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➢ Cadre général :

La propriété littéraire et artistique accorde des droits privatifs à des titulaires de droits
d'auteur ou de droits voisins dont l'importance et la puissance constituent une spécificité.

Les droits d'auteurs sont accordés aux créateurs d'une œuvre de l'esprit selon la terminologie
utilisée en la matière (écrivains, compositeurs, etc.), mais également à leurs ayants droit après
leur disparition.

Les droits voisins1 sont accordés à ceux que l'on considère comme des auxiliaires de la
création artistique (artistes interprètes, producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes,
entreprises de communication audiovisuelle)2.

Il s’agit à la fois de création humaine, de surcroît de nature artistique, et d’intérêts


économiques. La Déclaration universelle des droits de l'homme intégrait cette double
dimension : « Chacun a droit à la protection des intérêts moraux et matériels de toute
production scientifique, littéraire et artistique dont il est l'auteur » (Déclaration de 1948, art.
27-2).

L’objet de la propriété littéraire et artistique est incorporel, de sorte que l’on doit distinguer
l’œuvre de son support : ainsi, celui qui est propriétaire d’un CD ou d’un DVD (propriétaire
d’un objet) ne dispose pas de droits sur les œuvres qui y sont fixées (chanson, film…) ; c’est
cette constatation de base qui permet d’expliquer pourquoi le propriétaire ne peut pas
diffuser en public, échanger, copier, etc., à partir d’un bien dont il est, matériellement,
propriétaire3.

➢ Cadre institutionnel :

Au niveau national, la protection et l'exploitation des droits d'auteur et des droits voisins tels
qu'ils sont définis par la loi 2-00 sont confiées au Bureau marocain du droit d’auteur (BMDA)4.

Créé par Décret n° 2.64.406 du 8 mars 1965, le BMDA est placé sous la tutelle du Ministère de
la Communication. C’est un organisme pluridisciplinaire qui est nanti d’un monopole légal de
représentation et s’occupe de toutes les catégories professionnelles d’auteurs. Il accorde les
autorisations pour l’utilisation du répertoire protégé, perçoit les redevances de droits d’auteur
y afférentes et assure aux auteurs la répartition des droits leur revenant.

Cela dit, avec l’entrée en vigueur de la loi n° 25-19 relative au Bureau marocain des droits
d’auteur et droits voisins5, tant les missions que le statut attribués au BMDA ont été renforcés

1
Ce sont des droits voisins du droit d’auteur ; l’expression est réduite par commodité
2
Cette seconde catégorie accueille, sans le dire aussi clairement, les producteurs de bases de données
3
Xavier DAVERAT, Droit de la propriété littéraire et artistique, Collection Lexifac droit, 2011, 220 p. ; Xavier
DAVERAT, « Introduction », Droit de la propriété littéraire et artistique, UNJF, (RECO.HTM) ;
cours.unjf.fr/course/view.php?id=120 ; consulté le 29 avril 2021
4
Article 60 de la loi 02-00 tel que modifié et complété par l’article premier de la loi n° 34-05
5
B.O. n° 7158 du 05-01-2023
avec la transformation dudit bureau en un organisme de gestion collective6 doté de méthodes
de gestion modernes à la hauteur des défis du secteur. Il porte désormais la dénomination du
« Bureau marocain des droits d’auteur et droits voisins ». Le tout en contribuant, entre
autres, à l’amélioration de la situation morale et financière des artistes.

Au niveau international, l'instance mondiale chargée des services, des politiques, de


l'information et de la coopération en matière de Propriété intellectuelle7 est l’Organisation
Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).

C’est une institution des Nations Unies financièrement autonome, comprenant 193 États
membres8. Sa mission consiste à promouvoir l’élaboration d’un système international de
propriété intellectuelle équilibré et efficace qui favorise l’innovation et la créativité dans
l’intérêt de la société. La mission, les organes directeurs et les procédures de l’OMPI sont
énoncés dans la Convention instituant l’OMPI, qui a créé l’OMPI en 1967.

➢ Cadre législatif :

Au niveau national9, est en vigueur la loi 2-00 sur les droits d’auteur et droits voisins10 telle
qu’elle a été modifiée et complétée par la loi n° 34-0511 (2006), la loi n° 79-12 (2014)12 et tout
récemment par la loi 66-19 (Mai 2022)13.

D’un point de vue historique, il convient de rappeler que la première loi marocaine relative à
la protection des œuvres littéraires et artistiques a été promulguée le 23 juin 1916 suivie de
celles du 9 novembre 1926 et du 16 février 1927. Ces lois ont été abrogées et remplacées par
celle du 29 juillet 1970, elle-même abrogée et remplacée par la loi 2-00 précitée 14 telle qu’elle
a été amendée ; d’abord par la loi 34-05 précitée, pour contribuer à l’amélioration du système
national de protection des droits d’auteur et des droits voisins, par l’adjonction de nouvelles
dispositions dont le renforcement de la protection des titulaires de droits et des
consommateurs contre les actes de contrefaçon et de piratage.

6
Sous forme de personne morale de droit public doté de l’autonomie financière
7
Aussi bien pour la propriété littéraire et artistique que pour la propriété industrielle.
8
www.wipo.int/members/fr/; consulté le 30 avril 2021
9
Voir aussi le cadre réglementaire : Décret 17 avril 2015 fixant la composition et les attributions de la commission
de la « copie privée » instituée au sein du BMDA et Décret 15 février 2016 concernant l’établissement de la liste
des supports d’enregistrement utilisables et des appareils d’enregistrement soumis à la rémunération pour copie
privée ainsi que les prix forfaitaires applicables à la copie privé.
10
Bulletin Officiel n° 4810 du 3 rabii 1421 (06 juillet 2000), p. 604.
11
Dahir n° 1-05-192 du 15 moharrem 1427 (14 février 2006) portant promulgation de la loi n° 34-05 modifiant et
complétant la loi n° 2-00 relative aux droits d’auteur et droits voisins; Bulletin Officiel n° 5400 du 1er safar 1427
(2 mars 2006), p. 325
12
Dahir n° 1-14-97 du 20 rejeb 1435 (20 mai 2014) portant promulgation de la loi n° 79-12 complétant la loi n°
2-00 relative aux droits d’auteur et droits voisins; Bulletin Officiel n° 6266 du 21 chaabane 1435 (19 juin 2014),
p. 3588
13
Dahir n° 1-22-35 du 23 chaoual 1443 (24 mai 2022) portant promulgation de la loi n° 66-19 modifiant et
complétant la loi n°2-00 relative aux droits d’auteur et droits voisins.
14
bmda.ma/info/legislation-loi-–-legislation-nationale ; consulté le 30 avril 2021
La deuxième modification portant promulgation de la loi 79-12 a institué la rémunération
pour copie privée15 permettant la compensation financière du préjudice subi par les titulaires
de droits d’auteurs et droits voisins avec cette exception de copie privée au bénéfice du
consommateur.

La nouvelle loi n° 66.19 modifiant et complétant la 2.0016 vise le renforcement de la


protection et de la promotion de nouveaux genres. Cette loi accorde par ailleurs une attention
particulière aux arts plastiques et visuels, surtout en ce qui concerne les procédures juridiques
inhérentes au droit de suite17, le service du partage du contenu via Internet à l’instar du droit
d’exploitation des contenus et des œuvres visuelles protégées sur le net.

Au niveau international, le Maroc est signataire des principales conventions et traités relatifs
à la protection littéraire et artistique, notamment18 :

▪ La convention de Berne (1886) relative à la protection des œuvres littéraires et


artistiques, administrée par l’OMPI19

15
La rémunération pour copie privée permet de copier pour notre usage privé des contenus protégés et réalisés
à partir d’une source légale. Ce qui nous permet par exemple d’enregistrer notre musique ou nos images favorites
sur notre smartphone, de lire nos livres sur notre tablette… En contrepartie, les fabricants (ou importateurs) de
ces supports de stockage versent une rémunération pour les auteurs, artistes, éditeurs et producteurs des
œuvres qui sont ainsi dupliquées.
Cette rémunération compense le préjudice subi par les auteurs, artistes, éditeurs et producteurs du manque à
gagner résultant de cette utilisation massive et gratuite de leurs œuvres. Concrètement, en achetant des
supports vierges (cd, dvd…) ou du matériel servant à copier la musique et les images (baladeurs numériques, clé
USB…), une partie du prix de ces supports rémunère les créateurs, les éditeurs, les interprètes et les producteurs.
16
Dahir n° 1-22-35 du 23 chaoual 1443 (24 mai 2022) portant promulgation de la loi n° 66-19, opcit.
17
En vertu de l’article 1.28 de la loi n°66-19, l’expression « droit de suite » désigne le droit inaliénable de
perception d’un pourcentage du produit de toute vente d’une œuvre d’art graphique ou d’art plastique après la
première vente opérée par l’auteur ou par ses ayants droits lorsque cette opération s’effectue par un
professionnel du marché de l’art qui intervient en tant que vendeur, acheteur ou intermédiaire.

18
bmda.ma/info/legislation-conventions-et-traites ; consulté le 3 mai 2021
19
Convention de Berne relative à la protection des œuvres littéraires et artistiques (9 septembre 1886),
administré par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle OMPI (B.O n° 6058 page 2208) / (B.O
n° 2986 page 55) / (B.O n° 3879 page 52); Adhésion du Maroc : 16/06/1917 ; Ratification de l’acte de Bruxelles :
22/ 05/1952 ; Ratification de l’acte de Stockholm : 06/08/1971 ; Ratification de l’acte de Paris du 24 juillet 1971
: 17/02/1987
La Convention de Berne a été adoptée le 12 septembre 1886. Sa dernière révision a été opérée par l'Acte de
Paris en 1971. Les États parties à la convention constituent l'Union de Berne. La Convention impose le principe
du traitement national, selon lequel les œuvres ayant pour pays d'origine l'un des États membres de l'Union
doivent bénéficier dans chaque État contractant de la protection que ce dernier accorde aux œuvres de ses
propres auteurs. Autrement dit, le droit d'auteur interne s'applique tant aux œuvres des auteurs nationaux qu'à
celles des auteurs étrangers originaires d'un pays de l'Union. C'est l'assimilation de l'unioniste au national. Les
droits définis par la Convention de Berne constituent un minimum conventionnel que chaque État de l'Union
s'est engagé à appliquer. Le texte fixe une liste des œuvres littéraires et artistiques (art. 2). Elle contient des
dispositions relatives au droit moral, circonscrit aux droits à la paternité de l'œuvre et au droit de s'opposer à
toute déformation, mutilation ou autre modification de cette œuvre ou à toute autre atteinte à la même œuvre
préjudiciable à son honneur ou à sa réputation (art. 6 bis, 1). De plus, alors que notre droit moral est
imprescriptible, celui défini par la convention est maintenu, après la mort de l'auteur « au moins jusqu'à
l'extinction des droits patrimoniaux » (art. 6 bis, 2). Encore peut-on relever qu'il n'est pas question d'inaliénabilité
du droit moral dans la convention. S'agissant des droits pécuniaires, les auteurs jouissent du droit exclusif
▪ La convention de Genève ou convention universelle sur le droit d’auteur (1952),
administrée par l’UNESCO20
▪ La convention instituant l’OMPI (1967)21
▪ La convention Satellites de Bruxelles (1974) concernant la distribution de signaux
porteurs de programmes transmis par satellite22
▪ L’accord ADPIC (TRIPS), Marrakech (1994): annexe relative à la propriété intellectuelle
de la Convention instituant l’Organisation Mondiale du Commerce23
▪ Les traités Internet (1996) de l’OMPI: Traité sur le droit d’auteur (WCT)24
▪ Le traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les
phonogrammes (WPPT)25
▪ Le traité de Beijing sur les interprétations et exécutions audiovisuelles (2012)26
▪ Le traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et
des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres
publiées (2013)27

d'autoriser la traduction, la reproduction, la représentation, la radiodiffusion, ou l'adaptation de leurs œuvres,


moyennant rémunération.
20
Convention Universelle sur le Droit d’Auteur (6 septembre1952) administrée par l’UNESCO (B.O n° 3204 page
459) ; Adhésion du Maroc : 08/02/1972 ; Ratification de l’acte de Paris du 24 juillet 1971 : 28/10/1975
Adoptée le 6 septembre 1952 sous l'égide de l'UNESCO, la convention de Genève est moins contraignante que
la Convention de Berne, et était donc susceptible d’attirer des États réticents à l'adhésion à cette dernière.
Fonctionnant aussi sur le principe du traitement national, la Convention de Genève se caractérise d’abord par le
fait que le droit moral y est inexistant. On relève simplement une disposition obligeant, en cas de licence, qu'une
traduction soit correcte… L’éviction du droit moral par la Convention universelle devait permettre d’attirer les
pays de copyright. Les dispositions relatives au droit patrimonial, au contraire, offrent à l'auteur le droit exclusif
d'autoriser la reproduction par n'importe quel moyen, la représentation et l'exécution publique et la
radiodiffusion de son œuvre, son adaptation ou sa traduction. Mais les seuils de protection peuvent varier : outre
que certaines licences légales peuvent être instituées par les législations nationales (en matière de traduction,
ainsi qu'à usage scolaire, universitaire ou de recherche, dans les pays en voie de développement) on retiendra
surtout que chaque État peut déroger aux droits définis dans la convention, pourvu qu'il accorde un « niveau
raisonnable de protection effective » aux auteurs, ce qui offre un système à la carte. De plus, la durée de
protection prévue est inférieure à celle édictée par la Convention de Berne, étant fixée pour la durée de la vie
de l'auteur et 25 ans après son décès. Signalons qu’il n'y a pas de formalités prévues par le texte conventionnel
; toutefois, si des États en définissent, elles sont considérées comme remplies dès qu'on relève la présence de la
mention copyright. Celle-ci est formée d'un © suivi du nom du titulaire des droits et de l'année de première
publication de l'œuvre.
21
Convention instituant l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (Genève, 14 juillet 1967) (B.O
n° 2986 page 55)) ; Adhésion du Maroc : 27/07/1971
22
Convention Satellites de Bruxelles (21 mai 1974)concernant la distribution de signaux porteurs de programmes
transmis par satellite (B.O n° 3204 page 459) / (B.O n° 3359 page345) ; Adhésion du Maroc : 30/06/1983
23
Accord Trips ( annexe relative à la propriété intellectuelle de la Convention instituant l’Organisation Mondiale
du Commerce) ; Signé par le Maroc 15 avril 1994 à Marrakech
24
Traités Internet (1996) de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle : Traité sur le droit d’auteur
(WCT)
25
Traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les
phonogrammes (WPPT) (B.O n° 6100 page 2731)
26
Traité de Beijing sur les interprétations et exécutions audiovisuelles (B.O n° 6262 page 3521)
27
Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant
d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées (B.O n° 6344 page 1069)

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