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Éléments de droit romain, Volume 1

Por Charles Maynz

DES ACTIONS POSSESSOIRES (p. 421 do arquivo)


Notion et introduction historique .
Nous appelons actions possessoires celles qui onl pour but de pro téger la possession .
Or , la lésion de notre possession peut être plus ou moins grande , selon qu'elle
consiste simplement dans un trou ble apporté dans le pouvoir physique que nous
exerçons sur la chose , ou qu'elle a pour effet de nous priver entièrement de ce
pouvoir . Le préteur a créé deux catégories différentes d'interdits pour ces deux
espèces de lésion ; on les distingue par les noms de interdicta retinendi possessionis ,
et interdicta recuperandæ possessionis . Toutes les deux supposent nécessairement
que le demandeur a été posses seur au moment où la lésion a eu lieu ; mais en général
il importe peu que sa possession soit juste ou injuste 88 -- Souvent on em ploie le mot
interdits possessoires dans un sens plus étendu , en comprenant sous cette
dénomination trois catégories d'interdils , savoir les interdicta adipiscendæ , retinendæ
et recuperandæ possessio nis ; mais cette terminologie ne peut être approuvée 89. En
effet les interdicta adipiscende possessionis n'ont point pour fondement la possession
; au contraire ils sont donnés à celui qui ne prétend nullement avoir ou avoir eu la
possession . Aussi ne sont - ils point donnés pour protéger la possession , mais pour
nous faire acquérir une possession que nous n'avions pas auparavant . Cette circon
stance ne nous autorise point à leur donner le nom d'actions possessoires ; car au
même titre nous serions obligé de l'appliquer à beaucoup d'autres moyens de droit ,
qui ont pour but de nous faire obtenir la possession d'une chose , par exemple à la
revendi cation , à l'action résultant du contrat de vente en délivrance de la chose
vendue , ete . Nous réserverons donc le nom d'actions possessoires exclusivement aux
interdits qui ont pour but de pro téger notre possession , soit contre celui qui nous
trouble dans l'exercice de notre pouvoir , interdicta retinendæ possessionis , soit
contre celui qui nous en a privé entièrement , interdicta recu perandæ possessionis .
C'est aussi dans ce sens qu'on oppose aux interdits possessoires les actions pétitoires
qui ont pour but la protec tion d'un droit 90 et non point la protection d'un simple état
de fait . Au reste nous ne nous occuperons ici que des interdits créés pour la protection
de la possession corporelle ; ceux tendant à ga , rantir la juris ou quasi possessio
trouveront leur place dans les titres des servitudes et de la superficie . Quand on
examine l'ensemble de la législation romaine sur la possession et sur les actions créées
pour la protéger , on est forcé de se demander comment une chose qui paraît avoir si
peu d'im portance en droit a pu donner lieu à un système aussi compliqué et aussi
développé dans ses moindres détails . L'hypothèse suivante de Niebuhr et de Savigny
91 répond de la manière la plus satis faisante à cette question . Le sol romain se
composait du domaine public et des propriétés privées , ager publicus et ager privatus
. Ce dernier seul pouvait appartenir en propre aux citoyens . Quant au premier ,
abstraction faite des terres qui étaient destinées à l'usage commun , les particuliers
pouvaient en occuper des parties , les culti ver et en tirer profit . Cette occupation ne
leur donnait point la pro priété , ni par conséquent les actions réelles qui servent à
protéger la propriété . Il leur fallait donc un nouveau moyen de droit pour les protéger
dans leur occupation contre des agressions injustes . Ce moyen fut l'institution des
interdits , laquelle , après avoir été développée par l'usage , fut par la suite appliquée à
toute détention d'une chose qui n'avait pas le caractère de propriété . Enfin , quand
tout le domaine public avait été changé en propriété privée , le système de la
possession avait acquis le caractère de généralité que nous lui trouvons dans le droit
de Justinien . Toutefois il reste même dans le droit nouveau des traces de l'origine de
l'institu tion . Ainsi les interdits les plus importants ne sont donnés que pour les
immeubles 92 ; et ce n'est qu'à l'aide de cette hypothèse que nous pouvons expliquer
la nature de l'interdit de precario , la pos session accordée à l'emphytéote , et même le
principe que l'on retient la possession des immeubles par la seule intention.

Des interdits ' retinendæ possessionis


Les interdicta retinendie possessionis'sont donnés au possesseur toutes les fois qu'il
est troublé par des voies de fait dans l'exercice de sa possession . Celui qui veut se
servir de ces moyens doit done prouver qu'il est possesseur 95 et que le défendeur a
posé un'acle qui apporte quelque trouble à sa possession 96. Cependant ' si ' Pacte du
défendeur avait eu pour effet de faire perdre la possession au demandeur , il y aurait
lieu à intenter un interdit recuperandæ pos sessionis 97 . Les interdits retinendæ
possessionis ne peuvent être intentes , que contre celui qui a troublé . Ils ne se
donnent pas contre les héri1 tiers comme tels , mais seulement lorsqu'ils continuent
eux - mêmes de nous troubler 98 , Le but de ces interdits , est d'abord de mettre fin au
trouble qu'on apporle à l'exercice de notre possession , ensuite d'obtenir 1 des
dommages et intérêts pour la perte qui nous a été causée par le trouble 99. En outre le
juge peut prendre des mesures pour em pêcher toute lésion ultérieure 100. A cet effet
, il imposera au dé fendeur une cautio de non amplius turbando 1. Enfin quand l'inter
dit sert à préparer une action en revendication , il a pour but de faire déclarer ,
laquelle des deux parties prendra le rôle de deman deur ou celui de défendeur dans la
revendication 2 . Les exceptions que le defendeur peut opposer à l'interdit sont de
diverses espèces . D'abord , après une année utile l'in terdit n'est plus donné pour les
dommages et intérêts ; mais le defendeur reste responsable pendant trente ans de ce
dont il se trouve enrichi au moment de l'action intentée 3. - Une autre . exception
importante est celle qui consiste à soutenir , que la possession du demandeur est
vicieuse à l'égard du défendeur , c'est - à - dire que le premier a privé le dernier de sa
possession vi , clam aut precario . Si le défendeur prouve que cette exception est
fondée , le demandeur non - seulement sera débouté de sa demande , mais encore il
sera condamné à restituer la chose au défendeur 4 : C'est par ce motif que les interdits
retinendæ possessionis sont appe . lés judicia duplicia , parce que chacune des deux
parties peut pren dre éventuellement le rôle de demandeur ou celui de défendeur 5 .
Le terme judicium duplex s'explique ici de la manière la plus sim ple . En effet ce sont
réellement deux procès qui se jugent à la fois : car le défendeur , en soutenant que le
demandeur l'a privé de sa possession , ne fait qu'intenfer un interdictum recuperandæ
posses sionis . Il est vrai qu'à la rigueur il devrait succomber dans la pré mière
procédure ; mais il l'emporterait dans la seconde et le dernier jugement anéantirait de
fait tous les effets du premier . C'est donc pour abréger la procédure qu'on a réuni les
deux questions dans un seul examen et qu'on a fait un judicium duplex de la poursuite
inconsidérée du demandeur . Il y a deux interdits retinendæ possessionis , l'un pour les
immeu bles , l'autre pour les meubles . Ils sont appelés d'après les premiers mots de
l'édit , qui s'y rapportent , le premier uti possidetis 6 , ' le second utrubi .
Anciennement l'interdit utrubi se distinguait par quelques particularités . Notamment
on y donnait gain de cause à la partie qui avait possédé la chose litigieuse pendant la
plus grande partie de l'année et dont la possession n'était pas vicieuse à l'égard de la
partie adverse 7. Il était donc autant recuperandæ que retinendæ possessionis . Pour
calculer le temps pendant lequel les par ties avaient respectivement possédé , elles
joignaient à leur possession celle de leurs auteurs , accéssło possessionis 8. Dans le
droit nouveau " ces particularités ont disparu , et l'interdit utrubi est souniis aux
mèmes règles que l'interdit uti possidetis.

Des interdits recuperandæ possessionis

Nous trouvons trois interdits ayant pour but de nous faire re couvrer une possession
perdue . ibili 2011 *** !!!! sto L'interdit unde vi ou de vil 10. Anciennement il y en avait
deux espèces : l'un pour le cas de violence exercée à main armée , vis armata ; l'autre
pour cause de toute autre violence grave , vis quotidiana . Ces deux espèces ont été
fondues par la suite en un seul et même interdit 11. u Cet interdit était donné au
possesseur d'un immeuble 12 , qui en avait été expulsé par des voies de fait graves
exercées contre lui , atrox vis , ou par suite d'une crainte fondée de pareille violence 13.
Justinien l'accorde même pour le cas, où quelqu'un s'est emparé illégalement d'un
immeuble sans avoir exereé de violence envers le propriétaire 14. - On peut l'intenter
non - seulement contre le coupable , mais encore contre celui qui a donné l'ordre de
l'agression et contre le maitre des esclaves qui l'ont commise 15. Les héritiers n'en sont
point tenus , mais ils peuvent ; être poursuivis par une in ſactum , actio pour autant qu'ils
se trouvent enrichis par suite du , fait de leur au , , teur 16. - Le but de l'interdit est
d'obtenir la restitution de l'im - meuble dont on a été expulsé et des dommages et
intérêts 17. — Al'égard de ces derniers , il se prescrit par le après ce délai il n'est plus
donné que pour autant que le défendeur se trouve enrichi 18. Oulre la prescription , le
défendeur pouvait anciennement opposer l'exception de la possession vicieuse de son
adversaire , en soutenant que celui - ci avait possédé à son égard vi , clam aut precario .
Cette exception cessait quand l'expulsion s'était faite à main armée . Dans le droit
nouveau elle est entièrement abolie 19 , -- Au resle , l'interdit de vi lui - même a perdu
beaucoup de son importance par suite d'une constitution de , Valentinien III , d'après
laquelle celui qui s'empare de vive force d'une chose mos bilière ou immobilière est
toujours obligé de la restituer , et perd en outre son droit de propriété si la chose lui
appartenait , ou doit en payer la valeur estimative , si elle ne lui appartenait pas 20. 2 °
L'interdit de clandestina possessione . D'après un passage du Digeste il parait qu'un
interdit de ce nom était anciennement accordé dans : le cas où quelqu'un nous avait
privé clandestine , ment de la possession d'un immeuble 21. Depuis qu'il fut admis qu'on
ne peut plus perdre la possession des immeubles d'une ma nière clandestine , l'interdit
est devenu inutile et s'est trouvé na , , turellement remplacé par l'interdit de vi . Aussi
n'est - il plus men 1 ITA tionné dans sans nos sources , Bon 3 3. L'interdit de precario 22.
L'origine de cet interdit remonte pro bablement au temps où les possesseurs du
domaine public avaient l'habitude d’abandonner à leurs clients , l'usage des t terres
qu'ils ne cultivaient pas eux - mèmes 23. Celle faveur , accordée precario , . pouvait être
révoquée , et l'interdit servait à forcer le client à la restitution du bien qui concédé . Dans
le principe il n'eut lieu qu'à l'égard des immeubles ; par la suite , quand le preca rium fut
appliqué aux choses mobilières , l'interdit fut également ' , étendu à ndu à ces choses
24. Nous aurons l'occasion d'en montrer l'appli cation au titre du gage et au livre III .
L'interdit tend à la resti tution de la chose et au payement des dommages et intérêts 25
.

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