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I.

Le portrait d'un égoïste


1. Un glouton sans gêne
2. Un être égoïste

II. Un portrait à visée universelle


1. Une caricature
2. L'universalité du portrait
3. Une visée didactique

Commentaire littéraire

I. Le portrait d'un égoïste

1. Un glouton sans gêne

Gnathon est présenté comme un glouton répugnant : comportement bestial, prédateur et


voleur. Le champ lexical de la nourriture est très présent. Accumulation d’actions rapides et
désordonnées.

La répétition du verbe manger montre que la nourriture est une des principales préoccupations de
Gnathon. Cette répétition indique aussi, outre l’importance de cette activité pour Gnathon, son statut
inférieur à celui de la bête dans la mesure où le glouton ne sait pas s’arrêter là où l’animal est repu.

Gnathon est présenté comme un être sans gêne. Il ne soucie pas des autres, mais que de son
confort. La Bruyère accumule les exemples dans la première partie du texte. Les différents
exemples sont séparés par des points-virgules, ce qui donne un rythme plus rapide à cette
accumulation que avec des points, et lui donne ainsi plus de force.

Le rythme ternaire en gradation « les remanie, démembre, déchire » est un autre procédé de l'auteur
pour insister sur le sans-gêne de Gnathon.

Gnathon est un être proche de l’animal :


- un « râtelier » (endroit où il y a du fourrage pour le bétail).
- « démembre, déchire » -> fait penser à un animal qui mange
- « on le suit à la trace »
- « Il mange haut et avec grand bruit »

2. Un être égoïste

Gnathon est un être égoïste, et cela est dit dès la première phrase (« Gnathon ne vit que pour
soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s'ils n'étaient point » -> il ne prête aucune
attention aux autres hommes). Ce n’est pas un inconscient car Gnathon sait exploiter avec talent la
commisération de ses semblables.

Gnathon s'accapare sans scrupule tout l'espace et les choses, au dépens des autres : « il occupe
lui seul celle de deux autres », « il se rend maître du plat », « une manière d'établissement »… pour
finir explicitement avec « Tout ce qu'il trouve sous sa main lui est propre », c'est-à-dire qu'il agit
comme si tout lui appartenait.
La répétition du pronom « il », comme une anaphore, dans tout le texte semble montrer que tout
tourne autour de Gnathon, ce qui illustre son égocentrisme.

Gnathon n'a pas d'empathie pour autrui, comme le montre l'accumulation avec négation
restrictive « ne… » (« Il embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint
personne »…).

L’opposition : Gnathon semble opposé à tous les autres êtres humains dans ce portrait. Le
pronom personnel singulier « il » revient à de nombreuses reprises, opposé aux pluriels pour
désigner les autres : « les hommes », « ils », « deux autres »… il souhaiterait même se différencier
du genre humain (« il rachèterait volontiers de l'extinction du genre humain »).

Gnathon n'hésite pas à utiliser le mensonge pour arriver à ses fins : « si on veut l'en croire, il
pâlit et tombe en faiblesse ». Il exige le meilleur (« première place », « la meilleure chambre le
meilleur lit »…), mais au dépens des autres.

II. Un portrait à visée universelle

1. Une caricature

De nombreux procédés d'accumulation et d'exagération montrent que nous avons affaire à


une caricature. Par exemple, à la fin de l'extrait l'accumulation avec l'anaphore de « ne » : « Il
embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint personne »…

Toute l'attitude de Gnathon semble théâtralisée jusqu'à la caricature : « il manie les viandes, les
remanie, démembre, déchire », « il roule les yeux en mangeant »…

La répétition de « tout » et « tous » tout au long du texte montre que l'auteur est dans l'exagération,
sans nuance. Beaucoup d'hyperboles dans le texte illustre aussi le fait que le texte est une caricature.

On a une visée satirique car La Bruyère tourne en dérision Gnathon, il est le contraire d’un honnête
homme. Registre satirique avec l'exagération des faits et gestes de Gnathon.

2. L'universalité du portrait

Le portrait n'est pas porté sur le physique. C'est surtout un portrait moral : une éthopée (=
figure de pensée qui a pour objet la peinture des mœurs et du caractère d'un personnage).
Gnathon est présenté comme un égoïste, cupide : rachèterait sa mort.

Nous avons ici une description d'un « Caractère », en l'occurrence d'un défaut :
l'égocentrisme.

D’après l’onomastique (étude des noms propres), Gnathon veut dire mâchoire : c’est une
synecdoque pour désigner l’être.

On a affaire à un type, auquel on prête des traits collectifs. Le présent de vérité générale, le présent
gnomique, en témoigne. En fait, on pourrait parler d’une antonomase, c'est-à-dire qu’à travers
Gnathon, on a le portrait de plusieurs Gnathons.
Gnathon est une allégorie de l'égocentrisme et de l'égoïsme.

En résumé, c’est un caractère auquel on applique des termes spécifiques bien précis, qui évolue sur
la scène d’un fragment, avec une écriture de la concision, une esthétique de la condensation, tout en
étant dynamique par la construction de l’asyndétique (propositions indépendantes sans lien), tout
en gardant le ton plaisant, léger qui convient à l’esprit de salon.

3. Une visée didactique

La Bruyère dresse un portrait satirique de Gnathon. L’implicite du texte que Gnathon est un
exemple à ne pas suivre.

La Bruyère a une visée polémique avec une intention de choquer :


Un vocabulaire agressif : « les sauces lui dégouttent du menton ». Il joue sur les homophones entre
« dégoutte » et « dégoûte », cela vise à dégoûter le lecteur.
Gnathon est un être grossier proche de l’animal.
Ainsi, Gnathon dégoutte le lecteur.

Le texte est en focalisation externe, c'est donc au lecteur de se faire son propre jugement sur
Gnathon, jugement négatif à n'en pas douter.

On parle de littérature édifiante lorsqu’elle vise à l’édification positive de l’Homme.

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Conclusion

    Le Caractère dépeint par La Bruyère du type que représente Gnathon est dénoncé par une
description à l’inverse de l’éloge, c'est-à-dire le blâme. Le moraliste cherche l’approbation du
lecteur en utilisant sa rhétorique polémique et en employant un ton satirique afin d’amener le
lecteur à suivre son avis. Le contre-exemple que représente alors Gnathon est tourné en dérision et
est même comparé implicitement à un animal.

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