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Unité 3

L’image et l’écart avec le réel


Séance 1
L’image et sa proximité au référent « réel »
OBJECTIF

Étudier l’écart entre l’image et son référent « réel ».

Nous allons maintenant nous intéresser à l’image dans sa relation au réel. Dans un premier temps, nous allons étudier
la différence entre le réel et ses substituts (ce qui peut remplacer le réel) ; dans un second temps, nous allons examiner
la proximité (= proche) entre l’image et son référent « réel ».
A. La fleur dans tous ses états

Exercice autocorrectif n° 1
1- Fais sécher une fleur entre les pages d’un cahier, puis colle-la, ci-dessous, dans la case indiquée.
2- Fais un dessin de cette fleur dans la case indiquée.
3- Prends une photo de ta fleur séchée. Imprime-la et colle-la dans la case indiquée.
4- Dans un dictionnaire, cherche la définition du mot fleur et écris-la dans la case indiquée.

Vérifie ta réponse dans le livret de corrigés avant de poursuivre ton travail.

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Tu as là quatre productions distinctes qu’on a souvent tendance à confondre :
- La fleur séchée que tu as collée est le référent : le « réel » qui existe concrètement ;
- Le dessin est une reproduction manuelle de la fleur ;
- La photographie est une reproduction mécanique de la fleur ;
- La définition renvoie non seulement à ta fleur particulière, mais à tous les autres végétaux ayant les
mêmes caractéristiques.
Ainsi, regarder le dessin ou la photographie d’une fleur, ce n’est pas regarder une fleur, c’est regarder l’image
d’une fleur. L’image du réel n’est pas le réel, mais un substitut, (une image qui le remplace), nous l’avons déjà
noté rapidement dans les séances précédentes.
B. Réalisme

Exercice autocorrectif n° 2
Reproduis la photographie ci-dessous dans la case vide, en respectant au mieux les formes et les couleurs. Tu
peux décalquer l’image, puis utilise de la gouache, de l’aquarelle ou des crayons de couleurs.

Vérifie ta réponse dans le livret de corrigés avant de poursuivre ton travail.


Ton dessin est réaliste, c’est-à-dire qu’il est proche dans ses formes et ses couleurs de l’objet réel ou de sa
photographie.

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C. Trompe-l’œil

Exercice autocorrectif n° 3
Sur la photographie ci-dessous, dessine une mouche la plus réaliste possible pour qu’on croie qu’elle soit vraie.
Tu peux t’aider d’une photo.

Sam Lévin, Un clown du trio Les Hectors (1904-1992) Photographie,


Paris, Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine © Ministère de la Culture - Dist. RMN-Grand Palais / Sam Lévin
Vérifie ta réponse dans le livret de corrigés avant de poursuivre ton travail.
Le trompe-l’œil a un rapport ambigu entre le réel et sa représentation. Il joue sur la proximité ou la confusion
entre le référent « réel » et son image.

JE RETIENS

Lis le résumé ci-dessous et retiens-le grâce aux mots en gras.


L’image réaliste s’approche dans ses formes et ses couleurs du référent « réel ». Le trompe-l’œil abolit les
frontières entre réalité et représentation. Le spectateur est donc troublé car il est trompé sur l’image. Il la
croit réalité car l’image du réel se confond avec le réel lui-même.

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Séance 2

Le trompe-l’œil
On appelle « trompe-l’œil » une image peinte si réaliste qu’elle semble ne pas être une image mais le réel.
Dans une séance précédente, nous avons évoqué l’exemple célèbre du peintre Zeuxis qui peignit des raisins si
vraisemblables que les oiseaux s’y cassèrent le bec. C’est le trompe-l’œil le plus célèbre et le plus connu (bien que
personne ne l’ait peut-être jamais vu !). À partir de cet exemple, on peut comprendre rapidement les caractéristiques de
ce genre de peinture :
• Elle doit être très réaliste, c’est-à-dire s’inspirer de la réalité (couleurs, échelle des proportions, ombres,
lumière) et répondre à des qualités techniques particulièrement efficaces. Il faut en effet maîtriser les
dégradés, les rapports entre couleurs, les ombres, l’illusion de profondeur, la perspective, etc.
• Elle doit généralement représenter des objets. En effet, le mouvement ne pouvant pas exister dans la pein-
ture, l’illusion ne peut venir que de la représentation d’objets inanimés. Les trompe-l’œil sont donc souvent
des natures mortes. On trouve également des peintures murales qui donnent l’illusion d’une architec-
ture particulière et qui trompent notre regard par des inventions spectaculaires. Dans ces cas précis, des
personnages peuvent y figurer mais souvent, ils aident à comprendre qu’il s’agit d’une peinture car ils ne
bougent pas.

Le trompe-l’œil, comme nous le rappelle


Pline L’Ancien (voir la légende de Zeuxis
dans la première séquence), n’est pas
une nouveauté. La technique a permis
de le faire évoluer ; voyons quelques
exemples à travers le temps.
Des natures mortes décoraient déjà les
intérieurs des Romains les plus riches.
On peut encore en voir à Pompéi. Celle
qui est reproduite ici représente les
restes d’un repas (n’oublie pas qu’à
l’époque, on jetait tout par terre !).
On donne à ces images, qui étaient
assez répandues, un nom grec : Asaroton
(« plancher non balayé »).
Celle-ci n’est pas peinte mais réalisée en
mosaïque (petits morceaux de carrelage Restes du banquet, ou la Salle non balayée, mosaïque. Inspirée de Sôsos
découpés et collés). Malgré cette de Pergame, Musée Gregoriano Profano, Vatican, 4,05 x 0,41 m.
contrainte technique, tu peux remarquer ©⁄ Wikimedia Commons
que les couleurs et les ombres reproduisent fidèlement une source de lumière qui viendrait du haut de l’image,
c’est-à-dire de l’endroit où se trouvait la porte.
Un trompe-l’œil doit tenir compte de son environnement s’il veut être crédible : l’échelle et la lumière doivent
être cohérentes.

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Au Moyen Âge, on utilise nettement moins ce mode de
représentation mais il revient fortement dans les arts
avec la Renaissance.
Les intellectuels de Toscane (région de Florence en
particulier) s’installent pour lire dans des bureaux
richement décorés qu’ils appellent leur « studiolo ».
Ils font appel aux meilleurs artisans pour concevoir
ces décors. Ici, tu as un bel exemple de marqueterie
(sorte de mosaïque en bois méticuleusement découpé
dans des essences différentes pour faire varier les
couleurs).

Dessin Francesco di Giorgio Martini, marqueterie Giuliano


da Majano, Studiolo du palais Ducal de Gubbio, détail, XVe
siècle (ca. 1478–82),
© the Metropolitan Museum of Art, Dist. RMN-Grand
Palais / image of the MMA, New York

Tous les trompe-l’œil ne sont pas réalisés avec des techniques artisanales.
C’est dans le domaine de la peinture que l’on trouve les spécimens les plus
spectaculaires.
À peu près à la même époque, dans les Flandres, l’apparition de la peinture
à l’huile permet de représenter des détails que l’on était incapable de
figurer aussi petits auparavant. Ainsi, cette œuvre de Petrus Christus,
présente-t-elle un des premiers exemples de trompe-l’œil de l’époque
moderne. En regardant cette reproduction, tu vois évidemment où le peintre
a cherché à tromper le regard, mais face au tableau réel, nombreux sont les
spectateurs à vouloir chasser la mouche d’un geste de la main ! D’ailleurs,
cet insecte n’est pas le seul trompe-l’œil du tableau : le rebord dans lequel
l’artiste a gravé sa signature n’est absolument pas en bois, il est totalement
peint.
Il s’agissait autant de montrer une prouesse technique que d’indiquer au
spectateur de se méfier de ce qu’il
Petrus Christus, Portrait voit : comme nous l’avons noté dans les séquences précédentes, il ne
d’un chartreux, 1446, Huile s’agit pas du réel mais d’une représentation. On peut également ajouter
sur bois, 29,2 x 21,6 cm, © à ces deux magnifiques exemples l’illusion de la profondeur qui donne
the Metropolitan Museum of l’impression, quand le tableau se détache sur un mur, qu’il s’agit d’une
Art, Dist. RMN-Grand Palais / niche dans laquelle se tient le moine.
image of the MMA, New York
La mouche a été utilisée plusieurs fois par les peintres comme détail trompe-l’œil car elle est discrète et
provoque directement la réaction du spectateur.

JE RETIENS

Lis le résumé ci-dessous et retiens-le grâce aux mots en gras.


Un trompe-l’œil est une œuvre artistique, généralement bidimensionnelle, jouant sur la perception et
faisant croire au spectateur que ce qu’il voit n’est pas une représentation mais la réalité.

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Séance 3
L’écart entre le réel et sa représentation
Quand notre œil perçoit une œuvre figurative (rappel = qui représente quelque chose), il fait immédiatement le lien avec
ce qu’elle représente. Nous avons vu que cela pouvait parfois le conduire à confondre l’image avec le réel. C’est possible
quand l’artiste utilise des artifices techniques d’une grande habileté, mais tous les artistes ne cherchent pas à tromper
le regard !

Jusqu’à une période récente, l’artiste ne devait pas reproduire le


réel mais proposer une vision « idéale » de la réalité. Pour qu’on
l’admire, que l’on puisse même parfois le considérer comme un
génie, il devait dépasser le réel dans ses œuvres. Un exemple
simple pour comprendre cela est l’un des plus fameux artistes de
l’histoire, parfois considéré comme le plus grand : Michel-Ange.
Peintre, sculpteur, architecte, poète… Il est l’auteur des fresques
de la Chapelle Sixtine à Rome. Regardons une reproduction de son
David, une des œuvres les plus visitées au monde avec La Joconde
de Léonard de Vinci.
Rien, dans cette sculpture, ne respecte les proportions
« naturelles » d’un homme (regarde la taille des mains et la
longueur des bras !). David a été choisi comme symbole par la
ville de Florence car ce jeune héros valeureux réussit à vaincre le
terrible Goliath grâce à ses qualités humaines.
C’est un symbole, une sorte d’allégorie (comme Marianne pour la
République française). Maintenant les visiteurs ne s’intéressent
plus à la légende dont il s’inspire ni au symbole de Florence. Ce Michel-Ange, David, marbre, 1501-1504,
que tout le monde admire est sa beauté ; or, nous avons vu qu’elle ht. 434 cm, © Archives Alinari, Florence /
n’a rien de réel, rien d’humain… Il y a donc un « écart » entre RMN / Nicolo Orsi Battaglini
l’humain tel que nous le voyons quotidiennement et le héros de Michel-Ange, cet écart répond à une volonté
esthétique : l’artiste ne doit pas reproduire le réel mais en proposer une version idéale.
Voyons d’autres exemples d’écart entre le réel et la représentation.
Nous allons maintenant regarder un paysage réalisé par l’un des plus importants peintres français, Nicolas
Poussin.
Comme Michel-Ange, il invente ce paysage de toutes pièces, le construit comme un lieu idéal, il sert de décor à
une scène mythologique.

Pour ces deux exemples, et pour ces


raisons, on parle d’œuvre « classique »
(= inspirée de l’idéal antique). Observe
ce paysage attentivement, et tu verras
que chaque chose ou personnage est
identifiable et que tout est parfaitement
« bien » peint (respect de la lumière, des
ombres réelles et portées, perspective
dessinée et atmosphérique, etc.) mais
c’est précisément ce qui crée un «
écart » : dans la nature, rien n’est
aussi rigoureusement dessiné, la ligne
n’existe pas. Poussin ne cherchait pas
à reproduire la nature, d’ailleurs ses
tableaux étaient exclusivement peints en
atelier, il voulait donner la vision idéale
d’une nature inventée.
Nicolas Poussin, 1645-50, Paysage avec bâtiments, Huile sur toile, 120 x 187
cm, © Museo Nacional del Prado, dist.
RMN-GP / image du Prado

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Voyons maintenant d’autres artistes qui ont manifesté un
écart plus grand encore avec le réel, pour d’autres motifs
que le classicisme…
Tu connais certainement Vincent Van Gogh, cet artiste
hollandais du XIXe siècle qui a vécu dans le Sud de la
France, à Arles. La reproduction montre la peinture qu’il fit
de sa chambre dans cette ville, on a l’impression que tout
bouge, comme si l’espace tournoyait autour de nous.
Van Gogh était perturbé, il souffrait d’une maladie
mentale donnant une perception de son environnement
déformée. Ce qu’il a peint est donc exactement ce qu’il
ressentait et nous pouvons en percevoir les effets sur les
couleurs et les lignes. L’écart avec le réel n’est pas ici une
question d’idéal mais de perception personnelle, ce qui Vincent Van Gogh, La Chambre à Arles, Huile sur toile,
s’oppose à toutes les théories classiques. On appelle cela 72 x 90 cm, 1888, Musée van Gogh, Amsterdam © RMN
« l’expressionnisme ». On peut donc dire que Van Gogh (Musée d’Orsay), Hervé Lewandowski
est un peintre « expressionniste » car il nous transmet sa
vision personnelle et l’écart entre elle et le réel.
Nous pourrions multiplier les exemples et étudier
tous les écarts possibles entre une représentation
et le réel, nous n’en finirions jamais puisqu’aucune
œuvre n’est le réel !
Terminons donc cette petite étude avec une œuvre
asiatique.
En effet, l’Occident n’a pas le monopole de la
représentation artistique et il ne détient pas non
plus l’exclusivité de l’écart ! Hokusai est un des
plus grands artistes japonais. Dans la culture
traditionnelle de ce pays, la peinture n’existe pas
sous forme de tableau comme en Occident.
Au fil du temps, les artistes ont mis au point une
Katsushika Hokusai, La Grande Vague de Kanagawa (littéralement : extraordinaire technique de gravure sur bois. Tu
« Sous la vague au large de Kanagawa ») Fait partie de la série peux voir ici une planche extraite d’une série des
Trente-Six Vues du mont Fuji, n° 21, 25 x 37 cm, Metropolitan « Trente-Six Vues du mont Fuji ». On distingue la
Museum of Art © ⁄ Wikimedia Commons fameuse montagne au fond de l’image. L’écart
avec le réel est très perceptible : il n’y a pas d’ombre, pas de reflets, pas d’effets de perspective linéaire ; toutes
les couleurs sont traitées en aplat (= pas de dégradé), en raison de la technique, elles sont disposées en surfaces
coloriées. Ici, l’écart répond à une volonté esthétique.

JE RETIENS

Lis le résumé ci-dessous et retiens-le grâce aux mots en gras.


On appelle « écart » la différence entre le réel et sa représentation. Cet écart peut être plus ou moins grand
en fonction des volontés de l’artiste, mais il existe obliga-toirement car une œuvre n’est jamais la réalité
mais une vision de celle-ci par un artiste.

LE COIN DES CURIEUX

Bien que Wikipedia ne possède aucune garantie de sérieux ni de fiabilité de ses informations en ligne, tu
trouveras ici les reproductions des « Trente-Six vues du mont Fuji » d’Hokusai :
http://en.wikipedia.org/wiki/Thirty-six_Views_of_Mount_Fuji

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J’ÉVALUE MES ACQUIS

Tu peux à présent faire le bilan de tes compétences grâce à la grille d’auto-évaluation ci-dessous. Pour cela, fais une
croix dans les colonnes 1, 2 ou 3, en face de chacune des compétences du tableau selon ce que tu penses avoir acquis,
presque acquis ou pas acquis du tout ; dans ce dernier cas, tu pourras donc revoir le cours afin de t’améliorer.

1 = acquis
2 = en cours d’acquisition
3 = non acquis

Connaissances et compétences pour l’unité 3 1 2 3


Je sais différencier le réel et ses représentations.
Je sais tromper l’œil par une représentation fidèle du
réel.
Je sais ce qu’est un trompe-l’œil.
Je sais ce que signifie un « écart » entre le réel et sa
représentation.

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