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MEDAF : définition et expression mathématique

A partir des travaux réalisés réalisé par Markowitz en 1952 (la théorie moderne du portefeuille) , Le
"Capital Asset Pricing Model" (CAPM) ou Modèle d'évaluation des actifs financiers (MEDAF) a été
développé par Mossin, Sharpe et Lintner dans les années 60. Ce modèle décrit la relation
entre le risque d'un actif financier et les rendements attendus de cet actif. Aussi il relie le taux
de rendement requis pour un titre à son risque.

Afin d’élaborer la théorie de l’équilibre financier, Sharpe et Lintner ont ajouté deux autres
hypothèses clés au modèle de Markowitz. La première hypothèse indique que tous les
investisseurs ont les mêmes anticipations sur les rendements et la deuxième révèle qu'il
existe des emprunts et des prêts à un taux sans risque identique pour tous les investisseurs
sans contrainte quantitative.

Par ailleurs, le MEDAF est considéré comme un modèle à un seul facteur, qui permet
d’établir une relation entre le rendement espéré d’un actif et son risque systématique
exprimé par le bêta.

En effet, la formulation de base du MEDAF est la suivante :

E(Rit) = Rft + βi (E(Rmt) – Rft)

Rit : la rentabilité du titre i pendant la période t ;


Rmt : la rentabilité du marché pendant la période t ;
Rft : le taux sans risque sur la période t ;
βi : le risque systématique du titre i, est la covariance de son rendement avec le rendement du
marché divisé par la variance du rendement du marché soit :

𝛃𝐢=𝐂𝐨𝐯( 𝐑𝐢, 𝐑𝐦)/𝐕𝐚𝐫 (𝐑𝐦)

Le principe du MEDAF est le suivant : un portefeuille efficient doit être composé des actifs
risqués et d’actif sans risque.

Chaque actif comporte deux types de risque: un risque diversifiable ou unique et un risque
non diversifiable ou de marché.

L'univers du MEDAF doit obéir à certaines règles bien précises pour que la formule de la
rentabilité de l'actif fonctionne. Voici les différentes hypothèses de bases, tirées
principalement des travaux de Markowitz sur la théorie moderne du portefeuille :

- il n'y a pas de coûts de transactions ou de taxes


- la vente à découvert ou l'achat d'un titre n'a aucune incidence sur son prix
- les investisseurs sont averses au risque et rationnels
- tous les investisseurs ont le même horizon d'investissement
- les investisseurs contrôlent le risque de leur portefeuille par la diversification
- le marché est entièrement libre et tous les actifs peuvent y être échangés.
- les investisseurs peuvent emprunter et prêter des montants illimités au taux sans
risque
- toutes les informations sur le marché sont disponibles pour tous les investisseurs
- la concurrence sur les marchés et parfaite et non faussée
- tous les actifs financiers peuvent être divisés en actifs de plus petite taille

Les problèmes empiriques du MEDAF peuvent refléter des échecs théoriques, résultat de
nombreuses hypothèses simplificatrices. Cependant, ils peuvent également être causés par
des difficultés lors de la mise en oeuvre de tests valides du modèle. Malgré sa simplicité, de
nombreuses critiques ont été formulées à l'encontre du MEDAF.

Extensions et tests du MEDAF

Chacune des hypothèses du MEDAF présentent un certain degré d’irréalisme et peut en


conséquence être nuancée, voire modifiée. Cependant, Black a supposé qu’il n’existait pas
d’actif sans risque et qu’aucun emprunt ou prêt sans risque n’est autorisé. Il a ensuite
montré que le rendement attendu de tout actif risqué est une fonction linéaire de son bêta.

On aura en effet, la formule simple suivante :

E(Rit) = αi + βi(E(Rmt))

Brenan a précisé, dans le même contexte, que tout investisseur est soumis à des taux
d’impôt sur les dividendes, comme il a traité également l’effet de la politique de dividende
sur la valeur de la société dans le cadre de la condition d’équilibre du marché.
Par ailleurs, Lévy a indiqué que la prise en considération du coût de transaction, du coût de
l’accès à l’information ou même du coût du suivi du nouveau développement financier de
tous les titres est susceptible de contredire le résultat théorique affirmant que chaque
investisseur détient dans son portefeuille tous les titres disponibles sur le marché, car de
nombreux investisseurs détiennent les actions d'une seule société.
De même, en présence d’inflation, la mesure habituelle du bêta peut être une sous-
estimation du risque pour les actifs à faible bêta et une surestimation du risque pour les
autres actifs, ce qui contribue à expliquer au moins une partie de la non-linéarité observée
dans la relation entre le rendement et le risque non diversifiable . En effet, différentes
études et tests ont été effectués au cours des années 70 dans l'objectif d'analyser la
validation empirique du MEDAF. Ainsi, il existe différents modèles économétriques qui ont
été utilisés en ce sens, tels que le modèle de Black , le modèle de Blume et Friend et le
modèle de Fama et MacBeth. Ces études ont abouti à des résultats qui ont validé le modèle.
Tandis que, la plupart des études empiriques ultérieures telles que Roll, Basu, Banz, Bhandari
et Fama ont rejeté l'existence de la droite de marché pour l’évaluation des titres individuels
ou Security Market Line (SML).

Critiques adressées au MEDAF : apparition d’autres facteurs de risque


Rossi a précisé que les principales limites du MEDAF résultent d’hypothèses irréalistes. Tout
d’abord, il est très difficile de trouver un titre sans risque. Un titre gouvernemental très
liquide à court terme est considéré comme sans risque. Ensuite, l’hypothèse de l’égalité
entre taux débiteurs et taux créditeurs, qui sont différents en pratique, est un autre
inconvénient important. En pratique, ces taux diffèrent. La dernière limite est que le bêta ne
reste pas stable dans le temps, car les investisseurs ne disposent pas des données
supplémentaires nécessaires pour estimer la version bêta. Ils l’estiment uniquement à partir
de données historiques. Cependant, la plupart des études ont montré que les bêtas
historiques sont de mauvais indicateurs du risque futur des titres.

D’après une panoplie de travaux menés sur plusieurs portefeuilles d’actifs cotés à la bourse
de NYSE, Fama et MacBeth ont confirmé la validité du MEDAF. Ils ont estimé le bêta en
utilisant des études longitudinales sur des données mensuelles pour une longue période de
1935 à 1968. Les résultats auxquels ils ont parvenu montrent que le bêta est statistiquement
significatif, mais il est faible sur plusieurs sous-périodes. Une étude similaire à celle de Fama
et MacBeth menée par Tinic et West en utilisant les mêmes données de la NYSE sur la
période 1935-1982. En fait, ils ont constaté que le MEDAF ne pourrait pas tenir. En sus, Roll a
soulevé également de sérieux doutes quant à l’applicabilité du MEDAF.

Plusieurs études telles que Basu , Banz , Shiller et Rosenberg & al. ont représenté le socle
pour montrer qu'une relation linéaire du MEDAF à un seul facteur ne tient pas et que la bêta
seule ne peut expliquer la relation risque-rendement. A cet effet, d’autres facteurs non liés
au marché contribuent également aux relations risque-rendement des actifs.

Parmi ces facteurs, on trouve le PER (Price Earning Ratio) Basu a constaté que lorsque les
titres sont triés selon les ratios PER, Ceux dont le ratio PER est élevé, ils auront des
rendements futurs supérieurs à ceux prévus par le MEDAF.

D’autres études ont soulevées que les rendements moyens des actions américaines sont
positivement corrélés aux ratios book-to-market (B/M). Ils ont montré que les actions ayant
un ratio (B/M) élevé, ils ont des rendements moyens élevés qui ne sont pas capturés par
leurs bêtas Rosenberg & al. En plus, Chan et al. ont confirmé également une association
positive entre ces ratios et les rendements des actions sur le marché japonais. En effet, ces
travaux corroborent ceux de qui ont conclu que les ratios (B/M) sont supérieurs aux autres
facteurs de risque pour expliquer la représentation transversale du rendement des actions.

Plusieurs documents ont été publiés au cours des dernières années, traitant à la fois l’impact
théorique et empirique des rendements de dividendes sur les rendements des titres. La
relation entre les rendements en dividendes et les rendements des actions ordinaires aux
États-Unis a également fait l’objet de nombreuses critiques dans la littérature. Bien que les
preuves empiriques qui sont peu mitigées, vont généralement vers une relation positive
entre les dividendes et les rendements Rosenberg and al. Ainsi, au Japon par exemple, les
institutions financières cotées en bourse comptent sur les dividendes comme une source
importante de liquidités pour faire face à leurs autres engagements.

En effet, Lakonishok et Shapiro ont précisé que seule la taille semble plus explicative de la
variation transversale des rendements que le bêta et la variance, à des niveaux standards de
signification statistique. En outre, plusieurs travaux de recherche, à titre d’exemple ceux de
Fama et Banz ont indiqué que la taille de l’entreprise et le ratio (B/M) étaient les
déterminants les plus importants du rendement moyen des actions. Chan et al. ont
également constaté que les rendements espérés des entreprises à petite capitalisation sont
plus exposés aux risques de production et aux variations de la prime de risque que celles des
entreprises à grande capitalisation. Alors que, Berk a signalé que la taille est négativement
corrélée au rendement espéré.

Selon Lévy, Mayshar , Mayshar , et Mayshar , il existe des obstacles au niveau du marché,
tels que les coûts de transaction, l’inflation, les taxes et autres obstacles qui limitent la
diversification. Ainsi, le MEDAF qui présume une diversification complète, est mal spécifié et
une mesure de risque inappropriée est donc utilisée pour calculer les rendements espérés.
En particulier, ces auteurs ont vérifiés l'hypothèse selon laquelle les actions de petites
entreprises, qui ne sont pas largement détenues, sont davantage influencées par leurs
propres variances que les actions détenues à grande échelle des entreprises de taille
importante. Ils ont constaté que les mesures alternatives du risque (variance ou écart type
résiduel) peuvent expliquer, à des niveaux faibles de signification statistique, le rendement
espéré. Levy a mentionné que la variance d’un titre joue un rôle central dans la relation
risque-rendement et sa prise en compte est justifiée par le fait que lorsque les avoirs d'un
actif sont concentrés dans un nombre relativement restreint de portefeuilles non diversifiés,
la variance de l'actif lui-même (écart type) affectera considérablement les rendements
requis à l'équilibre.

De ce qui précède, il est possible de présumer que chaque facteur de risque parmi ceux
susmentionnés peut influencer, à son tour, et à un niveau donné de signification statistique
le rendement d’une action. A cet égard, nous allons tester dans cette étude l’existence d’une
relation linéaire entre le rendement d’une action, le bêta, le PER, book-to-Market ratio, la
taille, le rendement du dividende et le risque total. Il s'agira de se prononcer sur les
déterminants qui expliquent ou prédisent mieux le rendement d’un titre.

Le modèle à trois facteurs :


Plusieurs auteurs ont mis en évidence sur longue période, une prime à la (petite) taille (size
premium, Banz, 1981) et une prime à la détention de titres pour lesquels le rapport entre la
valeur comptable et la valeur de marché des capitaux propres est la plus élevée (value
premium). Sur son site web, Kenneth French met régulièrement à jour les taux de rentabilité
de portefeuilles de diverses caractéristiques, dont celles utilisées par le modèle à trois facteurs.
La figure 1 utilise les données publiées par French et présente l’évolution de quatre indices
constitués à partir de toutes les entreprises cotées aux États-Unis sur le NYSE, mais aussi sur
l’AMEX et le NASDAQ. Deux classes de taille (mesurée par la capitalisation boursière) et
trois classes formées suivant le ratio valeur comptable sur valeur boursière des capitaux
propres (book-to-market equity ou BE/ME ci-après) sont constituées suivant une démarche
fixée par Fama et French en 1993 et non révisée depuis lors :

Les bornes des classes sont déterminées à partir de toutes les entreprises cotées sur le
NYSE, les entreprises cotées sur d’autres marchés sont ensuite affectées à l’une des
classes (de taille ou de croissance) ;
Pour la taille, les entreprises sont réparties en deux groupes d’effectif identique (sur le
NYSE) suivant la valeur de la capitalisation boursière.
Selon les notations de Fama et French, les deux classes sont notées B
(big) et S (small) ;
Le ratio BE/ME permet de ventiler les entreprises en trois classes opposant les valeurs
de croissance et de substance. La classe intermédiaire qui regroupe 40 % des actions
n’est pas représentée sur la figure. Les deux classes extrêmes ont un effectif identique
sur le NYSE, elles sont notées H (high, forte valeur du ratio BE/ME ou valeur de
substance) et L (low, faible valeur du ratio BE/ME ou valeur de croissance) ;
Un dollar est investi, fin juin 1926, dans chacun des quatre groupes d’actions, les
dividendes perçus sont réinvestis et les classes sont révisées au mois de juin de chaque
année à partir des dernières valeurs connues des caractéristiques.
Par construction, le nombre d’entreprises cotées n’est pas identique dans chacun des
six portefeuilles. En fin de période par exemple,
3 224 entreprises sont ventilées dans six portefeuilles dont l’effectif varie entre 146
(B/H) et 962 (S/H). Pour la construction du graphique, les taux de rentabilité des
portefeuilles sont pondérés par les capitalisations.

Le MEDAF met en évidence une source de risque unique et, puisque les investisseurs sont
supposés être hostiles au risque, une prime de risque de marché obtenue par le détenteur
d’actions. La prime de risque de marché
(E(RM) – Rf) est égale à la différence entre l’espérance de rentabilité du portefeuille de
marché et le taux sans risque. L’exposition au facteur de marché d’un titre i donné ( le
coefficient bêta) est un élément déterminant du taux de rentabilité attendu.

Pour Fama et French (1992), le MEDAF ne permet pas d’expliquer les différences de
rentabilité observées. On ne peut réduire le risque à un facteur unique et commun à tous les
titres. Le bêta classique des titres garde son utilité pour estimer la sensibilité au facteur
commun qui est l’un des trois facteurs : « le bêta n’est pas mort, mais le MEDAF lui l’est »1.

Des différences de risque sont pour Fama et French à l’origine d’une prime à la (petite) taille
et d’une prime aux valeurs de substance (et d’une pénalisation des valeurs de croissance). Au
facteur de marché identifié par le MEDAF, Fama et French ajoutent deux facteurs
complémentaires. Le facteur taille (SMB) est représenté par le différentiel d’espérance de
rentabilité entre les petites et les fortes capitalisations et justifie la prime obtenue par le
détenteur d’actions de petite capitalisation. Le facteur croissance/substance (HML) est
représenté par le différentiel d’espérance de rentabilité entre les valeurs de substance et les
valeurs de croissance et il justifie la prime obtenue par le détenteur d’actions de substance.
SMB et HML sont calculés à partir des taux de rentabilité des six portefeuilles décrits ci-
dessus. Le site web de French détaille la procédure fixée dans Fama et French (1993).

Fama et French donnent peu de justifications économiques à ces trois facteurs : les petites
capitalisations sont plus risquées, car les évolutions des entreprises de petite taille sont
corrélées entre elles. Cette corrélation à l’intérieur du groupe est une source de risque non
diversifiable qui justifie la prime de rentabilité exigée en moyenne par le marché pour la
détention de ces titres. Augmenter indéfiniment la taille d’un portefeuille constitué de titres
faiblement capitalisés ne produira jamais un portefeuille parfaitement corrélé avec l’ensemble
des titres. Pour les entreprises de substance, Fama et French parlent d’un effet de détresse
financière en reprenant un argument présenté par Chan et Chen (1991) pour l’effet taille. Ils
soulignent le lien, par exemple, entre le taux d’endettement et le ratio BE/ME. La sensibilité
d’une action au facteur de détresse (le de l’action i) serait un élément déterminant pour
expliquer les trajectoires de cours. La démarche inductive qui conduit
Fama et French à formuler le modèle à trois facteurs expose à certains biais. Sans construction
théorique préalable, le risque de manipulation des données (data mining) est fort. Pour Black2
(1993), il n’est pas possible de rejeter le lien entre la rentabilité exigée et le risque des actions
et, donc, de rejeter le MEDAF sans proposer une alternative théorique.

Une série d’articles par Fama et French va suivre. Fama et French (1993) proposent une
approche alternative de test en série temporelle, adaptée de Black et al. (1972). Par ailleurs,
des tests sont menés en étendant l’échantillon initial dans le temps et l’espace en présentant
des résultats sur données non américaines. Progressivement, le modèle va s’imposer à la fois
dans les recherches académiques, mais aussi dans les pratiques de gestion de portefeuille où le
modèle a contribué à l’essor des pratiques dites de factor investing.

Tests du modèle à trois facteurs :

Fama et French (1993) analysent les taux de rentabilité de 25 portefeuilles (cinq classes
suivant la taille et cinq, suivant le ratio BE/ME). Ils montrent (se reporter à leur table 6) que le
facteur de marché est significatif pour chacun des 25 portefeuilles, à condition de prendre en
compte simultanément les deux autres facteurs. Le facteur taille (SMB) est significatif pour 24
portefeuilles, la sensibilité au facteur étant positive et plus importante pour les titres
faiblement capitalisés et négative pour les cinq portefeuilles les plus fortement capitalisés. Le
facteur de détresse (HML) est significatif pour 21 portefeuilles. La sensibilité au facteur de
détresse est négative pour 20 % des entreprises de plus faible ratio BE/ME (ce sont les valeurs
de croissance) et d’autant plus importante que la taille est elle-même importante, la sensibilité
est positive, sinon, et d’autant plus forte que le ratio BE/ME est fort (valeur de substance), et
que la taille est petite.

Les valeurs de croissance sont moins risquées, car leur détention protège contre le risque
associé au facteur de détresse (leur Beta (HML) est négatif). Les valeurs fortement
capitalisées sont moins risquées, car leur détention protège contre le risque associé au facteur
taille (leur Beta(SMB) est négatif).
Davis et al. (2000) reconstituent une base de données comptable permettant d’estimer les
ratios BE/ME à partir de 1927 pour toutes les actions américaines cotées. La prime aux
valeurs de substance (value premium) est de 0,50 % par mois de 1929 à 1963 et de 0,43 %, de
1964 à
1997 : ces deux primes sont en moyenne significativement différentes de zéro (test de Student
de 2,8 dans le premier cas et de 3,38 dans le deuxième). La prime à la petite taille est en
moyenne plus faible : elle est de 0,20 % par mois sur la totalité de la période (avec un test de
Student de
1,78).
Fama et al. (1993) montrent que les différences de rentabilité entre le
NYSE et le NASDAQ, avec un avantage au NYSE à taille d’entreprise identique, s’expliquent
pour l’essentiel par une différence d’exposition des entreprises cotées aux trois facteurs. Les
entreprises du NYSE sont plus rentables et également plus risquées, le NASDAQ est en
revanche le marché des valeurs de croissance. Nul besoin de recourir aux différences
d’organisation des deux marchés ou à un différentiel de liquidité pour expliquer les
différences de rentabilité.
Fama et French (1998) étendent les résultats initiaux à douze pays supplémentaires sur la
période 1975-1995. La faible qualité des données comptables et, dans certains cas, leur
indisponibilité rendent difficile un test sur une période plus longue. En dehors des États-Unis,
les bases de données ne sont pas exhaustives et, de plus, ne couvrent généralement que les
titres les plus fortement capitalisés. Tous pays confondus, la différence de rentabilité entre le
portefeuille des valeurs de substance et celui des valeurs de croissance est de 7,68 % par an.
Fama et French testent une version internationale de l’ICAPM (Intertemporal Capital Asset
Pricing Model) de Merton (1973), exposée dans Fama (1996) et valident le modèle dans une
version simplifiée ne tenant pas compte du facteur taille et sous l’hypothèse de non-
segmentation des marchés. En revanche, la version classique du MEDAF est rejetée. Pour
tous les pays, sauf un, le facteur substance/croissance est significatif. Fama et French
présentent le modèle à trois facteurs comme un cas particulier d’un modèle plus général tel
que le modèle de Merton 3. Il reste toutefois à identifier les variables d’état qui produisent ces
variations liées à la taille et au ratio BE/ME, à la fois dans les bénéfices et dans les cours en
bourse ; et à savoir si ces variables inconnues affectent, et de quelle manière, la
consommation et la richesse au-delà du facteur de marché.
Note : Cette figure est établie à partir des résultats publiés par Fama et French (1995). B/L et
S/L sont deux portefeuilles de faible (L) valeur du ratio BE/ME l’année 0 (valeurs de
croissance) ; B/H et S/H sont deux portefeuilles de titres à forte (H) valeur du ratio BE/ME
(valeurs de substance).

Un critère de taille permet de distinguer le groupe des petites (S) de celui des fortes (B)
capitalisations. De juin 1963 à juin 1992, toutes les entreprises cotées aux États-Unis sont
ainsi mises en portefeuille l’année 0.
Les documents comptables sont examinés avant et après la date de constitution des
portefeuilles et permettent le calcul d’un taux de rentabilité économique
(EI/BE ou bénéfice sur situation nette) qui est reporté en ordonnées. On remarque que la
rentabilité économique est plus faible pour les valeurs de substance étiquetées */H (que ce
soient de grandes – B/H – ou de petites – S/H – capitalisations) que pour les valeurs de
croissance étiquetées */L. Bien sûr, on observe une convergence vers la moyenne.
La valeur du ratio BE/ME est conditionnée par toute la séquence des bénéfices futurs attendus
et un écart jugé temporaire entre le bénéfice d’une période et la valeur comptable des actifs à
peu d’impact sur la valeur du ratio. Fama et French (1995) forment des portefeuilles d’actions
suivant les valeurs observées de la taille et du ratio BE/ME. En ordonnées de la figure 2,
EI/BE (bénéfice sur situation nette) représente une estimation à partir des documents
comptables de la rentabilité économique des groupes d’entreprises. La lecture de la figure 2
permet les constatations suivantes :

Une forte valeur du ratio BE/ME est suivie de plusieurs années de bénéfices médiocres
(les deux courbes nommées B/H et S/H) ;
le groupe des valeurs de croissance (B/L et S/L soit 30 % des entreprises du NYSE
avec le ratio BE/ME le plus faible) enregistré les plus fortes valeurs du ratio bénéfice
sur valeur comptable des capitaux propres (EI/BE) ;
Le taux de rentabilité des capitaux propres des valeurs de croissance est, en moyenne,
supérieur à celui des valeurs de substance et cela même cinq ans après la date de
formation des portefeuilles ;
Après la date de formation des portefeuilles (année 0), la rentabilité comptable des
entreprises de croissance (faible ratio BE/ME) baisse, car la valeur comptable des
capitaux propres croît plus vite que les bénéfices. Les entreprises de substance
connaissent une situation inverse.
Le taux de croissance des bénéfices est très similaire d’une classe à l’autre dans les années
postérieures à la formation des portefeuilles. Pour Fama et French, cette observation
corrobore l’hypothèse d’une évaluation rationnelle puisque le marché anticipe le retour à la
normale. Les forts écarts constatés avant la formation des portefeuilles, entre la croissance du
bénéfice d’un groupe à l’autre, ne peuvent perdurer. Les estimations de taux de croissance du
bénéfice à venir, faites par le marché conditionnellement à l’appartenance à une classe de
BE/ME sont non biaisées.

Il apparaît que le ratio BE/ME est un indicateur de la profitabilité plus crédible que la taille,
puisque la relation entre le taux de rentabilité des capitaux propres et le ratio BE/ME apparaît
inconditionnelle alors que la relation entre la rentabilité et la taille est conditionnée à
l’appartenance à une classe BE/ME. Une forte valeur du ratio BE/ME (valeur de substance)
une forte valeur de profitabilité. Qui plus est, le marché anticipe, conditionnellement à
l’appartenance à une classe de taille et de croissance, le phénomène de retour à un niveau
normal de croissance.

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