifs privés (Denis) pour la création de nouveaux projets résidentiels-
commerciaux privés, qui ainsi « achètent » des terrains jusqu’ici sans valeur (désert, etc...) et non urbanisés ; elle
consiste également dans l’occupation illégale par les franges les plus pauvres qui s’installent en périphérie (Salazar,
Denis), elle est dans ce cas une appropriation « privée » d’un autre type. La seconde cause est la désindustrialisation
des centres et des péricentres et la faillite des industries publiques qui laisse de grandes portions de terrains
urbanisés ou urbanisables qui pèsent lourds sur le marché foncier. Ces réserves constituent souvent une ressource
essentielle pour les politiques publiques urbaines, voire la seule possibilité de mener une politique urbaine en y
associant le secteur privé. Il s’agit le plus souvent d’opérations de type Partenariat Public-Privé (PPP) qui deviennent
la norme en matière de politique urbaine. Si ce « transfert » du bien public au privé est général, il peut mobiliser ou
favoriser des acteurs très différents. Les articles de ce numéro permettent de caractériser ce transfert en fonction
des acteurs qui y participent, et ainsi de nuancer la tendance globale à une « privatisation ».
15
L’article d’Éric Denis présente un niveau de transfert qui a lieu dans toutes les grandes métropoles du Sud et qui
correspond à une politique économique déployée par le corporate capital, l’investissement foncier dans les villes du
Sud.Ici, le transfert porte sur le « domaine public » au sens de « réserve foncière », terres non urbanisées et peu
exploitées, terres d’« intérêt général » lié à la présence d’infrastructure ou à leur possible développement. Pour le
cas égyptien, cette réserve foncière concerne avant tout les périphéries métropolitaines désertiques. Ce processus
est à double détente, puisqu’il consiste à la fois à « privatiser » les réserves foncières des États (ou des municipalités
dans certains cas), mais aussi à « liquéfier » le patrimoine foncier pour alimenter les marchés bancaires et financiers.
Autrement dit, il s’agit d’un double transfert, entre deux types de porteurs de titre et entre deux types de titres (de
la rente foncière à la rente du capital), qui transforme la nature des biens fonciers et détermine leur usage (ou au
contraire s’en détache, l’exploitation du sol sortant ainsi des usages et des intérêts localisés pour devenir une
richesse en circulation).
16
Ce transfert est également l’objet de l’article de Nicolas Douay qui montre comment la coalition entre autorités
politiques urbaines et secteur privé, qui a depuis longtemps été à l’œuvre dans la gestion foncière de l’ancienne
colonie de Hong Kong, est susceptible de réévaluer la place des acteurs privés au vu des attentes de la « société
civile ». Ainsi, le terme de « privatisation » doit être nuancé et explicité : l’enjeu est évidemment différent s’il s’agit
d’un transfert à la société civile (plus ou moins démocratique ou représentative) ou au corporate capital. Les
modalités de l’urbanisation sont donc cruciales pour conserver un « contrôle » politique sur les opérations
immobilières.
17
Dans les articles de N. Bautès, et de S. Benjamin et B. Raman, on voit que le transfert au secteur privé est une
opération à plusieurs dimensions. Si le but est avant tout d’assurer la sécurité foncière ou celle de la propriété
immobilière, les implications foncières sont trois fois plus coûteuses : la réhabilitation des slumsporte, en termes
fonciers, sur le périmètre du quartier en lui-même, sur la surface visée par la réhabilitation et, dans le cas de Mumbai
avec le principe du transfert des droits aux promoteurs, sur une autre partie de la ville. Les autorités transfèrent donc
la propriété à un ensemble d’acteurs : des habitants (une petite partie d’entre eux tout au moins), l’aménageur et
le corporate capitalqui s’associe à l’opération et qui peut reporter son gain foncier au profit d’une autre opération.
18
Dans le cas du Mexique (Salazar), il s’agit de convertir la « propriété sociale » en propriété privée : un des aspects
des politiques de titrement devant générer ces « classes moyennes urbaines avec accès au crédit ». Si la propriété
sociale mexicaine n’est pas, à proprement parler, « publique », elle relève en tout cas du domaine de la collectivité
locale et elle est garantie par l’État. Avec les réformes de 1992, elle peut être transférée soit à des individus, soit à
des sociétés de promotion. Cette politique de transfert qui est menée dans des programmes fédéraux à l’échelle du
territoire national est censée remplir la double mission d’accès à la propriété privée populaire et de sécurisation
foncière, tout endynamisant les investissements nécessaires à la métropole. Les « acteurs privés » destinataires des
programmes sont donc très divers et n’intègrent pas le marché de la même manière.
LE TRANSFERT DES RESPONSABILITÉS DE L’AMÉNAGEMENT URBAIN

19
Cette dépublicisation est également un dessaisissement des responsabilités politiques liées à l’usage du sol urbain  :
aménagement, équipement, approvisionnement, mais aussi politique urbaine à l’échelle métropolitaine, sont plus ou
moins délégués. Le recours à la réserve foncière comme outil de financement par le marché est un «  one shot » dès
lors que la ville / l’État / la collectivité se dessaisit de son levier le plus puissant. On peut observer dans ces différents
articles comment les mécanismes de transfert de la propriété foncière jouent conjointement sur les modalités de
production de l’urbain. On peut y relever plusieurs types de transfert de ces responsabilités :
20
 Le transfert au marché international où intervient le corporate capital : Une de ses modalités est le
développement des gated communities et des projets résidentiels de luxe (Denis). Très gros consommateurs de
foncier (voir les surfaces des logements et des équipements en proportion de celles de l’habitat populaire ou même
des classes moyennes), ces unités résidentielles et leurs centres commerciaux sont censés être autonomes, voire
autarciques, en termes d’équipements et de services. On peut dire, dans ce cas, que la responsabilité d’urbanisation
est très faible puisque, certes l’équipement de l’unité est réalisé, mais à des coûts très importants pour la collectivité
urbaine (foncier occupé, segmentation des services, voire accaparement des réserves d’eau et d’énergie) tout en ne
profitant qu’à une infime minorité (d’autant plus que ce résidentiel spéculatif reste très faiblement occupé). Par
ailleurs, ce type d’urbanisation par le corporate capital n’est pas efficace sur le plan de la réhabilitation des quartiers
insalubres illégaux (Bautès et alii) où, au contraire, s’observe un effet d’enlisement des slums par manque de
rentabilité immédiate de l’opération de réhabilitation – effet qui se conjugue à des évictions (Bautès et alii ; Dupont,
2010).
 Le transfert à de nouveaux acteurs : mixtes, nouvelles coalitions, partenariats publics-privés, sociétés
immobilières issues des collectivités locales : Une tendance importante à relever est la dé-publicisation par la
redistribution des responsabilités urbaines à un nouveau panel d’acteurs qui, tout en étant de nature privée, peuvent
devenir médiateurs et réguler les enjeux liés au développement urbain : c’est le principe du partenariat public-privé
(Douay, Bautès et alii) dans lequel les opérateurs publics gardent (pour un temps !) la maîtrise du foncier et des
législations. Dans le déroulement des opérations, le rapport de force entre société civile / habitants / collectivités
urbaines etinvestisseurs privés peut évoluer rapidement et conduire à une déresponsabilisation à l’égard des
équipements collectifs ou à négliger l’entretien des biens publics, voire à leur privatisation... On connaît d’ailleurs
parfaitement ce biais dans bon nombre d’opérations urbaines depuis les années 1960 en Europe (exemples à Paris
avec l’opération Italie, ou actuellement l’Opération Paris Rive Gauche – Michel, 2008) alors même que les législations
peuvent y être pourtant très fortes.
21
L’article de C. Salazar montre bien comment, dans le cas mexicain, le transfert à la propriété privée des parcelles
issues de la Réforme agraire tend à dynamiser le marché immobilier formel et informel du lotissement sans pour
autant stimuler l’application de normes d’urbanisation et l’incorporation légale au plan d’urbanisme. Les outils de
formalisation du foncier (les administrations) ne sont pas assez efficaces ou n’ont pas les moyens pour imposer une
intégration des lotissements aux réseaux et services. Mais par ailleurs, aucun acteur privé ne souhaite et ne sait
prendre en charge le coût de ces infrastructures. Il y a donc un effet minime de ce type de transfert sur
l’« urbanisation » au sens d’intégration et de mise à niveau des équipements. Au niveau de l’analyse des transferts
réels de propriété, on constate d’ailleurs que le dispositif qui prévoyait la conversion des collectivités agraires en
sociétés immobilières privées a été sous-utilisé voire inutilisé, au contraire de la conversion des parcelles
individuelles en pleine propriété, qui elle n’implique pas d’investissements d’équipement, mais ne les induit pas non
plus.
22
Outre le transfert aux acteurs privés des biens fonciers collectifs, le foncier urbain est agi par trois autres types de
transferts et médiation :
23
 i) Le transfert du volet social des politiques urbaines, dans un contexte d’ajustement, leur délégation, à
des programmes d’assistance, d’intervention et de réforme portés par les agences de l’aide bilatérale, multilatérale
ou des ONG (Deboulet). Cela prend la forme d’interventions dans tel ou tel quartier. Or, ces interventions, qui ne
sont que des expériences devenant au mieux des « best practices » (Navez-Bouchanine, Valadares, 2007), ne
permettent jamais de construire des structures d’intervention locale en mesure de se financer dans la durée, et
encore moins des politiques reproductibles. En revanche, elles favorisent la déresponsabilisation des autorités
locales et nationales à l’égard des questions d’habitat précaire et de pauvreté ;
 ii) Le transfert de la responsabilité à produire le contexte urbain aux collectivités locales, la
décentralisation en d’autre termes, n’apportent guère de solutions socialement plus équitables et favorables à
l’équipement des localités périphériques. Les cas mexicain (Salazar) ou indien (Benjamin et Raman, Bautès  et alii)
montrent qu’il est très difficile de faire porter l’effort d’urbanisation par les acteurs locaux, surtout lorsqu’il n’existe
aucun mécanisme de subsidiarité en mesure de compenser les inégalités entrelocalités et que le foncier a été cédé
sans exiger de contrepartie en matière d’équipement ;
 iii) Reste le transfert aux habitants qui se sont appropriés les terrains, qui consiste à les faire payer pour
qu’ils accèdent aux services à hauteur de leur contribution : c’est une solution non moins précaire. L’effet le plus
évident est un fractionnement à l’échelle des quartiers de l’offre de services dans un contexte d’ajustement des
dépenses publiques et de délégation / privatisation des services.
CONCLUSION : LA TRAGÉDIE DU PRIVÉ

24
La fragmentation des responsabilités et des fonctions du foncier avec ce transfert général néolibéral, loin de créer
des logiques d’intégration par le marché, est facteur de complexification. Ce transfert est coûteux pour les habitants
comme pour les activités économiques urbaines puisqu’il induit mécaniquement un renchérissement de l’accès au
sol qui pénalise les petites entreprises, certes peu productives, mais qui assurent presque la totalité de la subsistance
et de l’emploi dans les métropoles du Sud.
25
Il faudrait en effet mettre en rapport ces mutations avec les changements d’activités économiques et les territoires
qu’elles produisent. La désindustrialisation des centres (ou anciens faubourgs devenus centraux) recompose les
relations entre coût de l’espace et coût de l’activité dans tous les secteurs économiques – tertiaires, bureaux,
commerces de proximité et certaines industries de « proximité » comme la confection débouchant sur de multiples
formes de tri centrifuge et de faillites. C’est également ce qu’évoque l’article de Benjamin et Raman sur la production
d’un espace social et foncier lié à l’économie intermédiaire. Ainsi, s’il faut effectivement parler d’espace
« abstractisé » par les activités tertiaires de bureaux intégrées à l’économie globale contribuant à l’exacerbation des
conflits, notamment à référent identitaire (Shaban, 2010), il y a beaucoup à chercher également du côté des activités
économiques dans lesquelles la relation entre logement et espace de travail se joue de manière différente, dans la
mixité. Il conviendrait, sans anachronisme, de les rapprocher des activités de la première industrie au XIX esiècle qui
se jouait aussi dans l’interface et la proximité plutôt que dans la connectivité (Green, 1998). Proximité et mixité
demeurent les atouts économiques d’une grande partie des villes du Sud (Benjamin, 2000), notamment dans la
confection (Souchaud, 2011). Les marchés fonciers, dans ce cadre, jouent un rôle déterminant et l’enjeu n’est pas
seulement social (intégrer les classes paupérisées) mais aussi économique (accueillir de nouvelles activités
productives, dynamiser les existantes). Il peut donc y voir des opportunités économiques foncières spécifiques,
comme l’a été par exemple le Silicon Sentier à Paris ou la Silicon Alley à New York (Grondeau, 2009).
Reconsidérées comme modernes et porteuses de croissance, ces activités pourront jouer un rôle stabilisateur et
mitiger le lourd bilan de l’intégration des marchés fonciers des centres-villes au profit du corporate capital. Ces
appropriations ont eu et ont encore une fonction de tri qui déstructure sans que par ailleurs les nouvelles activités
implantées fournissent une masse d’emplois alternatifs suffisante et accessible.
26
Enfin, les conclusions des politiques foncières récentes s’imposent : le transfert du foncier aux acteurs privés n’est
absolument pas efficace en termes de développement urbain durable et socialement juste et il faudra, d’une
manière ou d’une autre, repenser la responsabilité du droit à la ville. Elle ne peut être déléguée au marché.

BIBLIOGRAPHIE
 Aveline N., 2008, Immobilier : L’Asie, la bulle et la mondialisation, Paris, CNRS éditions.

 Benjamin S., 2000, « Governance, Economic Settings and Poverty in Bangalore », Environment


& Urbanization, vol. 12, pp. 35-56.

 Bertrand M., 2010a, « Introduction », Revue Tiers Monde, n◦ 201, janvier-mars, pp. 7-23.

 Bertrand M., 2010b, « De l’accès au logement à la relation domicile-travail : enjeux


sociaux et spatiaux des mobilités dans la région du grand Accra (Ghana) », Revue Tiers Monde, n◦ 201, janvier-mars,
pp. 87-106.
 Capron G. (dir.), 2006, Quand la ville se ferme. Quartiers résidentiels privés, Paris, Bréal.
 Castel R., 1991, Les métamorphoses de la question sociale, Paris, Fayard.
 De Soto H., 2005 [2000], Le mystère du capital, Paris, Flammarion.

 Dupont V., 2010, « Création de nomades urbains et appauvrissement. Impact des


politiques d’éradication des camps de squatters à Delhi », Revue Tiers Monde, n◦ 201, janvier-mars, pp. 25-45.
 Durand-Lasserve A., 2006, « Market-Driven Evictions and Displacements » inHuchzermeyer M., Karam A.
(dir.), Informal Settlements. A Perpetual Challenge ?, University of Cape Town Press, pp. 207-227.
 Fourchard L., 2007, Gouverner les villes d’Afrique, État, gouvernement local et acteurs privés, Karthala,
180 p.
 Green N., 1998, Du Sentier à la 7e avenue, la confection et les immigrés, Paris-New-York, 1880-1980,
Paris, Le Seuil.
 Grondeau A., 2009, « Les grandes métropoles, lieux éternels d’innovation : les cas de New York et de
Paris » in Valat C. (dir.), Pérennité urbaine, la ville par-delà ses métamorphoses, Tome 2, Turbulences, Paris,
L’Harmattan, pp. 225-234.
 Kasarda J., Crenshaw E., 1991, « Third World Urbanization : Dimensions, Theories, and
Determinants », Annual Review of Sociology, vol. 17, pp. 467-501.
 Lorrain D. (dir.), 2011, Métropoles XXL en pays émergents, Paris, Presses de Sciences Po, 404 p.
 Michel A. (avec Beauvillard A.), 2008, Le treizième en sources : guide pour l’observation des mutations
urbaines, Paris 13e arrondissement, Paris, Le Manuscrit.
 Miranda L., 2002, « Book Review : A New Mystery from de Soto ? »,Environment and
Urbanization, vol. 14, pp. 263-264.

 Navez-Bouchanine F., Valadares L. (dir.), 2007, « “Villes et “best practices” »,Espaces et


sociétés, n◦ 131, p. 9-13.
 Payne G., Durand-Lasserve A., Rakodi C., 2009, « The Limits of Land Titling and Home
Ownership », Environment & Urbanization, vol. 21 (2), pp. 443-462.
 Pflieger G., 2011, « Santiago du Chili : prototype de la ville libérale, entre un État fort et des services
collectifs privatisés » in Lorrain D. (dir.), 2011,Métropoles XXL en pays émergents, Paris, Presses de Sciences Po.
 Pinol J.-L., 2000, Le monde des villes au XIXe siècle, Paris, Hachette.
 Ong A., 2006, « Introduction. Neoliberalism as Exception, Exception to Neoliberalism » in Ong
A., Neoliberalism as Exception : Mutations in Citizenship and Sovereignty, Durham (NC), Duke University Press.
 Rouleau B., 1985, Villages et faubourgs de l’ancien Paris. Histoire d’un espace urbain, Paris, Le Seuil.
 Santos M., 1971, Les villes du Tiers-Monde, Paris, Genin, 428 p.
 Shaban A., 2010, Mumbai : Political Economy of Crime and Space, Orient Blackswan, 236 p.
 Soares Gonçalves R., 2010, Les favelas de Rio. Histoire et droit, XIX e-XXe siècles, Paris, L’Harmattan.
 Souchaud S., à paraître en 2011, « Presença estrangeira na indústriadas confecções e evoluções urbanas
no bairros centrais de São Paulo » in Feldman S., Duarte Lanna A.L., Da Silva Leme A.C., Amaral de Sampaio M.R.
(dir.), São Paulo : os estrangeiros e a construção da Cidade, São Paulo.
 United Nations Centre for Human Settlements (UNCHS), 1982, Survey of Slum and Squatter Settlements,
Dublin, Tycooly Int.
Notes
 [*]Historienne, SEDET-Université Paris Diderot (Paris 7), aurelia.michel@univ-paris-diderot.fr
 [**]Géographe, Institut Français de Pondichéry, eric.denis@ifpindia.org
 [***]LEUS – PUC-Rio et UMR LAVUE 7218, rafaelsgoncalves@yahoo.com.br
 [1]La croissance urbaine est ici entendue comme un processus multiforme : on assiste autant à des processus
d’étalement urbain, de densification des centres secondaires, des démarches de retours aux centres historiques et
de production de multiples formes d’appropriation de l’espace autour des pôles métropolitains que l’on ne saurait
réduire à une catégorie unique, dite périurbaine. Tout ceci introduit des problématiques spécifiques et non encore
résolues, que ce soit dans la nomenclature ou dans l’analyse.
 [2]Nous désignons par ces termes, les grands groupes capitalisés via des ouvertures à des partenaires
étrangers, joint venture, des cotations en bourse et des hypothèques de leurs avoirs. Ces compagnies
internationalisées ont une capacité d’action sans commune mesure avec celle des acteurs économiques ordinaires.
 [3]Le 23e Conseil d’UN-Habitat a adopté, en avril 2011, une résolution qui représente un tournant majeur pour les
politiques foncières. Son paragraphe 7b encourage en effet les gouvernements et les partenaires à promouvoir la
sécurité de la tenure pour tous les segments de la société en reconnaissant et en respectant la pluralité des systèmes
de tenure... c’est une rupture fondamentale avec les politiques de titrement qui visent à «  rationaliser » et à réduire
en un titre unique de propriété privée les formes complexes et enchâssées de possession et d’usages.
Plan de l'article
1. INDUSTRIALISATION ET URBANISATION DANS LES VILLES DU SUD
2. RÉSERVES FONCIÈRES PUBLIQUES ET OCCUPATION ILLÉGALE
3. LE TRANSFERT DU FONCIER PUBLIC VERS LE SECTEUR PRIVÉ
4. LE TRANSFERT DES RESPONSABILITÉS DE L’AMÉNAGEMENT URBAIN
5. CONCLUSION : LA TRAGÉDIE DU PRIVÉ
Pour citer cet article
Aurélia Michel et al. « Introduction : les enjeux du foncier urbain pour le développement », Revue Tiers Monde 2/
2011 (n°206) , p. 7-20 . 
URL : www.cairn.info/revue-tiers-monde-2011-2-page-7.htm. 
DOI : 10.3917/rtm.206.0007

À Mumbai, dans un contexte de privatisation du marché et de décentralisation, une forte pression immobilière
s’exerce sur les bidonvilles, dont les perspectives de rénovation font l’objet de transactions multiples entre les groupes
immobiliers, les habitants, regroupés ou non en association, et l’État, pour la valorisation du sol urbain. Ces
transactions donnent lieu à la mobilisation de ressources et de stratégies spécifiques, qui relèvent tantôt de logiques
spéculatives, de pouvoir et / ou de survie. Cet article se propose d’examiner l’éventail des actions mises en œuvre par
les habitants du quartier Ahmed Zakaria Nagar à Behrampada, bidonville au cœur de Mumbai et de ses projets
actuels de réaménagement urbain.
Mots clés
 Pression immobilière
 
 jeux d’acteurs
 
 ressources sociales
 
 familiales et politiques
 
 bidonvilles
 Mumbai
Español
En Mumbai, en un contexto de privatización del mercado y de descentralización, una fuerte presión inmobiliaria se
ejerce sobre los barrios precarios, cuyas perspectivas de renovación generan múltiples transacciones entre los grupos
inmobiliarios, los habitantes, agrupados o no en asociaciones, y el Estado, para la valorización urbana. Estas
transacciones dan lugar a la movilización de recursos y estrategias específicas, vinculadas a lógicas especulativas, de
poder o de supervivencia. Este artículo se propone examinar el abanico de acciones implementadas por los habitantes
del barrio Zakaria Nagar, en Behrampada, un barrio precario en el corazón de Mumbai y sus proyectos actuales de
reordenamiento urbano.

Résumé
Français
Cet article envisage de mettre en perspective historique l’importance jouée par le marché de la location dans
l’expansion des favelas, ainsi que dans la formulation des politiques publiques. Bien que les données historiques sur ce
marché dans les favelas soient rares et souvent peu fiables, il est possible de constater qu’il ne s’agit pas là d’une
réalité récente. Bien au contraire, cet état de fait est, depuis le début du XX e siècle, un problème public à Rio de
Janeiro. Ce travail aborde, premièrement, la présence de rapports locatifs depuis l’origine des premières  favelas, puis
le processus de criminalisation de la perception des loyers dans les favelas à partir du Code de la Construction
de 1937. Il se penche, enfin, sur les enjeux suscités par le marché locatif dans le contexte des projets de régularisation
foncière à partir des années 1980.
Mots clés
 Favelas
 
 marché locatif informel
 
 Rio de Janeiro
 
 régularisation foncière
 
 histoire urbaine
Español
Este artículo pretende, en una perspectiva histórica, analizar la importancia del mercado de alquileres en la
expansión de las favelas, así como en la formulación de políticas públicas. Aunque los datos históricos sobre este
mercado en las favelas son raros, y a menudo poco confiable, es posible que esto no sea una realidad reciente. Por el
contrario, esto es, desde la mitad del siglo XX, un problema público en Río de Janeiro. Este trabajo aborda, en primer
lugar, la presencia del alquiler desde los orígenes de las primeras favelas y, a continuación, el proceso de criminalizar
la colección de rentas en las favelas a partir de la promulgación del código de construcción de  1937. Finalmente,
analizaremos las cuestiones relacionadas con el mercado de alquiler en el contexto de los proyectos de regularización
del suelo en las favelas desde la década de 1980.

Avec la libéralisation économique, l’État algérien s’assigne des missions régaliennes et managériales en vue de
garantir et attirer les investissements étrangers pour créer des richesses et offrir de l’emploi. Dans cette perspective,
l’accès au foncier a été placé au centre de dispositifs procéduraux pour parer à d’éventuels spéculateurs et ne pas
brader le patrimoine public de l’État. Après une décennie (1990) d’improvisations, la décennie 2000 marque une
volonté de prise en charge sérieuse du dossier foncier. Un état des lieux des ZI (Zones Industrielles) et ZAC (Zones
d’Activités Commerciales) a été dressé en vue de rationaliser l’utilisation du potentiel foncier public existant et de le
mobiliser pour la promotion de l’investissement privé. L’objet de ce travail est l’analyse du système de pilotage de
l’offre foncière publique instauré pour promouvoir l’investissement privé en prenant pour étude de cas, Annaba,
la 4e ville d’Algérie.

Plan de l'article
1. - 1- Introduction
2. - 2- Le pouvoir des acteurs fonciers : entre monopolisation, émiettement, improvisation et conflits de
compétences
3.
1. 2.1. La décentralisation et intermédiation du pouvoir foncier : le printemps du localisme
2. 2.2. Le processus de recentralisation du pouvoir foncier et résistance du local
3. 2.3. La démultiplication des structures foncières : stratégies sectorielles et gestion conflictuelle
4. - 3- L’offre foncière économique à Annaba : entre rigidité administrative et pratiques informelles
5.
1. 3.1. Annaba : un territoire littoral à fort potentiel en panne de projet
2. 3.2. Les investisseurs domestiques et étrangers : prédominance des PME/PMI et des succursales
et tertiarisation
3. 3.3. Le traitement des soumissions de projets d’investissement : blocage ou logique sélective ?
4. 3.4. Émergence de zones d’activités informelles : une réponse improvisée à une demande
réfléchie
6. - 4- Une gestion foncière et économique en crise
7.
1. 4.1. La dépossession des autorités locales du pouvoir foncier
2. 4.2. La démultiplication des structures et gestion des stocks
3. 4.3. Le blocage est d’ordre institutionnel
8. - 5- Conclusion
Cet article envisage de mettre en perspective historique l’importance jouée par le marché de la location dans
l’expansion des favelas, ainsi que dans la formulation des politiques publiques. Bien que les données historiques sur ce
marché dans les favelas soient rares et souvent peu fiables, il est possible de constater qu’il ne s’agit pas là d’une
réalité récente. Bien au contraire, cet état de fait est, depuis le début du XX e siècle, un problème public à Rio de
Janeiro. Ce travail aborde, premièrement, la présence de rapports locatifs depuis l’origine des premières  favelas, puis
le processus de criminalisation de la perception des loyers dans les favelas à partir du Code de la Construction
de 1937. Il se penche, enfin, sur les enjeux suscités par le marché locatif dans le contexte des projets de régularisation
foncière à partir des années 1980.

Le fait urbain dans le monde


1 Causes et conséquences de l'explosion urbaine
1.1 Un nouveau phénomène
Historiquement, la ville était le rassemblement en un même lieu de personnes pratiquant différentes professions
non liées à l'exploitation de la terre. La ville assurait des fonctions politiques (siège des gouvernements,
administrations et justices), religieuses (siège des dignitaires religieux), commerciales (lieux d'échanges).
Depuis 1800, la population de la Terre a quadruplé. Or le nombre des citadins a été multiplié par 25. Il y a dans le
monde 250 agglomérations de plus d'un million d'habitants. Un homme sur deux habite dans une ville. L'accélération
de l'urbanisation est due, dans les pays du Nord, à la Révolution industrielle. La ville s'accroît en superficie par la
création de banlieues. D'immenses régions sont urbanisées en grandes agglomérations comportant plusieurs centres
et s'étendant sur des distances immenses. L'agriculture y a disparu totalement.
Les agglomérations urbaines se répartissent très inégalement autour du globe. Généralement elle correspondent
aux grands foyers de peuplement traditionnels. Les villes géantes constituent un phénomène fondamental dans les
sociétés des pays du Sud où se trouvent les ¾ des agglomérations de plus de 10 millions d'habitants.
 Urbanisation : processus de croissance du nombre de citadins.
 Taux d'urbanisation : part de la population habitant en ville.
1.2 Les causes et les conséquences de l'urbanisation
L'urbanisation est due premièrement à l'accroissement naturel car la transition démographique y est plus précoce
et parce que la population y est plus jeune que dans le monde rural. Ensuite, l'exode rural fait connaître à la ville un
essor considérable car la pression démographique accentue le manque de terres et pousse les paysans vers les villes
où ils espèrent trouver du travail. Enfin, l'extension des villes provoque l'absorption des espaces ruraux alentours.
Ceci entraîne l'extension d'un mode de vie urbain à d'entières régions autrefois rurales.
En regroupant les hommes sur des espaces restreints, l'urbanisation pose de redoutables problèmes. 80 % des
hommes vivent sur 5 % de la surface de la Terre. Les centres-villes aux hauts immeubles sont de plus en plus
entourés d'immenses banlieues pavillonnaires. L'extension des villes devient démesurée en hauteur et en espace.
Les réseaux de communication sont très vite saturés car les infrastructures ne peuvent pas suivre la croissance
urbaine dans les pays les plus pauvres. La pression sur l'environnement (alimentation en eau) est très importante
aussi bien au Nord (Californie, Arizona) qu'au Sud (Egypte). La pollution (par les ordures ménagères, par les émissions
de gaz…) est un défi majeur des grandes métropoles.
De plus, la ville, où l'éclatement des solidarités sociales va de pair avec l'individualisme, concentre chômage, misère
aussi grande que dans le monde rural, et délinquance. Il y a création de ghettos. Cependant la ville est aussi le lieu de
l'innovation et du développement culturel et social et représente un mieux par rapport au monde rural souvent très
en retard dans les économies encore peu développées.
1.3 Les villes organisent les territoires
La ville est traditionnellement le centre de décision. Elle est aussi un espace de production car la Révolution
industrielle a favorisé son essor et de services car elle concentre le savoir. La ville est un centre d'échanges car tout y
converge : les marchandises et les migrations.
La ville utilise l'espace rural périphérique pour y étendre ses zones commerciales, industrielles, ses technopôles et
quelques infrastructures de services consommatrices d'espace (aéroports). Un véritable front urbain se développe
suscitant une transformation des espaces agricoles alentours. Le mode de vie des citadins (centres commerciaux,
salles de spectacle, adduction d'eau, éclairage public, réseau de tout-à-l'égout...) y est introduit : c'est la
périurbanisation.
Les villes adoptent aussi une hiérarchisation entre elles. La taille et les services offerts sont les critères les plus
importants car ils déterminent l'attractivité des villes. Des liens de complémentarité et d'interdépendance se créent
entre les différentes villes. La ville de niveau supérieur fournit des services grâce à son infrastructure administrative,
financière, commerciale et culturelle. La ville de niveau inférieur fournit main-d'œuvre et consommateurs. (Exemple
dans la région Rhône-Alpes : pôle dominant : Lyon ; pôles relais de deuxième niveau : Grenoble et St Etienne ; pôles
de troisième niveau : les préfectures de Annecy, Chambéry, Bourg-en-Bresse, Valence). Les grandes métropoles
concentrent en plus un pouvoir de décision à des échelles diverses : régionale, nationale, mondiale. (Exemple de
Lyon : niveau mondial : siège d'Interpol ; niveau national : traitement des grands brûlés par l'hôpital Herriot ; niveau
régional : siège d'académie). Le poids humain, économique et culturel des métropoles les hiérarchisent entre elles
dans les différents domaines.
Le réseau urbain est constitué par cet ensemble de villes et sa qualité (relations, maillage, poids des unités,
homogénéité) est l'indicateur de la réussite politique d'un Etat. Les réseaux urbains équilibrés sont rares.
L'Allemagne possède un réseau multipolaire où chaque agglomération possède un poids décisionnel certain (Munich,
Stuttgart, Francfort, Berlin, Dresde, Cologne, Düsseldorf, Essen, Brème, Hambourg). En Grèce, au contraire, il n'y a
que deux centres importants, Athènes, et loin derrière, Thessalonique.
En France, Etat hypercentralisé par excellence, Paris est sept fois plus importante que la seconde ville (Lyon). C'est
pourquoi l'Etat a créé la DATAR (Délégation à l'Aménagement du Territoire et à l'Action Régionale) chargée de
rééquilibrer le territoire et de faire contrepoids à Paris. Ainsi, en 1964, sont créées huit métropoles d'équilibre : Lilles,
Metz-Nancy, Strasbourg, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux et Nantes ; et, en 1982, la réforme régionale permet à
22 villes de devenir réellement les centres de décision de leur région.
1.4 Le cas des pays en développement
Dans les pays en développement, les réseaux urbains sont souvent déséquilibrés et mal hiérarchisés avec une ville
macrocéphale qui concentre tous les pouvoirs.
L'Amérique latine a la caractéristique de posséder d'immenses villes mais mal réparties. En général, chaque pays a
une grande ville qui sert de capitale et aucun réseau urbain à côté. Pourtant la population est fortement urbanisée
(70 %). Au Venezuela, Caracas, la capitale, est la seule ville du pays. Le Mexique montre un écart considérable entre
Mexico et les deux autres grandes villes, Guadalajara et Monterrey.
En Afrique, la population est encore très faiblement urbanisée (15 à 50 %) mais il y a déjà de très grandes
agglomérations (Le Caire en Egypte, Lagos au Nigeria, Abidjan en Côte d'Ivoire…). Il n'y a cependant pas encore de
réseau urbain véritable.
L'urbanisation asiatique :
 L'Inde a un modèle d'équilibre entre les grandes villes : Bombay, Madras, Calcutta, Dehli, Bangalore,
Jaipur…
 En Chine, le nombre des grandes villes est très important du fait de la taille de la population. Mais elles
sont toutes concentrées dans un tiers Est du pays.
 En Thaïlande, une grande ville (Bangkok) représente 10 % de la population du pays et présente de gros
problèmes d'engorgement.
 En Indonésie, seule l'île de Java est très peuplée et très urbanisée avec de très grands centres (Djakarta,
Bandoeng, Surabaya, Semarang…) qui posent d'énormes problèmes de salubrité. Le reste du pays est profondément
rural.
 Singapour, la cité-Etat est un vrai modèle de développement réussi avec une grande ville qui reste
agréable à vivre.
2 Les plus grandes métropoles mondiales
2.1 Un phénomène tout aussi récent que l'urbanisation
Aujourd'hui 250 villes dépassent le million d'habitants. Le développement de ces immenses centres urbains réunit
les agglomérations en conurbations. La plupart des métropoles mondiales, étant situées sur les carrefours de
communication et d'échange, centralisent les flux et concentrent les capitaux et les investissements, ce qui leur
permet de se développer.
Les grandes métropoles concentrent la puissance et le savoir. Elles sont les centres décisionnels des Etats et du
monde avec les gouvernements, les institutions internationales et les sièges des plus grandes entreprises. Leur
pouvoir est donc autant politique qu'économique (avec les banques, les bourses, les assurances). Elles dominent la
vie culturelle car elles sont riches et peuvent attirer les artistes et les spectateurs. Les meilleurs établissements
d'enseignement s'y concentrent ainsi que les centres de recherche. Les media y sont installés. Riches, elles attirent
aussi le tourisme.
2.2 Les réseaux de taille mondiale
Les plus grandes conurbations sont connues sous le nom de mégalopoles et sont les centres du monde développé,
la Triade : la mégalopole américaine de Boston à Washington, la banane bleue de Birmingham à Milan - par le
Benelux, la vallée du Rhin et le plateau suisse -, et la mégalopole Japonaise de Tokyo à Fukuoka. Celles-ci ont eu un
développement précoce et sont relativement bien équilibrées avec des pôles principaux (New York, Londres, Tokyo)
mais aussi des pôles secondaires (Baltimore, Turin, Hiroshima) et parfois des pôles extérieurs (Paris, Berlin).
Dans les pays en développement, le phénomène de mégalopole est moins réussi. À part au Brésil et en Inde, il s'agit
en fait plutôt de mégapole où une immense conurbation rassemble un fort pourcentage de la population du pays
sans qu'il y ait de pôles secondaires ni de véritables réseaux (Lagos, Caracas, Karachi, Le Caire…).
Cependant des échanges se développent de plus en plus entre ces pôles du Sud et du Nord. L'interdépendance et
les rivalités sont parallèles au sein d'un espace mondial fondé sur un modèle d'organisation centre-périphérie.
2.3 Les contrastes Nord-Sud
Dans les pays développés, l'urbanisation est très ralentie : la ville peut donc assez facilement gérer ses évolutions.
Les pays industriels possèdent une trame urbaine dense et hiérarchisée. Leur organisation est standardisée, ce qui
permet de gérer la répartition des activités ainsi que la constitution des équipements.
Dans les pays du Sud, en revanche, les villes affrontent une croissance très rapide. Les bidonvilles construits
illégalement voient le jour autour des centres-villes. Les situations des réseaux de villes restent contrastés avec des
pays qui possèdent un réseau homogène et équilibré et des pays qui n'ont que quelques mégapoles. En Amérique
latine, une capitale macrocéphale est bien souvent la seule grande agglomération du pays (cf. Mexico). En Asie, le
développement des villes est globalement meilleur et son équilibrage l'est également (cf. Chine et Inde). En Afrique,
le développement des villes est totalement anarchique.
À la fin du XX-ème siècle, les plus grandes métropoles sont essentiellement dans le Sud.
2.4 Les plus grandes métropoles mondiales
Les plus grandes agglomérations en 2000 :
 Tokyo : 30 millions
 Mexico : 24 millions
 Sao Paulo : 23 millions
 New York : 23 millions
 Shanghai : 23 millions
 Pékin : 20 millions
 Séoul : 20 millions
 Rio de Janeiro : 19 millions
 Calcutta : 18 millions
 Bombay : 17 millions
 Djakarta : 17 millions …
(il existe par ailleurs d'autres statistiques et d'autres classements)
Immersion à Johannesburg : le développement urbain au-delà de la gentrification
Publié le 17 sep 2013
Un groupe de 8 étudiants et professionnels issus des masters Affaires Urbaines (STU et GLM) de SciencesPo. Paris
est parti en Afrique du Sud, à Johannesburg. Le but du voyage : comprendre les innovations économiques, sociales,
artistiques, pratiques en germe à Maboneng, un quartier en pleine régénération qui interroge à bien des égards le
concept de gentrification. Une collaboratrice de Plein Sens a pris part à cette expérience, aux côtés des développeurs
et de la population.
« Qu’est-ce qu’une ville, sinon la vitrine où s’exposent des attachements subjectifs ? »
I. Vladislavic, Clés pour Johannesburg, portrait de ma ville

L’idée de gentrication est-elle encore valable ?


Gentrification : reconquête des centres-villes (ou de tout quartier) par des classes aisées puis supérieures, ayant
pour effet l’éviction des populations les plus pauvres (phénomène mondial). Telle pourrait être la définition de ce
concept reconnu, qui semble résister au temps et aux évolutions de la société depuis près de 50 ans. La gentrification
a le charme de l’abstraction et de la simplicité : elle permet de fournir un cadre de lecture stylisé aux mutations
urbaines, de donner à voir une chaîne causale claire, évidente. Pour autant, l’appliquer à l’ensemble des villes, c’est à
tort donner l’impression d’une unicité des évolutions urbaines dans le monde. La ville n’est pas une équation
mathématique et ne peut donc pas être décrite de façon pleinement satisfaisante selon un modèle. Au contraire, elle
est un système organique qui évolue en se nourrissant de l’existant et des particularités locales… Quelle est la force
de l’inertie urbaine (la « path dependency ») qui façonne le phénomène de gentrification ?
 
Penser la régénération des centres-villes lorsque les règles du jeu urbain changent
Juridiques, sociaux, historiques, culturels, politiques, économiques, idéologiques… De nombreux paramètres
modèlent chaque contexte local de déploiement ou de redéploiement de la ville sur la ville. Dès lors, si l’analyse de la
« mondialisation des modes de vie » permet de décrire des faits sociaux globaux, elle gomme considérablement (et
trop rapidement) les aspérités des différents territoires qu’elle prend pour objet, en observant tous les centres-villes
à l’aune d’une unique dynamique : leur embourgeoisement. Pourtant, en s’affranchissant de la théorie, l’analyse
d’un espace bien réel révèle que les choses ne se passent pas de façon si évidente ou manichéenne « dans la vraie
vie ».
Comment un territoire donné s’approprie-t-il ce phénomène, par quel rejet ou quelle synthèse ? Quels sont les
effets des variations des règles juridiques de part le monde, des modèles de gouvernance, des héritages
territoriaux ? Quelles sont les lignes de fracture sociales ou géographiques des différentes villes ? D’où viennent-elles
? Quelles solutions sont inventées pour construire un « vivre-ensemble » et que peuvent-elles nous apprendre de
l’urbain ? Comment faut-il désaxer son regard pour comprendre que le projet social n’est pas le même, alors qu’il
semble produire des formes urbaines familières ? L’embourgeoisement des quartiers pourrait-il ne pas être cette
déferlante qui interdirait tout autre forme de vie ? C’est notamment la tête pleine de ces questions que nous nous
sommes rendus à Maboneng.
 
Décaler une analyse occidentale classique par l’étude d’une ville du Sud : rapide portrait de Johannesburg
Plantons à grands traits le décor de la Ville de l’Or, cœur économique d’une Afrique du Sud au dynamisme
remarqué. Fondée en 1886, Johannesburg est profondément marquée par les cicatrices laissées par l’Apartheid tant
dans les mentalités que dans le tissu urbain. La fragmentation y est encore évidente, entre une périphérie où
s’opposent bidonvilles et gated communities (habitations, commerces, bureaux) et un centre urbain dégradé et
paupérisé.
A Johannesburg, l’idée d’espace public est une idée nouvelle, depuis la fin de l’Apartheid. Les rues assurent
principalement une fonction utilitaire : on s’y déplace (beaucoup en voiture), on achète éventuellement à un
marchand de rue (un « hawker »), mais on ne flâne pas, on ne s’y retrouve pas. La ville est connue pour sa violence,
ce qui explique l’importance accordée à la sécurité (formelle ou informelle) des bâtiments, y compris chez les classes
sociales les plus défavorisées ou pour des immeubles squattés. Si cette image évolue (comme en témoignent les
travaux titanesques entrepris par la Municipalité à l’occasion de la Coupe du Monde de 2010 et plus globalement
pour proposer un centre-ville compétitif sur la scène internationale), Johannesburg demeure une Ville où une grande
partie des habitants riches n’ose pas s’aventurer dans le centre-ville.
 
22 ans après la fin de l’Apartheid, une ville en effervescence qui se ré-invente – l’exemple de Maboneng
« Jozi » est actuellement, comme nombre de Villes sud-africaines, en train de poursuivre un travail de
(re)construction de l’identité de la Nation Arc-en-Ciel – un mouvement dans lequel le redéveloppement des centres
urbains comme lieux de rencontre, d’interactions, prend tout son sens.
Initiée en 2009, la régénération de Maboneng repose sur les épaules d’un développeur privé, Propertuity. Elle s’est
initialement déployée le long de deux avenues parallèles, Main Street et Fox Street, dans des bâtiments industriels
désaffectés. Premier né de l’entreprise de réhabilitation, Arts on Main est devenu un bâtiment emblématique de ce
quartier. Conservant une esthétique industrielle, Arts on Main s’intègre dans un paysage urbain toujours clairsemé
d’industries actives, tout en apportant de nouvelles dimensions. Structuré autour d’une cour intérieure, il accueille
un restaurant, des ateliers d’artistes (il doit notamment sa célébrité à l’installation immédiate de William Kentridge,
artiste sud-africain à la renommée internationale), des lofts, des boutiques, et, tous les dimanches, un marché
fréquenté par des habitants du quartiers et des gated-communities du Nord de la Ville.
Rapidement, le projet a changé d’envergure. Le « Maboneng Precinct » compte aujourd’hui 8 bâtiments
développés (sur les 38 du portfolio du propriétaire), au sein desquels 16 restaurants, un théâtre, le seul cinéma
indépendant de Johannesburg, des boutiques, les commerces de petits artisans… et une grande diversité de
logements, de la chambre d’étudiant à l’appartement panoramique. Maboneng affirmait dès l’origine un souci de
mixité fonctionnelle, auquel s’est ajoutée, de façon de plus en plus affirmée, une aspiration à la mixité sociale.
C’est d’ailleurs dans la rue que se lit la plus grande ambition de ce projet  : Maboneng offre des rues ouvertes, que
traversent les chiffonniers du quartiers (qui résident à 200 mètres sur Fox Street), dans lesquelles viennent jouer les
gamins des environs pauvres (un skate park a été installé à leur intention par une des associations du quartier)… et
dans lesquelles le badaud peut s’arrêter pour prendre un café en terrasse, voire sortir son ordinateur pour travailler.
Maboneng : un paysage de cafés et boutiques comme on en voit partout ?
La description peut paraître trop familière pour ceux qui ne connaissent pas Johannesburg. Ces quartiers, on en a
parcouru tant, à Shanghai, Berlin, en France, aux Etats-Unis. Alors pourquoi un tel engouement ? Parce que
justement, le théâtre qui accueille cette scène rejouée 100 fois à travers le monde est celui d’une ville qui souffre
souvent de sa propre violence – et de la représentation que le monde en a.
Dès lors, s’installer professionnellement ou personnellement à Maboneng est décrit comme un geste presque
citoyen pour renouer avec la Ville. Et c’est ce qu’expérimentent conjointement le développeur privé, les habitants du
quartier et la vie associative, en dialogue avec la Municipalité. Certes, le quartier demeure sécurisé par des gardes,
mais, sans mur, il est ouvert à tous – les « recyclers » (chiffonniers) continuent de le traverser, des enfants des
quartiers pauvres jouent dans la rue, les jeunes viennent observer le marché. Et au-delà, le Maboneng Precinct
travaille à laisser une place à tous ceux qui souhaitent faire partie du projet, quelque soit leur origine.
Cela passe par des innovations, comme celle qui vise à intégrer les « recyclers » du quartier dans le système de
ramassage des poubelles du quartier, pour leur proposer des revenus plus réguliers, et au-delà de meilleures
conditions de vie ; par le développement d’un des anciens bâtiments industriels pour créer des logements sociaux,
au profit notamment des personnes chargées des transports, de la sécurité, du nettoyage du quartier. C’est aussi
ouvrir continuellement la porte à des primo-entrepreneurs qui arrivent la tête pleine d’idées - ou comment un
container devient un restaurant de grillades sud-africain ou une boutique de chapeaux faits à la main.
Maboneng propose un mode de vie alternatif qui attire effectivement ces artistes, hipsters et autres bobos que l’on
pourrait qualifier de « gentrifiers »… Mais ce mode de vie place justement la mixité sous toutes ces formes comme
principe structurant, il se nourrit des initiatives et dynamiques locales, celles qui viennent des gens, pour les
assembler, les synthétiser selon une logique organique. Quand la mixité sociale et fonctionnelle devient le moteur de
la régénération urbaine, l’expérience mérite d’être suivie.
 

Mots Clés
Le Sud s’urbanise à vive allure, plus vite encore que ne l’avait prédit le célèbre rapport du Club de Rome,  Limits of
Growth, publié en 1972. Ses villes désormais absorbent plus de 90 % de la croissance démographique urbaine
mondiale. Au regard de cette nouvelle poussée urbaine, une question mérite d’être posée : comment les villes du
Sud seront-elles capables de supporter un tel choc démographique, elles qui connaissent déjà d’insurmontables
problèmes en termes de pauvreté, de logement, d’infrastructure sanitaire, d’insécurité, d’accès à l’eau, de pollution,
etc. ? De toute évidence, les solutions imaginées jusqu’à présent par les institutions internationales ne pourront
durablement infléchir la tendance à la précarisation et à l’informalisation croissante d’un nombre toujours plus grand
de citadins. Sans une révision des logiques et orientations fondamentales qui commandent les formules et projets de
développement urbain portés par ces mêmes institutions, le processus d’« urbanisation sans développement » que
connaissent de nombreuses villes du Tiers Monde aura sans doute encore de beaux jours devant lui. Des idées
pourtant existent. Des propositions « alternatives » sont avancées. Mais elles ne trouvent encore qu’un faible écho
sur la scène internationale. De leur côté, les acteurs urbains se mobilisent et initient avec succès des projets
novateurs en termes de développement urbain. Mais, très localisés, leur portée et le impact restent très limités à
l’échelle des villes.
Introduction : une vision « enchantée » de la ville et de l’urbanisation
L’humanité vient de franchir un cap historique. Désormais une personne sur deux dans le monde vit en ville. Et d’ici
2030, le nombre de citadins devrait avoisiner les 5 milliards, soit 2/3 de la population mondiale ! Ce boom urbain
aura lieu presque entièrement dans les villes des pays en développement qui absorberont plus de 90  % de cette
ultime poussée démographique. En 2030, environ 4 milliards de personnes dans le Sud vivront en villes, soit 81  % de
la population urbaine de la planète ! Contrairement à certaines idées reçues, les trois quarts de cette croissance
seront le fait d’agglomérations moyennes ou secondaires de moins de 500 000 habitants voire de bourgades peu
peuplées, la plupart de très faible visibilité, dépourvues de services et d’équipements suffisants que pour faire face à
cette vague démographique. De même, c’est l’Afrique qui connaîtra – et connaît d’ores et déjà – la croissance
urbaine la plus spectaculaire. Sa population urbaine, à l’instar de celle de l’Asie, doublera vraisemblablement en
l’espace d’une décennie. Devant une telle évolution une question mérite d’être posée  : comment les villes du Sud
seront-elles capables de supporter un tel choc démographique, elles qui connaissent déjà d’insurmontables
problèmes en termes de pauvreté, de logement, d’infrastructure sanitaire, d’insécurité, d’accès à l’eau, de pollution,
etc. ?
Le Fonds des Nations Unies pour le développement reste sur ce point étonnement confiant et optimiste par
rapport à cette croissance urbaine. Dans son dernier rapport (2007) consacré à la question, il voit toujours dans cette
tendance à l’urbanisation du Sud de réelles opportunités en termes de développement. Même si le rapport fait état
de la montée de la pauvreté [1] et des nouveaux risques urbains, il promeut presque une vision « enchantée » de
l’urbanisation pourvues de toutes les « qualités ». La ville serait un moteur puissant pour le développement grâce à
des atouts présentés comme « inhérents » : concentration humaine, économie d’échelle, proximité des service de
base, employabilité, possible réduction de l’empreinte écologique, etc. La conclusion est sans appel : l’urbanisation
est une chance pour le Sud pour autant qu’elle s’accompagne de politiques appropriées.
Mais qu’est-ce que l’UNFPA appelle « politiques appropriées » ? Le rapport assez curieusement n’entre pas dans le
détail de ses propositions, pas plus qu’il ne s’intéresse aux causes du profond « malaise urbain » vécu actuellement
dans l’hémisphère Sud. Publié un an plus tôt, un autre rapport, celui d’ONU-Habitat (2006) avait adopté un tout
autre ton. Loin du style consensuel et des prédictions « optimistes » de l’UNFPA – et d’une certaine « idéalisation »
du fait et de l’avenir urbain – il sonnait plutôt comme un avertissement quant à la trajectoire singulière prises par la
plupart des villes du Sud.
L’avantage urbain en question
Aussi, Anna Tibaijuka, directrice d’ONU-Habitat déclarait-elle lors de la présentation de ce dernier rapport à
Vancouver en 2006 : « Depuis longtemps nous suspections que la vision optimiste générale de la ville ne
correspondait pas du tout à la réalité sur le terrain. Ce rapport montre très concrètement qu’il existe au sein d’une
même ville en réalité deux villes - d’un côté celle abritant les individus qui tirent tous les bénéfices de la vie urbaine, de
l’autre, les bidonvilles où les gens vivent parfois dans des conditions bien pires que leurs correspondants ruraux  » (The
Guardian, 2006). De fait, s’il on s’en tient aux plus récentes statistiques urbaines, qui montrent une croissance
spectaculaire de la pauvreté et des inégalités urbaines, il semblerait que de nombreuses villes du Sud, sinon la
majorité d’entre elles, aient perdu leur statut de « productrices de bien-être » pour une part de plus en plus
importante de leurs habitants. La campagne, considérée comme jusque là comme le lieu par excellence de
production et de reproduction de la misère, cède peu à peu ce douteux privilège à la ville (ONU-Habitat, 2006). Le
dualisme classique « villes-campagnes » semblent se transporter au cœur de la cité, devenue lieu d’une
« polarisation obscène », où inégalités se cumulent, se renforcent et s’approfondissent (Harvey, 2001). De fait, les
écarts en termes de conditions de vie entre habitants des quartiers urbains informels et les ruraux tendent à
disparaître en certains endroits ; alors qu’ils se creusent dangereusement selon le lieu de résidence dans une même
ville. Plus que jamais les villes se divisent en deux monde presque complètement hermétiques  : « entre les nantis et
les destitués, les jet-setters mobiles et les habitants immobiles des bidonvilles, les super-consommateurs et les zéro
consommateurs (…) les riches globalisés et les pauvres localisés » (Henry, 2006). Non plus seulement « résiduelle »
comme par le passé, la pauvreté urbain signifie aussi des exclussions accrues, qu’elles soient sociales, culturelles ou
résidentielles.
L’explosion des bidonvilles (36 % de croissance dans les années 1990, un milliard de personne vivant actuellement
dans ce type d’habitat informel, le double estimé dans une bonne trentaine d’années) est la conséquence la plus
visible de la voie prise par le processus d’urbanisation dans le Sud. Autrefois étape transitoire, le bidonville tend de
plus en plus à un lieu de « résidence » permanent pour les nouveaux arrivants ; le seul débouché possible pour une
main-d’œuvre devenue excédentaire. Les portes de sortie s’y font rares. L’ascenseur social ne fonctionne plus. Quant
à l’avantage urbain d’un meilleur accès à l’éducation et à la culture, il demeure, comme le souligne ONU-
Habitat, « un mythe pour la majorité des habitants des bidonvilles ». Une situation d’autant plus préoccupante que la
population des bidonvilles est majoritairement jeune et l’est de plus en plus, l’accroissement naturel ayant pris la
relève des migrations dans le processus d’urbanisation.
Urbanisation et mondialisation dans le Sud : une liaison dangereuse
Ce qui frappe pourtant dans le rapport de l’UNFPA c’est sa croyance inébranlable en la capacité «  naturelle » des
villes – à surmonter ses problèmes et à produire du bien-être humain, en supposant une nécessaire interaction
mécanique entre croissance économique, développement et amélioration des conditions d’existence.
Les institutions internationales ont beau citer l’exemple de certaines villes « émergentes » comme Pune, Bangalore
ou Pékin, bonne élèves de la globalisation, mais on pourrait tout aussi bien opposer à ces nouvelles villes hight tech
Lagos, Kinshasa, Karachi, Lima, Dacca, Guatagualpa, ou encore nombre de villes, grandes, petites et moyennes sur les
trois continents (Asie, Afrique, Amérique) où inégalité et pauvreté on atteint des sommets depuis trois décennies. Là,
la mondialisation néolibérale et l’insertion économique des villes ont moins été synonymes de progrès que d’une
véritable « régression » et « involution urbaine ».
Comme explication à ce « mal développement urbain » il faut y voir en partie les recettes néolibérales (austérité
budgétaire, libéralisation, privatisation, dérégulation) appliquées aux villes du Tiers Monde depuis trois décennies,
dont les fameux PAS. Afin disait-on de rendre ces villes plus productives et plus attractives aux investissements
étrangers, elles ont été poussées dans une logique de libéralisation et de concurrence (dans un nouveau contexte
macroéconomique mondial). Les effets de cette première période d’ajustement urbain ont été catastrophiques, pour
ne pas dire cataclysmiques sur de nombreuses villes africaines (alors en pleine croissance). Les villes sont devenues
des lieux de polarisation extrême qui ont reproduit à leur échelle, projeté et imprimé dans leur espace les croissantes
inégalités et contradictions engendrées par ¼ de siècle de réformes libérales et de concurrence inter et intra urbaine
acharnée. Partout ou presque la tendance à la précarisation et à l’informalisation d’un nombre toujours plus grand
de citadins s’est trouvée confirmée et aggravée.
L’intense concurrence entre les villes, alimentée par les processus de mondialisation, a de manière quasi générale
renforcé les inégalités intra et inter urbaines et privilégié quelques grandes villes, en particulier les métropoles des
pays émergents, aux dépens des autres, capitales, villes moyennes ou petites, ne disposant d’aucune structure
d’accueil – ou présentant un avantage comparatif quelconque – pour attirer les capitaux nationaux et étrangers
(Davis, 2006). Etre compétitive, c’est-à-dire s’adapter et offrir les conditions les plus favorables aux investissements
étrangers (infrastructures économiques appropriés, terrain bon marché, avantages fiscaux, main-d’œuvre flexible et
disciplinée) ou dépérir, tels sont les deux seuls choix qui se sont offerts à elles. C’est dire que les villes se sont vues
soumises à la pression toujours plus grande des marchés et des investisseurs internationaux (qui se disputent
maintenant l’énorme potentiel des marchés émergents) qui ont pu eux-mêmes décréter quelles étaient les villes
utiles et celles qui ne l’étaient pas. Des clivages, souvent historiquement déterminés, que l’aide internationale va
accentuer puisqu’elle va de plus en plus être conditionnée à la capacité des villes à tirer vers le haut la croissance
économique nationale (Osmont, 2005). Sans parler de l’intense concurrence fiscale que se livrent les villes qui les
prive de précieuses ressources pour leur développement social et humain (Alternatives Sud, 2007).
Ensuite, partout ou presque, la libéralisation du territoire urbain a détourné l’épargne nationale vers le juteux
marché foncier, engendré un boom spéculatif et une hausse sans précédent des prix de l’immobilier au profit de
nouveaux entrepreneurs de logements. De leurs côtés, les processus de décentralisation ont abouti à vider les
caisses des municipalités et fini par faire reposer tout le poids de la charge fiscale sur les communautés locales
(Dupont, 2005). Quant aux partenariats public-privé censés assurer la couverture des besoins des communautés tout
en leur donnant une voix et un rôle dans la gestion des affaires publiques, leurs résultats sont bien plus que mitigés.
Rarement, les objectifs initiaux ont été atteints ou de manière partielle. Seuls les besoins solvables ou les demandes
d’acteurs influents ont dans la plupart des cas été satisfaits. Les autres demandes, celles des populations les plus
déshéritées, sont restées à la charge des ONG, des collectivités publiques et des communautés urbaines (Miraftab,
2004). De manière quasi générale enfin, la privatisation – à peine voilée dans le cadre du partenariat public-privé –, a
renchéri les prix des services urbains, en vertu du principe du recouvrement des coûts, sans pour autant étendre
substantiellement la couverture.
Une orientation inchangée
Le rapport de l’UNFPA reste pourtant étonnement évasif sur ces questions. Contrairement à celui d’ONU-Habitat
qui pointait ouvertement la responsabilité des politiques de restructuration libérale, et recommandait
impérativement le retour de l’Etat dans la gestion des villes, l’UNFPA continue à appuyer, contre vent et marrée, un
modèle de développement urbain imposées par les institutions internationales et dont on commence maintenant à
voir les effets pervers. Aussi, peut-on y lire, « La concurrence économique se mondialise de plus en plus ; les villes sont
mieux à même de tirer parti des perspectives de la mondialisation et de créer des emplois et des revenus pour
d’avantage d’individus ». Et de maintenir que le mal développement urbain tient principalement à un problème
de « mauvaise gouvernance ».
Voilà des « poncifs » véhiculés par les institutions internationales depuis la fin des années 1970 qui ont la vie dure.
C’est oublier le piège qu’a constitué pour les villes – soumise aux politiques néolibérales – leur insertion dans
l’économie globale. Oublier qu’on a plutôt assisté ces dernières dans de nombreuses villes à une chute du revenu
urbain et à un renforcement des inégalités inter et intra-urbaines. Oublier que si des emplois stables et relativement
bien rémunérés ont été créés ils sont quantité négligeable par rapport à la croissance vertigineuse de l’informel
(8,5/10 des emplois créés dans le monde en développement) et des emplois de seconde catégorie. Pensons aux
conditions de travail dans les maquillas en Amérique centrale ? Est-ce de cette manière que l’UNFPA entend « Libérer
le potentiel de la croissance urbaine » (sous-titre du rapport), ce qu’en réalité se sont évertuées à faire les politiques
urbaines des institutions internationales. Tel était en tout cas dès le début leur objectif explicite («  libérer le
développement en rendant les villes attrayantes pour les investisseurs étrangers »).
Les concentrations urbaines présentent, comme le signale l’UNFPA, certes potentiellement des avantages du point
de vue social, économique, culturel et environnemental. Mais encore faut-il bien voir qu’il s’agit là d’avantages
théoriques, tirés de l’expérience et de la trajectoire des villes européennes. C’est que dans les villes du Sud –
observant au plus près les réalités urbaines - ces « avantages supposés » se sont convertis bien souvent en nouveaux
acteurs de risques.
Le nécessaire retour à un développement endogène : le modèle de Friedman
Pour accablant que soit le constat, il n’a pas pour autant débouché sur une révision des logiques libérales qui sous-
tendent et commandent les projets urbains des organisations, des pays donateurs et des gouvernements nationaux.
Même si un accent nouveau est mis sur la « lutte contre la pauvreté, » la « bonne gouvernance » et la « participation
de la société civile », l’orientation « classique » est restée inchangée. La croissance, la compétitivité et l’attractivité
urbaine restent les objectifs prioritaires. La libéralisation et la dérégulation des territoires de la ville vont bon train.
Comment, dans ces conditions faire face aux nouveaux défis urbains ? De toute évidence, ni les programmes ciblés
à destination des plus pauvres, trop souvent limités et peu adaptés aux environnements urbains spécifiques ; ni les
projets visant à formaliser le monde de l’informel (aides à la création de micro-entreprises, facilités de crédits, etc.)  ;
ni une augmentation substantielle de l’aide au développement, et moins encore l’ensemble de ces stratégies qui
reposent sur la confiance inébranlable en un « marché autorégulateur » censé assurer au plus grand nombre
infrastructures et services appropriés, ne suffiront à « améliorer les conditions de vie de 100 millions d’habitants de
bidonvilles d’ici 2020 », 11e cible du huitième Objectif du Millénaire. Et encore, cet objectif apparaît-il bien modeste
et minimaliste au regard du raz-de-marée à venir. D’ici-là en effet ce n’est non pas 100 mais bien 400 millions de
personnes – selon les prévisions les plus basses – qu’il faudra loger décemment .
A l’initiative des autorités urbaines, de partis politiques, des organisations de la société civile, des projets de
développement urbain ont été lancés qui portent déjà leurs fruits. Des expériences inédites de gestion de la cité ont
montré leur efficacité sur le plan social, environnemental, sanitaire ou de la mobilité. Pensons au budget participatif
de Porto Alegre repris par de nombreuses villes brésiliennes ; aux plans de développement intégré de la municipalité
de Curitiba ; aux succès – malheureusement trop peu nombreux – des quelques Agenda 21 locaux mis en oeuvre
dans plusieurs villes. Mais, très localisés, la portée de ces initiatives reste limité. Leur fragilité chronique. Méconnues,
leur écho est faible sur la scène internationale, quand elles ne suscitent pas un désintérêt pur et simple de la part des
acteurs internationaux obnubilés par la croissance et l’efficacité urbaine. Et puis que peuvent ces initiatives face aux
orientations et pressions économiques internationales.
S’attaquer efficacement aux racines du « malaise urbain » nécessiterait la remise en question de ce modèle de
développement urbain imposé au Sud. Des solutions existent. Aussi, John Friedmann (1992), spécialiste des villes
chinoises, propose-t-il un modèle de développement urbain de type endogène qui s’appliquerait non seulement à la
ville mais aussi à sa région alentours (toutes deux liées par des relations de type organique). Plutôt que de chercher à
adapter la ville à son environnement économique externe, il s’agirait plutôt de mobiliser et les énergies et les
ressources locales. Et l’auteur de proposer sept domaines (« clusters ») dans lesquels les autorités urbaines, mais
aussi les agences bilatérales et multilatérales, devraient investir coûte que coûte pour garantir un développement
urbain harmonieux (plutôt que de chercher à adapter son cadre aux investisseurs externes) : 1) les besoins humains
fondamentaux (éducation garantie, accès à des services de qualité, un logement à prix abordable) ; 2) le soutien à
l’émergence d’une société civile organisée et indépendante ; 3) l’héritage urbain (patrimoine et vie culturel) qui sert
au renforcement de la cohésion + identification ; 4) les institutions culturelles, intellectuels, artistiques ; 5) gestion
durable ressources naturelles (fermes, pêcheries, lacs, plages, forêts 6) la qualité de l’environnement physique (air,
eau, qualité des sols, gestion des déchets etc) ; 7) la qualité de l’infrastructure urbain (énergie, communication,
transport).
Bibliographie
 Davis Mike (2006), Le pire des mondes possibles. De l’explosion urbaine au bidonville global, La
Découverte, Paris.
 Dupont Véronique (2005), « La gouvernance urbaine en Inde à l’ère de la libéralisation et de la
décentralisation », Villes en développement, mars-juin 2005, n°67-68, p. 10-11.
 Centre tricontinental (2007), « Evasion fiscale et pauvreté », Alternatives Sud, vol. XIV-1, Syllepse, Paris.
 Centre tricontinental (2008), « Explosion urbaine et mondialisation », Alternatives Sud, vol. XIV-2,
Syllepse, Paris.
 Friedmann John (1992), Empowerment. The Politics of Alternatives Development, WileyBlackwell.
 The Guardian (2006), « Urban Population to Overtake Country Dwellers for the First Time », 16 juin
(www.guardian.co.uk).
 Harvey David (2001), Megacities Lecture 4, Amersfoort, Twijnstra Gudde.
 Henry Etienne (2006), « La mégapole contre la ville, ou le dualisme réhabilité », Cahier Voltaire.
 Miraftab Faranak (2004), « Public-Private Partnerships. The Trojan Horse of NeoliberalDevelopment ? »,
in Journal of Planning Education and Research, 24, p. 89-101.
 Osmont Annick (2005), Développement urbain ou ajustement sectoriel des villes ? La politique urbaine
de la Banque mondiale, IPAM-AITEC, www.reseau-ipam.org.
 UNFPA (2007), Etat de la population mondiale 2007. Libérer le potentiel de la croissance urbaine, Fonds
des Nations Unies pour la population, New York.
 UN Habitat (2006), State of the World’s cities 2006/2007.
Notes
[1] Singulièrement il parle de la visibilité accrue de la pauvreté
Les opinions exprimées et les arguments avancés dans cet article demeurent l'entière responsabilité de l'auteur-e
et ne reflètent pas nécessairement ceux du CETRI.
Autorisation de reproduction ou traduction à demander à cetri (at)cetri.be

EXPLOSION URBAINE ET MONDIALISATION


La croissance des inégalités et de la pauvreté urbaines, dont l’explosion des bidonvilles est l’expression la plus
forte, résulte d’un modèle d’« urbanisation sans développement » induit par les ajustements structurels et le « tout-
au-marché ». La ville néolibérale, lieu de polarisation extrême, apparaît à la fois comme le support privilégié et
l’horizon ultime d’une certaine mondialisation.
par Laurent Delcourt
  imprimer 
  partager
« Les qualités de la vie urbaine au 21e siècle définiront les qualités de la civilisation elle-même. Mais si l’on juge
superficiellement l’état des villes mondiales, les générations futures ne trouveront pas que cette civilisation soit
particulièrement conviviale » (Harvey, 2001).
L’humanité vient de franchir un cap historique. Selon le dernier rapport d’ONU-Habitat (2006), le monde compte
désormais plus d’urbains que de ruraux. Du fait de l’imprécision des statistiques, peut-être cette transition
démographique, révolution silencieuse s’il en est, a-t-elle déjà eu lieu au tout début de la décennie. Quoi qu’il en soit,
la tendance séculaire à l’urbanisation, loin de s’essouffler, devrait se poursuivre. En 2030, les villes abriteront 5
milliards d’êtres humains sur un total de 8,1 milliards, soit deux tiers de la population mondiale. Si la croissance
démographique urbaine se maintient au rythme actuel, les villes accueilleront encore chaque jour pas moins de 180
000 nouveaux citadins (nouveaux nés et migrants), l’équivalent chaque année de presque deux fois la ville de Tokyo
(près de 35 millions d’habitants) !
La population rurale quant à elle commencera à décroître à partir de 2015. Entamant alors une courbe
descendante (- 0,32% par an), la campagne se videra de quelque 155 millions de ruraux sur 15 ans (jusqu’en 2030).
C’est dire que le pouvoir d’attraction qu’exercent les lumières de la ville sur le monde rural n’est pas prêt de faiblir.
Les villes, pour paraphraser Braudel, resteront voraces et continueront à absorber incessamment les paysans (1986).
Au moins pour un temps ! Jusqu’en 2050 peut-être, quand la planète aura semble-t-il atteint son maximum
démographique de 10 milliards d’habitants, dont trois quarts d’urbains.
Ce boom urbain concernera principalement les pays du Sud. D’après ONU-Habitat (ibid.), 95% de cette ultime
poussée démographique des villes aura lieu dans les zones urbaines des pays du tiers-monde. Leur population, qui
augmente en moyenne deux fois plus vite que les taux de croissance nationaux, devrait doubler au cours de la
prochaine génération pour atteindre le chiffre hallucinant de 4 milliards de personnes (80% de la population urbaine
mondiale). D’une région à l’autre, la forme, le rythme et le niveau d’urbanisation ne seront toutefois pas identiques.
Aussi, l’Amérique latine, fortement urbanisée, a entamé sa transition urbaine voilà déjà près de deux décennies.
Après le boom démographique et migratoire des années 1950-1980, encouragé dans un premier temps par les
politiques de substitution aux importations, le taux de croissance urbaine s’est considérablement ralenti pour se
stabiliser actuellement à 2,3%. Seuls l’Amérique centrale, certains pays andins et des Caraïbes continuent à
enregistrer des taux d’urbanisation supérieurs à la moyenne régionale.
Certes, pas aussi importants que le continent asiatique qui affiche des taux annuels de 2,9% (Asie du Sud) à 3,8%
(Asie du Sud-Est). Ici, ce sont les processus migratoires qui alimenteront principalement la croissance des villes. Le
cas de la Chine est à ce titre emblématique. On estime que 200 millions de Chinois ont quitté la campagne pour la
ville depuis la fin des années 1970. Et au cours de la prochaine décennie, 250 à 350 millions de paysans devraient les
y rejoindre (Davis, 2006) !
Mais si l’Asie, et en particulier la Chine, comptent d’ores et déjà le plus grand nombre de citadins de la planète
(50% du total), c’est à l’Afrique que revient le « privilège » de connaître la croissance urbaine la plus forte, soit un
taux annuel de 4,8% pour l’ensemble du continent. Entre 1950 et 2000, sa population urbaine a été multipliée par 9,
passant de 32 à 279 millions de personnes. Plus d’un Africain sur deux devrait vivre en ville en 2015 (53,5% contre
39,7% actuellement) ; environ 87 % de la population totale, selon certaines estimations, en 2050 (Nolan, 2006).
Ce déchaînement démographique, qualifié tantôt d’« explosion » tantôt d’« hyperinflation » urbaine, est rendu
visible surtout par la forte croissance des mégapoles dans le Sud. Mexico a déjà passé le cap des 20 millions
d’habitants ; elle est directement talonnée par São Paulo, Mumbai et Delhi. Dans une quinzaine d’années, Djakarta,
Dacca ou encore Karachi auront largement dépassé ce seuil. A ce moment, Mumbai comptera déjà plus de 30
millions d’habitants. Plus impressionnante encore est la croissance vertigineuse des grandes villes africaines.
Kinshasa (8,9 millions d’habitants) et Lagos (13,4 millions) ont vu leur population multiplier par 40 depuis les années
1950 ; Nairobi (2,82 millions) par 30. A titre de comparaison, il a fallu un siècle (de 1800 à 1900) à Londres, en pleine
révolution industrielle, pour voir sa population se multiplier…par 7 ! Avec un taux de croissance urbaine annuel
d’environ 5%, Lagos, la plus grande ville d’Afrique, devrait abriter en 2030 près de 23 millions d’êtres humains !
Si l’explosion spectaculaire des mégapoles de plus de 8 millions d’habitants frappe d’abord et avant tout les esprits,
elle ne suffit cependant pas à rendre compte de l’ampleur des processus d’urbanisation dans le tiers-monde. Ces
« hypervilles » ne joueront en réalité qu’un rôle secondaire dans l’augmentation de la population urbaine [1]. Près
des trois quarts en effet de cette future croissance démographique sera le fait de villes secondaires, moyennes et
petites, voire d’agglomérations ou de bourgades de faible visibilité, peuplées à peine de quelques milliers d’âmes  ;
et, comme le souligne ONU-Habitat, pratiquement dépourvues de services et d’équipements adéquats (2006).
En Afrique, les petites villes de moins de 10 000 habitants, majoritaires dans le paysage urbain, connaissent elles
aussi des taux de croissance démographique impressionnants. En Amérique latine, ce sont les villes de moins de 500
000 habitants qui enregistrent les taux les plus élevés. Quant à l’Asie, elle voit se multiplier le nombre de villes
« millionnaires ». L’Inde en compte déjà 35, la Chine 174, soit à elles seules plus de la moitié des villes de plus de 1
million d’habitants dans le monde (400 actuellement, 555 en 2015). En Chine, nombreux sont aussi les
établissements humains qui acquièrent, par changement de classification, le statut nouveau de ville.
Partout, ces villes émergentes et ces mégapoles ne cessent de s’étaler horizontalement, grignotent et empiètent de
plus en plus sur les territoires alentours. De fait, le monde rural s’urbanise in situ. C’est maintenant non plus les
paysans qui vont à la ville, mais la ville qui va aux paysans. Par de complexes processus de « conurbanisation », les
villes repoussent aussi loin que possibles leurs frontières ; établissent entre elles de nouveaux nœuds ; contournent
les bourgades, encerclent et enferment les villages. Et se dessinent de vastes zones polycentriques, entrecoupées
d’espaces hybrides semi-ruraux, semi-urbains.
En Chine, d’ores et déjà de gigantesques complexes urbains se forment sur la côte par maillage de villes centrales
et secondaires. Dans ce pays, la surface bâtie des villes pourrait être multipliée par 5 d’ici 2050  ! Mexico, quant à elle,
devrait continuer à s’étendre pour former avec ses villes périphériques une seule et même zone de conurbanisation
qui regroupera près de 50 millions de personnes, soit 40% de la population nationale. L’Ouest de l’Afrique n’est pas
en reste avec la vertigineuse croissance et l’extension territoriale de ses villes côtières. De Bénin City à Accra en
passant par Lagos, sur moins de 600 km, ce sont près de 300 entités urbaines qui fleurissent et définissent un long
couloir à forte densité démographique qui, comme le souligne Mike Davis, deviendra sans nul doute la plus grande
« tache de pauvreté urbaine de toute la planète » (Ibid.).
Modèle d’urbanisation débridée
Parallèlement à leur rapide croissance démographique, les villes du Sud ont en effet vu littéralement exploser leurs
taux de pauvreté. Au point qu’elles pourraient bientôt abriter la majorité des pauvres de la planète, ravissant alors ce
statut peu enviable aux zones rurales. Selon l’ONU, la pauvreté pourrait toucher entre 45 et 55% de la population
urbaine mondiale en 2020. Et, plus dramatique encore, près de 78% de la population urbaine en Afrique
subsaharienne ! Les villes africaines abriteront alors quelque 400 millions d’urbains pauvres. Déjà, la très urbanisée
Amérique latine compte depuis la fin des années 1980 plus de pauvres urbains que de pauvres ruraux  : 134 millions
en zones urbaines en 1999 contre 77 millions dans les campagnes. En Asie, même si la pauvreté restera longtemps
encore le triste privilège des campagnes, en chiffres absolus, le continent compte d’ores et déjà le plus grand nombre
d’urbains pauvres de la planète.
La conséquence la plus apparente et la plus tragique de cette « urbanisation de la pauvreté » est la croissance
spectaculaire et la multiplication sans précédent depuis une quinzaine d’années des bidonvilles [2]. Selon les experts
onusiens, le nombre de personnes vivant dans ces zones d’habitat informel a progressé de 36% au cours des années
1990, rythme presque aussi soutenu que l’urbanisation stricto sensu. Désormais, près de 1 milliard de personnes s’y
entassent (un citadin sur trois dans le monde) ; 90% d’entre elles dans les seuls pays en développement. Et on
s’attend à ce que ce chiffre astronomique double d’ici 2050 ! Ici encore l’Afrique subsaharienne, le Sud et l’Ouest de
l’Asie donnent le ton (ONU-Habitat, 2006).
En Afrique subsaharienne, l’habitat informel représente déjà l’univers quotidien de 71 à 72% de la population
urbaine (90% en Ethiopie, au Tchad ou en Tanzanie). Au Kenya, les bidonvilles des deux grands centres urbains
(Mombasa et Nairobi) ont à eux seuls absorbé 85% de la croissance démographique urbaine entre 1989 et 1999. Une
évolution presque similaire pour Lagos. Son plus grand bidonville, Ajungle (90 000 habitants en 1972), abrite
désormais 1,5 million de personnes. Au total, on estime que les bidonvilles d’Afrique subsaharienne regrouperont
environ 332 millions d’urbains et on pense que ce chiffre pourrait doubler tous les quinze ans (Davis, 2006).
Dans les cinq grandes métropoles d’Asie du Sud (Karachi, Mumbai, Delhi, Calcutta et Dacca), ce sont quelque 15
000 communautés de bidonvilles qui ont fleuri regroupant à elles seules une population totale de 20 millions
d’habitants. Les bidonvilles de la capitale pakistanaise continuent d’afficher des taux de croissance deux fois plus
rapides que la population en général. Oranji Township, la plus importante communauté informelle de Karachi, abrite
déjà près de 1,2 million d’êtres humains. Les bidonvilles de la seule ville de Delhi « accueillent » quant à eux chaque
année encore près de 400 000 migrants. Si on y ajoute les nouveaux nés, quelque 10 millions de personnes devraient
s’y concentrer en 2015.
Avec des taux annuels de croissance des bidonvilles proches des taux de croissance urbaine [3], il apparaît de plus
en plus clairement qu’en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud et de l’Ouest, l’urbanisation est pratiquement
devenue synonyme de « bidonvillisation ». Autrement dit, c’est comme si le bidonville était devenu pour les
nouveaux arrivants la seule voie d’accès à la ville. Dans les autres régions, bien que les taux de croissance de l’habitat
informel soient plus bas que l’accroissement annuel de la population urbaine, ceux-ci n’en demeurent pas moins
encore très élevés. Tout comme le nombre de gens qui s’entassent dans les bidonvilles  : plus de 134 millions de
personnes en Amérique latine et dans les Caraïbes ; environ 290 millions en Asie orientale et du Sud-Est, soit
respectivement 31% et 28,5% de l’ensemble de leur population urbaine. Et ces taux sont largement dépassés au
Pérou (68,1%), aux Philippines (44,4%) ou encore au Brésil (36,6%).
L’explosion des bidonvilles, corollaire tragique de la forte poussée démographique des villes, indique que les
processus d’urbanisation ont pris dans le Sud une voie inédite. D’une certaine manière, la croissance des villes du
tiers-monde ramasse et condense sur quelques décennies deux siècles d’évolution urbaine dans le Nord, mais elle la
contredit aussi. Débridée, elle réfute toutes les théories classiques qui voyaient dans l’essor des villes le deus ex
machina du progrès économique et humain et prédisaient que la croissance urbaine entraînerait de facto une
amélioration globale des conditions de vie, en supposant une nécessaire interaction positive, voire l’existence d’un
lien mécanique entre urbanisation, croissance et développement.
Force est de constater que l’urbanisation du Sud est d’une toute autre nature. Sauf peut-être en Chine et en Asie
du Sud-Est. Mais ces deux régions ont aussi enregistré des taux de croissance économique spectaculaires qui leur ont
permis de tripler leur PIB depuis 1960. Ailleurs, rien de tel. Dans la plupart des autres pays en développement, «  la
croissance urbaine est privée de ces moteurs puissants que sont les exportations industrielles de Chine, Corée et
Taiwan, ainsi que de l’énorme afflux de capitaux » (Davis, 2006). Les deux dernières décennies y ont plutôt été
synonymes de croissance faible, de récessions, voire de désindustrialisation tendancielle comme en Inde, au Brésil,
au Mexique et en Afrique du Sud. Certains pays d’Afrique ont même enregistré des taux de croissance proches de
zéro ou négatifs qui ont plongé les villes dans un profond marasme au point que certains n’hésitent pas à parler de
« déséconomie urbaine » (Henri, 2006).
A quelques exceptions près, partout l’urbanisation s’est trouvée découplée de l’industrialisation, du progrès
économique et, plus largement, du développement humain. L’exemple de l’Angola, du Congo (RDC), de la Tanzanie
ou de la Côte d’Ivoire est paradigmatique : malgré des taux de récession de leur économie de 2 à 5% par an, ces pays
ont connu durant la même période une croissance annuelle de leur population de 4 à 8% (Davis, 2006). En principe,
ce ralentissement économique et la baisse subséquente de l’emploi et du revenu urbains auraient dû freiner, voire
inverser les flux migratoires. Il n’en a rien été. Le déluge urbain s’est poursuivi entraînant dans son sillage son cortège
de pauvreté et de bidonvilles, de sorte que l’« urbanisation sans développement » semble être devenue l’horizon
borné des villes du tiers-monde.
Urbanisation sans développement : résultat des ajustements
Cette forme perverse d’urbanisation n’est pas seulement le produit d’une croissance urbaine mal maîtrisée, comme
nombre d’analystes le laissent entendre. Pas plus qu’elle ne résulte d’une tendance lourde, imprévisible ou
irrépressible. Elle trouve en grande partie son origine et son explication dans une conjoncture mondiale particulière  :
la crise de la dette et la récession des années 1980. Dans un contexte de mondialisation économique accrue et de
restructuration néolibérale, elle s’est ensuite trouvée confirmée et aggravée par les politiques et les thérapies de
choc appliquées uniformément et de manière obstinée, malgré des indicateurs accablants, aux pays du Sud par les
institutions financières internationales, FMI et Banque mondiale en tête : les plans d’ajustement structurel (PAS)et,
au-delà, l’ensemble des stratégies d’ouverture et de dérégulation économiques promues à compter de cette
décennie.
La longue période de récession mondiale qui s’installe au milieu des années 1970 est plus durement qu’ailleurs
ressentie dans le Sud. Les effets de la hausse des prix du pétrole combinés à la chute du prix des matières premières
et à une inflation qui deviendra bientôt galopante, aggravés dans les zones rurales par des périodes de sécheresses
prolongées et de graves crises alimentaires, précipitent les fragiles économies du tiers-monde dans une phase de
déclin ou de stagnation. Parallèlement, avec la flambée des taux d’intérêt, les pays du Sud voient leur dette exploser.
Certains comme le Mexique se retrouvent au bord de la banqueroute ; les autres connaissent une dangereuse et
douloureuse spirale d’endettement, le tout sur fond d’une crise généralisée de l’emploi et d’une chute du revenu
moyen et des salaires réels tant en ville que dans les campagnes.
Présentés d’abord aux pays les plus endettés comme le moyen le plus sûr de renouer avec la croissance à travers
une meilleure maîtrise des dépenses publiques et une politique active d’ouverture économique et d’insertion sur les
marchés internationaux, les PAS, premières expressions d’un vaste chantier de réformes économiques que les
institutions financières internationales ne vont cesser de promouvoir et tenter de généraliser, n’aboutiront dans les
faits qu’à rendre la crise urbaine plus aigue. Privatisation des entreprises publiques et des services financiers,
suppression des barrières douanières, libéralisation du marché des capitaux, réduction drastique des dépenses
sociales et des subventions publiques, respect des équilibres macroéconomiques, etc., partout, le cocktail de
mesures proposées, rangées plus tard sous l’appellation de « consensus de Washington », est identique. Leur impact
sur les villes et le monde rural le sera tout autant.
Dans les campagnes, la dérégulation du marché, la suppression des subsides, la promotion du secteur industriel
agroexportateur, de même que l’importation de plus en plus massive de produits subsidiés en provenance du Nord
(parfois à titre d’aide alimentaire), corrélative à l’élimination des barrières douanières, et la chute des prix agricoles
qui s’ensuit, accentuent la pression sur les populations les plus pauvres et provoquent un exode rural massif
(Alternatives Sud, 2002). S’y ajouteront, ici ou là, d’autres facteurs aggravants qui vont peser de tout leur poids sur
l’augmentation des flux migratoires : mécanisation de l’agriculture, désastres naturels et guerres civiles, en Afrique
tout particulièrement [4]. De ces processus de « dépaysannisation », les villes récoltent largement les fruits, malgré
l’affaiblissement au même moment de leurs capacités d’accueil.
Les centres urbains du Sud subissent en effet eux aussi très durement le contrecoup des réformes structurelles où
elles sont souvent vécues au sein des couches populaires et des classes moyennes comme de véritables
catastrophes. Les privatisations, le « dégraissage » du secteur public, les politiques d’ouverture économique, l’arrêt
des subventions aux secteurs industriels et le recentrage sur quelques exportations jugées « essentielles »,
entraînent une chute brutale des emplois formels dans l’industrie et les services urbains ; et la croissance
concomitante non moins brutale des secteurs informels.
Premier laboratoire grandeur nature de l’ajustement, l’Afrique n’en sortira pas indemne. Au Congo (RDC), la part de
l’économie formelle dans le PIB chute de 4% rien qu’en 1982, l’année même de la signature par Mobutu du premier
PAS. La restructuration du secteur public jette ensuite près de 300 000 personnes à la rue (fonctionnaires publics,
enseignants, personnel médical, etc.) sans ou presque aucune indemnité. Quant au revenu moyen par habitant, il ne
cesse de dégringoler : 288 dollars mensuels en 1960 ; 116 en 1997, juste avant la guerre civile ; 88 dollars en 2001.
Aujourd’hui, plus de 90% de la population de Kinshasa tentent vaille que vaille de survivre à travers l’exercice d’une
activité informelle (Iyenda, 2005). Pour l’ensemble de l’Afrique subsaharienne, 78% des emplois non agricoles
relèvent maintenant du secteur informel. Vient ensuite l’Asie avec 67% (ONU-Habitat, 2006, 9). Ici encore, la
restructuration libérale est en grande partie responsable d’une augmentation du chômage urbain et de la croissance
de l’informel. A Mumbai notamment, où l’emploi industriel passe de 71,8% en 1970 à 55,7% en 1990 (Krishnan,
2005).
En Amérique latine également, un tel changement d’orientation économique n’a pu qu’avoir des conséquences
dramatiques sur la « société en général, urbaine en particulier » (Portes et Roberts, 2004). A Buenos Aires, le taux de
chômage passe de 3% en 1980 à 20% en 2001, et la part du secteur informel de 13 à 34%. Les villes de Montevideo et
São Paulo enregistrent elles aussi une forte augmentation du chômage : 7% et 9% respectivement entre 1980 et
2002/2003. Partout, en Amérique latine et dans les Caraïbes, parallèlement au déclin ou à la stagnation de l’emploi
formel, les activités informelles connaissent un spectaculaire essor. Au Pérou, la récession causée par les PAS fait
chuter l’emploi formel de 60% en 1980 à 11% à la fin de la décennie. La proportion de l’emploi informel urbain y frôle
actuellement les 61%. Et partout ailleurs sur le continent, elle est rarement au-dessous de 50%.
Seul le Chili, considéré comme le bon élève des politiques néolibérales, est parvenu à maintenir l’emploi urbain
voire à l’augmenter dans un premier temps, mais au prix d’un renforcement des inégalités en termes de salaires et
de conditions d’existence. La plupart des emplois qui y ont été créés sont, comme partout ailleurs sur le continent,
précaires, instables, sous rémunérés et dépourvus de toute couverture sociale (ibid.). En Amérique latine comme
dans les Caraïbes, le secteur informel a fini par devenir le premier pourvoyeur d’emplois, loin devant l’économie
formelle. Désormais, sur 10 emplois qui y sont créés, 7 relèvent du secteur informel – 8,5 en moyenne dans le monde
(ONU-Habitat, 2006).
D’après les projections de la Banque mondiale, la reprise économique globale, le retour de la croissance dans les
années 1990, de même que les « nouvelles opportunités » offertes par la mondialisation auraient dû donner une
nouvelle impulsion à l’emploi, combler l’abîme des inégalités héritées de la période antérieure et diminuer
substantiellement la pauvreté, urbaine en particulier. La réalité en est on ne peut plus éloignée. Les écarts ont
continué à se creuser et le nombre de pauvres urbains n’a cessé d’augmenter. Selon le PNUD, dans 46 pays
(majoritairement africains), les gens sont actuellement plus pauvres qu’en 1990 ; et, dans 25 pays, davantage de
personnes souffrent de la faim qu’il y a dix ans (2004).
Au Mexique, malgré les promesses faites lors de la signature du très médiatique Accord de libre-échange nord-
américain (Alena), le pourcentage de personnes dans un état de pauvreté extrême est passé de 16% en 1992 à 38%
en 1999. Au Brésil, en dépit de l’embellie économique des années 1990, les favelas de São Paulo ont connu une
croissance annuelle de 16,8% ; et ce taux a atteint 80% pour les seules villes d’Amazonie. En Asie du Sud-Est, la crise
des années 1997-1998, largement attribuée à la libéralisation financière et au boom spéculatif dans l’immobilier, a
plongé les fragiles classes intermédiaires dans une inévitable spirale de pauvreté. Situation similaire en Argentine où
la crise a créé des dizaines de milliers de nouveaux pauvres. Partout ou presque, les inégalités, tant en ville qu’à la
campagne, ont continué à se creuser pour atteindre aujourd’hui de nouveaux sommets (Davis, 2006).
Assurément, depuis les années 1980, les populations urbaines du Sud se sont retrouvées piégées au centre d’un
double mouvement : dérégulation et flexibilisation du travail d’une part, désengagement de l’Etat de l’autre. Un
désengagement qui s’est traduit surtout par une forte diminution des budgets sociaux et de l’investissement public
dans l’infrastructure, les soins de santé, le logement, l’éducation, etc. A Dar es-Salaam, les dépenses de services
publics par habitant chutent de 10% par an dans les années 1980. Au Mexique, elles ne correspondent en 1987 plus
qu’à la moitié de ce qu’elles étaient au début de la décennie. En Ouganda, le budget consacré aux soins de santé en
vient à être douze fois plus petit que celui consacré au remboursement de la dette (ibid.). Alors même que les
opportunités d’emplois stables et relativement bien rémunérés se feront de plus en plus rares en ville, les citadins
(anciens et nouveaux) se verront simultanément privés, au nom des politiques de rigueur budgétaire, des avantages
qu’offrait la vie urbaine en termes d’équipement et de protection.
Certes, au début des années 1980, la plupart des gouvernements du Sud avaient en partie déjà abandonné leurs
responsabilités sociales. Mais l’ajustement libéral, en démantelant les quelques services et infrastructures encore
existants, a renforcé et accélérer ce désinvestissement, et interdit du coup toute possibilité d’une politique publique
active en matière d’accueil et d’encadrement des nouveaux urbains. La croissance des inégalités et de la pauvreté
urbaine, dont l’explosion des bidonvilles est l’expression la plus forte, est en quelque sorte le résultat de ce double
goulet d’étranglement que les institutions internationales et les pays donateurs ont largement contribué à mettre en
place. Il n’empêche, ces politiques s’inscrivaient dans le droit fil d’un modèle de « développement » conçu
spécialement pour les villes.
Ville néolibérale : vision, discours et méthodes
L’intervention de la Banque mondiale dans le champ du développement urbain est tardive. Ce n’est qu’au début
des années 1970 qu’elle établit le rôle positif des villes, auparavant réputées dévoreuses d’investissements non
productifs, dans la croissance, l’ouverture des marchés et le développement (Osmont,1995). A partir de là,
l’institution financière produira un discours renouvelé sur la ville, devenu enjeu économique et stratégique majeur.
Sans cesse remanié et actualisé en fonction d’un contexte mouvant et de circonstances changeantes, ce discours
reposera en définitive toujours sur une même vision instrumentale de la ville et du développement urbain qui, elle,
ne souffrira aucune remise en question. Elle ne fera au contraire que se renforcer à mesure que se poursuivra le
processus de mondialisation.
Derrière ce regard neuf porté sur la ville, devenue instrument par excellence du développement et moteur de la
croissance, une préoccupation : comment rendre la ville plus productive, plus compétitive, donc plus attractive ?
Autrement dit, il s’agissait pour la ville de gagner en efficacité dans un monde globalisé et de plus en plus
concurrentiel, tout en mobilisant un minimum de moyens. Et cela passait nécessairement, pour la Banque, par la
création d’un climat politico-réglementaire et macroéconomique propice à l’investissement productif, la diminution
des coûts de transaction, la fin du « gaspillage » et, de fil en aiguille, un désinvestissement progressif de l’Etat au
profit du secteur privé jugé « plus efficient », la réduction drastique et le recentrage des dépenses publiques,
conditions sine qua non pour faire de la ville « a level playing field for competition » (un cadre concurrentiel
équitable) comme le rappelait encore un conseiller onusien, une dizaine d’années après le lancement en 1986 du
New Management Program, véritable codification de la nouvelle doctrine urbaine de l’institution (Bond, 2006).
La lutte contre la pauvreté n’était toutefois pas absente de cette doctrine. Au contraire, elle justifiait, commandait,
sous-tendait et était présentée comme le motif principal de son engagement dans le champ urbain. Après tout, les
statuts de la Banque la définissent d’abord et avant tout comme institution d’aide au développement. Ceci dit,
l’optique dès le départ était loin d’être désintéressée. Comme le rappelle Annik Osmont, « l’intention n’était
nullement philanthropique, mais s’inscrivait dans une logique de croissance économique : il convenait d’intégrer une
population potentiellement productive mais dont les conditions de vie étaient trop précaires et trop misérables pour
qu’elle puisse devenir une main-d’œuvre profitable à l’économie. Des populations urbaines mieux logées, vivant dans
de meilleures conditions de salubrité, mieux nourries, mieux éduquées, seront plus productives » (Osmont, 2005).
D’emblée la Banque mondiale insiste sur l’échec – en partie bien réel – des politiques publiques urbaines menées
par les gouvernements du Sud au cours de la période antérieure. Et, très vite, en propose le remède  : puisque l’Etat
n’était pas parvenu à juguler la pauvreté, le marché devait pouvoir relever le défi. Après tout, en toute bonne
orthodoxie économique, le marché n’était-il pas l’instrument le plus adéquat pour parvenir à une meilleure
allocation des ressources, ce qui à terme ne pouvait qu’être profitable aux populations urbaines les plus pauvres ?
C’est autour de cette conception hyper idéologisée de la ville, de son rôle, et d’un modèle opérationnel «  idéal-
typique » à visée universelle, devenu presque « totalitaire » à partir des années 1980, que s’articuleront tous les
projets, stratégies et formules de développement urbain de la Banque, appliqués partout de la même manière sans
égards pour les trajectoires particulières des villes du Sud et leurs spécificités sociales et culturelles (Id., 1995).
Il en va ainsi de l’intervention de la Banque mondiale dans le domaine de l’habitat populaire. Constatant l’échec des
politiques publiques en matière de logement – les classes moyennes et la fonction publique, principale clientèle des
gouvernements, en ayant souvent été les principales bénéficiaires –, la Banque préconise la fin des programmes de
construction subventionnée. En lieu et place, elle recommande une politique d’amélioration de l’habitat, via la
mobilisation de l’épargne privée et l’élargissement de l’offre foncière et immobilière, afin, selon elle, de limiter les
coûts et répondre au mieux à la demande solvable des plus pauvres.
Aussi, encourage-t-elle les programmes d’aménagement in situ des bidonvilles, les formules d’auto-construction
assistée, une révision des normes à la baisse en matière de logement, la création de nouvelles structures bancaires
pour élargir l’offre de crédit, ainsi que des mesures de régularisation des communautés informelles situées sur des
terrains publics, eux-mêmes souvent découpés, sur son insistance, en parcelles titularisables. Aux pouvoirs publics
est laissé l’investissement dans et le maintien de l’infrastructure lourde, devenue simple support d’un habitat qu’il
s’agit de rendre productif par l’amélioration du cadre de vie d’une main-d’œuvre « potentiellement » mobilisable
(Id., 2005).
Engagée dans un premier temps dans la mise en œuvre de ses propres programmes, la Banque abandonnera
bientôt ce rôle aux agences bilatérales d’aide et aux ONG pour s’investir pleinement à partir des années 1980 dans
l’entreprise de réformes institutionnelles exigées par les PAS. Sans contrevenir à ses objectifs de départ – la
diminution des coûts et la recherche d’efficacité –, elle ne parlera alors plus que de « restructuration des services
techniques et financiers municipaux, de la mise en place de plans comptables et de cadres budgétaires locaux (…), de
la restructuration des systèmes de financement de l’habitat et des organismes publics de construction, de la
privatisation des parcs de logements sociaux et, bientôt de l’ensemble des services urbains. Selon une logique
descendante, les mesures prises à l’échelle urbaine seront du même ordre que celles prises au niveau local, au nom de
l’efficacité maximum des investissements et des institutions qui les gèrent. C’est en fonction de cette logique que la
Banque va entreprendre l’ajustement sectoriel des villes, qui sera légitimé par les programmes de décentralisation,
échelon local de la « bonne gouvernance » (Ibid.).
« Bonne gouvernance », le mot est lâché. A partir des années 1990, le concept revient systématiquement dans le
langage de la Banque mondiale pour justifier le rôle minimaliste désormais dévolu à l’Etat, confiné de plus en plus
dans un rôle de « fournisseur de moyens pour le marché » et, surtout, pour légitimer une intervention accrue du
secteur privé dans la gestion urbaine. Le tout sous couvert d’un discours renouvelé de lutte contre la pauvreté.
Attribuant presque systématiquement l’indéniable croissance de la pauvreté urbaine dans les années 1980 à
l’incapacité des gouvernements du Sud à mettre en œuvre les réformes prescrites, la Banque conditionnera alors son
aide à leur capacité à se montrer « bons gestionnaires ».
Synonyme de « good order » plus que de gouvernement démocratique des choses et des personnes, la bonne
gouvernance se traduira surtout par la recherche du cadre politico-institutionnel le plus adéquat pour atteindre les
« objectif du développement urbain » à travers la mise en place de dispositifs administratifs et réglementaires
susceptibles de mieux accompagner les réformes en vigueur, et dont les maîtres mots seront décentralisation,
responsabilité budgétaire, privatisation des services urbains et planification stratégique. On verra désormais la ville
non plus seulement comme une fonction de production mais comme une « structure de gouvernance qui de manière
rationnelle gère et coordonne les transactions économiques, sociales et politiques dont elle est le siège » (Id.,1998).
Par ailleurs, reconnaissant ouvertement que certaines couches de la population ont pu se trouver fragilisées par
l’ajustement, la Banque mettra en place des programmes de compensation faits de projets ciblés et uniformisés. Plus
tard encore, dans un souci affecté de mieux répondre aux besoins des plus pauvres, elle cherchera les moyens de les
associer, par l’intermédiaire des ONG et d’organisations relais, à ses projets. La participation des communautés
urbaines deviendra ainsi peu à peu son nouveau leitmotiv et cheval de bataille. Reste que cette « participation »
d’emblée sera limitée à un cadre opérationnel rigide qui ne dérogera en rien à la logique qui sous-tend depuis le
début l’action de la Banque dans le champ urbain : le partenariat public-privé (Miraftab, 2004).
Présentés et mis en avant par les institutions internationales comme des modèles d’intégration économiques et
des succes stories en matière de développement urbain, Shanghai, Pune ou Bangalore, ces nouvelles vitrines high
tech du monde émergent, masquent mal l’échec et les désastres engendrés par les politiques ultralibérales. L’intense
concurrence entre les villes, alimentée par les processus de mondialisation, a de manière quasi générale renforcé les
inégalités intra et inter urbaines et privilégié quelques grandes villes, en particulier les métropoles des pays
émergents, aux dépens des autres, capitales, villes moyennes ou petites, ne disposant d’aucune structure d’accueil
pour attirer les capitaux nationaux et étrangers (Davis, 2006). Des clivages, souvent historiquement déterminés, que
l’aide internationale va accentuer puisqu’elle va de plus en plus être conditionnée à la capacité des villes à tirer vers
le haut la croissance économique nationale (Osmont, 2005). Sans parler de l’intense concurrence fiscale que se
livrent les villes qui les prive de précieuses ressources pour leur développement social et humain (Alternatives Sud,
2007).
Ensuite, partout ou presque, la libéralisation du territoire urbain a détourné l’épargne nationale vers le juteux
marché foncier, engendré un boom spéculatif et une hausse sans précédent des prix de l’immobilier au profit de
nouveaux entrepreneurs de logements, de chefs coutumiers, voire des secteurs populaires les plus nantis. De leurs
côtés, les processus de décentralisation ont abouti à vider les caisses des municipalités et fini par faire reposer tout le
poids de la charge fiscale sur les communautés locales (Dupont, 2005). Le transfert administratif des compétences de
l’Etat central vers les instances locales non seulement n’a pas été accompagné d’un transfert financier proportionnel
à la mesure des tâches à accomplir, mais en plus a engendré d’importants phénomènes de corruption locale.
Quant aux partenariats public-privé censés assurer la couverture des besoins des communautés tout en leur
donnant une voix et un rôle dans la gestion des affaires publiques, leurs résultats sont bien plus que mitigés. En
l’absence d’une équité de fait entre des partenaires, aux intérêts par essence antagoniques, et d’une définition
rigoureuse de leur rôle, de leurs responsabilités et de leurs droits respectifs, ces partenariats ont fonctionné surtout
comme des « chevaux de Troie du néolibéralisme », en permettant l’entrée en force de puissants opérateurs privés
(firmes, multinationales, etc.) dans le champ de la gestion urbaine, qui ont trouvé là de nouvelles opportunités de
profit sur base du principe généralisé – et dûment recommandé par la Banque mondiale – de recouvrement des
coûts. Rarement, les objectifs initiaux ont été atteints. Seuls les besoins solvables ou les demandes d’acteurs
influents ont dans la plupart des cas été satisfaits. Les autres demandes, celles des populations les plus déshéritées,
sont restées à la charge des ONG, des collectivités publiques et des communautés urbaines (Miraftab, 2004).
De manière quasi générale enfin, la privatisation – à peine voilée dans le cadre du partenariat public-privé –, a
renchéri les prix des services urbains sans pour autant étendre substantiellement la couverture. Ce faisant, elle a
accru d’autant plus la fragilité des groupes les plus démunis et aggravé les inégalités au sein des villes.
« Polarisation obscène »
Phénomène complexe et polymorphe, la pauvreté urbaine a longtemps été sous-estimée par les gouvernements
nationaux et les instances internationales. Outre la rareté des statistiques urbaines disponibles et le manque d’outils
de mesure adéquats, cette situation tenait surtout à la croyance très largement répandue en un «  avantage » des
villes sur les campagnes [5]. Puisqu’il était admis que l’on vivait mieux en ville, une attention moindre était portée
aux situations de pauvreté et de précarité urbaines. Aussi, l’essentiel de l’effort – et partant, de l’aide au
développement – était-il dirigé vers le monde rural considéré comme l’antichambre de la misère. ONU-Habitat va
toutefois bousculer cette croyance, en montrant, chiffres à l’appui, dans son premier rapport sur les établissements
humains, la croissance spectaculaire de l’habitat informel en milieu urbain depuis une quinzaine d’années (2003).
Trois ans plus tard, son deuxième rapport brise un nouveau « tabou » en remettant sérieusement en question
l’avantage urbain. Anna Tibaijuka, directrice de l’organisation, déclare ainsi lors de la présentation du rapport à
Vancouver en juin 2006 : « Depuis longtemps nous suspections que la vision optimiste générale de la ville ne
correspondait pas du tout à la réalité sur le terrain. Ce rapport montre très concrètement qu’il existe au sein d’une
même ville en réalité deux villes - d’un côté celle abritant les individus qui tirent tous les bénéfices de la vie urbaine, de
l’autre, les bidonvilles où les gens vivent parfois dans des conditions bien pires que leurs correspondants ruraux  » (The
Guardian, 2006).
De fait, de nombreuses villes du Sud, sinon la majorité d’entre elles, ont perdu leur statut de « productrices de
bien-être » pour une part de plus en plus importante de leurs habitants. Lieu de production et de reproduction de la
misère, la campagne cède peu à peu ce douteux privilège à la ville (ONU-Habitat, 2006). Le dualisme classique
« villes-campagnes » tend à se transporter au cœur de la cité, devenu lieu d’une « polarisation obscène », où
inégalités se cumulent, se renforcent et s’approfondissent (Harvey, 2001). Les nouvelles zones high tech de
Bangalore, la « Silicon Valley » indienne, les quartiers cossus et aérés du centre de Mumbai, les condominios des
banlieues chics de São Paulo, les villas huppées de Victoria Island à Lagos apparaissent comme des îlots de prospérité
noyés dans un océan de misère fait d’un enchevêtrement de taudis surpeuplés et de logements insalubres.
Là, une petite élite cosmopolite, économiquement bien intégrée, branchée virtuellement sur le monde  ; ici un vaste
prolétariat informel sous qualifié, piégé dans le cercle vicieux de l’exclusion, n’ayant pour seul horizon que les limites
de la ville ou du quartier. Là, des revenus plantureux et un train de vie fastueux ; ici, des conditions de vie aléatoires,
des emplois précaires, instables et sous rémunérés. Là, l’accès aux technologies de pointe et aux équipements
urbains modernes ; ici, un monde dépourvu d’infrastructures et de services de base adéquats, règne de la débrouille
et de la privation. Là, une mondialisation « bienfaitrice » et opportune ; ici, une mondialisation déstructurante,
pressante et oppressante.
Dans certaines villes, les situations de manque dépassent l’entendement. A Delhi, par exemple, où il n’y avait en
1990 que 160 toilettes publiques pour 480 000 habitants, ou encore dans un faubourg périphérique de Harare, où
près de 1300 personnes se partagent actuellement une seule toilette publique  ! Deuxième cause de mortalité
infantile dans le monde, le manque d’eau potable reste un défi quotidien pour bon nombre d’urbains pauvres.
Surtout dans les villes d’Afrique subsaharienne où à peine 38,3% des ménages disposent d’un accès à l’eau courante.
Ici comme ailleurs dans le tiers-monde, le prix élevé de l’eau – surtout depuis la privatisation des réseaux de
distribution – est devenu un obstacle presque insurmontable pour de nombreux citadins pauvres [6].
Dans ces quartiers déshérités, le surpeuplement, la promiscuité, le manque d’eau potable et l’insalubrité,
accentuent toujours plus les risques sanitaires et l’impact des maladies infectieuses [7]. Sans parler des effets de la
malnutrition, « crise invisible » selon ONU-Habitat, qui actuellement fait des ravages en villes. Les taux de
malnutrition des enfants en bas âge des bidonvilles du Bangladesh, d’Ethiopie, de Haïti et d’Inde sont ainsi devenus
presque identiques à ceux des zones rurales. Au Brésil et en Côte d’Ivoire, ces taux sont même trois à quatre fois plus
élevés dans les bidonvilles que dans les zones rurales (2006).
De fait, on meurt généralement plus vite et plus jeune dans les zones d’habitat informel des villes du tiers-monde
que dans les autres quartiers. A Rabat, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans est ainsi 2,7 fois plus élevé
dans les zones d’habitat informel que dans les autres quartiers. Ecarts plus importants encore dans la ville du Cap
(Afrique du Sud), où le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans est 5 fois plus élevé dans les bidonvilles que
dans les quartiers de moyen et haut standing (ibid.). Les villes des autres continents ne sont guère mieux loties. La
mortalité infantile dans les bidonvilles de Quito est ainsi 30 fois plus élevée que dans le reste de la ville  ; et à
Mumbai, elle est de 50% plus élevée que dans les zones rurales adjacentes (Davis, 2006) !
Aux risques sanitaires et à leur incidence sur la mortalité sont venus s’ajouter d’autres risques qui renforcent les
inégalités intra muros et aggravent la fragilité des populations urbaines les plus pauvres : risques liés aux
catastrophes naturelles et à la pollution, les bidonvilles étant construits dans des matériaux peu résistants et le plus
souvent situés sur terrains instables, inondables ou à proximité de décharges ou de zones dangereuses [8] ; risques
aussi liés aux évictions et expulsions dont plusieurs gouvernements du Sud se sont fait les champions  [9] ; risques
enfin liés à la criminalité, à la violence physique et aux tensions interethniques et religieuses qui ont connu un essor
sans précédent depuis les années 1980.
Autrefois étape transitoire, le bidonville tend à devenir – quand il n’est pas tout simplement démantelé par les
autorités urbaines – un lieu de « résidence » permanent pour les nouveaux arrivants ; le seul débouché possible pour
cette main-d’œuvre devenue excédentaire et généralement peu qualifiée. Les portes de sortie s’y font rares.
L’ascenseur social ne fonctionne plus. Les opportunités d’emploi même diminuent en raison de la stigmatisation et
de l’exclusion dont ces populations sont généralement l’objet. Quant à l’avantage urbain d’un meilleur accès à
l’éducation et à la culture, il demeure, comme le souligne ONU-Habitat, « un mythe pour la majorité des habitants
des bidonvilles  ». C’est que pour l’habitant du bidonville un choix dramatique s’impose de plus en plus souvent  : soit
assurer ses besoins en termes de survie, soit financer l’éducation des enfants. Une situation d’autant plus
préoccupante que la population des bidonvilles est majoritairement jeune et l’est de plus en plus, l’accroissement
naturel ayant pris la relève des migrations dans le processus d’urbanisation (2006). 
Défis urbains à l’heure de la mondialisation
La ville néolibérale est à l’image d’une mondialisation dont elle est à la fois le support privilégié et l’horizon ultime.
Devenue lieu de polarisation extrême, elle a reproduit à son échelle, projeté et imprimé dans son espace les
croissantes inégalités et contradictions engendrées par un quart de siècle de réformes libérales et de concurrence
acharnée. Partout, la tendance à la précarisation et à l’informalisation d’un nombre toujours plus grand de citadins
s’est confirmée et aggravée. Plus que tout, l’explosion des bidonvilles, considérée pourtant par les instances
internationales comme l’un des problèmes mondiaux majeurs du 21e siècle au même titre que le changement
climatique, témoigne de l’échec des politiques néolibérales de la ville.
Un constat que partage ONU-Habitat qui indique dans un premier rapport qui tranche avec le style retenu et
conventionnel d’autres agences onusiennes : « l’orientation fondamentale des interventions tant nationales
qu’internationales au cours des vingt dernières années a (…) renforcé la croissance de la pauvreté urbaine et des
bidonvilles, tout comme l’exclusion et les inégalités ». Et de recommander ensuite un retour de l’Etat dans la sphère
urbaine et la mise en œuvre de nouvelles politiques publiques intégrées à l’échelle de la ville (2003).
Pour accablant et unanime que soit ce constat, il n’a pas pour autant débouché sur une révision des logiques
fondamentales qui commandent les projets urbains des organisations internationales, des pays donateurs et des
gouvernements nationaux. Malgré l’accent nouveau mis sur la « lutte contre la pauvreté, » la « bonne gouvernance »
et la « participation de la société civile », l’orientation « classique » est restée inchangée. La croissance, la
compétitivité et l’attractivité urbaine restent prioritaires. La libéralisation et la privatisation des territoires de la ville
vont bon train. On voit mal comment, dans ces conditions, ralentir ou inverser l’évolution en cours – ou ne faudrait-il
parler plutôt d’involution ? – aux conséquences sociales, mais aussi écologiques, politiques et culturelles
désastreuses et bientôt irrémédiables.
De toute évidence, ni les programmes ciblés à destination des plus pauvres, trop souvent limités et peu adaptés aux
environnements urbains spécifiques ; ni les projets visant à formaliser le monde de l’informel (aides à la création de
micro-entreprises, facilités de crédits, etc.) ; ni une augmentation substantielle de l’aide au développement, comme
le demande ONU-Habitat à défaut d’une annulation de la dette urbaine, et moins encore l’ensemble de ces stratégies
qui reposent sur la confiance inébranlable en un « marché autorégulateur » censé assurer au plus grand nombre
infrastructures et services appropriés, ne suffiront à « améliorer les conditions de vie de 100 millions d’habitants de
bidonvilles d’ici 2020 », 11e cible du huitième Objectif du Millénaire. Et encore, cet objectif apparaît-il bien modeste
et minimaliste au regard du raz-de-marée à venir. D’ici-là en effet ce n’est non pas 100 mais bien 400 millions de
personnes – selon les prévisions les plus basses – qu’il faudra loger décemment [10].
Dans ces contextes urbains dégradés et face à l’aveuglement, à l’inertie des autorités urbaines et des instances
internationales et, plus généralement, à leur absence de véritable macrostratégie en matière de lutte contre la
pauvreté, on voit toutefois apparaître, s’organiser et se mobiliser des groupes de citadins qui localement
réinvestissent l’espace politique de la ville et réinventent de nouvelles formes de vivre ensemble (démocratie locale,
budget participatif, économie solidaire, usines et hôpitaux récupérés, etc.). Mouvement des sans toit au Brésil,
assemblées populaires en Argentine ou en Bolivie, mouvement contre la vie chère au Niger et, partout ailleurs,
associations d’habitants, réseaux d’entraide et d’échange local, organisations de base, groupes de femmes, de
citoyens, de jeunes ou de chômeurs, etc., prennent l’initiative, revendiquent une participation accrue à la gestion de
la cité, des conditions de vie et de travail décentes, l’arrêt des expulsions ou encore de nouvelles politiques publiques
(en matière de logements, d’habitats, d’infrastructures et d’équipements, etc.) adaptées aux besoins du plus grand
nombre. Bref, ils réclament, pour reprendre la formule synthétique de Gustave Massiah, «  un droit à la ville et des
droits dans la ville » (2005).
A l’échelle régionale et internationale, un processus de convergence s’est également mis en branle, des coalitions
se sont formées à l’instar d’Habitat International Cooalition, de l’Alliance internationale des habitants ou encore de
l’Asian Coalition for Housing Rights qui entendent faire pression sur les instances internationales et promouvoir,
contre l’instrumentalisation néolibérale des villes qui confère à leurs habitants le simple statut de clients, de
consommateurs ou de producteurs, et vide les espaces de la ville de leur traditionnel contenu politique, un modèle
alternatif de cités mettant l’accent avant tout sur les priorités sociales, environnementales et culturelles.
Ce que demandent ces nouveaux acteurs internationaux, c’est un nouveau pacte social urbain qui garantisse et
réalise effectivement les droits (au logement, aux soins de santé, à l’éducation, à la participation politique, à la
protection, etc.) des citadins, réaffirme le caractère inaliénable, public et collectif des services urbains, encourage la
mise en œuvre et le renforcement de politiques publiques adaptées aux contextes singuliers et aux besoins multiples
des citadins, et établissent de nouveaux rapports entre villes et campagnes, problématiques urbaines et
problématiques agraires – en particulier réforme agraire et souveraineté alimentaire – étant étroitement liées.
Reste que ces organisations de base et mouvements sociaux sont encore très minoritaires dans le paysage urbain.
Véritable « laboratoire de l’exploitation humaine », dominé par les stratégies individuelles de survie et une
concurrence forcenée entre les plus défavorisés, le monde fragmenté et éclaté de l’informel n’offre pas le terreau le
plus propice à l’émergence d’une force d’émancipation collective. Ici, quand le collectif s’affirme, il prend le plus
souvent la forme des sectarismes religieux, de communautés évangéliques ou de structures apolitiques et violentes,
comme l’essor du crime organisé dans les grandes villes du Sud et, avec lui, l’explosion des taux de criminalité le
laissent supposer.
Relégués, certains quartiers de bidonville apparaissent de plus en plus comme des zones de non droit,
pratiquement « hors société », abandonnées par l’Etat. Parfois, ils se trouvent même désertés par les organisations
sociales et populaires. Telle est la tendance qui s’observe dans les favelas de Rio ou de São Paulo où ces
organisations doivent quitter leur traditionnel champ d’action sociale sous la contrainte et la pression des bandes
organisées qui y inventent de nouvelles formes de clientélisme mafieux (Peralva, 2001).
Trouver le moyen de réinvestir ces zones, y recréer du lien social et du sens politique et y impulser de nouvelles
dynamiques démocratiques constituent certainement, avec la mise en place de politiques publiques coordonnées,
l’enjeu le plus important pour l’avenir. Le pari est loin d’être gagné car comme le souligne très justement Mike
Davis : « Un prolétariat informel a-t-il la moindre chance de se transformer en « sujet historique », solution miracle
des prophéties marxistes ? Une force de travail désagrégée peut-elle se réagréger en un projet d’émancipation
globale ? Les formes de protestation dominantes des mégavilles déshéritées ressembleront-elles plutôt aux émeutes
urbaines de l’ère victorienne : des explosions épisodiques pendant les crises de consommation alternant avec la
routine de la gestion clientélaire, du spectacle populiste et de la démagogie ethnique ? (2005).
Bibliographie
 Braudel Fernand (1986), L’identité de la France, t. II (Les hommes et les choses), Paris, Arthaud.
 Centre tricontinental (2002), « Question agraire et mondialisation », Alternatives Sud, vol. IX-4.
 Centre tricontinental (2007), « Evasion fiscale et pauvreté », Alternatives Sud, vol. XIV-1.
 Davis Mike (2005), « La planète bidonville : involution urbaine et prolétariat informel »,Mouvement,
n°39/40, p.10-23.
 Davis Mike (2006), Le pire des mondes possibles. De l’explosion urbaine au bidonville global, La
Découverte, Paris.
 Dupont Véronique (2005), « La gouvernance urbaine en Inde à l’ère de la libéralisation et de la
décentralisation », Villes en développement, mars-juin 2005, n°67-68, p. 10-11.
 The Guardian (2006), « Urban Population to Overtake Country Dwellers for the First Time », 16 juin
(www.guardian.co.uk).
 Harvey David (2001), Megacities Lecture 4, Amersfoort, Twijnstra Gudde.
 Henry Etienne (2006), « La mégapole contre la ville, ou le dualisme réhabilité », Cahier Voltaire.
 Iyenda Guillaume (2005), « Street enterprises, urban livelihoods and poverty in Kinshasa »,Environment
and Urbanization, vol. 17, n°2., pp. 55-67.
 Krishnan Shekhar (2005), « Les espaces de Mumbai à l’ère post industrielle », Mouvements, n° 39/40, p.
31 à 39
 Massiah Gustave (2005), La transformation urbaine entre mondialisation néolibérale et
altermondialisme, IPAM-AITEC, www.reseau-ipam.org.
 Miraftab Faranak (2004), « Public-Private Partnerships. The Trojan Horse of Neoliberal
Development ?  », in Journal of Planning Education and Research, 24, p. 89-101.
 Mitlin Diana (2004), « Understanding Urban Poverty : What the Poverty Reduction Strategy tell
us » , Working Paper on Poverty Reduction in Urban Areas, IIED, 13.
 Nolan Deidre (2006), « African Cities and the Rising Price of Urbanization », Urban Action.
 Osmont Annik (1995), La Banque mondiale et les villes. Du développement à l’ajustement, Karthala,
Paris, 1995.
 Osmont Annick (1998), « La « Gouvernance » : concept mou, politique ferme », Les annales de la
recherche urbaine, n°80-81.
 Osmont Annick (2005), Développement urbain ou ajustement sectoriel des villes ? La politique urbaine
de la Banque mondiale, IPAM-AITEC, www.reseau-ipam.org.
 Peralva Angelina (2001), Violence et démocratie. Le paradoxe brésilien, Balland, Paris.
 PNUD (2006), Rapport mondial sur le développement humain (Au-delà de la pénurie : Pouvoir, pauvreté
et la crise mondiale de l’eau), Economica, Paris.
 Portes Alejandro, Roberts Bryan R. (2004), « Empleo y desigualidad urbanos bajo el libre mercado.
Consecuencias del experimento neolibéral », Nueva Sociedad, 193, déc.-octobre, p.76-96.
 UN Habitat (2006), State of the World’s cities 2006/2007.
 UN Habitat (2003), The Challenge of Slums : Global Report on Human Settlements.
 Véron Jacques (2006), L’urbanisation du monde, La Découverte, Paris.
 Warah Rasna (2005), « Chaotic Urban Transition in Africa. Zimbabwe Evictions come at a Heavy », UN
Chronicle Online Edition (www.un.org).
Notes
[1] . Environ 53% de la population urbaine vit actuellement dans des villes de moins de 500 000 habitants, et 22%
dans des villes de 1 million à 5 millions d’habitants. Les vingt plus grandes villes de la planète ne regroupent qu’à
peine 4 % de la population urbaine totale (ONU-Habitat, 2006).
[2] ONU-Habitat définit le ménage habitant dans un bidonville – ou taudis – comme un groupe de personnes vivant
sous le même toit et manquant au moins d’un des éléments suivants : un logement durable à caractère permanent
et offrant une protection contre les phénomènes climatiques extrêmes ; un espace habitable suffisant, à savoir pas
plus de trois personnes par chambre ; un accès à l’eau potable en quantité suffisante et à un prix abordable ; un
accès à des installations sanitaires adéquates (toilettes privées et publiques partagées par un nombre raisonnable de
personnes) ; enfin une sécurité d’occupation contre le risque d’expulsion forcée.
[3] Ces taux sont respectivement de 4,53 et 4,58% par an pour l’Afrique subsaharienne, 2,2 et 2,89 pour l’Asie du
Sud et 2,71 et 2,96% pour l’Asie occidentale. En ce qui concerne les autres régions, ils sont respectivement de 1,28 et
2,21% pour l’Amérique latine et les Caraïbes ; 2,28 et 3,39% pour l’Asie orientale ; 1,34 et 3,82% pour le Sud-Est
asiatique. Seule l’Afrique du Nord affiche un taux de croissance des bidonvilles négatif (- 0,25% par an) pour un taux
de croissance urbaine de 2,48% (ONU-Habitat, 2006).
[4] Sur les quelque 6 millions de réfugiés de guerre que compte en 1998 le Soudan, les trois quarts viendront
s’installer en zones urbaines ; la moitié rien qu’à Khartoum (ONU-Habitat, 2006).
[5] . Diana Mitlin a ainsi montré que les Plans stratégiques pour la réduction de la pauvreté (PSRP), héritiers des
PAS, se caractérisent par le peu d’intérêt accordé aux phénomènes de pauvreté urbaine. Et de souligner l’absence
d’une méthodologie commune et le peu de pertinence des modes de calcul utilisés. Dans plusieurs PSRP, seul est pris
en compte l’indice classique du seuil de pauvreté nationale pour évaluer la pauvreté urbaine, oubliant que vivre en
ville nécessite généralement un revenu plus élevé, en raison de besoins qui y sont dédoublés (transports, accès aux
services, éducation, etc.) et d’un coût de la vie généralement plus haut. Certains critères retenus dans les quelques
rares tentatives de trouver un indice composite censé refléter ces besoins tiennent parfois de l’absurde. Ainsi, dans
quelques PSRP, seul un critère de distance physique a été retenu pour mesurer l’accès au service urbain. Comme si
l’usage de ce service n’avait pas lui aussi un coût parfois très important (Mitlin, 2004).
[6] A Kibera (Nairobi), les habitants des bidonvilles paient leur eau 5 fois plus chère – à revenus égaux – que les
usagers américains. En moyenne, les habitants les plus pauvres des villes d’Afrique subsaharienne consacrent un tiers
de leur revenu à l’eau et au traitement des maladies liées à l’insalubrité de l’eau. Les maladies liées à l’eau ont
également un impact très important sur les revenus et les conditions de vies des populations urbaines pauvres des
villes d’Asie du Sud. Aussi, en Inde, quelque 60 % des patients hospitalisés le sont à cause de maladies liées à l’eau.
[7] . A Khartoum, par exemple, le taux d’incidence moyen de la diarrhée dans les zones d’habitat informels est de
40% contre 29% dans le monde rural ; de 27% dans les taudis de Nairobi contre 19% dans les zones rurales alentours.
Il en va de même pour l’impact du sida bien plus élevé dans les quartiers défavorisés.
[8] Après le tremblement de terre de Bam (Iran) en 2003, une enquête a conclu que la majorité des 40 000 victimes
vivaient dans des logements en briques crues traditionnelles. La majorité des victimes du tsunami, en décembre
2004, vivaient également dans des logements informels.
[9] Le Zimbabwe est le champion toute catégorie en termes d’éviction et de destruction de zones d’habitats
informels. En 2005 la tristement célèbre opération « Restore Order », dite aussi « Opération Murambatsvina »,
commanditée par le Gouvernement Mugabe a affecté directement près de 700 000 personnes, les unes ayant perdu
leurs logements, les autres leur principale source de revenu. Et indirectement, à des degrés divers, quelque 2,4
millions de personnes (Warah, 2005).
[10] Entre 2000 et 2006, les bidonvilles ont « accueilli » plus de 200 millions de personnes (ONU-Habitat, 2006) ! Ce
qui suffit à montrer le peu d’ambition de l’objectif fixé par les gouvernements.
Cet article a été publié dans Publications
Les opinions exprimées et les arguments avancés dans cet article demeurent l'entière responsabilité de l'auteur-e
et ne reflètent pas nécessairement ceux du CETRI.

DEUX MILLIARDS DE CITADINS EN L’AN 2000


Les mégapoles du tiers-monde asphyxiées par le chaos des transports urbains
POLLUTION, spéculation, infrastructures dégradées ou inexistantes... Dans les villes du tiers-monde se concentrent
tous les maux du sous-développement, ou du mal-développement. Le problème des transports empoisonne la vie
quotidienne des citadins. Deux milliards de personnes seront urbanisées dans le Sud en l’an 2000. Il faudra, pour
éviter des gaspillages absurdes, voire des catastrophes, imaginer des modes de déplacement différents de ceux trop
souvent utilisés dans les agglomérations du Nord.
par Jean-Loup Motchane, février 1991
APERÇU
La population urbaine des pays du Sud est passée de moins de 300 millions d’habitants en 1950 à plus de I milliard
en 1990. Elle devrait se situer autour de 2 milliards en l’an 2000. A la fin du siècle, une bonne vingtaine de villes du
tiers-monde auront plus de 10 millions d’habitants.
Longtemps perçues comme des foyers de pauvreté, de désordre et de délinquance, les villes du tiers-monde jouent
en réalité un rôle positif par leur fonction économique, elles constituent des lieux d’innovation et de transformation
sociale (les taux de natalité ont tendance à y décroître), de formation et d’accession à la démocratie. Encore faut-il
qu’elles possèdent les équipements collectifs indispensables : alimentation en eau potable, élimination des déchets,
systèmes de transport efficaces.
Les problèmes de transport dépendent, en premier lieu, de la maîtrise du développement urbain. Mais le rythme
effréné de l’accroissement de la population, l’absence de politiques foncières et de plans d’aménagement, la
difficulté de trouver les capitaux nécessaires pour assurer les investissements indispensables. alors qu’un grand
nombre de citadins - quelquefois les deux tiers - vivent au-dessous du seuil de pauvreté, ont entraîné, ces dernières
années, une dégradation alarmante des infrastructures.
L’expansion géographique des zones urbaines augmente la demande de transport et rend les solutions plus
difficiles. Ainsi, en 1930, Sao-Paulo comptait 1 million d’habitants, répartis sur 150 kilomètres carrés environ  ; en
1962, 4 millions sur 750 kilomètres carrés ; en 1980, plus de 12 millions sur 1 400 kilomètres carrés. La hausse des
prix des terrains dans le centre-ville et la spéculation immobilière sont la conséquence de l’extension des activités
tertiaires, au détriment des activités industrielles qui se déplacent vers la périphérie.
Dans la plupart des cas, les zones d’habitation les moins chères, sans parler des bidonvilles, sont implantées loin
des lieux de travail, sur des terrains peu viabilisés et mal desservis. Il n’existe en (...)
Taille de l’article complet : 2 034 mots.
Cet article est réservé aux abonnés à notre offre d'archives
Sociétés et cultures urbaines (XIe - XIIIe siècle)
Introduction
Le monde urbain en Europe est très minoritaire au Moyen Âge : il ne représente que 10 % de la population. Mais
c'est un monde très dynamique et en pleine expansion, grâce à sa position privilégiée au carrefour des échanges
commerciaux. Entre le XIe et leXIIIe siècle, les villes se dotent d'une nouvelle organisation et de statuts juridiques qui
leur donnent une certaine autonomie. Elles seront à la pointe des innovations et de la modernité.
I. L'essor des villes
1. La croissance démographique
• Les villes avaient perdu énormément de leurs pouvoirs politiques après la chute de l'empire romain d'Occident en
476. Cette tendance s'inverse à partir du XIe siècle.
• Le renouveau des campagnes a favorisé une croissance démographique qui profite aussi aux villes. Les grandes
villes marchandes d'Italie du Nord connaissent une extension spectaculaire : Gènes, Milan, Venise dépassent les
100 000 habitants et deviennent de grandes métropoles européennes comme Paris, Grenade (ville musulmane
andalouse, non loin de Gibraltar), ou Constantinople (contrôlant les détroits de la mer Noire).
• La population urbaine, trop importante, ne peut plus être contenue à l'intérieur des murailles : lesfaubourgs se
développent au-delà de l'enceinte qui définissait initialement la ville.
• Au XIIe siècle, de nouvelles villes fortifiées à vocation défensive sont créées sur les frontières entre l'Angleterre et
la France (Villeneuve, Neuville ; bastides dans le sud-ouest de la France…).
2. Des villes au centre des échanges et profitant du développement des campagnes
• Les villes médiévales sont avant tout des carrefours commerciaux au cœur des réseaux d'échanges fleurissant au
cours de cette période. Le développement des campagnes a également permis de diversifier les productions :
céréales, légumes, mais aussi chanvre et lin qui servent à l'élaboration de tissus, de draps par l'artisanat urbain.
• Ainsi, Paris profite de sa situation sur la route des grandes villes de foires de Champagne et sur l'axe Rhin-Rhône
qui débouche sur le port de Marseille.
• Les grands ports de la Hanse en Europe du Nord développent un commerce maritime depuis la Baltique jusqu'au
golfe de Gascogne.
• Les villes d'Italie du Nord sont des cités-États. Elles profitent de leur situation géographique pour dominer
le commerce méditerranéen.
• Toutes ces villes sont reliées entre elles par un réseau de voies maritimes et terrestres qui est à l'origine de la
mégalopole européenne actuelle, entre la région de Londres et l'Italie du Nord. Lesguildes (associations) de
marchands s'associent également pour uniformiser leurs pratiques commerciales et favoriser les échanges (avec, par
exemple, la pratique de la lettre de change, ancêtre du billet au porteur). C'est aussi le cas des guildes des villes
d'Europe du Nord qui forment la ligue de la Hanse en 1241.
• La position particulière des villes et l'essor du commerce favorisent la bourgeoisie commerçante. 
Exercice n°1
II. Une nouvelle organisation urbaine, des lieux dynamiques
1. Une reconnaissance juridique, la revendication de davantage d'autonomie
• Le statut juridique des villes est très variable. Le plus souvent, au XIe siècle, un seigneur (laïc ou ecclésiastique)
prélève des impôts sur les habitants ou sur les activités et des droits de péage. La bourgeoisie urbaine voit d'un
mauvais œil cette fiscalité qui entrave, selon elle, le commerce (les péages à l'entrée des villes en particulier). Elle
conteste donc la fiscalité locale et négocie parfois avec le seigneur des chartes de franchise : ensemble de privilèges
économiques, fiscaux, militaires et juridiques qui donnent à la ville davantage d'autonomie.
• Le mouvement des communes revendique la création de communes : association de citadins liés par serment. Les
échevins (dans le Nord), les consuls (dans le Sud) la dirigent alors. Ces villes ayant un statut juridique ont leur
propre sceau (cachet sur lequel sont gravées les armoiries de la ville).
• Du XIe au XIIIe siècle, le nombre des villes qui se gouvernent elles-mêmes augmente, mais pas partout  : ce sont
surtout les villes d'Italie du Nord et les villes hanséatiques qui ont acquis leur autonomie symbolisée par les palais
communaux en Italie et les beffrois (clochers) dans les Flandres. Dans les grands royaumes où le pouvoir royal se
renforce, une autonomie importante des villes est plus difficile à obtenir.
2. Différentes fonctions visibles dans l'expansion de l'architecture urbaine
• L'expansion des villes et la montée des fonctions urbaines ont des conséquences sur l'urbanisme. Chaque
fonction apporte, en effet, un type particulier de bâtiments ou d'infrastructures.
• La ville au Moyen Âge remplit d'abord une fonction de défense, symbolisée par sa muraille. Elle est aussi souvent
le siège du pouvoir politique et judiciaire de la région.
• Comme dans le reste du monde médiéval, l'Église et la religion y jouent un rôle important. Les villes peuvent être
les sièges des évêchés où les fidèles construisent des cathédrales, symboles de la piété et des croyances médiévales.
Les sites et édifices religieux attirent les croyants, surtout lorsque la ville est aussi la destination d'un grand
pèlerinage comme Saint- Jacques-de-Compostelle.
• Mais les villes sont aussi des centres culturels où se trouvent les écoles au XIIe siècle et lesgrands
collèges (universités) comme celui fondé par Sorbon à Paris (1257) au XIIIe siècle. Ville universitaire attrayante,
Tolède, en Espagne, est aussi un grand centre de traduction des ouvrages antiques et possède de
grandes bibliothèques.
3. Des centres économiques grâce à l'artisanat et aux échanges
• Le commerce et les activités économiques marquent le paysage urbain. En effet, les villes médiévales se
caractérisent par des rues étroites et encombrées, sans système de tout-à-l'égout (pourtant connu à l'époque
romaine) avec des maisons propices au déclenchement des incendies (torchis, charpentes en bois…). Les places
de marché ouvrent ces espaces. On construit aussi deshalles pour stocker les marchandises.
• L'artisanat urbain est également au cœur de la réussite économique des villes : malgré une limite ville-campagne
quelquefois difficile à définir (il y a des parcelles cultivées et des animaux d'élevage dans les villes médiévales), la
population urbaine se caractérise par une vie basée non sur l'agriculture, mais plutôt sur la transformation des
matières premières (cuir, lin…) en produits d'artisanat (draps des Flandres, objets en cuir de Cordoue…). Ces produits
sont aussi vendus et exportés.
Exercice n°2
III. La société urbaine au cœur de la culture urbaine
1. Des élites urbaines plus complexes
• Traditionnellement, les élites urbaines étaient composées d'aristocrates et de clercs qui les dirigeaient. Pendant
la période que nous observons, ils gardent une place essentielle dans la direction des villes.
• Mais l'essor du commerce et des échanges a fait émerger une nouvelle élite urbaine  : les bourgeois, marchands
enrichis par le commerce. Cette catégorie sociale estime être à l'origine du dynamisme économique urbain. Elle
revendique donc davantage de pouvoirs politiques, en particulier dans la direction des villes. Beaucoup de magistrats
urbains sont ainsi des marchands.
• Ce patriciat urbain de nobles, de marchands ou d'artisans est au cœur de la vie politique urbaine.
2. Une société marquée par la diversité
• La ségrégation sociospatiale n'existe pas réellement dans les villes médiévales : riches et pauvres vivent ensemble
dans les mêmes quartiers.
• En revanche, la société urbaine se divise en communautés homogènes : chaque métier est organisé au sein
d'une corporation qui regroupe les maîtres (patrons et propriétaires de leur atelier), les compagnons (ouvriers
travaillant pour le compte d'un maître) et les apprentis. Chaque corporation a ses règles (que tous doivent suivre),
son quartier dans la ville et son saint patron (les membres d'un même métier sont réunis dans des associations
religieuses d'entraide et de charité : lesconfréries).
• En revanche, certaines populations sont marginalisées comme les mendiants et les vagabonds. Les hôtels-Dieu
accueillent les plus pauvres : la charité est encouragée par l'Église. Les lépreux sont parqués en dehors de la ville
dans des léproseries. La situation des Juifs est plus compliquée : tout dépend des villes et des périodes. Dans
certaines villes, ils doivent vivre dans leur propre quartier (les juiveries) et porter un signe distinctif  ; ils sont parfois
expulsés d'un royaume à une époque et acceptés plus tard…
3. Le développement d'une culture urbaine spécifique
• Les fêtes, souvent financées par les élites urbaines, permettent de réunir la population (ce qui favorise le
développement des sociabilités urbaines) et de montrer la réussite sociale des grandes familles.
• Une véritable culture urbaine se développe, car la ville est le point de rencontre de plusieurs populations :
paysans venus pour vendre leur production, étudiants, marchands, artisans, clercs, ordres mendiants, nobles… Elle
incite à l'innovation et aux échanges culturels.
• C'est aussi un lieu de loisir avec ses auberges, ses tavernes (hauts lieux de la sociabilité masculine) et ses
établissements de bains, objet de toutes les critiques de l'Église, car ce sont des lieux de prostitution.
Fidji a appelé le monde à prêter une attention au développement urbain durable , au nom du Groupe des 77 aux
Nations Unies, a déclaré mardi le gouvernement fidjien.
S'exprimant mardi à l' Organisation des Nations Unies ent tant que président du Groupe des 77 plus la Chine pour
2013, l' ambassadeur fidjien Peter Thomson a déclaré que le développement urbain durable est devenu « l'un des
défis mondiaux les plus pressants du 21ème siècle », appelant à accorder plus d'attention aux villes durables dans la
formulation du programme de développement de l' après-2015, selon le ministère de l'Information.
M. Thomson a affirmé à la Deuxième commission de l'Assemblée générale des Nations Unies qu'« une révolution
démographique est en train de transférer les problèmes de la faim et de la pauvreté des zones rurales vers les zones
urbaines dans les pays en développement », soulignant qu'avec environ 50% de la population mondiale vivant déjà
dans les villes, le processus d'urbanisation reste rapide, surtout en Afrique et en Asie.
Lors de la Conférence 2012 de Rio +20, les dirigeants mondiaux ont reconnu l'importance des villes durables et de
l'urbanisation durable, a déclaré le diplomate fidjien, ajoutant que le G77 estime que pour atteindre cette durabilité,
une approche intégrée est nécessaire, avec une attention sur le logement abordable, les services sociaux, les
infrastructures, l'amélioration des taudis et la régénération urbaine.
M. Thomson a exprimé la profonde préoccupation du groupe sur la hausse continue du nombre d'habitants des
bidonvilles dans le monde, disant que la préoccupation du groupe s'étend à l'impact négatif de la dégradation
environnementale dans les établissements humains et la vulnérabilité croissante des colons urbaines aux
catastrophes naturelles et d'origine humaines. F

Le paysage urbain de Dubaï est souvent représenté comme une ville très dense structurée autour d’une autoroute
principale, la Sheikh Zayed Road, autour de laquelle sont disposés des immeubles de grande hauteur comptant
jusqu’à 40 voire 60 étages. Il est présenté ainsi dans la communication officielle dont l’ouvrage de P. Ziaian est un
exemple.

Vue sur Dubaï Internet City et Dubaï Marina (Ziaian, 2012)


 Dans la réalité, en 2013, plus de 90% de l’Emirat est encore largement désertique, seuls 100 km² ont été urbanisés,
et cela surtout le long du littoral. Le développement urbain conduit par les acteurs de la promotion immobilière a
commencé à conquérir des parcelles situées à l’intérieur du territoire de l’Emirat.
Le développement immobilier dans le sud de l’Emirat de Dubaï (Ziaian, 2012)
Au premier plan se distingue précisément Arabian Ranches, le lotissement de villas de haut standing géré par
Emaar, une des entreprises nationales chargées du développement urbain de l’Emirat de Dubaï, et en fond la ville
dense organisée autour de Sheikh Zayed Road. Sur cette prise de vue d’avion réalisée par P. Ziaian, d’immenses
parcelles de terrain urbanisables s’étendent entre l’autoroute Mohammed bin Zayed, (E 311, ancienne Emirates
Road) et l’autoroute Sheikh Zayed (E11). Or, quand on roule sur les deux autoroutes majeures qui structurent le sud
de l’Emirat de Dubaï, E 311 et E 611, on découvre de nombreux projets immobiliers inachevés. Ces immeubles dont
la construction semble être stoppée donnent une allure de ville désertée par ses habitants. C’est une des
conséquences, visibles dans le tissu urbain de Dubaï, de la crise financière qui a sévèrement touché le secteur de
l’immobilier et de la construction sur lequel reposait l’essentiel du développement économique de 2003 à 2008.
Carte 1 : Structure urbaine de la ville de Dubai en 2012 (Keilo, Montagne, 2013)

Cette crise s’est traduite par un effondrement de la bulle immobilière, un des moteurs essentiels de croissance de
l’Emirat, lequel a entrainé un arrêt des constructions et donc des licenciements massifs dans le secteur du bâtiment,
dans la construction comme en amont dans la conception (bureaux d’études et d’ingénierie, cabinets d’architectes)
et en aval dans la commercialisation (marketing, banques, promoteurs immobiliers). Pour l’entreprise nationale
Nakheel, chargée du développement urbain, les licenciements ont été massifs (répétition avec la phrase précédente),
certains évoquant le chiffre de 50 % du personnel licencié et renvoyé dans leurs pays d’origine. Les nombreux articles
de journalistes qui parlent des voitures abandonnées à l’aéroport sont un reflet symbolique des conséquences
sociales et économiques de la crise de la finance immobilière (The Independent).
Malgré cela, un ouvrage de photographies aériennes comme celui de P. Ziaian témoigne de la volonté
gouvernementale de présenter un bilan très positif du développement urbain, en effaçant les traces de la crise
financière et de ses conséquences dans l’économie et l’urbanisme de la ville et de l’Emirat. Cette politique d’image
de la ville, grandiose, hypermoderne, ce « phare de la région du Golfe » (Elsheshtawy, 2011) se retrouve dans les
discours des responsables de l’aménagement chez les promoteurs immobiliers, chez les responsables de la
conception des politiques urbaines et chez les urbanistes aménageurs, et le modèle de développement urbain a été
marginalement modifié depuis la crise. C’est pourquoi nous proposons à l’appui des discours recueillis que
l’hypothèse de l’appel à contribution d’Urbanités d’une transformation de modèle urbain, suite à une crise
économique majeure, ne semble pas validée aux Emirats Arabes Unis. Notre enquête fondée sur de nombreux
entretiens avec les acteurs de ce développement urbain a ainsi permis de constater, dans le discours de ceux-ci, une
défense de ce modèle de développement, défense pourtant fondée sur des arguments partiellement contradictoires
en regard de la position de ceux-ci dans le développement urbain de Dubaï. Si la façon de faire la ville à Dubaï n’a que
peu évolué – en dehors de réformes marginales dans les domaines légaux et financiers -, il faut aussi y voir la
conséquence de la rationalisation produite par les acteurs.
C’est pourquoi des géographes connaisseurs des villes de la Péninsule Arabique comme R. Stadnicki, accompagné
pour un projet de recherche sur les urbanités en marges des villes par le photographe M. Benchetrit, insistent sur la
nécessité d’études approfondies de « la complexité des dynamiques sociales des espaces urbains » (2012). Nous
proposons ici de nous attacher aux discours des acteurs de l’aménagement et de l’urbanisme pour déterminer leurs
points de vue sur les conditions et les modalités de la sortie « durable » de la crise. Nous avons enquêté auprès de
cinq architectes, d’économistes des transports, de dix ingénieurs de transport, de six urbanistes ayant travaillé
comme consultants dans les institutions gouvernementales (RTA, DM), comme cadres dans les entreprises
internationales (ARUP, McDonald), ou comme cadre dans les entreprises nationales (Emaar, Nakheel, Meerath,
DMCC). Certains acteurs ont pu être interrogés à deux reprises au cours des missions de septembre 2011, d’avril
2012 et durant les six mois de terrain au premier semestre 2013. Nous avons ainsi constitué un corpus conséquent
d’entretiens effectués avec un questionnaire semi-ouvert et nourris de nombreuses discussions informelles avec
d’autres informateurs, résidant à Dubaï, ayant travaillé ou non dans d’autres pays du Golfe mais ayant tous vécu les
années charnières de 2008 à 2010 à Dubaï. Les entretiens ont porté sur le développement urbain entre 2002 et 2007,
la crise et les conséquences de celle-ci sur la ville. A partir de leurs réponses, parfois volontairement peu précises ou
plutôt se rattachant exclusivement à leurs responsabilités directes, nous avons établi une première typologie des
motifs de justification du succès du modèle de Dubaï, des motifs de la résistance à la crise internationale et locale et
de son futur prometteur.
UNE VILLE, « CITÉ GLOBALE » (MARCHAL, 2001) EN PLEINE « ASCENSION » (MOLAVI, 2006)
Dite « cité globale » par R. Marchal, Dubaï est la ville principale d’un petit Emirat, membre de la Fédération des
Emirats Arabes Unis situés dans le Golfe Persique méridional. La superficie de l’Emirat est de 4114 km² et comptait,
en 2012, plus de 2 millions d’habitants très inégalement répartis sur le territoire.
Dubaï, ville principale et capitale de l’Emirat a connu son premier essor au 19 ème siècle grâce à une politique fiscale
avantageuse par rapport à celle qui était pratiquée à Manama, capitale du royaume de Bahreïn et à Lengeh, sous le
gouvernement du Shah d’Iran (Fucarro, 2009). L’influence dans le tissu urbain des quartiers commerçants est visible
dans la morphologie urbaine du quartier de Bastakiya à Dubaï, comme l’illustre la photographie 3. Ceci est loin d’être
anecdotique mais représente plutôt une tendance de Dubaï à toujours favoriser une politique économique
extrêmement libérale envers les entrepreneurs, car comme le répétait l’Emir Rashid Al-Maktoum (1958-1990), « ce
qui est bon pour les commerçants est bon pour Dubaï » (Molavi, 2006). Les commerçants puis les entrepreneurs,
originaires d’Iran, puis du Moyen-Orient et très vite du sous-continent indien (Vohra, 2011) ont fait de Dubaï une
plateforme privilégiée d’import et d’export mais aussi de placements de fonds d’investissements. Il est incontestable
que le développement de ce petit Emirat privé de ressources pétrolières et gazières fait figure de modèle dans la
région (Molavi, 2006, Dazi-Heni, 2006, Davidson, 2008).

Le passage de la crique sur une abra entre Deira et Bur Dubaï, photographie de Yoshio Kawashima (Kawashima,
Shimbun et Makishima-Akai, 1968)
En 2006, les mesures politiques en faveur des zones franches améliorent encore la souplesse des formalités et
donnent davantage de libertés aux investisseurs et aux promoteurs immobiliers au moment de l’ascension au
pouvoir du fils de Rashid, Mohammed Bin Rashid Al-Maktoum. Le modèle dubaïote de développement urbain est
fondé sur une intense financiarisation et une totale liberté de choix et de décisions donné aux promoteurs
immobiliers (Kanna, 2011), comme Emaar, Nakheel ou encore Dubaï Holding. L’économie de l’immobilier et la
finance ont connu un très fort développement non seulement grâce aux investissements des classes d’affaires
arabes à la suite des crises politiques des guerres du Golfe et de l’événement majeur du 11 septembre 2001. En
2006, l’ouverture à la propriété foncière aux étrangers a également accéléré le développement urbain de la ville
(Lavergne, 2009:41).
Le gouvernement, le Dubaï Executive Council, ainsi que les institutions ministérielles ont favorisé les
investissements internationaux, surtout le rapatriement des fortunes régionales dans l’immobilier. La majorité des
crises politiques régionales et globales ont conduit les hommes d’affaires libanais, irakiens, pakistanais et aujourd’hui
égyptiens et syriens à se replier à Dubaï, pour plus de sûreté dans l’avenir des investissements. L’apologie de ce
modèle et de son succès dans « l’ascension de Dubaï » vient  de sa capacité à « inspirer » à l’échelle « régionale »
(Molavi, 2006:103) jusqu’à représenter  « le New York de la région » (ibid. :104) dans les termes de Mohammad Al
Abbar (cité par A. Molavi), homme d’affaires et conseiller du Dubaï Executive Council, proche des cercles du pouvoir.
Cette liberté d’action des promoteurs immobiliers qui se sont vus conférer d’immenses lots à urbaniser contribue à
stimuler un urbanisme « accéléré » (Katodrytis, 2009 : 38) qui échappe entièrement au contrôle de la Municipalité.
Les avantages de Dubaï sont d’être « flexible », « très active » et capable de dépasser les problèmes de
« bureaucratie » (entretien, responsable de l’aménagement au ministère du transport, avril 2012, mai 2013). C’est la
raison qui fait de Dubaï une ville « attractive » et favorisant « les profits » (entretien, avril 2012) grâce à sa politique
de zone franche qui permet de s’absoudre du système de garant local (kafala), et à l’absence de système
d’imposition. Le développement urbain entièrement privatisé de Dubaï a été largement fondé sur la spéculation
immobilière et le recours systématique au crédit. Par exemple, la plus haute tour de la ville, Burj Khalifa «  qui a coûté
autour de 1 milliard de dollars »(Kanna, 2012) et d’autres projets beaucoup plus coûteux comme celui de la Palm
Jumeirah ont fini par endetter Dubaï Holding (Nakheel, Dubaï World) à plus de 99 milliards de dollars. L’urbanisme
n’était plus régulé que par la « main invisible » du marché.
 
LA BANQUEROUTE DE DUBAÏ DURANT LA CRISE ET LE RECOURS À LA SOLIDARITÉ FÉDÉRALE (PIQUET, 2013)
La crise des crédits américains en juillet 2007 et la faillite des banques ont assené un coup d’arrêt à cette économie,
décrite comme une « écologie baroque » (Kanna, 2012) en faisant exploser la bulle immobilière. Le choc sur
l’économie urbaine a été particulièrement ressenti dans la mesure où près de 70% de la richesse produite dans
l’Emirat reposait sur le secteur de la construction et du bâtiment et sur une spéculation intense. L’Emirat ployait sous
une dette de plus de 70 milliards de dollars (Bloch, 2010). En 2009, le magazine américain  Newsweek titrait même sa
couverture « Adieu Dubaï ». La crise financière a certainement fait trébucher l’Emirat (Molavi, 2009) quand toutes
ses entreprises nationales ont été écrasées de dettes. Plus de la moitié des projets de construction immobilière a été
arrêtée, formant un paysage urbain de ville fantomatique, un « portrait de ville rêvée » dont on se réveille
brutalement « à l’heure de la crise » (Lavergne, 2009).
La crise aurait dû entrainer une dissolution de ce qui faisait l’attractivité de la ville, un départ de ses habitants
majoritairement expatriés, dénués de droits civiques et en principe sans attache à la ville. Ce ne sont pourtant en
grande majorité que les départs des élites occidentales qui ont été abondamment commentés dans les journaux.
Contrairement « à ce que les médias et les opinions publiques [auraient]voulu faire croire », Dubaï n’a pas disparu,
« balayée par la crise financière » (Molavi, 2009, Moghadam, 2010). Ce furent « des adieux longs » (Bloch, 2010) qui
ont finalement abouti à un « Retour vers le Futur » titrait Business Afrique Méditerranée en octobre 2013. La ville est
candidate à l’accueil de l’Exposition Universelle en 2020.
LA POLITIQUE DE L’IMAGE POST–CRISE DE DUBAÏ
Malgré une dette extérieure colossale et une très mauvaise publicité, Dubaï demeure maître d’une position
centrale dans les échanges commerçants d’import et d’export, en direction par exemple de la République Islamique
d’Iran toujours sous embargo international. C’est aussi une ville à l’économie tournée vers le tourisme et l’industrie
de l’hospitalité qui accueille des touristes du Golfe (Saoudiens, Bahreïnis, Qataris, Omanais), des touristes d’Asie,
notamment du sous-continent indien, à la recherche d’infrastructures de loisirs, et des touristes occidentaux, attirés
par un héliotropisme certain et un cadre idéal pour le shopping.
« LE SUCCÈS DE DUBAÏ C’EST NOUS ! », DIXIT LES ACTEURS DE LA PROMOTION IMMOBILIÈRE
Une architecte-urbaniste, d’origine palestinienne, diplômée d’une grande université libanaise, responsable du suivi
du chantier des tours de Jumeirah Lake Tower (JLT), décrit ainsi l’effet de la crise économique à Dubaï : « ce fut une
légère baisse » tout à fait « normale » après un sommet de croissance. Elle explique que 80 % des tours de la zone
franche JLT ont été construites, seules 10 tours sont inachevées et sont « à demi construites » et comme « nous ne
voulons pas voir de parcelles vides » pas plus qu’avoir un « site visuellement dégradé », « nous recherchons des
investisseurs pour reprendre les contrats ». Elle affirme que ce n’est qu’une question de semaines avant de finaliser
les nouveaux contrats, « tout le monde veut venir à Dubaï » (entretien, avril 2013). Elle pose la supériorité de Dubaï
par rapport à d’autres villes qui auraient connu cette crise en se fondant sur l’image et le bon état des infrastructures
existantes, thèse qui est contestée parfois avec amertume sur le forum internet par les locataires des appartements
des quartiers de Discovery Gardens, de International City ou encore par ceux de Jumeirah Beach Road (Bouchareb,
2012) dont l’enfer du quotidien dans ces tours mal conçues fait écho à I.G.H. de J.G. Ballard (1975).

Vue sur les Résidences de la route de Jumeirah (JBR) et sur les gratte-ciels de la Marina de Dubaï (Montagne,
septembre 2011)
Même si cette architecte admet que plus de la moitié des employés de l’entreprise publique responsable du
développement de JLT a été renvoyée et la moitié de leurs projets de promotion immobilière a été stoppée, elle voit
dans la reprise de Dubaï, la preuve que le marché est la meilleure façon de réguler le développement urbain.
Toutefois, grâce au « contexte agité de la région du Moyen-Orient » (entretien, mai 2013), c’est-à-dire sans les
nommer les printemps arabes, les capitaux syriens et égyptiens commencent à affluer à Dubaï et les premiers effets
se font sentir dans la reprise des affaires. En effet, elle affirme «la plupart des projets gelés durant 2009 sont
quasiment tous finis » (entretien, mai 2013), avançant implicitement qu’il n’y a plus de projets inaboutis dans la ville.
Elle rappelle que le développement pavillonnaire à l’ouest des tours de JLT vient juste d’être livré.
Une résidence récemment livrée par le promoteur immobilier à Jumeirah Park , au second plan les immeubles de
grande hauteur de Jumeirah Lake Towers (C. Montagne, mai 2013)
Très souvent, à l’instar de cette architecte, les urbanistes travaillant chez les promoteurs immobiliers comme
DMCC, Nakheel et Emaar ont tous défendu le principe du marché pour réguler naturellement la production de
logements et de surfaces de bureaux. Ces acteurs défendent le modèle libéral du développement urbain dubaïote,
modèle qui favorise, selon eux, rapidité et efficacité dans les projets urbains. La liberté des promoteurs, auxquels ces
acteurs sont liés, la faiblesse de la régulation et le caractère exclusivement privé du développement seraient les
conditions de succès de Dubaï.
La zone franche de Jumeirah Lake Tower (C.Montagne, 18 mai 2013)
 
« C’EST À CAUSE D’EUX » DIXIT LES ACTEURS AMÉNAGEURS DES INSTITUTIONS GOUVERNEMENTALES
Le point de vue des urbanistes travaillant à la municipalité et au ministère du transport est différent, mais soutient
toujours la supériorité de Dubaï pour avoir traversé la crise économique de 2009. Les entretiens avec les ingénieurs
des transports publics, avec les urbanistes et avec les économistes des transports ont fait valoir des représentations
similaires, mais des arguments très largement opposés à ceux défendus par les acteurs cités précédemment. En
effet, c’est souvent l’impossible contrôle du secteur privé qui revient dans l’analyse des causes de la crise à Dubaï,
dans plusieurs entretiens obtenus dans les directions stratégiques du Ministère du Transport et de la Municipalité
ainsi qu’à la direction technique de la Municipalité (entretiens, octobre 2011, avril 2012, mars 2013, mai 2013).
D’après le directeur de la section planification et responsable du plan Dubaï 2020, la juxtaposition des grands projets
n’a pas permis à Dubaï d’acquérir une cohérence territoriale. En effet, les grands projets urbains dépendent
seulement de la responsabilité des entreprises nationales chargées de la promotion immobilière. Ils sont
entièrement affranchis du Plan Structural 1995-2012. Ce plan est  devenu très vite inapplicable aux conditions
contemporaines de l’urbanisation de Dubaï.
Par conséquent, le libre-jeu du marché, largement basé sur des prévisions de demande élaborées par des acteurs
privés hors du contrôle du ministère et de la municipalité aurait causé une dérégulation et une compétition très
forte. « Si tous les projets à grande échelle conçus entre 2000 et 2007 avaient été construits, Dubaï compterait
aujourd’hui plus de 10 millions d’habitants », avance le responsable du plan Dubaï 2020. La plupart des projets
immobiliers conçus entre 2004 et 2008 ont été annulés ou reportés.
C’est pourquoi les responsables de l’aménagement et de la planification urbaine de la municipalité ont choisi de
conserver l’identité de Dubaï flexible, favorable aux investisseurs et aux entrepreneurs, en un mot libéral dans la
rédaction du plan Dubaï 2020 et des règles d’urbanisme applicables à tous les projets de développement. La
première règle mise en place par le nouveau plan de régulation du développement urbain est de préserver le
« désert » et le territoire de pâturage de « 90 000 chameaux » (Dubai 2020). Plus qu’une réelle protection de leur
pâturage, c’est surtout une façon de préserver le paysage du désert et de contenir le développement urbain à
l’intérieur de limites précisées pour la première fois dans l’histoire de l’urbanisme de Dubaï, tout en offrant la
possibilité d’urbaniser sur la mer. Cependant, aujourd’hui, les projets de construction en mer semblent improbables
après l’échec du projet The World et l’annulation des Palm de Jebel Ali et de Deira à cause du coût faramineux des
infrastructures. La capacité d’action de la municipalité de Dubaï reste plutôt faible dans la mesure où les entreprises
nationales comme Emaar ou Nakheel n’ont pas d’obligation de suivre les recommandations et sont « plus rapides et
plus fortes » (entretien, municipalité de Dubaï, mai 2013).
Dans la confrontation des discours entre les acteurs (privés) du développement urbain et ceux s’efforçant d’exercer
un contrôle, il semble que, malgré une proximité et une coopération quotidiennes, les façons d’imaginer le futur du
développement urbain et d’éviter une nouvelle crise économique et un éclatement de la bulle immobilière à Dubaï
divergent drastiquement. Un mouvement de « prise de contrôle » par la Municipalité est vu comme une agression
par les acteurs de la promotion immobilière (Oula, 2012).
« SI DUBAÏ EST TOUJOURS LÀ, C’EST QUE SON MODÈLE EST DURABLE »
Il est sans équivoque que le territoire de Dubaï, le paysage urbain et la société urbaine ont été violemment affectés
par la « crise globale » (entretien, responsable de l’aménagement, municipalité, juin 2013), financière, immobilière
et économique. Pour les acteurs rencontrés qui ont des responsabilités importantes dans les ministères, ce qui est
arrivé à Dubaï était indépendant de la volonté des responsables de l’aménagement et de l’urbanisme, c’était
imprévisible « en 2007 et en 2008 les études des consultants ne s’attendaient pas à une crise d’une telle ampleur  »
(entretien avec un consultant en aménagement, septembre 2011).
D’ailleurs, nombreux sont les urbanistes qui nous ont affirmé « dire que Dubaï n’est pas durable est un peu
exagéré », notamment un urbaniste, fin connaisseur des rouages de l’urbanisme dubaïote et de ceux d’Abu Dhabi et
de Doha (entretien, avril 2013). En effet, puisque Dubaï a survécu à la crise c’est donc que le « syndrome de Dubaï »
(entretien, consultant en urbanisme, avril 2013), placé sous une « dictature du marché de libre-échange », permis par
de « forts moyens financiers et soutenu grâce à une forte armature légale » peut tout surmonter (entretien,
municipalité, mai 2013). Cet acteur-clé de l’aide à la décision en planification urbaine justifie par la grande flexibilité
des lois et des procédures de l’Emirat la capacité de Dubaï  à s’adapter et à traverser toutes les crises financières.
Pour se prémunir, le gouvernement de Dubaï et le conseil exécutif exigent désormais que des études de faisabilité
soient conduites pour déterminer les fonds propres de l’investisseur, du promoteur, et de l’entrepreneur,
garantissant ainsi la santé financière durable des projets. Il insiste aussi sur le fait que le cœur de l’économie de
Dubaï est sa logistique, et que la situation centrale de Dubaï sur les routes internationales du commerce garantit un
futur « brillant » à Dubaï. L’activité économique et son statut de ville iconique dans la région sont encore deux
puissants atouts.
La vue sur Dubaï Downtown des Dry docks de Dubaï (M. Esper, 15 mai 2013)
Un autre ingénieur – urbaniste, travaillant depuis 10 ans chez Nakheel comme responsable des infrastructures de
transports publics, a défendu le fait qu’une fois lancés les projets vivaient à leur propre rythme et évoluaient en
fonction de la conjoncture. Par exemple, le projet de la Palm Jumeirah, projet pharaonique, extrêmement coûteux en
remblaiement et en équipement n’est toujours pas entièrement construit, il reste encore un tiers du terrain à
développer.
DUBAÏ S’AFFIRME COMME UN CONTRE-MODÈLE
Dubaï reste un contre-exemple intéressant, capable de résister à une crise, certes grâce à l’influx de capitaux des
fonds souverains de l’Emirat d’Abou Dhabi. Le modèle urbain qui a entrainé cette bulle spéculative a vu ses règles du
jeu modifiées, mais intrinsèquement, le modèle de développement territorial et économique de Dubaï reste
inchangé. Dubaï demeure indispensable dans la région pour les échanges commerciaux, l’accueil des touristes du
Golfe et d’Asie et l’activité financière. Marginalisé durant la crise, le secteur du bâtiment pourrait vite redevenir l’un
des principaux piliers de la croissance économique, si le comité de préparation de l’Exposition Universelle valide la
candidature de Dubaï. En conclusion, il semble que la crise économique, financière et immobilière qui a touché
frontalement Dubaï en 2009 et qui continue de l’affecter n’a pas renversé la confiance des habitants, pas plus que
celle des responsables de l’aménagement à poursuivre leurs projets urbains avec les mêmes méthodes et les mêmes
outils.
 
CLÉMENCE MONTAGNE
 
L’auteur, géographe-urbaniste, vit et travaille aux Emirats Arabes Unis. Doctorante à l’Université Paris-Sorbonne, au
sein du laboratoire ENeC (UMR 8185), elle s’intéresse à la fabrique de la ville émirienne et au rôle des infrastructures
de transports dans l’urbanisme.
BIBLIOGRAPHIE
Ballard, J.G., 2006, I.G.H., Paris, Denoel, traduction par R. Fruit et G. Fradier, 558 p.
Bloch, M., 2010, «Dubaï’s Long Goodbye », International Journal of Regional and Urban Research, 34 (4), pp 943-95
Bonnenfant, P. (dir.), 1982, La péninsule arabique d’aujourd’hui, Paris, CNRS, 2 tomes.
Bouchareb, S., 2012, « Dubaï d’en bas, journal de Jumeirah Beach Residence », Criticat, n°10.
Davidson, C., 2008, Dubaï. The Vulnerability of Success, London, Hurst & Company, 376 p.
Davis, M., 2008, Le stade Dubaï du capitalisme, Paris, Les Prairies ordinaires, 88 p.
Davis M., Monk D.-B. (dir.), 2008,  Paradis infernaux. Les villes hallucinées du néo-capitalisme, Paris, Les Prairies
ordinaires, 315 p.
Dazi-Héni F., 2006, Monarchies et sociétés d’Arabie. Le temps des confrontations, Paris, Sciences-Po, 363 p.
Dubai Municipality, 2011, Executive Summary Dubai 2020, Atkins, 4p.
Dumortier B., M. Lavergne, 2002, Dubaï et la mondialisation : du souk à la zone franche, Paris, Éditions du Temps,
28 p.
Elsheshtawy, Y., 2010, Dubaï: Behind an Urban Spectacle, Londres, Routledge, 294 p.
Katodrytis, G., 2009, «The Dubaï Experiment », Gulf Revisited, Al Manakh 2, Amsterdam, Abu Dhabi, AMO, Urban
Planning Council, pp 38 -60.
Lavergne, M., 2009, « Dubaï, utile ou futile ? Portrait d’une ville rêvée à l’heure de la crise »,  Hérodote, n° 133, pp.
32-57.
Marchal, R., (dir.), 2001, Dubaï, cité globale, Paris, CNRS, 128 p.
Moghadam, A., 2010, Rapport de synthèse, Sénat, République Française,
Molavi, A., 2005, «Dubaï Rising», Brown Journal of World Affairs, 12 (1), pp 103-110
Molavi, A., 2009, «Do not believe reports of Dubaï’s demise», Financial Times, 11 mars 2009
Oula, A., 2012, « Les mégaprojets du Golfe : au-delà de la privatisation de la ville, la place de l’Etat »,communication
au colloque du GREMMO : Villes, acteurs et pouvoirs dans le monde arabe et musulman, 29 et 30 octobre 2012,
Actes non publiés
Pacione, M., «City Profile: Dubaï, Cities, 22 (), pp 225-265
Piquet, C., 2013, Les pays du Golfe de la perle à l’économie de la connaissance. Les nouvelles terres du libéralisme,
Paris, Armand Colin, 223 p.
Stadnicki, R. et M. Benchetrit, 2012, « Enquête « géophotographique » aux marges des villes du golfe arabique ou
comment dépasser la critique », Carnet de Terrain, Carnet de Géographes (revue en ligne)
Vohra, N., 2011, «From Golden Frontier to Global City: Shifting forms of Belonging, « Freedom » and Governance
among Indian Businessman in Dubaï », American Anthropologist, 113 (2), pp 306-318
L’article au format PDF
Retour au sommaire du #2
Category: #2 Crises en ville · Tags:
Comments
3 Responses to “Le renforcement du modèle de développement urbain de Dubaï après la crise”
Trackbacks
Check out what others are saying...
1. Dubaï et la crise de la centralité | dit :
10 novembre 2013 à 23 h 57 min
[...] http://www.revue-urbanites.fr/le-renforcement-du-modele-de-developpement-urbain-de-dubai-apres-la-cr…
[...]
2. Le renforcement du modèle de déve...  dit :
14 novembre 2013 à 13 h 44 min
[…] Le paysage urbain de Dubaï est souvent représenté comme une ville très dense structurée autour d'une
autoroute principale, la Sheikh Zayed Road, autour de laquelle sont disposés des immeubles de grande hauteur … 
[…]
3. Le renforcement du modèle de déve...  dit :
3 décembre 2013 à 21 h 01 min

9 JANVIER 2014 - EVÉNEMENT PARALLÈLE : "DÉVELOPPEMENT URBAIN DURABLE, DÉFIS ET SOLUTIONS POUR FAIRE FACE AU CHANGEMENT
CLIMATIQUE" - INTERVENTION DE M. PASCAL CANFIN, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES CHARGÉ DU
DÉVELOPPEMENT
Seul le prononcé fait foi
Monsieur le Directeur, messieurs les élus, 
Mesdames, messieurs,
Je suis très heureux de pouvoir échanger avec vous aujourd’hui sur la ville durable pour faire face au changement
climatique.
Comme l’a affirmé le Secrétaire général des Nations unies lors des « Journées des villes durables » organisées ici-
même le mois dernier, les autorités locales et régionales sont des acteurs presque plus importants que les
gouvernements dans la lutte contre le changement climatique. Car notre enjeu à tous, notre finalité, c’est de réduire
nos émissions dans le monde réel à un niveau compatible avec un réchauffement climatique contenu à moins de 2
degré. En ce sens l’accord international que nous recherchons à Paris n’est qu’un moyen d’atteindre cet objectif.
L’impact du changement climatique est une réalité d’une telle ampleur, qu’il nous est impossible de concevoir des
objectifs de développement durable pour l’agenda après 2015 sans en tenir compte. Il ne s’agit pas de dupliquer
dans ce processus la négociation climatique de la CNUCC – et d’en importer les blocages. Il est indispensable
d’introduire des cibles qui répondent à cet enjeu. Nous devons tracer la voie d’un développement compatible avec
notre objectif de limiter le réchauffement à 2 degré Celsius. Il en va de la pertinence et de l’efficacité de nos futurs
objectifs. Il en va également réciproquement de notre capacité à atteindre nos engagements en matière climatique.
Qu’il s’agisse d’énergie, de mode de consommation et de production ou encore de ville – thème qui nous réunit
aujourd’hui – chacune de ces thématiques doivent inclure des cibles qui contribuent à la lutte contre le changement
climatique.
Les villes ont un rôle crucial à jouer dans la lutte contre le changement climatique. C’est pour cela que j’ai confié
aux sénateurs Ronan Dantec et Michel Delebarre la responsabilité de réfléchir au rôle des gouvernements locaux et
régionaux pourrait jouer dans les négociations menant à la Conférence de Paris sur le changement climatique en
2015.
Les villes constituent un "acteur local" stratégique. Les villes génèrent une empreinte écologique majeure, étant
responsables de la consommation de 75 % de l’énergie mondiale et de la production de 70 % des émissions de gaz à
effet de serre. Si elles constituent un facteur essentiel contribuant au changement climatique, les villes sont
également particulièrement vulnérables à ses conséquences, incluant la montée du niveau de la mer, la majorité des
mégalopoles se situant en zone côtière.
Dans le même temps, les villes, si elles sont bien planifiées, représentent une formidable opportunité pour
l’innovation et un moteur puissant de développement. Les villes des pays en développement verront ainsi leur
superficie tripler entre 2005 et 2030. La moitié des zones urbaines qui existeront au Sud à cette date sont encore à
construire. La densité et le potentiel de connectivité des villes sont des leviers majeurs pour enclencher cette
dynamique de prospérité sobre en carbone et soutenable sur le plan social et environnemental.
Les autorités locales et régionales ont donc une responsabilité majeure dans la construction de ce monde durable.
Vos choix en matière d’énergie et de gestion des ressources naturelles, de transports et d’infrastructures,
détermineront notre capacité à atteindre nos objectifs en matière climatique.
Car c’est bien au niveau des villes que nous démontrons chaque jour que lutte contre la pauvreté et soutenabilité
environnementale et climatique sont des objectifs liés et non opposés.
Quand la ville de Curitiba, au Brésil met en place un système de bus en site propre particulièrement innovant, c’est
à la fois un progrès social pour tous ces habitants mais également un mode de transport climatiquement soutenable.
Nous n’éradiquerons pas la pauvreté urbaine dans un monde qui n’aurait pas réussi à contenir le changement
climatique. Car ce sont souvent les plus pauvres des habitants des villes qui sont les premières victimes des
conséquences du changement climatique. Je pense M. Sall, le maire de Dakar pourra en parler.
Mesdames et messieurs,
Plus que jamais nous avons l’impératif de réussir 2015. Réussir en septembre 2015 pour faire aboutir cet agenda
post-2015, réussir en décembre 2015 pour trouver à Paris un accord climatique ambitieux. Réussir pour la première
fois dans l’histoire de l’humanité à définir ensemble un avenir à l’humanité et à notre planète. C’est notre
responsabilité, nous n’avons pas le droit d’échouer.
Je vous remercie pour votre attention.

ENDA TM 
Environnement et Développement du Tiers Monde 
http://www.enda.sn
ENDA se veut avant tout un réseau d'échanges et de réflexion. Pour illustrer cet objectif, le réseau entreprend des
activités d’appui direct aux groupes de base, et initie des rencontres, des séminaires, des réunions de travail, des
manifestations et des expositions.

- Généralités - Groupes Cible - Domaines d’intervention - Modes d’accès àl’information - 


- Infos pratiques - Contacts -

Généralités
 Historique

Créée il y a 25 ans, l’ONG internationale ENDA Tiers Monde plaide pour une solidarité effective Sud-Sud et
fonctionne sur une véritable engagement associatif de chacun des membres. ENDA vis avant tout une auto-
organisation des groupes de base.
 Objectifs et mandat

ENDA cherche à améliorer l'Environnement et et le Développement du Tiers-monde en : 


- agissant avec les groupes de base, à partir de leurs stratégies et de leurs objectifs,  
- appuyant la recherche d'un développement alternatif à tous les niveaux et des types de formation qui le rendront
possible, 
- contribuant à l'engagement des intellectuels et des cadres dans la définition et la mise en oeuvre d'un
développement au service du plus grand nombre.
 Capacité de fonctionnement en réseau

ENDA Tiers-Monde, dont le siège est situé au Sénégal, est constitué d'un ensemble d'équipes et de programmes en
réelle synergie. Echanges intensifs d’expériences et des techniques à travers tout le réseau composé d'antennes
décentralisées.

Groupes Cible
- Groupes de base en Afrique, dont l’intérêt est de chercher à évoluer dans un esprit communautaire,  
- Intellectuels et cadres africains, 
- Institutions et administrations du Tiers Monde, 
- et plus généralement, toute personne engagée personnellement ou professionnellement dans le respect du
pluralisme et de la culture et dans une solidarité effective Nord-Sud des divers peuples.

Domaines d’intervention
 Approche thématique

- Droits de l'homme et droits des peuples, appui aux peuples culturellement les plus menacés, disparités "socio-
spatiales", 
- Enfants et jeunes face à l'environnement, à l'emploi et à la culture, 
- Articulations administration/population, 
- Technologies combinées, 
- Ecologie et économie populaire urbaine, 
- Communication pour le développement, 
- Action contre les modèles de consommation et de production importés 
- Lutte contre le sida.
 Autre type d’approche

Cette autre approche est caractérisée par la gestion de programmes : 


Economie populaire urbaine (ECOPOP) : Mohamed Soumaré ecopop@enda.sn 
Education environnementale (EDEV) : Raphaël Ndiaye edev@enda.sn 
Jeunesse action (JEUDA) :  Fabrizio Terenzio jeuda@enda.sn 
Peuples culturellement menacés (PEUPDE) : Huguette Lassort se@enda.sn 
Programme énergie : Youba Sokona energy2@enda.sn 
Protection naturelle des cultures (PRONAT) : Mahmoud Remal pronat@enda.sn 
Programme. prospective populaire urbaine (PPU) : Jean-Jacques Guibbert  ppu@enda.sn 
Relais pour le développement urbain participé (RUP) : Malick Gaye rup@enda.sn 
Santé : Abdelkader Bacha endaste@enda.sn 
Journées aérées (SIGJOU) : Lamine Diawara se@enda.sn 
Synergie genre et développement (SYNFEV) : M-H Mottin Sylla mhms@enda.sn 
Système et prospective (SYSPRO) syspro@enda.sn 
Ensemble : Dominique Ben Abdallah ensemble@enda.sn 
Vivre autrement : Sophie Bessis enda.va@globenet.org 
Actions en Casamance (ACAS) : Made Diouf acas@enda.sn 
Enda Sahel - GRAF : Emmanuel Ndione graf@enda.sn
 Zones géographiques d’intervention

ENDA couvre dans ses objectifs tous les pays en développement

Modes d’accès à l’information


o Produits

- Publication des coordinations et équipes (Energie, Jeunesse-Action, Formation-Education, Recherches) 


- Etudes et recherches 
- Documents tiers-monde - third world documents en français, anglais ou espagnol, 29 numéros parus 
- Fiches technologiques 
- Fiches communication 
- Diffusion de livres et documents audiovisuels. 
- "Occasionnal papers" (français, anglais) E 
- Essais, documents de base et réimpressions (liste et tirages sur demande) 
Pour effectuer une recherche rapide : 
Adressothèque, Sata Tall se@enda.sn
o Périodiques

Revue thématique "Environnement africain / African Environment" (français, anglais), 4 numéros/an  


" Vivre autrement ", sur les thèmes consommation et éco-développement
o Langues de travail

Français, Anglais 
Autre : Espagnol

Infos pratiques
o Affiliation

ENDA est membre conditionnel de APC (Association for Progressive Communications)


o Financement

Les appuis extérieurs (Nations Unies, Suisse, Autriche) et le mouvement associatif assurent l'indépendance financière
d'ENDA (66%des ressources). 
La France, la Belgique, le Canada, l’Union européenne, la Finlande, l'Italie, les Pays-Bas et la Suède ont apporté ou
apportent des contributions ponctuellement. 
Environ la moitié des ressources viennent en appui direct aux groupes de base, le reste se répartissant entre la
formation, la recherche, les consultations et la communication.
 

Contacts
 Siège

ENDA - 4 & 5 rue Kléber - BP 3370 - Dakar (Sénégal) 


Tél : (221-8) 22.42.29 / 21.60.27 
Fax : (221-8) 22.26.95 
Courrier électronique enda@enda.sn  - Site web http://www.enda.sn
ENDA Diffusion - BP 3370 - Dakar - Sénégal 
Tel : 221 216 027 / 224 229 
Fax : 221 222 695 
Courrier électronique enda@enda.sn  - Documentation centrale : Mamane Boukari docs@enda.sn 
Edition : Gideon Prisler Omulu editions@enda.sn
 Antennes, relais

Enda Bolivie - C.P. 9772 - La Paz (Bolivie) 


Tél : (591-2) 811.645 - Fax : (591-2) 811.446 
Courrier électronique enda@unbol.bo
Enda Amérique Latine - Calle 33 n°16-22 (sede principal) - Bogota (Colombie) 
Tél : (571) 338.3140 / 285.6628 - Fax : (571) 288.2567 
Courrier électronique pilartru@colnodo.apc.org
Enda Tramil Centro America - Apdo Postal 64 - Managua (Nicaragua) 
Tél : (505) 2 658.311 - Fax : (505) 2 657.283 
Courriers électroniques tramilca@nicarao.org.ni ou bien planmed@ibw.com.ni 
Site web : http://www.funredes.org/endacaribe/Tramil.html
Enda Ethiopie - PO Box 278 - Addis-Abéba (Ethiopie) 
Tél : (251-1) 512.186 - Fax : (251-1) 544.580 
Courrier éelctronique enda-ethiopia@padis.gn.apc.org
Enda Délégation Europe 
5 rue des immeubles industriels - 75011 Paris (France) 
Tél : (33-1) 4372.0909 - Fax : (33-1) 4372.1681 
Courrier électronique enda.del@globenet.org - Site web :  http://www.globenet.org/enda
Enda Siddhi - 5 Vashi Saphalya, Plot 10, Sector 9a Vashi - New Bombay (Inde)  
Tél : (99-22) 766.1902 - Fax : (99-22) 610.5617 
Courrier électronique siddhi.enda@lwbbs.net
Enda Océan Indien - 44 rue Rainandriamampandry -  SIAF 33 Ambondrona - 
BP 3386 - Tananarive - 101 (Madagascar) 
Tel : (261-20) 226.1474 - Fax : (261-20) 222.4730 
Courriers électroniques endaoi@enda.enda.mg ou endaoi@syfed.refer.mg 
Site web : http://www.enda.sn/madagasc/madagasc.htm
Enda Bamako - BP 3123 - Bamako (Mali) 
Tél : (223) 231.775 - Fax : (223) 232.593 
Courrier électronique enda-bko@spider.toolnet.org
Enda Maghreb - 196, Quartier OLM - Rabat Souissi (Maroc) 
Tél : (212-7) 756.414 / 756.415 - Fax : (212-7) 756.413 
Courrier électronique endamag@mail.sis.net.ma  - Site web : http://www.enda.sn/maghreb/endamag.htm
Enda Caraïbes - Apdo 3370 -  Santo Domingo (République Dominicaine) 
Tél : (1-809) 549.4836 - Fax : (1-809) 541.3259 
Courrier électronique ecaribe@aacr.net - Site web : http://funredes.org/endacaribe
Enda Inter-Arabe - Cité Vénus, Bloc 2, El Mesah VII - 1004 Tunis (Tunisie) 
Tél : (216-1) 752.003 - Fax : (216-1) 766.234 
Courrier électronique bhessma@gnet.tn
Enda Vietnam - J2 Cu Xà Bàc Hal, P15-Q10 - Ho Chi Minh Ville (Vietnam) 
Tél : (848) 645.096 - Fax : (848) 298.540 
Courrier électronique hanoi!endavn@netnam2.org.vn
Enda Zimbabwe - PO Box 3492 -  Harare (Zimbabwe) 
Tél : (263-4) 301.156 / 301.162 
Courrier électronique enda-zw@harare.iafrica.com - 
Site web : http://www.ecouncil.ac.cr/ngoexch/enda.htm

La première définition écrite du terme anglais « slum » apparaît, dit-on, en 1812 sous la plume de l'écrivain et hors-
la-loi James Hardy Vaux, dans son Vocabulary of the Flash Language, où il est présenté comme synonyme de
« racket » ou « commerce criminel ». Aussi, pendant longtemps, le « slum » a  été associé à un habitat sale et occupé
par une population misérable et criminelle. En français, le mot « bidonville » a été employé pour la première fois en
1953 à propos du Maroc pour désigner littéralement des « maisons en bidons », c'est-à-dire un ensemble
d'habitations construites avec des matériaux de récupération.
Photo : Le bidonville Dharavi à Bombay (env. 800 000 hab.)

 
 
Aujourd'hui, on qualifie de bidonville, un logement qui possède à peu près les caractéristiques suivantes :
 Surpeuplement
 Logements informels et de piètre qualité, majoritairement situés en périphérie des centre-villes
 Accès insuffisant à l'eau potable
 Manque d'hygiène
 Insécurité des personnes
 Insécurité quant à la conservation de la jouissance du domicile.
 
Image satellite : Le bidonville de Kibéra, Kenya (env. 200 000 hab.) - (Google Earth)

 
En revanche, tous les urbains pauvres ne vivent pas dans des bidonvilles, et tous les habitants des bidonvilles ne
sont pas pauvres. Bien que ces deux ensembles se recoupent pour l'essentiel, le nombre de pauvres urbains vivant
en dehors des bidonvilles est bien plus important.
 
Schéma des étapes de la bidonvilisation dans les agglomérations des pays en voie de développement
 
 
 
« C’est d’abord la misère rurale qui emplit les bidonvilles. Puis l’accroissement naturel prend le relais » Noël Cannat
 
Il existe probablement plus de 200 000 bidonvilles sur la planète, comptant de quelques centaines à plus d'un
million d'habitants. Selon un rapport des Nations unies de juin 2006, près d'un citadin sur trois habite déjà dans un
bidonville.
 
Carte - Les plus grands "mégabidonvilles" en 2005
 

 
 
Graphique - Part de la population urbaine vivant en bidonville en 2005
 
 
 
Comme le montre cette carte, la plupart des grands bidonvilles sont situés dans des pays en développement, mais,
bien que ce soit souvent occulté, ceux-ci ont existé également dans les pays industrialisés et subsistent encore, mais
de manière plus discrète.
 
Témoins de la crise du logement, les bidonvilles réapparaissent aujourd’hui en France
(Paris, Porte d’Aubervilliers, 2006)
 
 
Typologie des bidonvilles
 
Plusieurs formes de typologie existent.
Mike Davis, dans son livre "Le pire des mondes possibles", réalise une typologie des bidonvilles autour de la
question de savoir si oui ou non les nouveaux migrants ont les moyens de se loger à proximité des principaux sites de
travail  (centre/périphérie) puis après si le logement est formel ou informel :
 
 Les logements formels : vieux immeubles, immeubles construits pour les pauvres, logements publics,
hôtels meublés des marchands de sommeil, location privée ou publique de cabanes.
 
o Les logements informels : squats autorisés ou non, subdivisions pirates de terrains, ainsi
que les personnes vivant dans la rue. Dans le cas des logements informels, les opérations de
« déguerpissement » sont courantes, surtout quand de grands événements se préparent (JO, visite d’État) ou à
titre de répression politique (une manière de punir les habitants d’un quartier ayant voté majoritairement pour
l’opposition). Les bidonvilles sont le terrain d’un marché foncier invisible où des titres de propriété douteux
s’échangent sans que l’on ait procédé à une viabilisation des lots. La perspective d’une régularisation d’un
quartier alimente un marché immobilier parallèle. Les prix des loyers et des terrains flambent dans les favelas à
l’annonce d’une régularisation. Loger des pauvres est une affaire qui marche. Le retour sur investissement est
rapide même si les logements sont dénués de tout caractère légal. Les propriétaires des cabanes, construites
bien souvent sur des terrains appartenant à l’État, sont généralement des politiciens et des hauts
fonctionnaires.
 
Pour Odette et Alain Vaguet, dans leur ouvrage "Du bidonville à l'épidémie, la crise urbaine indienne à Hyderabad"
les bidonvilles sont répartis en cinq grandes classes :
 
 Les Taudis : le statut des occupants est variable (squatters, propriétaires, locataires...). Ces secteurs
sont hétérogènes (quartiers populaires et taudis voisinent avec des îlots plus aisés occupés par des familles
attachées à l'environnement traditionnel de leur communauté).
 Les huttes itinérantes : abris sommaires réalisés avec des feuilles, de la paille ou de vieux tissus. Ce
sont des îlots de 10 à parfois plus de 50 huttes, caractérisés par une absence totale d'équipements sanitaires.
 Les quartiers de squatters : c'est l'occupation d'un terrain sur lequel on ne peut prétendre à aucun
droit (quartiers illégaux,ville légale). Ces quartiers se créent selon deux procédés : la constitution progressive de
slums (des familles initiatrices en attirent d'autres) et l'invasion préméditée et organisée d'une parcelle (le plus
souvent menée par des leaders qui en tireront profit).
 Les squatters en voie de régularisation foncière : la squatterisation peut parfois déboucher sur une
régularisation de la situation foncière. La légalisation d'un slum aboutit souvent à une amélioration spontanée des
logements et parfois à l'installation d'infrastructures sanitaires.Ces quartiers en voie de régularisation se situent
souvent en périphérie.
 Les quartiers réhabilités : ce sont soit des transferts de slums en périphérie éloignée (sorte de
relocalisation), soit des quartiers de relogement in situ. Mais dans les deux cas, les réussites d'intégration sont
rares. Dans le premier cas, le nouveau slum est deserté du fait de l'absence d'infrastructures de transports. Dans
le deuxième cas on assiste souvent à une récupération par des catégories moins démunies du lieu.
 
Le slum de Indiramma Nagar à Hyderabad, Inde
 
 
L'ONU a consacré sa première conférence sur l'habitat, il y a plus de 30 ans déjà (Habitat I, Vancouver 1976). Face à
l'urgence et à la généralisation du problème de la paupérisation urbaine, la Déclaration du Millénaire vise, dans son
objectif 7, à « améliorer la situation d’au moins 100 millions d’habitants de bidonvilles d’ici 2020 ». Le chemin est
encore long : Kibera, l'un des plus grands bidonvilles africains, se trouve à Nairobi, le siège de l'Agence des Nations
unies pour les établissements humains (UN Habitat)...
 
Affiche de l'exposition "Bidonvilles, Histoire et représentation en Seine-Saint-Denis, 1954-1974"
 
 
 

 
Reportage sur les bidonvilles de Nanterre
 
 
 
Sources :
 
- Mike Davis : Le Pire des mondes possibles, De l'explosion urbaine au bidonville global. Édition La Découverte, 2006.
- Odette et Alain Vaguet : Du bidonville à l'épidémie, la crise urbaine indienne à Hyderabad. Édition Espaces
tropicaux, 1993.
- Wikipedia : Article Bidonville

LE MONDE EN QUELQUES STATISTIQUES


No comment...
Illustration : Population par continent (2009)
 
Illustration : Répartition homme/femme dans le monde (2009)

Illustration : Les moins de 15 ans et les plus de 64 ans dans le monde (2009)


Illustration : Les religions dans le monde (2005)

Illustrations : Population ayant accès à l'eau potable dans le monde (2009)


Illustration : Sous-alimentation et obésité dans le monde (2009)

Illustration : Viol et tentative de viol dans le monde (2005)


Illustration : L'accès à internet dans le monde (2009)

 
De nombreux espaces naturels protégés peuvent être considérés comme "urbains", en raison de leur intégration
dans une agglomération. A la fois grands jardins publics et garantie de biodiversité, ils sont nécessaires à la ville. Ils
incarnent la proximité du " sauvage " et une plus-value esthétique.
Cette relation est pourtant conflictuelle, du fait de la pression urbaine et du tourisme, et peut même aboutir à
l'exclusion des populations pauvres.
Carte : Le parc Tijuca face aux favelas à Rio de Janeiro
 
Le paradoxe des parcs nationaux urbains
Varsovie, Mumbai, Le Cap, Rio, Stockholm, Nairobi, San Francisco : plusieurs métropoles intègrent aujourd'hui des
espaces protégés, enveloppés par des activités et des quartiers résidentiels denses.
Mais au delà de l'idée d'une nature " assiégée " par la ville, des politiques émergent dans les pays développés,
composant avec la protection par une valorisation des écosystèmes, une éducation à l'environnement et des
réglementations foncières strictes.
Les concepts de " nature urbaine ", de " biodiversité urbaine " permettent d'accommoder les espaces construits à la
nature, dans une approche réparatrice.

Cependant, au Sud, la question du développement prime encore sur cette évolution de la relation ville-nature. A Rio
de Janeiro, et plus encore à Mumbai, les parcs sont exposés directement à la fragmentation des milieux naturels, à
l'étalement urbain et aux prédations diverses sur les ressources, avec souvent des réponses inégales.
La tentative de conciliation territoriale expérimentée à Rio - où la situation permet plus de marges de manœuvre -
contraste avec la radicalisation des positions à Mumbai.
Rio : la conciliation

Au cœur de Rio (6 millions d'habitants), le parc national de Tijuca, dont le symbole est la statue du Christ
Rédempteur (sur Corcovado) reçoit environ 2 millions de visiteurs par an. C'est une forêt tropicale secondaire en
mosaïque, coupée par 45 km de routes.
La pression urbaine y est grande : pelerinages, feux de forêt, braconnage, divagations d'animaux s'ajoutent à
l'extension de 100 bidonvilles dans un périmètre protégé par 5 gardes seulement.
 
Depuis 2008, la gestion du parc est participative, avec un conseil consultatif regroupant des membres de la société
civile et la mairie. Vers le sud et ses quartiers, un mur de protection contre l'expension de bidonvilles a été envisagé ;
ailleurs, des initiatives se developpent avec l'aide d'ONG locales (nettoyage, replantations, écotourisme...)
Photo : Mont Pedra Bonita, (700 mètres, il se trouve à l’intérieur du Parc National de Tijuca)

Mumbai : l'expulsion

Mumbai illustre une situation dramatique d'exclusion sociale par la nature. La mégalopole de 20 millions
d'habitants (auxquels s'ajoutent plus 150 000 personnes par an) exerce une pression accrue sur les mangroves et les
100 km² de la forêt du parc national Sanjay Ghandi, au nord.
Ce dernier sert de château d'eau, de poumon vert et de lieu de ressourcement pour les population urbaines, avec un
site de loisirs et de pèlerinage à l'ouest du parc, et des enclaves urbaines au sud. En 1995, plus de 500 000 habitants
vivaient dans le parc, par extension de l'habitant informel. Ici, le contexte ne permet pas la gestion participative : la
pression sur la ressource en bois, le gibier et le foncier est extrêmement forte. La pauvreté des  slums et la croissance
urbaine, symbolisée par des tours verticales aux portes du parc, assiègent littéralement la forêt.

Carte : Le parc Sanjay Gandhi, une enclave dans Mumbai ?


En retour, les attaques de léopards contre les riverains deviennent fréquentes. Un mur délimite donc le parc au
sud. Des expulsion violentes ont été décidées en 2000 : 46 000 logements informels et petits commerces ont été
évacués, avec le soutien des associations écologistes... et des promoteurs locaux. Des indemnités et un relogement
étaient prévus pour les résidents d'avant 1995. Cependant, seuls 12 000 bénéficiaires ont surmonté les démarches et
la corruption.
Aujourd'hui, 150 000 personnes seraient encore dans le parc, avec l'accord tacite des forestiers.
La relation entre le parc et la ville achoppe donc surtout sur la question du sous-developpement et de la promiscuité
spatiale.

Articles connexes :
 L'empreinte écologique
 Les parcs, reflet d'un environnement politique et social
 
Article extrait de : 
 Atlas des espaces protégés, Les sociétés face à la nature de L. Laslaz (Dir.) - S. Depraz - S. Guyot - S.
Héritier, cartographie et infographies d'Alexandre Nicolas, aux Éditions Autrement, 2012
 
DÉMOGRAPHIE :
LE XXIE SIÈCLE SERA-T-IL URBAIN
 
De plus en plus de citadins, de moins en moins de ruraux. Ainsi sera le monde en 2030, selon une étude des Nations
unies sur l’urbanisation galopante. Un futur alarmant, caractérisé par la paupérisation des villes et une fracture Nord-
Sud encore plus grande.
Le nombre de citadins est sur le point de dépasser celui des ruraux. Depuis 1950, le pourcentage de la population
mondiale vivant en ville est passée de 30 à 50 %. D’ici 2030, cette proportion devrait atteindre 60 %. Et on estime
qu’en 2050, les deux-tiers de la population mondiale vivront dans les villes. Selon les mêmes projections, le monde
comptera 36 mégapoles de plus de 10 millions d’habitants en 2015 contre 23 il y a dix ans. Tel est le constat du
rapport de prospective sur l’urbanisation, World urbanization prospects des Nations unies, paru en octobre dernier.
D’après les prévisions, 80 % des Européens vivront dans des zones urbaines d’ici 2020. Mais la population
augmentera surtout dans les zones urbaines des pays en développement. Un phénomène qui s’explique notamment
par l’exode rural et par la transformation progressive des villages en zones urbaines. L’Onu évalue que les villes en
développement accueilleront 4 milliards d’habitants, soit 80 % des citadins du monde d’ici 2030. Les villes indiennes
de Delhi et de Bombay atteindront respectivement 19 et 22 millions d’habitants, et 17 millions pour celles de Lagos
au Nigeria et de Shangaï en Chine.
Hypertrophie des villes
Mais cette redistribution de la population n’est pas sans conséquences. L’urbanisation massive dans les pays en
développement a pour corollaire une multitude de problèmes graves : conditions de vie déplorable (difficultés
d’approvisionnement en eau, manque d’hygiène, insuffisance de logements...), pauvreté, chômage, maladie, etc.
Aujourd’hui, selon le Programme des Nations unies pour le développement (PNUE), un quart de la population
urbanisée vit en dessous du seuil de pauvreté. Et un citadin sur trois (soit un milliard de personnes à l’échelle de la
planète) vit dans un bidonville, sans électricité, ni eau, ni accès aux services de base. D’après le rapport des Nations
unies, si la tendance actuelle se poursuit, ce chiffre atteindra 1,4 milliard d’ici 2020. Cet exode rural massif, qui,
contrairement à ce qu’espèrent les populations, ne permet pas d’échapper à la pauvreté, va renforcer encore plus la
fracture entre pays riches et pauvres. Actuellement, dans les pays riches, 6 % des citadins vivent dans le dénuement  ;
au Sud, le pourcentage grimpe à 80 %. De fait, la gestion de l’environnement urbain, thème qui se pose déjà avec
acuité, deviendra une priorité dans le monde entier.
Cultiver en ville, une solution d’avenir
La concentration autour des mégapoles créé en outre des difficultés inédites pour nourrir les populations. Car il va
rester moins de paysans dans les campagnes pour nourrir davantage de citadins. Pour espérer nourrir
convenablement les 9 milliards d’habitants que comptera la planète à l’horizon 2050, il faudrait doubler la
production agricole. Un vrai défi ! Pourtant, des solutions se profilent, à commencer par celle qui consiste à cultiver
en ville. Ce que préconise Michel Griffon, agronome. « Il faut tout simplement amener la culture de fruits et légumes,
ainsi que l’élevage, à l’intérieur des zones urbaines et en proche périphérie », écrit-il, expliquant qu’entre autre
avantage, « l’agriculture urbaine permet le recyclage des résidus de la ville : déchets organiques et gaz carbonique ».
D’après la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), ce système d’agriculture nourrit
d’ores et déjà 700 millions de citadins de par le monde, soit le quart de la population urbaine mondiale. C’est
notamment le cas à Pondichery, en Inde, où des jardins en ville approvisionnent les habitants en fruits et légumes. Il
ne faut pas oublier que, dans le même temps, la croissance urbaine fera peser une pression supplémentaire sur
l’environnement et les ressources. Le rapport de l’Onu montre en effet que les citadins, par leur mode de
consommation, leurs déplacements, leurs activités économiques, consomment plus d’énergie que les ruraux et
produisent plus de déchets. La préservation des ressources naturelles, le recyclage des déchets, la limitation des gaz
à effet de serre font également partie des défis considérables à venir.
La Croix : Vous consacrez un nouveau livre aux enjeux de la mondialisation urbaine… 
Olivier Mongin : Parce que, après les grandes découvertes et la révolution industrielle, on peut associer la troisième
mondialisation historique à un mouvement d’urbanisation très rapide. En Asie du Sud-Est et en Afrique, on assiste au
départ vers les villes de la dernière génération de villageois. C’est un choc historique : au début du XXe  siècle, seuls
8 % de la population de la planète étaient urbanisés !
Cette urbanisation généralisée ne signifie pas que tous les territoires sont construits et habités, mais que les mœurs
urbaines se propagent partout, sans retour : l’industrialisation de l’agriculture, la déforestation, la désertification.
Et elle est en mal d’urbanité et de civilité : l’urbs antique, espace d’intégration marqué par des enceintes, qui
résistent aux flux extérieurs, a divorcé de la civitas, espace politique où les services sont organisés, la justice rendue
et les risques mutualisés.
On observe un double mouvement, centripète et centrifuge : soit des territoires qui n’en finissent pas de s’étendre,
comme ces mégalopoles de São Paulo ou Johannesburg ; soit des pôles qui ont tendance à se replier sur eux-mêmes,
comme Dubaï, l’un des premiers aéroports du monde, ou Singapour, premier port de porte-conteneurs du monde.
La vitesse de l’urbanisation actuelle engendre beaucoup de fragilités, et des dégâts (par exemple l’effondrement
d’immeubles entiers) dont on parle moins que des gratte-ciel de Shanghaï ou Manille !
Quelles sont ces fragilités ? 
O. M. : Les chercheurs parlent de « non-lieux », pour évoquer ces espaces urbains sans urbanité. Des espaces
virtuels livrés aux hackers, ou bien privés d’accès et de services, qui s’opposent aux «  hyperlieux », ceux de la
connectivité réelle et virtuelle.
Les connexions deviennent le moteur du développement urbain. Plutôt que l’inscription dans un territoire, c’est la
mobilité qui compte. Toutes les villes sont organisées autour des ports, des aéroports, des gares TGV. Pour les
générations à venir, l’accès à la ville, à un logement dans des conditions financières correctes, sera le problème
central.
En Chine, un permis urbain est obligatoire pour pénétrer dans Shanghaï. À Istanbul, l’entrée sur le territoire urbain
se fait à travers des « quartiers tremplins » de logements illégaux, accolés au dernier constitué. Et comment accéder
à l’espace public, s’y déplacer ? 
Exister veut dire sortir de chez soi… Alors que la mobilité est devenue indispensable pour survivre, certains espaces
urbains sont bloqués : il faut plusieurs heures aux travailleurs vivant dans les périphéries lointaines pour rejoindre
leur lieu de travail.
La ville n’est plus habitable ? 
O. M. : Il y a beaucoup d’inhabitable, de mal habitable, de non habitable : les flux sont plus forts que les lieux, les
séparations plus fortes que les mixités ; il y a des zones blanches, des franges marginalisées, et partout le privé
l’emporte sur le public. Pour contrer ces tendances lourdes négatives, il faudrait reconstruire des valeurs urbaines.
L’urbanisation en cours est fragile, parce qu’elle n’est pas portée par la puissance publique : 60 % des territoires ne
relèvent ni d’un État ni du marché, mais de l’informel. La majorité se méfie de la puissance publique ; dans notre
pays, la démocratie participative est en crise, et pourtant c’est elle qui pacifie les mœurs, permet l’intégration
pacifique dans la ville. «Attention, m’a dit un élu brésilien, vous avez ces valeurs en Europe, ne les lâchez pas trop
vite !» 
Ce qu’il ne faut pas lâcher ? 
O. M. : La mémoire ! Chaque ville a une histoire, un imaginaire qui doit pouvoir se raconter. Et puis, le savoir  : ce
n’est pas un hasard si les villes médiévales ont été créées par les universitaires et les moines, si la question de
l’éducation redevient centrale. 
Il faut aussi de la solidarité, des édiles qui organisent l’espace commun. Je plaide pour une « mondialisation par le
bas », et un peu de décélération. On ne peut pas revenir au local ni se passer de la multiplicité des rythmes. Mais on
peut concevoir des villes à plusieurs vitesses, des « villes passantes », où l’on peut passer d’un rythme à l’autre,
entrer et sortir. Il faut des places aussi, des lieux de rassemblement, dans la tradition de l’agora grecque. 
Regardez leur rôle dans l’histoire, de la place Tian An Men à la place Tahrir au Caire… Il faut aussi retrouver des
cadres, des sites, des lignes d’horizon : le projet du Grand Paris ne peut se réduire à des connexions, il doit renvoyer à
un paysage sensible : celui qui suit la Seine jusqu’au Havre, et ses mouettes remontant le fleuve, a du sens !
………………….
BIBLIOGRAPHIE 
Olivier Mongin est écrivain, directeur de publication de la revue Esprit, et auteur notamment des essais :  
La Condition urbaine, la ville à l’heure de la mondialisation,  Seuil et Point Seuil, 2007, 10 €.
La ville des flux. L’envers et l’endroit de la mondialisation urbaine,  Fayard, septembre 2013, 520 p., 26 €.
Recueilli par GUILLEMETTE DE LA BORIE
26/12/13 - 13 H 48 - Mis à jour le 26/12/13 - 15 H 24
Réagir 0
 
VERSION PAPIERVERSION WEB
 
RÉAGISSEZ0 commentaire
 La possibilité de réagir aux articles est réservée aux abonnés
 Vous êtes abonné(e) ? Cliquez ici pour vous identifier
L’Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES) a organisé en son siège à Rabat, les 1 er et 2 octobre 2012, une
rencontre scientifique internationale sur le thème  « Défis futurs du nouveau monde urbain : quel modèle de
développement pour la ville marocaine ? », en collaboration avec l’Institut National d’Aménagement et d’Urbanisme
(INAU), l’Association Internationale des Sciences Régionales (RSAI) et le JPI Urban Europe. 
L’objectif de cette rencontre est d’analyser en profondeur les forces et les impacts du processus de développement
économique, social, culturel et technologique, induit par les villes du XXIème siècle, de détecter les menaces qui
pèsent sur les zones urbaines (changement climatique, sécurité…), d’identifier les nouvelles méthodes de re-
conception des villes et les pistes de solutions pour des politiques équilibrées qui renforcent le potentiel de
développement des agglomérations dans le monde, d’une manière générale et au Maroc, plus particulièrement.
Ont participé à cette rencontre des décideurs publics, des acteurs de la société civile et plusieurs experts nationaux
et étrangers pour discuter, selon une approche transdisciplinaire, des opportunités et des défis auxquels est
confronté le nouveau monde urbain.
Lien: 
http://www.ires.ma/fr/rencontres-et-debats/defis-futurs-du-nouveau-monde-urbain-quel-modele-de-
developpement-pour-la-ville-marocaine
Galerie photos



1/18
LE PROBLEME DES GRANDES VILLES EN TANT QUE DEFI GLOBAL, AUQUEL LES PARLEMENTAIRES SONT APPELES A
FOURNIR UNE REPONSE, EN TERMES A LA FOIS DE CIVILISATION URBAINE ET DE DEMOCRATIE
Résolution adoptée sans vote par la 101ème Conférence interparlementaire
(Bruxelles, 15 avril 1999)

La 101ème Conférence interparlementaire,


consciente que, du fait de l'explosion des villes et du rythme soutenu de l'accroissement démographique, la moitié
de la population mondiale vivra dans des zones urbaines au début du troisième millénaire,
sachant que les villes sont un moteur du progrès économique et social général des nations et qu'au fil de
l'évolution de la société, l'urbanisation a permis d'améliorer la qualité de la vie d'une grande partie de la population
en facilitant l'accès à l'éducation, aux services sociaux et aux soins de santé pour tous, en particulier les enfants, ainsi
que la participation à la vie culturelle, politique et religieuse,
convaincue que le potentiel de progrès des zones métropolitaines ne pourra être valorisé pleinement que si l'on
trouve des solutions durables aux graves problèmes dus à la concentration de la population et aux activités propres
aux grandes villes, dont les plus importants sont :
 la pénurie de logements et le caractère inadéquat d'une partie de ceux qui sont disponibles;
 la pollution de l'environnement à l'intérieur et autour des zones urbaines;
 le manque ou l'insuffisance des ressources en eau ou des installations de traitement de l'eau;
 la détérioration du fonds de bâtiments et du patrimoine architectural;
 l'insuffisance des infrastructures;
 le taux élevé de chômage;
 l'insuffisance des services sociaux de base, en particulier en ce qui concerne les enfants et les personnes
âgées, et de l'accès à l'éducation et aux soins de santé pour tous, notamment les enfants;
 la congestion de la circulation urbaine;
 les problèmes liés au vieillissement de la population;
 l'insécurité alimentaire;
 l'insuffisance des ressources financières dont disposent les autorités locales pour faire face à leurs
obligations;
 la montée de la criminalité;
 la prostitution, l'exploitation sexuelle des enfants et la consommation de drogue;
 la vulnérabilité accrue face aux catastrophes naturelles et à celles provoquées par l'homme;
inquiète
 que les femmes ne participent pas pleinement aux prises de décisions politiques, en particulier dans les
instances locales, ce qui signifie que les décisions sont prises sans égard pour les besoins propres aux femmes,
 que les femmes qui travaillent soient encore très souvent reléguées dans des tâches subalternes et
qu'elles ne soient pas rémunérées équitablement, que de nombreuses femmes fassent l'objet de harcèlement sur
leur lieu de travail et que la restructuration économique ait eu une incidence profonde sur l'emploi des femmes dans
de nombreux pays,
 que la charge de s'occuper de la maison et de la famille repose encore en quasi-totalité sur les femmes
alors que les programmes sociaux ne sont toujours pas adaptés pour tenir compte du double rôle des femmes en
tant que salariées et femmes au foyer,
 de l'importance des obstacles que rencontrent les femmes au chômage, notamment le manque
d'éducation et de formation, la discrimination dans le recrutement et l'absence d'accès au crédit quand elles
cherchent à créer leur propre entreprise,
profondément préoccupée par le fait que tous ces problèmes nuisent en premier lieu à la population pauvre et aux
groupes sociaux vulnérables (personnes âgées, femmes, enfants, personnes handicapées) et représentent en même
temps une menace permanente pour la vie de tous les habitants des grandes villes, quelle que soit leur catégorie
sociale,
consciente que les pays en développement, où sont concentrées la plupart des grandes villes de la planète, sont les
premiers à pâtir des effets négatifs de l'urbanisation, engendrée principalement par l'exode rural et non par
l'accroissement démographique, mais sachant que les pays développés affrontent eux aussi des difficultés majeures,
quoique d'un autre ordre, liées aux mégalopoles,
notant avec inquiétude que le rythme accru de "l'urbanisation" de la pauvreté et le fossé toujours plus grand entre
les pauvres et les riches des grandes villes compromettent la solidarité, accentuent le danger d'aliénation et de
marginalisation d'une partie de la population urbaine et engendrent ainsi une ségrégation sociale,
préoccupée par la multiplication, ces dernières années, des conflits et des guerres qui ont entraîné et entraînent la
destruction des habitations et des établissements de millions de personnes partout dans le monde,
rappelant le soutien accordé par l'Union interparlementaire au suivi des décisions de la Conférence des Nations
Unies sur l'environnement et le développement (Rio de Janeiro, juin 1992), de la Conférence internationale sur la
population et le développement (Le Caire, septembre 1994), du Sommet mondial pour le développement social
(Copenhague, mars 1995), de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes (Beijing, septembre 1995) et du
Sommet mondial de l'alimentation (Rome, novembre 1996),
rappelant en particulier la contribution de l'Union interparlementaire à la Deuxième Conférence des Nations Unies
sur les établissements humains (Istanbul, juin 1996) axée sur la problématique des établissements humains en
général, et sur celle des grandes villes, en particulier, ainsi que l'activité déployée par l'Union interparlementaire
pour promouvoir la mise en oeuvre, aux niveaux tant national qu'international, des engagements et décisions
adoptés à la faveur de cette conférence,
rappelant à ce propos la résolution intitulée " Appui parlementaire à la deuxième Conférence des Nations Unies sur
les établissements humains (Habitat II) " adoptée par le Conseil interparlementaire à l'occasion de sa 158ème session
(Istanbul, le 20 avril 1996) et surtout le paragraphe 4 de sa deuxième partie, où le Conseil "  souligne que nombre des
problèmes d'établissements humains appellent des mesures d'ordre législatif et que la participation des parlements
nationaux et de leurs membres à la mise en oeuvre des engagements qui seront pris à l'occasion de Habitat II revêt
de ce fait une importance cruciale ", qu'elle considère plus actuel que jamais,
se félicitant des activités du Centre des Nations Unies pour les établissements humains (Habitat), déployées en
coopération avec ses partenaires du système des Nations Unies, pour promouvoir des zones urbaines plus
productives, plus équitables et plus durables, dans l'esprit du Programme pour l'Habitat,
1. exhorte les parlements nationaux à :
a) agir pour la pleine prise de conscience du rôle positif de matrice sociale, économique, culturelle et politique que
les villes jouent dans le monde et, implicitement, de leur importance dans le développement général durable de la
société humaine;
b) contribuer, par des mesures législatives adéquates, au renforcement de la capacité institutionnelle et financière
des gouvernements de mettre en pratique les engagements de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les
établissements humains (Habitat II) et de veiller à la manière dont ces engagements sont appliqués au niveau
national;
c) s'agissant de l'insécurité alimentaire, appuyer le Programme spécial de la FAO pour la sécurité alimentaire, qui
s'attaque notamment aux problèmes de production alimentaire urbaine et périurbaine et vise à éliminer les goulets
d'étranglement dans les réseaux d'approvisionnement et de distribution alimentaires;
d) adopter, améliorer et compléter le cadre législatif national dans le but de créer les conditions propices à un
développement urbain durable, en s'engageant surtout à :
 faire face à la nécessité, dans les pays tant industrialisés qu'en développement, de renforcer
l'autonomie locale, l'application systématique du principe de subsidiarité et la décentralisation des responsabilités
ainsi que des ressources financières et humaines correspondantes des autorités locales, et de promouvoir une plus
grande participation de la population;
 inciter le secteur privé national à investir et à s'impliquer dans le règlement des problèmes des grandes
villes, et l'encourager à participer en priorité aux activités de première urgence, telles que  : la construction et
l'amélioration des logements et de l'infrastructure, la gestion des déchets ménagers et industriels, un
approvisionnement suffisant en eau de bonne qualité, la création d'emplois, la prestation de services de base, etc.;
 créer un climat stable et propice aux investissements étrangers, surtout dans les pays en
développement, fondé sur une complémentarité équilibrée entre le monde rural et les villes;
 renforcer les mesures législatives destinées à prévenir et à endiguer la criminalité, la prostitution,
l'exploitation sexuelle des enfants, la consommation de drogue, autant de phénomènes associés aux zones urbaines;
 assurer un environnement salubre à l'intérieur et autour des grandes villes en empêchant les actes
préjudiciables à l'environnement, en appuyant les organismes publics et les associations qui concourent à la
protection de l'environnement, et en consacrant des moyens financiers et techniques accrus à la préservation de
l'environnement;
 promouvoir des mesures de préservation et de restauration du patrimoine architectural des villes, afin
d'en préserver l'identité et de protéger la spécificité spirituelle et culturelle de chaque peuple;
 revitaliser les services sociaux en milieu urbain, en particulier les soins de santé et l'éducation;
e) affecter à tous les niveaux de gouvernement, y compris le niveau local, les ressources budgétaires nécessaires à
un développement urbain durable;
f) adopter les mesures législatives requises et allouer les ressources budgétaires qui permettent le progrès
économique, social et culturel des zones rurales, en contribuant ainsi à la diminution des écarts entre villes et
villages, à l'équilibre des migrations entre zones rurales et zones urbaines et, partant, à la prévention du
surpeuplement des grandes villes;
g) prendre en considération, lors du processus législatif, le rôle et la contribution des femmes à la vie des grandes
villes, ainsi que la nécessité de promouvoir un partenariat réel entre hommes et femmes dans l'élaboration et
l'application des politiques de développement urbain, en veillant à la mise en oeuvre du principe de l'égalité des
chances, et tenir compte des besoins propres aux femmes vivant dans les villes en :
 prenant des mesures pour que les femmes soient plus nombreuses à participer à la prise des décisions
politiques, en particulier à l'échelon local, à titre d'observatrices ou d'élues;
 promulguant des lois visant expressément à favoriser l'égalité, à supprimer la discrimination à l'égard
des femmes et, en particulier, à garantir le respect du principe "à travail égal, salaire égal";
 modifiant les lois et les pratiques commerciales qui sont discriminatoires à l'égard des femmes,
notamment les lois sur l'héritage, le régime foncier et l'attribution de logements;
 assurant l'accès des femmes au crédit, au moyen de fonds réservés ou par l'intermédiaire du secteur
privé;
 permettant aux femmes de vivre en sécurité dans les zones urbaines, en concevant les villes à cet effet
et en y créant des centres d'accueil pour les femmes qui sont victimes de violences;
h) créer ou améliorer le cadre légal pour la protection de tous les groupes sociaux défavorisés et vulnérables
habitant les grandes villes, par le biais de mesures permettant :
 de prévenir leur discrimination et leur marginalisation;
 de faciliter leur accès à un logement décent, à l'emploi, à l'éducation, aux soins de santé, aux services
sociaux de base, aux infrastructures, etc.;
 d'encourager leur participation active à l'élaboration des politiques de développement urbain;
i) contribuer à la création d'un environnement propice au développement de la coopération entre les Etats, leurs
acteurs urbains et les organismes régionaux et mondiaux compétents, dans le but d'atteindre le plus vite possible les
objectifs du Programme pour l'Habitat;
j) encourager le renforcement de l'assistance technique et financière en faveur des grandes villes des pays en
développement;
2. engage les parlementaires à :
a) veiller à l'application systématique des principes de bonne conduite des affaires publiques, afin d'assurer la
transparence, la responsabilité, l'efficacité et le caractère participatif de la gestion et de l'administration des grandes
villes, comme conditions indispensables à leur développement durable;
b) faciliter les contacts et le dialogue entre citoyens, autorités locales et instances nationales compétentes, en vue
de résoudre les difficultés auxquelles se heurtent les collectivités urbaines;
c) promouvoir le partenariat entre tous les acteurs engagés et concernés - secteur privé, autorités locales, société
civile, y compris les ONG, gouvernement, mais aussi organisations régionales et internationales - dans l'élaboration
et la mise en oeuvre des stratégies de développement durable des grandes villes;
d) encourager les échanges d'informations, d'expérience et de savoir-faire entre les autorités locales aux niveaux
tant national qu'international;
e) promouvoir la mise en place de systèmes nationaux et locaux de recueil, traitement et exploitation des données
relatives aux conditions et aux tendances urbaines, sur lesquelles puissent reposer des stratégies et des programmes
cohérents pour le développement durable des grandes villes;
f) s'engager à réaliser un développement durable dans les zones urbaines en encourageant des modes viables de
production, de consommation, de transport et d'aménagement des établissements humains; à prévenir la pollution;
à respecter la capacité limite des écosystèmes, et à préserver les chances des générations futures;
3. engage les Etats industrialisés à s'efforcer de consacrer 0,7 % de leur PNB à l'aide au développement comme l'a
recommandé l'Organisation des Nations Unies, recommandation approuvée dans le Plan d'action de Brasilia adopté
par l'Union interparlementaire; et invite les institutions financières internationales, le secteur privé, les organismes
d'aide, tant bilatérale que multilatérale, à fournir des ressources supplémentaires pour consolider les efforts
nationaux visant à résoudre les problèmes des grandes villes;
4. exhorte les parlements nationaux et les parlementaires à employer tous les mécanismes de la diplomatie
parlementaire afin de promouvoir la paix et la stabilité, d'éliminer les foyers de conflit et de mettre rapidement un
terme aux conflits en cours, réduisant ainsi le risque de perte de vies humaines, d'anéantissement des valeurs
historiques et culturelles et de dégradation de l'environnement et du patrimoine architectural dans les centres
urbains;
5. recommande à l'Union interparlementaire et aux parlements nationaux de soutenir les activités du Centre des
Nations Unies pour les établissements humains (Habitat) et de contribuer davantage aux activités et aux
programmes de l'Organisation des Nations Unies et de ses organismes compétents dans le domaine du
développement durable.
MÉTROPOLISATION ET BIDONVILLISATION, LES DEUX VISAGES DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Si une urbanisation bien gérée représente des avantages, la forte croissance de la population urbaine pauvre dans
les pays en développement s'accompagne de défis majeurs pour les années à venir
Par Julien Damon | publié le 27/02/2014 à 7h30, mis à jour le 28/02/2014 à 7h30

33


143


Driving through the Manila slum / shankar s. via Flickr CC License By
OUTILS

> taille du texte

La dynamique mondiale d’urbanisation, dans ses diverses composantes, accompagne des mutations et des
interrogations majeures sur l’avenir du monde. Les démarches «smart» constituent une entrée pour les apprécier et
les traiter.
Mais avant d’agir et trouver des solutions, il faut connaître les questions. Un portrait et quelques définitions
permettent de souligner les deux principaux mouvements à l’œuvre: la métropolisation (la concentration accrue des
activités, des populations et des pouvoirs), la bidonvillisation (l’augmentation préoccupante du nombre et de la
proportion des urbains vivant dans des bidonvilles).

publicité
Selon les statistiques assemblées par l’ONU, la population urbaine serait, en 2008, devenue majoritaire. D’ici à
2050, elle pourrait atteindre 6,3 milliards d’individus, soit 70% des habitants de la planète. Chaque jour d’ici à 2050,
la population urbaine pourrait croître, à l’échelle planétaire, d’environ 200.000 habitants. Il ne s’agit que d’une image
extrapolée à partir des projections démographiques couramment admises. Elle donne néanmoins une idée
saisissante des ordres de grandeur. La statistique est, en réalité, imprécise. Les définitions de ce qu’est l’urbain tout
comme la qualité des études et recensements varient considérablement selon les pays. Mais les grandes masses et
les ordres de grandeur sont clairs.
La dynamique planétaire d’urbanisation
Les situations régionales sont, par ailleurs, et évidemment, très différentes. L’urbanisation de nombre de pays
développés a atteint des seuils très élevés, qui ne sont pas partout appelés à encore augmenter. L’urbanisation à la
française, par exemple, est assez caractéristique des pays développés. Deux mouvements l’incarnent: un étalement
urbain consommateur d’espace, une métropolisation qui concentre les activités et les ressources. Le sujet, pour
l’avenir, n’est pas celui de nouvelles villes (comme dans les pays dits en développement) mais celui de l’adaptation
d’anciennes villes. Pour rapprocher ce constat des sujets Smart, il est plus rigoureux de parler en France de Smarter
Cities (des villes que l’on va améliorer) que de Smart Cities (des villes dites intelligentes que l’on va créer).
À l’inverse, l’urbanisation de nombre de pays en développement va se poursuivre. L’urbanisation rapide qui était
courante au milieu du XXème siècle est en réalité révolue. Mais l’urbanisation se poursuit massivement en Afrique et
en Asie, régions les plus peuplées du monde. Ce n’est plus la croissance urbaine qui est en soi remarquable, ce sont
les volumes du phénomène. De 2010 à 2050, la population urbaine asiatique devrait doubler, de 1,7 à 3,4 milliards
de citadins. En Afrique, la population vivant en ville triplerait, passant de 400 millions à 1,2 milliard. D’ici 2050, c’est
95% de la croissance urbaine (en termes de population) qui serait absorbée dans les villes en développement.
Une urbanisation mondiale à deux visages
Schématiquement, deux grilles de lecture insistent sur deux faces opposées de l’urbanisation.
La première souligne les avantages de la vie urbaine, de l’urbanisation et de la métropolisation. L’urbanisation est
traditionnellement analysée comme conséquence de l’exode rural, résultant lui-même de l’industrialisation et de la
modernisation. Augmentation des revenus et amélioration des conditions sanitaires accompagnent le mouvement.
Les facteurs qui améliorent, pour tous, la qualité de vie sont plus répandus dans les villes que dans les campagnes.
Les centres urbains procurent dans l’ensemble un meilleur accès aux services de santé, aux infrastructures, à
l’information. Par ailleurs, les politiques publiques s’appliquent plus aisément en milieu urbain, avec des cibles plus
larges, des économies d’échelle et une efficience accrue en ce qui concerne les transports, la gestion des déchets,
l’éducation.
Au total, comme disent les économistes, les externalités de la ville sont positives. Elles viennent compenser
pollution, crimes, embouteillages, surpeuplement, visibilité de la misère. Certes, la vie urbaine est synonyme
d’interactions difficiles, d’anonymat mâtiné d’isolement, d’exaspérations mutuelles. Certes, la ville fait parfois peur,
car productrice d’inégalités et d’insécurités. Cependant, l’organisation efficiente des politiques publiques, appuyées
sur les outils de type smart, peut permettre d’atteindre, en ville, un équilibre bénéficiant à diverses parties de la
population sans léser qui que ce soit. Pour les optimistes, les avantages potentiels des villes excèdent largement
leurs désavantages.
Et les avantages de la vie urbaine se renforcent encore à mesure de la métropolisation du monde.  Mais de quoi
parle-t-on quand on parle de métropolisation? Alors que la diffusion des technologies de l’information pouvait laisser
envisager un moindre intérêt conféré à la localisation, c’est l’inverse qui s’observe. Personnes et activités se
concentrent toujours davantage, notamment pour ce qui concerne les fonctions tertiaires supérieures.
Il s’ensuit des demandes accrues en matière de qualité de vie pour les habitants aisés, et une compétition nourrie
entre villes pour attirer l’argent et les talents. Classées selon leurs prix, leur qualité de vie, leurs infrastructures, les
villes sont comparées dans le cadre de multiples classements. Le défi pour elles est tout autant celui de l’attractivité
que de la cohésion sociale.
Cette métropolisation à l’œuvre donne à voir un monde hérissé de pics (démographie et richesse des villes), alors
qu’il avait pu être imaginé aplati grâce aux délocalisations, au travail à distance et à la généralisation de
l’urbanisation. Et cette métropolisation est généralement présentée comme heureuse, les habitants accédant aux
réseaux et aménités de la vie moderne. Le Smart, concrètement incarné par le Smart Phone, en simplifie et en
améliore considérablement les usages.
Un tiers des urbains habitent des bidonvilles
Une thèse inverse met en avant les périls d’une urbanisation mondiale non maîtrisée. Ce sont les pauvres, dotés
eux-aussi de téléphones portables, qui alimenteront dans une très large mesure la croissance urbaine à venir.
Certains voient dans cette direction une catastrophe à venir. Décrivant, non sans fondement, l’étendue des
problèmes et des calamités, ils en font une description apocalyptique.
La question première est celle des bidonvilles. Les Nations Unies ont estimé et annoncé que le nombre de
personnes vivant dans des bidonvilles avait dépassé un milliard en 2007 et qu’il pourrait atteindre 1,4 milliard en
2020, voire 2 milliards en 2030. Si ces statistiques prêtent, à plus forte raison encore que celles générales sur
l’urbanisation, à discussion, elles indiquent qu’actuellement un tiers des urbains dans le monde habitent des
bidonvilles.
Rappeler que les défis liés à la pauvreté urbaine sont gigantesques est une sorte de leitmotiv des conclusions des
sommets internationaux. Sur la période qui va de 2000 à 2030, la population urbaine des pays en développement
devrait doubler. Pour s’assurer que ces personnes ne se retrouvent pas dans des taudis, il faudrait chaque semaine
pendant ces trente années produire ce que l’on investit pour une nouvelle ville d’un million d’habitants.
Il est incontestable que l’ampleur des problèmes urbains d’accès à l’eau, d’assainissement, d’énergie et de mobilité,
est aujourd’hui inégalée. Et les difficultés pourraient s’accentuer. Les inégalités intra-urbaines deviendraient de plus
en plus visibles, opposant des populations riches protégées dans des résidences fermées à des populations pauvres,
plus nombreuses, concentrées dans des ghettos centraux ou dispersées dans d’immenses bidonvilles.
Les inégalités inter-urbaines, à l’échelle du monde, iraient également grandissant avec, d’une part, des populations
déjà âgées et encore vieillissantes dans les villes du monde développé, et, d’autre part, des populations jeunes, très
jeunes même, dans les villes en extension du monde en développement. La combinaison de la jeunesse et de la
pauvreté dopant la criminalité, la concentration croissante de l’humanité dans des grandes villes pourrait déboucher
sur des conflits majeurs touchant des zones urbaines et des pays entiers.
L’image opposant un monde urbain riche, vieux et relativement pacifié, avec son urbanisation derrière lui et des
villes parfois muséifiées, à un monde urbain pauvre, jeune et dangereux, confronté à l’explosion urbaine, a sa part de
caricature et de vérité.
Le défi commun est de réussir la transition urbaine mondiale. L’urbanisation peut se révéler bienfait ou fléau selon
l’affectation du pouvoir et des ressources. Une urbanisation bien gérée améliore sensiblement la croissance et la
qualité de vie, pour tous. L’inverse est vrai. Mal gérée, l’urbanisation entrave non seulement le développement, mais
elle favorise aussi l’essor des taudis, de la criminalité et de la pauvreté.
Julien Damon
À lire aussi sur Slate.fr

A quand la ville sans enfants?

La ville de demain, utopie ou cauchemar? Deux fictions sur ce qui nous attend

Municipales 2014: les dix points du programme du «smart maire»

Chapitre 1 : La position du problème


La gestion urbaine est d'une manière générale complexe car touchant les questions affectant directement au jour le
jour la qualité de la vie des citadins. Ce chapitre traite d'une part de la problématique de la gestion urbaine et d'autre
part des hypothèses et des objectifs de la présente étude.
1.1-La Problématique
L'ampleur du mouvement d'urbanisation s'est manifestée dans l'ensemble des centres urbains et dans leurs
périphéries qui s'étendent à un rythme effréné (Rahim, 2009). A titre d'exemple, en 1800, à peine 3 % de la
population mondiale vivait en ville, contre 15 % en 1900 et 50 % en 2000 (Chavagneux, 2001). A ce rythme, les
estimations prévoient que 65 % de la population mondiale sera urbaine en 2025 (UNFPA, 2007).
Cependant l'ampleur du phénomène urbain est inégale selon les régions du monde. L'urbanisation de nos jours
progresse beaucoup plus rapidement dans les pays du Sud (Diagabate, 2009). En effet, dans les métropoles des pays
du Sud, nous assistons à une urbanisation informelle des périphéries comme pratique populaire (exemple :
occupations illégales de terrains), une périurbanisation qui peut résulter d'un développement planifié (exemple :
quasi-villes satellites de Delhi) et un mouvement de déconcentration des classes aisées en périphérie lointaine
(Veron J., 1996). L'Afrique et l'Asie comptent encore une majorité de ruraux. Mais avec le développement de
l'urbanisation, les urbains devraient y être majoritaires d'ici 2030, et ces continents, les plus peuplés, pourraient ainsi
abriter la majorité des grandes cités (Veron J., 1996).
L'explosion urbaine dans les pays du Sud pose de nombreux problèmes sociaux et environnementaux (Diagabate,
2009). Certains faits sont caractéristiques des villes des pays du Sud. Ainsi, on a un accès difficile au sol et au
logement, à l'inaccessibilité des services de base, à la pauvreté, à la ségrégation résidentielle, aux violences sociales,
aux conditions de travail précaires dans une économie informelle sans sécurité de l'emploi (Bolay J.C, 2004). Aussi,
les transports publics sont insuffisants pour répondre aux besoins de déplacements des citadins (Rochefort, 2000).
Face à ce sombre tableau de « ville impossible », les autorités municipales du Sud ont reconnu leurs incapacités face
aux risques qui assaillent les villes (Rochefort, 2000).La résolution des problèmes urbains fait ainsi appel à la gestion
urbaine (Bouvier, 2007).
L'usage du concept de la gestion urbaine dans les villes du Sud s'est officialisé en 1985 par le Programme de gestion
urbaine, dont l'objectif était de « travailler avec les pays en développement au renforcement de la contribution que
les villes peuvent faire à la croissance économique, au développement social et à l'atténuation de la pauvreté  » (Jaglin
S., 1995). La gestion urbaine est donc présentée comme un élément majeur de la régulation sociale de l'espace
public, et donc du fonctionnement de la société. A ce titre, elle est un élément clé d'une conception sociétale du
développement durable. Aussi face aux problèmes urbains qui sont d'actualité et qui se posent différemment selon
les pays, la gestion urbaine se présente comme un moyen de résolution de ces crises urbaines en intégrant tous les
acteurs urbains : Etat, élus locaux, population et partenaires au développement, (Bouvier, 2007).
Depuis la conférence de Rio (1992) et avec la mise en place des agendas 21 locaux, les projets, aménagements et
gestions urbaines ont de plus en plus recours aux nouvelles idées issues de la réflexion sur le développement durable
notamment les nouveaux modèles environnementaux (amélioration de la qualité de vie urbaine, économie
d'énergie, réduction des pollutions) mais aussi de nouveaux modes de gouvernance (participation du local, rôle des
associations et des ONG, place aux initiatives individuelles et privée), (Renata, 2010). Tout ceci vise à résoudre les
problèmes complexes rencontrés par les municipalités. Il s'agit en effet de gérer des problèmes complexes
rencontrés dans les villes (Allen, 2004). Ainsi la gestion urbaine recouvre l'ensemble des activités qui concourent à
l'entretien de l'habitat, des espaces, des équipements urbains et qui plus largement assurent le fonctionnement
social urbain (Bonetti, 2007). Aussi, Nguyen rappelle que la gestion urbaine (du développement) est un secteur
transversal qui compte sur la gestion foncière, la gestion des infrastructures, la gestion de l'habitat, la gestion des
services sociaux, la gestion du développement économique, etc (Nguyen, 2008).
L'évolution de la politique de la ville constitue un bon indicateur du « phénomène » de la gestion urbaine : alors
que cette politique a émergé dans les années 1970, il a fallu attendre plus de 20 ans pour que les acteurs et les
responsables politiques commencent à se préoccuper des problèmes de gestion urbaine (Bonetti, 2007). Pour
Nguyen, les problèmes de gestion urbaine de Ho Chi Minh ville pourraient fragiliser le statut de capitale économique
du pays (Nguyen, 2008).
La dévalorisation de la gestion urbaine découle même tient tout d'abord de la nature même de ces activités qui
concernent de nombreuses actions récurrentes, dont les effets ne sont pas très spectaculaires (Bonetti, 2007). Or ces
activités sont fortement dévalorisées par la majorité des acteurs professionnels et des responsables politiques qui
participent au développement urbain. Tout en proclamant que ces activités sont indispensables au bon
fonctionnement de la ville, la plupart de ces acteurs ne s'y intéressent guère (Bonetti, 2007).
La difficulté de gestion du transport s'est manifestée par une disparition de la majorité des entreprises publiques
d'autobus et la régression de celles qui subsistaient. A cela, il faut ajouter le désengagement des états dans la gestion
des transports au profit des communes (Ezzine, 2000).Dans le domaine de l'habitat, le déficit de gestion urbaine
stigmatise les quartiers qui le subissent, accroît le processus de ségrégation, ne favorise pas les relations de bon
voisinage, accroît les tensions sociales et favorise la délinquance (Bonetti, 2007). Ce déficit de gestion entraîne aussi
une dégradation rapide des bâtiments, des espaces urbains et réduit leur durabilité. Ce déficit génère enfin des
investissements considérables car il conduit à engager des travaux de rénovation très couteux (Bouvier, 2007).
Sur le plan socio-économique, la crise de la gestion municipale peut être renvoyée à la problématique de
fractionnement et de l'atomisation institutionnelle comme ce fut le cas au Maroc (Sedjari, 2006).En effet, les
municipalités gérées par les communautés urbaines ont vu leur gestion subir des découpages administratifs
successifs, un éparpillement des pouvoirs de décision et une absence d'optimisation des ressources (Sedjari, 2006).
Aussi la polarisation sociale et spatiale croissante des villes va de pair avec la montée de la violence urbaine. Bien des
formes de violence dans la ville s'expliquent par l'exclusion sociale, économique et culturelle (Lapeyronnie, 1993).
Au Maroc par exemple, le problème de gestion financière est criard comme le résume ce constat de Jean Collin :
« la gestion financière était caractérisée par un déficit chronique et des errements d'une extrême gravité. Mais toutes
les municipalités des communes chefs-lieux de région avaient un dénominateur commun. Des groupes de pression y
avaient favorisé la politisation de la gestion, de sorte que les administrateurs élus, malgré leur volonté de bien gérer
les affaires de la collectivité, étaient dans la majorité des cas liés par mille entraves qui ne leur permettaient pas
d'oeuvrer toujours pour le bien commun : trop souvent au contraire, nombre de facteurs les poussaient à favoriser les
minorités partisanes au détriment de la collectivité locale et même de l'Etat » (Collin, 1977).
Cette mauvaise gestion est due à la personnalisation du mode de gestion du personnel municipal et aux effets du
clientélisme (Collin, 1977). Dans le même temps l'importance des coûts de gestion urbaine est souvent sous-estimée.
Au regard des investissements nécessaires pour rénover un quartier, qui peuvent représenter plusieurs milliards de
francs CFA, les coûts de gestion urbaine paraissent très faible (Bonetti, 2007). En plus, le faible équipement d'une
ville en services et en moyens de gestion expliquerait la pauvreté d'une grande partie de sa population (Haeringer,
1999). Enfin, dans la plupart des cas, les communes des pays en développement n'ont pas de garanties sur le volume
de ressources qui leur seront affectées et sur la régularité des versements (Rochefort, 2000).
La logique politique, que nul ne saurait ignorer, a fait des villes du Sud le théâtre d'un enjeu d'intérêts conflictuels
sans précédent. Ainsi, les villes ou les arrondissements au sein des villes sont érigées sans des mesures conséquentes
d'accompagnement. Ainsi la ville est éclatée en plusieurs municipalités et soumise à une gestion de type
bureaucratique. Une incompréhension naît entre les gestionnaires (administrateurs) locaux et la population qui
trouve que ses aspirations ne sont pas identiques aux ambitions déclarées des gestionnaires (Sedjari, 2006).
Pour ce qui concerne l'espace urbain, il faut rappeler que la gestion de l'espace est l'un des problèmes les plus
complexes qui se posent aux états africains issus de la colonisation depuis les indépendances, (Nzuzi Lelo, 1995).
L'inégale gestion de l'espace urbain dans les pays du Sud entraîne l'aggravation des ségrégations socio-spatiales, sans
résoudre les problèmes généraux de la pollution, des embouteillages et de la violence (Rochefort, 2000).
Quant à l'impact de l'environnement, il importe de souligner que l'univers est confronté à un véritable problème de
gestion des déchets de manière beaucoup plus aigu qu`anciennement (Shabanthu, 2006). Cette situation s'explique
par de multiples raisons dont : l`expansion démographique entraînant l`augmentation de la demande en produits de
consommation, la diminution de la durée de vie des biens et des produits, l`accroissement des emballages non
naturellement destructibles et l'augmentation de la quantité des informations imprimés (journaux, concentration des
populations et type d`habitats...). L'augmentation des quantités de déchets dans nos contrées pourrait occasionner
les maladies parasitaires y compris les helminthiases entraînant du même coup une élévation du taux de morbidité
et une mortalité dans le monde entier (Blumberg., 1968 cité par Shabanthu, 2006).
De nos jours, les questions touchant la gestion des déchets urbains et, par extension la planification et la gestion de
l'environnement urbain comptent parmi les plus complexes auxquelles doivent répondre les gestionnaires urbains en
raison de leurs effets sur la santé humaine, le développement durable (Attahi, 1996). Les risques environnementaux
et sanitaires liés à la problématique de la gestion des déchets solides ne sont pas correctement maîtrisés par les états
centraux, les appareils municipaux, et les organisations communautaires de base. Aussi la collecte ne dépasse guère
les 50 % des déchets produits et les municipalités de la plupart des villes du Sud y consacrent près de la moitié de
leur budget (Housseynou, 1997).
Dans ce siècle courant, divers changements semblent s'annoncer dans les villes des pays du Sud. De ce fait, la
gestion urbaine et municipale dans les pays du Sud est devenue un domaine de plus en plus complexe et sujet à des
conditions sans cesse changeantes qui affronte toute une série d'enjeux sociaux, économiques, politiques et
administratifs. Les centres urbains investis de nouveaux pouvoirs avec le processus de décentralisation se retrouvent
donc dans l'obligation de traiter les problèmes liés à la gestion des villes. Cette gestion est toutefois difficile à cause
de la pauvreté et du sous développement des villes.
La santé et la maladie sont des éléments écologiques qui décrivent les relations entre un organisme et la valeur
future de son environnement (Brewer, 1988). Aussi, le problème d'assainissement constitue un sujet d'actualité
partout dans le monde et particulièrement dans les pays du Sud (Diagabate, 2009). Dans les villes du Sud en effet, les
déchets sont jetés dans les rues, dans les caniveaux ou entreposés dans des dépôts sauvages devenant des
immenses cloaques d`immondices (Sane, 1999 ; Botkin, 1995). Ainsi, la problématique de l'insalubrité est devenue
une réalité incontournable et demeure préoccupante malgré les efforts des municipalités.
Le choix de ce thème « gestion urbaine dans les pays du Sud » tire son importance du fait que la préservation des
ressources naturelles et le respect de l'environnement sont parmi les axes principaux de toute stratégie de
développement durable. Ainsi aborder la question de la gestion environnementale présente pour nous un intérêt sur
le plan scientifique, écologique et économique à cause de l'impact des déchets sur le cadre de vie urbain et sur les
citadins.
Au regard de cet état de fait, il s'agit pour nous d'analyser les modalités de la gestion urbaine en privilégiant l'étude
de la gestion des déchets urbains dans les pays du Sud. En d'autres termes, il sera question de trouver des réponses
aux interrogations suivantes :
Quels sont les résultats des différents modes de gestion du cadre de vie urbain Distinguer les différents champs de
la gestion urbaine ?
Pourquoi la gestion environnementale apparaît plus préoccupante ? Pourquoi la gestion des déchets urbains est
elle capitale ?
1.2.-Hypothèses de l'étude
1.2.1-Hypothèse générale
Nous formulons l'hypothèse principale selon laquelle que les modes de gestion urbaine ne résolvent pas de façon
durable les problèmes urbains.
1.2.2-Hypothèse spécifiques
De cette hypothèse principale découlent trois hypothèses spécifiques, à savoir
1- Les domaines d'intervention de la gestion municipale touchent plusieurs secteurs de la vie sociale
2- La destruction de l'environnement et la présence de certaines maladies découlent des déchets produits
3- La gestion des déchets regroupe les actions d'enlèvement de traitement et de valorisation
1.3.-Objectifs de l'étude
Notre étude vise un objectif général et 3 objectifs spécifiques. 1.3.1-Objectif général
La présente étude a pour objet d'analyser la pertinence et l'efficacité des résultats des modes de gestion du cadre
de vie urbain
1.3.2-Objectifs spécifiques
1- Déterminer les domaines d'intervention de la gestion urbaine
2- Déterminer les impacts des déchets sur l'environnement
3- Identifier les axes de la gestion des déchets urbains
La relation entre les hypothèses, les objectifs de l'étude et les questions de recherche nous est présentée par le
tableau synthétique ci-dessous (le tableau ni)
Tableau ni : La relation entre les hypothèses, les objectifs de l'étude et les questions de recherche
Hypothèses de l'étude Objectifs de l'étude Questions de recherche
Hypothèse générale Objectif général Question principale
Les modes de gestion urbaine ne résolvent pas
Analyser la pertinence et Quels sont les résultats des différents
de façon durable les problèmes urbains l'efficacité des résultats des
modes de gestion du cadre de vie urbain
modes de gestion du cadre
de vie urbain
Hypothèse spécifique 1 Objectif spécifique 1 Question spécifique 1
Les domaines d'intervention de la gestion Déterminer les domaines Distinguer les différents
municipale touchent plusieurs secteurs de la vie
d'intervention de la gestion
champs de la gestion
sociale urbaine urbaine ?
Hypothèse spécifique 2 Objectif spécifique 2 Question spécifique 2
La destruction de l'environnement
Déterminer les impacts des Pourquoi la gestion
et la présence de certaines déchets sur l'environnementenvironnementale apparaît
maladies découlent des déchets plus préoccupante ?
produits
Hypothèse spécifique 3 Objectif spécifique 3 Question spécifique 3
La gestion des déchets regroupe les actions Identifier les axes de Pourquoi
la la gestion des
d'enlèvement de traitement et de valorisation gestion des déchets urbains déchets urbains est elle
prioritaire ?

Débat sur le développement d'un programme urbain intégré pour l'UE à la commission
COTER
 Actualités, communiqués de presse et interviews
 Communiqués de presse
 Interviews
 Lettre d'information en ligne
 Régions et villes d'Europe
24/02/2014
Jean-Paul Denanot
Jean-Paul Denanot, président de la région du Limousin, est intervenu lors du débat sur le développement d'une
politique urbaine intégrée pour l'UE durant la dernière réunion de la commission de la politique de cohésion
territoriale (COTER) du Comité des régions. Il a appelé à défendre la notion de respect du rural et à encourager un
meilleur équilibre entre monde urbain et monde rural.
Près de 70 % de la population européenne vit dans des zones urbaines et les tendances actuelles indiquent que,
d'ici 2030, la population urbaine atteindra 375 millions de personnes - soit 75 % de la population totale de l'UE.
La plupart de ces zones urbaines (56 %) sont de taille moyenne et comptent entre 5 000 et 10 000 habitants; 12,3 %
d'entre elles recensent plus d'un million d'habitants. Seules deux villes européennes (Londres et Paris) figurent sur la
liste des 31 "mégalopoles" mondiales (avec une population de plus de 10 millions d'habitants). Si l'on considère ces
chiffres, l'UE a-t-elle besoin d'un programme urbain? Quelles sont les principales difficultés rencontrées par les
collectivités locales et régionales dans leurs efforts d'améliorer la qualité de vie des citoyens et de stimuler la
croissance? Ces questions ont été examinées par les membres du CdR et dans un projet d'avis élaboré
par Bas Verkerk (NL/ADLE), membre du CdR et maire de Delft. À l'occasion de la réunion de la commission COTER du
19 février, le rapporteur du CdR a souligné: "Pour atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020, l'Union a besoin
que ses villes s'investissent au niveau des politiques. Nous devons maintenant dépasser le stade des discussions pour
réaliser de réelles avancées dans les pays et les villes".
Le projet d'avis invite les institutions de l'UE à élaborer un programme urbain intégré qui permette un ancrage
structurel de la dimension urbaine dans la politique et la réglementation européennes. Selon les membres de la
commission COTER, ces orientations politiques devraient être fondées sur une approche transversale abordant des
questions telles que le chômage, la pauvreté, l'évolution démographique et les défis climatiques. Elle recommande
également à la Commission européenne de donner aux parties prenantes de plus grandes possibilités de concevoir la
politique urbaine, en faisant participer la société civile et les organisations urbaines, qui connaissent davantage les
besoins de la société et les moyens d'y répondre. D'un point de vue financier, la COTER accueille favorablement la
proposition visant à consacrer 5 % du Fonds européen de développement régional au développement urbain et à
créer des réseaux pour favoriser celui-ci. Elle estime cependant que l'action de la Commission est restée insuffisante
au regard de la place des villes dans la politique européenne. Le projet d'avis invite dès lors la Commission à
intensifier ses travaux menés conjointement avec le CdR pour effectuer un suivi de l'ancrage des villes dans les
nouveaux programmes des Fonds structurels. Le projet d'avis sera à nouveau discuté lors de la prochaine réunion de
la commission COTER le 5 mai, puis sera présenté pour adoption en plénière les 25 et 26 juin 2014.
Jean-Paul Denanot est intervenu pour défendre une meilleure prise en compte de la dimension rurale: "Le monde
rural a plutôt tendance à aller vers le monde urbain qui est devenu une sorte d''eldorado'. C'est tout du moins
comme cela que l'on se l'imagine. Il est important d'insister sur le rôle du rural, tant au niveau de la culture et de
l'artisanat que des capacités de production d'énergie. Il y a matière à introduire une réflexion en vue de maintenir un
équilibre afin qu'il n'y ait pas concurrence entre monde urbain et monde rural mais une parfaite complémentarité."
La Commission européenne, qui est déterminée à élaborer ce futur programme urbain pour l'UE, a organisé les 17
et 18 février une conférence consacrée aux villes. Intitulé "CiTIEs: Villes de demain: investir dans l'Europe", ce forum
a donné lieu à des débats auxquels ont participé des représentants de pouvoirs publics locaux et régionaux de toute
l'Europe. À cette occasion, le Président du CdR, Ramón Luis Valcárcel, a souligné l que "les villes, les agglomérations
et les régions métropolitaines sont de puissants moteurs pour la croissance et l'emploi et, en tant que telles,
contribuent sensiblement à la réalisation de la stratégie Europe 2020 et à la cohésion économique, sociale et
territoriale de l'UE. Dans le même temps, elles sont confrontées à des défis de société complexes. L'UE a été en
première ligne pour l'élaboration des politiques mais, trop souvent, celles-ci ne tiennent pas compte de la dimension
territoriale".
PADDI, Centre de prospective et d’études urbaines
Hô Chi Minh Ville, Vietnam
2004-2008
C’est dans le cadre du programme de coopération bilatérale de la région Rhône-Alpes et de la Province de Hô Chi
Minh Ville qu’ITD Monde-VeT a défini et mis en œuvre le projet PADDI. Le centre avait alors pour mission de
développer les compétences opérationnelles locales, d’appuyer et faciliter la prise et le suivi de décisions
opérationnelles, ainsi qu’une fonction de prospective et d’initiation de travaux de recherches et d’accompagnement
à la publication.
300 fonctionnaires ont alors étés formés à la gestion urbaine. Le PADDI a participé à des études préliminaires et
détaillées et a créé divers répertoires et carnets d’adresses. De même, il a initié et nourri des travaux de recherches
(politiques publiques, logement social, développement urbain, mobilité). Le PADDI a également permis la publication
trilingue (Français, Anglais et Vietnamien) de 8 études du Programme de Recherche Urbaine pour le Développement
et a créé un lexique Franco-Vietnamien des « mots de la ville ».
Budget total : 596 000 €
Partenaires financiers et/ou opérationnels: 
Région Rhône-Alpes
Comité Populaire d’Hô Chi Minh Ville
 
Amélioration des conditions de vie :
Bloc 3 – Quartier 14, District 8, Hô Chi Minh Ville, Vietnam
2005-2008
ITD Monde – VeT a apporté une assistance technique et méthodologique aux autorités du District 8 afin de lutter
contre la pauvreté et améliorer les conditions de vies des 170 foyers de la zone délimitée. Dans un premier temps
nous avons sensibilisés et formés les autorités et communautés locales à la gestion urbaine, au développement
communautaire et aux méthodes participatives. Puis nous avons participé à l’amélioration et l’entretien des revenus,
de l’habitat et des infrastructures.
Grace à un système de gestion communautaire participatif les foyers concernés ont pu être mobilisés dans le
projet. Raccordements électrique, alimentation en eau propre et installations de sanitaires sont venus compléter des
travaux de lutte contre les inondations. Au niveau économique, un fond pour l’entretien de l’habitat collectif et la
maintenance des infrastructures a été mis en place ; ainsi qu’un système de financement des travaux d’amélioration
(crédit et épargne volontaires). Enfin les habitants ont bénéficié d’un accompagnement vers la légalisation de leur
occupation des sols et logements.
Budget total: 81 000 €
Partenaires financiers et/ou opérationnels:
Ministère Français des Affaires Etrangères et Européennes
Région Rhône-Alpes
 
Amélioration des conditions de vie :
foyers à bas revenus du quartier de Cat Lai
District 2, Hô Chi Minh Ville, Vietnam
2002-2007
Le District 2 était représentatif d’un passage progressif d’un environnement rural à un milieu essentiellement
urbain. De ce fait, ITD Monde-VeT proposa de faciliter la transition par un accompagnement socio-économique des
foyers pauvres et à bas revenus qui représentent 84% des habitants du quartier.
Apres une enquête socio-économique menée sur 200 foyers, un relevé de terrain et la réalisation de plan de
quartier, une phase d’amélioration des infrastructures a été lancée : cimentage de ruelles, construction d’égouts,
adduction d’eau. Un accompagnement technique et financier (crédits) a été effectué pour permettre l’acquisition de
compteurs d’eau et le rehaussement des rez-de-chaussée.
Un bureau de veille à l’emploi et un crédit à la formation professionnelle ont été initiés. Un programme de crédit
épargne pour le développement d’activités génératrices de revenus a été développé. Celui-ci impliquait les habitants
à travailler en groupe de 5 ou 6 membres, cela optimisant la solidarité au sein de la communauté et limitant les
risques de non-remboursement du crédit.
Budget total: 98 000 €
Partenaires financiers et/ou opérationnels:
Ministère Français des Affaires Etrangères et Européennes
Région Rhône-Alpes
Fondation Abbé Pierre
 
Projet pilote de relogement de Binh Trung Dông
District 2, Hô Chi Minh Ville, Vietnam
2001-2004
L’installation illégale et les conditions de vie insalubres de 53 familles du quartier a été le moteur d’une
intervention d’appui social et technique et de facilitation d’un processus participatif de ces habitants dans leur
relogement.
Après que les habitants soient officiellement devenus propriétaires de terrains via la délivrance de permis de
construire, le mode de l’auto-construction a été choisie par les bénéficiaires et encadrés par ITD Monde. Il s’agissait
de leur amener un soutien technique dans leurs projets individuels et leur laisser les choix d’aménagements et
finitions. En parallèle, ITD Monde a financé et installé un réseau d’assainissement domestique : fosses septiques
individuelles, raccordement au réseau des eaux usées. Une maison de quartier proposant des activités sociales a été
mise en œuvre.
C’est par la mise en place et l’approvisionnement de fonds de crédit par ITD Monde en partenariat avec
l’association Enda Vietnam que l’accès à la propriété a été possible. Cela a permis l’obtention du statut de résident
permanent qui donne accès aux services urbains élémentaires : eau, électricité, traitement des déchets, accès aux
soins, a la scolarisation, droit de vote.
Budget total: 180 000€
Partenaires financiers et/ou opérationnels:
Ministère Français des Affaires Etrangères et Européennes
Région Rhône-Alpes
NOVIB
 
Assistance à maîtrise d’ouvrage pour la conception et
la construction de l’école des Arts Ménagers «Hoa Sua»
Hanoi, Vietnam
1999-2001
L’école professionnelle des Arts Ménagers Hoa Sua est une institution privée vietnamienne à but non lucratif. Elle
vise à donner une opportunité de formation à des jeunes défavorisés (17- 25 ans) de Hanoi en leur fournissant un
apprentissage aux métiers de la restauration, de la confiserie, de la couture et en les initiant à une langue étrangère
(anglais, français). Aujourd’hui l’école a acquis une renommée nationale et internationale.
En 1999, ITD Monde a été mandaté par le gouvernement vietnamien pour une mission d’Assistance à Maitrise
d’Ouvrage concernant la conception et la construction du nouveau bâtiment scolaire (3 étages sur 1 500 m ²).
ITD Monde s’est chargé de la coordination entre les bailleurs de fonds et les acteurs vietnamiens (direction,
entrepreneurs des travaux). Apres élaboration du programme, du cahier des charges et de l’avant-projet avec la
direction, nous avons supervisé la conception de la maitrise d’œuvre vietnamienne et la conduction des travaux.
Budget Total : 203 850 €
Partenaires financiers et/ou opérationnels :
Gouvernement Vietnamien
Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement
Ministère Français des Affaires Etrangères et Européennes
Ecole professionnelle des Arts Ménagers Hoa Sua

développement urbain
Sommaire de la page
 Articles
 Bibliographies
Articles
 Le Mouvement du droit à la ville et l’été turc
Cet article a été traduit de l’anglais vers le français par Isa Tan, traductrice bénévole pour Ritimo. L’article original
est en ligne sur le (...)
Jadaliyya - CASSANO Jay - 25 juin 2013
 Re-imagining public spaces
 (English)
By Darryl D’Monte
An innovative new approach to Mumbai’s open spaces is an extensive mapping survey. The same approach can be
used in other cities too. (...)
India together - 18 May 2012
 Brésil - L’écodéveloppement solidaire et durable  : une chance d’intégrer un projet de société
Ce texte, publié originellement en espagnol par ALAI, a été traduit par l’équipe de traducteurs bénévoles pour
rinoceros.
Le nouveau (...)
FOUCHER Marilza de Melo - 9 décembre 2010
 Gérer ensemble les territoires
ECLM, juin 2010, 228 pages, 18 €
Nombreuses, novatrices et souvent pertinentes, ces initiatives méritent d’être mieux reconnues afin de créer plus
de synergies entre la (...)
28 juin 2010
 Les favelas de Rio de Janeiro. Histoire et droit XIXe et XXe siècles
L’Harmattan, février 2010, 298 pages, 29 euros
« Qu’est-ce qu’une favela ? Quelle est la nature juridique de ce morceau de ville ? Quel est le statut de ses
occupants ? Sur ce débat (...)
SOARES GONCALVES Rafael - 27 mai 2010
 Aumenta brecha entre ricos y pobres
 (Español)
El 20% más rico acapara casi 60% de los recursos, mientras que el 20% más pobre recibe sólo el 3.5%.
América Latina y el Caribe es el (...)
Noticias Aliadas - 26 de abril de 2010
 Au cœur de Bombay : le bidonville de Dharavi
Le bidonville de Dharavi situé en plein cœur du Grand Bombay, et le gigantesque projet de re-développement
visant à le métamorphoser en (...)
FERNANDO Valérie - 13 mai 2009
 L’accumulation flexible par l’urbanisation. Réflexions sur  : le "postmodernisme" dans la grande ville
américaine
Multitudes, revue politique, artistique, philosophique
Christopher Jencks (1984,9) date symboliquement la fin de l’architecture moderne et le passage au post-moderne
du 15 Juillet 1972 à (...)
HARVEY David - 18 février 2009
 Inde : Évitez l’indigestion !
Le défi énergétique et climatique de la motorisation
L’Agence Internationale de l’Energie a sonné l’alerte lorsque l’Inde a franchi le cap de 3 000 dollars de PIB par
habitant. En effet, dès (...)
Global Chance - ROYCHOWDHURY Anumita - 1er janvier 2009
 Les bidonvilles
Les chiffres varient mais le symbole est fort : le monde compte plus d’urbains que de ruraux. Parmi ces habitants
des villes, plus d’un (...)
Alliance Sud - 8 avril 2008
Croissance urbaine et développement durable
Article publié dans Aménagement du territoire et développement durable
Possibilités d'intégration des critères et des valeurs de développement durable dans la croissance urbaine.
Comment gérer le développement urbain de façon durable ?

La croissance urbaine intensive consomme beaucoup d'espaces naturels et de terres agricoles, ce qui appauvrit
la biodiversité et son habitat naturel. Elle allonge les distances, ce qui complexifie les infrastructures
de transports et d'assainissement d'eau notamment, et contribue au morcellement et à l'enclavement des
territoires.
La dispersion de l'habitat, des industries et des commerces contribue à rendre l'automobile indispensable pour
les déplacements, sans alternative de transport propre.
La croissance continue de l'étalement urbainn'est pas soutenable sur le long terme. Les dynamiques territoriales
non maîtrisées aboutissent à des consommations d'espacesinconsidérées. Pour le même nombre d'habitants, la
France consomme annuellement deux fois plus de terrains que son voisin allemand.
Une croissance durable des territoires est avant tout une croissance maîtrisée : une urbanisation plus
dense pour stopper l'étalement urbain, des transports en commun développés, la rénovation des centres-villes
et des quartiers déjà existants, ainsi que l'aménagement des friches industrielles.
La coexistence entre la ville et la nature doit être définie dans une perspective d'écologie urbaine.
Appliquer une politique de développement durable à l'échelle d'une ville, c'est maîtriser l'espace et construire
des villes sur le modèle de ville durable.

Aux origines de l'engagement des villes dans le développement urbain durable


La Ville de Genève organise et accueillera, en avril 2013, la Conférence européenne des villes durables sous
l’égide du Conseil international des initiatives écologiques locales (ICLEI). Cette association de collectivités
locales regroupe quelque 1200 communes, agglomérations et associations municipales dans près de 80 pays.
Mission : promouvoir un développement urbain soutenable partout dans le monde. La RevueDurable saisit
l’occasion de cette conférence pour publier, en partenariat avec la Ville de Genève, une série de cinq articles
afin notamment de faire connaître cette organisation au public francophone.
Première étape de ce parcours : la genèse de l’ICLEI. Comment cette instance, qui forme un réseau international
de villes, est-elle née ? Certes, elle a été fondée en 1990, à New York. Mais quelle était la situation géopolitique
qui a présidé à sa création ? Ce passage par l’histoire et le contexte nord-américain est essentiel pour
pleinement saisir, dans un monde aux perspectives bouleversées par la crise écologique gravissime en cours et
les échecs répétés de la politique climatique internationale, ce qu’apporte déjà – et pourrait apporter  ! – ce tissu
mondial de villes à la gouvernance planétaire du climat et de la durabilité.
Comment, après Copenhague… et vingt ans après le premier Sommet de la Terre, l’ICLEI représente-t-il une
carte à même de renouveler l’action climatique et écologique mondiale ? Le nécessaire retour aux sources pour
le savoir occupe ce premier article. A cette fin, LaRevueDurable a sollicité la géographe Cyria Emelianoff. Cette
très grande spécialiste française de la ville durable vient de soutenir son dossier d’habilitation à diriger des
recherches à l’Université du Maine, au Mans, en France. Ce texte est issu de ce volumineux document  intitulé
« Les pouvoirs locaux dans la mondialisation écologique : remodeler l’environnement planétaire et urbain ».
Avril - mai - juin 2012

 1. « L’explosion urbaine »
o a. Une croissance urbaine rapide

o b. Une urbanisation qui transforme la...

 2. Un nouveau visage urbain


o a. Une croissance mal accompagnée

o b. Le souci urbaniste

L’essentiel
La croissance des villes suit les révolutions économiques du XIX e siècle. A la croissance industrielle
rapide répond une croissance urbaine exponentielle. La morphologie des villes et des sociétés qui
la composent se transforme alors brutalement, ce qui pose des problèmes. Les Etats tentent de
reconquérir les villes et de contrôler les quartiers ouvriers du centre ou de la banlieue.
1. « L’explosion urbaine »
a. Une croissance urbaine rapide
La population urbaine augmente de façon rapide dans les pays touchés par la révolution
industrielle. En Grande-Bretagne, la population est urbaine à 70 % en 1870, et en Allemagne, alors
que seuls 25 % de la population étaient urbanisés en 1850, la proportion passe à 50 % en 1870.
La cause principale de cette croissance est l’exode rural. A Paris en 1870 par exemple, 6 habitants
sur 10 ne sont pas nés dans la capitale. Les causes de ce flux migratoire sont d’abord les
transformations de l’agriculture : mécanisation des tâches, enclosures et mise en herbe des terres,
moindre consommation de main-d’œuvre d’un monde rural devenu plus individualiste... Cette
évolution pousse les agriculteurs aux moindres capacités financières ou moins innovants à partir.
Le développement du rail accélère ce mouvement par la mise en concurrence des régions agricoles
et le désenclavement des populations rurales.
Les besoins en main-d’œuvre des villes qui concentrent de plus en plus le rôle productif
s’accroissent avec le développement industriel. La population des cités est aussi jeune et
dynamique et les villes reçoivent dans les pays neufs les migrants venus d’Europe (côtes ouest
américaine ou brésilienne par exemple).
b. Une urbanisation qui transforme la géographie des pays
Toutes les villes ne se développent pas de la même façon au cours du XIX e siècle et cette évolution
inégale crée une nouvelle géographie.
Les capitales tout d’abord, centres des décisions politiques et économiques, et premier foyers
industriels, connaissent une croissance rapide. La population londonienne est ainsi multipliée par 2
entre 1850 et 1880 (de 2 à 4 millions
...

LE TIERS MONDE ET LE SOUS DEVELOPPEMENT


Eric Le Barbu
Lycée Pierre Poivre, à Saint Joseph ( île de la Réunion)
Nouvelle adresse : eric.le-barbu@wanadoo.fr
INTRODUCTION
- Le 1 /3 Monde comprend 121 Etats, de l'Amérique Latine, d'Asie, d'Afrique .
- Ce sont tous des PVD et qui connaissent tous des problèmes économiques.
* Agriculture archaïque, secteur trop développé et non productif.
* Croissance démographique très forte et bas niveau de vie.
* Nature hostile et industries peu développées.
_ Tout cela constituent des caractères communs aux PVD. 
I/ CRITERES DEMOGRAPHIQUES DES PVD
* Démographie galopante
_ La population augmente et cette augmentation n'est pas le résultat des pays industriels.
3 Hommes sur 4 vivent dans le 1/3 Monde.
L'accroissement naturel atteint plus de 2 %
A/ NATALITE TRES FORTE
On parle de forte natalité à partir de 20 pr mille ( Cas du Brésil et du Mexique)
- Les raisons en sont:
* Traditions et mentalités + religion: La natalité a toujours été un rattachement à la famille traditionnelle.
* Enfants qui coûtent très peu ( forte Main d'œuvre, donc source de revenus)
* Progrès de la médecine: Beaucoup de naissances à terme viables.
* Utilisation des moyens de contraception avance lentement; dans la plupart des Etats, faute de pouvoir
changer les mentalités, on pratique une politique anti nataliste, mais les résultats sont plutôt limités.
Ex: La Chine: On les oblige à ne faire qu'un enfant par foyer, maximum deux; au delà, on pénalise
financièrement les ménages, ou on oblige l'avortement.
- Dans la plupart des pays, les politiques sont à dominance antinatalistes, natatives: Propagande, aide
financière, campagne d'information pour la contraception...
 
B/ UNE POPULATION JEUNE ( la 1/2 de la population)
- Problème du développement économique
- La mortalité dans les PVD est la plus faible du Monde (6 à 8 Pr. mille)
* Raisons:
- Taux de mortalité infantile élevé: 116 Pr. Mille (malgré l'aide d'associations internationales: UNICEF;
Croix Rouge... )
_ Médecine moderne ( épidémies enrayées.. )
_OMS et aide au 1/3 Monde: Création d'hôpitaux et de dispensaires; utilisation de vaccins.
- Famines plus rares. ( Grâce au FAO)
* Ce problème d'accroissement démographique va inquiéter les pays riches (Crainte d'une éventuelle
invasion des gens du Sud )
Ex: En Afrique: Tx Nat= 40 à 50 pr mille
Tx Mort= 20 pr mille
En Inde: TN = 36 pr mille
TM =20 pr mille
Brésil:42 % de la population a moins de 15 ans.
C/ LES POLITIQUES ANTI NATALISTES
* Résultats de limitation des naissances sont très variables selon les Etats.
_ En Inde, les classes urbaines réalisent mieux qu'il y a 20 ans, l'avantage de réduire le nombre d'enfants.
( Programmes de stérilisation masculine, avec aide financière)
_ En Chine, politique beaucoup plus dure et qui obtient un succès sans précédents dans aucun autre pays
Slogan " Un couple, Un enfant"
D/ NIVEAU DE VIE
1/ Le revenu
- On le voit d'abord au niveau de vie qui est très bas.
_ Ce revenu correspond à un PNB/Hab de 10 à 30 fois inférieur à ceux des pays riches.
* En Inde: 1/3 de la population en dessous du seuil de pauvreté absolu.
_ 30 Millions d'Hab a un revenu comparable à celui de l'Europe Occidentale.
* Dans le cas des Emirats Arabes, le revenu est excessif, car il repose sur "la vérité du pétrole"
_ En général ,dans les PVD, le PNB est très bas : < 2000 Dollars /Hab /an
* L'Afrique ne représente que 3% du PNB mondial
* L'Europe " 28% " "
* Le Japon " 10% " "
2/ Malnutrition et sous nutrition
* On note une insuffisance alimentaire en viande et légumes, mais une hyper consommation de céréales
et de blé
* La malnutrition touche 10 à 15% de la population mondiale.
- 2/3 souffrent de faim; 10% de la population mondiale ont - de 1500 calories /jour, d'ou faiblesses
physiques (carences, scorbut... ),et intellectuelles.
3/ L'analphabétisme
50% de la population mondiale manque d'enseignants et d'écoles.
_ On a essayé d'améliorer le niveau de l'enseignement
Ex: En Afrique: distribution de radios dans les écoles
_ Mais il faut des moyens financiers ( encore un aspect des causes du sous-développement)
E/ AMPLEUR DES INEGALITES SOCIALES
- Il existe une partie minoritaire de la population qui possède une grande partie du pays.
* Au Mexique; les 20% plus riches possèdent 50% du revenu national.
_ Cela pose des problèmes d'ordre humain:
* Bas niveau de vie
* Tensions sociales
( Lutte des classes entre propriétaires et agriculteurs.), et contribue à l'instabilité du pays.
_ Le chômage est trés important.
* Peu d'industries multiplication de petits métiers(parasitaires); concurrence, bas salaires...
_ L'Etat est trop pauvre pour payer des allocations familiales.
Aspect de villes du 1/3 monde.( bidonville)
- A noter un contraste très important entre les quartiers riches et les quartiers pauvres (rejetés en
périphérie dans les zones les plus insalubres; pas d'eau, pas d'électricité... )
- Quartiers souvent à côté des usines et qui grandissent trop vite à cause de l'exode rural.
- Contraste avec les quartiers de commerce, héritage de la colonisation et de la modernisation.
- Contrastes avec les quartiers des affaires ( centres ville) où le luxe déborde de partout.
II/ CRITERES ECONOMIQUES
A/ LES CAUSES
- Les PVD sont surtout dans la zone chaude (tropicale et équatoriale)= Chaleur excessive, accompagnée de
sécheresse ( Sahel ) ou d'inondations ( Inde)
_ Les sols sont souvent craquelés , infertiles ou lessivés( lavés par les pluies abondantes de tout leurs sel
minéraux)
* On peut y remédier en construisant des barrages afin de permettre l'irrigation... Mais il faut des moyens
financiers.
* Progrès médicaux ont fait baisser la mortalité, sans pour autant modifier la forte natalité =>  explosion
démographique
* Paralysie des structures
- Religion interdit certains modes de cultures (ex: l'alimentation en Inde (végétarienne))
- Obstacles aux formes agraires
- Domination de la ville sur la campagne...
* Enfin ces PVD, nouvellement indépendants, sont souvent très instables.
- Leur fragilité intérieure ( ethnies rivales, problèmes raciaux et religieux...) + leurs rivalités de
voisinage (ex: Amérique centrale, Afrique noire, Moyen Orient.. )y multiplient les dépenses.
- IL ne faut pas négliger que les effets de domination extérieure sont évidents:
ex : En URSS et Europe centrale.
C'est surtout au moment de la décolonisation que se manifeste le sous développement.
B/ DIFFICULTES DE L'AGRICULTURE
Se caractérise comme étant retardataire
peu productive
traditionnelle
1/ Conditions naturelles
(Reliefs, sols, climats.. )
* Climat équatorial: obstacle : Forets humides et forets denses
* Climat tropical: pluies incertaines, sols séchés ( ex: Cuvette du Niger; du Tchad)=> zone profondément
marquée par la sécheresse, sans compter les régions désertiques (Sahara) proprement incultes.
* Zones très arrosées: En Inde :2 Indes:
- Inde sèche ( pas assez d'eau: problèmes d'irrigation)
- Inde humide ( beaucoup d'irrigation; endiguement des fleuves)
- Manque de capitaux
" " technologie
Absence d'électricité
Pas assez d'engrais, de machines ( en Inde: utilisation de bouses de vaches à la place d'engrais)
2/ Conditions humaines
- Mauvaises => manque de qualification de la MO : Cela empêche la modernisation.
3/ Inégale répartition des terres
- Monde rural traditionnel, mais perturbé par la surpopulation et le manque de terres.
- C'est un système ouvert à l'extérieur, qu'entretiennent les cultures d'exportation, et les industries
implantées; d'ou un monde urbain croissant car beaucoup de mouvements migratoires.
- Les petites exploitations ne sont pas rentables et font vivre une population trés nombreuse..
- Pas assez de terres consacrées aux cultures vivrières => Problèmes de la faim.
Ex: Brésil: 12% des terres pour l'agriculture
52% " " " les pâturages
20% " " " les forêts
* Le reste est en friches ou en jachère.
* 52,2% des paysans occupent 2,8% de la surface cultivée
* 44 000 propriétaires occupent 59,8% des terres appropriées.
- En Inde: Majorité des paysans petites exploitations
1/3 des cultures < 20 Ha
Bcp sont locataires de la terre.
4/ Une agriculture vivrière, traditionnelle délaissée
- Cela concerne les petites propriétés.
* Méthodes archaïques : cultures sur brûlis (Asie, Afrique)
2 conséquences: fertilité du sol pas énorme
rendements baissent très vite
Ex; le Sénégal: au bout d'une année, les terres sont abandonnées
Riziculture (Asie du Sud Est) qui est irriguée, développée à la production, le riz exige beaucoup de M O
* Systèmes d'irrigation rudimentaire
ex: Nord de l'Afrique = troncs d'arbres, bambous creusés...
Inde: on utilise des jeunes pour faire circuler l'eau dans un système à roue à pédales.
- La production alimentaire est souvent faible et insuffisante.
- Si les cultures vivrières se développent peu, c'est que les gouvernements (en souhaitant des denrées
agricoles à bon marché, pour des raisons de paix et pour financer d'autres activités) découragent les
agriculteurs. 
C/ CULTURES D'EXPORTATION, PLANTATION DE PRODUITS TROPICAUX
- Ces cultures destinées sont des cultures de produits tropicaux (café, cacao, arachides, soja... )dont
laculture a été implantée et développée par les colonies.
- Ces cultures continuent à être exploitées car elles constituent les recettes des PVD
1° caractéristique: ces plantations sont implantées sur les meilleures terres ( ex: Terra Rossa... )
2° caractéristique: Cultures sur grandes propriétés, avec MO à bon marché.
Ces grandes propriétés ont des machines et une partie des terres sont inexploitées. Ils exportent leurs
produits; cela empêche le développement des cultures vivrières et place les PVD sous la dépendance des
pays industriels.
D/ EFFORTS DE MODERNISATION
- But: augmenter la rentabilité de l'agriculture.
2 aspects:
1/ Réformes agraires
- Redistribution plus équitable des terres
- Lutter contre l'inégalité des propriétés, mal exploitées.
- Mettre en cultures de nouvelles terres.
* Tous les PVD en Afrique ont tenté ces réformes agraires.
- Celles ci varient selon l'idéologie: 2 Types
* Indochine: Collectivisation
* Pays à économie privée: confiscation, moyennant une indemnité d'une partie des grandes propriétés.
- Les terres confisquées sont redistribuées avec paiement de mensualités, aux paysans.
- Le problème est que ces paysans peuvent difficilement racheter ces terres.
- L'Etat ne peut pas faire les travaux d'infrastructures, et au bout de quelques années, les petits
propriétaires disparaissent, rachetés par des gros propriétaires.
- Les résultats de ces réformes agraires sont souvent limités dans les pays à économie privée.
* Au Brésil, les paysans pauvres s'installent sur des terres cultivées.
2/ La "Révolution Verte"
( Développée dans la plupart des PVD, à partir de 1976)
= Effort de transformation radicale des cultures. 
Se caractérise par:
* Accroissement de l'irrigation: Construction de barrages, multiplication des puits.
- Les puits sont équipés de tuyaux: eaux de la nappe phréatique est extraite par des pompes, plus par des
norias.
- Amélioration des méthodes d'irrigation ( goutte à goutte) dans les PVD.
* Augmentation des exploitations
- Grâce à la mécanisation, à l'électrification; création de hangars de stockage; utilisation d'engrais et de
toutes sortes de produits chimiques; recherche économique pour améliorer le rendement...
- Problèmes: Manque de capitaux (eau et machines sont chères)
- Seuls les riches peuvent en profiter et avoir des résultats.
- Conséquences: Les riches sont de plus en plus riches
Les pauvres sont de plus en plus pauvres.
_ Manque de paysans bien formés On se heurte au problème de l'analphabétisation
au manque de locaux
les méthodes nouvelles viennent des pays riches, d'où dépendance du 1/3 Monde.
- Organisation du F.A.O. ( Food and Agricultural Organisation) qui envoie un aide technique et financière
(formation de paysans, construction de barrages... )
3/ Les résultats.
- Progrès dans les production agricoles, mais ces progrès sont irréguliers (aléas climatiques, inondations ou
sécheresse... )
- Cette production augmente dans tous les domaines, mais pas assez par rapport à la croissance
démographique.
- Si la population augmente, on doit puiser dans les stocks de céréales ( c-à-d : Importer )
Ex ; en Inde: obligation d'importer des céréales, dans les bonnes années , on stocke.
- Malgré les progrès agricoles, pas d'amélioration sensible des rations alimentaires.
Cette situation se retrouve dans tous les PVD , et l'explosion démographique en est la cause N° 1 .

Pourquoi s'intéresser aux gares dans les villes du Sud ?


Qu'elles soient ferroviaires, routières ou maritimes, les "gares" sont des lieux forts
de l'organisation des transports au coeur du système urbain et territorial. Carrefours
structurants à l'interface des différents réseaux qu'elles abritent, le rôle des gares,
en tant que lieu de connexion, ne cesse aujourd'hui d'accroître face face au
nombre et à la complexité des modes de déplacements.
 
A la fois portes d'entrée des villes et centre de vie urbaine, elles sont un point
d'appui privilégié pour leur développement à la fois social et économique. Bien plus
que des "lieux de passage", elles sont des lieux de rassemblement souvent à la
frontière entre "la ville ancienne" et "la ville moderne", des lieux intenses de vie,
d'échanges et, de mixité dont la gestion est délicate, source de nombreux conflits.
ce sont enfin des lieux d'émotion, de mémoire et de représentation, symbole
d'une puissance coloniale passée ou d'une modernité nouvelle.
 
Cette activité intense fait de la gare le "point chaud" d'un monde en évolution : le
lieu du commerce, des échanges et trafics en tous genres, là où les marchandises
et les hommes se frottent, là où se joue une bonne part de l'activité économique
formelle ou informelle de la ville, là aussi où se concentrent les plus grands dangers
(pauvreté, mendicité, violence, prostitution, trafic de drogue, etc.) et peut être aussi
les plus grands risques d'instabilité pour demain (révolutions, contrôle de la
population, diffusion des maladies infectieuses émergentes, etc.).
 
Les gares captent et incarnent à la fois les tensions qui travaillent et transforment
l'urbanité. Miroirs déformés, déformants parfois, elles sont toujours révélatrices des
pratiques, des attentes et des projections urbaines à l'oeuvre.
 
La montée en puissance de la gare comme objet de recherche urbaine, devenue
point focal du projet de Ville "durable" depuis une dizaine d'années est à cet égard
révélatrice.
 
Or, dans le contexte des métropoles du Sud où le dynamisme démographique
façonne de manière irréversible le destin de l'humanité et où l'urbanisation
croissante ainsi que la transformation des pratiques de mobilités interrogent
fortement les conditions du développement urbain, le développement de ces
espaces multifonctionnels et complexes semble d'autant plus crucial qu'il contient
les germes d'un avenir durable pour la ville.
 
De l'avenir des gares dépend aussi le devenir de ces villes appelées à représenter
la plus grande partie du territoire urbanisé de la planète.
 
Mais alors, de quel futur parlons-nous et pour quelles gares "du Sud" ? Dans le
contexte actuel de métropolisation et d'internationalisation des projets de "grande
gare", ce futur serait-il celui, à l'instar de la nouvelle gare de Shanghai Sud, des
gares St Pancras à Londres ou de la gare Saint Lazare à Paris ? ENfin s'il semble
évident que leur développement dépendra de leur contexte d'insertion (urbain,
économique, politique etc.), est-il possible d'entrevoir, au-delà de leurs différences
intrinsèques dont cette étude tachera de dessiner les contours, un avenir commun ?
 
C'est donc pour mieux comprendre ces "lieux" multiples aux enjeux à la fois
politiques, urbains, économiques, sociaux, symboliques, sécuritaires ou sanitaires,
d'en comprendre les différences et les points de convergence, pour apporter
demain les bonnes réponses que le projet de recherche et de prospective "Gares,
lieux de connexions et de vie urbaine dans les pays du Sud : Quel Avenir ?" a été
lancé.

La spectaculaire révolution urbaine de Mésopotamie, commencée 4 000 ans avant notre


ère, ne fut pas seulement le résultat d'une soudaine prospérité agricole, mais le lieu du
développement des échanges dans une société à l'économie déjà très diversifiée et
spécialisée.
L'urbanisation de la Mésopotamie au IVe millénaire avant notre ère est à juste titre considérée
comme l'une des grandes étapes de l'histoire de l'humanité. Dans le sud de l'Irak, des
communautés villageoises particulièrement dynamiques ont bâti en quelques centaines d'années
une civilisation urbaine, inventant non seulement un nouveau mode de vie, mais aussi une
nouvelle manière de voir le monde et de l'aménager. Cette « révolution urbaine », comme l'appela
dans les années 30 Gordon Childe, est étroitement associée dans la littérature archéologique au
site de Warka, l'antique Uruk qui a donné son nom à la fois à une période et à une culture, la
culture d'Uruk (de - 4300 à - 3100).

La ville sumérienne était au coeur d'un vaste réseau de relations et d'échanges dont le
développement est étroitement lié aux mutations que connaît alors l'ensemble du monde
mésopotamien : la recherche sur la naissance des villes, longtemps confinée à l'étude de quelques
grands sites, situés surtout en Irak, mesure mieux aujourd'hui l'ampleur des relations développées
par les Sumériens avec leurs voisins dès la fin des temps dits « préhistoriques ». Au IVe
millénaire, ils fondèrent des colonies en Syrie et exercèrent une influence culturelle majeure de la
vallée du Nil au plateau iranien, à tel point que l'on a pu parler de « système-monde urukéen » ; au
IIIe millénaire, vers - 2550, la Syrie connut elle aussi une urbanisation que l'on appelle parfois
« deuxième révolution urbaine », pour souligner qu'elle fut plus tardive et influencée par les Etats
sumériens situés plus à l'est.

Uruk, patrie de Gilgamesh


Le développement de ces réseaux de relations caractérise au mieux la naissance de villes qu'il
n'est plus question aujourd'hui de définir uniquement par la présence de bâtiments monumentaux,
de remparts ou d'une importante concentration de population. Assurément Uruk, la patrie du roi
Gilgamesh qui vécut vers - 2600, est 500 ans avant ce roi un centre important qui s'étend sur
environ 250 hectares, soit la taille d'Athènes à l'époque de Périclès. Elle présente un centre
monumental qui comprend deux zones : au sud d'une antique tour à étages se situent les
bâtiments archaïques du quartier de l'Eanna, et à l'ouest un autre ensemble monumental, celui de
la ziggourat (construction mésopotamienne à caractère sacré, telle que la tour de Babel) du dieu
sumérien Anu.
Il s'agit là de quartiers officiels, dotés de lieux de réception, sur le sol desquels on a découvert des
centaines de tablettes qui consignaient les opérations administratives qui se déroulaient dans ce
secteur. Ce qui fait d'Uruk une ville n'est pas sa taille mais la présence d'une hiérarchie du bâti et
surtout la concentration dans un lieu spécifique, voué aux activités politiques ou religieuses, de
spécialistes de l'écriture, des scribes. 5 400 textes ont été recueillis dans ces quartiers, s'agissant
pour la plupart de textes comptables écrits en caractères dits « protocunéiformes », qui sont au
nombre de 1 900 environ.

La hiérarchisation de l'espace bâti a été étudiée au mieux sur un autre site urukéen, fouillé par une
mission allemande dans les années 70 : Habuba Kabira. Le site a livré le plus ancien plan de ville
connu au monde. La ville a vu se succéder plusieurs phases d'occupation. Au cours de la
deuxième phase, elle passe d'une superficie de 6 à 10 hectares et se voit dotée d'un rempart
rectiligne de plusieurs centaines de mètres, décoré sur toute sa longueur de niches. Le mur large
de 3,30 mètres est renforcé tous les 13,50 mètres de tours en saillie de 2 mètres environ. C'est
une véritable opération d'urbanisme dessinée selon un projet préconçu.

A Habuba, les maisons sont serrées les unes contre les autres, et le bâti est irrigué par un réseau
de rues hiérarchisées. Le plan lui-même n'est pas orthogonal mais on a reconnu un grand axe
nord-sud qui paraît s'incurver au nord, et des axes est-ouest qui lient cet axe aux portes de la ville.
Sur ces axes se branchent de petites ruelles, ou des impasses. Les rues principales présentaient
une surface de graviers.

De nombreuses maisons privées sont construites selon un plan tripartite (un espace central bordé
par des salles étroites) et les plus grandes d'entre elles sont dotées d'une cour bordée sur deux
côtés de vastes salles. On a découvert sur le sol de ces maisons un abondant matériel céramique
et surtout des petites sphères d'argile couvertes d'empreintes de sceaux et des tablettes. La
culture matérielle des habitants de Habuba Kabira était semblable à celle des gens d'Uruk et
l'agglomération était dominée par un quartier officiel où on a repéré deux grands édifices tripartites
et un hall de réception très semblables aux édifices d'Uruk. C'était le centre politique de cette ville,
résultat d'une véritable opération d'urbanisme. L'influence culturelle urukéenne s'étendit jusqu'en
Turquie orientale, où se développèrent d'importants centres proto-urbains, comme Arslan Tepe.

La ville sumérienne est au coeur d'un réseau de relations : c'est un centre économique lié à un
arrière-pays avec lequel il entretient des relations multiples. Habuba Kabira était le plus grand
établissement d'une série d'installations urukéennes dans la moyenne vallée de l'Euphrate. Ces
établissements, à l'écart du cours majeur du fleuve pour les protéger des crues, permettaient de
contrôler et d'exploiter la vallée : on y cultivait surtout les terres basses, et celles du plateau quand
les pluies le permettaient. Les établissements contrôlaient aussi la circulation des biens et des
hommes le long du fleuve.

Les villes, centres économiques régionaux


Uruk était le centre très actif d'un important réseau de villages et de petits bourgs situés le long
des chenaux de l'Euphrate. Le développement d'un aussi grand centre reposait sur les ressources
agricoles des villages situés en amont de la ville. Les grains y arrivaient par voie fluviale. Le dense
réseau des chenaux de l'Euphrate et du Tigre, qui formait au IVe millénaire un ensemble unique,
était la ligne de vie du pays de Sumer : ce que les textes appellent le « pays vivant » est la terre
nourrie par les eaux de l'irrigation, dont les canaux dessinaient des arborescences encore bien
visibles aujourd'hui dans des zones devenues depuis désertiques. Ces chenaux permettaient
l'irrigation, mais aussi le transport des grains, accumulés dans les greniers des centres urbains.
Là, les grandes maisonnées sumériennes redistribuaient sous forme de rations ces céréales à des
artisans et aux personnels spécialisés d'unités de productions variées.

La révolution urbaine repose en effet sur l'avènement de spécialistes et de figures sociales


différenciées. Le développement de l'artisanat était le résultat d'un long processus entamé dès le
VIe millénaire avant notre ère, en Mésopotamie. Les céramiques préhistoriques souvent décorées
de motifs complexes étaient faites à la main dans un cadre domestique, peut-être féminin. On
observe à partir de - 4500 d'importantes mutations : le développement de formes standardisées,
une simplification des décors peints, puis leur disparition, la manufacture de vases au tour. Toute
la chaîne opératoire de production des céramiques paraît s'adapter à des besoins nouveaux : la
distribution de rations alimentaires nécessita la fabrication en série de bols puis d'écuelles
grossièrement moulées, qui représentent jusqu'à 60 % du total des céramiques découvertes sur
certains sites. Ces céramiques moulées ou tournées étaient cuites dans des centres artisanaux où
se concentraient des ateliers de tournage et des fours.

Les différentes formes céramiques qui se diversifient, ainsi que des listes de céramiques
consignées sur des tablettes montrent le développement de toute une série de filières
économiques nouvelles : l'exploitation et la transformation de produits laitiers, la production de
bière et de vin, qui sont autant de marques d'une révolution agroalimentaire aussi importante par
son ampleur que la révolution néolithique. Cette révolution agricole, en effet, concerne les produits
issus des cultures irriguées mais aussi de l'élevage : les milliers d'empreintes de sceaux
retrouvées en Mésopotamie montrent à partir du début du IVe millénaire des scènes artisanales,
notamment des scènes de productions textiles. Jusque-là essentiellement issue de l'exploitation
du lin, la production s'oriente vers la transformation de la laine fournie par de grands troupeaux qui
pâturent dans les marécages du pays de Sumer, voire dans les steppes de Haute-Mésopotamie. A
la fin du IIIe millénaire, on estime que le pays de Sumer avait un cheptel de 535 000 moutons, que
des villes comme Girsu ou Ur employaient respectivement 15 000 et 13 000 femmes dans la
production textile.

On comprend donc pourquoi on a depuis longtemps lié la révolution urbaine à une croissance
démographique que la rente agraire du pays de Sumer rendait possible. Mais est-ce là l'unique
cause de la naissance des villes ?

Des centres politiques et culturels dynamiques


De multiples facteurs ont été invoqués pour expliquer ce phénomène en Mésopotamie : le
développement de l'agriculture irriguée, en particulier. Celle-ci aurait nécessité une coordination
accrue des populations, encadrées par des institutions de plus en plus coercitives : c'est la thèse
du despotisme oriental. Le développement du réseau d'irrigation sumérien ne nécessita pas en fait
au départ de gigantesques travaux d'aménagement, car les multiples chenaux existant aux IVe et
IIIe millénaires permettaient de mettre en oeuvre une irrigation relativement simple. Celle-ci se
raffine assurément par la suite jusqu'à ce que l'intégralité du système fluvial soit contrôlée par
l'Etat, à la fin du IIIe millénaire. Mais c'est un développement tardif.

Au moment de l'émergence des premières villes, les conditions environnementales jouent un rôle
décisif, mais discuté, dans leur développement : installées sur des bras du cours combiné du Tigre
et de l'Euphrate, les cités sumériennes exploitent au prix d'un effort humain limité les ressources
exceptionnellement riches d'une niche écologique, un immense delta, qui offre d'abondantes
ressources piscicoles, des roseaux et l'eau de l'irrigation. A cette époque, la côte du golfe Persique
se trouvait à 200 kilomètres à l'intérieur des terres, et les villes sumériennes de l'extrême Sud-Est
étaient situés sur des lagunes. On pense de surcroît que les pluies des moussons affectaient
jusque vers - 3500 le pays de Sumer. En revanche, à partir de cette époque, les conditions
climatiques actuelles - l'aridité extrême - se mettent en place, et il n'est pas exclu que ces
modifications climatiques aient nécessité un encadrement accru des populations. Cette
dessiccation aurait aussi dégagé d'immenses espaces qui auraient alors été mis en culture par
irrigation.

Quelle que soit la part jouée dans ce processus par l'arrivée de nouvelles populations, la
naissance des villes et l'essor démographique furent liés à l'existence d'organisations collectives
qui avaient mûri dans le sud de l'Irak depuis plusieurs centaines d'années, à partir de - 4300.
L'organisation sociale de ces communautés villageoises était adaptée aux exigences de
l'agriculture irriguée. De puissants lignages dont on a retrouvé les maisons se structurèrent au Ve
millénaire en chefferies. On discute toujours de la part jouée par la religion dans cet encadrement.
L'apparition de bâtiments monumentaux a été diversement interprétée : s'agit-il de temples, de
lieux de réunion, voire de l'habitat de familles de chefs ? Celles-ci ont-elles conforté leur pouvoir en
s'appuyant sur une religion institutionnalisée ? Cette partie de l'Irak fut en tout cas une véritable
« cage sociale » : l'espace habitable y était restreint, on l'a vu, et l'essor démographique, lié aux
rendements agricoles, suscita de considérables problèmes. Cet essor n'alimenta que très
ponctuellement, comme en Grèce, un mouvement colonial. Les problèmes sociaux issus de la
densité humaine furent résolus d'abord par le développement des villes : vers - 3000, sur un
territoire grand comme la Suisse, existent le long de trois grands chenaux de l'Euphrate et du Tigre
une série d'Etats (une quinzaine) qui exploitent chacun une partie du réseau. Ces Etats ne sont
pas des cités-Etats, comme on continue à l'écrire abusivement, mais des micro-Etats qui
comportent plusieurs centres urbains aux fonctions diverses. Un Etat sumérien comme Lagash
s'étend, vers - 2550, le long de plusieurs chenaux du Tigre, sur une longueur de 65 kilomètres,
exploite environ 2 000 kilomètres carrés de terres irriguées (pour une superficie en comptant
environ 3 000), présente 25 bourgs, 40 villages et 3 villes importantes : une capitale politique,
Lagash, une capitale religieuse, Girsu, et un port situé sur les lagunes du cours inférieur du Tigre.
Il avait au nord-est une frontière longue de 45 kilomètres avec son voisin le plus proche, avec
lequel il fut en conflit constant pour le contrôle des terres irrigables.

Sumer : une vision ethnocentrique du monde


En dépit de leurs conflits, ces Etats étaient liés entre eux par un sens profond de leur unité
culturelle, matérialisée par l'usage d'une écriture, l'écriture cunéiforme, et par une langue, le
sumérien : il existait vers - 3000 un sceau sur lequel étaient gravés les symboles des principales
villes, expression d'une ligue qui contrôlait la circulation de certains produits. Par-delà
l'appartenance à une communauté politique, les Sumériens conçurent une vision ethnocentrique
du monde, nourrie par un sens marqué de leur propre identité et par l'idée que le reste du monde
était destiné par les dieux à ravitailler leurs cités. Celles-ci en effet échangeaient les produits issus
du système économique que nous avons évoqué, notamment les textiles, contre des matières
premières qui faisaient défaut dans le Sud irakien, notamment le bois, les pierres précieuses et les
métaux.
Une autre ville, Ur, était sur le golfe Persique à la tête d'un réseau qui s'étendait jusqu'à l'Indus et
redistribuait des produits dans le vaste Hinterland que constituait la Basse-Mésopotamie. Les
élites sumériennes fondaient symboliquement leur pouvoir dans la détention de ces objets de luxe,
retrouvés dans les tombes royales d'Ur. Les villes sumériennes naissent des échanges maritimes
et fluviaux. Si Ur était la porte maritime du pays de Sumer, Mari était l'une de ses portes fluviales  :
vers - 2900, une ville nouvelle circulaire (250 hectares) fut bâtie dans la vallée de l'Euphrate pour
contrôler le trafic fluvial et l'importation du cuivre anatolien en Mésopotamie : la ville devint aussi
un centre de transformation et de réexportation du cuivre comme le montrent les fouilles en cours
dans un quartier artisanal de la ville sous la direction de Jean Margueron. Mari fut le centre d'un
Etat qui s'étirait sur 150 kilomètres le long de l'Euphrate. Elle fut aussi un relais majeur des
transferts culturels qui ont lieu alors en Mésopotamie. La découverte en 2002, dans ce quartier
artisanal, de la plus ancienne roue trouvée pour l'heure montre la diversité des productions
réalisées là, mais aussi le transfert d'une technologie née peut-être au pays de Sumer vers les
steppes de Haute-Mésopotamie. Celles-ci connaissent, peu après - 2500, leur propre révolution
urbaine : ces villes de « deuxième génération » ne sont plus liées à la voie fluviale mais aux
échanges terrestres rendus possibles par l'usage de chariots à deux ou quatre roues.

Ces villes sont aujourd'hui mieux connues. Outre Mari, deux centres ont fait l'objet de recherches
poussées : Ebla d'abord, en Syrie occidentale et le site de Tell Beydar, dans le nord-est de la
Syrie. Centres d'échanges et de direction, ces cités situées dans les steppes de Syrie reposent sur
une autre base économique : le pastoralisme semi-nomade. Elles ne dépassèrent jamais les 100
hectares de superficie, alors qu'Uruk, au début du IIIe millénaire, en atteignait 550. Ce sont là les
tailles critiques des révolutions urbaines de Mésopotamie. La première, vers - 3500, est le résultat
de mutations sociales et écologiques complexes liées à l'évolution et à l'aménagement de la plaine
des deux fleuves. La deuxième, vers - 2550, est le résultat du développement de sociétés
agropastorales adaptées aux steppes de Syrie et liées étroitement aux villes du sud de la
Mésopotamie. C'est donc une révolution « secondaire ». Comme dans d'autres lieux du monde
ayant connu une urbanisation primaire, par exemple la vallée d'Oaxaca et le pays maya en
Amérique, le sud de la Mésopotamie devint entre - 4300 et - 2000 un archipel de villes, fondées
sur un équilibre socioécologique très fragile. La surexploitation des terres du sud de l'Irak, la
séparation des cours combinés du Tigre et de l'Euphrate, l'avancée inexorable du delta des
fleuves ruinèrent progressivement les villes sumériennes au profit de centres mieux situés, comme
Babylone ou Asshur.
Partager :
   

Pascal Butterlin
Maître de conférences en histoire et archéologie des mondes anciens, université de Versailles-
Saint-Quentin-en-Yvelines, laboratoire Urmed. A récemment publié Les Temps proto-urbains de
Mésopotamie. Contacts et acculturation à l'époque d'Uruk au Moyen-Orient, CNRS, 2003.

Qu'est-ce qu'une ville précolombienne ?


A la fin des années 90, les recherches menées par l'archéologue américaine Ruth Shady et
son équipe sur le site de Caral, au nord du Pérou, ont relancé le débat sur la naissance des
villes en Amérique du Sud. Jusqu'ici, les évidences d'urbanisation étaient beaucoup plus
tardives : le site de Moche, sur la côte nord du Pérou, datant du début de notre ère, en est un
exemple. D'autres sites plus anciens, tels Aspero (- 2700) et El Paraiso (- 2000) sur la côte ou
Kotosh et La Galgada (- 1900) dans la montagne, ne peuvent être vus comme des centres
urbains, leur fonction étant principalement cérémonielle.

Situé dans la vallée de Supe, sur la côte nord du Pérou, Caral est un ensemble urbain de 66 ha
présentant 32 structures monumentales associées à des complexes résidentiels et des zones
d'habitat plus modestes en périphérie. Les vestiges, datés entre - 2100 et - 1600, reflètent une
organisation spatiale complexe faisant référence aux points cardinaux et des techniques de
construction élaborées. Le grand temple (153 m sur 109 m) est le monument le plus important du
site, tant par ses proportions que par sa fonction de siège du pouvoir. Il s'agit d'une structure
pyramidale formée de plates-formes superposées d'une hauteur de 28 m, reliée par un escalier à
une place circulaire en sous-bassement. La superposition des structures témoigne de la
rénovation constante des édifices. Cette activité architecturale était liée au domaine rituel. Avant
leur remaniement, les bâtiments étaient enterrés avec diverses offrandes (ossements, textiles).
Toutes ces activités nécessitaient d'importantes ressources humaines et matérielles. Elles reflètent
l'existence d'une société hiérarchisée, avec une élite dirigeante et une population à son service.
Selon R. Shady, Caral représente plus qu'un centre cérémoniel : il s'agirait de la première ville des
Andes centrales dotée d'une population permanente.
Cet exemple illustre bien le problème de l'urbanisme dans les Andes. Mais peut-on
véritablement parler de ville avant l'arrivée des Espagnols ? Les progrès faits par l'archéologie
ces dernières années ont introduit de nouvelles données sans toutefois apporter de réponse
définitive. Les trois premières tentatives d'explication remontent aux années 60. A l'époque, John
Rowe (1) définissait une ville comme un« lieu de résidence permanent des administrateurs,
des commerçants, des artisans et des militaires ». Il distinguait une ville d'un centre cérémoniel
par la présence d'une population permanente, une ville d'un village par le type d'occupation et
situait les débuts de l'urbanisme andin très tôt, dès le IIIe millénaire av. J.-C. Un centre urbain
et/ou administratif se caractérisait alors par un certain nombre de traits : schéma spatial planifié ou
ordonné, complexité formelle et différenciation fonctionnelle de l'architecture monumentale,
existence de zones d'habitation et de préparation d'aliments, une aire totale dépassant 10 ha. Le
célèbre site de Chavín de Huantar (- 1500), entrait dans cette catégorie.
Une autre proposition, due à Richard Schaedel (2), s'inspirant du développement urbain en
Méditerranée orientale, reposait essentiellement sur des critères démographiques. Selon R.
Schaedel, l'urbanisme apparaissait plus tardivement, entre les viie et ixe siècles et était lié à la
transformation des chefferies en Etats expansifs, tels que l'empire Huari. Luis Lumbreras (3),
reprenant ce modèle, associait l'urbanisation à la formation des classes sociales, mais rejoignait J.
Rowe pour la chronologie.
Ces arguments sont aujourd'hui remis en cause par l'archéologie. Il semble que beaucoup de
centres urbains anciens n'abritaient qu'une population permanente réduite : 10 % seulement de
l'aire totale est résidentielle. Les places de marché, essentielles au commerce, sont rares. La
plupart des structures monumentales avaient des fonctions cérémonielles, funéraires ou
administratives. Sur le site de Moche, La Huaca del Sol aurait été vouée à l'administration tandis
que la Huaca de la Luna aurait eu des usages rituel et funéraire. Les structures plus petites
accueillaient les dépôts et ateliers de production de biens destinés principalement au culte. La
religion jouant un rôle essentiel dans les Andes, les calendriers cérémoniels régulent les
mouvements de populations, de services et de biens. Les villes se remplissent et se vident au gré
des cérémonies. On parle alors plus facilement de centres urbains administratifs-religieux que de
villes. Cuzco, capitale du tardif Empire inca (xve siècle), était le coeur du système centralisé du
culte étatique dont les fonctions profanes et religieuses sont mêlées. Son architecture est
constituée de palais destinés au culte des momies des fondateurs de l'Empire, de mausolées et de
temples. Ce noyau monumental est entouré de terrasses de culture et de villages dispersés.
Comparé à l'urbanisme méditerranéen de l'Antiquité, le système andin apparaît « anti-
urbain (4)» et se caractérise par l'absence de tell, la prédominance de l'architecture publique et la
récurrence de formes d'architecture cérémonielle (place, plate-forme échelonnée, rampe...).
NOTES
1
J. Rowe, « Urban settlements in ancient Peru », Nawpa Pacha, n° 1, 1963.
2
« The urbanization process in America from its origins to the present day », Actas y memorias del
36 Congreso internacional de Americanistas, Buenos Aires, 1969.
3
L.G. Lumbreras, De los pueblos, de las culturas y las artes del antiguo Peru, Editores asociados
Moncloa/Campodonico, 1969.
4
K. Makowski, « La ciudad y el origen de la civilizacion en los Andes. Sobre el imperativo y los
limites de la comparacion en la prehistoria », Estudios Latinoamericanos, n° 17, 1996.
TANIA DELABARDE ET NATACHA PANTELIC

Urbanismes de projet
Sur quoi peut-on innover aujourd’hui ? Comment financer ? Comment garantir sa mise en œuvre et imaginer son évolution dans trente ans ? - Photo : Le

nouveau quartier Seine et Parc : reconquérir les berges de Seine pour en faire de véritables lieux de vie (Choisy-le-Roi, 94) © Pattacini (Jean-Claude), IAU

îdF

En Île-de-France, les projets urbains des villes sont les moteurs du développement métropolitain.- Photo : Le parc de Clichy-Batignolles © Lecroart (Paul),

IAU îdF

De plus en plus de projets sont construits hors démarches PLU ou Scot.- Photo : © Lecroart (Paul), IAU îdF

Urbanismes de projetCahiers n° 162

Juin 2012
La conception urbaine face à la diversité des réalités
L’urbanisme de projet n’est pas une idée nouvelle. Mais face au constat d’une construction qui tourne au ralenti, et dans
un contexte de rupture, cette idée revient sur le devant de la scène, apportant au passage quelques idées nouvelles. Ce
numéro des Cahiers rend compte de la diversité des réalités qu’il recouvre selon les contextes : de la reconversion
industrielle à l’aménagement d’espaces publics, en passant par le projet urbain à la campagne ou la création d’axes de
transports. Il montre la permanence, mais aussi l’évolution des réflexions sur la conception urbaine.
L’urbanisme est nécessairement le fruit d’une construction collective
L’idée de projet urbain évolue sans cesse, tentant de s’adapter à un environnement changeant et appelant des démarches
innovantes. Parmi ces changements : la multiplicité croissante des acteurs qui s’invitent dans le projet. Désormais,
l’urbanisme est nécessairement le fruit d’une construction collective où élus, concepteurs, opérateurs, gestionnaires,
usagers et artistes conjuguent leur vision de la ville. Que l’on parle d’urbanisme négocié, concerté, participatif ou encore
«d’urbanisme des voisins », de « mises en projet coélaboratives », toutes ces démarches se fondent sur le dialogue et
l’enrichissement collectif. Cette diversité d’acteurs est d’ailleurs l’occasion de réinterroger chacun sur son rôle, sur ses
pratiques professionnelles et sur la manière de se coordonner. Les marges de progrès sont encore grandes pour
concevoir et mettre en œuvre des outils de management adaptés aux projets urbains et particulièrement à leur dimension
humaine et sociale.
Le rôle essentiel des agences d’urbanisme comme ensembliers ou facilitateurs
Enfin, l’urbanisme de projet, c’est aussi savoir croiser les approches, les échelles et, dans cette optique, il apparaît que les
agences d’urbanisme peuvent jouer un rôle essentiel d’ensembliers ou de facilitateurs. L’innovation est, quant à elle, à la
fois juridique, technique et artistique. Ce Cahiers fait le jour sur les nouveaux outils législatifs, comme le projet urbain
partenarial, le dialogue compétitif ou la loi sur la majoration des droits à construire. Il illustre aussi, à travers de nombreux
exemples, comment la visualisation 3D, l’art et la communication enrichissent le projet urbain. Il montre qu’il n’y a pas
d’urbanisme exemplaire ni de modèle reproductible, mais des démarches d’urbanisme multiples dont la force et la
pertinence résident dans leur capacité d’adaptation.

Autres études dans le même domaine :

Aménagement des territoires | Trame verte et bleue

Aménagement urbain | Grands projets urbains

Patrimoine | Patrimoine bâti

Sdrif

Ajouter au panier33 €TéléchargerS'abonner

Contacts
Amelie DarleyGwenaelle Zunino

Repères
La démarche d'ensemblier dans le projet urbain10 février 2009

Projets urbains en cours

Le projet d’aménagement des terrains Renault ZAC Seguin-Rives de Seine. Superficie : 74 hectares. Il est prévu la construction de 850 000 m2 de

logements, équipements, bureaux et commerces d’ici à 2016. À terme, 12 000 habitants et plus de 10 000 emplois y sont attendus.

Le tramway grenoblois et ses projets d’extensionPlusieurs projets en cours de réalisation. L’autorité en charge du développement des transports

collectifs prévoit la construction d’une cinquième ligne (E) en direction du nord-est de l’agglomération d’ici à 2014. Dans le cadre d’une charte Urbanisme et

Transports, une restructuration de l'espace urbain de l'agglomération est prévue autour de ces axes de transports « doux ».

Le projet urbain à la campagneLes écoles d’architecture, au-delà de leur mission de formation initiale des architectes, sont aussi des lieux de recherche et

d’expérimentation. La collaboration entre territoires et université est riche pour tous, créant les conditions de débats, colloques et rencontres régulières.

Comment inventer une modernité rurale et accueillir de nouvelles populations dans des conditions soutenables ? Comment économiser sols, ressources et
énergie, en répondant aux besoins d’expansion des petites communes ? …L’ENSA de Nancy fait partie d’un réseau d’écoles qui, via ces ateliers « hors les

murs », formalise une nouvelle forme de recherche territoriale à partir du « projet rural ».

Définition

Qu'est-ce que les CDT ?

Les contrats de développement territorial (CDT) sont définis dans la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris. Ils doivent mettre en œuvre le développement

économique, urbain et social de territoires définis comme stratégiques, et en particulier ceux desservis par le réseau de transport public du Grand Paris. Ces

démarches contractuelles, à visée opérationnelle, engagent l’État, représenté par le préfet de région, et les communes et leurs groupements. La région d’Île-de-

France et les départements ainsi qu’un certain nombre d’acteurs institutionnels du Grand Paris dont Paris Métropole, l’Atelier international du Grand Paris et

l’Association des maires d’Île-de-France sont invités à s’associer à ces démarches.

Les contrats de développement territorial sur notre site

 Le projet urbain partenarial

Le projet urbain partenarial (PUP) est le nouvel outil de financement des opérations d’aménagement institué par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de

mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. Il permet aux communes ou aux établissements publics compétents de signer avec les propriétaires

des terrains, les aménageurs ou les constructeurs, une convention fixant le programme des équipements publics à réaliser pour répondre aux besoins des

futurs habitants et usagers de l’opération, ainsi que les conditions de leur prise en charge (article L.332-11-3 du code de l’urbanisme). Il est mis en œuvre par

voie conventionnelle. C’est la convention qui établit le montant de la prise en charge privée du coût des équipements publics, qui fixe les délais de paiement,

ainsi que les modalités de cette participation. Il crée une souplesse contractuelle entre une collectivité locale et les opérateurs aménageurs, constructeurs, tout

en garantissant une vraie sécurité juridique et un cadre transparent pour les opérations d’initiative privée. Attention, toutefois, le PUP ne demeure qu’une

procédure de financement d’équipements publics : une procédure qui ne doit pas se limiter à une approche technico-financière. Cela favorise le déblocage

foncier, mais cette procédure ne doit en aucun cas dispenser la collectivité, de réaliser au préalable une étude sérieuse de faisabilité du projet urbain sous

toutes ses autres facettes, fonctionnelle, sitologique, sociale, économique, environnementale…

acteur du débat métropolitain

«Nous sommes un syndicat d'étude mixte qui est là pour faire des travaux conjoints, déboucher sur des propositions et faire en sorte d'essayer de les faire

passer. Ce qui n'est pas facile, mais ce qui rend l'objectif encore plus intéressant et motivant.»- Photo : © Lecroart (Paul), IAU îdF

«Métropole et gouvernance sont des mots neufs, en fait, pour ce qui nous concerne.»- Photo : © Ballet (Hélène), IAU îdF
Paris Métropole, nouvel acteur du débat métropolitainRetranscription
de la table ronde du 19 octobre 2011. 32e Rencontre de la Fnau

Avril 2012
Depuis 2004, la métropole parisienne a vu la montée en puissance d’un réel intérêt du grand public pour son avenir.
Initié par la ville de Paris, la Région et les nombreux élus locaux réunis dès 2006 dans la Conférence métropolitaine,
repris par l’État avec la consultation des dix architectes, cet intérêt a vu l’émergence parallèle d’une structure originale –
Paris Métropole – portée par la ville de Paris et par les collectivités du cœur de la métropole.
Paris Métropole est devenu un des lieux majeurs du débat pluriel sur la métropole, sous une forme originale et
dynamique, qui fait sens à cette échelle et mérite d’être connue.
L’atelier visite du 19 octobre 2011, organisé et accueilli par l’IAU île-de-France permet de situer Paris Métropole dans le
paysage de la nouvelle gouvernance métropolitaine et de présenter l’ingénierie sur laquelle elle s’appuie.
Ce document constitue la retranscription de la table ronde sur la gouvernance qui s’est déroulée, à l’institut, lors de la
32e Rencontre de la Fnau.

Obstacles au
développement
durable:
l'Arctique à
l'heure de la
mondialisation
des marchés
  Le Conseil de l'Arctique met l'accent sur la protection de
l'environnement et le développement durable, spécialement en ce
qui a trait à la poursuite du travail commencé par la Stratégie de
protection environnementale de l'Arctique (AEPS). Comme
l'indique un communiqué du Conseil :
  Les Ministres voient la mise sur pied de ce nouveau forum
intergouvernemental comme un symbole de leur engagement afin
d'améliorer la coopération dans le Nord circumpolaire. Le Conseil
va fournir un mécanisme afin de répondre aux interrogations de
tous et chacun et aux défis auxquels font face leurs
gouvernements et les gens de l'Arctique. À cette fin, les Ministres
font particulièrement référence à la protection de l'environnement
arctique et au développement durable comme moyen d'améliorer
le bien-être économique, social et culturel des citoyens de
l'Arctique.
  Cependant, comment cela sera-t-il possible quand les projets de
développement qui ne se préoccupent guère de la protection de
l'environnement et du développement durable abondent ou qu'ils
ne vont pas dans l'esprit de coopération environnementale de
l'Arctique ? En effet, comment le développement durable pourrait-
il devenir une réalité dans les différents secteurs de l'Arctique
alors que ces derniers sont de plus en plus assujettis aux
fluctuations de l'économie mondiale ? Le développement à grande
échelle se poursuit dans l'Arctique même si la joie du moment,
avec l'arrivée de la Stratégie de protection environnementale de
l'Arctique (AEPS) et du Conseil de l'Arctique, peut lui avoir
momentanément fait de l'ombre. Mais il n'y a pas que les États
nations souveraines sur un territoire arctique qui voient le Nord
circumpolaire avec un intérêt sans cesse croissant pour le
développement des ressources. L'avenir économique de l'Arctique
dépend de l'économie mondiale et de ses processus, ce qui rend
les diverses régions de l'Arctique vulnérables à la volatilité des
marchés.
  Certains pays comme le Japon, la Corée et les membres de l'Union
européenne constituent des marchés pour les précieuses
ressources de l'Arctique, positionnant ainsi solidement le Nord
circumpolaire dans l'échiquier mondial. Les régions du monde
densément peuplées et qui n'ont aucune ou peu de ressources ne
peuvent subvenir à la demande matérielle faite par leurs
populations en croissance. Ces régions se tournent alors vers
celles du Nord pour le développement des pêcheries, des
hydrocarbures et des minéraux. La Sibérie, par exemple, possède
20% des régions forestières de la planète et près de 40% des
forêts de conifères auxquelles il faut encore ajouter la Mer de
Béring qui regorge de l'une des plus grandes réserves de poissons
du monde. Cette réserve est cependant menacée par la nature
commerciale de l'industrie des pêches (une usine de
transformation du goberge a fermé ses portes en 1992 dû à la
surpêche) et les États-Unis ne constituent qu'une nation parmi
tant d'autres qui contribue à l'appauvrissement de l'écosystème de
la Mer de Béring. La surpêche par des flottes internationales de
navires de pêche produit aussi sa part d'impacts sur l'écosystème
marin dans l'Arctique européen. Il y a un besoin urgent d'en
arriver à un accord quant aux règles de gestion. Il semble
cependant que la pêche ne soit pas un point d'intérêt pour la
coopération dans l'Arctique. Il y a incertitude quant à savoir si la
pêche peut faire partie des questions touchant les ressources
renouvelables au Conseil de l'Arctique. Il y a aussi un désaccord à
propos de l'impact de la pêche commerciale. Un rapport de
l'Agence européenne pour l'environnement (AEE) souligne que le
plus grand impact sur l'écosystème marin est le fruit de la pêche
commerciale, tandis qu'un autre rapport, produit cette fois par les
Ministres du Conseil nordique, contredit l'agence européenne et
conclut que la surpêche dans les eaux européennes n'a pas
appauvri les stocks de poissons.
  Le travail entreprit par la Stratégie de protection
environnementale de l'Arctique (AEPS) et ses divers groupes de
travail et qui se poursuit maintenant sous l'égide du Conseil de
l'Arctique, se penche surtout sur l'observation des effets des
problèmes environnementaux de l'Arctique. Le travail de Conseil
de l'Arctique cherche à produire des rapports sur l'état de santé
environnementale de l'Arctique afin de fournir cette information
aux politiciens, aux scientifiques et aux communautés autochtones
afin de formuler des recommandations afin que les ministres des
gouvernements agissent pour la protection de l'environnement et
le développement durable. Bien qu'on reconnaisse ouvertement
que les problèmes environnementaux auxquels est confronté
l'Arctique proviennent de l'extérieur de la région, la coopération
environnementale dans l'Arctique nécessite une perspective plus
ouverte quant aux dimensions régionales et globales des
changements environnementaux et des pressions exercées sur la
ressource. Ce qui se produit ailleurs dans le monde est tout aussi
important pour l'Arctique. Le discours environnemental de
l'Arctique nous donne encore cette image de l'Arctique employé
comme une sorte de laboratoire naturel pour étudier les
changements qui affectent l'environnement au niveau mondial
(une phrase très utile pour justifier les demandes de subvention
de la part des fondations scientifiques et des conseils de
recherche), mais il néglige de prendre en considération
l'importance et la pertinence du phénomène de la pauvreté dans
les pays en voie de développement, de la déforestation au Népal,
des inondations au Bangladesh ou des activités des corporations
transnationales dans le sud-est asiatique pour l'avenir de
l'Arctique, ses peuples et ses ressources.
  Les plus grandes menaces à l'écologie de l'Arctique résultent de
prime abord des conditions sociales qui découlent de l'activité
humaine et de son interaction avec l'environnement dans un
contexte local, régional et finalement, mondial.
  Mais le mandat des groupes de travail entrepris sous la direction
de la Stratégie de protection environnementale de l'Arctique
(AEPS) a été d'observer les effets systémiques et cumulatifs des
processus globaux sur une région spécifique, aussi vaste fut-elle,
plutôt que d'essayer de comprendre les processus sociaux,
économiques et politiques souvent complexes mais qui sont
pourtant à la source des changements environnementaux et des
pressions exercées sur les ressources à l'échelle mondiale. Les
futures stratégies pour la protection de l'environnement de
l'Arctique et le développement durable bénéficieraient d'une vision
allant au-delà d'une perspective centrée sur l'Arctique dans le but
de conceptualiser les liens économiques, sociaux et
environnementaux entre l'Arctique et d'autres régions du globe.
  Ceux qui travaillent à la préparation d'un calendrier de travail pour
des initiatives quant à la protection de l'Arctique ont besoin de
tenir compte du processus de mondialisation. Comme c'est le cas
dans presque toutes les parties du monde, les relations sociales,
économiques et politiques, dans l'Arctique, font maintenant
vraiment partie de la mondialisation. Dans l'Arctique moderne,
presque tous les aspects de la vie sont influencés et modelés par
des événements, tendances, décisions et activités qui se prennent
ou se produisent ailleurs. Un simple coup d'oeil aux étagères bien
remplies d'un supermarché de Fairbanks ou encore une tasse de
café partagée avec des chasseurs de phoques sur la banquise
dans le nord du Groenland (alors que leurs femmes sont à
préparer des peaux de phoque qui seront ultérieurement
exportées vers le Japon) suffit à montrer comment les résidants
de l'Arctique font vraiment partie d'un réseau mondial de
production et d'échange. L'Arctique étant inextricablement liée au
reste de la planète par des rapports culturels, idéologiques et
politiques souvent complexes, il en découle le besoin de
comprendre le processus de mondialisation qui affecte la
population, la production, les changements technologiques, la
consommation et les styles de vie, et ce, dans une perspective
mondiale. Une population croissante génère une demande
considérable sur les ressources et, à cet effet, la production
mondiale croît afin de rencontrer la demande de consommation.
Ceci, inévitablement, mène à l'épuisement des ressources
naturelles comme le charbon, le pétrole, le gaz et les minéraux et
contribue à l'émission de gaz à effet de serre comme l'acide
carbonique, ainsi qu'à la perte d'habitats et l'extinction d'espèces
florales et fauniques.
  Il n'y a pas que les pays développés qui exercent une pression sur
l'environnement, poussés par leur désire de progrès économique
et le maintient de modes de vie opulents et d'une économie active
(l'industrie japonaise, par exemple, est à épuiser les forêts du
Sarawak et du Sabah), mais il y a aussi les pays en voie de
développement. L'un des héritages du colonialisme fut la création
et la formation de types de sociétés qui doivent non seulement
s'ajuster aux systèmes postcoloniaux mais dont le développement
économique suit la même trajectoire que celle des pays
développés. Plusieurs de ces pays en voie de développement
doivent trouver des façons de diversifier la base de leur économie.
Le développement industriel requiert l'utilisation d'une plus grande
quantité de pétrole, ce qui entraîne du même coup une hausse des
émissions d'acide carbonique. Non seulement les pays en voie de
développement doivent-ils nourrir leurs populations grandissantes
mais ils doivent aussi payer des dettes massives accumulées à
l'étranger, ce qui explique en partie la déforestation (comme en
Amazone). La croissance du nombre de régions urbaines dans le
monde en voie de développement produit aussi sa part de stress
sur l'environnement. Quoiqu'une majorité de la population des
pays industrialisés vive en régions urbaines, c'est la population
urbaine d'Afrique qui connaît la plus forte croissance et dès les
premières décennies du vingt et unième siècle, la moitié de la
population mondiale se trouvera sans doute dans le Sud et le sud-
est asiatique. La plupart des gens de ces régions habiteront dans
des villes qui n'arrivent pas à produire ce dont elles ont besoin
pour survivre. Les ressources des régions rurales, des océans et
de régions comme l'Arctique seront alors vitales pour un monde de
plus en plus urbain.
  L'avenir des régions arctiques est sans doute ainsi lié à des
intérêts régionaux, sociaux, politiques et économiques loin des
réalités de l'Arctique. Dans un ouvrage intitulé The Age of the
Arctic (1989), Osherenko et Young soulignent l'importance d'une
vision du développement de l'Arctique en termes de liens
transnationaux plutôt que sous le modèle classique des relations
entre le noyau et la périphérie (aussi appelé l'exploitant et
l'exploité) développé sous l'influence du colonialisme. Comme les
deux auteurs expliquent,
  Les investisseurs étrangers peuvent promettre des capitaux et des
technologies de pointes pour le développement de l'Arctique tout
en ouvrant les portes vers des marchés pour lesquels il n'y a pas
de demande au niveau local. À quelques exceptions près... cela ne
s'est pas traduit par des accords de types coloniaux ou même en
des relations néocoloniales. Au contraire, les investissements
directs de la part de corporations étrangères ou de gouvernements
sont de plus en plus nombreux et produisent un réseau complexe
de relations transnationales dans l'Arctique.
  Les pêcheries représentent un bon exemple de l'impact des
pratiques transnationales sur les modes de vie des régions ;
pratiques qui nuisent souvent au développement. Les
communautés qui dépendent des ressources marines, soit dans
l'Arctique comme n'importe où ailleurs dans le monde, sont
assujetties aux effets et influences de la mondialisation. Celles-ci
se font de plus en plus sentir dans tous les aspects de la vie
sociale, économique et culturelle. Il est important de concevoir les
divers problèmes des communautés côtières en relation avec la
restructuration mondiale des pêches, de l'équilibre et de la
compétition entre diverses espèces et selon les différentes zones
de pêche, l'internationalisation des sources d'approvisionnement
pour les usines de transformation et le marché de vente au détail.
Il faut aussi tenir compte de la redistribution des richesses
d'acteurs traditionnels comme les pêcheurs locaux et les
travailleurs des usines de transformation vers des joueurs plus
puissants à l'échelle mondiale comme les corporations
transnationales. L'une des conséquences les plus importantes de
la mondialisation sur les pêcheries se fait sentir de façon
marquante dans les modèles de gestion des ressources et dans la
transition du poisson à titre de ressource commune vers la notion
de poisson à titre de propriété privée. Ainsi, les pêcheries qui
étaient jusque-là une industrie ou même un mode de vie assujetti
au contrôle et à la réglementation des autorités locales, régionales
et nationales, sont devenues des entreprises mondiales contrôlées
par une poignée de compagnies transnationales.
  Les relations entre le commerce international, l'environnement et
le développement durable sont souvent mal compris alors que les
tendances du marché mondial influent sur l'élasticité possible de
l'utilisation des ressources renouvelables. En ce moment, les
subventions aux pêches constituent l'un des principaux obstacles à
une pêche renouvelable, nuisant au commerce et générant une
surcapacité - ce qui entraîne la surpêche et le déclin des stocks de
poissons. La possibilité de réaliser un développement durable
dépend des nations qui éliminent les subventions aux pêches. À
cet égard, l'Islande possède une longueur d'avance. Dans ce pays,
on déploie beaucoup d'efforts afin d'encourager les pêcheurs à
détourner leur attention des stocks de poissons en déclin afin de
se concentrer plutôt sur des techniques de pêche qui soutiennent
le développement durable. Cette pratique est le fruit de la
coopération internationale et de la formulation de critères
écologiques pour un 'étiquetage vert' des produits de la pêche.
  Tandis que la l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation
et l'Agriculture (FAO) travaille sur ce projet, de grandes
corporations et des organismes non-gouvernementaux (OGN) font
aussi des progrès significatifs dans le but de garantir de bonnes
habitudes environnementales via un système d'étiquetage vert. Un
bon exemple de cela nous vient du Marine Stewardship Council
(MSC), une initiative de la compagnie Unilever et du Fond Mondial
pour la Nature (WWF). Le MSC a déjà imposé ses propres normes
à l'échelle mondiale pour une pêche durable et travaille en ce
moment à stimuler la création de nouveaux marchés en
récompensant les pratiques écologiques dans le domaine de la
pêche. En un sens, cela peut poser une menace à la viabilité des
communautés des régions côtières et des industries locales dont
les activités reposent sur des denrées de la mer produites pour le
marché international. À cela s'ajoute une attention sans cesse
croissante de la part des consommateurs quant à la sécurité des
produits de la mer destinés à la consommation humaine. Bien que
le but d'un étiquetage vert soit d'assurer une cueillette écologique
des ressources, cela peut aussi contribuer à masquer certaines
distorsions du marché - l'efficacité d'un tel système ne sera
connue qu'une fois que la recherche sur l'économie en milieu
côtier et sur les techniques de pêche sera mise en contexte avec
l'internationalisation de la production et des échanges ainsi
qu'avec les activités et influences des corporations transnationales
impliquées dans le secteur des pêches.
  Les communautés des régions côtières qui dépendent de la prise
des ressources marines sont exposées aux effets combinés des
forces mondiales, du commerce international, de la restructuration
de l'industrie de la pêche et de l'élargissement de la portée des
politiques de pêche par l'action des environnementalistes. Ces
communautés doivent aussi relever un défi encore plus difficile
puisqu'elles font face à des changements de dynamiques
communautaires soit en raison du déclin de l'importance attribuée
à la parenté et à la famille dans l'organisation sociale de la pêche,
soit à cause de diverses réactions face aux changements sociaux
et aux divisions qui surgissent entre les différentes associations de
pêcheurs et à l'intérieur même de ces organisations. Jusqu'à tout
récemment, les pêcheries locales des communautés côtières du
Groenland, de l'Islande et du nord de la Norvège, étaient
traditionnellement caractérisées par des organisations de petite
échelle basées sur la famille. Ces pêcheries engendraient du
même coup des formes d'organisations sociales distinctes
reposant sur des groupes de parents proches d'où l'on recrutait les
équipages de pêche. Aujourd'hui, la réalité de plusieurs
communautés de ces mêmes régions côtières est que les gens
s'en remettent de plus en plus à des associations professionnelles
en plus ou en substitut des organisations familiales. Comme c'est
déjà le cas dans plusieurs villages de pêche de l'Atlantique Nord,
des communautés jusque-là définies pour leur intérêt lié à des
liens familiaux étroitement tissés, sont remplacées par des
réseaux d'associations dispersées selon le type de travail et où les
relations familiales sont remplacées par des liens contractuels et
plutôt formels. Ainsi, dans un Groenland qui se veut de plus en
plus technique et moderne, la chasse devient de plus en plus
commerciale alors que la pêche, elle, se transforme en une
activité de plus en plus complexe sur le plan de la technologie. Les
pêcheurs investissent dans des bateaux de plus en plus grands et
de plus en plus sophistiqués pour se lancer à l'assaut des eaux de
différents secteurs du Groenland. Quoique dans certains cas, les
frères d'une même famille choisissent d'investir ensemble dans
ces navires, leurs équipages ne sont pas toujours apparentés mais
plutôt des employés bien qualifiés qui reçoivent un salaire plutôt
qu'une partie des profits des prises.
  De plus, l'utilisation durable et renouvelable des ressources de la
mer et la viabilité des modes de vie de ces localités sont menacées
du fait que les poissons, phoques et baleines, assujetties aux
droits d'utilisation commune, sont de plus en plus perçus comme
des ressources privées et divisibles soumises à des régimes de
gestion rationnelle. En Islande, le principe d'usage commun a été
appliqué aux ressources de la mer tout au cours de l'histoire du
pays tandis qu'au Groenland, la tradition voulait plutôt que la
faune n'appartienne à personne. Dans les deux cas, comme
ailleurs dans les pêcheries de l'Atlantique Nord, un poisson ou un
mammifère marin ne devient une denrée soumise à la propriété
individuelle qu'une fois capturé et transformé en propriété privée.
Encore à ce stade, des règles complexes, des croyances et des
habitudes culturelles peuvent aller à l'encontre de la définition
exclusive de propriété individuelle. Au Groenland, le partage et la
libre distribution de la viande de phoque ou provenant d'autres
mammifères marins sont perçus comme la reconnaissance de la
dette des gens envers l'animal, à commencer par le chasseur et,
de ce fait, exprime combien nul n'a de droits exclusifs sur les
prises. Ainsi, bien que le développement de marchés pour les
poissons et les viandes du Groenland soit une source de revenus
pour les chasseurs et pêcheurs de la région, il provoque aussi des
débats à l'intérieur des communautés quant à l'utilisation
adéquate des ressources de la mer. Pour plusieurs personnes, la
chasse aux phoques et à la baleine incarne les relations qui posent
un problème en terme d'idéologique, de nature et de culture. La
chasse à des fins commerciales soulève aussi un problème face à
la question du partage et de la distribution de la viande pourtant
essentielle à la survie de la culture et de l'identité même du
Groenland puisque le partage et la distribution de viande
expriment et maintiennent le tissu social qui unit les Groenlandais.
Quoique la plus grande partie du fruit de la chasse soit partagée
entre les membres immédiats de la famille du chasseur ainsi
qu'avec d'autres proches, au Groenland de nos jours, un nombre
croissant de chasseurs vendent leurs prises de subsistance aux
usines de transformation maintenant installées dans la plupart des
villages et ce, pour des raisons mentionnées précédemment.
Quand la chasse est menée afin de pourvoir aux demandes d'un
marché qui va bien au-delà des besoins communautaires ou de
ceux de l'économie régionale, il y a ce sentiment que l'idéologie de
subsistance traditionnelle qui met l'accent sur les relations de
sang, les liens communautaires, le partage et la réciprocité, est
brouillée et changée à jamais.
  La nature changeante des politiques et des cultures qui façonnent
l'usage des ressources de l'Arctique, les conséquences de la
mondialisation et des pressions exercées sur les ressources
auxquelles s'ajoutent des valeurs politiques, culturelles et
esthétiques souvent conflictuelles en ce qui a trait à l'avenir de
l'Arctique, justifient le besoin de repenser l'Arctique en termes
géopolitiques. De récentes perspectives géographiques et
politiques sur la façon dont l'Arctique et ses régions changent sous
l'action géopolitique, économique et culturelle, ont mené à
certains progrès en ce sens. En ce début de vingt et unième siècle,
les recherches en sciences naturelles et sociales, dans l'Arctique,
prendront de plus en plus d'importance puisqu'elles tentent
d'expliquer des questions d'ordre mondial. Il est tout aussi
important de tenir compte des processus de mondialisation et de
leur impact si nous voulons comprendre l'Arctique d'aujourd'hui et
la place qui lui revient dans le contexte de la mondialisation.

Etude de la gouvernance urbaine à Bogotá


Eléments introductifs pour comprendre Bogotá – quels apports tirer des exemples
innovants étudiés en matière de gouvernance urbaine ?
PROGRAMME Analyse et évaluation de la gouvernance
DOSSIER  Bogotá, une ville sud-américaine innovante en matière de gouvernance urbaine. Quels
exemples ?
Mot-clés : citoyens Colombie ; Amérique du Sud

E n dehors des quelques mots de présentation de la ville de Bogotá, la présente fiche consiste
notamment à montrer l’intérêt d’étudier la question de la gouvernance urbaine dans des grandes
villes de pays en voie de développement en général et à Bogotá en particulier : une métropole de
plus de huit millions d’habitants confrontée à des problèmes de planification urbaine du fait d’une
croissance urbaine effrénée, trait commun de nombreuses métropoles dites « du Sud ». On peut
penser que l’analyse de la gouvernance urbaine de Bogotá s’avère instructive pour les urbanistes
du monde entier, des pays en voie de développement comme des pays développés. Etudier la
gouvernance urbaine de Bogotá renvoie à s’interroger sur le rôle des pouvoirs publics ainsi que sur
le rôle des acteurs privés, associatifs et des habitants de Bogotá. L’entretien réalisé avec David
Luna et les différents exemples de projets étudiés – le programme OSP, Metrovivienda et
TransMilenio – rendent compte des principales évolutions connues par la ville depuis le début des
années 1990 ainsi que des traits originaux de la gouvernance urbaine de Bogotá.
» lire le document complet au format PDF (PDF - 1,3 Mio)

TABLE DES MATIÈRES


 1. PROLOGUE : LES NOUVELLES PRATIQUES DE GOUVERNANCE URBAINE DANS HUIT MÉTROPOLES DITES « DU SUD »

 2. BOGOTÁ : ÉLÉMENTS CLÉ DE PRÉSENTATION POUR COMPRENDRE CE QU’EST BOGOTÁ

 3. PROBLÉMATIQUE DE L’ÉTUDE : BOGOTÁ, UNE VILLE SUD-AMÉRICAINE INNOVANTE EN MATIÈRE DE GOUVERNANCE

URBAINE. QUELS EXEMPLES ?

 4. BILAN : QUELS APPORTS DES EXEMPLES INNOVANTS ÉTUDIÉS EN MATIÈRE DE GOUVERNANCE URBAINE À

BOGOTÁ ?

Carte de la Colombie – localisation de Bogotá


1. Prologue : les nouvelles pratiques de gouvernance urbaine
dans huit métropoles dites « du Sud »

Ce travail sur Bogotá, mené par l’association Urbanistes du Monde, s’inscrit dans le cadre d’une enquête plus
globale sur l’identification de nouvelles pratiques en terme de gouvernance urbaine dans huit métropoles de
pays en voie de développement (Bogotá, Rio de Janeiro, Casablanca, Oujda, Dakar, Ouagadougou, Accra,
Cotonou). Il s’agit du fruit d’une collaboration entre Urbanistes du Monde, le Master Stratégies Territoriales et
Urbaines de Sciences Po Paris, l’Ecole Centrale de Paris et la Fondation Charles Leopold Mayer pour le Progrès
de l’Homme.

La question de la gouvernance urbaine est devenue une problématique centrale en politiques publiques. Le
mot anglais de « governance » a été introduit dans les années 1990 par des économistes et politologues
anglo-saxons ainsi que par certaines institutions internationales comme l’ONU, la Banque Mondiale et le FMI.
Son utilisation découle du constat de l’ingouvernabilité des sociétés et des défaillances des gouvernements
institutionnels en place. Le terme de gouvernance renvoie à l’art ou la manière de gouverner mais se
distingue clairement du mot « gouvernement » (défini comme une institution) : c’est la promotion d’un
nouveau mode de gestion des affaires publiques fondé sur la participation de la société civile. 1

Pourquoi étudier cette notion dans le cadre de métropoles de pays en voie de développement ? Tout d’abord,
il s’agit de l’objet d’étude et de travail de l’association Urbanistes du Monde : cette association a été créée en
décembre 2005 dans l’optique de mobiliser des urbanistes occidentaux prêts à collaborer et relever, avec les
équipes locales, les défis de la croissance urbaine des grandes villes dites « du Sud ». L’objectif de
l’association est avant tout de collaborer avec les équipes locales à travers un transfert de compétences dans
les deux sens auprès de confrères étrangers.

Par ailleurs, cette étude globale part du présupposé que l’analyse de la gouvernance urbaine dans des
métropoles de pays en voie de développement peut permettre de casser certains clichés occidentaux et d’en
retirer un apprentissage bénéfique pour les urbanistes européens. L’association Urbanistes du Monde projette
d’organiser début 2009 un forum sur la gouvernance « des métropoles du Nord et du Sud » avec la question :
qu’est-ce que les secondes ont à apprendre aux premières ?

2. Bogotá : éléments clé de présentation pour comprendre ce


qu’est Bogotá

Le travail réalisé ici s’intéresse à la question de la gouvernance urbaine à Bogotá, capitale de la Colombie. Il a
été réalisé à partir des éléments bibliographiques (documents, entretiens, photographies) rassemblés par
Carolina Valdes Restrepo, architecte-urbaniste colombienne, secrétaire générale et correspondante
d’Urbanistes du Monde pour Bogotá, chargée de DSU (Développement Social Urbain) à OPIEVOY et expert
auprès de la Commission européenne (URBACT).

La ville de Bogotá, officiellement appelée Santa Fé de Bogotá Distrito Capital, est la capitale de la Colombie.
Elle se trouve à plus de 2 600 mètres d’altitude dans la Cordillère orientale des montagnes du nord des Andes.
Depuis sa fondation, en 1538, la ville de Bogotá s’est étendue selon un processus lent et progressif sur le
plateau de Cundinamarca selon un axe nord-sud (la carrera Cra 7, aujourd’hui) et ce, jusqu’au début du
20ème siècle. Jusqu’au 16ème siècle, les limites de la ville sont restées les deux fleuves San Francisco et San
Agustín ; ces barrières naturelles ont été rompues ensuite, le développement de la ville se poursuivant
toujours selon un axe nord-sud. Le maillage orthogonal du centre historique de la ville ainsi que ses édifices
(la place principale, les établissements publics, les églises et les résidences) témoignent de la période
coloniale espagnole qui a marqué l’histoire de Bogotá. La ville est aujourd’hui caractérisée par un plan en
damier avec de nombreuses avenues orientées nord-sud (carreras) coupées perpendiculairement par des
rues (calles). La densité humaine est aujourd’hui élevée (210 habitants par hectare en 2000).

Divisions territoriales au sein de Bogotá selon le Plan d’Aménagement du Territoire de Bogotá

(POT – Plan de Ordenamiento Territorial).


carte trouvée sur le site Internet : contenido.metrocuadrado.com/ 

La ville de Bogotá compte aujourd’hui 8 550 000 d’habitants (dont plus de deux millions supplémentaires
depuis 1990). La majorité de la population est très jeune. 56% de la population a moins de 30 ans et 14% de
la population a plus de 50 ans. Chaque année, la capitale colombienne reçoit 150 000 nouveaux résidents.
Cette croissance démographique lui a permis de concentrer plus de 17% de la population nationale. Bogotá
est le plus grand centre urbain de la Colombie sur le plan démographique mais également sur les plans
économique et social : concentration de 25% du PIB, premier marché national des capitaux, premier centre
d’éducation et de services sociaux et commerciaux. Par ailleurs, son statut de capitale politique lui a donné,
depuis la Constitution de 1991, une particularité administrative. A noter que la ville est divisée en :

 vingt localités, chacune avec un maire local désigné par le maire de Bogotá pour un
mandat de quatre ans et un conseil municipal élu au suffrage universel, appelé Groupe
Administratif Local (les Juntas Administradoras Locales),
 5200 quartiers dans lesquels sont élus des comités d’habitants appelés Groupes d’Action
Communale (Juntas de Acción Comunal).

Tableau récapitulatif des différents échelons locaux institutionnels à Bogotá (réalisé par l’auteur)

Niveau territorial Elus Modalités d’élection

District Maire « principal »/Conseil municipal Suffrage universel


Administration
centrale

Localité Maire « secondaire »/Groupe Administratif Désigné par le Maire « principal » et sur


Local (JAL – Junta Administradora Local) proposition du Groupe Administratif Local
(JAL)./Suffrage universel

Quartier Groupe d’Action Communale (JAC – Junta Elu par les résidents du quartier
de Acción Comunal)

Tableau récapitulatif des différents échelons locaux institutionnels à Bogotá : (réalisé par l’auteur)
Source : Photographies issues du Site Internet www.ambafrance-co.org 

3. Problématique de l’étude : Bogotá, une ville sud-américaine


innovante en matière de gouvernance urbaine. Quels
exemples ?

Bogotá, métropole sud-américaine, est confrontée comme l’ensemble des grandes villes des pays en voie de
développement à une croissance urbaine effrénée, difficilement contrôlable, encore récemment peu planifiée.
D’après le nouveau rapport de l’ONU-Habitat L’Etat des villes du monde (édition 2008-2009), « les pays en
voie de développement sont responsables de 95% de la croissance urbaine mondiale et apportent 5 millions
de nouveaux urbains chaque mois ». La population urbaine des pays en voie de développement devrait
doubler d’ici à 2050 selon l’ONU.

Cette croissance urbaine suscite de nombreux enjeux en matière de gestion urbaine pour l’ensemble des
métropoles des pays en voie de développement. La Ville de Bogotá n’a pas échappé à la règle. La forte
croissance urbaine de ces dernières années et l’incapacité d’intervention de la part des pouvoirs publics
jusqu’aux années 1990 ont entraîné le développement, sans aucune planification, d’un urbanisme anarchique
et informel. En découlent :

 des quartiers urbanisés anarchiquement, souffrant de nombreuses carences en matière de


services, d’espaces verts et de réseaux urbains,
 une ville socio-spatialement ségrégée, dont la planification globale a été peu pensée. 2
C’est à partir du début des années 1990 que les pouvoirs publics commencent véritablement à chercher des
solutions à la croissance urbaine explosive et à ses conséquences négatives sur la structure urbaine de la ville
et la qualité de vie de ses habitants. Une quinzaine d’années après, Bogotá remporte le prix du Lion d’or à la
Biennale de Venise en tant que « Meilleure ville », récompense la plus prestigieuse de cette manifestation
internationale d’art contemporain.3 Ce prix avait pour objectif de saluer non seulement la qualité de
l’exposition mise en place pour l’occasion mais également tout le travail réalisé en matière de gestion urbaine
à Bogotá, un travail qui a donné lieu à des résultats remarquables sur un certain nombre de thématiques : le
transport public, la récupération et la valorisation de l’espace public, le logement social…

Ce ne sont pas les résultats qui étonnent le plus nos yeux d’occidentaux mais les mécanismes originaux mis
en place pour les atteindre. On peut penser que l’analyse du fonctionnement de la gouvernance urbaine de
Bogotá s’avère instructive pour les urbanistes du monde entier, des pays en voie de développement comme
des pays développés (même si les enjeux, les problèmes, les préoccupations, les contextes et les histoires
sont différents). Etudier la gouvernance urbaine de Bogotá renvoie à s’interroger sur :

 le rôle des pouvoirs publics (le politique et l’administratif) aux différentes échelles
spatiales,
 le rôle des acteurs non gouvernementaux et institutionnels : les acteurs privés,
associatifs, les habitants de Bogotá.

Le dossier réalisé sur la question de la gouvernance urbaine à Bogotá cherche à répondre à une question
principale : en quoi la ville de Bogotá, « métropole du Sud », témoigne d’un certain nombre de projets
originaux en matière de gouvernance urbaine ? Dans le cadre de ce dossier, quatre fiches ont été réalisées :

 Fiche n°1: Entretien avec David Luna, élu à la Camara pour Bogotá – Comprendre
l’évolution de la gestion urbaine de Bogotá depuis une quinzaine d’années.
o Il s’agit d’un compte-rendu d’entretien réalisé avec David Luna, un jeune politicien qui a
travaillé sur des territoires urbains à des échelles et des enjeux différents : élu d’une
localité, il est ensuite devenu conseiller de la capitale, puis élu dans une instance
d’envergure nationale. Ce compte-rendu d’entretien met en lumière avant tout le rôle-
clé des acteurs politico-institutionnels dans la gestion d’une ville telle que Bogotá.
 Fiche n°2 : Le programme « Obras con saldo pedagógico » à Bogotá. Un exemple de
gouvernance urbaine innovante dans la capitale colombienne.
o Obras con saldo pedagógico (OSP) – « Ouvrages à vocation pédagogique » en français –
est un programme d’amélioration du cadre de vie mis en place par la municipalité de
Bogotá à partir de 1995. Ce programme s’appelle Obras con Participación ciudadana
(« Ouvrages avec une forte participation citoyenne ») aujourd’hui.
o Ce programme fait figure d’exemple réussi lorsque l’on évoque la question de la
gouvernance urbaine à Bogotá dans la mesure où il présente une méthodologie de
travail innovante, fondée sur la mise en place d’accords contractuels entre organisations
sociales locales et pouvoirs publics. Les organisations sociales et civiques et, à travers
elles, les habitants sont placés au centre du programme : ce sont elles qui créent et
montent leur projet d’amélioration du cadre de vie des quartiers les plus carencés de
Bogotá.
 Fiche n°3 : Metrovivienda, une entreprise à capital public chargée de la question du
logement social à Bogotá. Une solution innovante proposée par les pouvoirs publics face à
la croissance urbaine informelle.
o Comment faire face au déficit chronique d’offre de logements dans la capitale ?
Comment l’administration publique peut-elle traiter notamment la question du logement
social dans une ville telle que Bogotá ?
o En 1999, l’administration d’Enrique Peñalosa tente de trouver une réponse à ces
questions en créant Metrovivienda, une entreprise industrielle et commerciale à capital
public chargée de la promotion du logement social. Les pouvoirs publics mettent en
place un système original dans lequel une entreprise privée à fonds publics fournit des
terrains aménagés, choisit des projets de logements proposés par des promoteurs (sous
certaines conditions de prix de vente) et accompagne les ménages dans l’achat des
logements sociaux réalisés.
 Fiche n°4 : TransMilenio ou l’organisation des transports collectifs à Bogotá. Le cas d’un
système de transports en commun exemplaire dans une métropole latino-américaine.
o TransMilenio est le système de transports en commun de Bogotá créé à partir de 1999
sous l’administration d’Enrique Peñalosa. Son étude est incontournable dans ce dossier
sur les exemples innovants de la capitale colombienne en matière de gouvernance
urbaine. TransMilenio est un système complexe fondé sur l’intervention d’acteurs publics
et privés qui travaillent de concert pour assurer un système de transport collectif massif
pour l’ensemble des habitants de Bogotá.

4. Bilan : quels apports des exemples innovants étudiés en


matière de gouvernance urbaine à Bogotá ?

Les différents projets étudiés – le programme OSP, Metrovivienda et TransMilenio – témoignent de la volonté
d’action des pouvoirs publics ainsi que du rôle plus prononcé qui est donné et que se donnent les acteurs
privés de Bogotá cette dernière décennie. L’entretien réalisé avec David Luna constitue un peu le fil rouge de
l’ensemble du dossier ; il met en évidence l’ensemble des enseignements tirés de l’étude de la gestion urbaine
de la Ville de Bogotá depuis le début des années 1990, à savoir :

 Le rôle essentiel du politique à travers les figures de maires comme Jaime Castro,
Antanas Mockus ou Enrique Peñalosa. On a le sentiment que ce sont les pouvoirs publics
qui sont avant tout à l’origine de la nouvelle dynamique que connaît Bogotá en matière de
gestion urbaine, alors que les administrations successives précédentes avaient joué un
rôle mineur, sans pouvoir faire face aux différents enjeux liés à la croissance urbaine que
connaissait la capitale.

Le projet de transports en commun de TransMilenio a par exemple été porté à bout de bras par Enrique
Peñalosa. Ces maires charismatiques ont insufflé une dynamique à la ville de Bogotá en introduisant de
nouvelles pratiques innovantes dans l’organisation de l’administration publique, pratiques qui ont dépassé la
planification urbaine traditionnelle.

Ce nouveau souffle impulsé par certains maires s’est inscrit dans un cadre politico-administratif et législatif
nouveau. Les administrations dirigeantes de la Ville se sont appuyées sur les grandes réformes
(institutionnelles, fiscales et administratives) qui découlent de la promulgation de la nouvelle Constitution de
1991.

 Le renforcement du pouvoir de l’administration centrale de Bogotá et l’émergence des


pouvoirs institutionnels locaux. La Constitution politique de 1991 a permis un
renforcement du gouvernement local, en particulier de l’administration de Bogotá : une
nouvelle structure politique, administrative et fiscale fut introduite par Jaime Castro
(1992-1994) après la promulgation de la Constitution. Les maires suivants ont poursuivi
ce processus de décentralisation et de renforcement des compétences locales de la Ville.

A l’échelle infra-administration centrale de Bogotá, de nouveaux pouvoirs publics ont émergé : les localités,
représentées par des maires locaux et les Groupes Administratifs Locaux (JAL – Junta Administradora Local).
Même si leur rôle est apparu marginal dans les différents programmes étudiés, il est pour autant non
négligeable (les JAL interviennent dans la négociation des projets locaux, comme c’est notamment le cas dans
les programmes OSP).

 La prise de conscience de l’importance d’associer les habitants à la gestion de la Ville. La


promotion d’une culture urbaine, impulsée par Antanas Mockus, a fait partie de façon
inhérente du processus global de renaissance et de rénovation de Bogotá. Une série de
mesures et de nouvelles pratiques ont été mises en place dans l’optique de :
o susciter une prise de conscience du respect des biens publics,
o accroître la participation active des habitants sur des sujets d’ordre civique,
o renforcer les normes, valeurs, règles de vie et le savoir-vivre,
o reconnaître les droits individuels comme collectifs,
o éveiller une prise de conscience identitaire et le sentiment d’appartenance à une ville et
à un quartier.

Le programme OSP (aujourd’hui appelé « Obras con participación ciudadana ») constitue une bonne
illustration de l’application de ces différents objectifs. C’est un exemple de planification urbaine avec
participation citoyenne : en collaboration avec leurs représentants élus, les habitants de plus de cent quartiers
tentent d’améliorer les conditions de vie et la qualité de l’espace public.

A noter que c’est dans le cadre du processus de décentralisation (depuis 1991) que les maires locaux, plus
autonomes, ont commencé à considérer la participation des habitants comme un enjeu de planification
urbaine. Chacune des localités doit notamment rédiger un plan de développement local participatif (« Plan de
desarrollo local participativo ») dans lequel sont définis les projets prioritaires du territoire. La réalisation d’un
tel plan nécessite la création d’espaces de dialogue entre les organisations sociales, les individus et les
pouvoirs publics.

 Le rôle du privé à travers des partenariats public-privé originaux. Les enjeux et les
responsabilités d’un certain nombre de projets (transports en commun, logement,
création d’espaces publics…) étaient tels qu’ils ont nécessité la mise place de mécanismes
de régulation et de financement innovants et originaux qui peuvent étonner du fait de
l’introduction réussie d’acteurs privés dans des programmes a priori d’essence publique.
TransMilenio et Metrovivienda sont les exemples qui illustrent la mise en place de ces
partenariats public-privé originaux et innovants du point de vue de la gouvernance
urbaine à Bogotá.

Développement urbain et aménagement


durables
Un rappel de la définition du développement durable (concept) et notre définition du développement urbain
durable et d’un projet d’aménagement durable figurent dans L’urbanisme durable: concevoir un
écoquartier paru en mars 2009 aux Editions du Moniteur et rédité en septembre 2009.

Rappelons tout d’abord qu’à l’origine, le développement durable est un objectif macroscopique à mettre en
relation avec celui de « développement », lequel repose sur la notion de progrès, tant quantitatif que
qualitatif.

La célèbre définition du développement durable donnée par Harlem Gro Brundtland, alors premier ministre
de Norvège, en 1987 : « Un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre les
capacités des générations futures à répondre aux leurs7. » a été illustrée par le non moins célèbre schéma
des trois piliers du développement durable.

Ce schéma traditionnel est parfois complété avec un quatrième pilier: la démocratie participative ou
gouvernance, celle-ci pouvant aussi être un thème commun aux trois piliers. Enfin d’autres encore ajoutent
comme 4ème pilier la culture (et l’éducation). Cependant cette représentation n’empêche pas les media de
présenter, quasiment tous sans exception (y compris bien sûr Le Moniteur), le développement durable dans
la rubrique Environnement, comme un volet de l’environnement, comme une approche transversale de
l’environnement…
Comme le souligne René Passet, « le développement durable ne constitue pas une théorie mais un
objectif ». C’est une démarche qui vise au progrès social et à la qualité de vie dans le respect des
générations futures et des contraintes économiques.
L’objectif d’une politique de développement durable est donc de favoriser la mise en place d’un
mode de production et de développement compatible avec le long terme et centré sur l’homme.

Le développement durable est défini dans la circulaire du 11 Mai 1999 sur l’évaluation des politiques
publiques :

Le développement durable « ne se réduit pas à la protection de l’environnement ou à la conduite écologique


des chantiers. Le développement durable, c’est d’abord une conception patrimoniale ou responsable du
monde dans lequel nous vivons. De ce fait, les politiques publiques doivent déterminer les conditions
d’utilisation, de préservation, de partage et de transmission de ce patrimoine collectif, dans des conditions
qui permettent la nécessaire satisfaction de nos besoins d’aujourd’hui sans compromettre celle des
générations futures… Le développement durable est un mode de croissance qui garantit, à la fois et à long
terme, le progrès économique, social et environnemental de la société. »
Contents [hide]
 1 Le développement durable des territoires
 2 L’Agenda 21 Local
 3 Le cadre de référence national pour les projets territoriaux
 4 Urbanisme durable
 5 Aménagement et renouvèlement urbain durables
 6 Evaluation
 7 Assistance à maitrise d’ouvrage
Le développement durable des territoires
Rappelons que le développement durable est une démarche qui se décline à toutes les échelles de
territoire. Il doit être (re)défini pour chacune de ces échelles, les objectifs étant différents selon le niveau
concerné. On ne peut pas traiter de la même façon un projet d’aménagement concernant une région et un
lotissement. Ni les enjeux ni les objectifs ne peuvent être similaires, et des méthodes et des outils différents
doivent donc être élaborés pour chaque type de projet, pour chaque échelle de territoire.

De même les indicateurs européens ou nationaux ne sont pas adaptés à l’échelle régionale ou
départementale, ni à celle de la ville et des agglomérations.

Voir le référentiel élaboré par le MEED en 2006 sur le site du ministère (cf. ci après).

Téléchargez :

 le DD à l’échelle d’une région avec l’exemple de la Picardie


 l’échelle du quartier : la démarche HQE2R (synthese HQE2R) ou l’OPAH durable
L’Agenda 21 Local
A l’heure actuelle en France l’outil majeur du développement territorial durable est l’Agenda 21 Local.
Un Agenda 21 Local est un projet politique de développement durable pour le 21ème siècle qui
comprend un programme d’actions.
Cependant, dans la pratique, les Agendas 21 Locaux élaborés par les villes européennes se sont le plus
souvent limités au fonctionnement des services des collectivités ou au traitement d’aspects ou de thèmes
environnementaux et n’ont pas réussi à se situer au cœur de la politique urbaine ou territoriale.

Et nous avons tous conscience aujourd’hui que les actions menées en faveur de l’environnement n’ont pas
réussi jusqu’ici à inverser la tendance d’une dégradation globale.

L’intégration des politiques territoriales, et notamment urbaines, dans une démarche de développement
durable globale est une nouvelle optique encore en devenir…

Le cadre de référence national pour les projets territoriaux


Le MEDD (Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable) a fourni fin 2005 un cadre de référence
pour les projets territoriaux de développement durable, lesquels doivent intégrer des démarches de
développement durable conformément à la stratégie nationale de développement durable, « notamment sur
les territoires bénéficiant d’une aide publique comme les grands projets urbains… » :

« Le cadre de référence pour les projets territoriaux de développement durable, comme la priorité accordée
au développement durable dans la future génération des contrats de projets Etat Régions permettent de
développer une nouvelle synergie en faveur de la mise en œuvre de la stratégie nationale de
développement durable sur les territoires. » (Circulaire du 13 juillet 2006)
Le MEDD a retenu cinq finalités essentielles de développement durable, lesquelles avaient déjà été
mises en avant dans un certain nombre de déclarations et de textes fondateurs du développement durable
dans le monde :
 la lutte contre le changement climatique et la protection de l’atmosphère , qui constitue un enjeu majeur
de solidarité entre les hommes, entre les territoires et entre les générations ;
 la préservation de la biodiversité  (qui est une composante majeure de la durabilité des écosystèmes
dont dépendent, directement ou indirectement, toutes les sociétés humaines) et la protection des
milieux et des ressources ;
 l’épanouissement de tous les êtres humains , finalité qui correspond à l’article 1 de la déclaration de
Rio : « Les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable. Ils
ont droit à une vie saine et productive en harmonie avec la nature. » ;
 la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et entre les générations , incontournables du
progrès social ;
 une dynamique de développement suivant des modes de production et de consommation
responsables, c’est-à-dire à la fois moins polluants, moins prédateurs en terme de ressources et de
milieux naturels, et limitant au maximum les risques pour l’environnement et les conditions de vie sur
terre. Cette dynamique nécessite un changement des modes de production et de consommation
actuels.
Cette circulaire rappelle aussi les critères de développement durable d’un projet ou d’un programme
d’actions définis par le MEDD en Octobre 2005 :
 la participation de la population et des acteurs du territoire dès l’amont du projet et tout au long de sa
mise en œuvre,
 l’organisation du pilotage ou du processus décisionnel qui doit tenir compte de l’articulation des niveaux
(échelles) de territoire et du principe de subsidiarité,
 la transversalité de la démarche, laquelle s’exprime notamment par le décloisonnement des cultures et
des méthodes de travail,
 un processus d’évaluation, laquelle doit être partagée d’une part et pensée dès l’amont du projet
d’autre part,
 une stratégie d’amélioration continue.
Enfin cette circulaire précise les champs d’actions concernés, parmi lesquels figure l’urbanisme.
Voir également le site du ministère :
www.developpement-durable.gouv.fr
Urbanisme durable

On distingue :

 l’urbanisme réglementaire : le droit de l’urbanisme face au droit de la construction, les textes


réglementaires structurants tels que la Loi Solidarité et Renouvellement Urbains (SRU) régissant les
documents tels que les Plans Locaux d’Urbanisme et d’autres documents structurants le territoire tels
que le Schéma de Cohérence Territoriale (SCoT), les lois régissant les Plans de Déplacements Urbains
(PDU), les Plans Locaux de l’Habitat (PLH )…, les textes de loi thématiques (sur l’eau, l’énergie, la
gestion des risques, l’évaluation environnementale des documents d’urbanisme…), le Code des
Marchés Publics, etc.
(Voir la page Documents d’urbanisme).
 de l’urbanisme opérationnel : les projets d’aménagement eux même.

Rappelons la directive européenne 2001/42/CE qui porte sur l’intégration de l’environnement dans les
documents d’urbanisme. Certains pays ont profité de la transposition de cette directive dans leur cadre
législatif pour intégrer le développement durable et non pas seulement l’environnement.

Il n’y a pas de définition officielle de l’urbanisme durable mais nous rappelons les définitions de l’Union
Européenne et proposons une définition dans L’urbanisme durable : concevoir un écoquartier
Aménagement et renouvèlement urbain durables

En ce qui concerne l’aménagement (et le renouvellement urbain qui est de l’aménagement de territoire déjà
urbanisé), il faut distinguer différentes échelles d’intervention :

 l’aménagement de proximité (une rue ou une place par exemple) ;


 l’aménagement d’un petit territoire (un quartier, un lotissement, une ZAC) ;
 l’aménagement d’une zone importante (une ville) ;
 et enfin l’aménagement structurant (un bassin versant).La porte d’entrée vers le développement
durable est souvent l’environnement et l’aménagement a intégré la prise en compte de préoccupations
environnementales depuis de nombreuses années.

Cependant le développement durable (ou plutôt la prise en compte de « l’environnement et du


développement durable » comme nous le voyons souvent curieusement mentionné) ne fait que commencer
timidement à être un critère de sélection des projets d’aménagement.

Il n’y a pas de définition officielle de l’aménagement durable.

Selon nous (cf. L’urbanisme durable paru au Moniteur en 2009 et Ecoquartier mode d’emploiparu en


2009 chez Eyrolles), l’aménagement durable se caractérise par la mise en œuvre d’une démarche projet,
laquelle doit être l’expression d’une volonté politique et doit se caractériser par une nouvelle façon de
penser et d’agir qui se manifeste par:
1/ une approche « systémique » :
 raisonnant en cycle : cycle de l’eau, cycle de l’énergie et cycle des matériaux
 raisonnant en écosystème : gestion des déchets, gestion des flux ;
 et centrée sur la cohérence économique, ce qui a aussi à voir avec la faisabilité économique des
projets.
2/ une démarche qui associe le sensible (architecture) et l’ingénierie technique et économique(performance
et évaluation) ;
3/la prise en compte du long terme : économie de ressources naturelles, investissements évités (réseaux),
prévention et lutte contre le changement climatique ;
4/ une nouvelle gouvernance :
 la participation des différents acteurs et particulièrement des habitants citoyens ;
 des partenariats multiples (public-privé, entreprises-clients, etc.) et de nouvelles règles de marché
(partenariat public-privé, dialogue compétitif, etc.) ;
 une nouvelle culture urbaine, pluridisciplinaire et transversale.

On remarquera que ni les piliers du développement durable ni les 5 finalités du MEED ne structurent cette
définition (contrairement aux définitions et référentiels traditionnels) mais nous analysons les thèmes au
regard de chacun des piliers du développement durable. En effet, pratiquant cette référence aux piliers
depuis 1998 dans nos analyses de territoire pour différentes collectivités en France, nous en sommes
arrivés à la conclusion que commencer par cette approche par pilier n’est pas opérationnel. Quant à la
structuration de la démarche sur les 5 finalités du MEED elle ne permet pas d’éviter les redondances tout
en n’étant pas exhaustif…

Téléchargez l’analyse de différents projets de quartiers durables : fichier aménagement-durable

Téléchargez des guides régionaux pour l’aménagement durable des territoires :


 Recommandations pour un aménagement durable des territoires en Picardie par La Calade pour
la DRE Picardie (2006)
Evaluation
L’évaluation et le suivi sont obligatoires dans une démarche de développement durable. Le processus
d’évaluation doit être défini en amont du projet afin de contribuer à la décision et au suivi de chacune des
phases du projet.

Par ailleurs, en période de crise économique, il est important d’élaborer des outils d’évaluation et de ne pas
se focaliser uniquement sur l’environnement (en mesurant les impacts sociaux et économiques des
solutions environnementales retenues) comme ceci est fait (voire même parfois préconisé) aujourd’hui en
France.

Il s’agit d’aborder en même temps les trois piliers du développement durable (et non pas l’un après l’autre
comme le font quasiment tous les bureaux d’étude), de se doter de nouveaux outils d’analyse, de
financement, d’évaluation (analyse coût/efficacité notamment), de nouvelles méthodes de travail.

Les collectivités (et a fortiori les petites communes) peuvent avoir recours pour ce faire à un assistant à
maîtrise d’ouvrage (AMO) Développement Durable (à dinstinguer de l’AMO HQE pour les bâtiments).

Voir différents modèles et outils d’évaluation dans L’urbanisme durable  : concevoir un écoquarier
Voir Concevoir et évaluer un projet d’écoquartier
Assistance à maitrise d’ouvrage

La complexité des projets d’une part et la diversité des thèmes abordés d’autre part  soulignent l’importance
d’un Assistant à Maîtrise d’œuvre ou d’Ouvrage et celui-ci ne peut a priori pas être un architecte
(contrairement à l’AMO HQE qui lui est souvent un architecte)

En effet une qualité durable du projet peut être, dans la phase actuelle de méconnaissance du
développement durable, assurée par une mission d’Assistance à Maîtrise d’Ouvrage Développement
Durable ou AMO DD. Ceci est vrai à toutes les échelles territoriales et pour différents documents
stratégiques (Plan Local pour l’Habitat par exemple ou Charte de l’environnement et du Développement
Durable, projet d’agglomération, etc.), y compris pour les documents réglementaires (SCoT, PLU).

Le maître d’ouvrage comme le maître d’œuvre peuvent avoir recours, notamment pour les premiers
projets lancés avec une volonté de mise en œuvre de démarche de développement durable, à
l’assistance d’un expert en développement durable.

La mission doit donner au maître d’ouvrage l’assurance que l’ensemble des thèmes sera bel et bien abordé
et que la démarche sera réellement transversale. Cette mission doit intervenir le plus en amont possible
d’un projet, quel qu’il soit, quelle que soit son échelle territoriale. L’AMO peut alors aider le maître d’ouvrage
à définir ses objectifs et surtout à les structurer, à finaliser le corpus qui structurera le projet et il expliquera
les raisons de la mise en œuvre d’une démarche de développement durable.
L’intégration du développement durable doit elle-même être durable et ne pas s’arrêter au projet en
question.

L’action à mener doit favoriser sa reproductibilité dans les futurs projets et démarches du maître d’ouvrage.
Pour pérenniser l’action de développement durable, il est nécessaire de favoriser la mise en place de
comportements respectueux d’un développement durable. Le renforcement de ces comportements ne vise
pas uniquement à modifier les comportements individuels. Il s’agit avant tout de pérenniser une démarche
qui vise à renforcer les finalités d’un développement durable (démarche participative accrue,
développement équitable et solidaire, des démarches transversales favorisant les stratégies partenariales et
les synergies entre acteurs).

Cette assistance n’a pas pour objectif sa pérennisation et, une fois la démarche mise en place et
assimilée par les différents responsables en interne, cette assistance ne se justifie plus. On peut
imaginer qu’une assistance relativement importante soit nécessaire la première fois et que celle-ci soit
beaucoup plus légère la seconde fois et limitée à la phase initiale de définition et de fixation des
performances à atteindre dans les différents thèmes retenus comme prioritaires et les modes d’évaluation
(pour chacun des thèmes d’une part et pour le projet lui-même d’autre part) puis qu’enfin aucune assistance
ne soit plus nécessaire.
Bibliographie
 Concevoir et évaluer un projet d’écoquartier 
 Projets territoriaux de développement durable et Agendas 21 locaux, MEDD, octobre 2005
 Projets territoriaux de développement durable : Orientations et pistes pour l’action, MEDD, février 2006
 Un cadre de référence pour les projets territoriaux de développement durable et les Agendas 21 locaux,
MEDD, 2006
 Mémento des décideurs, avec la participation de Philippe Outrequin, 2ème édition, Mission
Interministérielle à l’effet de serre, 2002
 L’urbanisme durable : concevoir un écoquartier, Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin,
Edition du Moniteur, 2009
 Intégration du développement durable dans les projets d’aménagement et de renouvellement urbain,
sous la direction de Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin, Edition La Calade, 2004 (10 € +
frais de port) ; (téléchargez le fichier Aménagement durable)
 Analyse de projets de quartier durable en Europe, 2004, La Calade (16 € + frais de port)
 Ecoquartier mode d’emploi, Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin, Edition Eyrolles, 2009

Le défi des villes durables


0 contributions

Publié le 26 avril 2013.





Le défi des villes durables D. SHEN / REUTERS

Chine Un accord avec la France sur le développement urbain durable doit être renouvelé ce
vendredi

Avec l'exode rural et l'industrialisation, la Chine a connu en vingt ans un développement urbain sans
précédent. Le taux d'urbanisation est passé de 26 % en 1990 à 50 % en 2011, et devrait atteindre 62 %
en 2030. Ce boom spectaculaire oblige le pays et son 1, 339 milliard d'habitants à relever le défi de
construire des villes durables, sous peine de les voir exploser sous le poids démographique et la
pollution – devenue un sujet d'exaspération nationale –, et de ruiner tout effort pour réduire leur impact
sur l'environnement.

Expertise française

C'est le sens de l'accord de coopération franco-chinois sur le développement urbain durable (DUD)
signé en 2007. Il doit être renouvelé pour cinq ans ce vendredi par la ministre de l'Ecologie, Delphine
Batho, qui accompagne François Hollande en Chine. Concrètement, la France conseille la Chine pour
construire des villes durables, c'est-à-dire cohérentes et écologiques. Un site a été choisi comme
laboratoire d'expérimentation d'une stratégie de développement urbain durable : le Grand Wuhan, une
métropole de 30 millions d'habitants située au centre de la Chine. La ville de Wuhan est bien connue
dans l'Hexagone puisqu'elle accueille de nombreuses entreprises françaises, dont PSA. Pour la France,
l'un des enjeux consiste à en faire la vitrine de son expertise, faire école et récupérer des marchés.

L'organisme Urba 2000, spécialisé dans l'urbanisme, travaille depuis 2010 sur le projet. «Les autorités
locales sont soumises à une forte pression foncière, explique sa directrice, Caroline Maurand. On les
aide à réfléchir à la façon d'organiser le territoire.» Mais convaincre de la pertinence d'une vision à long
terme est parfois compliqué face à des maires – nommés par le pouvoir – qui sont jugés sur les
investissements à court terme. Selon Emmanuel Fourmann, responsable Asie à l'Agence française de
développement, qui travaille aussi sur Wuhan, «le pays a pris conscience» de la nécessité de faire des
villes durables. «Mais, observe-t-il, entre la théorie et la pratique, il y encore du chemin.»

 Faustine Vincent
■ Coopération

La ministre de l'Ecologie, Delphine Batho, devrait signer ce vendredi, dernier jour du voyage du président
Hollande en Chine, un accord de coopération sur la protection de l'environnement.
Le reste de l'actualité internationale en vidéo


Des commandos armés pro-russes ont pris de facto le contrôle de la Crimée


La crise en Ukraine fait paniquer les marchés financiers


Ukraine: des tirs en direct pendant un duplex sur BFMTV - 03/03


Oscars : “12 Years a Slave” sacré meilleur film, Gravity triomphe avec 7 statuettes !


Ukraine : défection du chef de la marine


L’Occident entre pression et tentative de dialogue avec la Russie


La colère des ultra-orthodoxes israéliens


Ouverture du procès d’Oscar Pistorius à Pretoria

Ukraine : Les sites stratégiques de Crimée assiégés


Rassemblement sur le Maïdan : Kiev refuse de se rendre


Harold à la carte: Crise en Crimée (Ukraine): les plans cachés de Kiev et de Moscou - 02/03


Showbiz: 86ème cérémonie des Oscars: "Ernest et Célestine", nommé pour l'Oscar du meilleur film d'animation - 02/03


A Donetsk, pro-russe et pro-Kiev dans la rue


Ukraine: "Nous ne sommes pas encore à la veille d'une guerre en Crimée" - 02/03


“Poutine ne sortira pas victorieux”, estime l‘écrivain Boris Akounine
NOUS RECOMMANDONS
 Nathalie Kosciusko-Morizet a adressé au «Monde» un e-mail furieux
 L'hôpital de Grenoble dément la mort de Michael Schumacher
 60 sec pour comprendre les imprimantes et scanners 3D (Le Collectif)
 70 ans, Catherine Deneuve en 70 photos (Vanity Fair)
 Oscars: «Gravity» rafle presque tout, McConaughey et Blanchett sacrés
 Face à l’éparpillement du développement urbain, affronter les paradoxes de la ville
aujourd’hui, plurielle mais « commune ».

 L a « France des villes » ne s’oppose pas à la « France des champs ». Cette distinction n’a plus

aucune pertinence, ni statistique, ni économique et encore moins sociétale. La France est résolument
urbaine, l’Europe également, quant au vaste monde, il s’urbanise là où l’urbain ne s’est pas encore
totalement déployé… Mais, s’étonnera l’habitant de La Rochelle, Perpignan, Colmar ou Menton :
« Ma ville existe, je m’y promène, je peux en faire le tour, alors que me répondez-vous ? » Chaque
ville apparaît comme une entité administrative, avec son périmètre géographique bien délimité, sa
population dénombrée, ses élus représentatifs de la diversité des sensibilités politiques, une
autonomie fiscale et budgétaire, une vie locale rythmée par la Quinzaine commerciale, le Festival de
jazz et la Farandole des enfants des écoles. Elle ne ressemble à aucune autre : celle-ci est balafrée par
une obscène autoroute, celle-là se donne des airs de cité-jardin et sa voisine exhibe ses grands
ensembles délabrés comme autant de stigmates sur le corps d’un saint. En ce sens, la ville est bien,
comme l’écrit Antoine Furetière dans son Dictionnaire universel(1690), l’« habitation d’un peuple
assez nombreux ».

 DE LA VILLE À L’URBAIN
 Pour qu’il y ait de la ville, il faut donc du nombre. Combien ? Deux mille, pour la France, répond
l’Insee. Mais à cette réalité statistique – qui diffère d’un État à un autre [1] –, il convient
heureusement, et Furetière l’écrivait aussi, d’ajouter un certain « esprit ». Au-delà du quantitatif, la
ville, c’est aussi et surtout un art de vivre et celui-ci est toujours local, lié à un site, un climat (dans
tous les sens du terme), une histoire (attestée ou imaginaire), un système relationnel plus ou moins
nourri avec d’autres villes et campagnes et une culture revendiquée. Avec la production de masse, la
mécanisation de l’agriculture, l’extension des réseaux, l’automobilisation et la généralisation d’un
mode de vie entièrement dépendant du marché, les sociétés contemporaines se sont non seulement
urbanisées – exode rural, accroissement du nombre de villes, expansion des aires métropolitaines,
villes millionnaires… -, mais sont passées, en une poignée de décennies, de la ville à l’urbain [2].
Conséquences ? Subordination totale des campagnes à une économie de marché globalisée,
concurrence effrénée entre les villes pour conserver ou attirer des industries, diffusion des
comportements et des valeurs citadins à l’ensemble des populations ( via les migrations, le tourisme,
l’école et la télévision), éparpillement de la ville en des territoires urbains de plus en plus ductiles.
 Il n’y a pas disparition de la ville, mais son enveloppement par l’urbain qui submerge, comme une
vague, tous les territoires et y impose, peu ou prou, son ordre. Ce processus est à l’œuvre à l’échelle
planétaire, de manière inégale selon les continents (l’Afrique, par exemple, en est au début alors que
l’Asie entre dans la phase d’achèvement) et avec des manifestations diverses selon les combinaisons
de ses éléments constitutifs. Aussi constatons-nous une unité du processus d’urbanisation et une
diversité de ses formes de réalisation. Il faut se garder de toute généralisation et surtout accepter les
coexistences (mégalopolisation et maintien des petites villes, multiplication des gated
communities sans disparition de la maison individuelle ou du programme de logements sociaux…),
les décalages (telle région s’équipe en NTCI tout en valorisant ses « traditions », telle global
city abrite aussi des taudis à proximité de ses hôtels de luxe, telle capitale d’un État du sud inaugure
de somptueux équipements et légalise du bout des lèvres les bidonvilles qui prolifèrent sur son
territoire), les résistances (la France inscrit dans la loi la « mixité sociale », tel élu se bat contre la
privatisation de certains services publics…), les métissages inattendus et les rejets. Le danger d’une
uniformisation de la vie citadine est bien réel et s’y opposer demande beaucoup d’imagination,
d’opiniâtreté et d’actions.
 La mégalopolisation du monde semble irréversible : on dénombre actuellement plus de 400 villes de
500 000 à un million d’habitants, près de 200 villes d’environ 2 millions d’habitants et plus de 20 qui
dépassent les dix millions d’habitants ! Ces mégalopoles constituent les hauts lieux de l’économie de
production (tant matérielle qu’immatérielle), et au classement par taille démographique, il convient
d’ajouter une classification par « produit intérieur brut urbain » [3]. L’urbanisme de ces gigantesques
conurbations se plie souvent aux dessins des réseaux techniques, contrôlés par une poignée de
multinationales et identiques d’une ville à une autre. Reem Koolhaas (concepteur d’Euralille)
annonce la fin de l’urbanisme et fait l’apologie du « plateau technique » (tour-bureau, centre
commercial, gare Tgv, rocades autoroutières…) sur lequel on vient se brancher et se débrancher
selon l’offre et la demande. On consomme alors de l’urbain comme on consomme un logement, une
voiture ou un rasoir jetable. Quant à l’architecture des bâtiments publics, des équipements
touristiques (hôtels, musées, parcs de loisirs, quartiers patrimonialisés, etc.), des centres
commerciaux, des aéroports, des logements pour « riches », elle ne se soucie aucunement du lieu.
Elle fait image, image d’une surmodernité, enfin libérée de la tyrannie du lieu. Le but recherché
consiste justement à nier le lieu, afin croit-on, de se trouver partout chez soi ou du moins dans les
mêmes représentations ! La screen city n’appartient pas au seul studio de cinéma, elle se construit
sous nos yeux en même temps que se consolide un bidonville ou qu’un quartier privatisé, vidéo
surveillé, s’entoure de lourdes grilles, à Istanbul, Le Caire ou Buenos Aires…
 A côté de cette mégalopolisation que personne ne contrôle vraiment et qui apparaît comme une
négation de toute intervention concertée, de tout projet politique pour une Cité digne de ce nom, l’on
découvre des quartiers autogérés, des expériences d’auto-construction, des chantiers-écoles, mille et
une micro-opérations, modestes, peu spectaculaires, qui néanmoins démontrent que l’humain ne se
laisse pas facilement broyer par les rouages bien huilés de la machine-à-marchandiser toutes les
relations entre l’homme et le monde, entre l’homme et l’homme, entre l’homme et la nature. La
préoccupation de plus en plus explicite pour un « développement durable », nonobstant le flou d’une
telle notion, son poids idéologique et sa capacité à récupérer le discours critique des écologistes et
altermondialistes, ne peut que contribuer à une redéfinition de l’habitabilité de la ville, de ses formes
de sociabilité et de sa vocation à fabriquer de l’aménité.

 LA FRANCE URBAINE
 L’urbain appartient à un autre vocabulaire que « ville », « banlieue », « faubourgs », il ne décrit pas
une quelconque unité administrative – du moins pas encore -, mais un mode de vie, ses territoires et
ses temporalités [4]. Dans le cas français, avec les récentes lois (Chevènement en 1999, Voynet en
1999 et Solidarité Renouvellement Urbain en 2000), les municipalités sont invitées à unir leurs
destins en un « projet de territoire » qui satisfasse un réel « développement durable ». Ainsi la
décentralisation (engagée avec les lois Deferre en 1982) se trouve confortée et renforcée par
l’intercommunalité (« communautés de communes ou d’agglomération », « communautés
urbaines »), nouvelle échelle des décisions en matière de transports en commun, d’urbanisme, de
logements sociaux, d’équipements et de services collectifs, etc [5]. Ce n’est pas la mort des 36 000
communes, mais une profonde redistribution des cartes du jeu démocratique et administratif.
 Simultanément, la plupart des villes et villages en croissance démographique le sont par leurs
franges. Des lotissements pavillonnaires s’installent à la marge des villes, remplissent les « blancs »
entre une ville et un centre commercial quelque peu distant. L’urbain diffus résulte de nombreux
facteurs, difficile à hiérarchiser et à mesurer : le désir de nature, l’ambition de construire « son »
pavillon, le refus de la ville dense – bruyante, grouillante et violente –, le bon état des routes (80 %
des ménages, en France, sont dorénavant motorisés), le confort relatif des voitures (l’automobiliste
« moyen » dépense chaque année 4 880 euros en frais d’entretien et de transport)… En vingt ans, le
temps moyen de transport quotidien n’a guère varié (hors Ile-de-France), mais la distance parcourue
a doublé ! On n’hésite plus à se loger à une heure en train de la capitale, bénéficiant ainsi d’un
emploi bien rétribué, de la possibilité de faire ses courses à Paris et de profiter de ses spectacles, tout
en résidant dans une ville de taille moyenne (ah, le parfum de la Province…), à la vie moins agitée et
où les enfants se rendent à l’école en bicyclette. Mais cette image publicitaire de la jeune-famille-
dynamique-et-souriante dissimule le véritable temps de transport (en plus du train et de ses aléas, il y
a au départ un peu de voiture et à l’arrivée, quelques stations de métro !), la fatigue, les relations
sociales distendues, un emploi du temps alourdi, l’entretien du jardin et du pavillon (« Dans une
maison, il y a toujours quelque chose à faire… »). Bref, seules les personnes ayant un métier aux
horaires souples, peu de contraintes familiales et dont l’usage des nouvelles technologies de
l’information et des télécommunications autorise un réel éloignement de l’entreprise optent pour un
tel scénario. Le télétravail n’a pas connu l’engouement attendu, il est vrai que l’habitat ne l’a pas du
tout intégré (aucune « pièce » étudiée pour, aucune maison domotique…) et que le « travailleur »
ressent l’irrépressible besoin de passer au bureau pour y rencontrer ses collègues. Rester chez soi
pour travailler exige une attention motivée et une organisation bien particulière de son temps.

 ASSEMBLAGE DE MODES DE VIE


 La France urbanisée déménage, avec le vieillissement de sa population, elle migre vers le sud, le
long des côtes et près des Alpes. Mais partout les aires urbaines s’étalent. Ce phénomène n’est pas
nouveau [6]. On a parlé de « rurbanisation » en 1976, de « péri urbanisation » quelques années après,
on a surtout voulu en minorer l’importance afin de légitimer la politique technocratique impulsée par
l’État, avec les grands ensembles, puis les métropoles d’équilibre et enfin les villes nouvelles. On a
même favorisé la création d’Agences d’urbanisme (la première ouvre à Rouen, en 1963) dont une
des missions consistait à « maîtriser » l’extension des villes. Il ne s’agit pas de dénigrer l’urbanisme
des grands ensembles, critiquer la philosophie de la Datar (créée en 1963) ou contester les villes
nouvelles, mais d’analyser le pourquoi et le comment d’une telle urbanisation et d’en comprendre les
imperfections, les errements et les rares réussites. La marée pavillonnaire n’est pas, en soi,
inquiétante, comme le croyaient avec obstination et aveuglement les hauts fonctionnaires, à
commencer par Paul Delouvrier [7]. Même si les « styles » (!) les plus fréquents sont esthétiquement
affligeants et si l’on doit regretter l’absence d’architectes bien attentionnés – je connais des maisons
en série, à côté d’Eurodisney, avec un premier étage mansardé et inhabitable pour des adultes et un
jardinet scandaleusement exigu ! –, le plus dommageable vise l’extérieur de ces constructions, leurs
à-côtés. L’habitat, aux yeux des résidents – y compris ceux des barres et des tours –, concerne non
seulement la parcelle et son habitation mais aussi les cheminements environnants, les services de
proximité, les espaces publics, bref, tout le territoire du quotidien urbain. Or le promoteur se soucie
avant tout de la rentabilité de son opération et beaucoup moins de son insertion dans un paysage ou
de ses relations avec les bâtiments ou les espaces verts voisins. Il en est de même pour un lotisseur
qui isole plus qu’il ne raccorde le chapelet de ses nouvelles maisons à la voirie ou au bâti existants.
 L’urbanisation française récente confirme, à la fois, l’éparpillement de la ville au-delà de ses limites
administrativo-historiques, et la revitalisation de certains centres, grâce entre autre à la politique de
renouvellement urbain engagée depuis une dizaine d’années et au tracé d’un transport collectif,
comme le tramway, dont l’impact dépasse sa fonction première et provoque toute une cascade
d’embellissements et d’opérations urbaines. L’urbain résulte de ces diverses morphologies et de cet
assemblage, pas toujours évident, de modes de vie dominés par le paradoxe (je veux être en ville
mais à la campagne, seul mais en contact avec la foule, dans le silence mais aussi le bruit…). Un tel
urbain pose crûment la question de sa gouvernance démocratique et donc de ses limites. Le maire de
Montpellier envisageait de faire payer un droit d’entrée au citadin domicilié dans un village
avoisinant mais venant régulièrement utiliser ses services sportifs et culturels. En tant que
banlieusard, fréquentant Paris, je ne serais pas opposé à élire, non seulement le maire de ma
commune, mais celui de Paris, sachant à quel point les destins de ces deux entités sont liés.
 Si les autorités locales et territoriales ne s’en préoccupent pas plus, nous verrons se multiplier les
enclaves sécurisées, repliées sur elles-mêmes. L’implantation d’un domaine privatisé me paraît la
négation même de l’urbain, de la gratuité et de la liberté qui le caractérisent. Cela revient à priver le
citadin ordinaire d’une déambulation sans interdit. Et, inversement, cela prive l’habitant de cette
petite « forteresse » d’une rencontre avec l’Autre. La ville et l’urbain assurent la cohabitation de
populations différentes précisément parce qu’elles favorisent et entretiennent le brassage. L’étrangeté
de l’étranger est la meilleure garantie de mes propres différences. Tout accès contrôlé engendre une
exclusion. Le sentiment d’insécurité conforte donc la demande d’habitats regroupés et protégés. Sans
contrecarrer totalement cette tendance planétaire, il est possible de ménager les lieux afin de les
rendre plus aimables et sûrs. Une bonne signalétique, un souci pour le paysage et les plantations, une
préférence affirmée pour les piétons et cyclistes, une attention méticuleuse portée au site et à son
entretien, la redynamisation de mini-centres urbains avec services et commerces, constituent
quelques ingrédients du confort urbain. Si le logement futur ne comportera plus seulement des pièces
monofonctionnelles et monogénérationnelles, et deviendra réactif et modelable, l’urbanisme des
centres denses comme celui de l’urbain diffus devra tenir compte de la pluralité changeante des
usages et de leurs temporalités désynchronisées.
 Un tel urbanisme adapté au cas par cas nécessite des expérimentations, des quartiers-témoins, des
forums d’initiatives habitantes, des débats entre professionnels, des fêtes, etc. Il ne sera un Bien
commun que si et seulement si, il engage chacun envers autrui.

 1 / François Moriconi-Ebrard, L’urbanisation du monde depuis 1950, coll. «Villes», Anthropos,


1993. 
2 / Thierry Paquot (dir.) « Le XXe siècle de la ville à l’urbain », Urbanisme, n° 309, 1999. 
3 / Rémy Prud’homme, « Mégavilles : économie et gestion », in Thierry Paquot (dir.) Le monde des
villes, panorama urbain de la planète, éd. Complexe, 1996. 
4 / Thierry Paquot, « Que savons-nous de la ville et de l’urbain ? », in Marcel Roncayolo, Jacques
Lévy, Thierry Paquot, Olivier Mongin, Philippe Cardinali, De la ville et du citadin, Parenthèses,
Marseille, 2003. 
5 / Maurice Goze, « Décentralisation et intercommunalité », Informations sociales, n° 104, 2002. 
6 / Jean-François Gravier, « L’essaimage urbain en France et en Europe », Vie sociale, n° 10, 1964 ;
Melvin Webber, L’urbain sans lieu ni bornes (1964, traduction de l’anglais), éd. de l’Aube, 1996 ;
« Penser la non-ville et la non-campagne de demain », Françoise Choay, La France au-delà du
siècle, éd. de l’Aube-Datar, 1994 ; « L’étalement péri-urbain : perspectives internationales », Gabriel
Dupuy et Patricia Sajous, Données urbaines 3, sous la direction de Marie-Flore Mattei et Denise
Pumain, Anthropos, 2000. 
7 / Paul Delouvrier, « L’avenir de l’urbanisation : Problème de civilisation », Semaines sociales de
France (Brest, 1965), L’homme et la révolution urbaine, Chronique sociale de France, Lyon, 1965.

L'air de la ville, celui d'une mobilisation de tous, des citoyens, des associations , des acteurs
économiques et politiques? Sûrement. Pourtant, ici, la vie urbaine conduit à l'isolement, à la
formation de ghettos. Ailleurs, un vivre ensemble se construit, qui conjugue mobilité et
enracinement.
Si la prudence invite à ne pas poser un diagnostic ferme sur les origines et les conséquences de la crise
du mois de novembre 2005, un fait massif s'impose: cette crise ne partait pas de nulle part, elle était
ancrée, inscrites, dans des territoires que l'on a souvent décriés et identifiés comme étant des zones
sensibles, à risque... Le malaise avait donc une dimension particulière, les événements s'inscrivaient
dans un espace, et donnait à voir ces zones comme étant problématiques, comme pouvant faire l'objet
d'une bataille de sens : que veut dire habiter, résider, demeurer ? Dans des zones dont il est difficile de
partir, parce qu'il est difficile d'obtenir un emploi, parce que les transports en commun sont
déficients, parce que les systèmes de communication les plus élémentaires sont défaillants, la résidence
peut devenir un refuge ou une prison. Elle peut constituer le centre d'une communauté ou les débuts
d'un ghetto. Elle est ambivalente.

REPOUSSOIRS OU ABRIS ?
Le sens de ces mots, - habiter, résider, demeurer -ne se décide pas uniquement à l'intérieur de ces quartiers. Le
regard porté de l'extérieur, soit à travers les médias et la télévision dont on...

CET ARTICLE EST RÉSERVÉ AUX ABONNÉS. VOUS POUVEZ L’ACHETER À L’UNITÉ OU PAR QUESTION EN DÉBAT.
REVUE-PROJET.COM OFFRE L’ACCÈS GRATUIT AUX ARTICLES DE MOINS DE 2 MOIS OU PLUS DE 4 ANS.

Pour accéder à cet article :


abonnez-vous en ligne. 

ou ajoutez à votre panier. 

Si vous êtes déjà abonné, identifiez-vous.

L’expérience d’un Chargé de la vie des quartiers dans une commune de banlieue.
Projet – Qu’est-ce que la politique des quartiers dans une ville de banlieue, et quel développement vise-t-
elle ?
Patrick Norynberg – Dans le domaine de la politique de la ville, il y a deux piliers : l’urbain et l’humain.
Ma sensibilité va plutôt à l’humain. J’ai eu à travailler sur la transformation structurelle du territoire, mais
cela ne suffit pas. Les habitants de ce territoire ne pourraient y vivre longtemps si l’on ne s’attaque pas aussi
aux questions sociales. Personnellement, je milite pour un développement social, économique et urbain : par
exemple, la régie de quartier que nous avons montée est une entreprise de forme associative, elle doit créer
de l’emploi dans le quartier, elle est un tremplin pour les habitants. L’économique et le social y sont très liés.
Projet – Quelle est l’importance du développement de la vie des quartiers, mais aussi de leur ouverture
comme lieux de rencontre, d’histoire et de démocratie ? N’y a-t-il pas, à l’inverse, un risque de
morcellement entre quartiers, des écoles ghettos, etc. ?
Patrick Norynberg – Dans une ville de banlieue parisienne qui a 200 ans d’existence, toute une part de la
population, installée depuis longtemps, y est fortement attachée. Mais l’histoire n’est plus très marquante.
Nous essayons de travailler sur l’identité de ville. Bien sûr, des quartiers se révèlent plus compliqués que
d’autres, car ils ont été construits trop rapidement, sans véritable réflexion : on y a vécu correctement, tant
qu’il y avait du travail et du lien social fort, puis tout s’est disloqué.
À partir de 1994, nous nous sommes inscrits dans la politique de la ville, et, au Blanc-Mesnil, les quartiers
nord ont été classés prioritaires. Les nuisances sonores liées à l’autoroute et à l’aéroport du Bourget, un
habitat social très concentré avec une population en situation précaire…, ces handicaps importants n’ont pas
aidé au développement de ces quartiers. En même temps, la proximité de deux aéroports favorise l’activité
économique et Blanc-Mesnil est à dix minutes de Paris. Mais ces atouts du territoire, comment en tirer
parti ? Les habitants ne profitent pas assez des potentiels de la ville : des entreprises innovantes s’implantent,
mais ne peuvent embaucher des habitants qui n’ont pas le niveau de qualification requis.

Un autre quartier, au sud de la commune, est entré dans la politique de la ville avec le nouveau contrat de
ville 2000-2006. Le quartier s’est appauvri peu à peu ; ce n’est pas un quartier où l’habitat social est
concentré, mais les jeunes n’ont plus envie de s’y installer quand ils quittent la maison parentale. Il nous faut
agir sur cette question. Dans un quartier du nord de la ville, pour inverser ce type de tendance et donner
envie de vivre et de rester dans le quartier, nous travaillons à son désenclavement, par la construction de rues
traversantes, car beaucoup de rues se terminent en impasse contre la route nationale ou sont coupées par
l’autoroute. Il y a aussi des voies privées, appartenant aux bailleurs sociaux, alors qu’elles ont une vocation
publique (des bus y circulent). Concrètement, en concertation avec les habitants et les bailleurs, nous avons
entrepris de faire passer certaines de ces voies dans le domaine public, de les rénover et du même coup de
redéfinir la ville. Au-delà de l’aspect purement urbain, nous travaillons à soutenir les initiatives des habitants
du quartier : propositions des associations, de groupes informels, des centres sociaux (il y a deux maisons de
quartier). Elles constituent des leviers pour changer les rapports entre les gens. Nous subventionnons, par un
fonds de participation, leurs actions en matière d’animation – fête ou repas de quartier, fresque sur un mur,
fleurissement d’un espace, etc. Nous voulons aussi renforcer la présence publique dans le territoire : dans la
partie située au-delà de l’autoroute, il y a dix ans, le service public, ce n’était que l’école. Nous avons créé
un centre social, et un pôle de service de santé avec un point permanent de sécurité sociale, un service de
vaccination, un centre de planning familial, des permanences de conseillères de la Caf. Cette implantation a
représenté un grand progrès pour les habitants. Mais, en dix ans, le quartier a vu arriver une nouvelle
population immigrée, d’Asie et d’Afrique, avec des problèmes d’adaptation à la vie locale et d’apprentissage
de la langue : le grand progrès que je viens d’évoquer se révèle donc insuffisant et il faut sans cesse
recommencer le travail !

Dans un autre quartier, le grand ensemble des Tilleuls, on a reconstruit et doublé le volume de la maison de
quartier, qui est devenue l’équipement phare de la ville et joue un véritable rôle fédérateur dans le quartier et
au-delà.

Projet – Vous tentez de recréer une dynamique de quartier. Mais les habitants ont-ils l’impression de
participer à l’ensemble de la ville et comment ? Les équipements qui sont installés peuvent-ils concerner
les habitants d’autres quartiers, afin que des frontières n’apparaissent pas ?
Patrick Norynberg – Les équipements en question sont en effet des maisons de quartier, mais on ne vous
demande pas votre adresse quand vous venez vous inscrire à une activité ! Une de mes missions est le suivi
de l’action de toutes les maisons de quartier pour les mettre en cohérence. La ville souhaite qu’elles
rayonnent dans toute la ville : et, en effet, des habitants des quartiers sud participent aux activités de la
maison du quartier des Tilleuls et inversement. Nous préparons actuellement la création d’une nouvelle
maison de quartier, maison pour tous, avec un pôle de service public à l’intérieur. Les habitants participent
depuis le début à ce projet (c’est d’ailleurs eux qui ont réclamé ce nouvel équipement) ; ils aident à chercher
des financeurs, ils discutent sur les plans, les espaces, etc. La démarche, assez exemplaire, rayonne bien au-
delà du quartier.
Cela correspond à ce que souhaite la ville, c’est-à-dire ne pas cantonner les gens dans leurs îlots. Nous
faisons la guerre aux logiques de quartier trop marquées. Les pratiques de proximité ne doivent pas exclure
une identité de ville. J’insiste sur ce point : bien sûr, il existe des frontières (nous avons déjà parlé de
l’autoroute), et des relations de voisinage parfois difficiles, mais il n’y a pas – comme dans d’autres
communes de banlieue – de phénomènes de ghettoïsation qui nous mèneraient tout droit à une société de
communautarisme à l’américaine.

Projet – Y a-t-il un théâtre au Blanc-Mesnil, ou les habitants se déplacent-ils à Paris ou ailleurs pour
leurs activités culturelles ?
Patrick Norynberg – Le Forum culturel se trouve en centre ville. Il réalise un travail considérable avec les
équipements de quartier et les écoles, notamment grâce à des artistes en résidence qui interviennent dans les
quartiers pour sensibiliser les habitants au spectacle vivant. De même, une autre action très intéressante a été
entreprise depuis quatre ans avec un foyer de travailleurs migrants  au nord de la commune : l’État, la
municipalité, le bailleur et les résidents participent à un projet de développement global de cet équipement.
Dans ce cadre, les professionnels de la culture intervenant dans la ville viennent travailler avec les résidents
du foyer : cela se conclut par une grande fête, puis les résidents vont participer à une représentation sur la
grande scène du Forum culturel. Cet exemple illustre les incessantes allées et venues entre le quartier et la
ville.
Projet– Mais ce sont des professionnels qui se déplacent : les habitants d’autres quartiers se déplacent-ils
aussi, et pas seulement pour aller au centre ville ?
Patrick Norynberg – Bien sûr : cela se vérifie si l’on examine la fréquentation des maisons de quartier.
Certes, le noyau dur des participants à la plupart des activités correspond aux habitants du quartier proche,
mais il y a des gens qui viennent de l’autre bout de la ville parce que l’activité ou le service proposé les
intéresse. Pour sa part, la municipalité fait tout pour qu’il en soit ainsi et que le brassage culturel et
intergénérationnel ait lieu.
Car la notion de quartier comporte des dangers. Il y a quelque temps a été votée une loi sur la démocratie de
proximité avec l’obligation de créer des conseils de quartier. Le texte de loi indiquait qu’on parlerait dans
ces conseils exclusivement de ce qui concerne le quartier, je n’y étais pas très favorable : c’est un piège. Pour
moi, dans les conseils de quartier, on doit parler de tout car, aujourd’hui, la planète est un village, et les
décisions de l’Onu, de l’Omc ou d’autres instances ont des répercussions dans la cage d’escalier ou sur le
trottoir devant son logement ou son pavillon. Ce n’est pas simple, mais nous essayons quant à nous de mettre
cela en pratique dans ce que nous avons appelé les « conseils de ville et de voisinage » qui sont au Blanc-
Mesnil nos conseils de quartier. À l’origine, au moment du nouveau contrat de ville, j’ai proposé aux élus
que les habitants soient consultés en amont des projets : nous avons alors utilisé les « Ateliers de l’avenir »
réunissant les habitants pendant deux jours. Ils se sont exprimés sur ce qui fonctionnait ou ne fonctionnait
pas dans leur environnement proche ou dans la ville, ce dont ils rêvaient pour leur ville, sans contrainte. À
partir de cette réflexion sont nés des projets qui vivent encore aujourd’hui, comme celui de la future «maison
pour tous» Jean Jaurès dans le quartier sud.

Au terme de leur travail, les habitants ont présenté les résultats aux élus qui se sont alors engagés à les
rencontrer régulièrement pour parler de ce qui avait été fait : ainsi sont nés les conseils de ville et de
voisinage. Il y en a maintenant trois au Blanc-Mesnil et un quatrième est en gestation : ce sera ainsi le
passage à la généralisation de la vie démocratique partout dans notre ville.

Projet – Dans le centre ancien du Blanc-Mesnil, n’y a-t-il pas une tradition de militantisme ouvrier qui a
permis un maillage associatif, moins présent dans les nouveaux quartiers ?
Patrick Norynberg – Les habitants de notre ville sont en effet en majorité ouvriers et employés. La ville
connaît donc une grande tradition combative. Les élus sont aussi de gauche – il doit bien y avoir 70 ans que
la ville est gérée par un maire communiste. Mais la réalité se transforme : j’ai constaté, à propos d’une
opération de démolition reconstruction dans une cité peuplée d’ouvriers maghrébins de chez Citroën,
combien la mémoire individuelle et collective des ouvriers s’effiloche et que la génération suivante ne
connaît plus cette tradition ouvrière : du coup, la vie associative perd de son dynamisme, car elle repose sur
des personnes vieillissantes. En ce qui concerne les associations, si on enlève les clubs sportifs, les
regroupements de parents d’élèves et de locataires, il reste quelques associations qui vivent vraiment. Blanc-
Mesnil n’est pas une exception : les difficultés de la vie associative sont assez générales. La ville est un lieu
d’échange où il faut mieux vivre ensemble : nous refusons d’être une ville dortoir. Blanc-Mesnil est aussi
une ville ouverte au monde, nous multiplions les jumelages « coopération », avec l’Éthiopie et avec
l’Algérie.
Projet – Mais quelle stratégie peut/doit mener la ville pour éviter que les habitants ne connaissent que la
gare et le centre commercial géant, hors de leur quartier ?
Patrick Norynberg – Dans notre ville, il n’y a pas de centre commercial géant. Mais il vrai que nous devons
lutter fermement pour valoriser le commerce traditionnel face au centre commercial de Paris-nord, tout
proche, qui transforme le rapport des gens à la ville. L’action municipale consiste à soutenir le commerce de
proximité et à développer l’activité économique. Nous sommes encore en discussion avec le ministère de la
Ville pour créer une zone franche urbaine à partir de janvier 2004 : cela va permettre de faire venir de
nouvelles entreprises, qui recruteront du personnel même non qualifié dans ces quartiers, et de travailler avec
le réseau emploi formation sur la commune pour élever le niveau de qualification des habitants, afin qu’ils
aient accès à ces nouveaux emplois.
Une ville qui fonctionne, c’est une ville qui arrive à faire vivre ensemble la proximité et une vision plus large
des choses et du monde. « Penser global, agir local », d’autres l’ont dit et je m’approprie cette formule qui
me convient bien ; une partie de mon travail consiste à faire que la ville ne soit pas exclusivement un lieu de
consommation à grande échelle : de biens, de services, d’élus, etc. On peut faire une superbe ville, mais si la
vie sociale des habitants n’est pas brillante, on n’en sortira pas : c’est tout l’enjeu des opérations de
renouvellement urbain et de la loi Borloo, en partie intéressante mais à laquelle manque l’aspect humain. Au
Blanc-Mesnil, l’action que nous menons donne, je pense, des résultats ; on n’y connaît pas de moments de
frictions entre jeunes de différents quartiers et on n’entend pas parler d’appropriation de leur territoire par les
habitants des cités. C’est un bon signe, mais il faut rester vigilant.

L’urbanisation
L'urbanisation est causée à la fois par la croissance démographique de la population urbaine et par l'exode rural. Au cours du dernier demi-siècle, il
y a eu un exode rural massif et l'urbanisation (c'est-à-dire la concentration des populations et des activités dans des zones considérées comme
urbaines) devrait se poursuivre durant une bonne partie du XXIe siècle. Les principaux facteurs de cette urbanisation sont les possibilités et les
services qu'offrent les zones urbaines, en particulier dans les secteurs de l'emploi et de l'éducation et, dans certaines parties du monde,
notamment en Afrique, les conflits, la dégradation des terres et l'épuisement des ressources naturelles (PNUE, 2000).

Les villes jouent un rôle majeur non seulement en tant que fournisseurs d'emplois, de logements et de services, mais aussi en tant que centres de
culture, d'apprentissage et de progrès technique, portails ouvrant sur le reste du monde, centres industriels pour la transformation des produits
agricoles et l'industrie manufacturière et concentrations d'activités rémunératrices. Il y a une forte corrélation entre le niveau de développement
humain et le niveau d'urbanisation d'un pays (CNUEH, 2001b). Toutefois, l'expansion rapide des villes se traduit aussi par une aggravation du
chômage, une dégradation de l'environnement, l'insuffisance des services urbains, la surcharge des infrastructures et les difficultés d'accès à la
terre, aux ressources financières et à des logements convenables (CNUEH, 2001b). C'est pourquoi la gestion durable de l'environnement urbain
sera un des grands défis de l'avenir.

Il y a une forte corrélation entre le niveau d'urbanisation et le revenu national - les pays les plus avancés sont déjà pour l'essentiel urbanisés - et
dans presque tous les pays, la production des zones urbaines représente la majeure partie du produit national brut (PNB). Par exemple, la
production de Bangkok représente 40 % celle de l'ensemble de la Thaïlande, alors que seuls 12 % de la population vivent dans cette ville (CNUEH,
2001b). À l'échelle mondiale, les villes produisent en moyenne 60 % du PNB.

L'accroissement rapide de la population urbaine mondiale, avec le ralentissement de la croissance de la population rurale, a entraîné une
redistribution majeure de la population au cours des 30 dernières années. En 2007, la moitié de la population mondiale vivra dans des zones
urbaines, alors que la proportion ne dépassait guère le tiers en 1972 ; en 2050, 65 % de la population habiteront les villes, alors qu'en 1950 65 %
de la population mondiale vivaient dans les campagnes (Nations Unies, 2001a). En 2002, quelque 70 % de la population urbaine du monde vivront
en Afrique, en Asie ou en Amérique latine (CNUEH, 2001a).

L'évolution la plus frappante à l'heure actuelle est celle du niveau de l'urbanisation dans les pays en développement : la proportion de la
population urbaine est passée d'environ 27 % en 1975 à 40 % en 2000, ce qui représente une augmentation de plus de 1 200 millions de
personnes (Nations Unies, 2001b). En outre, il y a tout lieu de penser que cette évolution se poursuivra au cours des 30 prochaines années, ce qui
ajoutera 2 milliards d'habitants à la population urbaine des pays aujourd'hui en développement. Ces moyennes mondiales cachent des différences
complexes entre les régions en matière de croissance et d'évolution des villes. Le pourcentage annuel d'augmentation de la population urbaine
aura tendance à diminuer dans toutes les régions sauf en Amérique du Nord - voir figure ci-dessous (Nations Unies, 2001b).

Distribution de la population
mondiale (%) selon la taille de
l'agglomération, 1975 et 2000

Zones
  < 1 million 1-5 millions > 5 millions
rurales

  1975 2000 1975 2000 1975 2000 1975 2000

Ensemble du 62,1 53,0 25,1 28,5 8,0 11,6 4,8 6,9

monde

Régions 30,0 24,0 46,8 48,1 13,9 18,5 9,3 9,5

développées

Régions en 73,2 60,1 17,6 23,7 6,0 10,0 3,2 6,3

développement

Source : D’après la Division de la population du Secrétariat de l’ONU, 2001a.

Durant la deuxième moitié du XXe siècle, le nombre et la taille des mégalopoles (villes de plus de 10 millions d'habitants) et des autres grandes
agglomérations ont considérablement augmenté, et la répartition géographique de ces grandes villes a changé : en 1900, neuf des dix plus
grandes villes du monde se trouvaient en Amérique du Nord et en Europe, alors qu'aujourd'hui seules trois des plus grandes villes du monde (Los
Angeles, New York et Tokyo) sont situées dans des pays développés. Cependant, la majeure partie de la population urbaine vit encore dans des
villes de taille moyenne ou petite (voir tableau), qui, dans la plupart des pays, croissent aujourd'hui plus vite que les agglomérations les plus
grandes (Nations Unies, 2001b).

Population urbaine (% Accroissement annuel


du total régional) par de la population urbaine
région (%)

Près de la moitié de la population mondiale vit aujourd'hui dans les zones urbaines. L'urbanisation se poursuit dans toutes les régions, mais son rythme diminue dans
L'Afrique et la région Asie et Pacifique sont les régions les moins urbanisées du la plupart d'entre elles, sauf en Afrique où il reste à peu près stable et en Amérique
monde, tandis que l'Amérique du Nord, l'Europe et l'Amérique latine sont les
régions les plus urbanisées. du Nord où il a tendance à augmenter.

Source : D'après la Division de la population du Secrétariat de l'ONU, 2001b. Source : D'après la Division de la population du Secrétariat de l'ONU, 2001b.

Une rue de Bogotá – vue sur la colline de Montserrat.


Source : Site Internet – duchesse.viabloga.com 

NOTES
1
: La définition du terme de gouvernance selon Patrick Le Galès, directeur de recherche CNRS au CEVIPOF et

professeur de sociologie et sciences politiques à Sciences Po Paris : «  la gouvernance peut être définie

comme un processus de coordination d’acteurs, de groupes sociaux, d’institutions pour atteindre des buts

discutés et définis collectivement. La gouvernance renvoie alors à l’ensemble d’institutions, de réseaux, de

directives, de réglementations, de normes, d’usages politiques et sociaux, d’acteurs publics et privés qui

contribuent à la stabilité d’une société et d’un régime politique, à son orientation, à la capacité de diriger, à la

capacité de fournir des services et à assurer sa légitimité. »

2
: A noter que les inégalités socio-spatiales sont encore aujourd’hui très prononcées à Bogotá. Pour la

première fois, l’ONU a appliqué le coefficient utilisé pour mesurer les écarts de revenus aux villes. L’égalité est

parfaite quand l’indicateur est égal à zéro. Plus l’indicateur est proche de 1, plus les inégalités sont

importantes. Plusieurs villes d’Amérique latine et d’Afrique subsaharienne dépassent 0,6, un seuil déjà

considéré comme très élevé. Le coefficient est de 0,7 à Bogotá en 2008.

3
: La Biennale de Venise est une manifestation internationale d’art contemporain au cours de laquelle des prix

sont décernés afin de récompenser la meilleure participation nationale à l’exposition. La Biennale de Venise de

2006 a attribué à Bogotá le Lion d’or en tant que « Meilleure ville », récompense la plus prestigieuse de la

manifestation.

» lire le document complet au format PDF (PDF - 1,3 Mio)

VOIR AUSSI
 Comprendre l’évolution de la gestion urbaine de Bogotá depuis une quinzaine d’années
 Le programme « Obras con saldo pedagógico (OSP)  » à Bogotá
 Metrovivienda, une entreprise à capital public chargée de la question du logement social à Bogotá
 TransMilenio ou l’organisation des transports collectifs de Bogotá
 Etude de la gouvernance urbaine à Bogotá

Vous aimerez peut-être aussi