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Barousse Claude. Ruth Amossy, Les idées reçues, Sémiologie du stéréotype, Collection « Le texte à l'oeuvre », 1991. In:
Littératures 27, automne 1992. pp. 269-271;
https://www.persee.fr/doc/litts_0563-9751_1992_num_27_1_1616_t1_0269_0000_4
On peut, nous semble-t-il, définir ce qui fait l'unité de ces quatre études en
avec Yves Moraud, qu'elles aideront le lecteur à être, face aux romans de
Duras, « poète et déchiffreur de sens d'une uvre ouverte, qui trouve son principe
de vie dans le mystère qu'elle entretient de façon systématique et retorse » (p. 7).
Ainsi, malgré la modestie de son propos (on ne prétend pas ici, nous prévient-on,
« renouveler la connaissance que l'on a actuellement de l'univers de Duras » l) ce
numéro mérite à coup sûr de retenir l'attention de ceux qui s'intéressent à cette
uvre.
Pierre Bardel
La seconde partie, non sans quelque arbitraire dans le choix des exemples,
nous offre trois monographies, dont nous oublions vite le collage aléatoire, pour nous
laisser prendre par la richesse de la documentation et la virtuosité malicieuse dans le
maniement du scalpel. Le premier chapitre a pour titre « l'industrialisation de la
peur ». Sans trembler, Ruth Amossy dresse avec une minutie de magasinière aux
Galeries de l'épouvante le répertoire hétéroclite des stéréotypes en usage au pays de
l'étrangeté effrayante. Elle montre pourquoi le vampire, le loup-garou, le cadavre
ambulant déclenchent les mécanismes de l'effroi malgré leur caractère de poncifs.
Cette réflexion s'inscrit dans la lignée des travaux de Caillois et de Huizinga sur le
jeu ; elle exploite les films de Hitchcock et de Polanski, comme les uvres de Poe,
Walpole ou Julien Gracq.
Viennent ensuite vingt-cinq pages sur « l'autobiographie des stars
» Nous retiendrons, à travers celles de Marilyn Monroe, Mary Pickford ou
Marlène Dietrich, que la star qui se raconte, même si elle tente de prendre ses
vis-à-vis de son image pétrifiée, ne brise jamais complètement le pacte tacite
qui la lie à ses admirateurs.
Dans son dernier chapitre « les pièges de la féminité » l'auteur constate
que le discours féministe n'aura souvent fait que remplacer le paradigme convenu de
la femme dépendante et passive par celui d'une créature « dominatrice et ambitieuse,
raisonneuse et sèche ». Peut-être les femmes sortiront-elles de cette aporie si elles
apprennent à relativiser la dichotomie masculin/féminin, à l'instar de Colette ou
d'Hélène Cixous.
Voilà un livre qui pourrait rendre bien des services aux étudiants et aux
Nous craignons pourtant qu'il ne rencontre pas tout son public potentiel, car il
ne comporte aucun index des thèmes, des uvres, des auteurs. Privé de ce trousseau
de clés, qui eût multiplié les entrées, le lecteur pressé risque de passer outre. Ce
dommage pour cet ouvrage compact mais riche en tiroirs de rangement, petit
chef-d'uvre de marqueterie qui, s'il était un meuble, mériterait de s'appeler un
bonheur-du-jour.
Claude Barousse