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CORRECTION DE LA DISSERTATION

« Le juge administratif, un vrai juge ? »

Accroche : « La justice administrative est une institution de l’ancien régime. (…) elle n’a pas
toujours donné, dans toutes les périodes de sa longue existence, les garanties de libre défense
et d’impartialité dont les justiciables ont besoin. Mais elle s’est successivement
transformée » (AUCOC Léon, conseiller d’état au XIXe siècle, in « La justice administrative
en France », Annales de l’École libre des sciences politiques, 1898).

Intérêt du sujet : La mise sur pied d’un « vrai » juge administratif, indépendant de
l’administration active, est allée de pair avec un renforcement de l’État de droit, c’est-à-dire
de la soumission effective de l’administration au droit. On peut ainsi s’interroger sur la notion
de « vrai » juge.
Sur la notion de « vrai » juge : Le Conseil constitutionnel a jugé les garanties d’impartialité et
d’indépendance – qu’il fait découler de l’article 16 de la DDHC –, « indissociables de
l’exercice de fonctions juridictionnelles » (Décision du 20 février 2003, n°2003-466 DC, Loi
organique relative aux juges de proximité). Le juge administratif doit répondre aux standards
universels de toute juridiction, aux exigences inhérentes au statut de juridiction.
Intérêt sujet : Or, en France, le juge de l’administration – avec le CE et les conseils de
préfectures (création napoléonienne) n’a longtemps pas considéré comme un « vrai » juge,
remplissant les garanties d’impartialité et d’indépendance vis-à-vis des autorités
gouvernementales, mais comme servant les intérêts de l’administration.
Historiquement : En effet, historiquement, c’est l’administration elle-même qui jugeait le
contentieux de l’administration. Le CE, hériter du conseil du roi, a été créé par la Constitution
de l’An VIII sous l’impulsion de Napoléon Bonaparte qui souhaitait un corps de technicien
capable de l’éclairer et d’assurer sa puissance ; le juge historique de l’administration n’était
donc pas indépendant des autorités gouvernementales (+ justice retenue). Le CE acquiert le
statut de juridiction avec l’article 9 de la loi du 24 mai 1872 lui permettant de statuer
souverainement. Les conseils de préfecture étaient également directement rattachés à
l’administration préfectorale.
Droit comparé : en France, on a un juge administratif. En RU, le principe de la séparation des
pouvoirs impliquait que l’administration soit soumise à la compétence du juge de droit
commun ; absence de juge administratif même si dans les faits, des spécialisations au sein des
juridictions judiciaires dans le contentieux de l’administration.
Actualité : Le Président de la République proposait la suppression de l’ENA alors que le juge
administratif est essentiellement formé à l’ENA (avec les administrateurs), interrogeant ainsi
– si réforme est – son recrutement.
Problématique : Dans quelle mesure le juge administratif est-il devenu un véritable juge,
indépendant de l’administration  ?

I. L’acquisition progressive par le juge de l’administration de son indépendance

A. La séparation de l’administration active de l’administration contentieuse


- Lois des 16 et 24 août 1790 et Décret du 16 Fructidor an III qui consacrent ce
principe : « défenses itératives sont ainsi faites aux tribunaux de connaitre des actes de
l’administration, de quelque espèce qu’ils soient »
- Le procès de l’administration est confié à l’administration elle-même
- Création des conseils de préfecture et du Conseil d’État sous le Consulat et l’Empire :
les prémisses de la juridiction administrative mais les conseils de préfecture sont présidés
par le préfet tandis que le CE ne rend que des avis (justice retenue)
- Loi du 24 mai 1872 fin de la justice retenue, le CE statue souverainement, mais en
appel jusqu’à l’arrêt Cadot

B. La fin de la théorie du ministre juge


- Arrêt Cadot 1889 : CE accepte un recours directement porté devant lui
- Le ministre n’est plus juge (compétence du CE en 1er ressort)
- En 1953, les TA se substitue aux conseils de préfecture (qui avaient une compétence
d’exception), le préfet ne préside pas les TA qui ont une compétence en 1 er ressort et de droit
commun

II. La reconnaissance du juge administratif en tant que « vrai » juge

A. La consécration constitutionnelle de la juridiction administrative

CC, 22 juillet 1980, Validation d’actes administratifs, consacre comme PFRLR


l’indépendance et donc l’existence de la juridiction administrative (considérant 6).
CC, 23 janvier 1987, Conseil de la Concurrence, reconnaît la compétence exclusive du JA
pour juger certains contentieux. Ainsi, a valeur constitutionnelle, de PFRLR, la compétence
du JA pour l’annulation et la réformation des décisions pris par les autorités publiques
investies de PPP. Le CC reconnaît un bloc de compétence spécifique aux juridictions
administratives ; c’est la consécration finalement de l’existence du JA.
La RC du 23 juillet 2008 introduit dans la Constitution l’article 65 introduisant l’expression
d’ordre administratif.
CC, 3 décembre 2009, qualifie le CDC et CE de juridictions placées au sommet de chacun
des deux ordres de juridictions reconnus par la Constitution : si on en doutait, explicitement,
le CE est une juridiction au sommet de l’ordre administratif.

B. Un pouvoir d’injonction garantissant la soumission effective de l’administration


au droit
- Loi 1980 : pouvoir d’injonction à posteriori du JA
- Loi 1995 : pouvoir d’injonction a priori du JA participant de la soumission de
l’administration au droit
- Référé : référé liberté et référé suspension permet au JA de suspendre une décision
administrative dans l’urgence avant le procès « au fond ».

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