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Projet de fin d’étude

En vue de l’obtention du diplôme de Master

Option : FINANCE

Thème :

Les crises financières internationales et son impact sur la


croissance économique marocaine

Réalisé par : Encadré par :

OUMAYMA BECHTAOUI Mr. MEHDI DEHMANI

Soutenu publiquement devant le jury composé de :

Le directeur : Mr. MEHDI DEHMANI

Professeur : Mme. BASMA MOUMNI

Année universitaire : 2022/2023


REMERCIEMENTS :

Au terme de la rédaction de ce projet de fin d’études, c’est un devoir agréable d’exprimer en


quelques lignes la reconnaissance que je dois à tous ceux qui ont contribué de loin ou de près
à l’élaboration de ce travail, qu’ils trouvent ici mes vifs respects et ma profonde gratitude.

Je tiens à remercier Mr. MEHDI DEHMANI pour son encadrement fructueux, sa générosité,
son suivi au cours de ma préparation de ce projet. Pour son suivi de ce travail dans tous ces
détails avec une rigueur scientifique exceptionnelle, ce qui m’a donné le courage pour
poursuivre la réalisation de ce projet de recherche. Il a su me faire partager son intérêt pour la
recherche à travers de conseils et d’échanges amicaux.

Un grand merci à Mme BASMA MOUMNI, professeur à HECI pour sa disponibilité


permanente et son soutien au cours de ma recherche. Je ne pourrais oublier les conseils qui
m’ont été d’une grande utilité.

Je tiens à les remercier profondément pour l’aide efficace qu’ils m’ont toujours apportée, leurs
critiques et leurs remarques ont largement contribué à l’aboutissement de mon travail.
J’adresse mes plus sincères remerciements aux membres de Jury, Mr. MEHDI DEHMANI et
Mme. BASMA MOUMNI, le Directeur de l’institut supérieur HECI et mon professeur de
management et entreprenariat, d’avoir accepté de juger mon travail.

2
DEDICACE :

Je dédie ce projet de fin d’étude à mes parents


pour leur soutien indéfectible et leur amour
inconditionnel tout au long de mon parcours
académique et professionnel. Leur confiance
en moi a été une source de motivation pour
atteindre mes objectifs et réussir cette étape
importante de ma vie.

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SOMMAIRE :

Introduction ;

Chapitre 1 : Les crises financières internationales

Section 1 : Les fondements historiques des crises financières

Section 2 : Causes et mécanismes des crises financières

Section 3 : Solutions suggérées par le FMI

Chapitre 2 : Exemples des crises financières internationales :

Section 1 : Crise énergétique mondiale

Section 2 : La crise du COVID-19

Section 3 : Scandale financier : Crédit Suisse

Chapitre 3 : Etude de cas « MAROC »

Section 1 : Etude de la crise en Afrique

Section 2 : Etude de la crise au Maroc dans plusieurs secteurs

Section 3 : L’impact de la crise financière internationale sur le secteur touristique


marocain

Conclusion.

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ABREVIATIONS :

PIB : Produit intérieur brut

FMI : Fonds monétaire internationale

G20 : Le groupe des 20

LCM : La ligne de crédit modulable du FMI

DTS : Droit de tirage spécial

OPCVM : Organisme de Placement Collectif en Valeurs Mobilières

SICAV : une Société d’Investissement à Capital Variable

CDS : credit default swap

UBS : l’Union de Banques Suisses

RSE : Responsabilité Sociale des Entreprises

IDM : Investissement Directs Marocains

EPP : Les établissements et entreprises publics

BAD : Banque Africaine de Développement

SEC : Securities and Exchange Commission

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INTRODUCTION :

La crise financière est un type incertain de crise économique qui résulte des marchés
financiers et les marchés boursiers, donc toutes les crises financières sont des crises
économiques. Les crises financières se caractérisent par 4 points essentiels :

- L’effondrement boursier qui est un effondrement de la valeur des actions sur les places
boursières ;
- Des faillites d’entreprises ;
- La chute du PIB : qui se manifester comme une récession si ça dure seulement
quelques mois, ou une dépression si ça dure longtemps, comme ça été le cas dans les
années 30 aux Etats-Unis ;
- Hausse de chômage.

Ces points peuvent être communs entre toutes les crises financières.

Entre les années 1930 et les années 1980, il y’a eu très peu de crise financière parce que les
marchés financiers ont été fortement régulier, à partir des années 1980, il y’avait une
dérégulation des marchés financiers qui a abouti à une multiplication des crises financières
certaines de moyennes et majeures importances. Comme la crise de 2008 qui a touché les
Etats-Unis et ensuite le monde entier.

La crise se forme à partir de la spéculation1. Quand les spéculateurs sont nombreux et


spéculent sur le même type de choses, elle se forme une bulle spéculative c’est-à-dire de
nombreux agents économiques vont spéculer un élément comme ça été le cas aux Etats-Unis
en 2008, les agents économiques ont spéculé sur le marché immobilier américain c’est-à-dire
le prix sur ce marché se sont envolés, déconnectés de leur valeur réelle, les prix des maisons
sont fortement élevé. Un autre exemple du Japon qui a eu une bulle spéculative également sur

1
La spéculation : D’après la définition de Nicholas Kaldor : « C’est l’achat ou la vente de marchandises en vue
d’une revente ou rachat à une date ultérieur, en anticipation d’un changement des prix en vigueur, et non en
vue d’un avantage résultant de leur emploi, ou une transformation ou un transfert d’un marché à un autre »
(Economie et instabilité, éd. Economica, 1987, p.49).
6
le marché de l’immobilier, la valeur de l’immobilier était équivalente à la valeur des biens
immobiliers de tous les Etats-Unis à la même période.

La bulle spéculative est la conséquence des comportements mimétiques et moutonniers, ça


veut dire qu’il y’a des agentes économiques qui prennent leurs décisions sur la base des
décisions d’autres agents économiques. Donc elle commence à se former puis elle s’éclate, ce
qui résulte une propagation de la crise financière, cette dernière se propage à travers plusieurs
canaux à savoir :

- Paniques bancaires : Les ménages retirent leurs argents auprès des banques à cause du
manque de confiance, alors que les banques ne possèdent pas l’intégralité en réserves,
ce qui va entraîner la faillite de certaines banques qui ne peuvent pas faire face aux
demandes de monnaie.
- Effet de richesse négative : quand les ménages commencent à épargner, le niveau de
consommation des biens et services dans le pays va diminuer, ce qui va influencer sur
la production et par la suite sur le PIB2.
- Contraction du crédit : les banques commerciales vont s’interdire d’octroyer des
crédits aux entreprises, alors les investissements vont diminuer.

En effet, la crise qui est financière se propage en économie réelle. Par exemple la crise de
2008, quand la crise a éclaté les marchés boursiers, la valeur de l’action a diminué, alors que
la crise a propagé à tous les autres secteurs de l’économie.

Donc, pour éviter une nouvelle crise, les banques centrales et les gouvernements ont décidé de
réduire l’aléa moral chez les banques, c’est-à-dire elles vont se protéger par l’Etat et prennent
des risques excessifs. Alors l’Etat peut faire deux choses principaux :

- Un ratio de fonds propre : C’est-à-dire demander obligatoirement les banques de


posséder une réserve de capitaux pour avoir la solidité pour faire face en cas de crise
financière.
- La supervision des banques : mise en place par la banque centrale européenne, cette
dernière surveille et vérifie régulièrement la résistance des banques commerciales à
une situation de crise.

2
PIB : Le produit intérieur brut vise à mesurer la richesse créée par tous les agents, privés et publics, sur un
territoire national pendant une période donnée.
7
Contexte de l’étude :

Le covid 19, la crise énergétique, une crise politique, une faillite bancaire … tout cela
engendre une crise financière pour un pays quel que soit sa performance.

D’abord la finance analyse la manière dont un Etat, une entreprise, un particulier prend une
décision économique, dans un contexte précis. Elle englobe les activités liées aux opérations
bancaires, aux marchés des capitaux, aux investissements et aux dettes. Ce secteur est très
dynamique et en force croissance mais comme chaque secteur il y’a toujours des balustrades
qu’on doit surmonter. Cependant, en finance nous retrouvons des crises financières

Alors le thème que j’ai choisi est la crise financière internationale, ce sujet est plus prêt de
mon domaine d’étude, en plus il n’est pas limité dans le temps et le lieu, et demande beaucoup
de réflexion, mon choix est motivé par l’état que le monde vie aujourd’hui. Ces crises
financières sont liées aux problèmes économiques et politiques d’un pays.

Ceci conduit donc à poser la question fondamentale :

- Comment influence la crise financière internationale sur l’économie africaine,


marocaine et sur le secteur touristique marocain ?
- Quels est l’impact des crises internationales sur la croissance de l’économie du
Maroc ?

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CHAPITRE 1 : LES CRISES FINANCIERES INTERNATIONALES

SECTION 1 : Les fondements historiques de la crise financière :

1) La crise de 2008 :

Apparue aux Etats-Unis au cours de l’été 2007, la crise, appelée initialement crise des «
subprimes », trouve son origine dans le retournement du marché immobilier et l’envolée des
taux d’intérêt aux Etats-Unis. Sous l’effet de ces deux facteurs, les défauts de paiements des
emprunteurs s’étaient multipliés et les sociétés de crédits immobiliers ont été confrontées à de
graves difficultés financières, déclenchant dans le secteur une crise aigüe. Les effets de la
crise des « subprimes » se sont rapidement étendus au-delà du marché immobilier américain
et ont perturbé par la suite les marchés financiers mondiaux.

Se manifestant tout d’abord sous la forme d’une crise de liquidité, la crise s’est matérialisée
par des tensions sévères sur les marchés interbancaires. Ces perturbations se sont traduites par
une envolée des spreads, une réduction des maturités ainsi qu’une baisse sensible du crédit.
D’autres segments des marchés financiers ont été également affectés.

Cette crise est aussi apparue comme une crise de la titrisation. L’effondrement des formes les
plus généreuses de titrisation a révélé que l’innovation financière de ces dernières années a
servi non pas à mieux gérer et répartir le risque, mais à accroître le crédit par l’effet de levier.
La faillite de la banque d’investissement Lehman Brothers en septembre 2008 a marqué un
tournant décisif dans la crise. Elle a déclenché un climat de défiance généralisée sur
l’ensemble des marchés financiers caractérisé par une forte progression de la volatilité, une
importante aversion au risque et un blocage des marchés monétaires ainsi qu’une panne de
confiance profonde dans la solvabilité des institutions financières.

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Les turbulences sur la sphère financière ont fini par affecter à leur tour le canal réel, entraînant
la paralysie d’un grand nombre de secteurs économiques et une baisse remarquable de
l’activité et du commerce mondiaux.

Graphique 1 : Détérioration de l’activité économique au niveau


international

Source : data Stream

La crise financière peut être schématisée ainsi comme un problème de marché survenu au
début dans les subprimes, qui a généré une crise financière sur le marché des refinancements à
court terme qui, à son tour, a provoqué une crise aigüe dans le secteur bancaire avant
d’induire des implications sévères sur l’économie réelle et l’emploi, comme en témoigne
l’évolution du taux de chômage qui a particulièrement explosé dans les principales économies
avancées.

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Graphique 2 : Evolution de taux de chômage

Source : Data Stream

La crise a revêtu très vite une dimension internationale, puisqu’après avoir affecté l’ensemble
des pays développés, les économies émergentes ont été à leur tour rattrapées par la crise à
partir de l’été 2008, soit un an plus tard après son déclenchement sur le marché américain. Un
tel degré de contagion internationale laisse penser que la crise actuelle peut être qualifiée de
première crise de la mondialisation.
Pour la plupart des experts, c’est l’une des crises les plus sévères jamais survenues. A cet
égard, le FMI a recensé plus de 120 crises bancaires entre 1970 et 2007, mais la récente crise
financière est d’une ampleur et d’une complexité sans précédent.
Pour ce qui est des éléments explicatifs avancés, il semble que la crise actuelle trouve son
origine dans plusieurs facteurs, à savoir la politique monétaire aux Etats-Unis, le cadre

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d’analyse des banques centrales et enfin la supervision des banques et des marchés. Les
agences de notation ainsi que les règles comptables ont également joué un rôle significatif.
Attestant de l’ampleur très forte de la crise, les perspectives de croissance mondiale ont subi
des révisions successives à la baisse en raison de la détérioration rapide de la conjoncture
internationale. Selon les plus récentes projections de croissance du FMI, les économies
avancées vont connaître un repli de leur croissance de l’ordre de 3,4% en 2009 avant de
renouer avec une croissance de 1,3% en 2010. Les Etats-Unis subiront une contraction de leur
croissance de 2,7% en 2009 suivie par un rebond de l’activité de 1,5% en 2010, tandis que la
zone Euro enregistrera une baisse de croissance à hauteur de 4,2% avant d’amorcer une
reprise timide estimée à 0,3% en 2010. Pour leur part, les économies émergentes qui ont
nettement mieux résisté aux turbulences financières, verront leur taux de croissance croître de
1,7% en 2009 et de 5,1% en 2010.
Si des signes de reprise de l’activité économique sont perceptibles à l’heure actuelle et que les
marchés financiers connaissent une relative amélioration, les perspectives de reprise varient
d’un pays à l’autre et de grandes incertitudes pèsent encore sur une sortie définitive de la
crise. L’économie mondiale demeure en outre marquée par une volatilité importante des cours
des matières premières, qui ont connu une hausse au cours de la période récente, mais dont les
niveaux restent largement inférieurs à ceux atteints en 2008.
Au plan financier, si les risques d’effondrement systémique semblent avoir été réduits sous
l’effet des politiques de gestion de la crise, les marchés demeurent instables. Et bien que
l’appétit pour le risque ait rebondi, la confiance est loin d’être durablement rétablie.

2) Les politiques de gestion de cette crise :


Pour ce qui est des réponses apportées à la crise, force est de constater qu’au début, compte
tenu du mouvement d’instabilité générale et de panique sur les marchés qui en a résulté, les
actions déployées pour y faire face n’étaient pas concertées, notamment en Europe. Les pays
n’étaient pas unanimes sur le choix des mécanismes de résorption de la crise, en particulier
sur la priorité à accorder aux mesures urgentes à adopter.
Les incertitudes portaient notamment sur la nécessité de privilégier les liquidités sur le marché
interbancaire, de sécuriser les opérateurs et, par voie de conséquence, la capitalisation des
banques, ou encore d’apporter les garanties nécessaires en ce qui concerne les créances
toxiques.

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Cependant, il est très vite apparu que l’approfondissement de la crise et la prise de conscience
de l’inefficience de certaines mesures prises individuellement rendaient nécessaire et cruciale
une concertation globale. Deux types de facteurs de relance se sont, par conséquent, déclinés,
à savoir la relance sur les plans budgétaire et monétaire. C’est la combinaison de ces deux
instruments qui a joué un rôle déterminant pour éviter une crise systémique, soutenir la
confiance et créer les conditions de la relance. A cela, il faudrait ajouter l’action du G20 et des
organisations internationales, notamment le FMI, qui ont également joué un rôle prépondérant
dans le processus de relance. Ces mesures étaient avant tout destinées à rétablir la confiance
dans les marchés en vue d’assurer la stabilité financière.
S’agissant des programmes lourds déployés par les pouvoirs publics destinés à relancer la
demande, à procéder au sauvetage des établissements bancaires fragilisés et à réduire
l’incertitude sur les marchés financiers, les Etats ont déboursé des sommes colossales pour
contrer les retombées de la crise et venir en aide à leurs économies.
Du fait de ces dépenses de grande envergure, les soldes budgétaires dans ces pays se sont
fortement dégradés.
Parallèlement, les ratios de la dette publique devraient considérablement se détériorer en 2009
pour atteindre des niveaux préoccupants. Cette situation de creusement du déficit budgétaire
et de l’aggravation de la dette soulève des interrogations quant aux conditions de
remboursement. Celles-ci vont-elles s’opérer à travers un regain des tensions inflationnistes ?
Avec la reprise de l’activité économique, les recettes budgétaires seront-elles suffisantes ou
sera-t-il nécessaire de prévoir un rehaussement du taux d’imposition ? La situation est
d’autant plus préoccupante qu’elle intervient dans un contexte actuel de désinflation, voire de
déflation dans certains pays.
Pour leur part, les banques centrales, dès l’apparition des turbulences financières, ont réagi
avec rapidité et souplesse. Pour endiguer les effets de la crise, des mesures conventionnelles
et non conventionnelles ont été largement utilisées. Sur le plan des mesures conventionnelles,
les taux ont été abaissés de manière substantielle, se réduisant à des taux zéro dans les
économies avancées. En outre, face à l’intensification de la crise et la raréfaction des
opérations interbancaires, les banques centrales ont également eu recours aux mesures non
conventionnelles pour injecter des liquidités et soutenir le crédit. Cependant, à l’instar des
mesures de politique budgétaire, la sortie des mesures de politique monétaire suscite
également des craintes en cas de reprise de l’activité économique.

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Graphique 3 : Evolution des principaux taux directeurs des banques
centrales :

Source : Data Stream

Le troisième type de mesures concerne l’intervention coordonnée dans le cadre du G20 et le


rôle du FMI.
De par leur ample action, ces instances ont grandement œuvré pour la restauration de la
confiance et la redynamisation du marché monétaire, qui devront immanquablement favoriser
la reprise de l’activité du crédit. De ce fait, les concours financiers accordés par le FMI à un
grand nombre de pays ainsi que l’allocation de DTS 3ont contribué à rétablir la confiance. La
ligne de crédit modulable 4(LCM) en particulier a apporté un soutien important à plusieurs

3
Droit de tirage spécial : Le DTS est un actif de réserve international, créé en 1969 par le FMI pour compléter
les réserves de change officielles de ses pays membres. En mars 2016, 204,1 milliards de DTS avaient été créés
et alloués aux pays membres (soit l’équivalent d’environ 285 milliards de dollars).
4
La ligne de crédit modulable du FMI (LCM) La ligne de crédit modulable a été conçue pour répondre à la
demande de financement émanant de pays qui présentent une politique et des antécédents économiques très
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pays émergents. En même temps, l’augmentation des prêts concessionnels a élargi la marge
de manœuvre des pays à faible revenu pour mener des politiques anticycliques.
Pour sa part, le G20, lors de sa réunion à Londres le 2 avril 2009, est parvenu à un certain
nombre d’engagements en matière de relance budgétaire et monétaire, de renforcement de la
réglementation financière et de promotion du commerce international. Ces engagements
portent sur le rétablissement de la croissance et de l’emploi, le renforcement de la supervision
et de la réglementation du système financier, le renforcement des institutions financières
internationales ainsi que la lutte contre le protectionnisme et la promotion du commerce
international. En revanche, il ressort que la Banque Mondiale, en tant qu’acteur important au
sein des organisations internationales, n’a pas joué un rôle significatif dans cette dynamique
de relance, la communauté internationale ne l’ayant pas dotée de ressources appropriées. Elle
s’est davantage consacrée à résorber les difficultés du système financier international plutôt
qu’à tenter de remédier aux problèmes de la croissance.
En définitive, les politiques concertées de relance budgétaire et monétaire ont réussi à
maîtriser les risques systémiques et de grave récession, bien que des fragilités persistent
encore. Les interventions sans précédent des banques centrales et des gouvernements de par le
monde ont réussi à stabiliser la situation financière des établissements de crédit, à apaiser les
tensions de financement et les risques de contrepartie et à soutenir la demande globale.
L’ensemble des mesures mises en place a globalement permis une normalisation des
conditions financières au cours des derniers mois et une stabilisation, voire une reprise de
l’activité économique dans le monde. Sur le plan financier, les marchés de la dette bancaire et
les marchés interbancaires ont redémarré. Les incertitudes face aux risques de contrepartie et
de liquidité dans le secteur bancaire sont moins marquées, tels qu’il est reflété par le
rétrécissement des écarts LIBOR-OIS et des écarts des contrats sur risque de défaut. Les
indices boursiers ont commencé également à se redresser. Au plan réel, des signes précurseurs
de reprise ont pu être observés aussi, comme le confirment les premiers taux de croissance
positifs au cours du deuxième trimestre 2009 observés depuis le début de la crise dans certains
pays avancés tels que la France, l’Allemagne et le Japon.
Les conditions financières globales restent cependant tendues. La croissance du crédit
bancaire au secteur privé n’a pas encore recouvré sa dynamique dans les économies avancées,

solides pour prévenir et résoudre des crises. Cet instrument a été créé dans le cadre de la réforme engagée par
le FMI pour modifier les conditions auxquelles il accorde des prêts aux pays qui traversent des difficultés de
trésorerie en les adaptant à leur situation et besoins particuliers.
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les marchés de titrisation marquent toujours le pas, hormis ceux qui bénéficient de l’aide de
l’État, et les emprunteurs dont la signature est de moindre qualité n’ont guère accès aux
marchés de capitaux pour se financer. Les interventions de l’État, qui ont été décisives pour
réduire les risques du secteur privé, ont par ailleurs entraîné un accroissement des risques pour
le secteur public et représentent un poids grandissant pour la viabilité des finances publiques.
La récession mondiale devrait cependant se poursuivre jusqu’à la fin de 2009, avant de céder
place à une reprise partielle et progressive en 2010, dont l’ampleur demeure tributaire de
l’efficacité des mesures de relance et de la dynamique des marchés du crédit.
Globalement quel bilan peut-on tirer de la crise actuelle et des mesures de relance au niveau
international ?
Il est possible d’avancer que la crise, de par son ampleur et la vitesse de sa propagation, a
révélé de sérieux dysfonctionnements qui caractérisent de manière profonde le système
financier international. Par ailleurs, il est permis de constater que les erreurs commises lors de
la crise de 1929 n’ont pas été reproduites, tels un retour du protectionnisme dans les domaines
du commerce, de la finance, de l’investissement et des services de main d’œuvre, des
dévaluations compétitives ou encore des réactions orthodoxes de la part des banques
centrales.
A moyen terme, des risques majeurs continuent de peser sur la reprise économique,
principalement dans les pays avancés. Sur le front financier, l’enjeu majeur est de rétablir
durablement la confiance dans un système financier durement malmené par la crise. Sur le
plan macroéconomique, le risque le plus important a trait à la détérioration des positions
budgétaires, notamment à la suite des mesures prises pour soutenir la relance.

3) Synthèse de la crise de 2008 :

La crise des subprimes s’est déclenchée au deuxième semestre 2006 avec le krach des prêts
immobiliers (hypothécaires à risque aux Etats-Unis, les subprimes, que les emprunteurs,
souvent de conditions modestes, n’étaient plus capables de rembourser. Révélée en février
2007 par l’annonce d’importantes provisions passées par la banque HSBC, elle s’est
transformée en crise ouverte lorsque les adjudications périodiques n’ont pas trouvé preneurs
en juillet 2007. Compte tenu des règles comptables en cours, il est devenu impossible de
donner une valeur à ces titres qui ont dû être provisionnés à une valeur proche à zéro. En
même temps, les détenteurs ne pouvaient plus liquider leur créance. La défiance s’est installée
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envers les créances titrisées ABS, RMBS, CMBS, CDO qui comprennent une part plus ou
moins grande de crédits subprimes, puis envers les fonds d’investissement, les OPCVM 5 dont
les SICAV6 monétaires et le système bancaire susceptibles de détenir ces dérivés de crédit.

SECTION 2 : Causes et mécanismes de la crise financière :

1/ Les causes des crises financières :


 Des innovations financières mal contrôlées :

Les innovations financières comme l'apparition de nouveaux produits, de nouveaux acteurs ou


de nouvelles règles dans le cercle de la finance. Leurs fonctions peuvent être diverses : visant
le plus souvent à capter les flux d'épargne via des véhicules plus performants ou moins
onéreux, elles peuvent aussi servir à contourner les réglementations en vigueur ou encore à
accroître les commissions des financiers par le biais d'une augmentation des rendements.
Ainsi, si leur but consiste généralement à fluidifier les transactions financières tout en
assurant plus de sécurité, ces innovations ont joué un rôle central dans les périodes
d'émergence des crises financières et ont de ce fait amplifié le cycle et les conséquences du
retournement, en raison de leur mauvais usage, de leur calibration dangereuse ou encore de
leur réglementation insuffisante.

Le commerce des tulipes en Hollande au début du 17ème siècle constitue un marché de niche
fonctionnant par vente directe des horticulteurs aux clients, ces derniers passant commande en
automne et réglant leurs acquisitions à l'été suivant. Trois innovations apparaissent dans le
marché à partir de 1635. D'abord, un intermédiaire naît entre l'horticulteur et le client : le
fleuriste. Ensuite, afin de libérer les transactions financières limitées jusque-là aux mois d'été,
sont créés des billets à effets (i.e. des contrats à terme) permettant d'acheter et vendre des
tulipes, encore en terre, à un prix fixé à l'avance. Cette deuxième innovation transforme le
marché de niche en véritable marché financier de gré à gré composé d'un segment primaire et
5
Organisme de Placement Collectif en Valeurs Mobilières (OPCVM) est un organisme financier qui a pour
vocation : La collecte de l’épargne auprès des investisseurs pour la placer dans des valeurs mobilières selon des
critères bien défini. Ainsi, cela permet de constituer un portefeuille de valeurs mobilières.
6
SICAV est un type d’OPCVM, est une Société d’Investissement à Capital Variable est une société anonyme. Tout
investisseur qui souscrit à une action, devient actionnaire et possède le droit d’exprimer son avis sur la gestion
lors des assemblées générales.
17
surtout secondaire sur lequel les billets à terme s'échangent de plus en plus pour eux-mêmes,
sans rapport avec les caractéristiques des bulbes sous-jacentes aux contrats. Une troisième
innovation financière a émergé lorsque certains acteurs du marché ont proposé de vendre des
contrats à terme avec une assurance contre le risque de baisse de prix, nourrissant ainsi une
dernière vague spéculative avant le retournement de février 1637. Même si le krach n'a que
peu affecté l'économie réelle, l'entremêlement des contrats financiers a considérablement
complexifié l'assainissement des bilans des agents impliqués.

Le système mis en place par John Law dans la France du 18ème siècle s'est également
construit sur une série d'innovations financières. Premièrement, Law obtient du Régent
Philippe d'Orléans le droit de créer une banque privée en mai 1716, sans garantie de l'État, au
capital de 6 millions de livres, pour collecter les dépôts et escompter des lettres de change. La
spécificité réside dans le fait que les investisseurs sont autorisés à n'apporter qu'un quart du
prix de l'action de la banque, celui-ci pouvant être payé à trois-quarts en titres d'État.
Deuxièmement, après avoir autorisé en avril 1717 l'utilisation des billets émis par Law pour le
paiement des impôts, Philippe d'Orléans avalise la transformation de la banque de Law en
Banque Royale en décembre 1718. Les investisseurs sont remboursés en espèces et les titres
de dette sont transformés en actions d'une nouvelle compagnie. C'est la troisième innovation :
en août 1717 est créée la Compagnie du Mississippi. La Compagnie absorbe progressivement
de nombreux comptoirs de commerce et obtient le privilège de fabrication de la monnaie.
Quatrième innovation, Law propose au Régent de racheter pour 1,2 milliard la totalité de la
dette française et offre aux détenteurs de la dette des actions de la compagnie. Law demande
aussi l'intégralité de la Ferme générale et devient en janvier 1720 Contrôleur général des
Finances. Le montage financier constitué de ces quatre innovations constitue aux yeux de
Law un système sans faille : les profits issus du commerce et de la collecte des impôts
soutiennent la hausse des actions qui elle-même garantit la valeur des billets émis. Une
dernière innovation précipitera pourtant sa chute : la possibilité pour les investisseurs
d'apporter une action de la compagnie en collatéral de nouveaux prêts minera rapidement la
confiance dans la monnaie de Law.

Dans la crise de 1907, les frères Heinze sont d'abord victimes d'innovations financières
passées : l'achat de titres à la marge et la vente à découvert. En effet, persuadés à tort que

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certains financiers sont en train de vendre à découvert les actions de leur entreprise de cuivre,
la United Copper Company, ils achètent une grande partie des titres disponibles sur le marché
pour empêcher la baisse du cours. Trompés par leur intuition, ils précipitent leur faillite :
l'augmentation du cours engendré par leurs achats incite l'intégralité des détenteurs de titres à
vendre et réaliser leurs gains. Cependant, c'est une innovation financière contemporaine à
cette crise qui explique la transmission des paniques bancaires visant les banques détenues par
les Heinze à une partie du système financier américain : l'émergence de trusts opaques et peu
règlementés à la fin du 19ème siècle, combinant à la fois des activités de gestion patrimoniale,
de financement de marché, de crédit bancaire et de collecte des dépôts.

Les crises financières à l'origine de la Grande Dépression dans les années 1930 et la Grande
Récession initiée en 2008 se sont également nourries d'innovations financières multiples.
Trois d'entre elles caractérisent principalement la crise de 1929 : le développement accéléré
dans les années 1920 des sociétés d'investissement qui spéculent sur les marchés financiers et
se livrent une concurrence féroce pour attirer l'épargne disponible ; l'émergence de caisses
d'épargne spécialisées dans l'immobilier exigeant moins de garanties que les banques
commerciales ; les débuts du marché de l'assurance-crédit et de la transformation des crédits
immobiliers en actifs financiers. Dans un climat de spéculation porté par l'optimisme des
années 20, l'accroissement de la concurrence a notamment conduit les acteurs financiers dans
une course aux commissions, encourageant leurs clients à émettre des titres au-delà de leurs
capacités de remboursement.

Quant aux innovations qui ont permis la crise des subprimes, elles se sont traduites dans le
milieu des années 1990 par la montée en puissance des techniques de titrisation opérées à
l'aide de véhicules d'investissement spéciaux et la complexification de produits dérivés peu
liquides en cas de chocs financiers. Ces produits étaient vendus notamment par une poignée
d'acteurs systémiques, déjà considérés « too big to fail » suite à la course à la concentration
des décennies passées. Il est aujourd'hui clair que la titrisation a conduit les banques à relâcher
les efforts de sélection et de surveillance des dossiers de crédit, et les investisseurs à
surestimer la liquidité virtuelle des titres assurée par le marché des CDS 7 (crédit default
swaps). Mentionnons enfin, et ceci dès les années 1970, la stratégie de certaines banques
7
Un CDS (credit default swap) est une sorte d’assurance par laquelle un établissement financier se protège du
risque de défaut de paiement d’un crédit en payant une prime.
19
(Merrill Lynch, Bankers Trust etc.) visant à créer des produits financiers à mi-chemin entre
l'activité de banque commerciale et de banque d'investissement pour obtenir du régulateur
l'abrogation du Glass-Steagall Act de 1933, réalisée en 1999.

 Des crédits en quantités excessives :

La deuxième composante de la matrice d'instabilité financière est la distribution excessive de


crédit bancaire. Cet argument n'est en aucune façon le reflet d'une nostalgie d'une économie
fondée seulement sur un financement par épargne préalable, comme ce peut être le cas dans la
critique du crédit portée par l'école d'économie autrichienne. Nous voulons davantage mettre
en avant que le crédit, lorsqu'il finance en trop grande quantité l'achat d'actifs, nourrit,
amplifie et rend encore plus instables les bulles financières. Le lien entre crédit bancaire et
prix d'actifs est d'ailleurs signalé dans la littérature théorique. Citons par exemple le modèle
des économistes Allen et Gale (2000) fondé sur l'existence d'une relation d'agence particulière
entre les investisseurs et les banques auprès desquelles ils s'endettent. L'incapacité de la
banque à observer parfaitement l'emploi des fonds et la responsabilité limitée associée aux
contrats de dette incitent les investisseurs à augmenter leur demande d'actifs risqués, poussant
le prix de ces actifs au-dessus de leur valeur fondamentale. La dynamique du prix des actifs
au sein de la bulle dépend de l'incertitude sur leurs rendements futurs et sur l'évolution
anticipée du crédit. Dans ce modèle, il suffit que la croissance anticipée du crédit ralentisse
légèrement pour que la bulle éclate et que les agents économiques fassent défaut.

Détaillons maintenant le rôle joué par le crédit dans les différentes crises financières étudiées.
Nous ne nous attardons pas sur la crise des tulipes car les données historiques sont fragiles.
Law, quant à lui, est souvent considéré comme un des premiers grands penseurs du lien entre
crédit, dette et croissance économique. Il a beaucoup appris sur ces sujets aussi bien en
spéculant lui-même sur les marchés des titres souverains que lors des divers voyages à travers
l'Europe. Lorsqu'il s'installe définitivement en France en 1714, il est persuadé que les
économies occidentales tournent en dessous de leur production potentielle. Il pense que
libérer l'économie française de la contrainte de la monnaie métallique peut permettre de
relancer l'activité et d'améliorer les finances publiques en augmentant les recettes fiscales. Il a
appliqué ses idées puisque sa banque a toujours émis des billets pour une valeur bien
20
supérieure à la quantité de métaux précieux présente en contrepartie. Cette dynamique s'est
considérablement amplifiée lorsqu'il a laissé aux épargnants la possibilité d'emprunter 2 500
livres destinés à l'achat de nouveaux titres pour toute action de la compagnie apportée en
collatéral. En mai 1720, les billets représentent quatre fois les encaisses métalliques.

Les trois autres crises comportent également en leur cœur la dynamique du crédit. Les frères
Heinze se sont associés à Charles Morse, banquier spécialiste du « Chain Banking », pratique
consistant à utiliser des participations dans une organisation économique comme collatéral
pour obtenir des prêts afin de prendre d'autres participations et ainsi de suite. Heinze a utilisé
les actions de son entreprise de cuivre, la United Copper Company, pour investir dans six
grandes banques nationales, des banques locales, des banques d'affaires, et des compagnies
d'assurance. Ainsi, le financement d'achat de titres par crédit bancaire est d'autant plus risqué
qu'il est gagé sur des variations d'actifs collatéralités.

La bulle de 1929 fut aussi alimentée par un endettement excessif : pendant la décennie, les
banques ont non seulement augmenté de 8 points la part des actions dans leur bilan, mais elles
ont également accru leurs prêts spéculatifs, passés de 23 % à 38 % de leur actif, aboutissant à
un volume d'échanges d'actions multiplié par cinq.

Le même diagnostic vaut pour la crise amorcée en 2007. Les acteurs financiers ont augmenté
leur levier pour acheter les produits adossés aux crédits immobiliers subprimes contractés par
les ménages américains à faibles revenus. D'ailleurs, depuis cette dernière crise, beaucoup de
travaux empiriques, qui réévaluent le lien entre finance et croissance, convergent vers une
conclusion similaire : la taille du secteur financier, mesurée par la quantité totale de crédit
accordé au secteur privé rapportée au PIB (ou bien par la part de la finance dans l'emploi
total), a un impact non linéaire sur la croissance économique. En particulier, les économistes
Cecchetti et Kherroubi (2012) concluent à partir d'un échantillon de 50 économies avancées et
émergentes entre 1980 et 2009 à un effet marginal négatif de la finance sur la croissance
lorsque le crédit privé dépassé 100 % du PIB (ou lorsque le secteur financier représente plus
de 3,9 % de l'emploi total). À cet égard, le stock de dette privée américaine demeure encore
très élevé.

21
Graphique 4 : Dettes privées aux Etats-Unis

Source : calculs de Steve Keen


(http://www.debtdeflation.com/blogs/2014/02/02/modeling-financial-
instability/#_ENREF_10)

c) Des inégalités économiques marquées :

L'existence d'inégalités économiques et sociales importantes constitue la troisième brique de


la matrice d'instabilité financière. Cet élément est fondamentalement relié à la distribution de
crédit évoquée précédemment : comment expliquer l'endettement croissant des ménages
pauvres américains sans évoquer la stagnation du niveau de vie de cette partie de la
population aux États-Unis depuis trente ans ?

Mais revenons d'abord aux crises plus anciennes. Dans la Hollande du 17ème siècle, cœur de
l'économie monde, l'activité maritime et commerciale a permis l'émergence d'une classe de
riches marchands ayant le goût du risque. L'opulence de ceux-ci explique en partie l'apparition
de nouveaux intermédiaires, les fleuristes, attirés par des perspectives d'enrichissement facile,
qui s'introduisent dans l'échange des tulipes entre horticulteurs et clients. Les inégalités ne
22
sont pas moins criantes en France au 18ème siècle. En plus d'avoir été creusée par les guerres
menées par Louis XIV, la dette française colossale dont hérite Philippe d'Orléans reflète l'état
d'une société de privilèges. Noblesse et clergé sont exemptés d'une part conséquente d'impôts
par rapport au tiers état, et le droit de collecter l'impôt est concédé aux fermiers généraux,
ceux-ci réalisant un profit considérable.

Les crises de 1907, 1929 et 2007 se sont également déroulées dans une société américaine très
inégalitaire. L'Amérique du début du 20ème siècle voit éclore de grandes fortunes capitalistes
comme celles des frères Heinze et de John Rockefeller qui vont ensuite s'investir dans la
bourse et l'immobilier. À la veille du krach de 1929, les 1 % des américains les plus aisés
reçoivent 21 % du revenu national soit trois points de plus qu'en 1920. Ils sont aux surplus
relativement peu taxés, la tranche marginale la plus haute d'imposition sur le revenu s'élevant
seulement à 24 %. L'Histoire rime : la part des revenus reçus par les 1 % les plus riches, ayant
atteint un plancher à 10 % en 1976, grimpe jusqu'à 20 % en 2007, soit quasiment la même
statistique qu'en 1929. Les inégalités de consommation furent inférieures aux inégalités de
revenus, mais au prix d'un endettement croissant des ménages modestes et d'une augmentation
de la taille du secteur financier, autre facteur d'instabilité financière mentionné précédemment.

d) Des obstacles à la réglementation financière :

Le quatrième et dernier élément de notre matrice d'instabilité financière réside dans certains
obstacles à la mise en œuvre de règlementations favorables à la stabilité financière. Ceux-ci
peuvent être engendrées par l'existence de conflits d'intérêt ou d'un manque de recul, parfois
coupable, par rapport aux concepts économiques ou outils existants pour appréhender les
risques.

La crise des tulipes s'est déroulée à une période où les commerçants ne craignaient guère des
représailles vis-à-vis de leurs comportements financiers : les régents des villes hollandaises,
représentants locaux de l'autorité publique, croyaient avant l'heure aux bienfaits de la main
invisible du marché et menaient une politique très favorable aux élites économiques en
refusant l'introduction d'une imposition sur le capital. Law, quant à lui, a souvent été accusé
par ses détracteurs d'avoir construit un système financier au service des « puissants ». Bien
23
avant son installation en France en 1714, Law entretenait déjà des relations avec le pouvoir
politique. Dans un intérêt qu'il croit bien compris, Philippe d'Orléans laisse Law, qu'il
rencontre dès 1708 dans les salles de jeux, s'adjuger de plus en plus de pouvoirs et demande
bien peu de comptes. À tel point que lorsque la Banque s'effondre, il se voit contraint de faire
une dernière fois appel aux services de Law en juin 1720 pour tenter d'auditer les comptes et
de liquider son système.

La panique de 1907 intervient également dans un monde financier peu réglementé. D'abord,
l'architecture bancaire américaine est par construction fragile. Fragmenté et hiérarchisé, des
petites banques rurales aux grandes banques des centres de décision du pays, le système
financier américain permet certes une circulation flexible de l'épargne à travers le territoire
par le jeu des réserves bancaires mais soumet surtout l'ensemble des acteurs au risque de
réaction en chaîne suite à un choc localisé, sans prêteur en dernier ressort. Ensuite, les
autorités publiques autorisent les trusts à concurrencer les banques pures tout en ayant des
contraintes réglementaires beaucoup plus faibles. Alors que les banques devaient par exemple
disposer d'environ 25 % de réserves, les trusts décident en 1903 de quitter la chambre de
compensation de New York, qui leur assurait une sécurité de base en cas de panique bancaire,
au motif que celle-ci leur demande d'augmenter leur taux de réserves obligatoires à seulement
10 %. Cette faible régulation a évidemment participé à l'aggravation de la crise. Lorsque la
Knickerbocker Trust Company, troisième trust le plus important de New York, chute dans le
sillage de la faillite des frères Heinze, la panique bancaire s'étend tandis que les trusts refusent
de s'aider entre eux, dans une course à la vente d'actifs. Ces acteurs seront sauvés par les
banques plus régulées et la chambre de compensation de New York qui leur apportent toute la
liquidité nécessaire. Cet épisode aboutira tout de même à l'institution d'une Banque Centrale
en décembre 1913 suite aux réflexions menées par le démocrate Carter Glass. Toutefois,
aucun contrôle des pratiques financières risquées n'est adopté.

Ce n'est qu'à la suite de la crise de 1929 qu'une régulation financière conséquente est décidée,
après que la commission d'enquête sur la crise financière dirigée par le juriste proche du parti
démocrate Ferdinand Picora met en lumière les conflits d’intérêt. En réponse à ces
dysfonctionnements multiples, la régulation mise en place sous le mandat de Roosevelt à
partir de mars 1933 a permis de poser les fondements de la stabilité financière. En juin 1933,

24
Roosevelt avalise à travers le Banking Act les principales propositions émises par les
démocrates Carter Glass et Henry Steagall dès 1932 mais sans succès sous la présidence
Hoover : séparation des banques commerciales et des banques d'affaires, création d'une
assurance des dépôts dégressive, renforcement du pouvoir central de la Fed par rapport à ses
antennes régionales dans la distribution des liquidités. Le Securities Exchange Act de 1934
conduit également à la création de la SEC (Securities and Exchange Commission), chargée de
surveiller les activités boursières et informer les investisseurs sur la nature des titres échangés.

La route vers les subprimes commence par la fragilisation de fait du Glass-Steagall Act aux
États-Unis dès la fin des années 1970 et la suppression par Reagan en 1982 du plafond des
taux d'intérêts voté par Roosevelt pour garantir une rentabilité minimale aux banques. Elle se
poursuit au milieu des années 1990 avec le développement de la titrisation au même moment
où les autorités publiques (et particulièrement les secrétaires au Trésor Robert Rubin et Larry
Summers ou encore le président de la Fed Alan Greenspan) refusent fermement toute
régulation contraignante sur les marchés des produits dérivés de gré à gré 8afin que les États-
Unis conservent leur attractivité pour ces marchés en plein essor. Sur la période 1999-2006,
les économistes Igan, Mishra et Tressel (2009) ont étudié l'impact du lobbying financier sur
l'instabilité financière. L'industrie financière américaine représente 15 % des dépenses en
lobbying et, avec une dépense moyenne de 479 500 USD par firme en 2006, était plus intense
en lobbying que le secteur de la défense (300 273 USD par firme) et de la construction (200
187 USD par firme). Entre 1999 et 2006, les dépenses par firme ont augmenté davantage dans
l'industrie financière que dans le reste de l'économie américaine. Les auteurs identifient les
dépenses en lobbying visant à influencer les règles de protection des consommateurs de prêts
hypothécaires et les règles de la titrisation (pour un montant cumulé de 475 millions USD
entre 1999 et 2006) et recoupent celles-ci avec les caractéristiques ex-ante et les performances
ex-post des prêts hypothécaires accordés. Deux conclusions émergent. D'une part, les
institutions financières qui ont le plus dépensé en activités de lobbying sont aussi celles qui
ont émis les prêts les plus risqués, ont titrisé la plus grande part de leurs portefeuilles et
accordé le volume de prêts hypothécaires le plus important. D'autre part, ce sont dans les aires
métropolitaines où les banques lobbyistes ont le plus accru leurs prêts hypothécaires

8
Les produits gré à gré : (aussi appelé Over The Counter) sont des marchés où se vendent et s'achètent des titres
de petites sociétés qui sont généralement peu négociés (peu liquides). Les transactions se font directement entre
le vendeur et l'acheteur, il est souple et réduits les coûts de transaction.
25
relativement à l'ensemble des banques que les taux de non recouvrement ont été les plus
importants.

Ces exemples historiques révèlent aujourd'hui a posteriori un manque de recul de certaines


autorités contemporaines de ces crises dans l'analyse des données et des enseignements
empiriques et théoriques accumulés. Ces erreurs d'appréciation s'éclairent à travers le concept
de « paradoxe de la tranquillité » de Minsky (1977) : les crises naissent pendant des périodes
favorables de façon endogène car celles-ci donnent de mauvaises incitations aux agents
économiques. Ils se montrent optimistes, baissent la garde, créent des structures financières
moins prudentes. La moindre importance accordée lors de la phase d'euphorie du cycle
financier aux problématiques de régulation, de liquidité, d'évaluation des risques peut alors
engendrer des politiques économiques peu judicieuses, négligentes face aux risques.

Plus largement, des consensus autour de concepts ou de modèles parfois inappropriés se


forgent à certaines périodes. Les changements de paradigme rencontrent des résistances
intellectuelles et interviennent malheureusement trop tard, une fois que les crises éclatent.
Larry Summers, déjà mentionné, avait par exemple contesté en 2005, l'économiste indien
Raghuram Rajan lors de la conférence de Jackson Hole alors que Rajan (2005) démontrait
dans son intervention comment l'innovation financière (titrisation, CDS, rémunérations
convexes etc.), loin de mieux répartir le risque, donnait les mauvaises incitations aux acteurs
de marché et nourrissait l'instabilité financière. À cet égard, l'influence de la théorie de
l'efficience des marchés financiers aussi bien dans les cénacles académiques que chez les
régulateurs, pourtant invalidée théoriquement et empiriquement depuis la fin des années 1970,
demeurera certainement encore longtemps l'illustration la plus marquante de ce phénomène.

2/ Les mécanismes des crises financières :


La finance, souligne Christian Chavagneux, est considérée souvent comme un domaine sur
lequel il est aussi difficile de comprendre ce qui se passe que de porter un jugement sur les
efforts des dirigeants politiques pour le réguler. Son livre, d’Une brève Histoire des crises
financières. Des tulipes aux subprimes, écrit de manière la plus pédagogique possible, a pour
ambition de ne pas laisser la finance dans les mains des seuls experts et de permettre aux

26
citoyens de comprendre ce qui se passe et d’apprécier la pertinence des politiques qui
prétendent la combattre.

La mécanique commune des crises :

En premier, une innovation financière : des petits génies de la finance inventent de nouveaux
produits qui attirent la clientèle du fait des potentiels de gain qu’ils permettent de générer.
En second lieu une bulle de crédit qui permet de multiplier les gains.
Troisièmement, des politiques de déréglementation. Les financiers doivent avoir la main pour
développer les innovations et le crédit.
Quatrièmement, la marginalisation de ceux qui à l’intérieur du système s’inquiètent des
risques d’une perte de maitrise. Comme l’a dit un grand banquier américain, « tant que la
musique joue, je me lève et je danse ».
En cinquième lieu, les bulles ont une dimension frauduleuse. Dans le cadre de la crise
actuelle, le régulateur américain a porté plainte contre une quinzaine de grandes banques
mondiales sur la façon dont elles ont vendu les produits financiers complexes liés aux
subprimes.
Lorsque tout cela est en marche, les rémunérations dans le système financier prennent
beaucoup d’ampleur, Les très hauts revenus distribués dans la finance a des conséquences en
termes d’inégalités sociales mais aussi de pouvoir et d’idéologie. Dans toutes la mécanique
des crises souligne Christian Chavagneux, « des économistes répandent la bonne parole selon
laquelle plus on laisse faire les financiers, les banquiers et le marché et mieux les choses iront
».
En sixième lieu, il existe toujours un aveuglement au désastre. Ceux qui alertent ne sont pas
écoutés. La bulle gonfle jusqu’au moment où intervient une perte de confiance. Vient alors
le krach, puis un sauvetage de court terme. Mais l’étape suivante concerne la capacité
qu’auront ou non les dirigeants de créer de nouvelles règles et d’inventer un nouveau système
financier.

A. Les régulations :
La vraie réussite de Franklin Roosevelt, durant les années 1930 a été de reprendre la main sur
la finance et de modifier l’ambiance idéologique. Avant lui, les économistes reconnus

27
recommandaient le laisser faire en matière de finance. Après lui, pour être un économiste
reconnu, il fallait recommander le contrôle et l’encadrement des marchés financiers.
Le G 20 9:
Selon Christian Chavagneux, le G 20 n’est pas un G vain. D’incontestables avancées doivent
être notées :
a) Par exemple, la stabilité financière n’est plus laissée au libre jeu des marchés. En
Europe, aux États-Unis ou au Royaume Uni, qui constituent les trois plus grands
marchés de la planète, des institutions politiques ont été créées dont le rôle est de
traquer les dysfonctionnements de la finance. En Europe il s’agit du Conseil
européen du risque systémique. Certes il est trop tôt pour savoir si ces institutions
vont être efficaces pour détecter les dysfonctionnements et pour les arrêter, mais leur
création est importante.
b) Autre exemple, les régulateurs réclament davantage de transparence pour pouvoir
contrôler les innovations financières qui se produisent généralement sur des marchés
très ambigu. Mais il reste des lacunes importantes.
c) Par exemple, en matière de réforme de la gouvernance privée des établissements
bancaires, rien de significatif n’a été réalisé notamment en Europe où il s’agit
seulement de mettre plus de diversité dans les conseils d’administration. Mais les
contrôleurs financiers internes sont loin d’avoir obtenu des pouvoirs suffisants pour
combattre l’existence de risques inappropriés dans les établissements.
La maitrise des rémunérations est, selon Christian Chavagneux, un autre sujet qui n’est pas
traité correctement.
Il en va de même en ce qui concerne la façon dont les investisseurs gèrent leur participation à
la gouvernance des entreprises. La recherche de rendements rapide reste le paradigme en la
matière. Cependant, note-t-il, les évolutions réglementaires amènent les investisseurs à
comprendre qu’ils vont devoir s’habituer notamment dans les banques, à des taux de
rendement plus normaux et plus en ligne avec les rendements économiques réalisables dans
l’économie réelle.
9
Le G20 : Le groupe des vingt (G20) créé en 1999 est un groupe de rencontres et de décisions informelles mis
en place pour faire face à la succession de crises financières dans les années 1990. Il est composé de dix-neuf
pays et de l'Union européenne. Le G20 réunit une fois par an les chefs d'État, les ministres des Finances, ainsi
que les gouverneurs des banques centrales des pays industrialisés et des pays émergents, dans le but de
faciliter la concertation économique internationale et de proposer des solutions aux différentes crises
économiques. Il représente 85 % du commerce mondial, les deux tiers de la population mondiale et plus de 90
% du produit mondial brut (somme des PIB de tous les pays du monde).
28
B. Régulations mondiales ou nationales :

Selon Christian Chavagneux, dans le contexte de mondialisation financière, il serait


évidemment souhaitable que les politiques de contrôle et de retour à la stabilité
financière soient harmonisées au niveau mondial. Mais cela n’empêche pas ceux qui
souhaitent agir au niveau national ou européen de pouvoir le faire avec une certaine efficacité.
Par exemple dans le domaine des rémunérations ou dans celui des bulles de crédit.
L’argument qui est opposé à une action à ces niveaux est celui d’une éventuelle perte de
compétitivité. Au contraire avoir des meilleures protections contre les risques d’instabilité
financière constituerait sans doute un avantage susceptible d’attirer des investisseurs en quête
d’une plus grande sécurité.

C. La taxation des opérations financières :

La taxation des opérations financières, par exemple, peut très bien être mise en œuvre au
niveau de l’Europe. Si le Royaume Uni le refuse, il faudra prendre la voie de la coopération
renforcée qui suppose l’accord d’au moins neufs pays de L’Union. Celui existe pour une mise
en place d’ici 2013. Dans le cadre d’un accord des pays membres de la zone Euro, il serait
possible de décider que la taxation concernerait toutes les opérations en euros quel que soit le
lieu où elles seraient effectuées. Cela réduirait la perte d’efficacité d’une taxation qui ne
concernerait pas Londres, c’est à dire la première place financière européenne. Une partie des
opérations réalisées à partir de cette place sont effectuées en euros par des banques et des
institutions du continent.
Au total, conclut Christian Chavagneux, face à une crise financière historique, les dirigeants
du monde ont entrepris dans certains domaines des réformes significatives, sans que l’on
puisse savoir à ce stade si elles seront efficaces. Mais des trous importants subsistent. Le
combat pour la régulation financière ne fait que commencer.

29
Section 3 : Les solutions suggérées par le FMI :

Le premier point à considérer est le niveau d’endettement de l’État débiteur. Si ce niveau est
insoutenable, l’octroi de crédits officiels risque alors d’aggraver la situation financière de cet
État (ce dernier a intérêt à alléger sa dette, non à l’alourdir). En outre, comme les bailleurs de
fonds officiels ont normalement préséance, l’aide additionnelle qu’ils consentent réduit la
valeur des créances privées existantes. Dans l’évaluation de la dette qu’un pays peut soutenir
à moyen terme, une trop grande importance a été accordée, par le passé, au ratio de la dette au
PIB ou au ratio du service de la dette aux exportations. L’endettement était soutenable,
jugeait-on, si ces ratios diminuaient au fil du temps. Les analyses de ce genre ne disent rien du
niveau soutenable de ces ratios (Cohen, 2000). Les analyses du caractère soutenable d’une
dette doivent s’attacher aussi à l’évaluation des seuils pertinents. Si le fardeau de la dette est
insoutenable, les créanciers devront réduire la valeur actuelle nette de leurs engagements. Le
cas échéant, il est important de pouvoir recourir à un moyen efficace d’organisation des
négociations entre les créanciers et le débiteur durant le processus de règlement. Il convient,
également, que les pertes soient réparties équitablement entre les créanciers. Des directives en
matière de moratoires constituent un moyen de faire en sorte que le processus de règlement
soit efficace, équitable et rapide. Si le niveau d’endettement est soutenable, on présumerait
que les limites de crédit normales du FMI s’appliquent. Certains pays peuvent être
admissibles à la ligne de crédit préventive (LCP) du FMI, s’ils ont satisfait aux conditions
requises ex ante. D’autres pourraient se prévaloir d’un accord de confirmation, auquel ils
devraient se conformer aux conditions requises ex post. Dans la plupart des cas, une aide
officielle de ce type accorderait au pays visé un délai suffisant pour surmonter la crise. Dans
les situations plus graves, toutefois, l’octroi de crédits officiels pourrait, à lui seul, s’avérer
insuffisant. L’État débiteur pourrait devoir solliciter de nouveaux capitaux auprès des
créanciers, ou encore négocier un rééchelonnement de sa dette. Dans ce dernier cas, les
créanciers ne subiraient pas de pertes au titre de la valeur actuelle nette de leurs actifs, vu le
niveau soutenable de l’endettement du pays débiteur. Ces conditions rendraient possible
l’injection de fonds additionnels nets par le biais de mécanismes volontaires fondés sur le
marché, tels que les reconductions d’emprunts, les swaps et les échanges. Toutefois, si un
accord volontaire ne peut être conclu, ou si l’exode de capitaux est persistant, le pays peut
recourir à un moratoire afin de freiner l’épuisement des réserves de liquidités. Le FMI peut
soutenir cette mesure en octroyant des crédits au pays en situation d’arriérés, si ce dernier se
30
conforme aux directives de l’institution en matière de moratoires. Le financement officiel
disponible par l’entremise de ce mécanisme ne pourrait dépasser le montant n’ayant pas
encore été utilisé dans le cadre de l’accord de confirmation, ce qui fixe une limite globale à
l’égard des ressources accessibles auprès du FMI. La présomption liée au respect des limites
normales de crédit s’applique aussi bien à l’accord de confirmation qu’à la ligne de crédit
préventive. Des crédits additionnels seraient disponibles, mais seulement dans des
circonstances exceptionnelles devant être justifiées. Les fonds additionnels consentis en vertu
de la facilité de réserve supplémentaire seraient assortis d’une échéance plus courte et d’un
coût plus élevé que les crédits obtenus par un accord de confirmation.

Il existe à la fois un désir et un besoin de clarifier le cadre de résolution des crises. Aussi est-il
essentiel d’avoir une idée juste des responsabilités respectives des secteurs privé et officiel.
La prévisibilité des actions des instances officielles exercera une influence déterminante sur
les anticipations du secteur privé. À cet égard, la limitation des crédits octroyés par le FMI
constitue un pas dans la bonne direction. Non seulement fit-elle de la participation du secteur
privé une composante fondamentale de la résolution des crises, mais elle encourage débiteurs
et créanciers à collaborer à la recherche de solutions.

31
CHAPITRE 2 : Exemples des crises financières internationales récentes :

SECTION 1 : La crise énergétique mondiale :

La crise énergétique mondiale de 2021-2023 est une pénurie d'énergie dans le monde, causée
en 2021 par la forte reprise économique mondiale après la récession liée à la pandémie de
Covid-19 à partir de 2020, puis amplifiée, à partir de mars 2022 par l'invasion de l'Ukraine par
la Russie.

L'Agence internationale de l'énergie a déclaré que : « Nous traversons actuellement la


première crise énergétique mondiale. Des pressions sur les marchés s’étaient déjà manifestées
avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, mais les actions de cette dernière ont transformé
la reprise économique rapide qui a suivi la pandémie – et entraîné des tensions sur toutes les
chaînes d’approvisionnement mondiales dont celles de l’énergie – en une véritable tourmente
énergétique ».

Graphique 6 : Les prix du gaz naturel

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_%C3%A9nerg
%C3%A9tique_mondiale_de_2021-2023

32
Parmi les causes de cette crise on peut citer :

 Hausse de la demande d’énergie à la suite de la reprise économique post-


COVID :

Selon Nicolas Goldberg, expert énergie chez Colombus Consulting, les prix du gaz avaient
augmenté dès 2021 en raison de la hausse des prix du CO 2, puis à partir de juillet 2021 avec la
reprise de l'économie mondiale.

Depuis l’automne 2021, la reprise économique mondiale a fait grimper le prix des matières
premières (gaz, charbon et pétrole). Le gaz fossile est devenu un enjeu géopolitique entre
l’Union européenne, la Russie et les États-Unis. La tension sur le gaz fossile au niveau
mondial est aussi liée à l’augmentation du prix des quotas d’émission européens de dioxyde
de carbone.

En 2021, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a constaté la plus forte augmentation


jamais enregistrée de la demande mondiale d'électricité : +1 500 TWh, soit +6 %, à la suite du
rebond économique mondial après la récession liée à la pandémie de Covid-19 en 2020. En
pourcentage, c'est la plus forte augmentation depuis 2010. Elle a déclenché des pannes dans
certains pays et conduit à une hausse historique des prix ainsi que des émissions de CO 2.
Selon l'AIE (janvier 2022), la volatilité du marché pourrait entraîner encore trois années de
hausse des prix, ainsi que des émissions record de gaz à effet de serre.

 Guerre en Ukraine :

Le 27 avril 2022, la Russie coupe l'approvisionnement en gaz à la Pologne et à la Bulgarie


pour sanctionner leur soutien à l'Ukraine et le refus de payer le gaz en rouble, puis à la
Finlande. Gazprom annonce le 30 mai 2022 la suspension de ses livraisons de gaz aux Pays-
Bas, et le 31 mai au Danemark. Dans les deux cas, il s'agit de volumes relativement faibles à
l'échelle de l'Europe, et l'importateur néerlandais Gas Terra avait déjà pris ses dispositions
pour acheter son gaz ailleurs. Le ministre néerlandais de l'Environnement déclare qu'en cas
d'urgence, la production pourrait être augmentée dans le champ gazier de Groningue.

La Russie coupe ses exportations d'électricité vers la Finlande à la suite de l'annonce de sa


volonté de rentrer dans l'OTAN. L'électricité russe représentait 10 % de la consommation
mais la fin de ces importations ne devrait pas faire courir de risque sur la sécurité du réseau
électrique finlandais.
33
 Causes secondaires :

D'autres causes existent pour expliquer les tensions sur l'énergie.

En décembre 2020, après des mois de restrictions, la Chine bloque totalement les importations
de charbon d'Australie, qui était la plus grande source de charbon importé par ce pays.

Les exportations américaines de gaz naturel liquéfié (GNL) vers la Chine et d'autres pays
asiatiques bondissent en 2021, les acheteurs asiatiques étant prêts à payer des prix plus élevés
que les importateurs européens.

Comment lutter contre cette crise :

 Fournir des analyses faisant autorité sur la demande et l’offre mondiales d’énergie et
regrouper sous un même toit les principales données énergétiques qui sont actuellement
dispersées et incomplètes.
 Accélérer le transfert de technologies énergétiques appropriées aux pays pauvres en leur
donnant des conseils objectifs sur une composition optimale de l’approvisionnement
énergétique, qui soit sûre, assurée et écologiquement rationnelle.
 Mettre en place un mécanisme mondial pour garantir les approvisionnements énergétiques
en cas de crise ou d’urgence. (L’AIE le fait déjà pour ses membres dans le cas du pétrole.
L’Agence internationale de l’énergie atomique envisage d’instituer une garantie
d’approvisionnement des réacteurs en combustible nucléaire).
 Aider les pays à gérer leurs services énergétiques et même le faire temporairement pour
eux après une guerre ou une catastrophe naturelle.
 Coordonner et financer la R-D, tant en amont qu’en aval, en particulier pour les pays
pauvres en énergie, dont les besoins sont trop souvent ignorés par la R-D commerciale
orientée vers les pays riches.

SECTION 2 : La crise du COVID-19 menace la stabilité financière :

La pandémie de COVID-19 a provoqué une crise humaine et sanitaire sans précédent. Les
mesures qui s’imposent pour endiguer le virus ont entraîné un ralentissement économique. À
ce stade, de grandes incertitudes entourent la gravité et la durée de ce dernier. D’après le
dernier Rapport sur la stabilité financière dans le monde, le système financier a déjà subi un

34
impact considérable et une intensification de la crise pourrait porter atteinte à la stabilité
financière à l’échelle mondiale.

Depuis le début de la pandémie, les prix des actifs à risque ont brutalement chuté : Au
paroxysme du récent désengagement, les actifs à risque ont subi des pertes au moins
équivalentes à la moitié des pertes essuyées en 2008 et 2009. Par exemple, dans le creux de
cette chute, un grand nombre de marchés boursiers (tant dans les grands que les petits pays)
ont enregistré des baisses de 30 % ou plus. Les écarts de taux se sont envolés, en particulier
pour les sociétés moins bien notées. Des tensions sont également apparues sur les principaux
marchés de financement à court terme, y compris sur le marché mondial du dollar.

La volatilité est montée en flèche, atteignant parfois des niveaux enregistrés pour la dernière
fois durant la crise financière mondiale, en raison de l’incertitude qui règne autour de l’impact
économique de cette pandémie. Du fait de cette volatilité accrue, la liquidité du marché s’est
fortement détériorée, y compris sur des marchés généralement perçus comme étant très actifs,
comme le marché du Trésor américain, ce qui a fait varier brutalement les prix des actifs.

À l’échelle mondiale, afin de préserver la stabilité du système financier et de soutenir


l’économie, les banques centrales ont été la première ligne de défense. Tout d’abord, elles ont
sensiblement assoupli leur politique monétaire en abaissant leurs taux directeurs (dans le cas
des pays avancés, à un niveau historiquement bas). Dans la moitié des pays émergents et des
pays à faible revenu, les banques centrales ont fait de même. L'impact de ces baisses de taux
est exacerbé par le cadre prospectif sur l'orientation probable de la politique monétaire et
l'élargissement des programmes d'achat d'actifs de la banque centrale.

Deuxièmement, les banques centrales ont apporté des liquidités supplémentaires au système
financier, y compris au moyen d’opérations d'open market10.

Troisièmement, plusieurs banques centrales ont accepté d’accroître l'apport de liquidités en


dollars au moyen d'accords de swap.11
10
Les opérations d’open market : Interventions de la banque centrale sur le marché monétaire consistant à
fournir ou retirer des liquidités aux établissements financiers via des achats ou des ventes de titres et ainsi
influencer à la baisse ou à la hausse le taux du marché monétaire.

11
Accord de swap : Il s’agit d’un accord conclu entre deux banques centrales en vue de procéder à un échange
de devises. Ce dispositif permet à une banque centrale d’obtenir des liquidités dans différentes devises auprès
de leurs instituts d’émission respectifs. Ces liquidités sont habituellement mises à la disposition des banques
commerciales opérant sur le marché domestique. Il sert à financer certaines interventions sur le marché, ils
sont devenus, ces dernières années, un instrument important dans la préservation de la stabilité financière et
35
Enfin, elles ont rétabli des dispositifs qui ont servi pendant la crise financière mondiale et ont
lancé une série de nouveaux programmes globaux, dont l’achat d’actifs plus risqués tels que
des obligations d’entreprises. En assumant de fait le rôle d’acheteur en dernier ressort sur ces
marchés et en contribuant à maîtriser les pressions à la hausse du coût du crédit, les banques
centrales veillent à ce que les ménages et les entreprises continuent d’avoir accès au crédit à
un prix abordable.

À ce jour, les banques centrales ont annoncé leur intention d’accroître leur apport de
liquidités, y compris sous forme de crédits et d’achat d’actifs, d’au moins 6 000 milliards de
dollars et se disent prêtes à en faire davantage si les conditions l'exigent.

Ces mesures visant à maîtriser les retombées de la pandémie ont rassuré les investisseurs ces
dernières semaines. Les tensions sur certains marchés se sont quelque peu relâchées et les prix
des actifs risqués sont partiellement remontés. Ce regain de confiance est toutefois précaire et
les conditions financières mondiales continuent d’être beaucoup plus restrictives qu’elles ne
l’étaient en début d’année.

Dans l’ensemble, le net durcissement des conditions financières mondiales depuis le début de
l’épidémie de COVID-19, conjugué à la forte dégradation des perspectives économiques, a
déplacé la distribution à un an de la croissance mondiale vers la gauche. Cela signifie que les
risques pesant sur la croissance et la stabilité financière ont considérablement augmenté. La
probabilité que l'économie mondiale se contracte de 7,4 % est maintenant de 5 % (ce qui
arrive une fois tous les vingt ans). À des fins de comparaison, ce seuil était supérieur à 2,6 %
en octobre 2019.

Comme c’est souvent le cas en temps de difficultés financières, les pays émergents risquent
de payer le plus lourd tribut. En effet, ils ont connu la plus forte inversion de flux
d'investissements de portefeuille jamais enregistrée (environ 100 milliards de dollars, soit 0,4
% de leur PIB), ce qui cause de grandes difficultés aux pays les plus vulnérables.

Face à la propagation mondiale de la COVID-19, l’application de mesures d’endiguement


plus strictes et de plus longue durée pourrait s’avérer nécessaire, ce qui pourrait entraîner un
nouveau durcissement des conditions financières mondiales s'il en résultait un ralentissement
plus sérieux et prolongé. Ce durcissement pourrait à son tour mettre au jour les vulnérabilités

l’atténuation des effets sur l’économie réelle des tensions apparaissant sur les marchés.
36
financières qui se sont accumulées ces dernières années sur fond de taux d’intérêt
extrêmement bas. Cela amplifierait le choc causé par la COVID-19.

À mesures que les entreprises connaissent des difficultés et que les taux de défaillance
augmentent, les marchés du crédit pourraient se bloquer soudainement, surtout dans les
segments risqués comme les obligations à haut rendement, les prêts à effet de levier et la dette
privée. Ces marchés se sont développés rapidement depuis la crise financière mondiale, pour
atteindre 9 000 milliards à l'échelle mondiale, tandis que la qualité de crédit des emprunteurs,
les normes de souscription et les protections des investisseurs se sont affaiblies. Depuis début
mars, les écarts de taux sur les obligations à haut rendement sont montés en flèche en dépit de
leurs baisses récentes, surtout dans les secteurs les plus touchés par la pandémie, comme le
voyage aérien et l'énergie. De la même manière, les prix des prêts à effet de levier ont
diminué brutalement (environ la moitié de la baisse observée à un moment donné pendant la
crise financière mondiale). En conséquence, les agences de notation ont révisé à la hausse
leurs prévisions de défaillance pour les obligations à risque en les portant à des niveaux
correspondant à une récession, et les défaillances dérivées des informations des marchés ont
augmenté nettement aussi.

Graphique 6 : Les secteurs les plus impactés en période de COVID-19

37
Cependant, les banques ont plus de fonds propres et de liquidités que par le passé, et elles ont
été soumises à des tests de résistance et à un contrôle plus strict ces dernières années : elles
sont donc mieux armées qu’au début de la crise financière mondiale. En outre, dans de
nombreux pays, les apports de liquidités par les banques centrales aux banques, à grande
échelle et coordonnés, devraient aussi atténuer les tensions éventuelles sur les liquidités.

SECTION 3 : CRÉDIT SUISSE, LA BANQUE EMBLÉMATIQUE DES


SCANDALES FINANCIERS :

Il s’agit d’une banque systémique, dont la faillite pourrait entraîner une grande partie de
l’économie. Quand le Crédit Suisse a commencé à vaciller, les autorités publiques se sont
aussitôt penchées à son chevet pour imaginer un rachat express par UBS. Mais les difficultés
de la banque de Zurich remontent à plusieurs années et sont liées à des pratiques douteuses.
Des Suisse Secrets en passant par des amendes liées à l’évasion fiscale de ses clients, le Crédit
Suisse a multiplié les scandales.

En octobre dernier, le Crédit Suisse a annoncé un plan de restructuration et une augmentation


de capital de 4 milliards de francs pour tenter de reprendre le contrôle de ses activités en
difficulté. Mais une chaîne de faillites bancaires aux États-Unis et la perte de confiance envers
son principal actionnaire, la Banque nationale saoudienne, ont provoqué l'effondrement du bel
immeuble. Les clients de la deuxième banque du pays ont perdu confiance et ont commencé à
retirer leurs dépôts, incitant le gouvernement à prendre des mesures d'urgence. L'acquisition
de Crédit Suisse par son principal rival UBS nous a montré les faiblesses de ce qui est
considéré comme le fleuron du système bancaire suisse, qui a connu scandale sur scandale ces
dernières années. Si la crise bancaire semble en suspens, revenons sur les controverses qui ont
façonné l'histoire du Crédit Suisse.

Blanchiment d’argent, clientèle sulfureuse, mauvaises pratiques de gouvernance… le Crédit


Suisse semble accumuler les controverses. La fin de la loi sur le secret bancaire à partir de
2009, l’expose à une transparence inconfortable, d’autant que, au sortir de la crise financière,
de nombreux pays se sont lancés dans la chasse à l’évasion fiscale de leurs ressortissants. En
2014, la banque se fait ainsi rattraper par les autorités américaines qui l’accusent d’inciter ses

38
riches clients à ouvrir un compte pour échapper à l’IRS, le fisc américain. Le Crédit Suisse
doit plaider coupable et accepter de payer une amende de 2,6 milliards de dollars.

Mais c’est l’enquête sur les "Suisse Secrets", menées par un consortium international de
journalistes, qui révèle en février 2022 l’ampleur de ses pratiques. Une fuite de données
concernant près de 30 000 clients du Crédit Suisse, pour des opérations datant des années
1940 jusqu’aux années 2010, montre que la banque aurait abrité de l’argent issu de la
corruption ou d’organisations criminelles. Selon Le Monde, membre du consortium, sur les
près de 100 milliards de dollars analysés, près de 8 milliards ont une origine pouvant être
considérée comme problématique.

La banque s’est défendue en expliquant que les cas soulevés par les journalistes relevaient du
passé. Sauf que, en parallèle des "Suisse Secrets", le Crédit Suisse était attaqué sur le front
judiciaire pour des pratiques similaires. En juin 2022, elle a été condamnée par le Tribunal
pénal fédéral pour "défaut d’organisation", parce qu’elle n’a pas fait en sorte d’empêcher le
blanchiment d’argent issu du trafic de drogue d’un réseau criminel bulgare. La sanction est
symbolique, avec une amende de 2 millions de francs suisses, mais révélatrice. Le tribunal
relève les défaillances de la banque "dans le suivi des relations bancaires liées à
l’organisation criminelle", mais aussi dans "la surveillance du respect des règles anti-
blanchiment par la hiérarchie, le service juridique et le service compliance".

Avec l’accumulation des scandales, la santé financière de la banque commence à lâcher. Elle,
qui valait encore 30 milliards de francs suisses en 2019, a vu sa valorisation boursière chuter à
7 milliards au moment du rachat par UBS12. La valse des dirigeants n’a pas aidé. Surtout
lorsque le franco-ivoirien Tidjane Thiam a dû quitter ses fonctions de PDG sur fond de
scandale d’espionnage de certains collaborateurs de la banque et de Greenpeace Suisse.

La gestion des risques de la banque laisse également à désirer. Le Crédit Suisse s’est retrouvé
pris coup sur coup dans deux scandales financiers. D’abord la faillite de Greensill en mars
2021, une société spécialisée dans la technique de l’affacturage pour laquelle Crédit Suisse
gérait un fonds de 10 milliards de dollars. Puis à quelques semaines d’écart, la faillite du

12
UBS : (dérivé de l’Union de Banques Suisses) est une société multinationale de services financiers diversifiés
dont les sièges sont à Zurich et à Bâle. UBS est impliquée dans pratiquement toutes les grandes activités
financières, y compris la banque de détail et commerciale, la banque d’investissement, la gestion des
investissements et la gestion de patrimoine. L’UBS est très présente aux États-Unis et son siège américain se
trouve à New York. Elle dispose de plus de 2 800 milliards de francs suisses d’actifs investis et est la plus grande
banque de Suisse. Elle est présente dans plus de 50 pays dans le monde et emploie près de 60 000 personnes.
39
fonds Archegos, auquel elle avait prêté plus de 5 milliards de dollars. Entre appât du gain,
risques inconsidérés et affaires sulfureuses, la chute du Crédit Suisse semble illustrer le risque
pris par les entreprises qui ne respectent pas les fondamentaux de la RSE13.

CHAPITRE 3 : ETUDE DE CAS « LE MAROC » :

13
RSE : La RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises, ou Responsabilité Sociétale des Entreprises) regroupe
l’ensemble des pratiques mises en place par les entreprises dans le but de respecter les principes du
développement durable, c’est-à-dire être économiquement viable, avoir un impact positif sur la société mais
aussi mieux respecter l’environnement.
40
Section 1 : L’étude de la crise en Afrique :
Pour comprendre l’impact de la crise mondiale sur l’Afrique, il faut prendre en compte les
facteurs structurels et les interdépendances asymétriques dans un système à la fois global et
différencié, et distinguer les effets de court, de moyen et de long terme.
Dans un contexte de mondialisation, toutes les économies sont touchées par le canal financier
(chute des Bourses) et par l’instabilité des places financières. La récession des économies
d’Afrique, elle limite les investissements directs et accroît les risques. Mais les formes de
résilience diffèrent selon les dynamiques endogènes et les modes d’intégration à l’économie
mondiale.
A. Les canaux de transmission de la crise :
La crise mondiale infléchit les trajectoires de l’Afrique par le biais de trois principaux
canaux :
1) Le canal commercial et productif :
La chute de la demande des pays industriels et émergents et la montée du protectionnisme
ont réduit les exportations africaines en volume (Il est prévu que les exportations chutent
de 634 milliards de dollars à 383 milliards en 2009. Les excédents des comptes courants
estimés à 2.7% du PIB en 2008 « 40 milliards de dollars » devraient se situer à - 4.3% du
PIB « - 65 milliards de dollars » selon la BAD 2009). Ainsi en 6 mois, les importations
européennes de produits venant d’Afrique ont baissé de 5%. La récession des pays
industriels a conduit à une baisse en valeur des exportations qui s’est accompagnée d’une
baisse des prix des matières premières. Les termes de l’échange de (+12.2% en 2008) ont
baissé de 15.3% au début de l’année 2009. Ce choc a été particulièrement important pour
les pays pétroliers : de +29% en 2008 ils ont chuté de 44.9% au début de l’année 2009.
Certains produits, comme l’or ou le cacao, ont connu une évolution à la hausse. Le prix du
cacao a ainsi augmenté malgré la chute de la demande de chocolat car la filière ivoirienne,
dans un contexte de crise politique, pressurisée par la fiscalité et marquée par l’insécurité
des fronts pionniers, a chuté. Par conséquent, le Ghana et le Nigeria ont été bénéficiaires.
Bien entendu, l’effet de volatilité des prix est plus important que celui du trend et l’on a
observé, au milieu de l’année 2009, une certaine reprise des cours des matières premières
(Selon l’indice Scotia des prix des produits de base, après une plongée de 45% entre juillet
2008 et avril 2009, on observe une remontée selon un trend mensuel de 2.2%).

41
La baisse en valeur des exportations s’est répercutée en termes de devises et de recettes
budgétaires. La chute de la demande de produits primaires et de leurs prix ralentit les
projets d’investissements mis en place en période de flambée des prix que ce soit dans le
domaine pétrolier, minier ou agricole. On a ainsi observé une chute des prix des
hydrocarbures, des produits miniers (sauf l’or) et des produits agricoles (sauf le sucre, le
maïs et le cacao). Les effets des baisses de prix des produits primaires sont positifs pour
les importateurs nets d’hydrocarbures et de produits alimentaires, même s’ils rendent
moins rentables certains projets agricoles. Ils sont, en revanche, très négatifs pour les Etats
producteurs d’hydrocarbures (Angola, Nigeria, Soudan) et de produits miniers et agricoles
(Cameroun, Côte d’Ivoire, Ethiopie, Kenya, pays du Sahel exportateurs de coton).
2) Le canal financier :
A court terme, les économies africaines ont été relativement déconnectées de la crise
financière, exception faite des pays les plus intégrés au système financier mondial et
connaissant une libéralisation financière. C’est le cas du Botswana, de la Côte d’Ivoire, de
l’île Maurice, du Nigeria, de l’Egypte, de l’Afrique de Sud et du Kenya où les places
financières ont chuté. Celles d’Accra, de Douala, de Tunis, du Malawi ou de la Tanzanie
ont connu une hausse. Il y a plusieurs raisons à ce constat : les produits financiers sont peu
sophistiqués, les marchés financiers sont embryonnaires, les marchés monétaires sont
limités. Les banques, globalement « sur liquides », ont peu de produits toxiques, les
capitaux extérieurs à court terme sont limités et le poids de l’endettement extérieur est
devenu limité compte tenu des mesures d’allégement.
Plusieurs effets financiers apparaissent néanmoins. La chute des transferts des migrants
est estimée à un milliard de dollars alors qu’elle représente vingt milliards de dollars en
Afrique. Les emplois et les revenus des immigrés sont les premiers touchés dans les pays
industriels et émergents (emplois précaires, secteur immobilier). Les investissements
directs étrangers chutent, notamment dans le secteur minier et forestier. Les filiales des
banques multinationales voient leurs crédits se réduire, conduisant à la suspension de
plusieurs projets d’investissement et à la réduction des lignes de crédits commerciaux
pour les importations ou les investissements. D’autre part, la montée des déficits publics
risque de créer des effets d’éviction vis-à-vis des projets privés. On note une chute de la
part don de l’aide publique au développement (APD) qui est devenue inférieure à 100
milliards de dollars (à comparer avec les 3000 milliards de plans de relance des pays

42
industriels) alors que 150 milliards sont nécessaires pour atteindre les objectifs du
millénaire du développement (OMD) de 2015. Le redéploiement vers les prêts aux dépens
des dons bénéfice aux projets et aux pays les plus solvables. La conférence de Doha de
décembre 2008 sur le financement du développement a été un signe du désengagement
relatif des puissances occidentales vis-à-vis des pays les plus pauvres alors que l’Afrique a
besoin de flux de capitaux sécurisés.
Les effets financiers sont différents selon les économies. Certains pays appartenant à des
unions monétaires n’ont pas la contrainte du niveau des réserves extérieures ni les risques
des volatilités des capitaux à court terme. Les 15 pays de la zone franc ou ceux de la zone
CMA (Communauté monétaire d’Afrique australe) appartiennent à des unions monétaires
réduisant le risque de change et les volatilités des capitaux flottants. En revanche, la
dépréciation du rand a contrasté avec l’évolution du FCFA rattaché à l’euro. On notait en
2008 une appréciation du taux de change réel des pays exportateurs de pétrole et des
membres des unions monétaires et une dépréciation des pays à taux flottant ou à régimes
conventionnels de parité fixe. La finance islamique (300 institutions qui pèsent pour 500 à
700 milliards dollars d’actifs), interdite de spéculation, résiste apparemment mieux (Debt
Rating Agency Moody), ayant moins de produits toxiques et d’instruments financiers
complexes. Elle n’est pas toutefois à l’abri du manque de liquidité, de la faiblesse du
marché interbancaire et du poids élevé des obligations à court terme (90% contre 67%
pour les banques conventionnelles).
B) Les risques, incertitudes et instabilités :
Largement dépendantes des prix pétroliers, agricoles et alimentaires, les économies
africaines subissent les effets de l’extrême volatilité des prix, rendant impossible toute
prévision et privilégiant ainsi des comportements courts termistes. La sécurisation des flux
s’est réduite : c’est le cas des transferts des migrants ou des crédits commerciaux. La crise
se propage ainsi par le canal des risques accrus et avec une forte aversion aux risques des
investisseurs. Les économies sont devenues vulnérables aux chocs extérieurs. Il est prévu
que le rythme d’inflation baisse en moyenne de la moitié en 2009 mais il est impossible de
prévoir les comportements sur des marchés aussi spéculatifs que les hydrocarbures et les
produits alimentaires.
L’ensemble de ces facteurs devrait conduire à une chute de plus de deux points du taux de
croissance en 2009, qui devrait se situer entre 2.5% (FMI, avril 2008) et 2.8% (BAD,

43
juillet 2009) contre 5.7% en 2007 (FMI, avril 2009). On estime qu’une chute de 1 point de
la croissance mondiale (pondérée en fonction des échanges par partenaires commerciaux)
se traduit en moyenne par un recul entre 0.3 et 0.5 point de la croissance africaine (FMI,
2009). Dans l’ensemble, les pays africains ont relativement maintenu leur taux
d’investissement (23%) et leur taux d’importation (38%) alors que le taux d’épargne est
passé de 24.5% à 17.6%, le taux d’exportation de 40.8% à 32.1%. On peut noter une
aggravation des trois déficits de la balance interne, de la balance courante et du budget. Il
est prévu une perte des recettes fiscales en part du PIB de 3.9% pour 2009 (Banque
mondiale, mars 2009). L’excédent budgétaire de 2.8% en 2008 devrait se situer à – 5.4%
en 2009. L’excédent global du compte courant de 2.7% du PIB en 2007 et 2008 devrait
conduire à un déficit de 4.3% en 2009 (BAD, mai 2009).
L’impact de la crise varie selon les régions : les pays exportateurs de pétrole (+2.8%)
seraient plus touchés que les pays importateurs ; les pays à revenu moyen élevé, les pays
miniers et pétroliers sont plus touchés que les pays les moins avancés ; les pays en conflits
et à forte défaillance institutionnelle connaissent des crises largement déconnectées de la
crise mondiale. Bien entendu, ces données macroéconomiques et statistiques reflètent mal
la structure et les dynamiques des économies africaines. Elles ne prennent pas en compte
les effets sur l’économie souterraine ou « informelle ».
C) Les différents impacts de la crise :
La présentation précédente reste à un niveau global. Elle ne prend pas en compte le jeu
des grands acteurs transnationaux qui ont des stratégies différenciées par grands secteurs
et selon les territoires. Elle n’intègre pas les différents vulnérabilités et politiques des
Etats, leurs marges de manœuvre ni les effets des plans de relance.
A l’échelle mondiale, les principaux groupes concernés par la crise sont la banque,
l’automobile, l’immobilier, même si par des effets multiplicateurs la plupart des
entreprises sont touchées. La question majeure est de voir comment se restructurent les
grandes entreprises africaines et les filiales des multinationales. Les firmes multinationales
(FMN) font des arbitrages entre investissement direct à l’étranger (IDE), exportation,
sous-traitance entre internalisation et externalisation, entre territoires.
Les critères sont multiples (dimension des marchés, sécurité et risques, accès aux
financements, climat des affaires, infrastructures). Les IDE s’appuient à la fois sur des
financements locaux, des pays d’origine mais s’insèrent aussi dans des circuits mondiaux,

44
y compris les paradis fiscaux. L’Afrique du Sud demeure la puissance économique
dominante avec 156 des premières entreprises sur 500, mais son poids tend à se réduire.
Trois grands types de groupes peuvent être différenciés : les grandes entreprises publiques
que l’on trouve notamment dans les hydrocarbures (par exemple, la Sonatrach, première
société africaine), les filiales ou les joint-ventures des groupes multinationaux non
africains, les multinationales africaines (notamment sud-africaines et marocaines). Les
effets de la crise sont différents selon les grands secteurs. Les secteurs les plus touchés à
court terme en Afrique sont les mines, les hydrocarbures, le tourisme, les BTP et les
transports notamment aériens. On observe une crise des petites compagnies ne pouvant
accéder aux financements. Les secteurs fournisseurs de matières premières pour la
construction immobilière (bois), pour les industries automobiles ou les équipements
(produits, minéraux) sont fortement touchés. En revanche, les secteurs des
télécommunications, de l’agroalimentaire, du textile restent dynamiques.
Le secteur bancaire est évidemment touché. Il est différemment exposé aux risques selon
que les marchés financiers sont émergents, pionniers ou peu développés. L’ouverture est
ainsi limitée en Algérie, plus élevée en Tunisie et forte au Maroc avec une croissance
externe des banques. Les pays de la zone franc connaissent une concentration des banques
avec des fusions/ acquisitions.

Tableau 1 : Effets de la crise sur les principaux secteurs africains

45
Les groupes multinationaux ayant une surface importante ont des stratégies attentistes ou
offensives, mais peu de retrait. C’est le cas de Total investissant en Angola et au Nigeria ou
du groupe Bolloré se positionnant en Afrique du Sud, en Angola et au Nigeria. Les groupes
chinois ayant des stratégies de long terme cherchent à prendre les places de ceux qui se
retirent. En revanche, des groupes forestiers comme Rougier ont vu leur chiffre d’affaires se
réduire de 16% en Afrique et se spécialisent sur des produits à plus haute valeur ajoutée.
D) Les réformes envisageables :
La crise peut être une opportunité pour réaliser des réformes structurelles de long terme tout
en trouvant des réponses immédiates aux chocs extérieurs.
Le FMI préconise d’utiliser les marges de manœuvre budgétaires, d’assouplir la politique
monétaire et de laisser le taux de change s’adapter. Il a accru fortement ses prêts
concessionnels aux pays pauvres (17 milliards de prêts supplémentaires d’ici 2014 dont 8
milliards dans les deux ans) et préconisé une nouvelle boîte à outils en adoptant des
traitements différenciés, avec des conditionnalités limitées et des facilités de crédit plus rapide

46
(prêts de précaution, prêt d’urgence dans le cas de chocs exogènes). Plusieurs axes peuvent
être privilégiés.
L’affection des capitaux à des fins contracycliques est le premier axe. Plusieurs mesures sont
envisageables. Robert Zoellick, Dominique Strauss-Kahn ou Jacques Chirac ont ainsi proposé
d’affecter 1% des plans de relance pour un fonds vers les pays vulnérables. Une autre
possibilité serait de consacrer 10% des 500 milliards du FMI à de nouveaux allégements de la
dette. Il paraît aussi nécessaire de sécuriser les engagements du G20, notamment à
Gleneagles.
La banque mondiale pourrait sortir de son rôle classique de financement des projets et
programmes à long terme et venir au secours des systèmes bancaires vulnérables ou fragiles,
notamment des banques privées abandonnées par leur maison mère. Un tel projet est déjà mis
en œuvre par la BAD. Des fonds de liquidité d’urgence pourraient être débloqués. La question
des fonds de garantie permettant de transformer l’épargne en prêt à long terme se pose avec
acuité.
Le deuxième axe serait de stabiliser l’environnement des marchés internationaux. Les pays
africains exportateurs de produits primaires en dollars subissent de plein fouet la volatilité des
cours des produits de base. En effet, ceux-ci étaient, avant la crise, devenus des produits
financiers valeurs refuge ou des placements de la part des Hegde funds. Or, ces recettes
déterminent les capacités d’importation et d’investissement ainsi qu’une part importante des
recettes budgétaires. A défaut d’accords sur les produits ou de monnaie internationale fondée
sur les matières premières, plusieurs axes sont prioritaires : réduire le rôle des hedge funds,
prendre pour référence des prix des paniers de monnaie, compenser les instabilités des prix et
des recettes, mettre en place des fonds de stabilité lissant les conjonctures.
Les mesures d’accroissement des régulations, la plus grande transparence vis-à-vis des
circuits financiers et commerciaux parallèles ou des circuits criminels devraient réduire
l’insertion de l’Afrique dans une économie criminelle. L’Afrique est directement concernée
par l’initiative de transparence des industries extractives, le processus de Kimberley, les
taxations des fonds venant des paradis fiscaux, les contrôles des trafics de narcodollars, de
coltan, d’êtres humains. La levée du secret bancaire des on shore et offshore bancaires est un
levier essentiel pour réduire la fuite des capitaux.
Les fondements de cette nouvelle architecture renvoient aux interdépendances planétaires
sous plusieurs angles. La nouvelle gouvernance doit se situer également au niveau régional

47
Sud/Sud et Nord/Sud à travers les fonds monétaires régionaux et les banques régionales de
développement. Sur le plan régional, des politiques doivent fournir des apprentissages sur les
marchés régionaux permettant des montées en gamme, notamment sur certaines filières. On
peut citer l’exemple du riz en Afrique de l’Ouest ou du coton/textile. La solution à de
nombreux problèmes de gouvernance politique et économique, dans les domaines
énergétiques et agricoles par exemple, passe par une intégration renforcée et la montée en
puissance des organisations régionales et continentales. Pour l’Afrique de l’Ouest, il faut ainsi
miser en priorité sur la dimension régionale car les pays sont trop petits pour pouvoir
développer l’économie sur des marchés porteurs. Pour cela, il faut davantage susciter une
volonté politique en faveur de la coopération puis d’une réelle intégration régionale. Certaines
réformes structurelles comme dans le secteur de l’énergie ou de l’agriculture ne peuvent ainsi
être envisagées qu’à ce niveau.
La relance économique n’est cependant pas la seule réponse à la crise en Afrique. Beaucoup
de pays du continent sont encore touchés par une inflation importante et un espace fiscal
insuffisant. Dès lors, une relance économique ne s’inscrirait pas dans les meilleures
conditions sans les réformes structurelles qui en tout état de cause devaient être conduites
avant la crise.
De surcroît, le contexte de crise se prête à la prise de mesures drastiques. La crise dans
certains pays a en effet entraîné une prise de conscience du caractère insupportable des
distorsions économiques et du poids prohibitif des déficits budgétaires. Comme avant la crise,
l’Afrique a besoin d’investir fortement dans des infrastructures pour lesquelles les besoins des
financements non couverts sont estimés à 40 milliards par an. Cependant, la Banque mondiale
considère que 50% de ce besoin pourraient être trouvés en conduisant les réformes
économiques et budgétaires nécessaires.
Les pays industriels sont concernés par les nuisances venant des maillons les plus faibles
(risques épidémiologiques, conflits) ; tous les pays participent de manière inégale à la
constitution d’externalités négatives (émission de gaz à effet de serre, déforestation). Certains
biens et services sont réservés aux seules puissances riches (savoirs, recherche).

SECTION 2 : Etude de la crise au MAROC dans plusieurs secteurs :

48
La crise financière actuelle a été brutale et d’une ampleur considérable. Se déroulant en trois
phases pour affecter successivement les marchés, les banques et l’économie réelle, cette crise
s’est caractérisée par une extrême rapidité de propagation, prenant de court à la fois les
autorités publiques et les banques centrales.
Au Maroc, les mécanismes de transmission des effets de la crise ont emprunté les circuits
réels portant sur les échanges commerciaux et les investissements directs plutôt que les flux à
caractère purement financier car le marché financier marocain n’a pas encore atteint un niveau
d’intégration aux marchés internationaux suffisamment significatif. L’exposition du secteur
financier a été par conséquent relativement limitée.
La crise actuelle se distingue des crises financières précédentes par sa dimension globale, son
ampleur et sa vitesse de diffusion. En effet, cantonnée au début sur un marché de segment
spécifique (le secteur des prêts immobiliers à risque aux Etats-Unis), la crise s’est vite
propagée à la sphère financière et bancaire, occasionnant la défaillance de nombreux
établissements, des turbulences sur les marchés financiers ainsi qu’une crise de confiance
généralisée, avant d’engendrer par la suite de multiples répercussions macroéconomiques.
Au niveau de l’impact de la crise sur le Maroc, la démarche adoptée n’est pas forcément
comparable à celle suivie au niveau international, le secteur financier étant demeuré
relativement à l’abri des turbulences observées sur le plan international. A l’instar des pays
émergents, les effets de la crise se sont davantage fait ressentir à travers les canaux de
transmission macroéconomiques. En effet, le ralentissement de l’activité économique chez
nos principaux partenaires a eu des incidences notables sur le secteur réel. La propagation des
facteurs de récession vers le secteur réel a impacté l’économie marocaine à travers quatre
principaux canaux de transmission, à savoir les exportations de biens, les transferts de fonds
des Marocains résidant à l’étranger, les recettes voyages et les flux des investissements directs
étrangers.

49
1- Le repli des échanges commerciaux de biens avec l’étranger :
Bien que les exportations se sont accrues de 23% en 2008, la progression est surtout due à une
augmentation exceptionnelle des prix du phosphate et de ses dérivés, la hausse des
exportations hors phosphates et dérivés s’étant limitée, quant à elle, à seulement 0,5%.
L’examen des données pour les neuf premiers mois de l’année 2009 montre que les
exportations ont accusé une baisse sensible de 34% par rapport à la même période de l’année
précédente pour s’établir à 83,6 milliards de dirhams, sous l’effet du tassement de l’activité
étrangère et de la consommation dans les principales économies partenaires.
Les importations de biens après avoir enregistré une progression de 23% en 2008 en liaison en
grande partie avec la forte hausse des cours internationaux des produits de base et matières
premières, se sont, pour leur part, inscrites en baisse de 23,4% à fin septembre 2009 par
rapport à la même période de l’année précédente pour se situer à 193,5 milliards de dirhams.
Par conséquent, le déficit commercial global qui s’était alourdi en 2008 pour représenter
167,4 milliards de dirhams, atteint déjà 109,8 milliards à l’issue des neuf premiers mois de
l’année 2009, bien qu’en baisse par rapport à la même période de l’année précédente.
Graphique 7 : Evolution de la balance commerciale
(En milliards de dirhams)

SOURCE : BANK AL MAGHREB

50
2 - Le ralentissement des transferts des Marocains résidant à l’étranger :
En hausse ininterrompue ces dernières années, les rapatriements des Marocains résidant à
l’étranger ont marqué un fléchissement en 2008 pour revenir de 55 milliards en 2007 à 53
milliards de dirhams. Les données disponibles à fin septembre sur les flux financiers avec
l’étranger indiquent une contraction en glissement annuel de 9,7% des transferts des
marocains résidents à l’étranger qui se sont établis seulement à 37,6 milliards de dirhams.
Cette contraction des transferts des Marocains résidant à l’étranger qui découle d’une
réduction de leurs revenus est due au repli de l’activité et au chômage, notamment dans les
secteurs du bâtiment et de l’automobile où la main d’œuvre étrangère est très représentée.

Graphique 8 : Evolution des transferts des Marocains résident à l’étranger


(en glissement annuel) :

SOURCE : BKAM

51
3. La contraction des investissements et prêts privés étrangers :
Après avoir été réduits de 21,5% en 2008 pour s’établir à 32,5 milliards de dirhams, les
investissements et prêts privés étrangers n’ont porté à fin septembre 2009 que sur un montant
modeste de 17,4 milliards de dirhams, en repli sensible de 35,9% en glissement annuel.
La contraction des investissements étrangers s’explique par la persistance des incertitudes et
les difficultés de financement à l’échelle internationale.

Graphique 9 : Evolution des investissements directs étrangers

(En glissement annuel)

SOURCE : BKAM

52
L’impact de la crise sur le secteur financier :

Malgré ses tendances à l’ouverture, le marché financier, n’ayant pas encore réalisé une réelle
intégration aux marchés financiers internationaux, reste dans sa globalité assez réduite avec
des flux d’échange limités avec l’extérieur.

Le secteur bancaire marocain est à l’abri des risques liés à cette crise (Mezouar, 2008). Car les
banques marocaines ne détiennent pas de créances hypothécaires « toxiques » et n’ont pas de
liens significatifs avec l’étranger. Elles dépendent uniquement des ressources locales : leurs
avoirs à l’étranger demeurent modestes par rapport à leurs fonds propres (1.2%). De même
que les engagements des entreprises marocaines en devises ne représentent que 33% des
crédits qui leur sont accordés par les banques.

En ce qui concerne la panique sur le marché de la bourse de Casablanca en mai 2007 (Ndiaye,
2009), elle est le résultat d’un effet psychologique. Au niveau de l’économie réelle, les
répercussions négatives de la crise sur l’économie nationale sont sensibles aux niveaux
suivants :

1) Contraction de la demande extérieure adressée au Maroc :

La dépression économique résultant de la crise financière internationale a induit un


ralentissement significatif de l’activité et de la croissance (perte de 1.5 à 2 points) entraînant
ainsi une réduction de la demande mondiale de production primaire et donc de la demande des
matières premières.

La diminution de la demande adressée à la production marocaine se traduit dans un contexte


inflationniste par un repli des exportations, de la production et de l’emploi dans les secteurs
les plus exposés notamment l’agro-alimentaire, le tourisme, l’automobile et le textile
(Ballong, 2008). Puisque l’essentiel des exportations marocaines sont constituées par les
matières premières, l’économie marocaine reste vulnérable aux « chocs externes ».

53
Graphique 10 : Demande étrangère adressé au Maroc :

2) Ralentissement des flux d’investissements directs étrangers (IDE) :

La crise financière internationale a immanquablement entraîné un manque à gagner pour les


débouchés. La conjoncture internationale influence négativement les flux d’investissements
étrangers, dont le montant moyen sur ces dernières années atteint 5 milliards de dollars
(Integra Bourse, 2008) et qui sont importants pour le développement des capacités de
production du Maroc. Le ralentissement des flux d’investissements étrangers, comme le
montre le graphique ci- dessous, a pour conséquence un ralentissement de l’activité. A cet
égard, la crise financière a des répercussions négatives surtout sur les projets touristiques.

Le ralentissement des flux financiers venus de l’étranger d’aide au


développement ou générés par les transferts des Marocains résidents à
l’étranger (MRE) :

Le Maroc est dépendant des flux d’aide au développement ainsi que des transferts financiers
des migrants marocains, qui envoient une partie de leurs revenus à leur famille dans leur pays
d’origine (11 milliards de dollars en 2007). Ces transferts représentent une source financière
54
très importante de devises, contribuent de façon significative au Produit Intérieur Brut du pays
et participent à l’amélioration des revenus de centaines de milliers de familles.

Cependant, il est évident que les sommes investies dans les plans de sauvetage bancaires
entraînent une diminution des flux d’aide au développement qui constituent une source
croissante de financement. Parallèlement, la hausse du chômage en Europe et aux Etats-Unis
touche catégoriquement les travailleurs migrants et pèse sur leurs flux de transfert vers le
Maroc qui connaissent en 2009 une réduction allant jusqu’à 10%, soit une diminution
d’environ 5 MMDH (Boukhalef, 2009).

c) Détérioration des équilibres financiers et alourdissement du déficit


commercial :

Le repli de croissance s’accompagne d’une détérioration des équilibres financiers interne et


externe. La diminution de la demande extérieure et la hausse des prix des matières premières
ont contribué à l’alourdissement du déficit commercial qui a déjà atteint au terme des sept
premiers mois de l’année 2008 le seuil de 80 Milliards de dirhams (Centre Marocain de
Conjoncture, 2008).

Hausse du taux d’inflation :

Dans un environnement marqué par le renchérissement des matières premières, des produits
alimentaires et de l’énergie, les prix continuent d’augmenter à un rythme soutenu. Le taux
d’inflation franchit, à fin octobre 2008, le seuil de 3.8% en relation avec la hausse des prix des
produits alimentaires (+6.8%) (Mezouar, 2008). Il était de 1.8% entre 1996 et 2007.

55
Graphique 11 : Hausse du taux d’inflation et le déficit commercial

56
Section 3 : L’impact de la crise financière internationale sur le secteur
touristique au Maroc :

La crise financière internationale a engendré une crise profonde de l’économie et de l’emploi


au niveau mondial : baisse des taux de croissance, perte d’emplois, hausse des taux de
chômage, baisse des niveaux de vie… Cette crise a eu un impact sur le secteur touristique
notamment au Maroc.

1) Impact de la crise sur le secteur touristique au Maroc :

Le secteur touristique traverse une crise aigüe, depuis 2001. Selon l’OMT, la croissance des
touristes étrangers en 2009 est établie à 1% (Viceriat P., 2009). Ce fort ralentissement de la
croissance est entre autres selon l’OMT, le résultat de la dégradation de la conjoncture
économique internationale. Dans ce contexte, le secteur touristique marocain, qui représente
9% du PIB et crée plus de 400000 emplois directs (Boussaid, 2009), n’échappe pas à cette
tendance. Malgré ses avantages compétitifs, il traverse une crise aigüe. Selon des chiffres
officiels, les recettes du tourisme ont baissé de 14% entre juillet 2008 et mars 2009, sous
l’effet de la réduction des dépenses des ménages dans les principaux pays émetteurs de
touristes et de la concurrence régionale et internationale devenue de plus en plus rude.
La crise actuelle a pesé lourdement sur les budgets voyages impliquant une diminution de la
rentabilité des compagnies aériennes et une vague de soldes des billets aériens et des tarifs des
hôtels quatre et cinq étoiles. Avec la crise financière internationale, les entreprises et les
particuliers contrôlent mieux leurs voyages et gèrent leurs budgets avec économie. Ils
réduisent leurs budgets voyage : certains voyagent moins, alors que d’autres suppriment des
budgets. A titre d’exemple, des entreprises n’ont autorisé la classe affaires que pour un très
petit nombre de cadres supérieurs. D’autres accordant à leurs employés leur propre budget
voyage l’ont réduit. D’autres encore obligent leurs dirigeants à voyager en classe économie.
Cette mauvaise conjoncture a conduit à la suppression d’un certain nombre de liaisons. Ainsi
des vols notamment non rentables ont été annulés.
La crise financière internationale a déjà un impact sur la rentabilité des hôtels notamment
ceux de luxe. Les statistiques récentes montrent une baisse des bénéfices et des taux
57
d’occupation dans des villes comme Marrakech, Tanger, Fez et Casablanca. Abdelali Chaoui,
directeur de l’hôtel cinq étoiles Andalou de Marrakech a souligné une baisse des réservations
en 2009 par rapport à l’année 2008. Ce point de vue est partagé par le directeur de l’hôtel Jnan
Palace à Fès.
En outre, la crise contrarie les plans du gouvernement pour stimuler le tourisme dans les
années à venir. En effet, le projet gouvernemental s’inscrivant dans la « vision 2010 », visant
à attirer dix millions de touristes en 2010 et prévoyant la construction de nouvelles stations et
sites d’attraction risque de ne pas atteindre les objectifs escomptés. La construction des
stations balnéaires [Taghazout (Agadir), Mogador (Essaouira), Port Lxus (Larache), Saidia,
Mazagan (El Jadida) et Plage Blanche] prévues dans le cadre du plan Azur est retardée. Avec
la crise ce plan a été redimensionné. Du fait de ce retard, seules deux stations ont été ouvertes
en 2009 : Saidia (juin) et Mazagan (octobre).
Parmi les autres implications de la crise sur le tourisme on peut citer :
- la baisse des budgets vacances ;
- le ralentissement des investissements aussi bien publics que privés ;
- la multiplicité des offres spéciales ;
- l’attrait des destinations « low cost ».
Si certains responsables considèrent que le tourisme national dispose de potentialités
importantes telles que l’offre de produits touristiques haut de gamme, la libéralisation du ciel
(Open Sky) et la proximité du marché européen lui permettant de faire face à la crise
financière internationale, il n’en reste pas moins que le secteur a été réellement affecté. De
même, selon les professionnels, outre la crise, le secteur souffre d’un déficit structurel de
communication et de l’absence d’une stratégie claire.
Certes, pour donner un coup de fouet au secteur touristique l’intervention de l’Etat est
importante, mais les entreprises doivent revoir et perfectionner leurs méthodes de gestion
notamment leurs pratiques marketing.
2) L’impact de cette crise sur les recettes touristiques :
Le dynamisme soutenu de l’activité touristique au cours des dernières années a été interrompu
en 2008, suite notamment au ralentissement de la croissance dans la zone euro, principal
marché émetteur de touristes.

58
Dans ces conditions, les recettes de voyages se sont contractées pour s’établir à 55,4 milliards
de dirhams, soit une baisse de 5,6% au lieu d’un accroissement de près de 11% en 2007 et de
30% en 2006.
Au terme des neuf premiers mois de l’année 2009, les recettes touristiques, en dépit d’une
hausse des arrivées de 5,3% pour totaliser 6,5 milliards de visiteurs, sont revenues à 40,5
milliards de dirhams, soit une baisse de 8,8% par rapport à la même période de l’année
précédente. De même, les nuitées recensées dans les établissements classés ont subi une
diminution de 2,5% pour s’établir à 12,8 millions.
Le repli des recettes touristiques trouve son origine dans la baisse des dépenses des ménages
des pays émetteurs ainsi que dans l’avivement de la concurrence des autres pays.

Graphique 12 : Evolution des recettes voyages


(En glissement annuel)

SOURCE : BANK AL MAGHREB

3) La crise et ses répercussions sur le secteur touristique au Maroc :


Pour apporter des éléments de réponse aux interrogations de la problématique, il est
indispensable de présenter des éclaircissements sur la nature de la crise, les mécanismes de sa
propagation et son impact sur l’économie marocaine et notamment sur le secteur touristique.
La crise et ses incidences sur l’économie marocaine :
La crise financière est une crise des crédits immobiliers des Etats-Unis, appelée aussi la crise
des « subprimes », prêts à taux variables à une clientèle de particuliers peu solvable « working
59
poor ». A la fin de l’année 2006, les taux d’intérêt ont augmenté, en 2007, le marché
immobilier s’est effondré entraînant une augmentation des défauts de payement. Les
emprunteurs en difficulté ont vendu leurs habitations afin qu’ils ne subissent pas des pertes
qui deviennent lourdes, la conséquence est la chute des prix.
La crise des prêts hypothécaires à risque a débouché sur la plus grave crise financière depuis
celle de 1929 (Zacharie, 2009). Les conséquences sont néfastes :
- L’éclatement de la bulle immobilière se traduit par la chute vertigineuse des actifs et la
faillite des banques (faillite de Lehman Brothers le 15 septembre 2008) ;
- La perte de confiance des différents acteurs du système financier s’est généralisée ;
- La chute de la demande globale et la baisse de l’activité économique entraînent des
pertes considérables, des faillites et des fermetures d’entreprises.
Les difficultés et les pertes des banques et des fonds d’investissement, surtout aux Etats-Unis
et en Europe ont entraîné une immédiateté des réponses matérialisée par des soutiens publics
importants depuis la concertation et la coordination des politiques monétaires à l’échelle
internationale (baisse des taux directeurs des banques centrales, injections massives de
liquidités,), plan de sauvegarde américain (700MM. Dollars), plan de sauvegarde européen
(200MM. Euros) (Chafiki, 2008), jusqu’à la prise de participation publique dans les banques
(nationalisation forcée de la banque britanique Northern Rock et rachat provisoire de la
banque Bear Stearn par la banque J.P.Morgan avec le soutien de la FED). Mais, la crise sera-
t-elle résorbée par ces ajustements techniques ?
Les difficultés des banques ont provoqué, notamment aux Etats-Unis des restriction et des
difficultés accentuées du crédit (à la consommation et aux entreprises), pesant lourdement et
principalement sur les PME qui ont procédé aux licenciements. Les pertes d’emplois
augmentent causant des difficultés de consommation des ménages endettés dont la demande a
diminué, d’où le ralentissement de la croissance (avec des taux moyens réduits à 3.7% en
2008 et 2.2% en 2009) (FMI, 2008), voire même une menace de récession puisque les taux de
croissance dans de nombreux pays ont atteint des valeurs négatives
Ce ralentissement de la croissance est plus visible aux Etats-Unis qu’en Europe. Pour ce qui
est des pays émergents, peu touchés par cette crise, leur croissance même si elle est ralentie,
elle reste encore importante. Par exemple le taux de croissance de la Chine a passé de 11.4% à

60
9.3%, celui de l’Inde de 9.2% à 7.9%, la Russie de 8.5% à 7%. Pour ce qui est de l’Afrique,
ce taux a paradoxalement augmenté de 6.2% à 6.3% (Boccara, 2009). Il en résulte que la
croissance mondiale a baissé tout en restant relativement soutenue.
Comment se situe le Maroc dans cette évolution ? Peut-on avancer que la crise financière
internationale a épargné le Maroc ? L’impact de la crise se ressent de façon plus ou moins
significative sur l’économie nationale. L’essentiel des répercussions de la crise financière
transite par les circuits réels de l’économie portant sur les échanges commerciaux, les
transferts des Migrants et les apports en investissements directs plutôt que sur les flux à
caractère purement financier.

Section 3 : Le détournement du Maroc vers les pays africains :

Dans cette section nous allons trouvez face à la réponse de notre problématique : Quel
est l’impact des crise financières internationales sur la croissance de l’économie
marocaine ?

Après toutes les crises financières qui ont impacté les pays émergents, à savoir les Etats-Unis
et l’union européenne, le Maroc a changé sa stratégie politique et économique, aussi bien a
pris une décision très importante qui est le détournement vers l’Afrique et il est devenu le 2 -
ème plus grand investisseur en Afrique, et par conséquent, le Maroc va agir en Afrique pour
son développement et celui du continent.

En effet, Le trio banques-télécoms-industrie constitue le principal pôle d’activité des


entreprises marocaines en Afrique. Ces trois secteurs ont capté en 2019 près de 74,1% des
investissements marocains injectés sur le continent. En 2019, le secteur bancaire s’est érigé
en tête des secteurs d’activités des investissements marocains en Afrique.

1. LES ÉCHANGES COMMERCIAUX ET FINANCIERS MAROC – AFRIQUE :

LES ÉCHANGES COMMERCIAUX ET FINANCIERS ENTRE LE MAROC ET LE


RESTE DU CONTINENT AFRICAIN ONT CONNU UNE DYNAMIQUE
CROISSANTE DURANT LES DIX DERNIÈRES ANNÉES, AUSSI BIEN AU NIVEAU

61
DES PRODUITS ÉCHANGÉS, QU’AU NIVEAU DE L’INVESTISSEMENT DIRECT
RÉALISÉ ENTRE LES DEUX PARTIES.

a. ÉCHANGES COMMERCIAUX MAROC - AFRIQUE : BALANCE


COMMERCIALE EXCÉDENTAIRE À PARTIR DE 2015 :

Les échanges commerciaux entre le Maroc et le reste de l’Afrique ne cessent de croître au fil
des années, enregistrant une croissance annuelle moyenne de 6,1% sur la période 2009-2019.
La part de ces échanges par rapport au volume global des échanges commerciaux du
Royaume se situe à 5,1% en 2019.
Au cours de cette période, ces échanges ont été marqués par un changement structurel à partir
de 2015. En effet, à partir de cette année le solde commercial du Maroc devient excédentaire.

Graphique 11 : Evolution des échanges commerciaux Maroc-Afrique

Ce résultat est dû à une progression des exportations plus importante que celle des
importations. En effet, les ventes de marchandises à destination de l’Afrique ont presque triplé
durant les dix dernières années passant de 8,3Mds DH en 2009 à 21,6Mds DH en 2019. Les
62
importations quant à elles s’établissent à 17,9Mds DH en 2019 contre 13,7Mds DH en 2009,
soit une hausse de de 4,2Mds DH.

Le solde commercial de ces échanges enregistre un excédent en faveur du Maroc se situant à


+3,7Mds DH en 2019 contre un déficit de 5,5Mds DH constaté en 2009.

Au cours de la même période, le taux de couverture s’est amélioré de 60,6 points passant de
60,2% en 2009 à 120,8% en 2019. Ce taux a atteint son niveau le plus haut en 2017 avec
145,6%.

b) Exportations marocaines vers l’Afrique

Les exportations marocaines à destination de l’Afrique enregistrent un taux d’accroissement


annuel moyen de 10% au cours de la dernière décennie. Ces ventes sont caractérisées par une
diversification des marchés de destination et des produits exportés.

En effet, l’analyse des principaux clients du Maroc dans le continent africain laisse apparaître
une diversification des marchés de destination des exportations Marocaines.
En 2019, le Djibouti et le Sénégal sont les premiers clients du Maroc dans le continent
Africain avec une valeur de 2,1 Mds DH chacun. Ils sont suivis par la Mauritanie (1,9Md
DH), la Côte d’Ivoire (1,8Md DH) et l’Algérie (1,5Md DH). Les exportations marocaines à
destination de ces pays représentent 43,5% du volume global des exportations du Maroc à
destination de l’Afrique en 2019.

Par secteur, les exportations du Maroc vers l’Afrique ne se limitent pas aux produits
alimentaires; d’autres produits constituent l’offre exportatrice nationale, notamment les ventes
des produits de l’industrie chimique (30,1% du total des exportations en 2019 contre 11,8%
en 2009) et celles de l’agriculture, sylviculture, chasse (3,2% en 2019 au lieu de 1,1% en
2009), et ce au détriment des exportations des produits de l’industrie alimentaire (25,1% en
2019 contre 31,9% en 2009), de l’industrie automobile (4,1% en 2019 contre 8,4% en 2009)
et de la métallurgie (2,1% contre 5%).

63
Graphique 12 : Principales évolutions de la structure des secteurs
exportateurs vers l’Afrique :

64
Par secteur, la structure des importations en provenance de l’Afrique en 2019 est de plus en
plus diversifiée. Plusieurs secteurs commencent à prendre du poids tels que la fabrication
d’autres produits minéraux non métalliques (4,5% en 2019 contre seulement 2% en 2009), la
fabrication de meubles industries diverses (3% en 2019 contre 0,6% en 2009), et ce au
détriment des importations des extractions de houille, de lignite, de tourbe (22% du total des
importations en 2009 et 16,2% en 2019) et du raffinage de pétrole et autres produits d’énergie
qui passent de 27,1% en 2009 à 22,4% en 2019.

Graphique 13 : Principales évolutions des secteurs importateurs en


provenance de l’Afrique :

65
c) Importations marocaines en provenance des pays africains :

S’agissant des importations, elles atteignent 17,9Mds DH en 2019 contre 13,7Mds DH en


2009 réalisant un taux d’accroissement annuel moyen de 2,7% au cours de cette période.
Par pays, l’Egypte est le premier fournisseur du Maroc au niveau continental avec 36,2% du
total des importations en provenance de l’Afrique en 2019, suivie de l’Algérie et de la Tunisie
avec respectivement 27,6% et 13,2%. Ces trois pays s’accaparent 77% du total des
importations marocaines en provenance de l’Afrique.

2. ÉCHANGES FINANCIERS : DES FLUX EN PLEIN ESSOR :

A l’instar des échanges commerciaux, les échanges financiers entre le Maroc et le reste du
continent Africain connaissent depuis une dizaine d’années une nouvelle dynamique.

a) Investissement Directs Marocains (IDM) en Afrique :

Au cours de la période 2009 – 2019, les investissements directs marocains en Afrique passent
de 3 Mds DH en 2009 à 6,8 Mds DH en 2019 affichant un taux d’accroissement annuel
moyen de 8,3%. Ces investissements ont atteint leur niveau le plus haut durant cette période
en 2017 avec une valeur de 8,8 Mds DH.
La part des investissements directs marocains en Afrique dans le total des investissements
directs marocains à l’étranger s’établit à 58,7% en 2019 avec une part moyenne de 59,5%
durant la période 2009 – 2019.

Graphique 14 : Evolution des investissements Directs Marocains en


Afrique :

66
En 2019, les investissements marocains en Afrique sont présents dans 29 pays contre
seulement 9 pays en 2009. La Côte d’Ivoire se place en première position avec une part de
21,4% en 2019, suivie du Tchad avec 19,8% puis le Sénégal avec une part de 14,7%. Ces trois
pays représentent à eux seuls, 55,9% du total des IDM en Afrique en 2019.

L’Egypte, pays destinataire d’un montant record de ces investissements en 2017, occupe la
7ème place en 2019 (3,7% du total des IDE en Afrique en 2019 contre 61,1% en 2017).

Par secteur, les IDE marocains en Afrique touchent un nombre important de secteurs (plus de
13 secteurs en 2019 contre seulement 7 secteurs en 2009).
Le secteur des banques est classé au premier rang avec une part de 39,4% en 2019 (quasi-
stabilité par rapport à 2009 : 36,3%). Le secteur des télécommunications arrive en deuxième
position avec une part de 21,1% (baisse par rapport à 2009 avec une part de 59,9%). En
troisième position, vient le secteur de l’industrie avec une part de 13,5% (Hausse par rapport à
2009 avec une part de seulement 2,6%). Ces trois secteurs s’accaparent 74,1% du total des
IDM à destination de l’Afrique en 2019.

67
b) Stock des investissements directs marocains en Afrique :
Le stock des investissements directs marocains réalisés en Afrique enregistre un taux
d’accroissement annuel moyen de 14,7% au cours de la période 2011-2018. En 2018, il
s’élève à 21,5Mds DH, contre seulement 8,2Mds DH en 2011. Sa part dans le total du stock
des investissements directs marocains à l’étranger se situe à 41,5% en 2018, en recul par
rapport à 2011 (48,5%).

68
CONCLUSION :

Les crises financières trouvent leur origine dans le système bancaire et financier et peuvent
avoir de graves répercussions sur l’économie réelle. Ces crises, comme celle des années 1930
et celle de 2008, proviennent de mécanismes comme les comportements mimétiques (qui
forment des bulles spéculatives) et les prises de risque facilitées par des situations d’aléa
moral, et entraînent des faillites en chaîne. Les crises financières se transmettent à l’économie
réelle via des canaux de transmission comme l’effet de richesse, la contraction du crédit ou les
ventes forcées : elles deviennent alors des crises économiques, avec des conséquences sur la
production et le chômage. Suite à la crise de 2008, les mesures de régulation sont renforcées
afin de diminuer le risque de crise.

Après toutes les crises financières qui ont impacté les pays émergents, à savoir les Etats-Unis
et l’union européenne, le Maroc a changé sa stratégie politique et économique, aussi bien a
pris une décision très importante qui est le détournement vers l’Afrique et il est devenu le 2 -
ème plus grand investisseur en Afrique, et par conséquent, le Maroc va agir en Afrique pour
son développement et celui du continent.

Également, le Maroc évite les crises financières à travers la surveillance permanente de sa


stabilité financière qui est une condition importante à la croissance économique.

La surveillance macroprudentielle se réfère à l’ensemble des instruments de la réglementation


et de la surveillance prudentielle des établissements financiers destinés à préserver la stabilité
du système financier et à réguler le risque systémique. Ce dernier est défini comme étant le

69
risque de perturbation des services financiers causé par une déficience de l’ensemble ou partie
d’un système financier qui peut avoir des conséquences graves sur l’économie.

La surveillance macroprudentielle a un impact significatif sur la stabilité financière et requiert


une attention particulière, son objectif est d’identifier et évaluer les risques systémiques
pesant sur le système financier, minimiser la probabilité de survenance d’une crise financière
et réduire les coûts.

BIBLIOGRAPHIE :

 REVUE DE LA BANQUE DU CANADA • HIVER 2001–2002


 Council on Foreign Relations, Inc. (1999). Safeguarding Prosperity in a Global
Financial System : The Future International Financial Architecture. Rapport d’un
groupe de travail indépendant, Washington, Institute for International Economics
(octobre). Document accessible à l’adresse < http://www.cfr.org/public/pubs/
IFATaskForce.html >.
 International Financial Institutions Advisory Commission (2000). Report of the
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Document accessible à l’adresse < http://www.house.gov/jec/imf/ifiac.htm >.
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 Bank Al-Maghrib, Rapport Annuel, 2008.
 Banque de France, « La crise financière », Documents et débats n°2, février 2009.
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 Comité de veille stratégique, « Crise internationale : scenarii d’impact sur le Maroc et
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 International Monetary Fund, Meetings of G-20 Finance Ministers and central banks
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 BAD (2009), Rapport sur l’impact de l crise sur l’économie ;
 BAD-OCDE (2009), Les Perspectives économiques de l’Afrique, Juillet

71
WEBOGRAPHIE :

 https://www.iaea.org/sites/default/files/publications/magazines/bulletin/bull50-
1/50104013940_fr.pdf
 https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_crises_mon%C3%A9taires_et_financi
%C3%A8res
 https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_%C3%A9nerg%C3%A9tique_mondiale_de_2021-
2023
 https://www.imf.org/fr/Blogs/Articles/2020/04/14/blog-gfsr-covid-19-crisis-poses-
threat-to-financial-stability
 https://www.imf.org/fr/Home
 https://www.cairn.info/revue-d-economie-financiere-2011-3-page-21.htm
 https://www.cairn.info/revue-francaise-d-economie-2013-3-page-213.htm
 https://www.lafinancepourtous.com/decryptages/crises-economiques/mecanique-des-
crises/une-nouvelle-crise-financiere-est-elle-possible/
 https://www.bkam.ma/content/download/360884/3034455/InterventionLINKS.pdf
 https://www.universalis.fr/encyclopedie/crise-des-subprimes-en-bref/
 https://www.ig.com/fr/glossaire-trading/crise-des-subprimes-definition
 https://www.cairn.info/revue-geoeconomie-2012-4-page-73.htm
 https://www.finances.gov.ma/Maliya%20tawassol/almaliya66.pdf
72
 https://www.cese.ma/media/2020/11/ebook-IntegrationMarocAfrique-vf-3.pdf

LISTE DE FIGURES :

Graphique 1 : Détérioration de l’activité économique au niveau international ………...…..10

Graphique 2 : Evolution de taux de chômage……………………………………………….11

Graphique 3 : Evolution des principaux taux directeurs des banques centrales…………….14

Graphique 4 : Dettes privées aux Etats-Unis…………………………………………………22

Graphique 5 : Les prix du gaz naturel……….………………………………………………32

Graphique 6 : Les secteurs les plus impactés en période de COVID-19……….…………...37

Graphique 7 : Evolution de la balance commerciale (En milliards de dirhams) .....………..50


Graphique 8 : Evolution des transferts des Marocains résident à l’étranger (en glissement
annuel) ..………………………………………………………………………………………51
Graphique 9 : Evolution des investissements directs étrangers (En glissement annuel)…...52

Graphique 10 : Demande étrangère adressé au Maroc…………...………………………….54

Graphique 11 : Hausse du taux d’inflation et le déficit commercial………………………...56

Graphique 12 : Evolution des recettes voyages (En glissement annuel) …..…...…………..59

73
Tableau 1 : Effets de la crise sur les principaux secteurs africains………………………..…46

TABLE DE MATIERES :

Abréviations…………………………………………………………………………………..5
Introduction…………………………………..………………………………………………6
Contexte de l’étude………….………………………………………………………………..8
Problématique…………..…………………………………………………………………….8
Chapitre 1 : Les crises financières internationales…….……………….…………………. 9
Section 1 : Les fondements historiques des crises financières…………………………….9
1) Crise de 2008 ……………...…………………………………………………………..9
2) Les politiques de gestion de cette crise……………………………………………..12
3) Synthèse de la crise de 2008………………………………….……………………..16
Section 2 : Causes et mécanismes de la crise financière…………………………………..17
1) Les causes des crises financières..…………………………………………………..17
a) Des innovations financières mal contrôlées……………………………………17
b) Des crédits en quantités excessives……………………………………………..20
c) Des inégalités économiques marquées…………………………………………22
d) Des obstacles à la réglementation financière…………………………………..23
2) Les mécanismes des crises financières……………………….…………………….26
a) Les régulations………….……………………………………….……………….27
b) Régulations mondiales ou nationales……………………….…………………..29

74
c) La taxation des opérations financières…………………………………………29
Section 3 : Les solutions suggérées par le FMI…………………………………………….30
Chapitre 2 : Exemples des crises financières internationales récentes…………………..32
Section 1 : La crise énergétique mondiale …………………………………...……………32
Section 2 : La crise du COVID-19 menace la stabilité financière………………………..34
Section 3 : Crédit suisse, la banque emblématique des scandales financiers…………....38
Chapitre 3 : Etude de cas « Le Maroc »…………...……………………………………….41
Section 1 : L’étude de la crise en Afrique…………………………………………….....…41
1) Les canaux de transmission de la crise……………………….…………………….41
1) Le canal commercial et productif………………………………………………41
2) Le canal financier………………………………………………………………..42
2) Les risques, incertitudes et instabilités………………………………...……….….43
3) Les différentes impacts de la crise………………………………………………….44
4) Les réformes envisageables…………………………………………………………46
Section 2 : Etude de la crise au MAROC dans plusieurs secteurs………….………..47
1) Le repli des échanges commerciaux de biens avec l’étranger………………..….50
2) Le ralentissement des transferts des Marocains résidant à l’étranger…..………51
3) La contraction des investissements et prêts privés étrangers………...…………..52
L’impact de la crise sur le secteur financier……………………………………………….53
1) Contraction de la demande extérieure adressée au Maroc……………………….53
2) Ralentissement des flux d’investissements directs étrangers (IDE)…………...…54
3) Détérioration des équilibres financiers et alourdissement du déficit commercial55

Section 3 : L’impact de la crise financière internationale sur le secteur touristique au


Maroc…………………………………………………………………………………….57
1) Impact de la crise sur le secteur touristique au Maroc……………………………57
2) Impact de cette crise sur les recettes touristiques…………………………………58
3) La crise et ses répercussions sur le secteur touristique au Maroc………………..59
Conclusion……………………………………………………………………………………62

Bibliographie……….………………………………………………………………………..63

Webographie………..………………………………………………………………………..65

Listes de figures…...…………………………………………………………………………66
75
Table de matières…………………………………………………………………………….67

76

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