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Synthèse du texte de Maurice Godelier

Au fondement des sociétés humaines

(cette synthèse fait bien plus que les 40 lignes demandées. C’est exprès.
Le but est que vous compreniez, donc j’ai dû délayer)

Le point de départ de ce texte, c’est la situation sociale des sociétés paléolithiques : une situation très
horizontale, basée sur des rapports non hiérarchiques. Certes il y a une division sexuelle de la vie
sociale. Ainsi chez les Guayakis l’homme est chasseur, la femme est collectrice, et leur culture
distingue radicalement identité masculine et identité féminine. Mais il n’y a pas de structure
hiérarchique, avec un chef, des subordonnés. La relation sociale fondamentale est celle de l’échange
entre égaux.

Le texte de Godelier est centré sur ce qui va suivre l’âge paléolithique dans le cours de l’histoire
humaine, à savoir l’apparition de structures hiérarchiques qui finiront par prendre tout à fait la forme de
l’État. Le premier moment de cette évolution est qu’une partie de la population va « se détacher » des
activités productrices. Autrement dit, alors que jusque là tous étaient impliqués dans la recherche et la
production de nourriture, la fabrication des outils et des habitations, un certain nombre d’individus de
la société vont former un groupe à part qui n’aura plus à travailler pour vivre parce qu’il sera entretenu
par les autres et aura sur eux assez d’autorité pour les gouverner.

Par quel prodige la plus grande partie des individus va-t-elle ainsi accepter de travailler pour ce
groupe, accepter de s’infliger plus d’effort et de peine pour non seulement pourvoir aux besoins de ce
petit groupe, mais même lui fournir plus, beaucoup plus(plus de nourriture et de meilleure qualité, des
habitations plus grandes, plus saines, et enfin accepter carrément que des individus deviennent les
serviteurs de ce petit groupe) ? Voilà la question à laquelle ce texte répond.

Avant de répondre Godelier insiste sur le caractère universel de cette évolution : de la Rome
Antique au Moyen Age Européen, de l’Égypte Pharaonique à l’Inde védique, on retrouve à chaque fois
cette structuration hiérarchique dans laquelle le grand nombre travaille pour pourvoir non seulement
aux besoins, mais aux désirs du petit nombre qui a autorité sur eux.

La réponse de Maurice Godelier tient en un mot : cette domination a été possible parce qu’elle
est apparue aux yeux de tous comme légitime, c’est-à-dire juste. Autrement dit, il y a eu un moment où
il est apparu comme normal, conforme à l’ordre des choses qu’un petit nombre
1. jouisse du privilège de ne pas travailler à produire ses moyens d’existence
2. commande le reste de la population.

Il faut bien prendre conscience du caractère étrange de cette évolution : j’accepte de travailler
pour toi, de te servir, d’obéir à tes ordres, en un mot, j’accepte ta domination… parce que je crois que
celle-ci est bonne, juste, je crois que c’est ton droit de me commander. Tout, ici, se joue dans la
représentation que je me fais de toi et de moi.
Or dans toutes les sociétés connues, les groupes dominants, les chefs, ont toujours été les
politiques et les religieux.

• Les religieux : parce qu’ils sont en rapport avec les Dieux, et par là, avec l’ordre du cosmos. Si
le prêtre ne bénit pas les semailles de l’agriculteur, celles-ci ne pousseront pas. Si une épidémie
se déclenche, seul le prêtre pourra apaiser la colère de Dieu.
La conscience religieuse de l’être humain imagine partout des forces ou des intentions divines,
et le travail du prêtre est de maintenir de bons rapports entre le groupe social et les Dieux.

• Les politiques : ici la domination est beaucoup plus terre à terre. Au départ le chef politique
c’est le guerrier, l’homme en arme, celui qui soumet par la peur et la violence. Violence qui
inquiète (parce qu’elle peut s’exercer sur l’agriculteur) et violence qui rassure (parce qu’elle le
protège contre les agressions extérieures).

Mais la violence ne suffit pas à installer ce sentiment de « justice » de la domination. C’est par
l’alliance des religieux et des chefs politiques, par l’alliance de la violence et de la croyance que la
domination de l’État s’est structurée. Retenons un exemple de cette fusion du religieux et du politique
qui fonde la domination de l’État et l’ancre comme « juste » dans l'IMAGINAIRE des individus :

« Pharaon, dont le souffle, Khâ, était censé animer tous les êtres vivants jusqu’au
plus minuscule des moucherons, et qui chaque année, remontait le Nil sur sa barque
sacrée pour demander au dieu-du-fleuve de faire couler à nouveau ses eaux
chargées de limon afin d’engraisser les champs des paysans et leur assurer
d’abondantes récoltes. »

Ainsi, dans la conscience des dominés (mais aussi des dominants), la domination des puissants
est légitime parce qu’elle est vue comme faisant partie intégrante du fonctionnement du cosmos, du
monde. Les puissants sont ceux qui sont en relation avec les Dieux. Ainsi, leurs prières et bénédictions
valent infiniment plus que notre propre travail.

Et c’est ainsi que se produit le plus extraordinaire prodige de la domination : non seulement les
producteurs servent leurs maîtres, mais ils se sentent perpétuellement en dette vis à vis d’eux.

C’est ainsi que Godelier nous explique le consentement à la domination.

Mais il n’oublie pas de terminer son texte en soulignant que dans l’histoire il y a des moments
où les peuples se réveillent, bousculent leurs croyances, et entrent en résistance contre cette
dépossession de leur travail, de leur vie-même.
Un bon exemple de ce type de crises est la révolution française qui est
notamment le moment où le peuple décide de couper la tête à son roi, et de mettre la
religion dominante hors la loi. En faisant cela la Révolution Française bouleverse
totalement l’imaginaire social, et engage la France sur une révolution qui est en
premier lieu idéologique : elle va changer la représentation que l’on se fait du
mérite, de l’autorité, de la justice.

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