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UNIVERSTE HASAN II Année Universitaire 2010 – 2011

Mohammedia – Casablanca Première Année – Premier Semestre


ECOLE NATIONALE DE Matière : Introduction au Droit
COMMERCE & DE GESTION Professeur : Hassan RAHMOUNI

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Séance du 28 Octobre 2010


Thème : Le Droit de Propriété
Résumé
1. La théorie générale de la propriété :
- La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en
fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements.
- La notion de propriété se fonde étymologiquement sur l’unicité de son titulaire (le mot vient du latin
proprius = propre, sans partage).
- En effet, la propriété permet au propriétaire de gérer son bien selon ses propres prévisions.
- Ce fut avec la révolution française de 1789 que la propriété est devenue « un droit inviolable et sacré ».
- Ainsi, le droit de propriété apparaît comme un droit absolu qui permet au propriétaire de la chose d’agir
de manière souveraine sur elle.

2. L’acquisition de la propriété :
- On distingue l’acquisition par un acte juridique et l’acquisition par un fait juridique.
- Ainsi, en est-il d’abord (pour l’acte juridique) de l’acquisition par la transmission du bien du précédent
propriétaire au suivant, lorsque cette transmission repose sur un acte de volonté unilatéral (i.e. un
testament) ou sur une convention (i.e. contrat).
- Traditionnellement on oppose les actes à titre gratuit aux actes à titre onéreux.
- L’acte à titre gratuit (donation) est un acte par lequel une personne animée d’une intention libérale, le
donateur, transfère actuellement et irrévocablement la propriété d’un bien lui appartenant à une autre
personne, le donataire, qui l’accepte sans contrepartie.
- Quant à l’acte à titre onéreux (la vente), il consiste en un contrat qui a pour objet le transfert de propriété
d’une chose (meuble ou immeuble) contre le versement d’un prix.
- L’échange est également considéré comme un acte à titre onéreux, du fait que les parties se donnent
respectivement une chose pour une autre.
- Pour ce qui est du fait juridique, il consiste en l’acquisition d’une propriété par la possession (qui
consiste en un simple fait juridique) : avoir la possession d’une chose c’est se comporter à son égard
comme si l’on en était propriétaire, c'est-à-dire exercer sur elle les attributs du droit de propriété alors
même qu’on n’en serait pas propriétaire.
- Ainsi, la possession est le fait d’exercer des actions positives sur un bien en se comportant comme un
propriétaire, mais sans en détenir le pouvoir de droit.
- Exemple : exploitation du bois d’une forêt par des coupes régulières et répétées.
- La possession comprend deux éléments : le corpus (qui consiste à effectuer des actes matériels sur la
chose) et l’animus (représenté par l’élément intentionnel qui fait que le possesseur se sent propriétaire).
- La possession suppose une certaine attitude du possesseur : la bonne foi. Elle doit être continue,
paisible, publique et non équivoque.

3. Les caractères du droit de propriété :


- Le droit de propriété est considéré comme le droit le plus complet.
- Il donne la faculté de tirer de la chose toutes les utilités dont elle est susceptible.
- Ce caractère complet se traduit de 3 manières : Il est absolu, exclusif et perpétuel.
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- Trois autres attributs permettent par ailleurs de qualifier ce droit
- Le droit d’user (usus), comportant la faculté de se servir de la chose comme on l’entend (le propriétaire
d’une automobile peut l’utiliser pour ses déplacements privés ou professionnels) ;
- Le droit de jouir (fructus), qui permet de tirer des revenus du bien. Juridiquement on dit que le bien
produit des fruits, c'est-à-dire qu’il produit des biens accessoires qui en proviennent périodiquement
sans qu’il ne s’en trouve diminué (Ainsi en est-il par exemple lorsque le propriétaire d’un local le donne
à bail, c'est-à-dire en location et encaisse des loyers tous les mois.
- Le droit de disposer (abusus) soit par des actes matériels (consommation, destruction), soit par des
actes juridiques (vente, donation, échange).
- L’usus, le fructus et l’abusus confèrent au propriétaire un droit quasi souverain sur la chose. Le droit de
propriété permet à son titulaire de faire respecter par toute personne les prérogatives attachées à son
droit : on dit alors que la propriété est un droit opposable à tous. C’est là le caractère absolu du droit de
propriété.
- Quant au caractère exclusif, il implique qu’en principe un bien n’a qu’un seul propriétaire qui cumule
ainsi les trois pouvoirs issus de l’usus, du fructus et de l’abusus.
- Enfin le droit de propriété a un caractère perpétuel : en ce sens qu’il dure autant que dure la chose qui
en est l’objet. C’est donc un droit imprescriptible. La propriété est par ailleurs un droit héréditaire, qui
ne s’éteint pas au décès du propriétaire. La propriété est transmise aux héritiers par voie de succession à
la mort du titulaire.

4. L’étendue du droit de propriété :


- Le droit de propriété est donc un droit absolu, mais la vie en collectivité a imposé la nécessité de
certaines restrictions.
- Ainsi en est-il de l’assiette par exemple qui implique que la propriété du sol emporte la propriété du
« dessus » et du « dessous ».
- La règle de la propriété du dessus signifie que le propriétaire peut s’opposer à tout empiètement au
dessus de son fonds. Il est ainsi présumé propriétaire de toutes les constructions et plantations faites sur
son fonds.
- Quant à la propriété du dessous, elle signifie que le propriétaire a le droit de s’opposer à un empiètement
souterrain (il peut par exemple empêcher que son voisin creuse des galeries sous son terrain).
- Il existe cependant une limitation légale essentielle à ce droit : en matière de fouille archéologique et de
découverte de gisements qui sont de droit « propriété de l’Etat ».
- De même que la propriété d’une chose mobilière ou immobilière donne droit sur tout ce qu’elle produit.
- Le droit de propriété peut cependant connaître des limites.

5. Les limites du droit de propriété :


- Ainsi, la propriété peut être grevée de servitudes : charges réelles au profit d’un autre propriétaire
(l’exemple le plus courant est celui du droit de passage sur le terrain du voisin si votre terrain est
enclavé).
- Parmi les autres exemples de servitudes, il y a les servitudes qui dérivent de la situation des lieux
(appelées aussi servitudes naturelles) telle que la servitude d’écoulement des eaux, les servitudes établies
par la loi (telles que les distances à respecter pour les constructions), les servitudes d’utilité publique
(constituées par les charges imposées à la propriété foncière dans l’intérêt général) comme c’est le cas
pour les servitudes de voierie.
- En outre la propriété ne saurait servir à des actions illégales. Il n’est guère acceptable de transformer
une maison en lieu de jeux clandestins. Ainsi le caractère absolu du droit de propriété se trouve-t-il
limité !
- De même que le caractère exclusif de la propriété peut connaître des exceptions notables soit du fait de
l’usufruit (quand se présente une situation dans laquelle une personne, l’usufruitier, dispose du droit
d’user de la chose sans en être le propriétaire ; il dispose donc de l’usus et du fructus sans disposer de
l’abusus qui continue à appartenir au propriétaire) ou du fait de la propriété collective : soit dans les cas
de propriété en indivision (situation de personnes qui se trouvent en même temps propriétaires d’une
même chose, chacune possédant un quote-part du bien indivis)[L’indivision provient le plus souvent
d’une succession, plusieurs personnes héritent d’une même maison dans laquelle chacun détient une

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quote-part] ou dans celui de la copropriété : qui s’est développée en matière d’immeubles d’habitation
(chaque lot de copropriété comporte une partie privative, le logement, et des parties ‘communes’,
escaliers, ascenseurs, etc., dont la propriété est collective).

6. Les applications particulières de la propriété :


 Le fonds de commerce :
- Le fonds de commerce a pour objet l’accomplissement d’actes de commerce pour développer
une activité commerciale.
- Son champ d’application est très large : il couvre aussi bien la petite boutique de quartier que
l’hypermarché.
- Ses éléments sont variés d’un fonds à un autre : Parmi ces éléments la clientèle ou
l’achalandage sont indispensables mais non suffisantes.
- Ainsi, au Maroc « le fonds de commerce est (défini comme) un bien meuble incorporel
constitué par l’ensemble de biens mobiliers affectés à l’exercice d’une ou de plusieurs activités
commerciales » (article 79 du code de commerce marocain promulgué le 1er Août 1996 : Loi N°
15-95). Il comprend obligatoirement la clientèle et l’achalandage.
- Il comprend aussi, tous autres biens nécessaires à l’exploitation du fonds tels que le nom
commercial, l’enseigne, le droit au bail, le mobilier commercial, les marchandises, le matériel
et l’outillage, les brevets d’invention, les licences, les marques de fabrique, de commerce et de
service, les dessins et modèles industriels et, généralement tous droits de propriété industrielle,
littéraire ou artistique qui y sont attachés (Article 80 du Code de Commerce).
- Les éléments corporels du fonds de commerce sont le matériel et les marchandises.
- Les éléments incorporels sont quant à eux constitués par la clientèle et l’achalandage ainsi que
par les droits d’enseigne et de propriété industrielle.

 La propriété commerciale :
- Le commerçant qui exploite son fonds de commerce dans des locaux loués bénéficie d’une
protection : le statut des baux commerciaux, appelé aussi propriété commerciale.
- Le législateur protège l’entrepreneur et son entreprise en lui conférant un véritable droit de
maintien dans les lieux, car le commerçant a besoin d’une adresse professionnelle stable pour
fidéliser sa clientèle.

 La propriété intellectuelle :
- Comme les biens corporels, les créations de l’esprit font également l’objet d’un droit de
propriété.
- Le droit de propriété intellectuelle est là pour protéger, récompenser et encourager la création
dans des domaines aussi variés que la littérature, les arts ou l’industrie.
- L’auteur se voit reconnaître à la fois un droit moral sur son œuvre (décider du sort de l’œuvre)
et un droit économique (la possibilité de tirer des revenus de l’œuvre).
- La propriété intellectuelle recouvre la propriété industrielle, le droit d’auteur et les droits
voisins
- Les dispositions concernant cette propriété sont regroupées (En France) dans le Code de la
er
Propriété Intellectuelle promulgué le 1 Juillet 1992 (et au Maroc) dans la Loi N° 17-97 relative à
la protection de la Propriété Industrielle telle que modifiée par la Loi N° 31-05 d’une part et par
la Loi N° 02-00 relative aux Droits d’auteur et Droits Voisins telle que modifiée par la Loi N° 34-05.
o La propriété industrielle :
- La propriété industrielle se définit comme l’ensemble des droits destinés à la protection
des créations de nature industrielle ou des signes distinctifs à vocation industrielle et
commerciale.
- En ce sens, la propriété industrielle a pour objet les brevets d'invention, les schémas de
configuration (topographies) de circuits intégrés, les dessins et modèles industriels, les

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marques de fabrique, de commerce ou de service, le nom commercial, les indications
de provenance et les appellations d'origine ainsi que la répression de la concurrence
déloyale (article 1 de la loi N° 17-97).
- Le brevet d’invention : « Est brevetable toute invention nouvelle, impliquant une
activité inventive et susceptible d'application industrielle » (article 22). « Une invention
est considérée comme nouvelle si elle n'est pas comprise dans l'état de la technique
industrielle » (article 26). Ainsi, « Toute invention peut faire l'objet d'un titre de
propriété industrielle délivré par l'organisme chargé de la propriété industrielle. Ce titre
confère à son titulaire ou à ses ayants droit un droit exclusif d'exploitation de
l'invention » (article 16). « Le droit exclusif d'exploitation attaché au brevet d'invention
prend fin à l'expiration de sa durée de validité » (article 81).
- Les schémas de configuration (topographies) de circuits intégrés : On entend par
schéma de configuration (topographie) « la disposition tridimensionnelle des éléments,
dont l'un au moins est un élément actif, et de tout ou partie des interconnexions d'un
circuit intégré … destiné à être fabriqué » et on entend par circuit intégré « un produit,
sous sa forme finale ou sous une forme intermédiaire, dans lequel les éléments, dont
l'un au moins est un élément actif, et tout ou partie des interconnexions font partie
intégrante du corps et/ou de la surface d'une pièce de matériau et qui est destiné à
accomplir une fonction électronique ».

- Les dessins et modèles industriels : « Est considéré comme dessin industriel tout
assemblage de lignes ou de couleurs et, comme modèle industriel, toute forme plastique,
associée ou non à des lignes ou à des couleurs, pourvu que cet assemblage ou cette
forme donne une apparence spéciale à un produit industriel ou artisanal et puisse servir
de type pour la fabrication d'un produit industriel ou artisanal » (article 104). Le dessin
ou modèle industriel doit se différencier de ses similaires soit par une configuration
distincte et reconnaissable lui conférant un caractère de nouveauté, soit par un ou
plusieurs effets extérieurs lui donnant une physionomie propre et nouvelle.
- Les marques de fabrique de commerce ou de service : « La marque de fabrique, de
commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à
distinguer les produits ou services d'une personne physique ou morale. Peuvent
notamment constituer un tel signe les dénominations sous toutes les formes (telles que
mots, assemblage de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes,
lettres, chiffres, sigles) et les signes figuratifs (tels que dessins, étiquettes, cachets,
lisières, reliefs, hologrammes, logos, images de synthèses); les formes, notamment
celles du produit ou de son conditionnement ou celles caractérisant un service ; les
dispositions, combinaisons de couleurs ou nuances de couleurs » (article 133).
- Le nom commercial : « On entend par nom commercial l'appellation distinctive ou le
signe distinctif sous lequel est exploitée une entreprise » (article 177).
- Les indications de provenance : « On entend par indication de provenance l'expression
ou le signe utilisé pour indiquer qu'un produit ou service provient d'un pays ou d'un
groupe de pays, d'une région ou d'un lieu déterminé »(article 180).
- L'appellation d'origine : « c’est la dénomination géographique d'un pays, d'une région
ou d'une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité, la
réputation ou autres caractéristiques déterminées sont dues exclusivement ou
essentiellement au milieu géographique, comprenant des facteurs naturels et des
facteurs humains » (article 181).
- La concurrence déloyale : « Constitue un acte de concurrence déloyale, tout acte de
concurrence contraire aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale »
(article 184).

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o La propriété artistique et littéraire :

- A la différence de la propriété industrielle, la protection de la propriété littéraire et


artistique « commence dès la création de l’œuvre » (article 2 de la Loi N° 02-00).
- Les œuvres littéraires et artistiques entendues au sens de la loi marocaine sur les ‘droits
d’auteur et droits voisins’ sont « des créations intellectuelles originales dans le domaine
littéraire et artistique, telles que : les œuvres exprimées par écrit, les programmes
d’ordinateur, les œuvres musicales, les œuvres dramatiques et dramatico-musicales, les
œuvres chorégraphiques, les œuvres audiovisuelles y compris les œuvres
cinématographiques et les vidéogrammes, les œuvres des beaux arts y compris les
dessins, les peintures et les gravures, les œuvres photographiques, les cartes
géographiques et les expressions du folklore » (article 3).
- Au Maroc, « les droits patrimoniaux [i.e. utilisation et commercialisation] sur une
œuvre sont protégés pendant la vie de l’auteur et 70 ans après sa mort » (article 25).
Quant aux droits moraux [paternité de l’œuvre], « ils sont imprescriptibles, inaliénables
et transmissibles aux ayants droit » (article 25).

Sources : Divers textes législatifs marocains et français (B.O.)


« Introduction au Droit » (Dunod, 2009),
« Droit Général » (Gualino, 2009),
« Fondamentaux du Droit » (Nathan, 2010)
« Introduction au Droit » (Hachette, 2008).

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