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MIDJRESSO K.

Romain
Chercheur-associé à la Chaire UNESCO-DPHD
THEME : Coups d’État des cols blancs en Afrique : la personnalisation du pouvoir en débat.

INTRODUCTION

« L’État, c’est moi ! »1. Cette affirmation, symbole d’un absolutisme monarchique, semble devenir dans les
régimes démocratiques africains, le mot d’ordre de la plupart des chefs d’État qui se considèrent comme
« Père de la Nation »2, « seul élu du peuple »3, « Président fondateur »4, « Grand camarade de lutte » ou
encore « le catalyseur [et le seul] créateur de la Nation »5. À ce titre, pour résoudre les problèmes qui
surviennent durant leur mandat, ces chefs d’État africains adoptent, remettent en cause, suspendent,
abrogent puis renouvellent la Constitution,6 au point de présenter l’image d’une Afrique qui cherche.
Précisément il présente l’image d’une Afrique dont : « …l’État cherche ses institutions, la démocratie, son
expression, la justice, son éthique, la société ses valeurs, l’économie, sa croissance, le peuple, lui, cherche
sa survie »7. Pour permettre au peuple de vivre plutôt que de survivre, il est proposé la présente
communication qui s’intitule : « Coups d’État des cols blancs en Afrique : la personnalisation du
pouvoir en débat ». Avant tout débat et en guise de prolégomènes notionnels, il faut s’accorder sur : « la
personnalisation du Pouvoir » et les « coups d’État des cols blancs ».

La « personnalisation du pouvoir » est le procédé par lequel, l’homme d’État qui détient le Pouvoir
s’accommode des structures constitutionnelles pour mettre en crise les rapports entre institutions. C’est-à-
dire, l’homme d’État se place dans les cadres constitutionnels et faire en sorte que sa personnalité émerge
des institutions, mais n’en fait cependant pas abstraction.8 Ainsi, on assiste à une sorte de fusion-acquisition
au profit de l’homme d’État entre son personnage et l’institution qu’il incarne. La personnalisation du
pouvoir s’oppose à « l’individualisation du Pouvoir » qui désigne l’hypothèse où : un individu exerce le
Pouvoir en dehors des cadres habituels de l’État, c’est-à-dire en dehors des titres traditionnels des régimes
constitutionnels qu’il ignore ou détruit rapidement après son accession au pouvoir. Tandis que

1C’est est une formule apocryphe que Louis XIV, roi de France et de Navarre, aurait prononcée le 13 avril 1655 devant
les parlementaires parisiens. Néanmoins, les historiens contestent que cette phrase, qui n'apparaît pas dans les registres du
parlement, ait réellement été prononcée par Louis XIV. La paternité de la formule reviendrait à Pierre-Édouard Lémontey dans
son Essai sur l'établissement monarchique de Louis XIV et sur les altérations qu'il éprouva pendant la vie de ce prince (1818), qui
écrit : « Le Coran de la France fut contenu dans quatre syllabes et Louis XIV les prononça un jour : “L'État, c'est moi !” ».
2 Voir Claisse (A), Le Premier ministre de la V République, Paris, LGDJ, 1972, pp.23-27. Michel Debré, écrit Alain Claisse, « n’est

pas seulement le premier ministre titulaire du titre [de Premier ministre sous la Ve République NDA], mais aussi le principal
inspirateur de la constitution de 1958 ».
3 Nicéphore SOGLO, président de la République du Bénin de 1991-1996.
4 Comme le Maréchal Mobutu Sesse séko. Conac (G.), « L’évolution constitutionnelle des États francophones d’Afrique noire et

de la République Démocratique Malgache », p.14


5 Tixier (G.), « La personnalisation du pouvoir dans les États de l’Afrique de l’Ouest », RDP, n°6, 1965, p.1134.
6 Maurice Ahanhanzo Glele, cite par Koffi AHADZI, « Les nouvelles tendances du constitutionnalisme africain : le cas des États

d’Afrique noire francophone », La revue du CERDIP, volume I, N°2, Juillet-décembre 2002, p.35.
7 Jean-Jacques Raynal, « Le renouveau démocratique béninois : modèle ou mirage », Afrique contemporaine, n°160, 1991, p.25.
8 Albert MABILEAU, « la personnalisation du Pouvoir dans les gouvernements démocratiques », op. cit. p.40

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l’individualisation du Pouvoir détruit le régime démocratique, la personnalisation du Pouvoir9 par contre,


bien que ne le détruisant pas, cherche au contraire à s’y intégrer pour mettre en crise les rapports entre les
institutions afin que nul ne puisse limiter l’action de l’exécutif. La personnalisation du pouvoir a pour
finalité de créer au sein du régime constitutionnel un mécanisme suivant lequel, l’allégeance par les autres
pouvoirs publics, notamment le législatif et le judiciaire au chef de l’État est la seule et véritable condition
de leur fonctionnement. Quant aux « coups d’État des cols blancs », ils désignent à l’occasion de la
présente étude : toute modification ou réédition de la Constitution par des personnalités civiles de grande
réputation, soit pour se maintenir au pouvoir, soit pour organiser la succession au Pouvoir au moyen de la
cooptation.

Coopter en Afrique n’est pas diable, mais requiert d’accepter de donner pour recevoir. Si majoritairement
en Afrique des cooptations ont été rendues possibles, par exemple de Léon Mba à Omar Bongo Ondimba,
de Ahmadou Ahidjo à Paul Biya pour ne citer que ceux-là, c’est parce que le processus de décolonisation
a entrainé l’avènement et le développement de nouveaux régimes constitutionnels paradoxalement autour
d’un Pouvoir personnalisé10.

Or, en principe, le fondement unique des régimes constitutionnels est l’institutionnalisation du Pouvoir.
C’est-à-dire que dans un régime constitutionnel, le pouvoir s’identifie à un ensemble d’institutions, qui
encadrent les individus titulaires de l’autorité et, par le jeu de leurs rapports, limitent les gouvernants.11 Ce
qui favorise l’avènement de l’État de droit qui promeut dans un premier temps, l’existence de normes
hiérarchisées assortie de l’obligation pour les gouvernants de respecter la « norme mère »12 qu’est la
Constitution. Et, dans un second temps, l’effectivité d’un régime de type libéral13 par la consécration et la
reconnaissance des droits et des libertés fondamentales puis l’organisation régulière d’élections libres,
équitables et justes. Certain que l’institutionnalisation du Pouvoir est le fondement unique des régimes
constitutionnels, le président américain Barack Obama lors d’une visite officielle au Ghana disait :
« l’Afrique, au lieu d’avoir des hommes forts, doit avoir des institutions fortes ». Cette invitation du
président Obama bien que s’inscrivant dans la logique des régimes constitutionnels parait ignorer que les
institutions sont ce que les font, les hommes qui les animent. Car, la personnalisation du pouvoir en Afrique

9 M. Duverger distingue pouvoir personnel et pouvoir personnalisé, le premier sécrétant lui-même ses propres institutions, le second
jouant dans le cadre d'institutions préexistantes.
10 Albert MABILEAU, « la personnalisation du Pouvoir dans les gouvernements démocratiques », op. cit. p.41
11 Albert MABILEAU, « la personnalisation du Pouvoir dans les gouvernements démocratiques » in : Revue française de science

politique, 10ème année, n°1, 1960, p.40


12 Jean GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, 18e édition, Montchrestien, 2002, p.162.
13 R. DEGNI-SEGUI, Les droits de l’Homme en Afrique noire francophone, théories et réalités, Abidjan, Imprimob, 1998, p.14

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découle d’une part, de la tendance naturelle des gouvernés à réclamer que l’autorité s’incarne en un homme
« qu’on puisse louer et surtout blâmer de la réussite ou des échecs du gouvernement de l’État » et d’autre
part, de la volonté d’avoir un exécutif fort. Cette volonté d’avoir un exécutif fort a conduit en Afrique, à
une prolifération de régimes présidentialiste où le chef de l’État incarne l’autorité. Dans ces régimes
présidentialistes africains, l’homme d’État, détenteur du pouvoir exécutif a généralement tendance à mettre
en crise les autres institutions de la République au moyen d’un patrimonialisme et d’un clientélisme14
vigoureusement entretenu. Le patrimonialisme s’expliquent par l’omniprésence et l’omnipotence de
l’exécutif qui concentre l’essentiel des prérogatives politico-administratives entre ces seules mains au
mépris de la séparation des pouvoirs. En conséquence, lorsque durant ou à la fin de son mandat des
situations d’insécurité surviennent ou lorsque la durée de son mandat ne lui permet pas de concrétiser les
actes constitutifs de développement tel que promis au peuple, certains chefs d’État africain révisent ou
rééditent la constitution soit pour remettre en cause la limitation du mandat présidentiel, soit pour organiser
l’accession de leur dauphin au Pouvoir. Les organisations régionales et sous régionales ont cru que la remise
en cause de la limitation du mandat présidentiel était le socle de la personnalisation du pouvoir en Afrique
; et ont pour y remédier, adopter une série de traités dont : la charte africaine de la démocratie et des
élections15, le protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance16 et la Déclaration de
Bamako du 3 novembre 200017. Ces traités se sont avérés inefficaces parce qu’ignorant le véritable socle
de la personnalisation du pouvoir qu’est la prétendue garantie de la paix et du développement de l’État par
un seul individu : c’est le mythe de l’Homme providentiel. C’est ce mythe qui justifie l’intérêt de la présente
étude.

La présente étude revêt un intérêt théorique et pratique certain. Dans une perspective scientifique, elle vise
à prouver que le mythe de l’Homme providentiel est le fondement essentiel de la personnalisation du
pouvoir en Afrique. Dans une perspective sociologique, cette étude vise à proposer le mécanisme d’une

14 Le clientélisme est favorisé par les dons et le(s) parti(s)-États (Parti de la Révolution Populaire du Bénin (M. KEREKOU),
Rassemblement du Peuple Togolais (G. Eyadema), Parti Démocratique Gabonais (O. Bongo O.), Rassemblement Démocratique
du Peuple Camerounais (Ahmadou Ahidjo puis Paul Biya)), qui concourent à l’achat des consciences. Ce qui remet en cause la
vocation même de l’élection qui est de fonder la démocratie représentative et de légitimer le pouvoir. Dans un tel régime, l’élection
ne sert qu’à renforcer les pouvoirs autoritaires par le détournement du suffrage universel. (Ainsi, le parlement n’est plus un contre-
pouvoir, mais devient une institution à la solde de l’exécutif pace qu’ayant abandonné le contrôle de l’action gouvernementale et
concentré sur l’adoption de lois souvent indifférentes aux droits humains.)
15 Adoptée le 30 janvier 2007 à Addis-Abeba (Éthiopie)
16 Protocole additionnel aux protocoles sur la prévention des conflits armés qui en son article 2 de la section 2 du chapitre 1 :

« interdit la modification des constitutions six mois avant les élections ».


17 Adoptée après le symposium international sur le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et libertés dans l’espace

francophone : « a recensé les acquis, les insuffisances et échecs de la démocratie pour enfin proposer des solutions à l’ensemble
des pays africains.

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véritable déconstruction du mythe de l’Homme providentiel afin de satisfaire les aspirations pressantes des
peuples africains qui ont soif de la démocratie manifestée à l’occasion du « printemps de l’Afrique »18.

Il se pose dès lors la question de savoir : quel mécanisme pour la déconstruction du mythe de l’Homme
providentiel aux fins d’une institutionnalisation du pouvoir en Afrique ?

Selon le mythe de l’Homme providentiel, un chef d’État se considère comme le seul garant de la
« construction nationale ». Selon le Professeur Maurice Kamto, la « construction nationale » désigne
« l’unité nationale et le développement économique, social et culturel ». En d’autres termes, la construction
nationale désigne la paix et le développement de l’État. C’est pourquoi, déconstruire le mythe de l’Homme
providentiel revient à adopter une double démarche consistant successivement a démontré l’impossible
garantie de la paix (I) et du développement (II) de l’État par un seul individu.

I- UNE DÉCONSTRUCTION DE L’IDÉE DE SEUL GARANT DE LA PAIX

La paix signifie en Afrique : l’unité nationale. L’unité nationale désignerait, l’absence de conflits
identitaires, confessionnels, intracommunautaires ou armés. Pour certains chefs d’État africains, la garantie
de l’unité nationale est l’une des fonctions régaliennes de l’État. À ce titre dans les régimes constitutionnels
africains, les chefs d’État se sont très tôt considérés comme les seuls garants de l’unité nationale. Pour ce
faire, ils adoptèrent deux attitudes majeures. D’une part, certains chefs d’État africains faisaient de la lutte
contre la grande diversité ethnique la solution à l’unité nationale. D’autre part, certains croyaient que pour
éviter des divisions ethniques préjudiciables, il suffisait de mettre en veilleuse le pluralisme politique
considéré comme une « force de désintégration »19 très tendancieuse.

Relativement aux chefs d’État qui pensait que la grande diversité ethnique faisait obstacle à l’unité
nationale, pour eux la solution résidait dans la détribalisation et la désethnicisation de l’État. Or, la
détribalisation et la désethnicisation, dans plusieurs États africains, ont débouché sur des conflits
identitaires, confessionnels, intracommunautaires et armés aux conséquences dramatiques. C’est le cas du
« Libéria, de Sierra Leone, du Nigéria (guerres politico-confessionnelles entre le Nord musulman
haoussa-fulani et Sud chrétiens Ibo-yoruba), du Ghana (conflits tribaux en 1992 entre Nanounba et
Konkomba à la suite du vol d’un coq), […], de Guinée Conakry (entre Peuls et malinké), de Côte d’Ivoire
avec le concept d’ivoirité qui a accouché d’une poudrière identitaire soldée pas des milliers de morts, du

18 A. Bourgi, C. Casteran, Le printemps de l’Afrique, Paris, L’Harmattan, 1991. A. Bourgi, L’évolution du constitutionnalisme en
Afrique : du formalisme à l’effectivité, in RFDC, 2002, n°52 pp.721-748
19 Kobo (P-C), Leaders politiques et Unités nationales, Senghor, Sékou et Houphouët-Boigny, Mémoire D.E.A, Droit Public, Nice,

1980, pp.34 et s.

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Niger (entre sédentaires Haoussa, Zarma et nomades peuls ou touareg) et dans la région des Grands Lacs
(République démocratique du Congo, le Burundi, l’Ouganda et le Rwanda [le génocide entre Hutu et
tutsi], les violences postélectorales au Kenya entre les partisans du Président de la République et ceux de
son Premier ministre tous deux d’ethnies différentes], de la Mauritanie (conflits entre noirs et populations
arabo-berbères dans les années 1990 ». En somme la garantie par un seul individu de l’unité nationale au
moyen de la détribalisation et de la désethnicisation a montré ces limites. Quant à la seconde catégorie de
chefs d’État africains pour qui il suffisait de mettre en veilleuse le pluralisme politique pour éviter des
divisions ethniques préjudiciables, la solution résidait selon eux en une floraison en Afrique de partis
uniques20 ? Ce fut le cas du PRPB21 au Bénin, du RPT22 au Togo, successivement du BDG23 et du PDG24
au Gabon et de l’UNC25 puis du RDPC26 au Cameroun pour ne citer que ceux-là. Pour ces chefs d’État, le
parti unique était la véritable solution au maintien de la cohésion nationale, à la préservation et la
conservation de l’unité nationale qui pouvaient être mises à mal par la compétition pour le pouvoir et la
liberté d’expression qui caractérise la démocratie. C’est à juste titre que le 1er janvier 1968, le chef de l’État
gabonais Omar Bongo Ondimba dans sa première déclaration radiodiffusée, martelait27 sa conviction de
parvenir à l’union de tous les gabonais par le bâillonnement politique en déclarant que s’il laissait les trois
anciens partis politiques ethniques jusqu’en « 1967, le Gabon divisé, tiraillé pas les uns et les autres, serait
devenu la proie de toutes les convoitises ». Cette fonction réservée au parti unique a conduit Michel Prouzet
à affirmer que l’unité nationale que prônent les dirigeants africains est devenue une « idéologie du
rassemblement » qui sert essentiellement au renforcement du pouvoir. Et, selon le Professeur Joël AIVO :
« […], l’unité nationale […] que brandit les chefs d’État africain, a servi de prétexte à la conquête du
pouvoir, mais aussi de moyens et de support aux différentes techniques nécessaires à sa conservation »28.
Une fois encore, le parti unique a aussi montré ses limites puisque conduisant directement à la dictature
d’un parti unique, à une alliance avec l’armée par l’exécutif aux fins du bâillonnement des citoyens puis au
musellement des opposants. Cet échec conduisit au retour au pluralisme politique. Nonobstant ce retour,

20 Mahou (A.), L’avènement du parti unique en Afrique noire, L’expérience des États d’expression française, Paris, LGDJ, 1969,
423 p.
21 Parti de la Révolution Populaire du Bénin (PRPB)
22 Rassemblement du Peuple Togolais (RPT)
23 Bloc Démocratique Gabonais (BDG)
24 Parti Démocratique Gabonais (PDG)
25 L’Union Nationale Camerounaise
26 Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC)
27 : « Il est indéniable, je le répète, tous ceux qui ont vécu cette époque peuvent d’ailleurs en témoigner, que l’esprit de compétition

- compétition entre les leaders politiques, mais aussi entre les groupes ethniques- qui a présidé à la fondation des trois anciens
partis a été pendant des années, un élément de désordre et de stagnation qui a cristallisé des divisions plus artificielles que réelles
[…] Si j’avais laissé les choses aller en 1967, le Gabon divisé, tiraillé pas les uns et les autres, serait devenu la proie de toutes les
convoitises ».
28 Joël AIVO, « Le Président de la République en Afrique noire francophone », thèse de doctorat, p.256

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certains chefs d’État africain actuels semblent substituer à l’unité nationale la sauvegarde des acquis. C’est
le cas en Côte d’Ivoire, où le chef de l’État Alassane Ouattara pourtant élu en 2010 et réélu en 2015 affirme
que : « …les défis auxquels nous sommes confrontés, le maintien de la paix et de la sécurité, la crise
sanitaire, le risque que tous nos acquis (depuis 2011) soient compromis, tout cela m’amène à reconsidérer
ma position ». En claire, au risque que tous les acquis depuis 2011 soient compromis, il décide de briguer
un troisième mandat. Alors même que la Constitution ivoirienne en vigueur limite à deux le nombre de
mandats présidentiels. Selon le chef d’État ivoirien, l’adoption de la loi fondamentale en 2016 a remis les
compteurs à zéro. La confiscation du pouvoir de toute évidence ne saurait être dans les démocraties
contemporaines une solution à la cohésion nationale. C’est pourquoi la présente étude propose le
dialogue interculturel29 et le dialogue politique aux fins de la garantie de l’unité nationale. Ce dialogue
consistera au moyen de la communication et de la compréhension en une tolérance et en une solidarité entre
les forces vives de la nation (les membres des différents partis politiques, des différentes cultures, traditions
et confessions).

Par ailleurs, en Afrique, les problèmes de violences exercées par des acteurs non étatiques30 dans de
nombreuses régions constituent une mise en danger réelle de la paix31 civile. Plus dangereux encore, les
violences exercées en dehors du cadre et des normes des États ou des armées étatiques, introduisent des
défis tout à fait nouveaux dans la construction de la paix au point de conduire à la conclusion que la paix
n’est plus une question exclusive des États. Si l’État n’est plus le seul garant de la paix, alors, comment un
chef d’État peut s’estimer seul garant de la paix de l’État. Et, pourtant au Tchad, en considération du
contexte sécuritaire, Idriss Deby Itno s’est toujours présenté comme le seul garant de la paix du Tchad, car,
le seul pouvant lutter efficacement contre le terrorisme au Tchad. En conséquence il n’a hésité nonobstant
les contestations populaires à briguer un sixième mandat présidentiel. Et comme si, la capacité à garantir la
paix du Tchad et à lutter efficacement contre le terrorisme était héréditaire, juste après l’annonce du décès
de Idriss Deby Itno, son fils Mahamat Idriss Deby s’empare du pouvoir au mépris de la Constitution qui
prévoyait que la présidence intérimaire tchadienne soit assurée par le président de l’Assemblé nationale.
Officiellement, selon les organes de la transition tchadienne, le président de l’Assemblée nationale a
renoncé à assumer cette responsabilité. Ce fut aussi le cas de Faure Gnassingbé au Togo qui, juste après le

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30Groupes armés, groupes d’extrémismes religieux
31 Selon le Dictionnaire historique de la langue française : « la paix désigne la concorde, la tranquillité régnant dans les rapports
entre deux ou plusieurs personnes ». Dans un autre sens, selon le Grand dictionnaire Universel du XIX e siècle, la paix désigne la
« situation d’un État qui n’a aucune guerre à poursuivre ou à soutenir ».

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décès de son père, empêcha le Président de l’Assemblée nationale d’entrée sur le territoire et s’empare du
pouvoir.

L’exposé des procédés du maintien de l’unité nationale par les chefs d’État africain conduit à s’interroger
sur la réelle paix recherchée par ceux-ci ainsi que sur l’efficacité des moyens employés. Relativement à la
paix recherchée, pendant que la tendance universelle tant vers une paix durable, la paix recherchée par les
dirigeants africains semble être une paix personnelle et donc temporaire. Caractérisée par deux facteurs.
Primo, une absence de remise en cause de l’idéologie du détenteur du pouvoir exécutif. Secundo, une
absence de poursuite pénale aussi bien pendant qu’à la fin de leur mandat. Ce qui ne favorise pas une saine
gestion économique et financière. Quant aux moyens employés, il est vrai que les pays africains sont
confrontés à des conflits multiformes et complexes, pour lesquels des propositions de solution plus
holistique s’avèrent nécessaires. Néanmoins, les propositions de solution en vue d’une paix durable
devraient tenir compte de l’État de droit. Ce qui implique un respect continu de la Constitution tant durant
les périodes conflictuelles, transitoires que post-conflictuelles.

En effet, durant les périodes conflictuelles, le respect de la Constitution induit un respect minimum des
libertés, le respect de l’ordre constitutionnel établi et une application des normes internationales se
rapportant aux femmes, à la paix et à la sécurité. Au titre desdites normes internationales, il sied de proposer
le respect des sept résolutions du conseil de sécurité des Nations Unies, notamment les résolutions 1325
(2000), 1820 (2008), 1888 (2009), 1889 (2009), 1960 (2010), 2106 (2013) et 2242 (2015). Ces résolutions,
dans un premier temps, mettent en lumière le lien évident entre la participation des femmes et la durabilité
accrue des accords de paix et proposent le renforcement de la participation et du leadership des femmes et
des organisations de femmes dans les stratégies de lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme. Dans
un second temps, lesdites résolutions proposent, la formation des médiateurs sur l’impact de processus
inclusifs et sur la manière de les réaliser. Car : « au cours des trois dernières décennies, les médiateurs ont
peiné à résoudre le conflit en Angola, au Burundi, aux Comores, en République Démocratique du Congo
(RDC), en Côte d’Ivoire, au Kenya, au Lesotho, au Libéria, à Madagascar, au Mozambique, au Rwanda,
en Sierra Leone, en Somalie, au Soudan, en Ouganda et au Zimbabwe. Cet échec résulte de l’ignorance des
organisations régionales et sous-régionales du fait que : « la médiation32 est une spécialisation et non de la
diplomatie ». Selon Laurie Nathan, si plusieurs médiations ont échoués en Afrique, c’est parce qu’on ne
procède pas de façon appropriée en particulier dans l’identification des médiateurs qui doivent certes

32Elle est un processus de dialogue et de négociation dans lequel un tiers aide deux ou plusieurs parties en conflit qui consentent
de gérer ou de résoudre leur différend sans recourir à la force.

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avoir des aptitudes diplomatiques, mais aussi et surtout de la professionnalisation33 dans ce domaine à
travers un haut niveau de formation et d’expérience ainsi que de la crédibilité. Cela est d’autant plus
réaliste qu’on questionnerait les chances du succès d’une médiation lorsqu’un ancien auteur de coup d’État
est désigné médiateur dans des conflits. Que transmettrait-il en termes d’éthique ou de crédibilité de
médiation ? Aussi, il faut éviter qu’en Afrique, les accords de paix aboutissent systématiquement au partage
du pouvoir politique et économique en intégrant les belligérants34 dans l’armée et dans l’élite politico-
administrative sans aucun critère d’exigence. Car cela ressemble davantage à un blanchiment politique de
la violence, à la prime à la violence et à la consécration de l’impunité qu’à une recherche de paix durable.
Pour une paix durable, il faudra plutôt que les médiateurs adoptent leurs stratégies de résolution des conflits
en fonctions des facteurs endogènes35 et exogènes du conflit.36

Ensuite, les périodes transitoires devraient être gérées par des civils pour un retour rapide à l’ordre
démocratique. D’ailleurs on l’a vu lorsque l’ancien chef d’État centrafricain, Michel Djotodia est tombé en
2014, qu’un consensus a été vite trouvé pour une transition gérée par un civil, et de surcroit une dame en la
personne de Mme Catherine Samba Panza. Et cela a permis au pays de connaitre une stabilité et d’organiser
des élections inclusives et crédibles. Cela a été le cas aussi au Burkina Faso lorsque Blaise Compaoré est
renversé en 2014 et au Mali après la chute du président Amadou Toumani Touré en 2012.

Enfin, durant la période post-conflit, la paix durable supposerait une démocratisation notamment des
processus électoraux et une effectivité des droits socio-économiques. Ceci emporte l’organisation régulière
d’élections justes et équitables, l’éducation des forces de défense et de sécurité à une éthique professionnelle
afin qu’ils œuvrent au profit de la consolidation de la paix puis la répartition équitable des ressources de
l’État comme il sera développé plus loin.

De tout ce qui précède, il est évident qu’un seul individu ne saurait prétendre être le garant de la paix d’un
État. Non seulement parce que l’État n’est plus seul garant de la paix, mais aussi du fait de la mutation et
de la complexification des conflits. Si un individu ne peut seul garantir la paix d’un État, peut-il tout au
moins prétendre garantir son développement ?

33 Une mise en place d’un système d’évaluation des médiateurs, en particulier par rapport à leurs aptitudes dans ce domaine – Tirer
des leçons sur les erreurs commises précédemment, surtout en ce qui concerne l’appréciation politique – Susciter de bonnes
connaissances afin de former et de faire des recherches pour alimenter ces dernières – comprendre l’approche basée sur la
confiance : construire une relation entre le processus de médiation et les médiateurs.
34 Car la sanction de ces derniers à un triple objectif : resocialisation, réparation globale de la victime puis le rétablissement de la

paix sociale.
35 En favorisant le dialogue politique et le dialogue interculturel.
36 Relations internationales tumultueuses

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II- UNE DÉCONSTRUCTION DE L’IDÉE DE SEUL GARANT DU DÉVELOPPEMENT

En Afrique, entre 1970 et 1990, le développement s’est mué en développementalisme. Le


développementalisme est une idéologie politique à deux lignes fondamentales. La première consiste à
prioriser le progrès et le bonheur des populations.37 La seconde est marquée par l’intention manifeste de
déroger à la conception classique de la démocratie pluraliste ou tout au moins, la volonté de l’adapter aux
impératifs de développement.

Les dirigeants africains par goût du pouvoir, et à la quête de la stabilité politique et sociale, ont fait de
l’intention de déroger à la démocratie, notamment au principe électif et au régime de liberté, l’essentiel de
leur politique d’action gouvernementale. Ils ont érigé le progrès et le bonheur des populations en un alibi
de légitimation du bâillonnement des citoyens et de musellement des opposants. Nonobstant, la stabilité
politique et sociale, qui prévalait et qui était considérée comme le vecteur directeur du développement
notamment de la lutte contre la pauvreté, très peu sont les pays africains qui ont adopté des réformes sociales
et ont fait des choix économiques stratégiques mêmes les plus amers. Selon le Professeur Joël AIVO,
l’autoritarisme africain résultant du développementalisme : « n’a en effet engendré que de la désolation,
laissant derrière lui et sur ses décombres, la pauvreté, la misère, la famine et un véritable marasme
sociopsychologique ». Le développementalisme a permis à la plupart des chefs d’État africains de conserver
le pouvoir sans pouvoir améliorer la vie de leur population ou moderniser leurs États.

Le développementalisme en Afrique noire s'est avéré stérile, mais pourtant fécond dans le sud-est de l’Asie.
Cette stérilité est justifiée par l’absence dans les régimes autoritaires africains, d’un pouvoir fort,
visionnaire, ambitieux et doté d’une feuille de route clairvoyante. C’est pourquoi la modernisation et
l’émancipation du Rwanda, sous le régime du Président Paul Kagamé, ont relancé les débats sur l’antériorité
du développement à la démocratie en Afrique.

En réalité, ignorant ou méconnaissant le passé du développementalisme en Afrique, certains chefs d’État


africains se demandent à nouveau si la légitimité d’un dirigeant africain ne devrait pas être davantage basée
sur ses résultats concrets au développement que sur le principe électif. Cette question dépourvue de réalisme
aboutira encore inéluctablement à des conséquences désastreuses. Puisque, prenant l’exemple du Rwanda,
sous le leadership du président Paul Kagamé l’on peut lire sur le site du journal « le Monde » que
l’émancipation et la modernisation du Rwanda se sont articulées autour de quatre principaux éléments : «
Premièrement, une volonté de moderniser le pays et l’acceptation d’appliquer rigoureusement les modèles

37 M. Kombila-Iboanga. J. AIVO, p.272

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MIDJRESSO K. Romain
Chercheur-associé à la Chaire UNESCO-DPHD
THEME : Coups d’État des cols blancs en Afrique : la personnalisation du pouvoir en débat.

de modernisation des institutions financières internationales. Deuxièmement, la promotion …d’une


économie de services haut de gamme comme le tourisme, l’informatique et la sous-traitance automobile.
Troisièmement, une dimension écologique liée à l’interdiction drastique de toute production et importation
de sacs en polyéthylène (plastique). Et, quatrièmement et en dernier lieu, le basculement de l’expression
officielle du pays en anglais38 et la promotion du capital humain diasporiques, en chassant et en recrutant
des têtes nationales et africaines bien faites en Occident et en promouvant l’émancipation de la femme par
son intégration au pouvoir décisionnel ». Donc il ressort le président Kagamé, autoritaire soit son régime,
et pensant être le seul homme pouvant conduire le Rwanda au développement à pour ce faire établir une
vision ambitieuse et s’est doté à cette occasion d’une feuille de route clairvoyante. Ainsi, au lieu d’asseoir
les débats en Afrique noire sur une vision claire, ambitieuse et inscrite dans une feuille de route clairvoyante
comme l’a fait le Président Kagamé, les débats sont plutôt faussement orientés sur l’autoritarisme qui
caractérise son régime. Par ailleurs, cette modernisation et émancipation du Rwanda n’est pas synonyme
de développement au sens du développementalisme et ne peut pas être exportée dans le reste de l’Afrique
pour deux raisons. La première est en lien avec les véritables bénéficiaires de la modernisation et de
l’émancipation du Rwanda. La seconde raison tient à la dérogation au principe de limitation du mandat
présidentiel. Relativement aux véritables bénéficiaires l’on peut lire sur le site du journal « le Monde » que :
« Kigali est une vitrine moderne, une carte postale qui cache des paysans rwandais connaissant des disettes
chroniques à quelques kilomètres des lumières de la capitale. Paysans obligés d’abandonner la polyculture
traditionnelle grâce à laquelle ils s’assuraient une autosuffisance alimentaire, pour appliquer une
spécialisation culturale qui fait dépendre l’accès aux denrées alimentaires d’un pouvoir d’achat qui leur
fait défaut, dans la mesure où leur richesse, qui ne consistait qu’en terres, n’est plus entre leurs mains,
mais dans celles des coopératives et de l’agro-industrie. Il s’ensuit que la réussite rwandaise est limitée au
bien-être d’un petit groupe au pouvoir, une élite politique qui a pris le pouvoir et se montre insensible aux
souffrances des paysanneries, dont le sort fait peu de cas dans les décisions d’une politique de révolution
verte axée sur la répression de la polyculture traditionnelle, la spécialisation à outrance, le remembrement
des terres paysannes pour l’agro-industrie, le mode coopératif et l’interdiction des méthodes et technique
de l’habitat traditionnel. La modernisation de Kigali en ville moderne a également entraîné une
gentrification qui a repoussé les pauvres à la périphérie d’une ville désormais élitiste et chère. ». Quant à
la remise en cause du principe de limitation du mandat présidentiel, l’on peut toujours lire sur le site du
journal « Le Monde » que « la répression de l’opposition politique interne et externe [puis] la modification
constitutionnelle [ont favorisé la réélection pour un troisième mandat de Kagamé] par un score stalinien

38L’anglais est censé assurer à moyen et long termes la réduction des coûts de communication, de transactions, de diffusion des
savoirs technologiques et de contractualisation.

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MIDJRESSO K. Romain
Chercheur-associé à la Chaire UNESCO-DPHD
THEME : Coups d’État des cols blancs en Afrique : la personnalisation du pouvoir en débat.

de 98% ». Pour mettre fin aux révisions constitutionnelles opportunistes en Afrique et pour sortir le peuple
de la misère aux fins de présenter l’image d’une Afrique rayonnante et compétitive, il est important que les
États africains dans le respect des règles démocratiques39 établissent une feuille de route clairvoyante axée
sur les trois clavicules du développement socio-économique que l’association « Modus operandi » désigne
par les trois ingrédients à savoir : primo, la construction matérielle40 ; secundo, la gestion économique
saine et équitable41 et, tertio, la répartition équitable : des ressources propres et des bénéfices des
programmes de réduction de la pauvreté en matière de santé, d’éducation et d’emploi.42 Ceci imposerait
donc que chaque gouvernement puisse établir un programme d'action gouvernementale clair et précis et
non qu'un seul individu se considère comme le seul capable de la construction nationale.

CONCLUSION

À tout bien considéré, que les chefs d’État de l’Afrique noire qui se considère comme les seuls garants de
la paix ou du développement de leurs États se rappellent de la célèbre affirmation de Louis XIV qui sur
son lit de mort déclare : « Je meurs, mais l’État demeurera toujours »43.

39 Principe de la limitation du mandat présidentiel et le régime des libertés.


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D’abord, si la construction matérielle emporte une modernisation du pays par la construction des routes, des écoles, des marchés
et des hôpitaux ainsi qu’une couverture nationale en eau et en électricité. Or, ces constructions requièrent une technicité assez
pointue dont seules les maîtres d’œuvre c’’est-à-dire les sociétés adjudicataires de marchés publics sont généralement détenteur.
De ce fait, le chef de l’État n’est même pas l’acteur des constructions, mais n’en est que l’un des ordonnateurs des constructions.
Ainsi, un seul individu ne pourrait prétendre qu’en dehors de lui, plus aucun autre citoyen de la République n’est en mesure de
construire des routes, des écoles, des marchés et des hôpitaux ou même de veiller à une couverture nationale en eau et en électricité.
Il faut plutôt veiller à la mise en place d’institutions techniques nationales dotées d’une autonomie financière et administrative et
spécialisées dans la construction matérielle. Ceci favorisera dépolitisation de la construction matérielle et une gestion saine et
équitable.
41 Ensuite, la gestion économique saine et équitable, promeut d’une part, une lutte implacable contre la corruption et le

détournement des deniers publics et d’autre part, que les programmes d’action gouvernementale offrent une même possibilité de
développement à toutes les communes en fonctions des besoins de ces dernières. Le but visé est dual. Primo, il est envisagé une
effective répression des infractions de corruption et de détournement des deniers publics quel que soit la position sociale des
présumés auteurs, coauteurs ou complices. De ce fait, la présente étude propose une réforme du statut pénal aussi bien du chef de
l’État et des ministres que des parlementaires. De sortes à ce que les ministres soient jugées devant les juridictions de droit commun
et sans que celles-ci ne soient en mesure d’interpeler le Président de la République. Quant aux parlementaires, la levée de
l’immunité parlementaire serait dorénavant conditionnée non pas à un vote parlementaire, mais à une ordonnance de renvoi du juge
d’instruction. Secundo, la gestion économique équitable induit que les parlementaires doivent régulièrement contrôler l’action
gouvernementale pour s’assurer de l’effective affectation des ressources aux charges adéquates comme mentionnées dans la loi de
finance. Ainsi, la gestion économique saine et équitable dépend essentiellement du pouvoir judiciaire et du pouvoir législatif. Le
premier, doit réprimer la corruption et le détournement des deniers publics et le second, doit contrôler régulièrement l’action
gouvernementale. Alors, si le chef de l’État ne peut prétendre être un garant d’une gestion économique et saine, peut-il prétendre
être le seul garant de la répartition équitable des ressources ?
42 Enfin, la répartition équitable des ressources propres et des bénéfices des programmes de réduction de la pauvreté requiert

une obligation pour les parlementaires de veiller à ce qu’aucune région du pays, pour des considération politiques, ethniques ou
religieuses, ne soit ni privée des ressources disponibles en fonction de leurs besoins. Cette surveillance devra intervenir aussi bien
au moment de l’adoption de la loi de finances, qu’au moment de l’adoption des lois de programme.
43 Lire sur : https://www.lemonde.fr/archives/article/1964/12/28/la-personnalisation-du-pouvoir_2124456_1819218.html, consulté

le 06 juin 2022 à 09 heures 39 minutes (Journal Le Monde, « La personnalisation du pouvoir ».

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