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Faculté de Médecine d’Alger

Département de Médecine
3ème année de Médecine

LES IMMUNOGLOBULINES

Pr N.KECHOUT

Année universitaire: 2018/2019


INTRODUCTION

§ Les immunoglobulines (Ig): molécules effectrices de l’immunité


spécifique humorale.
§ Sont des glycoprotéines douées d'activité anticorps, c'est-à-dire
capables de se lier spécifiquement à un déterminant antigénique
unique, ou épitope.
§ Elles sont présentes dans le plasma, les liquides extra-vasculaires et
les sécrétions.
§ Elles sont produites par les lymphocytes B, mais seulement excrétées
leur descendance plasmocytaire.
§ Un lymphocyte B donné produit des Ig qui ne portent qu'une seule
spécificité anticorps.
§ Existent sous la forme: soluble dans les liquides biologiques
Peuvent être membranaires: BCR
INTRODUCTION

§ Les anticorps sont les médiateurs de l'immunité humorale, dont les


cibles sont extra-cellulaires. Ils remplissent leur rôle grâce à trois modes
d'action:
- neutralisation des micro-organismes et de leurs toxines,
- opsonisation facilitant l'ingestion par les cellules phagocytaires
(phagocytose)
- activation du complément conduisant à l'opsonisation et parfois la lyse
des micro-organismes.
INTRODUCTION
Ø En 1949, Kabat et Tiselius: immunisation de lapins avec de l'ovalbumine
sérum du lapin électrophorèse albumine, et des globulines αβγ

Ø Formation de précipité (sérum + ovalbumine)

Ø Electrophorèse du reste : diminution significative du pic des γ globulines

Ø La fraction γ globuline contient donc les anticorps.

après immunisation +
ovalbumine
Les immunoglobulines se recrutent donc dans les zones βγ
après séparation électrophorétique des protéines sériques.
STRUCTURE DES IMMUNOGLOBULINES

Ø Les travaux de PORTER et EDELMAN ayant


permis de déterminer la structure des Ig leur a
valu le prix Nobel 1972

Ø C'est la molécule d'IgG1 qui a servi de modèle


de description.
IgG: structure symétrique en Y, constitué de
deux chaînes lourdes et de deux chaînes
légères
STRUCTURE DES IMMUNOGLOBULINES

• Les Ig ont une structure pluri-catenaire, elles sont constituées de:


- 2 chaînes polypeptidiques de 446 aa (PM 50-80 kD):
appelées chaînes lourdes (Heavy) « H »
- 2 chaînes polypeptidiques de 220 aa (PM ≈23 kD):
appelées chaînes légères (Light) «L »
• Les Ig sont formées de:
- 2 chaînes L identiques entre elles
- 2 chaînes H identiques entre elles

• Au niveau de chaque chaine, on retrouve:


- Une partie NH2 terminale: variable
- Une partie COOH terminale: conservée appelée région
constante
Notion de domaines:

Chaque région d'homologie (un segment d’environ 110 acides aminés): VL, CL,
VH, CH1, CH2 et CH3/CH4; forme un domaine compact stabilisé par un pont
dissulfure.

Janus kuby
STRUCTURE DES IMMUNOGLOBULINES

NH2 NH2
2 chaînes L

2 chaînes H

COOH COOH
Dr Gene Mayer
STRUCTURE DES IMMUNOGLOBULINES

NH2 NH2

On compte cinq types de chaînes lourdes:


Gamma (γ) IgG
Alpha (α) IgA
Mu (μ) IgM
Delta (δ) IgD
Epsilon (ε) IgE
Deux types de chaînes légères:
Kappa (κ)
Lambda (λ)

Les chaînes H: 1 VH
(CH)n n=3 pour γ, α, δ
n=4 pour μ, ε

Les chaînes L: 1VL


1CL
COOH COOH
STRUCTURE DES IMMUNOGLOBULINES

NH2 NH2

partie Nt: variable

partie Ct: constante

COOH COOH
STRUCTURE DES IMMUNOGLOBULINES

Expériences de PORTER et EDELMAN (1959)

La digestion enzymatique par la PAPAINE:


• Trois fragments de tailles égales (≈50kD) chacun:
- 2 Fab (Fragment antigen binding)
- 1 Fc (Fragment cristallisable)

La digestion enzymatique par la PEPSINE:


- 1F(ab)’2 (Fragment antigen binding)
- p Fc’ (polypeptides issus du clivage du Fc)
Digestion enzymatique
LA DUALITE STRUCTURALE ET FONCTIONNELLE DES Ig

Extrémité Nt variable
Paratope (VH-VL)

La région charnière (Hinge)

Extrémité Ct constante
Fc (CH2-CH3) et CH4 pour IgM
et IgE
PROPRIETES FONCTIONNELLES DES Ig

1) La fonction de reconnaissance:
Ø Est portée par les Fab (VH+VL)
Ø Organisation du site actif: le paratope est constitué de:
CDR (Complementarity Determining Regions)
FR (Framework: parties conservées dans la région
variable)
2. Les fonctions effectrices: sont assurées par le fragment Fc
HETEROGENEITE DES IMMUNOGLOBULINES

Les Ig sont caractérisées par une très grande hétérogénéité qui s’exprime à trois niveaux

1. ISOTYPIE 2. ALLOTYPIE 3-IDIOTYPIE

§ Caractères communs § Permet de distinguer les Ig de § variations associées au site


à tous les individus deux individus ou de groupes de liaison à l’antigène et
d’une même espèce. d’individus au sein d’une même liées à la partie variable
§ Déterminants espèce. des chaînes lourdes et
localisés sur le § L’existence de déterminants légères des Ig (zones
domaine constant antigéniques (allotypiques) hypervariables).
des chaînes lourdes présents au niveau de régions
(classe et sous-classe) constantes des chaînes γ, des
ou des chaînes chaînes α et des chaînes κ .
légères (type).
HETEROGENEITE DES IMMUNOGLOBULINES
1. ISOTYPIE
• Les déterminants isotypiques sont portés par les domaines
constants des chaines lourdes et légères.
• Ils définissent les classes et sous classes d’Ig.
• On distingue:
Pour la chaine H: Gamma (γ) IgG
(γ1) IgG1
(γ2) IgG2
(γ3) IgG3
(γ4) IgG4
Alpha (α) IgA 9 isotypes
(α1) IgA1
(α2) IgA2
Mu (μ) IgM
Delta (δ) IgD
Epsilon (ε) IgE

Pour la chaine L: kappa κ et lambda λ 2 isotypes


2. ALLOTYPIE:

• Les marqueurs allotypiques sont des déterminants


antigéniques qui permettent de distinguer les Ig de deux
individus ou groupes d’individus au sein d’une même espèce.

• Les allotypes sont présents au niveau des les domaines


constants des IgG, IgA et les chaînes légères kappa.

• Bases biochimiques: substitutions d’acides aminés au


niveau des chaines polypeptidiques γ, α et κ.
3. IDIOTYPIE

• Déterminants antigéniques (séquences) uniques retrouvés


au niveau des régions hypervariables (CDR) des chaînes légères
et des chaînes lourdes (peuvent être confondus avec les
séquences impliquées dans le site actif).

• Peuvent être localisés en dehors du site actif (région «


framework)
Différentes classes d’Ig
PROPRIETES DES IMMUNOGLOBULINES

1. Les IgG

• Représentent 75 à 85% des Ig sériques humaines.


Soit, une concentration sérique de 8 à 18 g/l chez l’adulte.
• Elles sont constituées de: γ2κ2 ou γ2λ2
• 4 sous classes: γ1, γ2, γ3, γ4
γ3 contient la région charnière la plus longue
• Les IgG possèdent au niveau du CH2 (γ1, γ3) un site de fixation
pour le C1q (activation du complément par la voie classique)

• Les IgG ont la propriété de se fixer aux cellules phagocytaires:


- Opsonisation (Fcγ-RI,Fcγ-RII,FcγRIII)
- ADCC (FcγRIII)
• Les IgG assurent le transfert de l’immunité maternelle .
Production d’Ac de classe IgG

Ø À la naissance, le taux des IgG est supérieur ou égal à celui


de la mère (sauf prématuré). La décroissance des IgG
maternelles explique l’hypogammaglobulinémie observée de
façon physiologique au cours du 2ème – 3ème mois).

Ø La synthèse des IgG commence à partir du 2ème – 3ème


mois et atteint celui de l’adulte à l'âge de 2 ans.

Ø Les IgG sont les Ac produits lors d’une réponse immune


secondaire (Ac d’hyper immunisation).
2. Les IgM

• Représentent 10% des Ig sériques humaines. Soit une


concentration sérique d’environ 1g/l
• Pentamériques
• L’unité de base μ2κ2 ou μ2λ2
• Les 5 monomères sont reliés entre eux par des ponts
disulfures et par des chaînes J (chaîne J: 15kD, 129aa).
• Peuvent activer le complément par la voie classique:
- pouvoir lytique
- pouvoir agglutinant > IgG
• Ne traversent pas la barrière placentaire
• Premiers Ac produits lors d’une réponse immune primaire.
Production d’Ac de classe IgM

· Chez le fœtus:
La réponse en Ac de classe IgM commence après la 32ème
semaine.

· Après la naissance :
- Le taux des IgM augmente régulièrement pour atteindre les
valeurs de l’adulte vers l'âge de 1 an.
- La réponse immunitaire en Ac de classe IgM lors de la :
Primo-infection
Primo -vaccination
3. Les IgA

• Représentent 15% environ des Ig circulantes. Soit, une


concentration sérique de 2 à 4 g/l.

• Peuvent se présenter sous forme monomérique ou dimérique

• Deux sous classes: IgA1 et IgA2

• La chaîne α1 a une région charnière longueà sensible aux enzymes


protéolytiques

• La chaîne α2 a une région charnière courte à résistance aux


enzymes protéolytiques
IgA sérique : L’IgA1 est majoritaire (IgA1 : 80 % et IgA2 : 20 %).

IgA sécrétoire (IgAs): L’ IgA2 est majoritaire. puisque la region charniere est court et resistant au enzymes proteolytique

Les IgAs constituent chez l’homme, l’essentiel des Ig présentes


dans la salive, les larmes, le colostrum, le lait, les secrétions
nasales, bronchiques et gastro-intestinales. Assurent l’immunité
des muqueuses.
L’IgAs a une structure dimérique: 2 molécules de base, réunies
entres elles par une chaîne J et un composant sécrétoire.
• Chaine J (joining):
Glycoprotéine de jonction de PM 16000 Da synthétisée par les
plasmocytes.

• Composant sécrétoire :
Glycoprotéine de PM 75000 Da synthétisée par les cellules
épithéliales intestinales et servant de récepteur pour les IgA
dimériques. Il confère à l’IgAs une grande résistance à l’action
des enzymes protéolytiques des différentes sécrétions.
Production d’Ac de classe IgA

Ø À la naissance, la synthèse des IgA démarre 3 semaines


après la naissance et augmente pour atteindre 75% du
taux de l’adulte à 2 ans.

Ø Les IgA n’atteignent les valeurs de l’adulte que vers la


dixième année.
Production des IgA sécrétoires
4. L’ IgD
• Existe dans le sérum à l’état de traces.
• A été mise en évidence grâce à l’étude de Myélome multiple à
IgD
• A une région charnière longue: grande sensibilité à la protéolyse
• Elle est intra vasculaire
• Pas de fonction connue
• Elle constitue avec l’IgM le BCR sur les LB naifs.
5. L’ IgE
• Existe à l’état de traces dans le sérum humain normal
• Sa concentration sérique augmente en cas de :
- Atopie
- Parasitoses
- Prise de certains médicaments
• C’est l’Ig la plus glycosylée
• C’est l’Ig qui a la demi vie la plus courte
• Elle est Homocytotrope.
Fonction des IgE

LE PONTAGE DE DEUX IgE ADJACENTES INDUIT LA DEGRANULATION


DES MASTOCYTES, AVEC LIBERATION DE MEDIATEURS VASO ACTIFS -
HISTAMINE ET SEROTONINE

LA REACTION INFLAMMATOIRE DEMARRE


En résumé

Propriété/Activité IgG1 IgG2 IgG3 IgG4 IgA1 IgA2 IgM IgE IgD

Poids moléculaire 150.000 150.000 150.000 150.000 160.00- 160.00- 9OO.000 190.000 180.000
600.000 600.000
Isotype γ1 γ2 γ3 γ4 α1 α2 μ ε δ

Taux sérique normal 9 3 1 0,5 3 0,5 1,5 0,003 0,03


(mg/ml)
Demi vie dans le 23 23 8 23 6 6 5 2,5 3
sérum in vivo (jours)
Activation de la voie + +/- ++ - - - +++ - -
classique du
complément
Passage + +/- + + - - - - -
transplacentaire
Expression - - - - - - + - +
sur le LB naif

Liasison au ++ +/- ++ + - - ? - -
récepteur du Fc
des phagocytes
Transfert à travers la - - - - ++ ++ + - -
muqueuse
Dégranulation des - - - - - - - ++ -
mastocytes

Les niveaux d’activité sont indiqués comme suit : ++ = élevée ; + = modérée ; +/- = faible ; - = aucune ; ? = Douteuse.
PRODUCTION DES IMMUNOGLOBULINES
ONTOGENESE DES IMMUNOGLOBULINES
Bases génétiques
On estime que le système immunitaire des mammifères peut générer plus de 1010 d’anticorps
différents.

Cette énorme diversité de la structure des Ig dérive d’un système génétique capable de créer
cette formidable diversité.

Les réarrangements de DNA, intervient au cours de la différenciation des Lymphocytes B et entraîne la


formation d’un bloc de gènes fonctionnels codant pour les chaînes légères et lourdes d’Ig.

Les chaînes légères et lourdes sont codées par trois familles multigéniques distinctes localisées sur
des chromosomes différents:
chaînes λ → chromosomes 22 . chaines κ → chromosomes 2 . chaînes lourdes → chromosomes 14

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LES GÈNES DES IMMUNOGLOBULINES
Ø Les chaînes légères sont codées par 3 segments de gènes : un gène
V (pour variable), un gène J (pour jonction) et un gène C (pour constante).
Ø Les chaînes lourdes sont codées par 4 gènes: un gène V (pour variable),
un gène J (pour jonction), un gène C (pour constante) et un gène
D (pour diversité).
Ø Au niveau des précurseurs de la lignée B, ces gènes sont en configuration
germinale, autrement dit ces gènes sont non fonctionnels étant éloignés les uns
des autres.

Chaîne Chromosome V D J C

Kappa 2 p12 300 0 5 1

Lambda 22 q11 30 0 >6 >6

Chaînes 14 q32 1000 15 5 9


lourdes
Mécanisme général de la recombinaison VDJ
Ø Les recombinaisons permettent d’assurer la diversité des immunoglobulines,
indispensable à la reconnaissance spécifique d’une très grande variété de
peptides antigéniques.

Ø Elles correspondent à un mécanisme de réarrangements somatiques au sein


des gènes codant pour les chaînes lourdes et légères, permettant ainsi ce
polymorphisme. On observe la formation de locus de gènes réarrangés. Ces
réarrangements se faisant au hasard, ils augmentent la diversité des
immunoglobulines ; on parle de diversité combinatoire.

Ø Ces recombinaisons sont dirigées par des séquences RSS (pour Séquences
Signales de Recombinaison) qui bordent chaque gène.

Ø On observe tout d’abord une recombinaison VDJ au niveau des gènes codant
la chaîne lourde : juxtaposition d’un gène D avec un gène J, puis d’un gène V
avec la juxtaposition DJ précédente.

Ø Par la suite on aura une recombinaison VJ au niveau des gènes codant la


chaîne légère : juxtaposition d’un gène V avec un gène J.

Ø Ces réarrangements seront ou ne seront pas productifs, et seuls les


réarrangements productifs entraineront la formation des chaînes.
V J

1 2 3 n 1 2 3 4 5 3’
5’
AAA

Transcription

ARN

5’ 1 2 Cκ 3’

ARN

1 2 Cκ
Réarrangement des gènes de la chaine lourde
VH CH
L V2 D2J4 S Cμ S Cδ S Cγ3 S Cγ1
5’
Cγ2
Cγ4
Cε S

Cα1
Cα2 3’
S
ADN
Switch d’une IgM à une IgG1
VH CH
L V2 D2J4 S Cμ S Cδ S Cγ3 S Cγ1
5’
Cγ2
Cγ4
Cε S

Cα1
Cα2 3’
S
ADN
Diversité des immunoglobulines:
Il existe 5 niveaux de diversité:

1- La diversité combinatoire relative à la recombinaison VDJ, elle est obtenue


grâce à des associations aléatoires des différents gènes V, gènes D et gènes J.
2- La diversité jonctionnelle grâce à des mécanismes d’addition et de délétion
aléatoires au niveau des extrémités des gènes V, gènes D et gènes J avant
fusion lors de la recombinaison VDJ. Ces mécanismes sont surtout présents au
niveau de la chaîne lourde.
3- La diversité « H-L » obtenue par une association au hasard des chaînes
lourdes et légères.
4- L’hypermutation somatique par augmentation de mutations ponctuelles au
niveau des régions variables des chaînes lourdes et légères.
5- La commutation de classe par changement de régions constantes.

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