Cahiers d'études africaines

Markakis, John. - National and Class Conflict in the Horn of Africa

Monsieur Roland Marchal

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Marchal Roland. Markakis, John. - National and Class Conflict in the Horn of Africa. In: Cahiers d'études africaines, vol. 28,
n°109, 1988. Mémoires, Histoires, Identités II. pp. 137-138;

https://www.persee.fr/doc/cea_0008-0055_1988_num_28_109_2157_t1_0137_0000_2

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ANALYSES ET COMPTES RENDUS 137

il postule que la première vague de peuplement celle qui concerne les Sara de
ouest doit la réussite de son implantation organisation agraire de la société
qui se caractérisait une part par la constitution de réserves collectives de grains
au niveau villageois autre part par institution du maître-agriculteur le mbay
chef de famille riche et administrateur des greniers pour les familles pionnières qui
partaient coloniser de nouvelles terres Toutefois face aux autochtones dotés de
structures politiques et militaires élaborées une autre fonction celle du mbay
be vint compléter celle du mbay Choisi parmi les mbay par le conseil des lignages
son rôle consistait coordonner les mouvements migratoires Il organisait les
actions attaque ou de défense pour installation un nouveau site dirigeait les
travaux pour les fortifications des villages etc
Là où implantation sarà ne rencontra aucune résistance dans la région de
est seules des institutions caractère religieux se développèrent au niveau supra-
villageois Des prêtres ngorge toge ngage ou mbang fondent sur la détention
objets sacrés un pouvoir rituel et font jouer leur bénéfice la pratique des stocks
collectifs un de ces personnages le mbang de Bedaya auteur appuie ici
longuement sur les travaux du père Portier) réussit imposer sa domination sur
les autres centres religieux mais dut se soumettre aux Baguirmiens qui dès la
deuxième moitié du xixe siècle mènent des incursions en pays sara pour capturer
des esclaves Ce contexte historique va favoriser émergence de nouvelles chefferies
de traite qui paient tribut au Baguirmi Le même type de redevances en céréales
sera alors prélevé sur la population par ces chefs appelés ngar
On peut étonner du décalage existant entre le titre donné cette deuxième
partie la centralisation du pouvoir chez les Sara avant 1900 et son contenu
En effet les auteurs précédents avaient souligné absence unité politique chez les
Sara J.-P Magnant qui semble reprendre son compte la thèse de Kogongar en
parlant tat sara précolonial décrit en fait des institutions villageoises auto
nomes dénuées de véritable lien federatif et échec de instauration une forme
théocratique tat est sans doute une définition extrêmement large du mot
tat qui autorise un tel emploi
Les conséquences néfastes de administration fran aise sur la société sara sont
largement développées dans la dernière partie auteur met en avant plusieurs
facteurs qui vont faire basculer cette société greniers vers une société de
pénurie introduction de la culture du coton dont le calendrier chevauche celui de
la culture du mil le poids des impôts la capitation est payée en mil et la ponction
de la main-d uvre paysanne pour les grands travaux ou pour armée mettent un
terme la pratique des stocks collectifs en céréales Il faudra attendre les
années 1960 pour que les paysans sara retrouvent un regain de prospérité
Si ce livre est probablement destiné devenir un manuel pour les étudiants
tchadiens juste retour des choses auteur citant volontiers ses élèves on ne
peut empêcher de déplorer il comporte autant de coquilles Les cartes nom
breuses et bien documentées sont malheureusement difficilement lisibles
Fran oise DUMAS-CHAMPION

MARKAKIS John National and Class Conflict in the Horn of Africa Cambridge
Cambridge University Press 1987 xvii-314 p. cartes bibi. index African Studies
Series 55)
approche courante des conflits dans la Corne de Afrique privilégie largement les
aspects internationaux ou se concentre essentiellement sur les discours des acteurs
internes mouvements de libération et appareils tat John Markakis revendique
une méthode différente qui renon ant au globalismo une analyse en termes pure
ment politiques attache au contraire appréhender les différents modes inser-
138 ANALYSES ET COMPTES RENDUS

tion des idéologies mobilisatrices elles ne sont pas toutes politiques dans les
sociétés concrètes De là une première partie de ouvrage qui trace certes grands
traits les spécificités des sociétés de la Corne mais aussi et est fondamental dans
analyse proposée les transformations différentielles induites par la colonisation
et articulation au marché mondial
La suite de ouvrage tente analyser des mouvements de rébellion le mot
doit être entendu dans son sens le plus large au Soudan avec aide de Howell)
en rythrée en Ethiopie au Nord Kenya Bref une gageure autant que de
nombreux aspects de leur histoire restent élucider Les matériaux utilisés sont
non seulement des sources secondaires mais aussi des informations précises et
quelquefois précieuses recueillies lors de rencontres avec les protagonistes des
conflits étudiés De ce fait ouvrage est un intérêt majeur Dommage donc que
éditeur ait relégué en nn ouvrage des notes fort utiles qui eussent pu figurer en
bas de page
videmment traiter de situations aussi nombreuses et diverses ne peut en
gendrer certaines insatisfactions chez le lecteur Sans contester accent mis sur les
facteurs ethniques des analyses plus fines auraient pu être tentées Pour prendre
exemple érythréen les rivalités intérieur du Front de libération de rythrée
renvoient certes des questions ethniques mais aussi des processus islamisation
des islam différents sur la côte et dans la Western Province Les contradictions
exprimées ne additionnent pas simplement celles issues du fait ethnique elles
en changent la nature et cela dès le début du mouvement nationaliste des
années 1940 De même on peut se demander si le nomadisme est le seul facteur qui
détermine les rapports complexes et ambigus entre les cadres des mouvements
armés et la base des combattants ces derniers acceptant de soutenir les élites poli
tiques condition elles reprennent en charge les histoires locales Bref une his
toire mais aussi une sociologie de ces mouvements avèrent nécessaires Certes
auteur multiplie les indications mais souvent sans engager de fa on plus systé
matique Les informations sur les rapports concrets quotidiens entre les populations
civiles et les mouvements armés font défaut Elles feraient probablement apparaître
des discontinuités et une périodisation qui ne serait plus seulement calquée sur les
événements politiques Le conflit au Sud-Soudan de 1955 hui pourrait
illustrer cette hypothèse De plus cela permettrait de nuancer une thèse de Markakis
énoncée en introduction tat il est un protagoniste est-il toujours objet réel
du conflit Les pages passionnantes consacrées aux soulèvements dans le Sidamo
et le Northern District au Kenya montrent elles aussi élasticité potentielle un
tel enjeu Le mérite essentiel de ce travail stimulant et riche en matériaux est sans
doute travers étude de la récurrence des conflits dans cette région de pousser
des analyses qui font une large place au champ social et ses logiques sous-jacentes
sans pour autant minimiser le politique
Roland MARCHAI