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ENSEIGNEMENT Supérieur ET UNIVERSITAIRE

Cours de droit pénal


général
Bienvenu Wane Bameme
Professeur Associé
Avocat

2013-2014
Cours de Droit Pénal Général 2013

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Etymologiquement, le droit pénal est le droit de la peine. Pénal vient de


"poena", en grecque. La peine est une sanction particulière, infligée par la
société, au délinquant ; c'est à dire à celui qui a violé une norme pénale.

Autrement, le droit pénal est l'ensemble des règles juridiques, qui


organisent la réaction de l'Etat, vis à vis des infractions et des délinquants. Le
droit pénal est la même chose que le droit criminel. Les deux expressions sont
synonymes, nonobstant le fait que la première mette plus l’accent sur la
sanction pénale et que la seconde se rapporte au délinquant.

Cela étant dans le droit pénal, il y a en réalité différentes branches (droit


pénal général, spécial et droit de procédure pénale), mais ce qui nous intéresse
à ce niveau, c'est le droit pénal général.

Le droit pénal est la branche du droit qui répond au phénomène


criminel. Puisqu'il faut bien l'avouer, s’il n'y avait pas de phénomène criminel
(Section 1), il n'y aurait pas de droit pénal (Section 2).

Section I. LE PHÉNOMÈNE CRIMINEL

Qu'est ce que c'est le phénomène criminel ?

C'est l'ensemble des transgressions particulièrement graves


attentatoires à l'ordre et à la sécurité, contraires aux valeurs sociales admises,
réprouvées par la conscience et punies par une norme. Cette définition vient du
lexique des termes juridique. (Cornu).

On s'aperçoit vite que le phénomène criminel est inhérent à la société.


C’est que toute société s'accompagne d'un phénomène criminel.

Durkheim a choisi d'étudier comme phénomène social, le phénomène


criminel. Pour lui le phénomène le plus humain, c'est le crime. C'est quelque
chose d'humain, d'important, qui menace l'équilibre de la société.

Quand on parle de crime on se retrouve entre 3 intérêts différents :


- intérêt de la société, représentée par le ministère public ;
- intérêt du délinquant ; et
- intérêt de la victime.

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Ces 3 personnages interviennent. On est donc en présence de 3 intérêts,


qui ne sont pas conciliables. Parfois ce jeu, prend une tournure originale. Les
rapports entre ces personnes sont compliqués.

Le phénomène criminel (§1) est au centre de tout cela et suscite une


réaction de la part de la société (§2).

Paragraphe I. L'existence du phénomène criminel

Il y a une surreprésentation du phénomène criminel. Le phénomène


criminel est important, car il nous intrigue. Il convient de le définir avant de
connaître de son ampleur.

A. La définition du phénomène criminel

Il y a plusieurs grands axes de définition possibles.

Approche sociologique du phénomène criminel. C’est Durkheim qui la


présenta. Il recherchait un phénomène social, qui pour lui est le crime. Pour
qu'il y ait crime, il faut une violation d'un interdit, et même d'un interdit
majeur. Et pour qu'il soit interdit, il faut avoir conscience de l'interdit. Ex:
lorsqu'un chat, vous ramène une tête de souris, il n'y a pas crime puisqu’il n’y
a pas violation d'un interdit. Le crime est forcément quelque chose d'humain. Il
faut qu'il y ait une règle sociale, qui soit connue, et violée en connaissance de
cause.

Approche criminologique du crime. Au sens de la criminologie, le crime


est un abus soit de la force, auquel cas cela s'appelle "la violence", soit un abus
de l'astuce, au quel cas cela s'appelle " la ruse ". Le viol est commis par la
violence. Le vol d'un stylo est commis généralement par la ruse. Le phénomène
est la transgression d'interdit absolument essentiel, inhérent à la vie en société.
Le phénomène criminel est donc la violation de ces interdits.

Approche juridique. Du point de vue du droit, le phénomène criminel, est


la violation de la règle pénale.

La loi pénale est la loi qui prévoit une peine. Dans cette conception, le
législateur fixe à l'avance les comportements interdits, et il détermine à l'avance
la peine encourue. Exemple : Si on prend le code pénal, et qu'on va à l'article
79, on constatera que le vol y est défini, et sa pénalité est déterminée à l'article
80 qui punit le coupable d'emprisonnement et d'amende. C'est cela la prévision
du législateur. C’est qui veut dire que du point de vue du droit, le phénomène
criminel consiste en la violation d'un texte d'incrimination.

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Le droit est un langage précis. Certaines législations (française,


belge…etc.) procèdent par la tripartition des infractions : le crime, le délit et la
contravention. La législation congolaise quant à elle emploi indistinctement les
trois termes pour une même réalité : l’infraction.

B. L'ampleur du phénomène criminel

Deux questions:
- peut-on mesurer le phénomène criminel ? Si oui comment
- quels sont les résultats ?

1. Les méthodes de mesures du phénomène criminel

Il est difficile de le mesurer de façon précise et dans les années 1970, il y


a eu par exemple en France, forte insistance, sur l'existence du " chiffre noir ".
Finalement, on s’est rendu compte qu’il y a une partie que l'on ne peut pas
mesurer. Et donc toute mesure devrait être vouée à l'échec. Les statistiques
criminelles françaises ont pour cela été contestées, à cause de ce chiffre noir.

En réalité, une telle idée paraît pour le moins inexacte dans certaines
sociétés et pour quelques infractions. On peut mesurer la criminalité. Le chiffre
noir n'est pas si important pour toutes les infractions. Il y a sans doute des
infractions où le chiffre noir est égal à 0. Exemple : Pour les homicides
volontaires commis dans certaines sociétés, le chiffre noir est nul.

Un cadavre, on le trouve, et lorsqu'on le trouve, il y a enquête. Pour


avoir un chiffre noir il faut que l'on ne trouve pas le cadavre. Mais cela n'est pas
du tout le cas pour le cadavre. Car, il va bien manquer une personne quelque
part. En matière de vol, il n'est pas très important non plus dans ces sociétés.
N'importe quel vol fait l'objet d'une déclaration à l'assurance, et cette dernière
demande toujours une copie de la plainte déposée au près des autorités.

Il y a un domaine où le chiffre noir est important, pour les infractions


sexuelles commises contre les mineurs, parce qu’en plus, elles sont
généralement commises dans le cadre de la famille. Même en tenant compte du
chiffre noir, qui est une constante, que l'on retrouve chaque année. Malgré ce
chiffre noir on peut connaître l'évolution de la criminalité. Les statistiques
criminelles sont globalement valables.

Dans les années 1970, la France a imaginé d'autres mesures de la


criminalité, appelées " les enquêtes de victimisation" et "d'auto-confession".

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La victimisation. C’est l’action de « victimiser ». Elle consiste au fait


d’être considéré comme étant particulièrement sensible à devenir victime d’un
acte ou d’un phénomène préjudiciable (infractionnel ou non). L’enquête de
victimisation se réalise par des sondages à effectuer dans une société en
demandant à un certain nombre de personnes de répondre à des
questionnaires. Exemple : au cours de l'année précédente, avez-vous été victime
de vol, viol,... (ce sondage doit être anonyme).

Auto-confession. Elle consiste en la déclaration d’une faute ou l’aveu


d’un acte blâmable. C’est donc le fait pour toute personne de dénoncer ses
propres faits infractionnels. Il en est ainsi par exemple de la question : Avez-
vous été corrompu cette année ?

Mais, quel peut être le volume du phénomène criminel dans une société.

2. Le volume de la criminalité

La criminalité : c'est l'ensemble des crimes et délits réalisés en un temps


donné.

1°. Dans toute société, les statistiques criminelles doivent montrer le


sens suivi par le phénomène criminel au cours d’une période donnée. En RDC,
les études relatives à l’évolution de la criminalité peuvent relever une sensible
augmentation entre la période d’avant la colonisation, celle pendant la
colonisation et celle actuelle.

En République Démocratique du Congo donc, l'augmentation est très


importante. Mais, les raisons d’un tel mouvement d’augmentation sont bien
différentes au sein de toute société. Trois faits majeurs peuvent être retenus :
- La croissance de la population. En effet, la population a aussi
augmenté, donc il est normal, que la criminalité augmente aussi.
- La tendance à la surpénalisation. La liste des textes a aussi
augmenté, il y a de nouveaux textes qui considèrent un fait
comme délit, alors qu'auparavant, il ne l’était pas.
- L’avènement des nouvelles technologies. La grande vitesse a été
provoquée par l'avènement des nouvelles technologies. Il y a
apparition de nouveaux délits. Si on regarde l'époque romaine, il
y avait seulement 10 délits. Aujourd'hui, on ne sait pas.

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2°. Qu’est ce qui peut être à la base de la baisse de la criminalité à un


certain moment dans une société ?

La seule explication est l’organisation de la réaction sociale. En effet,


une société qui organise sa défense peut réduire considérablement le
phénomène criminel. Il en est ainsi du phénomène « Kuluna » qui ne peut être
vaincu qu’avec l’organisation d’une réaction sociale efficace.

3. Les facteurs du phénomène criminel

Pourquoi il y a-t-il le phénomène criminel ?

Il y a eu d’abord, les premières explications :

Elles correspondaient aux origines de la criminologie. En effet, la


criminologie est née avec 3 italiens, Lombroso, un psychiatre, qui s'est
intéressé à l'hystérie. Ferri fut professeur de droit et enfin Garofalo, un
magistrat.

C'est LOMBROSO qui apporte la 1ière explication avec un ouvrage :


l'homme criminel. C’était donc pour la 1ière fois qu’on s'est intéressé au criminel.
Et donc Lombroso décrit les criminels, comme cela se faisait en 1960, (dessin).
Il fit des statistiques et les a rangés par catégories : le criminel-né, le criminel
constitutionnel et le criminel passionnel,... Il a ajouté des facteurs
physiologiques. Pour pouvoir déterminer à l'avance la catégorie dans laquelle
une personne se trouvait. Si l’on avait affaire à un criminel né, il ne fallait pas
que l’autorité attende la commission de l'infraction, donc elle pouvait agir
directement. C'est le "principe de mesure de sûreté".

On est donc passé du crime au criminel. C’est que pour Lombroso, il y


avait une explication biologique à retenir. Il y avait donc une prédestination.

Autre explication : l'école socialiste de Marx et Engel. Il s’agit ici d’une


autre analyse des années 1880, qui vise à démontrer que le crime est un sous
produit du capitalisme. Ce qui voudrait dire en conséquence que dans un pays
socialiste, il n'y aurait pas de crime. On serait dans une société sans crime.
C’est ainsi que la Russie (à l’époque de l’URSS) avait des statistiques de
criminalité égale à 0. Cependant, il y a lieu de reconnaître que cette analyse est
utopique. Néanmoins, elle est intéressante, pour sa vision sociologique.

Mais, ces analyses ont été mises de côté au profit de différentes autres
théories. C’est ainsi qu’on distingue les facteurs déclenchant de ceux
prédisposant.

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a. Facteurs prédisposant

Plusieurs facteurs y sont retenus pour expliquer en partie le fait


criminel, à savoir :

Critère biologique voir même un critère chromosomique, dite conception


du "chromosome du crime", qui se fonde sur quelques cas. "Camalca". Cette
théorie n'est pas très satisfaisante.

Situation culturelle : on s'intéresse au conflit de culture, à l’immigration,


aux populations jeunes, souvent très violentes, qui n'ont plus de norme de
repère et entrainent des crises familiales. Parmi ces facteurs, il y a la
ghettoïsation qui est un facteur pré-disposant d'ordre économique. L’on peut
évoquer aussi la diminution sensible du taux de scolarisation dans nos sociétés
africaines…

Effritement des valeurs : le désintéressement total à la formation


morale. Exemple : les personnes vont de moins en moins à l'église, même si
celles-ci pullulent les rues...

b. Facteurs déclenchant

Qu'est ce qui fait qu'une personne puisse passer à l'acte ?

Les facteurs déclenchant s'intéressent au moment du passage à l'acte.


Ils s'intéressent notamment à la :
- personnalité du délinquant, et
- situation pré-criminelle, ce qui va se passer juste avant le passage
à l'acte.

Exemple : l'occasion : cette situation fait qu'on réfléchit en termes de


risque et d'opportunité. C'est ce qui explique la baisse de la criminalité. Est-ce
que je prends le risque de me faire attraper ?... Plus on sent le risque, moins on
agit.

La criminologie s'en intéresse depuis des années. C'est difficile de lutter


contre les facteurs prédisposant, mais on peut agir sur les facteurs
déclenchant. Exemple : illumination des rues, qui étaient des coupe-gorge. On
agit de plus en plus sur les moments du passage à l'acte. Mais cela ne marche
que sur des personnes sensées, une personne fragile, ne s'interroge pas sur ces
risques. Exemple : la délinquance juvénile.

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Paragraphe II. La réaction sociale au phénomène criminel

Il y a forcément un phénomène criminel dans toute société humaine. Le


phénomène criminel est inhérent à l'humanité. Cela étant précisé, toutes les
sociétés n'ont pas les mêmes modes de réaction. Il y a des réactions différentes.

A. Les fonctions de la réaction sociale

De manière schématique, il y a deux séries de fonctions différentes :

- Une fonction orientée autour de l'idée de justice : la société réagit


au phénomène criminel, d'abord, parce que cela est juste. Elle réagit car il
serait injuste de ne pas punir l'auteur. Dans ce système on va punir l'auteur
des faits. Cela veut dire lui infliger une peine, une souffrance. La peine est là
pour faire souffrir. La peine renvoi à l'idée de rétribution. C'est le paiement de
l'infraction. Elle doit être proportionnelle à la gravité de l'infraction.

Une infraction donnera lieu à une peine lourde, même si le préjudice est
minime, dérisoire. Ex : tentative de meurtre. Du point de vue civil, elle n'a rien.
Mais du point de vue pénal, la peine est lourde. Le critère de la peine est la
gravité de l'infraction, pas le dommage pour la rétribution. Si la faute est grave,
la peine est grave, c'est la "rétribution" ou "l'expiation".

- La réaction peut avoir une fonction tirée de l'idée d'utilité : La


société doit réagir parce que c'est utile. Dans cette conception, la réaction
sociale s'attarde sur l'avenir, pour que cela serve à quelque chose.

Il y a plusieurs dimensions : il y a la dissuasion qui peut être collective


ou individuelle, la réinsertion mais aussi la neutralisation ou l’élimination.
la dissuasion collective : il s'agit de faire peur à la société, afin d'empêcher le
passage à l'acte. C'est pour cela que dans la plupart des pays, la justice est
rendue au nom du peuple. C’est d’ailleurs pour cela qu’en principe, les
procès sont publics. On peut assister un procès au TGI ou en cour d’appel.
la dissuasion individuelle : elle est ciblée et s'adresse à celui qui à déjà été
condamné pour qu'il ne récidive pas. C'est l'objet par exemple du sursis.
la réinsertion du délinquant. Parce que s’il se réinsère bien, il ne récidivera
pas. Le législateur s'efforce de limiter la désocialisation. C’est ainsi que par
exemple, le législateur prévoit des modalités d'aménagement de la peine, en
organisant entre autres : pour la France la semi-liberté qui permet de
travailler la journée, et aussi pour la RDC, la liberté conditionnelle. Tous ces
éléments limitent la désocialisation. Et pourtant, une personne désocialisée,
lorsqu'elle sort de la prison, ces seuls amis, sont ceux qu'elle s'est fait en
prison, donc il y a risque de récidive.

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la fonction de neutralisation. La réaction a aussi pour but ou pour effet, la


neutralisation ou l’élimination de l'auteur de l'infraction. Il en est ainsi par
exemple de l’emprisonnement à perpétuité et la peine de mort.

B. Les modèles de réactions sociales

Il y a lieu d’en retenir deux, à savoir : le modèle pénal classique et celui


criminologique.

1. Le modèle pénal classique :

C'est un modèle très ancien qui a été théorisé par un italien "Beccaria
César " né à Milan en Italie le 15 mars 1738 et décédé le 28 novembre 1794.

Ce jeune marquis milanais, publia le « traité des délits et des peines », de


façon anonyme, en 1764 et très rapidement, il eu du succès.

Ce livre est aujourd’hui connu dans tous les pays de la famille romano
germanique ; et particulièrement en France, par le rôle efficacement joué par
Voltaire. On y trouve toute la philosophie pénale actuelle. C'était donc pour la
première fois que l'on réfléchissait au droit de punir, que l’auteur reconnaissait
à la société. Le traité fut fondé à partir du contrat social de Rousseau. L’auteur
est parti du Contrat social pour expliquer le droit de punir.

Pour lui donc, certaines peines comme la peine de mort ne sont pas
vraiment utiles ni dissuasives. Qu'en fait ce qui compte le plus, c'est la rapidité
de la peine, modérément, plutôt qu'une intervention tardive. Mais sa grande
idée est la légalité criminelle : que l'on punisse seulement avec un texte. Il faut
qu'une loi pré-existe. La loi doit dire avant ce qui est permis ou non.

Avec ce livre, Beccaria va révolutionner le droit pénal. Le tout premier


Code Pénal né en France, portait d’ailleurs hommage à Beccaria, appelé code
des délits et des peines. Même la Russie stalinienne faisait semblant de
respecter cette égalité criminelle.

Le point de départ c’est le libre arbitre de chacun. L’homme est donc


libre d'agir ou de ne pas agir. La loi pénale prévoit à l'avance ce qui est interdit.
Du coup celui qui commet une infraction, en connaissance de cause, doit avoir
choisi de violer la loi pénale. Donc le délinquant doit être puni, on doit lui
infliger une peine, parce qu'il est responsable, c'est à dire qu'il répond de ses
actes. Globalement c'est à peu près le système actuel dans la plupart des
législations nationales.

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2. Le deuxième est un modèle criminologique.

Ce sont les italiens qui l'ont conçu : Lombrozo, Ferri et Garofalo. Ce sont
des positivistes juridiques. Le positivisme est conçu par un français Auguste
Comte. Ces idées sont reprises par les Italiens par la suite.

Le point de départ est l'anti-Beccaria. C'est à dire que l'homme n'est pas
libre mais déterminé, soit biologiquement pour Lombrozo (nez, œil,...) soit
socialement ou sociologiquement, conception de Ferri (immigré ou non). Du
coup, il n'est pas nécessaire d'attendre la commission d'une infraction, on peut
aussi régulièrement agir préventivement. Le critère d'intervention n'est pas la
commission d'une infraction, mais l'état dangereux.

Comment faire pour connaître l'Etat dangereux ?

Principalement, par la gravité du préjudice causé à autrui. Celui qui a


donné 28 coups de couteaux à une victime peut être dangereux. La dangerosité
peut être aussi appréciée par un collège d'experts, de juristes, d'aliénistes, qui
vont pouvoir diagnostiquer la dangerosité, si on n’atteint pas l'infraction. Ici, il
n'y a pas d'idée de peine, mais l’application d’une mesure de sûreté tournée
vers l'avenir, donc la durée sera indéterminée. Elle durera le temps de l'Etat
dangereux.

En revanche, il convient d’avouer qu’on on ne peut pas diagnostiquer un


état dangereux à 100%. La psychiatrie n'est pas la mathématique. Par ailleurs,
on estime que ce système est dangereux puisque la mesure de sureté à retenir
est indéterminée dans le temps. On a transposé ce système dans le Système de
Staline, avec le Goulag (organisme central gérant les camps de travail forcé en
Union soviétique).

Le système n'a jamais été transposé à l'état pur : Il est construit sur la
base du système pénal. Sur la base d'un modèle juridique, donc sur la base de
Beccaria. Le Code Pénal, est finalement composé des incriminations, des
comportements interdits. Si un acte n'est pas prévu par le texte pénal, on devra
relaxer la personne.

Mais le système positiviste a influencé les systèmes français et congolais


à la fin du 19ième siècle. La première vague d'influence a été vécue à la fin du
19ième siècle, notamment avec le sursis, c'est l'influence du positivisme. La
libération conditionnelle, est aussi une influence du positivisme ainsi que les
mesures de sûreté, comme les mesures éducatives en France, notamment pour
les mineurs, comme celles de 1912, qui n'agissent que pour l'avenir.
Aujourd'hui, la France en connait d’autres comme l'injonction de soin.

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Soulignons que les mesures de sûreté ne peuvent être ordonnées


qu'après la commission d'une infraction. Elles, et leurs éventuels dangers sont
encadrés comme la mesure des peines.

Il y a aujourd'hui en France, une deuxième vague d'influence du


positivisme. Elle est liée aux faits d'actualités médiatisées, aux lacunes du droit
pénal classique. Exemple : la rétention de sûreté et la surveillance de sûreté du
25 février 2008, ainsi que la loi du 12 décembre 2005, relative à la lutte contre
la récidive, qui créait la surveillance judiciaire. Il faut retenir que la notion
d'état dangereux a fait son entrée depuis 2005 dans le C.P. français. Il
s'agissait de la nécessité d'apporter une réponse conséquente à des délinquants
dangereux, généralement après la peine.

La rétention de sûreté : Elle est la possibilité après une peine


d'emprisonnement d'avoir un enfermement au titre de mesure de sûreté, en
raison de la dangerosité exceptionnelle de l’intéressé. La Cour d'assises doit
dire si une rétention de sûreté sera possible plus tard, lors de son verdict. Elle
n'est possible que pour un certains nombres d'infractions, limitativement
énumérées dans le code pénal français. Et il faut qu'a la fin de la peine, des
experts diagnostiquent la dangerosité de l'intéressé et une juridiction
spécialisée prononce par la suite cette rétention de sûreté. Elle est d'une durée
d'un an. Mais qui est reconductible tant que le besoin s'en fera sentir.

C. Le processus de réaction sociale

Elle suppose la commission de l'infraction. C'est une condition


nécessaire, suivie d'un certain nombre d'étapes.

Il y a l'étape policière : elle a pour but de rechercher les preuves, les


auteurs et les infractions éventuelles. Les personnes poursuivies sont
protégées.

La deuxième étape est l'instruction : une fois qu'il y a suffisamment de


preuves, l’autorité judiciaire chargée de mener l'instruction fait une mise en
examen. S'ouvre alors une nouvelle phase. Les droits de la défense sont
renforcés. L'avocat a droit au dossier. Du côté du juge d'instruction français, les
pouvoirs sont plus étendus. Des actes vont être renforcés. Il va pouvoir y avoir
une détention « préventive ». En RDC, l’instruction menée au niveau du parquet
ne permet pas le magistrat de décider la détention « préventive ». Il devra se
référer au juge pour la solliciter. Seul le magistrat instructeur militaire
congolais peut décider de détenir une personne avant que l’affaire ne soit portée
devant le magistrat du siège.

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La troisième phase est celle de jugement : lorsque le dossier est


suffisamment prêt, qu'il a eu des interrogatoires, des débats, on va renvoyer
l'affaire devant une juridiction de jugement (tribunal de paix ou de grande
instance, cour d’appel ou de cassation mais parfois aussi constitutionnelle en
RDC). Il va y avoir le président, et d'autres membres dans la composition.

La phase des voies de recours qui est la continuation.

Enfin, en droit français il existe la phase d'application des peines que


nous souhaitons voir intégrée en droit congolais de procédure pénale. Cette
dernière, constituera un autre procès qui devra commencer. Ici, l'enjeu ne sera
pas la culpabilité mais les modalités de l'exécution de la sanction pénale, déjà
retenue et prononcée contre le coupable définitivement condamné.

Section II LE DROIT PÉNAL

C'est la branche du droit dont l'objet est la réaction sociale au fait


criminel. C’est la plus ancienne branche du droit, la plus rigoureuse, dont les
enjeux sont les plus importants. C'est la vie, l'honneur…etc ; qui ne s'achètent
pas. Le droit le plus proche du droit pénal est le droit de la famille.

Il va falloir traiter de l’évolution du droit pénal et ses caractéristiques.

Paragraphe I. L'ÉVOLUTION DU DROIT PÉNAL

Le droit pénal a connu une évolution considérable car il est l'une des
plus anciennes branches du droit.

On peut distinguer plusieurs étapes : l’étape de l’émergence du Droit


pénal, celui de la genèse où il y a un mouvement fondamental puisque au
départ, l’acte de délinquance était considéré comme causant un trouble privé.
Mais, le Droit pénal a véritablement émergé lorsqu’on a considéré que l’acte de
délinquance causait un trouble à l’ordre public. Puisque si c’est considéré
comme privé, la réaction première sera celle de la vengeance privée : œil pour
œil, dents pour dents. La réaction collective en retour est la vengeance privée.

Il y a amélioration lorsque l’on passe de la vengeance privée à la justice


privée (canalisation). La société vient imposer un minimum de règles pour
l’exercice de cette réaction contre le crime. Puisque l’on impose des règles, l’idée
de justice apparaît, néanmoins, ça reste privé car la réaction à la criminalité
conserve sa nature privée. La victime continue à dominer le système privé.

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L’apparition véritable du Droit pénal se fait lorsque le phénomène


criminel est appréhendé comme facteur de trouble public et que d’une justice
privée, on est passé à une justice publique. Dès lors, la sanction ne conserve
pas seulement l’intérêt de la victime, l’acte de délinquance cause un trouble à
l’ensemble de la société. Cette émergence de la justice publique a entraîné
l’apparition des juridictions y compris les juridictions ecclésiastiques. La justice
publique étant fermement établie, se sont succédées des périodes où seuls les
caractères du Droit pénal changent et entre la politique genèse et la codification
de Napoléon, se trouve une période intermédiaire.

Cette période intermédiaire aura été marquée par la révolution qui


constitue une rupture assez nette par rapport au Droit de l’ancien régime.

Sous l'antiquité, le droit pénal n'était pas très développé. Le droit qui
était bien construit était le droit civil. Le droit pénal était oublié. En effet, le
droit pénal suppose un État fort. Hors sous l'Antiquité, l'Etat était rarement fort
et donc le droit pénal était un droit assez peu construit. Ce qu'on sait quand
même c'est que les grandes infractions existaient. Ex: le vol, l'escroquerie... La
procédure était plutôt accusatoire et la tendance était d’abandonner peu à peu
le caractère privé de la réaction à l’infraction.

Sous l'ancien droit, c'est là que le droit pénal va se construire, car l'Etat
va progressivement apparaître. On va partir du Moyen-Age, avec plusieurs fiefs,
dans lesquels chaque seigneur faisait son droit pénal. Et par la suite il va y a
voir un droit pénal influencé par l'Église, qui avait un volet répressif et donc ce
n'est pas innocent, si c'est l'Église qui a inventé une réelle procédure. L'Église
était une institution centralisée, construite. C'est comme cela que des peines
ont pût être données de l'Église.

C'est comme cela que l'Église influença les juridictions seigneuriales et


féodales.

Ce droit pénal ancien qui s’est maintenu jusqu'à la Révolution


présentait trois (3) caractéristiques :
 un droit pénal très cruel : châtiment corporel, torture, supplice du collier,
noyade... dès lors, lorsqu'on torture c'est pour obtenir l'aveu, et lorsqu'on a
bien torturé, alors là il y aura une action, c'est à dire le supplice, la peine.
 un droit pénal sévère : un droit dont l'échelle des peines, paraît
disproportionné. Exemple : Un déplacement d'une clôture, c'était puni de la
peine de mort. Les infractions étaient punies sévèrement. La peine
d'emprisonnement était presque rare.
 un droit pénal irrationnel : sous l'ancien régime, il y a avait quelque chose
d'irrationnel.

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Exemple : le blasphème et la sorcellerie étaient des infractions pénales. Ce


droit pénal était symbolique, ce qui faisait, qu'on organisait des procès à des
mannequins en paille, animaux, pour apaiser le bon peuple. Néron a pu faire
fouetter la mer.

La révolution française du 1789 amène un droit pénal révolutionnaire


opposé au droit pénal de l'Ancien Régime. Un des aspects était le pouvoir des
magistrats, et l'absence de principe de légalité criminelle. C'est-à-dire que les
magistrats après coups, disaient ce qui était interdit ou non. On se souviendra
des adages comme " quels sont les maux de la Provence : la Durance, le
Parlement de Provence". Les parlements avaient des grands pouvoirs.

Quelques temps après, soit en 1810, il y a eu le premier code pénal


français, hommage à l’italien Beccaria, qui écrivait déjà en 1764 son traité « des
délits et des peines ». Mais, il faut avouer que ce fut la conséquence d’un vaste
mouvement d’idées nourri depuis le VIIIième siècle par la pensée féconde des
philosophes et criminalistes aux noms prestigieux comme l’allemand
Feuerbach, les anglais Jérémie Bentham et John Locke, les français
Montesquieu, Rousseau, Voltaire…etc.

Ce code qui a inspiré au moins pour un demi-siècle la plupart des codes


européens, entre autres le code pénal belge de 1867 d’où est issu le décret
congolais du 30 janvier 1940 ; pose et respecte le principe de la légalité
criminelle. C'est à dire qu'il souligne la nécessité de la prévision préalable de
l’incrimination avant sa commission. On doit donc écrire à l'avance ce qui est
interdit et le juge n’ayant que peu de pouvoir, ne statuera que sur ce qui est
prévu.

Ce code reste néanmoins un code sévère, puisqu’on pouvait y retrouver


encore la peine de mort. Il est aussi imparfait et va assez vite connaître des
modifications importantes : il en était ainsi en 1832 où l’on a adouci la
législation. Il y a de nombreux cas de peines capitales qui vont disparaître, et il
y aura suppression des châtiments corporels. On va adoucir la répression. Cet
adoucissement va se poursuivre à la fin du deuxième empire. Ce qui va
coïncider avec l'influence positiviste. Et donc à la fin du 19ième siècle, il va y
avoir l'influence positiviste, avec le sursis, les mesures éducatives,...etc.
Progressivement on reconnaît au juge plus de pouvoir. Exemple : libérer
quelqu'un avant la fin de sa peine ; Créer une circonstance atténuante. Puisque
le Code pénal de 1810 prévoyait déjà le système des peines planchées, le juge
ne pouvant aller au dessous ou en dessus ; les circonstances atténuantes ont
servi à aller en dessous du plancher.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le code pénal congolais. Le code pénal, sur lequel est fondé l’objet de
notre enseignement de droit pénal, a été introduit en République Démocratique
du Congo par la colonisation. En effet, lorsque vers la fin du XIXième siècle, le
territoire du bassin du fleuve Congo fut placé sous la responsabilité de Léopold
II roi des belges et roi souverain de « l’Etat Indépendant du Congo » (1884-
1908), puis au XXième siècle sous l’administration de la Belgique dans le cadre
du « Congo belge » (1908-1960), les autorités coloniales belges y ont
naturellement transposé le modèle pénal européen, avec quelques adaptations
mineures.

Il en est résulté le code pénal congolais de 1886 inspiré


essentiellement du code Napoléon. En réalité, le décret du 7 mars 1886
mettait en place un simple embryon de code pénal. S’en sont suivis par la
suite, un certain nombre de dispositions réglementant spécialement divers
secteurs de la vie publique. Cette multiplicité de textes a suscité le réel
besoin de codification qui est intervenue d’abord à travers le décret du 26
mai 1888, puis celui du 27 avril 1889 avant la mise en ordre définitive
faite par le décret du 30 janvier 1940.

Tel que présenté, le droit pénal congolais, ancré dans la culture


africaine, appartient à cette grande famille de droit « Romano-germanique »
autant que les codes pénaux français et belge. Le droit pénal congolais partage
ainsi une parenté philosophique et technico-juridique avec ses ascendants
Belge et Français. Il partage aussi avec ces derniers la même histoire qui peut
se résumer en des périodes.

A. La vengeance privée

D’après « des récits légendaires, des textes sacrés et des œuvres


littéraires », à ses origines, l’infraction est une atteinte à l’ordre privé et la
justice pénale est une justice privée1. En effet, cette période autrement appelée
temps de la guerre privée se caractérisait par une justice rendue par le chef de
famille ou du clan. Celui-ci était doté du pouvoir omnipotent, c’est-à-dire, il
avait toute compétence et pouvait connaître toutes les infractions et prononcer
toutes les sanctions jusqu’à la peine capitale et à l’expulsion du membre
indiscipliné. Lorsque l’infraction était commise par un individu qui
n’appartenait pas à la famille, elle était vengée par un membre de la famille et
cette vengeance n’avait pas de limites car, elle pouvait aller jusqu’à
l’anéantissement de l’agresseur. Bref, ce n’était qu’une surexcitation de la
famille.

1
Jean PRADEL, Droit pénal général, 12e éd., CUJAS, Paris, 2010, p.93.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Pendant cette période, la responsabilité pénale était collective en ce sens


que tout membre de la famille du délinquant répondait pénalement à
l’infraction de leur membre. Mais, il arrivait que cette vengeance aboutisse au
versement d’une composition, c’est-à-dire, une indemnité versée par la famille
du délinquant à la famille de la victime afin d’empêcher la vengeance. Cette
procédure était en vigueur dans les deux petits moments ci-après : le temps de
la justice privée ; et le temps du pouvoir public sanctionnateur ou de la justice
publique.

1. Temps de la justice privée

Pendant ce moment, on tente de sortir de l’exercice illimité de la


vengeance ou de la force brutale. Il y a naissance de quelques règles, d’une
sorte d’embryon d’organisation juridictionnelle. Autrement dit, la réaction de la
victime est limitée. Mais, cette justice reste encore privée parce que c’est la
victime de l’infraction qui demeure l’instigatrice de l’infraction et qui en est
bénéficiaire.

Le rôle de la société commence à naître, mais reste accessoire et se


limite au pouvoir qui lui est reconnu d’imposer aux parties le versement de la
composition.

2. Temps du pouvoir public sanctionnateur ou de la justice publique

Ce temps se caractérise par la prise en main de la direction de la


répression par la société qui arrivait à un certain niveau de développement. Par
conséquent, on considère certains actes contre les personnes comme des
atteintes portées à l’intérêt de la collectivité. La société organise la répression de
telle manière que la réparation du préjudice social causé par l’infraction devient
de plus en plus l’objet principal et de plus en plus la victime directe de
l’infraction est renvoyée au second plan. Le meurtre devient un crime public,
car la société préfère ne pas vivre avec ceux qui ôtent la vie aux autres. C’est
ainsi que le procès pénal né de l’infraction peut se dérouler entre la société
représentée et le délinquant et ce, même en l’absence de la victime. Le pouvoir
du chef est limité et la vengeance devient proportionnée à l’attaque. La
responsabilité naguère collective devient individuelle dans l’institution
d’abandon noxal. Celle-ci consiste dans le fait d’abandonner l’auteur de
l’infraction dans les mains de la famille de la victime qui est libre d’en
faire ce qu’elle veut (le vendre, en faire un esclave, le mettre à mort, etc.).

Cette institution était en vigueur à Rome, en Grèce, chez les hébreux,


dans les lois franques, dans les coutumes anglo-saxonnes et scandinaves.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

D’autres mécanismes verront le jour pour limiter la vengeance privée :


l’Etat se donne le pouvoir de fixer le montant de la composition et de l’imposer
aux parties. Il se donne, en outre, le pouvoir de partager cette composition
entre lui et la victime et cela précisant l’origine de l’amende et des dommages-
intérêts.

A l’époque anglo-saxonne, la victime demande la réparation pour les


dommages subis et l’auteur d’un meurtre paie un montant appelé « Wergeld »
qui varie selon le rang social de la victime. Cette indemnité était loin d’être
symbolique. Dans la justice publique, les infractions cesseront d’être des
choses privées pour acquérir la qualité des infractions sociales, publiques,
infractions qui, certes, portent préjudice à des personnes privées mais qui
perturbent l’ordre social. Par conséquent, elles deviennent des choses
publiques.

B. La période théologico-politique fondée sur la vengeance divine et


publique

1. Le fondement religieux

A un stade de son évolution, la répression a pris un fondement religieux.


Les sociétés primitives voyaient que l’infraction provoquait la colère des dieux.
La peine aura pour rôle de rétablir l’équilibre entre les dieux et les hommes.

Le christianisme apporte les notions d’expiation (pénitence) et


l’amendement. Cependant, cela ne suffit pas à réduire les rigueurs du droit
européen ancien.

2. La philosophie pénale de cette période

Cette période veut aussi dire que l’autorité sociale est constituée et
repose dans les mains d’un seul dépositaire qu’on appelle chef, roi, empereur,
seigneur ou même grand vassal. Cette autorité laïque va se considérer comme
le bras séculier de la religion et va punir de manière rigoureuse. Dans certaines
sociétés, l’auteur d’un crime, loin d’être protégé par son groupe, est abandonné,
livré au groupe victime qui demeure libre d’en faire ce que bon lui semble.

3. Les moyens répressifs et les abus

Il y a ici la révolte contre l’arbitraire théologico-politique. Pour


comprendre cette révolte, examinons les moyens répressifs.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Georges VIDAL résume cette période : considérant comme une nécessité


politique d’assurer l’unité religieuse du royaume, la monarchie punissait de
mort, par le feu, le blasphème, l’athéisme, le sacrilège, la magie, la sorcellerie,
la possession démoniaque ou la démomanie2. Pour les crimes de l’ordre public,
le moyen répressif comprenait notamment à Rome : la mort : par décapitation,
par pendaison, par saut de la roche tarpéienne, par crucifixion, par combat
entre gladiateur et fauve, par noyade dans un sac avec un coq, singe ou vipère
pour le parricide ; travaux dans les mines ; exil ou déportation.

En conclusion à cette période, il y lieu de retenir qu’il n’y avait pas


d’hygiène dans les prisons, il y a incertitude des lois (pas de principe de légalité)
qui étaient nombreuses et incomprises, incertitude des peines (le juge a la
latitude de les appliquer), la sévérité et la cruauté des peines par leur
disproportion avec la gravité des délits, la rigueur excessive pour les crimes
contre la religion et la monarchie, l’inégalité des peines selon les conditions
sociales des délinquants (les nobles avaient certains privilèges).

C. La période humanitaire : siècle de lumière

Cette période est caractérisée par une participation de l’église et des


penseurs à l’administration de la justice pénale. Pendant cette période, il y a
l’amélioration de la vie carcérale, le droit pénal est codifié, les supplices ont
disparu, la peine de mort est abolie pour des nombreux crimes ; mais les
cellules ont fait leur apparition et il y a la création des pénitenciers.

Le droit canon est pénétré par la philosophie pénale qui était orientée
vers la réhabilitation du criminel et le christianisme fort des grands thèmes de
la charité et de la rédemption favorisant le sentiment de pitié et de modération
dans l’applicabilité de la peine.

En 817, le consul d’Aix La Chapelle pose les bases de l’emprisonnement


cellulaire dans les monastères.

En 1764, le jeune italien Beccaria publia un traité des délits et des


peines qui allait précipiter une révolution dans la législation criminelle. Pour cet
auteur, le droit de punir de la société est la somme des droits de chaque
individu. Lorsque l’individu entre dans la société, il cède à celle-ci son droit de
défense et renonce à céder à l’instinct de conservation ou l’esprit de vengeance.

2.
Vidal Georges, Cours de droit criminel et science pénitentiaire, 9ième éd, Rousseau, Paris, 1949, p.1.

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Le droit de punir est limité par la justice et l’utilité sociale et les peines
ne peuvent pas dépasser les limites de la stricte nécessité de défense sociale.
BECCARIA exclut comme injuste la torture, la peine de mort, l’atrocité des
peines et des supplices et réclame premièrement la nécessité de certitudes des
peines, leur personnalisation, leur humanité et leur proportion aux infractions.

En 1775, l’Anglais John HOWARD qui visita plusieurs prisons et fit ce


constat :

- la nécessité de l’hygiène et d’un régime alimentaire sain ;


- une discipline différente pour les prévenus et les condamnés ;
- la nécessité d’une éducation morale et religieuse des prisonniers ;
- la nécessité de l’éducation professionnelle et l’obligation au travail.

Le 14 juillet 1789, le peuple français s’empare de la bastille, la


déclaration des droits de l’homme est adoptée et le grand principe devant régir
l’humanité, est déclaré. L’Assemblée législative française proclama quelques
principes : la personnalisation des peines, l’abolition des procès aux cadavres et
de la confiscation générale.

Jérémie BENTHAM, philosophe anglais a repris les idées de BECCARIA


et a suggéré une architecture nouvelle pour les prisons par les moyens
suivants :
- l’organisation du travail et l’éducation professionnelle ;
- l’instruction morale et religieuse ;
- la séparation par petits groupes pour éviter le danger de
contamination causée par la promiscuité ;
- le patronage des prisonniers libérés ;
- le travail ou profit des victimes ; et
- la nécessité du système préventif plutôt que répressif.

En 1810, le premier code pénal français voit le jour, il est appelé code
napoléon et est influencé par les idées de l’anglais Jérémie BENTHAM, mais
l’autoritarisme de l’époque permet la réapparition de quelques peines abolies en
1791. Ce code fixe la fourchette de la peine, c’est-à-dire détermine le minimum
et le maximum.

Il influence le droit belge et aura des répercussions en droit congolais.

On y trouve quelques principes :


- la pure construction juridique ;
- la conception abstraite et rationnelle d’un criminel désincarné ;
- le délit demeure une pure entité ;

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Cours de Droit Pénal Général 2013

- la responsabilité est objective : la peine est conforme à la justice et


dans les limites de la justice, c’est-à-dire pas plus qu’il n’est nécessaire et pas
plus qu’il n’est juste.

D. La période pénitentiaire

Depuis 1830, l’épine dorsale du système pénal est représentée par les
pénitenciers cellulaires tels qu’ils existent encore aujourd’hui. Tout le 19ième
siècle fut dominé par la création, l’organisation, la domination et l’amélioration
des pénitenciers. Deux doctrines ont marqué l’histoire du droit pénal.

1. Les doctrines classique et positiviste

La doctrine classique est un mouvement inspiré des criminologues à la


fois philosophes et qui considère que la meilleure réaction sociale contre
l’infraction consiste dans la répression.

Les animateurs sont : BECCARIA, FEUERBACH, BENTHAM, LOCKE,


ROUSSEAU, MONTESQUIEU et VOLTAIRE. Ce courant doctrinal a élaboré un
certain nombre de principes qui, jusqu’à ces jours, continuent à régir le droit
pénal. Il en est ainsi : de la légalité des délits et des peines ; de l’utilité sociale
de la peine : la peine doit être utile et non une souffrance ; et enfin du libre
arbitre qui régit le domaine de la responsabilité pénale.

La doctrine positiviste animée par Cesare Lombroso et Enrico Ferri


considère que la priorité doit être accordée à la défense de la société au besoin
par l’élimination du délinquant pour le maintien de l’ordre social. Il faut
l’éliminer parce qu’il est un danger pour cet ordre social. Le libre arbitre est
rejeté au profit du déterminisme. En effet, pour cette doctrine, la criminalité est
déterminée par certains facteurs (hérédité, milieu, profession) positifs,
déterminables. Pour les positivistes, le délinquant qui commet une infraction
est tenu d’en répondre non pas tellement parce qu’il est en faute, mais
simplement parce que la société doit se défendre. Lorsque la peine ne suffit pas,
il faut assurer au délinquant les mesures de sûreté.

2. Ecole anthropologique et sociologique

Créée en Italie en 1876, elle a introduit la méthode des sciences


expérimentales, d’observation dans l’étude de la criminalité.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est ainsi que pour LOMBROSO Cesare, FERRI Enrico et GAROFALO


Raphaël, pour commettre une infraction, il y a des facteurs endogènes,
organiques et biologiques rattachés à la constitution psycho-psychique du
délinquant, comme il y a des facteurs exogènes naturels ou sociaux inhérents
en milieux physique et social dans lesquels a vécu ou vit le délinquant. Pour les
causes endogènes, on rencontre : le criminel né et le criminel passionnel. Pour
les causes exogènes, on trouve : le criminel d’occasion, le criminel d’habitude et
le criminel aliéné.

Cesare Lombroso analyse ces criminels comme suit :

Les criminels nés : Il existe trois catégories de criminels nés qui sont.

D’abord, il y a des grands criminels nés : ceux qui ont des signes
anatomiques et morphologiques. Exemple : Oreilles écartelées en forme d’anse,
yeux enfoncés et obliques, pommettes saillantes, fronts étroits, cheveux
abondants, etc. Il y a ensuite des criminels qui ont des stigmates biologiques et
fonctionnels ; dans ce sens, il y a anomalie de la sensibilité tactique. Il y a
enfin, ceux qui ont des stigmates philosophiques : ce sont les criminels qui ont
une insensibilité morale, l’imprévoyance dans l’exécution et ils sont vaniteux.

Ces criminels sont caractérisés par leur précocité et leur incorrigibilité,


leur prédisposition innée restent et demeurent une menace pour la société.

Le criminel passionnel : c’est un être sanguin de tempérament nerveux,


d’une sensibilité exagérée, exacerbée et déséquilibrée. Ce criminel a une vie
honnête et réglée lorsque l’ouvrage psychologique le jette par passion contre les
personnes. Emu et bouleversé avant son crime, il ne sait ce qu’il fait au cours
de l’infraction et est pris de remords lorsqu’il réalise la gravité de son acte et
tente souvent de se donner la mort. Non seulement qu’il avoue le fait qu’il a
commis, mais aussi, il est pris de remords et ne présent aucun obstacle au
traitement en dehors ou dans le pénitencier.

Et d’après FERRI, il n’est pas un danger social futur. Loin de présenter


une physionomie de criminel né, il a généralement des beaux traits et présente
une physionomie anti-criminelle.

Le criminel aliéné : les criminalistes italiens confondirent les fous


moraux et les criminels nés. Les fous moraux sont atteints d’une folie morale,
maladie mentale causée par une maladie congénitale et d’une façon acquise de
l’absence du sens moral souvent couplé avec les apparences d’un raisonnement
normal. En fait, les vrais aliénés sont une exagération du criminel né et leur
seule différence et constituée par des signes pathologiques de leurs maladies.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Les criminels d’occasion : ce sont les circonstances qui les conduisent


par suite de la faiblesse du sens moral à commettre une infraction. La sanction
à retenir contre ces criminels doit éviter d’en faire des professionnels en évitant
la promiscuité avec des prisonniers endurés. Pour les mineurs de dix-huit ans,
il conviendra d’appliquer la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection
de l'enfant qui traite des mécanismes à préconiser à leur égard, lorsqu’ils sont
présumés auteurs d’une infraction.

Criminel d’habitude ou professionnel : il commet généralement


l’infraction contre la propriété dans son jeune âge entraîné par les mauvais
compagnons et victime de sa propre faiblesse ou de l’imprévoyance de ses
parents.

3. Système pénal et préventif de l’école italienne

Le système classique fondé sur le libre arbitre ayant échoué


lamentablement, les italiens en concluent que la société ne doit pas se laisser
hypnotiser par le délit et le passé du délinquant, mais doit plutôt se préoccuper
du délinquant et de son présent. Il faut rappeler que dans le système classique
c’est la pénitence qui prévalait.

Le châtiment est remplacé par les sanctions et il convient de traiter les


délinquants comme des malades sociaux et même de leur assurer l’hygiène
sociale en visant les causes de la criminalité avec un système préventif
généralisé. En effet, la politique criminelle d’un Etat doit être la prévention de la
commission des infractions parce que la prise en charge des délinquants par
l’Etat coûte très chère (le logement, la nourriture, l’hygiène, …). D’où la
nécessité des mesures préventives par rapport à la répression.

A la suite de Lombroso, Enrico FERRI indique les mesures préventives à


adopter :
- l’organisation contre le vagabondage ;
- la lutte contre l’excitation des mineurs à la débauche ;
- l’interdiction de mariage et de reproduction aux dégénérés (aliénés).

Exemple : En Allemagne Nazie, on a appliqué cette mesure pour éviter


qu’il y ait un nombre croissant des dégénérés.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Critique de l’école italienne anthropologique et sociologique

L’école italienne a eu le mérite d’introduire la méthode scientifique dans


l’étude du phénomène criminel. Elle a prouvé la fausseté des notions abstraites
et juridiques qui essayaient de saisir le criminel dans sa réalité intrinsèque,
notions qui demeurent à la base d’une grande partie des législations pénales
surtout dans l’application pratique.

Aussi, a-t-elle consacré la nécessité de l’individualisation de la peine et


donné une impulsion nouvelle à la théorie préventive de la criminalité.
Cependant, sa classification des criminels en catégorie a été discutée et
critiquée comme dépourvue des preuves scientifiques. Toute la théorie des
stigmates indiquerait tout au plus une prédisposition à la criminalité, mais ne
l’occasionne point. Le positivisme philosophique inspirant le législateur et la
pratique pénitentiaire et la criminalité augmentant, il faut se souvenir que la
défense sociale ne doit pas profiter exclusivement à la société, mais tenir aussi
compte de l’intérêt du délinquant, personne humaine, mais ne méritant pas
d’être sacrifié au totalitarisme d’un Etat jaloux d’une trop grande sécurité.

Le décret du 30 janvier 1940 proclame le code pénal congolais. Il


reprend les décrets du 26 mai 1888 et du 27 avril 1889, lesquels avaient été
coordonnés par arrêté du Secrétaire d’Etat belge le 19 décembre 1896. Et
monsieur WALEFFE qui était chargé du rapport sur le projet du décret du 30
janvier 1940 décriait déjà à l’époque que le code pénal congolais est la partie la
moins bonne de toute la législation congolaise, alors que tant de lois du Congo se
distinguaient par leur originalité, leur caractère pratique que certains avaient
devancé et de beaucoup, le progrès de la science juridique contemporaine.

Sauf que ce code pénal est une œuvre sommaire accomplit hâtivement
au début de l’installation de l’Etat Indépendant du Congo et qui n’a reçu depuis
que peu de modification substantielles.

4. La défense sociale nouvelle

Depuis la deuxième guerre mondiale, apparaissent des idées nouvelles


qui humanisent le sort du délinquant, envisagent son traitement et les
possibilités de sa réinsertion dans la société. La peine de mort recule, les
châtiments cruels tendent à disparaître parce qu’ils sont inhumains et
dégradants.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le mouvement de défense sociale nouvelle animé par GRAMATICA et


MARC ANCEL est à l’avant-garde de ce combat pour un droit pénal qui
considère que la défense de la société doit passer par celle de l’homme dans ses
possibilités de relèvement. En effet, la défense sociale nouvelle rejette l’idée qui
consiste à défendre la société contre les délinquants en les éliminant.

L’objectif du droit pénal, de la sanction en l’occurrence doit consister à


l’amendement, l’amélioration, la resocialisation du délinquant. Ceci, pour éviter
la récidive du délinquant.

Toutefois, ce mouvement subit de plus en plus des critiques suite à


l’échec de la prison qui est unanimement admis. Un délinquant a commis une
infraction, il doit être puni. Bref, il s’agit d’un retour de plus en plus prononcé
vers la dimension répressive et rétributive de la sanction. Néanmoins, en
attendant de voir quelle ampleur prendre cette orientation, nous pouvons
affirmer que la resocialisation du délinquant demeure l’objectif le plus affirmé
du droit pénal contemporain.

En conclusion, on peut dire que l’histoire du droit pénal nous montre les
progrès accomplis dans ses aspects fondamentaux :
 au niveau de la loi pénale : il y a l’avènement du principe de la légalité des
délits et des peines ;
 au niveau de l’infraction : elle cesse d’être une lésion privée pour devenir une
atteinte à l’ordre intéressant toute la société ;
 au niveau du délinquant : il doit être une personne responsable et donc
amendable. La responsabilité collective devient individuelle ;
 au niveau de la sanction : elle ne peut plus se limiter à la simple vengeance
ou à l’élimination, mais doit permettre l’amélioration et la réinsertion sociale
du délinquant. C’est pourquoi, elle doit être individualisée.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe II. LES CARACTÉRISTIQUES DU DROIT PÉNAL

A ce niveau de notre analyse il va falloir traiter des questions suivantes,


à savoir :
- l’environnement et contenu du droit pénal ;
- la nature, et l’importance du droit pénal ;
- la définition du droit pénal.

A. L’ENVIRONNEMENT ET CONTENU DU DROIT PÉNAL

Pour comprendre le droit pénal, le plus simple est de dire ce qu'il n'est
pas avant de traiter de ce qu’il comporte : l’environnement et le contenu du
droit pénal.

I. L’ENVIRONNEMENT DU DROIT PENAL.

L’environnement du droit pénal est constitué de plusieurs disciplines


qui entretiennent des rapports plus ou moins étroits. La première discipline que
l’on peut citer est d’abord la politique ensuite la politique criminelle ; alors que
les autres disciplines sont philosophiques, juridiques et même des sciences
criminelles.

1. Le rapport entre le droit pénal et la politique

a. Le droit pénal et la politique

Le Droit pénal défend globalement les valeurs de la société, puisqu’il


assorti ses violations de sanctions pénales. Le Droit pénal entend assurer la
protection de l’ordre public. Il se situe donc au cœur des préoccupations
politiques essentielles. La difficulté en la matière est celle de toujours
rechercher l’équilibre à établir entre deux valeurs qui sont la sécurité et la
liberté ; les deux étant nécessaires. Alors cet équilibre n’est pas assuré de la
même façon selon le système politique dans lequel on vit.

Dans un Régime totalitaire : c’est la société qui prime sur l’individu, dès
lors l’interdit pénal est la règle et la liberté l’exception. Ces régimes reposent sur
l’idée que tout ce qui n’est pas permis est interdit.

Dans un Régime libéral et ou démocratique : la société est régie par la


notion d’Etat de Droit. Ces sociétés sont dominées par le plus grand principe en
matière pénale : la légalité.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

On parle alors de la légalité des délits et des peines. Ce qui suppose


qu’un individu ne peut être condamné pour un fait qui ne constituait pas une
infraction au moment de sa commission ; ni subir une peine qui n’était pas
prévue préalablement. Donc en résumé, le principe de la légalité exige que
l’incrimination et la sanction pénale soient préalablement prévues par un texte
de loi, une norme pénale.

Dès lors, dans ces systèmes libéraux ou démocratiques, l’interdit pénal


devient l’exception et la liberté le principe.

b. Le droit pénal et la politique criminelle

La politique criminelle est entendue comme l’élaboration consciente et


méthodique des moyens adoptés par la société pour combattre la criminalité.
Elle doit être perçue à la fois comme un art et comme une science explicative,
répressive et préventive.

Elle est, en effet, une réflexion qui recherche à partir du phénomène


criminel, une identification des moyens qui doivent être mis en œuvre pour
lutter contre la criminalité. Elle est l’action organisée par l’Etat dans le domaine
de la lutte contre la criminalité. Il faut noter que cette action ne se limite pas
seulement à la répression. En plus des moyens répressifs, cette action
comprend les mesures préventives exercées soit sur le milieu social, soit sur les
individus dans le but de la lutte contre la criminalité.

Le droit pénal est donc l’un des instruments essentiels de la politique


criminelle, mais il n’est pas toute la politique criminelle, c’est-à-dire, celle-ci
englobe celui-là. A côté de la politique criminelle, le droit pénal entretient des
rapports avec d’autres disciplines et même celles philosophiques.

2. Le droit pénal et les disciplines philosophiques

Deux disciplines entretiennent les rapports avec le droit pénal, à savoir :


la métaphysique et la morale.

a. Rapport entre le droit pénal et la métaphysique

Ce rapport s’observe dans la compréhension et l’acceptation par tous de


la sanction pénale. En effet, la métaphysique donne une explication
fondamentale à la répression pénale qui est un acte de violence. La
métaphysique explique la répression en se plaçant à la fois du côté de la société
et du côté du délinquant.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

A la société. La métaphysique reconnaît le « jus puniendi » (le droit de


punir). Ce jus puniendi ne consiste pas en une vengeance ; il est plutôt fondé
sur l’idée d’utilité sociale. C’est qu’en effet, le membre de la société qui viole
l’une de ses règles fait naître dans ladite société ce jus puniendi, cette nécessité
de sanction.

Au délinquant. De la même manière, lorsqu’on s’intéresse au


délinquant, la métaphysique donne l’explication de la répression pénale qui
trouve son fondement dans l’idée de responsabilité individuelle qui est liée à
l’idée de faute qui suppose à la fois la liberté et le discernement. En d’autres
termes, les métaphysiciens reconnaissent à la personne humaine un certain
champ d’action dans lequel l’individu exerce son libre arbitre, sa souveraineté.

Dans l’exercice de ce libre arbitre, l’individu accepte d’engager sa


responsabilité et ne doit pas s’étonner de la réaction de la société.

b. Rapport entre le droit pénal et la morale

Le droit pénal, se distingue aussi de certaines matières proches, comme


la religion et la morale, qui sont des disciplines normatives. Elles édictent
toutes, des normes de comportement. D'ailleurs, ce n'est pas innocent, si l’on
constate que les dix commandements de la bible, recouvrent le droit pénal : "
Tu ne tueras point". Le Droit pénal entretient donc des liens avec la religion et
la morale. Aussi, constate-t-on que la procédure pénale est inquisitoriale, lors
de l’une des phases, ce qui date du Pape innocent III.

Cependant, ces matières divergent dans différents aspects. En effet, le


but de la religion est d'améliorer la relation entre les individus et Dieu. Ce qui
n’est pas le cas pour le Droit pénal. La morale a pour but l'amélioration ou
l'épanouissement de l'homme. Le droit pénal, s'intéresse plus à la société. Ce ne
sont pas les mêmes moyens qui sont utilisés partout. En religion, la sanction la
plus forte est l'excommunication, venant du Vatican. Dans le cadre de la
morale, la sanction est aussi morale. Une autre différence, et non la moindre,
est la source de la sanction : l'une vient de l'Etat et l'autre non.

Disons que le point commun est assez évident et repose sur la notion de
jugement de valeur. En effet, la morale et le Droit pénal sont amenés à poser un
jugement sur le comportement d’une personne par rapport à des valeurs.

Néanmoins, elles ne se confondent pas et Maurice Garçon l’avait très


bien exprimé en comparant la morale et le Droit à deux cercles concentriques
qui se chevauchaient partiellement. Cela signifie que sur un certain nombre de
points, le droit rejoint la morale.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Concrètement, le champ d’action de la morale est à la fois plus grand et


plus petit que le champ d’action du droit pénal parce qu’il existe des faits qui
sont moralement punissables, mais qui ne sont pas pris en charge par le droit
pénal et réciproquement. Exemple : la chasse des gibiers pendant une période
interdite, la conduite sans permis de conduire ou le fait pour un conducteur
qui voit le feu rouge de continuer à rouler. Ces faits sont punissables par le
droit pénal et non par la morale.

Inversement, le fait pour une personne de proférer des mensonges ou de


s’endetter et ne pas désintéresser ses créanciers : moralement tous ces faits
sont choquants, mais pourtant, non punissables par le droit pénal comme
infractions.

Mais, le droit pénal et la morale se rencontrent à un point (intersection)


où plusieurs comportements sont sanctionnés par les deux disciplines.
Exemple : Vol, assassinat, …etc. En conclusion, le droit pénal est le
prolongement de la morale s’agissant de certains comportements, mais il
déborde le champ d’action de la morale, car il prend en charge d’autres faits qui
ne sont pas réprimés moralement.

3. Le droit pénal et les sciences criminelles

Les autres branches criminelles qui entretiennent des rapports avec le


droit pénal sont : la criminologie, la criminalistique et la sociologie du droit
pénal.

a. La criminologie

Laconiquement définie comme une science du phénomène criminel, la


criminologie englobe en réalité diverses disciplines. En effet, elle se compose
de :
 la biologie criminelle qui permet d’observer les caractères héréditaires du
criminel ;
 l’anthropologie criminelle qui détermine les caractères somatiques,
anatomiques ou physiologiques du délinquant ;
 la psychologie criminelle qui observe le comportement, les tendances et les
faits psychiques du criminel ;
 la psychiatrie criminelle qui permet de déterminer les anormalités mentales
du délinquant.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Par ces diverses disciplines, la criminologie cherche à comprendre


et à expliquer le phénomène criminel, à découvrir les causes, les origines
du crime et la personnalité de l’auteur en s’efforçant d’appréhender ses
mobiles pour dégager ensuite les lois naturelles qui le gouvernent. Elle va
même au-delà de ces préoccupations en cherchant à prévenir et à tarir les
sources de la criminalité. C’est l’objet de la prophylaxie criminelle.

De manière générale, la doctrine actuelle définit la criminologie comme


la science criminelle qui s’efforce de décrire, d’expliquer et de prévoir le
phénomène et le comportement délinquants dans leurs aspects généraux
et spéciaux et qui, grâce à une triple démarche clinique, préventive et
critique, tente d’appliquer les connaissances ainsi collectées à la lutte
contre le crime afin de le contenir, voire de le réduire.

Pour Stefani et Levasseur la criminologie procède par la recherche les


causes du phénomène criminel. Elle s’intéresse aux mobiles de l’infraction,
mobiles qui ont déterminé le délinquant de passer à l’acte infractionnel.

Cela étant, les études de criminologie sont utiles par ce qu’elles


permettent au droit pénal de s’appliquer. Puisque la criminologie est
essentiellement descriptive. Car, elle cherche à comprendre comment lutter
contre le phénomène criminel. Mais elle n'est pas là pour dire si c'est bien ou
mal, tâche qui revient au droit pénal.

b. La criminalistique

C’est une discipline composée parce qu’elle renferme plusieurs


branches ayant pour objet l’étude scientifique des faits qui ont entouré la
commission de l’infraction et s’intéressant à tout ce qui est trouvé sur le lieu du
crime c’est-à-dire à toutes les traces de l’infraction (par exemple : les Cheveux).

Il en est ainsi :
 de la police technique et de la police scientifique qui se chargent de découvrir
l’origine d’un cheveu, d’une tâche de sang, de la poussière ou de déterminer
l’arme du crime et utilisent la balistique pour étudier le mouvement des
projectiles ;
 de l’anthropométrie qui permet l’identification des délinquants par la
description du corps humain (photographies, mesures des parties ou organes
humains) ;
 de la dactyloscopie facilitant l’identification des malfaiteurs par l’examen des
empreintes digitales ;
 de la cryptographie qui étudie l’écriture secrète utilisant les abréviations ou
les signes convenus ;

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Cours de Droit Pénal Général 2013

 de la médecine légale qui permet de déterminer les causes ou l’heure de la


mort, les circonstances d’un viol, d’un avortement ou d’une blessure ;
 de la toxicologie qui renseigne et détermine la nature, la quantité des poisons
ayant entraîné la mort.

Le rapport entre la criminalistique et le droit pénal se situe donc dans le


domaine de la preuve et l’identification de l’infracteur.

c. La sociologie du droit pénal

C’est une discipline qui s’intéresse à la détermination des causes et des


conséquences de l’élaboration de la loi pénale. On parle aussi de la sociologie
criminelle. Elle étudie donc les facteurs criminogènes dans la société.

La sociologie du droit pénal explique les conditions dans lesquelles est


née une loi pénale. La sociologie du droit pénal apporte un appui important au
droit pénal notamment dans le domaine de l’interprétation d’une loi pénale.

4. Le droit pénal et les autres disciplines juridiques

Ce rapport entre le droit pénal et les autres disciplines juridiques (droit


constitutionnel, droit civil, droit administratif,…etc) se régularise par la
spécificité de la fonction exercée par le droit pénal qui consiste dans la défense
de l’ordre social. Cette fonction de défense de l’ordre social confère au droit
pénal deux caractéristiques significatives (caractéristiques répressive et
protectionniste) et de ces caractéristiques se dégage l’autonomie du droit pénal.

II. LE CONTENU DU DROIT PENAL

Le droit pénal se présente comme une mosaïque constituée des pièces et


ces pièces sont à la fois diverses et unies. On parle alors de la diversité et de
l’unité du droit pénal.

1. Diversité du droit pénal

Les diverses pièces qui forment le droit pénal. Tout au long de son
histoire, certaines branches se sont détachées du droit pénal pour déclarer une
certaine autonomie. Ces branches qui se sont détachées peuvent être
regroupées en deux catégories :
- les branches traditionnelles ; et
- les branches nouvelles.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

a. Les branches traditionnelles du droit pénal

On retrouve le droit pénal substantiel et formel. Le premier est composé


du droit pénal spécial et du droit pénal général. Le second n’a que la procédure
pénale.

Droit pénal spécial. Il étudie chaque infraction en particulier en


précisant le régime répressif de chaque infraction et ses structures et éléments
constitutifs. C'est donc la description au cas par cas des comportements
interdits par la loi pénale : le vol, l’escroquerie, l'assassinat...etc. Il convient de
noter que ce droit précède historiquement le droit pénal général parce que dès
que les humains ont convenu de vivre ensemble, le premier devoir pour cette
société a consisté à définir les comportements qui violent les règles vitales de la
société.

Droit pénal général. Il se trouve dans le livre 1ier du Code pénal. C'est
l'étude des règles générales, permettant de réprimer les infractions à la loi
pénale.

Elle concerne les règles communes aux infractions, règles qui


définissent de manière générale les grands principes de la responsabilité
pénale : la notion d’infraction, la personne punissable, les causes
d’exonération, les règles qui organisent la fixation et l’exécution des peines. On
peut les regrouper en deux grandes articulations : l’étude de l'infraction et de la
peine. Certains auteurs détachent de ces deux grandes composantes l’analyse
de la responsabilité pénale.

Procédure pénale ou droit pénal de forme. Entre la commission d’une


infraction et la décision définitive de condamnation ou d’acquittement d’un
délinquant, il y a l’intervention du juge et le déroulement d’un procès suivant
des règles dont le but est de découvrir la vérité et d’assurer l’efficacité de la
lutte contre le crime tout en sauvegardant les garanties individuelles entre
protagonistes. Ces règles vont de l'enquête sur l'infraction, l'instruction, le
jugement, l'exercice des voix de recours mais aussi les règles de l’application de
la peine. L’ensemble de ces règles forme la procédure pénale.

b. Les branches nouvelles

Celles-ci sont nombreuses et se regroupent en deux sous-catégories : la


première rassemble les branches nouvelles nées du développement de l’une des
branches traditionnelles et la seconde rassemble les branches nouvelles qui
sont nées du développement d’une idée commune des branches traditionnelles.

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1. Disciplines nées du développement d’une branche traditionnelle

Parmi les disciplines nouvelles, nées du développement d’une branche


traditionnelle, on peut citer à titre indicatif : la science pénitentiaire et quelques
parties du droit pénal spécial.

- Les sciences pénitentiaires

Ce sont des disciplines nées du développement du droit pénal général,


car elles faisaient d’abord partie de ce droit. Elles se structurent en deux
articulations : le droit pénitentiaire et la science pénitentiaire ou la pénologie.

Droit pénitentiaire. C’est l’ensemble des règles qui régissent la vie


carcérale des détenus c’est-à-dire des règles qui fixent le régime juridique et
administratif des sanctions prévues par le droit pénal. C’est l’aspect
institutionnel du traitement.

Science pénitentiaire ou la pénologie. Elle, étudie scientifiquement le


traitement curatif et préventif de la délinquance. Autrement dit elle est une
science qui a pour objet d’étudier les moyens et les méthodes susceptibles de
faire produire aux peines leur maximum d’efficacité thérapeutique tout en
assurant la prévention aussi bien générale qu’individuelle. C’est l’aspect
spéculatif, prospectif et proprement scientifique du traitement. C'est que la
pénologie étudie donc la fonction des sanctions pénales, les règles de leur
exécution et les méthodes utilisées dans leur application.

- Quelques parties du droit pénal spécial

Au fil de l’évolution du droit pénal spécial et surtout à cause de la


prolifération des textes d’incrimination, certaines parties du droit pénal spécial
se sont développées à déclarer l’autonomie vis-à-vis de ce droit.

C’est ainsi que sont nés : le droit pénal du travail, le droit pénal des
affaires, le droit pénal de l’économie réglementant le prix, le droit pénal
financier, le droit pénal de l’environnement régissant le domaine de
l’urbanisme, le droit pénal de la construction…etc.

2. Disciplines nées du développement de l’idée commune à toutes les


branches traditionnelles

Parmi les disciplines nées du développement de l’idée commune à toutes


les branches traditionnelles, on peut citer : le droit pénal des mineurs, le droit
pénal militaire, le droit pénal international et le droit pénal comparé.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

- Le droit pénal des mineurs

Il s’agit du droit pénal applicable aux mineurs de dix-huit ans. Ce droit


est né de la nécessité d’adapter aussi bien sur le plan de fond que sur le plan
de la forme, la réaction sociale contre les infractions, à la situation particulière
des mineurs délinquants. En droit congolais, nous estimons que le siège de la
matière était, par le passé, le décret du 06 décembre 1950 sur l’enfance
délinquante, décret modifié par l’ordonnance-loi n°78-016 du 04 juillet 1978.
Mais, depuis quelques années, il nous parait tout à fait logique de soutenir que
la matière est organisée par la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l'enfant qui a été promulguée et publiée au Journal officiel de la
République et est entrée en vigueur à la même date.

A notre avis, ce texte consacre les principes généraux applicables


particulièrement dans le cadre répressif impliquant les mineurs de dix-huit
ans. On y trouve notamment les règles de protection des mineurs victimes et
celles applicables aux mineurs délinquants. Ce qui nous permet d'évoquer déjà
l'avènement d'un droit pénal autonome, propre aux mineurs.

- Le droit pénal militaire

Le droit pénal militaire est une branche spéciale du droit criminel ayant
pour objet de prévenir par la menace et au besoin de réprimer par l’application
de différentes sanctions (peines ou mesures de sûreté), les actions ou inactions
susceptibles de troubler l’ordre public dans les rangs des forces armées de la
République. Il présente cette particularité d’avoir une organisation, une
compétence et une procédure propres et variables selon les contingences
(période du temps de paix ou période troublée)3.

- Le droit pénal international

Défini comme « la branche du droit criminel qui règle l'ensemble des


problèmes pénaux dépassant les limites des compétences nationales », le droit
pénal international est aujourd'hui une matière composée de deux ensembles à
la fois proches et distincts.

3. Norbert LIKULIA BOLONGO, Droit Pénal militaire Zaïrois, T1, l’organisation et la compétence des juridictions des Forces
Armées, Paris, LGDJ, 1977, p.1
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le premier ensemble se rapporte au Droit d’extradition et autres


procédures sur les collaborations bilatérale, multilatérale ou régionale en matière
pénale notamment la reconnaissance et l’exécution des jugements, les procédures
d’enquêtes et la recherche de preuves, (le mandat d’arrêt européen) qui concerne
les crimes internationaux mais aussi les infractions tant internationales que
celles de droit commun présentant un élément d'extranéité. Il est né de l’idée qu’il
convient d’organiser une sorte de coopération entre les Etats pour lutter avec
efficacité contre le phénomène criminel, lequel phénomène ne fait que
s’internationaliser.

Ce premier élément complique en fait la répression parce qu'il met en


présence plus d’un État. Abordant dans un premier temps la compétence de la
loi pénale nationale de façon à déterminer précisément les actes et les
personnes susceptibles d'être jugés par les juridictions pénales nationales, cet
ensemble traite ensuite de l'entraide pénale internationale (ensemble des actes
et procédures par lesquels un État apporte son concours aux poursuites
pénales engagées par un autre État). Il aborde enfin l'effet des jugements
répressifs étrangers pour déterminer dans quelle mesure ceux-ci peuvent être
positivement ou négativement pris en compte par un autre État.

Le second ensemble constitutif de la matière est plus récent : il


concerne ce que l'on appelle le droit international pénal. Il se concentre
exclusivement sur la répression des crimes internationaux et sur les moyens
nécessaires à la répression de ces crimes. Il relève davantage du droit
international public et sa conception est liée à la justice rendue par les
juridictions internationales (tribunaux militaires de Nuremberg et Tokyo,
tribunaux pénaux internationaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, la
Cour Pénale Internationale), mais aussi purement nationales voire celles
internationalisées (tribunaux pénaux spéciaux de sierra-Léone, du Liban, du
Timor leste, du Cambodge, de l’Irak… etc.) sur les crimes internationaux (le
génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre...etc.).

- Le droit pénal comparé

Il y a pour objet la confrontation de divers droits répressifs dans le but


d’en tirer les enseignements ou des emprunts à des fins législatives ou
scientifiques. Il est considéré comme source d’un droit pénal universel.

2. L’unité du droit pénal

L’unité de ces différentes branches est réalisée par deux facteurs qui
sont communs à toutes ces branches. Ces facteurs sont l’objet et la politique
législative qui sont les mêmes pour toutes ces branches.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

L’objet de toutes ces branches est, en effet, d’une part le crime


(l’infraction) et d’autre part la sanction pénale ou plus généralement la lutte
contre la criminalité.

La politique législative est la conception générale que le législateur se


fait du phénomène criminel et de la réaction sociale.

B. LA NATURE DU DROIT PÉNAL

On verra ici 3 aspects:


- un droit sanctionnateur ;
- un droit mixte ; et
- un droit autonome.

I. DROIT SANCTIONNATEUR

Le droit pénal s’applique pour punir. Et c'est sa spécificité, c'est ce qui


fait sa force, c'est aussi ce qui explique qu'il y a du droit pénal partout. On va
faire appel au droit pénal, car il est sanctionnateur. C’est ce qui fait qu’il y a
aujourd'hui explosion des droits pénaux techniques. Exemple : droit pénal des
affaires, du travail, de la consommation, de l'environnement, commerce... etc.

Il est de ce fait un Droit interventionniste. L’on constate ainsi que le


droit pénal intervient dans les domaines des autres branches du droit afin de
protéger les valeurs fondamentales de la société. C’est notamment : le droit
civil, le droit commercial et économique, le droit foncier, le droit administratif et
constitutionnel, le droit fiscal, le droit maritime, le droit coutumier, le droit des
transports, les finances publiques, le droit du travail et la sécurité sociale, le
droit des relations internationales, le droit du commerce international, le droit
des organisations internationales, etc.

Gendarme du droit, le droit pénal qualifié par certains auteurs de droit


criminel vient au secours de certaines règles de fond d’une grande importance
sociale que les simples prescriptions civiles sont, en l’état actuel des mœurs,
impuissantes à faire respecter. Dès lors, cette position d’interventionniste du
droit pénal dans les domaines prioritairement réservés aux autres branches de
droit en fait le droit des droits.

Droit de répression et de protection. Lorsque tous les mécanismes de


sanctions prévus dans les différents domaines (de la société) ne parviennent à
mieux sécuriser une valeur fondamentale de la société, le droit pénal intervient
avec sa gamme de sanctions pénales contraignantes ou coercitives.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

PORTALIS considère à ce sujet que « les lois pénales, sont moins une
espèce particulière des lois que la sanction de toutes les autres ».

Le droit pénal assure la protection des valeurs de la société ; en ce sens :


la science, la technologie, l’information, l’éducation, les œuvres intellectuelles et
artistiques, l’innovation, la pensée, la libre circulation des personnes, le
gouvernement de la cité, les modes démocratiques d’accession au pouvoir, la
garantie des droits des personnes face aux gouvernants et au regard de leur
participation à la direction de la chose publique. C’est que l’économie, la
technique, la médecine, l’agronomie, la sociologie, la science politique, etc ; ne
peuvent mieux évoluer sans que l’on retrouve à leurs cotés un système pénal
efficace leur assurant la garantie et la protection, au-delà de leurs propres
mécanismes de protection.

Au demeurant, il est un Droit de renforcement. Il convient de relever que


le droit pénal renforce les autres règles de droit. Il permet et facilite leur respect
par son existence ainsi que son efficacité.

Lorsque les règles édictées en vue d’une vie équilibrée en société ne


suffisent pas pour leur respect, le droit pénal intervient avec sa gamme de
sanctions contraignantes : la peine de mort (comme c’est le cas dans les pénaux
de certains Etats), les travaux forcés, l’emprisonnement à perpétuité ou à
temps, l’amende, etc.

II. DROIT MIXTE

Il existe en droit la distinction entre droit public et privé. Le droit privé,


c'est l'étude des rapports entre les personnes privées, les gens.

Par certains aspects, le droit pénal évoque le droit public, parce que la
peine est infligée par la société au nom de l'Etat. Ceci est vrai puisque d’une
part c'est l'Etat qui met en prison un condamné. Le parquet représente la
société et par conséquent, l'Etat. D'un autre côté, la plupart du temps
l'infraction intervient entre deux personnes privées : le cas de monsieur A qui
tue sa femme B. Au départ, le contentieux est privé. Ensuite et surtout, le droit
pénal, relève des juridictions judiciaires, non pas celles administratives.

En principe, tous les magistrats appartiennent au pouvoir judiciaire. Et


surtout, les raisonnements du droit pénal, sont des raisonnements privatistes.
Mais, de ce fait, le droit pénal est-il de droit privé ou public.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Il est pourtant une lapalissade connue de tous que d’une part, le droit
pénal ressemble au droit public dans l’autorité sanctionnatrice, mais que
d’autre part, il se rapporte au droit privé dans les préjudices causés. A cet effet,
quelles peuvent être les conséquences de ces caractéristiques du droit pénal ?

Ces caractéristiques définissent le particularisme ou encore l’autonomie


du droit pénal et font que celui-ci ne peut être classé ni dans le droit public ni
dans le droit privé.

Il existe encore un débat autour de cette autonomie du droit pénal. Une


partie de la doctrine soutient la thèse du classement du droit pénal dans le
droit public en avançant quatre arguments :
 le droit pénal traite des rapports entre l’Etat et les individus ;
 la répression des infractions est une fonction de la souveraineté de l’Etat ;
 lorsqu’une infraction est commise, ce sont les organes de l’Etat qui sont
chargés de poursuites et de la répression ;
 l’auteur de l’infraction est poursuivi et jugé au nom de la société (l’Etat) et la
sanction intervient essentiellement pour rétablir l’ordre social troublé.

Une autre partie de la doctrine classe le droit pénal dans le droit privé et
avance également quatre arguments :
 le droit pénal poursuit essentiellement comme objectif la défense des droits
subjectifs des individus (par exemple droit au patrimoine) ;
 une des préoccupations majeures du droit pénal est le souci de la protection
de la victime de l’infraction ;
 ce sont les mêmes magistrats qui composent les juridictions civiles et
répressives en vertu du principe de l’unité des juridictions civiles et pénales ;
 dans nombreuses hypothèses, le droit pénal met en œuvre les concepts du
droit privé, et pour la définition de ces concepts, le droit pénal se réfère
souvent au droit civil.

La troisième thèse est intermédiaire : c’est celle qui soutient que le droit
pénal ne peut être classé ni dans le droit public ni dans le droit privé et ceci
pour deux raisons :
 d’abord, il faut remarquer que chacune de deux premières thèses avance des
arguments qui, pour la plupart, sont défendables. Les deux premières thèses
s’annulent ;
 ensuite, précisément à cause du rôle sanctionnateur qu’il joue vis-à-vis des
autres branches juridiques, il apporte son soutien tant au droit public qu'au
droit privé. Par conséquent, aucune de ces deux disciplines ne peut
s’accaparer du droit pénal à titre exclusif.

C'est justement ce qui renvoi à sa nature autonome.


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Cours de Droit Pénal Général 2013

III. DROIT AUTONOME

L'autonomie du droit pénal est importante. Bien sur, le droit pénal a


ses notions, ses règles, mais chaque droit a ses notions et ses concepts...

L'autonomie du droit pénal signifie que le droit pénal est libre d'adopter
ses propres définitions pour d'autres notions empruntées à d'autres droits
(public ou privé). Le droit pénal a plusieurs occasions d’exprimer cette
autonomie notamment en matière d’interprétation de la loi pénale.

Il arrive souvent que le droit pénal utilise des termes empruntés soit au
droit public, soit au droit privé sans pour autant leur accorder la même
signification qu’ils ont dans leurs disciplines respectives. D’abord, il en est ainsi
du terme Fonctionnaire. En effet, en droit administratif, c’est tout agent qui
entre dans le personnel de carrière du service public de l’Etat. C’est ainsi qu’en
droit administratif, le ministre n’est pas fonctionnaire. En revanche, en droit
pénal, est fonctionnaire tout agent public (y compris le ministre). Ensuite, l'on
peut invoquer la définition du domicile.

Cette dernière vient du droit civil. Mais par la suite, on a dû créer


l'infraction de violation de domicile. En droit pénal donc, le domicile, c'est tout
endroit ou l'on se sent chez soi. Cela veut dire que 3 maisons sont des
domiciles au sens du droit pénal. Une tente aussi est un domicile. Donc sa
définition est autonome en droit pénal.

Le droit pénal est cependant limité. L'autonomie du droit pénal est


quand même en recul, notamment sur le point de l'action civile : l'action civile
est l'action en réparation du dommage causé par une infraction pénale.
Exemple : je donne un coup de point, j'aurais commis une infraction et aussi
une faute civile, pour avoir cassé les lunettes de la victime. L'action civile,
répare le préjudice subi par la victime. On peut l'exercer devant les juridictions
civiles principalement et pénales accessoirement.

C. L’IMPORTANCE DU DROIT PÉNAL

Dans le cadre de la formation de juriste, il convient de noter que le Droit


Pénal Général est l’une des branches du droit qui assurent la protection des
valeurs fondamentales au sein de toute société. En fait, la vie, l’intégrité
physique, la liberté, l’honneur, le patrimoine, la vie professionnelle, le crédit
dans les affaires, la gloire dans la cité, la foi publique, la paix et la sécurité de
l’humanité…etc, sont efficacement protégés par le droit pénal.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Autant dire que le droit pénal constitue une arme de gros calibre
destinée à maintenir le déroulement des activités et des entreprises des
membres de la collectivité dans un cadre régulé et ordonnancé. Il est le
dispensateur de certitude et de sûreté. C’est donc une discipline qui assure
essentiellement le fondement de tout système dans un Etat. On ne peut
concevoir une certaine garantie des droits de l’homme sans le droit pénal. On
ne peut concevoir un Etat démocratique sans le droit pénal.

On ne peut concevoir un Etat de droit sans le droit pénal. C’est le


soubassement de tout système juridique et étatique. Le droit pénal congolais
est dès lors appelé à établir la protection, l’égalité et l’affermissement des droits
des pauvres et faibles face aux riches et aux puissants.

Au sein de l’Etat, le droit pénal a pour rôle et mission de base, non


seulement de concourir à la protection des personnes et de leurs biens, en
garantissant ce que la société retient et considère comme valeurs
fondamentales ; mais aussi de favoriser et de promouvoir par la certitude de sa
sanction, le développement harmonieux de la société dans un traitement
égalitaire. Puisqu’en effet : Que l’on soit puissant ou misérable, le traitement que
réserve le système pénal aux justiciables est le même, il n’y a rien de plus
égalitaire, dans les prétoires que le banc de l’infamie 4.

Sur le plan international, la nécessité du rétablissement de l’ordre


public international a appelé l’avènement d’un droit supranational répressif.
Lequel, connaît dans sa démarche, d’importantes difficultés dans le cadre de
son efficacité. Il faudra donc que ce droit international pénal devienne
beaucoup plus autoritaire, contraignant et surtout applicable à tous de manière
égalitaire avec célérité mais sans la moindre sélectivité de tous ses justiciables :
personnes à poursuivre et même victimes à indemniser.

Comme on peut le constater, le droit pénal diffère nettement des autres


branches du droit. Il ne faut donc pas le considérer au même titre que toutes
les autres branches du droit. Il est la branche fondamentale du droit :

 Il tient à la protection de la vie de l’homme en réprimant sévèrement le


meurtre, l’assassinat, l’empoisonnement, etc ;
 il tient à la sauvegarde du (foyer) mariage en réprimant la bigamie, la
polyandrie, l’adultère, etc ; et ceci tant pour l’intérêt du couple que pour
celui de la société. Par ailleurs, le droit pénal protège l’ordre de famille en
sanctionnant l’avortement, l’attentat à la pudeur, le viol commis sur une
personne, les outrages publics aux bonnes mœurs, etc ;

4. BOLLE P.H., Le procès pénal nouveau, in R.D.P.C., 1995, p. 18


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 il assure la protection de la liberté de mouvement en sanctionnant


l’arrestation arbitraire, la détention illégale, etc ;
 il protège la propriété d’autrui en réprimant le vol, l’escroquerie, l’abus de
confiance, le cel frauduleux, le recel frauduleux, etc ;
 il protège la foi publique en sanctionnant la contrefaçon, la falsification et
l’imitation de certains signes, l’usurpation des fonctions publiques, le
port illégal de décoration, le faux en écriture et le faux témoignage, etc ;
 il protège le droit garanti aux particuliers en réprimant sévèrement les
atteintes à la liberté des cultes commises par des fonctionnaires publics
ou autres personnes ;
 il assure la protection de l’Etat en réprimant toute atteinte à la sûreté
extérieure et intérieure de l’Etat ;
 il tient à la sauvegarde de l’humanité toute entière en réprimant les
crimes internationaux parmi lesquels : les crimes contre l’humanité, le
crime de génocide, le terrorisme, les crimes de guerres, etc.

Le but du droit pénal est de faire respecter les devoirs naturels de base,
ceux qui nous interdisent de nuire aux autres dans leur vie et leur être, ou de
les priver de leur liberté et de leur propriété ; et les peines doivent servir à cette
fin. Elles ne sont pas simplement un système de taxes et de charges qui
donnent un prix à certaines formes de conduite et qui, ainsi, guident le
comportement des hommes pour leur avantage mutuel. Il vaudrait infiniment
mieux que les actes interdits par le code pénal ne fussent jamais commis. Mais,
la tendance à commettre de tels actes est la marque d’un caractère mauvais et,
dans une société juste, les peines légales ne seront infligées qu’à ceux qui
montrent de tels défauts.

La société doit donc se défendre et l’une de ses armes favorites, c’est le


droit pénal. Et comme développé ci-dessus, tantôt le droit pénal agit de manière
autonome en son sein en définissant les infractions et les peines qui lui sont
applicables ; mais, tantôt ce droit pénal agit comme sanctionnateur des règles
relevant d’autres disciplines juridiques. Il va falloir développer ces différentes
caractéristiques du droit pénal dans ce cours.

D. LA DÉFINITION DU DROIT PÉNAL

Le droit pénal est parfois appelé droit criminel en raison de la division


tripartite que connaissent d’autres pays. Ces deux expressions s’utilisent
indifféremment et sont donc synonymes. Elles signifient donc la même chose à
la seule différence que la première met en évidence la peine, et la seconde, le
crime.

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Le droit pénal a reçu plusieurs définitions à travers l’histoire. D’où, la


définition du droit pénal est à la fois difficile et multiple. Ceci s’explique par le
fait que le droit pénal comporte divers aspects qu’il n’est pas toujours facile à
ramasser dans une définition étant donné qu’on y trouve des aspects relatifs à
l’infraction, à la peine et au délinquant.

Parmi ces définitions, nous en retenons cinq :

DONNEDIEU DE VABRES définit le droit criminel comme l’ensemble des


lois qui réglementent dans un pays l’exercice de la répression par l’Etat5.

Cette définition était acceptable à l’époque où l’infraction, phénomène


criminel, ne recevait qu’une réponse répressive, c’est-à-dire, au moment où
l’infraction n’appelait que la répression. Au jour d’aujourd’hui, cette définition
est jugée incomplète et donc dépassée parce que la réaction sociale ne concerne
pas seulement la répression.

En d’autres termes, cette définition ne rend pas compte des lois de


défense sociale dont le rôle n’est pas essentiellement de réprimer les
infractions, mais plutôt d’isoler les délinquants dangereux ou de les soigner
lorsqu’ils présentent quelque anormalité.

MERLE et VITU soutiennent quant à eux que : le droit pénal est


constitué de l’ensemble des règles juridiques qui organisent la réaction de l’Etat
vis-à-vis des infractions et des délinquants, et qui traduisent en normes
obligatoires les solutions positives appliquées par chaque nation au problème
criminel6.

Ces auteurs ne parlent donc pas de la répression. A la place de la


répression, ils utilisent le concept de réaction. Dans la réaction sociale, on
rencontre tant la répression que la prévention. Ces auteurs ont ainsi estimé que
la meilleure façon de définir le droit pénal était d’en décrire le contenu de
manière détaillée.

Georges MINEUR considère que : Le droit pénal est la seule base possible
d’une bonne justice répressive. Celle-ci ne peut se satisfaire ni des vagues
notions personnelles de l’équité ni surtout des recherches des fins
administratives d’un bon rendement économique ou d’un ordre basé sur une
crainte aveugle de répression7 ;

5. DONNEDIEU de VABRES, Traité élémentaire de droit criminel et de la législation pénale comparée, 3e éd., Paris, n°1.
6. MERLE Roger et VITU André, Traité de droit criminel, Cujas, Paris, 1967, n°85.
7. MINEUR Georges, Commentaire du droit pénal congolais, 2e éd., Larciers, Bruxelles, 1953.
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NYABIRUNGU pense que : Le droit pénal est la branche du droit public


qui traite des infractions et des peines et dont l’objet essentiel est de déterminer
les faits punissables et de fixer les sanctions qui doivent leur être appliquées 8.

Nous estimons avec LIKULIA que le droit pénal, est la branche


spéciale du droit criminel ayant pour objet de prévenir par la menace et
au besoin, de réprimer par l’application des différentes sanctions :
peines ou mesures de sûretés; des actions ou inactions susceptibles de
troubler l’ordre public au sein d’une société9.

Il apparaît de cette dernière définition que l’étude du droit pénal doit se


faire autour de deux éléments essentiels ci-après : l’infraction et la sanction
pénales.

D’où :

Première partie : l’infraction ; et

Deuxième partie : la sanction pénale.

8. NYABIRUNGU-mwene-.SONGA, Traité de droit pénal général congolais, D.E.S. éd., Kinshasa, RDC, p.15.
9. LIKULIA BOLONGO, Droit Pénal militaire Zaïrois, T1, l’organisation et la compétence des Forces Armées, Paris, LGDJ,
1977, p. 1
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PREMIERE PARTIE

L’INFRACTION

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Titre Premier

LA SOURCE DE L’INFRACTION :
La norme pénale
Le droit pénal est la discipline normative par excellence. Seule la « loi »
en détermine l’étendue et les limites, et les autres sources du droit, à savoir : la
coutume, la jurisprudence, l’équité, même les principes généraux du droit, si
utiles dans l’interprétation des textes, n’ont aucun rôle créateur dans la
détermination des infractions et des sanctions.

C’est pourquoi, il est impérieux de connaître cette norme pénale (loi


pénale) comme elle est formulée dans les textes pertinents, d’en dégager le sens
et la portée véritable afin d’éviter des extensions abusives ou des restrictions
qui conduiraient à l’impunité, et enfin, d’en déterminer le champ d’application
aussi bien dans le temps que dans l’espace.

Ce titre comprend donc les deux articulations suivantes :


- l’identification des sources de l’infraction ; et
- l’application de la norme pénale.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre 1. L’IDENTIFICATION DES SOURCES DE L’INFRACTION

Il va falloir traiter de :
- l’inventaire des sources de l’infraction ; et
- le principe de la « légalité des délits et des peines ».

Section 1. INVENTAIRE DES SOURCES DE L’INFRACTION

Il existe d’une part les normes du droit pénal commun et de l’autre celle
du droit pénal particulier.

Paragraphe 1. Les normes de droit pénal commun

Il y a le code pénal et d’autres normes qui lui sont complémentaires.

A. Le code pénal (Décret du 30 janvier 1940)

Ce code, avec des lois additionnelles et modificatives, constitue


l’essentiel du droit pénal commun congolais. Il comporte deux livres :

Le premier livre traite des infractions et de la répression en général. Ce


livre contient 42 articles et pose les principes du droit pénal commun à
l’ensemble des infractions. Autrement dit, il porte sur le droit pénal général,
c’est-à-dire sur les règles applicables à toutes les infractions.

Il en est ainsi des règles sur les circonstances atténuantes (art. 18-19),
le concours de plusieurs infractions (art. 20), la participation criminelle (art.
21-23).

Le second livre traite des infractions et de leur répression en particulier.


C’est le droit pénal spécial. Ce livre contient 8 titres à ces jours et qui
correspondent chacun à des valeurs sociales fondamentales que la société
congolaise entend protéger de manière particulière, même à l’aide de
l’application de la peine.

B. Les normes complémentaires du code pénal

Elles ne sont pas incorporées matériellement au code pénal ; elles en


font, cependant, partie intégrante soit parce qu’elles formulent des principes
généraux sur les infractions et leur répression, soit parce qu’elles définissent
les infractions fortuitement omises, auxquelles le législateur ne pouvait penser
lors de l’élaboration du code.

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On peut citer à titre indicatif les dispositions sur l’adultère et la bigamie


(décret du 25 juin 1948), l’ivresse publique (ord. du 10 juin 1939), le
blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme etc.

C. Les caractères du droit commun

Le droit commun est la partie la plus permanente et la plus stable du


droit pénal. Il détermine les valeurs essentielles qui appellent une protection
particulière. Il s’applique de manière générale quant aux personnes et aux
biens qu’il régit.

Paragraphe 2. Les normes de droit pénal particulier

Celles-ci sont nées de la nécessité de régler des situations personnelles


et locales particulières, de protéger des biens juridiques spéciaux ou de faire
face à des besoins temporaires et variables. Elles relèvent du droit pénal
spécial. Il faut noter que certaines d’entre ces lois sont exclusivement pénales et
ont pour objet la répression d’infractions non prévues par le code pénal
ordinaire. Il en est ainsi du code de justice militaire, du code de la route, etc.
D’autres contiennent des dispositions pénales à côté des dispositions
ressortissant à d’autres disciplines, civile, commerciale, fiscale, etc.

Paragraphe 3. Rapport entre les normes de droit pénal commun et


les normes de droit pénal particulier

Le droit pénal général énoncé dans les normes de droit pénal commun
est applicable aux textes de droit particulier. Mais dans quelle mesure ?

Le décret du 22 décembre 1888 sur les peines et les fautes militaires


graves disposait en son article 19 que « les conseils de guerre appliquent aux
infractions de droit commun les peines édictées par les lois pénales ordinaires ».
De même, le code de justice militaire de 1972, en son article 389, disposait
que, moyennant certaines réserves prévues au même code, les juridictions
militaires prononcent les mêmes peines que les juridictions de droit commun,
et ces peines sont appliquées selon les principes généraux et les règles de droit
commun. Il a été jugé enfin que « les dispositions du code pénal ordinaire
s’appliquent aux infractions prévues par les lois militaires »10.

10
C.G., 14 octobre 1901, Jur. Etat, I, 163.
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Et à la suite de cette jurisprudence qui a fait long feu, la législation


er
pénale militaire a été modifiée. C’est ainsi que l’article 1 de la loi n° 024/2002
du 18 novembre 2002 portant Code pénal militaire prévoit ce qui suit : « Sous
réserve du présent Code, les dispositions du Livre Premier du Code Pénal
ordinaire sont applicables devant les juridictions militaires ».

Section 2. LE PRINCIPE DE « LEGALITE » DES DELITS ET DES


PEINES

La primauté de la norme est exprimée dans ce que nous appelons « le


principe de la légalité ». Ce principe est considéré à juste titre comme « la clé de
voûte » du système judiciaire.

Mais, étant donné que l’infraction mais aussi la sanction pénale ne sont
plus portées uniquement que par la loi et qu’il existe actuellement une diversité
de règles pénales, nous pensons qu’il serait plus exact, à la place, de parler du
principe de « normativité » ou de « textualité » des délits et des peines.

Traitons de ce principe dans son énoncé, sa justification et son contenu.

Paragraphe 1. Enoncé du principe

Ce principe signifie que les règles du droit pénal sont exprimées dans la
« loi » : seuls peuvent faire l’objet d’une condamnation pénale les faits déjà
définis et sanctionnés par le législateur au moment où l’accusé a commis son
acte, et seules peuvent leur être appliquées les peines édictées à ce moment
déjà par le législateur. L’infraction doit donc être portée par une norme pénale
qui peut être une loi, une convention, et même pour d’autres pays, un arrêté.

Le criminaliste FEUERBACH a résumé ce principe par la forme « Nullum


crimen, nulla poena sine lege » au 19e siècle, c’est-à-dire « Nul crime, nulle
peine sans la loi »11.

Roger MERLE et André VITU considèrent que, quoique savante, cette


formule est néanmoins incomplète parce qu’elle ne vise que le droit pénal de
fond (qui gère les crimes et les peines) ; alors que le principe de la légalité
s’applique également à la procédure, au droit pénal de forme. Pour ce faire, ces
deux auteurs complètent la formule : Nullum crimen, nulla poena, nullum
judicium sine lege12.

11
STEFANI (G), LEVASSEUR (G) et BOULOC (B), Droit pénal général, Précis Dalloz, 11e éd., Paris, 1980, n°116.
12
V° MONTESQUIEU, De l’Esprit des lois, Liv XI, Chap. VI, 1748 ; BECCARIA, Traité des délits et des peines, Chap. III,
1764.
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Le principe de « légalité » que nous qualifions de normativité ou de


textualité des délits et des peines est consacré en République Démocratique du
Congo par l’article 1er du code pénal : « Nulle infraction ne peut être punie de
peines qui n’étaient pas portées par la loi avant que l’infraction fut commise ».
En plus, ce principe est également internationalement consacré. C’est le cas de
la Déclaration universelle des droits de l’homme en ses articles 8 et 9.

Paragraphe 2. Justification du principe

Deux domaines sont visés : celui de procédure et celui de fond.

A. Dans le domaine de procédure

Ici, le principe en étude permet d’assurer l’équilibre entre les droits de


l’accusation et les droits de l’accusé. Cet équilibre ne peut être assuré que par
la norme, car cette dernière intervient de façon impersonnelle avant le procès et
par conséquent neutre.

B. Dans le domaine de droit pénal de fond

1. La limitation du droit de punir

La société ne peut punir sans borne et sans mesure. Le pouvoir de la


société de maintenir l’ordre doit être contenu dans certaines limites, qui
garantissent et respectent la liberté, la sécurité et l’indépendance individuelles.
Cette opposition d’intérêts du pouvoir et des individus ne trouve sa solution
que dans la loi : seule, celle-ci écarte les inégalités et l’arbitraire.

2. Le rempart contre l’arbitraire du juge

Le principe de « légalité » constitue un rempart contre l’arbitraire du


juge. En effet, il ne convient pas que le juge soit seul à décider de la
punissabilité des faits. Cela peut créer deux dangers :
- le juge, là de faire prédominer les exigences de justice et de vérité,
risque de soumettre sa démarche à son émotion, tempérament,
intérêt et son zèle ;
- l’incertitude quant à la façon dont le juge dira en définitive le droit
est de nature à créer l’insécurité juridique au sein de la population.

3. Exigence d’une meilleure politique criminelle

Il est de meilleure politique criminelle que la norme avertisse avant de


frapper, afin que dans son comportement l’agent sache à quoi s’en tenir.

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La norme pénale exerce ainsi une certaine influence sur la psychologie


de l’agent qu’elle informe de l’interdit, et de la menace qui pèse sur lui en cas de
transgression. Elle joue un rôle à la fois éducatif et préventif (intimidant).

En effet, la norme se présente comme un code de valeurs essentielles


pour la survie de la société. Elle joue donc ici un rôle de l’instituteur de la
société. En plus de ce rôle, la elle exerce également une pression sur tous les
membres de la société. C’est cette pression qu’on qualifie de fonction préventive
ou intimidante qui réalise la prévention individuelle et/ou collective.

Paragraphe 3. Le contenu du principe

Il existe une légalité des incriminations et une autre des sanctions


pénales.

A. « La légalité » des incriminations

Les incriminations sont établies par la norme. Seuls tombent sous la


norme les faits qui, au moment où ils sont commis, sont déjà définis comme
constituant une infraction par le législateur. Ce principe de l’antériorité
obligatoire des définitions des infractions est une garantie de la liberté et de sa
sécurité juridique, car on peut valablement supposer que, dans ce cas, ces
définitions ont été élaborées sans parti pris, dans l’ignorance des personnes qui
tomberont éventuellement sous leur application.

Le principe de « légalité » trouve son application non seulement au


niveau du législateur, mais aussi au niveau du juge.

I. Pour le législateur

Le législateur a le monopole d’établir les normes pénales. Il doit établir


avec précision la liste des incriminations, c’est-à-dire le catalogue des
comportements qu’il qualifie infractionnels de manière précise en fixant les
éléments constitutifs de chaque infraction en évitant que le juge puisse les
étendre au-delà de l’esprit du législateur.

Le législateur ne doit pas édicter des dispositions rétroactives. En


d’autres termes, les dispositions qu’il prend en matière d’incrimination ne
peuvent concerner que les agissements du présent et de l’avenir.

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II. Pour le juge

- Il ne doit pas appliquer la « loi » de manière rétroactive.


- Lorsqu’il est saisi des faits, le juge doit rechercher leur qualification exacte
en droit. Autrement dit, il doit rechercher le texte incriminateur qui est
violé par le fait qui lui est présenté, s’il ne trouve aucun texte, il devra
considérer qu’il n’y a pas d’infraction.
- Le principe « légaliste » impose au juge l’obligation d’appliquer la « loi » de
manière stricte sans rien ajouter, sans rien retrancher. C’est pour cette
raison que l’analogie est écartée en droit pénal.

En effet, le juge ne peut considérer comme infraction un fait que la « loi »


ne définit pas comme tel, quelle que soit par ailleurs son appréciation
personnelle sur la valeur morale de l’acte. Il en est ainsi du suicide mais aussi
de la prostitution. En effet, quel que soit le dégoût qu’ils puissent inspirer à
cause de leur caractère immoral, ils ne sont pas à ces jours des actes
infractionnels en droit congolais.

B. « Légalité » des peines

I. Au niveau du législateur

Seul le législateur peut déterminer la nature et le taux de la peine, c’est-


à-dire seules peuvent être appliquées des peines et des mesures édictées par le
législateur au moment où l’accusé a commis son acte. En d’autres termes, le
principe « légaliste » impose au législateur l’obligation de fixer les sanctions de
manière précise dans le texte même des incriminations, c’est-à-dire, à chaque
infraction doit être rattachée une sanction précise.

II. Au niveau du juge

Le juge ne doit pas condamner un prévenu alors que la « loi » n’a pas
prévu de peine pour le comportement adopté par ce dernier, c’est-à-dire, le juge
ne peut prononcer des peines (même pas une peine complémentaire) si le texte
n’en prévoit pas. Il n’appartient pas, en effet, au juge en raisonnant, par voie
d’analogie, de suppléer au silence de la loi et de prononcer des peines en dehors
des cas limitativement prévus par la « loi ».

Lorsque le législateur a prévu une peine pour un comportement, le juge


est tenu de respecter la fourchette fixée. C’est qu’il doit nager entre le maximum
et le minimum prévus par le législateur sauf en cas de circonstances
aggravantes, atténuantes et des excuses légales. Il ne peut refuser de prononcer
une peine prévue par la « norme », sauf s’il y a cause d’exonération.

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Chapitre II. L’APPLICATION DE LA NORME PENALE

Pour mieux appliquer une norme pénale, il s’impose de la comprendre


préalablement. C’est ainsi que l’on devra procéder à :

- l’interprétation de la norme pénale ; avant d’analyser


- l’application dans le temps et dans l’espace de la norme pénale.

Section 1. L’INTERPRETATION DE LA NORME PENALE

L’étude du principe de « légalité » nous a permis de comprendre que


seuls les faits préalablement définis comme infractionnels par la norme peuvent
être punis. Il est donc essentiel que le juge sache quelle loi il devra appliquer.
C’est pourquoi il doit pouvoir l’interpréter.

L’interprétation d’une norme pénale est une opération intellectuelle qui


consiste à rechercher la portée réelle de ladite norme dans le but d’en assurer
une correcte application.

Si la norme est claire et précise, le problème ne se pose pas. Mais toute


norme doit être interprétée, car il faut assurer le passage de la règle abstraite,
qui définit l’infraction et établit la sanction, au cas concret à résoudre.
L’interprétation donne donc naissance à la jurisprudence.

Alors que les autres disciplines juridiques admettent l’interprétation


extensive, voire analogique, l’interprétation pénale est stricte. Elle connaît ses
sources et méthodes propres.

Paragraphe 1. Les sources d’interprétation

Elles sont de trois ordres :


- l’interprétation authentique ;
- l’interprétation judiciaire ; et
- l’interprétation doctrinale.

A. Interprétation authentique

Elle émane du législateur lui-même. Elle revêt une force obligatoire pour
le juge, car elle est l’œuvre de l’autorité même qui a rédigé la loi. En effet, le
législateur intervient pour donner la signification, la portée de la norme.

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Elle peut prendre deux formes :


- l’interprétation authentique contextuelle ; et
- l’interprétation authentique postérieure.

I. Interprétation authentique contextuelle

Elle prend ce nom lorsqu’elle est faite dans le texte même à interpréter.
C’est le cas de l’article 174 C.P. qui définit le souteneur. Pour fixer l’opinion sur
le terme souteneur, il le définit lui-même dans cet article. Cette explication c’est
donc l’interprétation authentique contextuelle ; l’article 212 C.P. définit
l’attentat ; art. 213 C.P. définit le complot, …

II. Interprétation authentique postérieure

Il y a cette interprétation, lorsqu’après la promulgation de la norme et à


l’occasion des difficultés qu’elle soulève, une nouvelle norme vient préciser son
sens et sa portée. Et la norme que le législateur utilise pour interpréter cette
précédente norme s’appelle norme interprétative qui fait partie intégrante de
la norme interprétée et s’impose à tous.

Il en était ainsi des dispositions finales de l’ancien accord global et


inclusif qui précisait ce qui suit au point A : « La constitution de transition est
élaborée sur base de présent accord inclusif sur la transition en R.D.C. et en fait
partie intégrante ».

B. Interprétation judiciaire

Est celle qui émane du juge, des cours et tribunaux. Elle s’appelle aussi
jurisprudence. Quand le législateur ne donne pas la signification d’un concept,
le juge peut combler ce vide.

Les juges ont comblé la signification du concept préméditation en la


définissant comme le dessein formé avant l’action de façon réfléchie, délibérée
et de sang-froid.

Cette interprétation n’a pas autorité de droit, mais de fait. Pour l’autorité
des arrêts de la Cour de cassation, deux hypothèses sont envisageables :
- en cas de renvoi après cassation, les cours et tribunaux inférieurs sont
tenus de se conformer à l’arrêt de la Cour de cassation sur le point de droit
jugé par celle-ci ;
- dans les autres cas, les arrêts de la Cour de cassation ne s’imposent pas
aux juridictions inférieures. Ils jouissent tout de même d’une autorité
morale et la pratique judiciaire démontre qu’ils ont une autorité de fait.

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C. Interprétation doctrinale

Elle émane des savants juristes qui se prononcent dans leurs écrits sur
le sens à donner à telle disposition légale. Elle n’a aucune autorité de droit,
mais une réelle autorité morale.

Paragraphe 2. Les méthodes d’interprétation

Il existe trois méthodes d’interprétation :


- l’interprétation littérale ;
- l’interprétation téléologique ; et
- l’interprétation analogique.

A. L’interprétation littérale

C’est une méthode qui a régné comme corollaire du principe de la


« légalité » à la suite des idées développées par les auteurs classiques. Elle
consiste, en effet, à rechercher la portée de la norme en s’attachant à la lettre
de la norme, c’est-à-dire, en se limitant aux termes même utilisés par le
législateur dans le texte. Il s’agit donc d’une interprétation très étroite,
restrictive, judaïque, traditionnelle qui fait du juge une simple bouche qui
prononce les paroles de la norme.

Lorsqu’il y a contradiction entre la lettre du texte et la volonté du


législateur, d’après cette méthode, la lettre du texte s’impose, l’emporte sur
l’esprit. Si le texte de la norme est obscure, le juge doit systématiquement
adopter l’hypothèse la plus favorable au prévenu en application de l’adage : « IN
DUBIO PRO REO », c’est-à-dire, dans le doute, pour le prévenu. Je solliciterai
que l’adage soit expliqué de manière la plus facile comme suit : le doute profit
au prévenu.

L’interprétation littérale trouve son fondement dans le souci d’assurer la


protection de la liberté individuelle contre l’arbitraire du juge parce que les
auteurs classiques considèrent que les textes pénaux sont sévères. Cela étant,
ils doivent être interprétés restrictivement. La pensée de ces auteurs est
exprimée dans l’adage : « ODIOSA SUNT RESTRIGENDA », c’est-à-dire, les
choses odieuses (sévères) devront être restreintes.

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La doctrine adresse deux critiques à cette méthode :


- cette méthode est une conception méthodologique inexacte parce
qu’elle sous-entend la perfection de la norme, alors qu’en réalité
tel n’est pas le cas, car on rencontre des textes contenant des
erreurs, lacunes, obscurités, contradictions que doit compléter le
juge ;
- la méthode littérale apparaît stérilisante, paralysante parce que
cette méthode fige le droit, alors que celui-ci est une réalité
dynamique qui doit s’adapter aux mouvements des faits
(politiques, sociologiques, …) qu’il régit.

Cette méthode est écartée parce qu’elle minimise le rôle que doit jouer le
juge (procéder aux adaptions nécessaires).

B. L’interprétation téléologique

C’est celle qui consiste à dégager le but de la norme, la volonté du


législateur. Elle fait prédominer l’esprit sur la lettre de la norme. Elle est aussi
appelée méthode déclarative de la volonté du législateur. Lorsqu’il y a
contradiction entre la lettre et l’esprit de la norme, celui-ci l’emporte.

I. Les principes

Pour cela, il se soumettra aux deux principes suivants :

a. La norme pénale doit être appliquée à tous les cas rentrant


dans ses termes

Le juge ne doit rien ajouter aux conditions d’existence de l’infraction ni


créer une cause justificative ou d’exonération de responsabilité non prévue par
la norme. Il en est ainsi de l’article 79 C.P. : « Quiconque a soustrait
frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est couple de vol ».

b. La norme pénale ne peut être appliquée qu’aux seuls cas


rentrant dans ses termes

C’est la conséquence de la légalité du droit pénal. Ce principe signifie


qu’un fait, ne rentrant pas dans les termes du droit pénal, ne peut être puni
que sous prétexte qu’il présente une similitude fondamentale avec un autre fait
puni par la norme qui, son impunité constituerait une lacune dangereuse pour
l’ordre public.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est en application de ce principe que l’interprétation analogique est


prohibée. L’interprétation téléologique permet de dégager tous les sens de la
norme sans rien y ajouter, ni retrancher.

Dans cette recherche, le juge tient compte, certes, de la lettre et de


l’esprit de la norme, mais aussi de la ratio legis, des travaux préparatoires, de
l’évolution sociale, scientifique et technique.

Donc, tout en étant stricte, l’interprétation pénale ne saurait être


restrictive. Elle doit sauvegarder le bon sens, la logique et permettre des
adaptations justifiées par l’ordre social actuel.

II. Les techniques d’interprétation téléologique

a. L’étude grammaticale

C’est une technique qui consiste pour le juge à commencer à dégager le


sens de la norme à partir de l’analyse grammaticale du texte, c’est-à-dire, à
partir du texte lui-même. Dans cette analyse grammaticale, les termes utilisés
par le législateur sont entendus dans leur sens ordinaire, c’est-à-dire, leur sens
usuel et normal, sauf si le législateur leur accorde un sens technique. S’il le
fait, il le dit. Lorsque l’étude grammaticale ne permet pas à découvrir le sens et
la portée de la loi, il faudra utiliser d’autres techniques.

b. La recherche de la ratio legis

La raison d’être de la norme se dégage généralement lorsqu’on situe la


norme dans le contexte dans lequel elle est intervenue. En d’autres termes, la
ratio legis se dégage lorsque le juge arrive à découvrir l’idée centrale (la
préoccupation) du législateur dans le texte. Quand on connaît l’objectif que
poursuivait le législateur en édictant une loi, on connaît donc la raison d’être de
cette loi.

c. La consultation des travaux préparatoires

Le juge se référera avec intérêt à l’exposé des motifs aux rapports des
commissions et aux interventions des rapporteurs et d’autres orateurs qui
proposent des amendements.

Toutefois, il faudrait plutôt se méfier des interventions improvisées faites


au cours des débats. Elles ne sont pas toujours œuvre de spécialiste. Et même
lorsqu’il s’agit des spécialistes, le cadre est tel qu’on ne peut toujours attendre
l’expression la plus adéquate.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

L’article 112 du code pénal ordinaire livre 2 sur la destruction et la


dégradation d’arbres, récoltes ou autres propriétés porte que « seront punis des
peines portées à l’article précédent… ». La simple étude grammaticale fera
comprendre que l’article précédent ce soit l’article 111 CPO. Mais en fait, il
s’agit des peines portées à l’article de 110 CPO.

d. La prise en compte de l’évolution historique ou interprétation


évolutive

C’est une technique qui permet au juge de sanctionner certains faits qui
se sont produits après la mise en vigueur d’une loi, mais qui rentrent dans le
champ d’application normal de cette loi sans pour autant que le législateur ait
visé expressément ledit comportement dans le texte ; tout simplement parce
qu’à l’époque de l’élaboration du texte, le législateur ne pouvait pas se les
représenter.

C’est le cas de l’article 79 du Code Pénal qui sanctionne le vol et le


définit comme une soustraction frauduleuse d’un bien mobilier appartenant à
autrui.

En le définissant ainsi, le législateur n’a visé que les biens matériels,


car, à l’époque, seuls les biens matériels pouvaient être volés et étaient
susceptibles d’appréhension et de soustraction. Avec l’évolution, il est arrivé
qu’il y ait d’autres biens immatériels susceptibles d’être soustrait.
Conformément à cette définition, celui qui vole ce bien immatériel (l’électricité)
ne sera pas sanctionné, car, il n’y a pas de texte qui sanctionne ce
comportement.

L’interprétation évolutive vient donc compléter ce vide en sanctionnant


ce voleur du bien immatériel.

e. La prise en compte du contexte général du texte : Argument a


rubrica

C’est une technique qui permet au juge d’établir la vraie signification


d’une loi ou d’une disposition légale en prenant en compte la place qu’elle
occupe dans l’ensemble du texte.

Généralement, le texte normatif se présente par des rubriques, c’est-à-


dire, que la norme est élaborée suivant un plan. Pour interpréter donc une
disposition de cette norme, il faut la placer dans son contexte, dans le texte en
général.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

A titre d’exemple : il existe en doctrine une discussion autour de l’article


85 du code pénal et dont l’objet est de savoir lequel du meurtre ou du vol
aggrave l’autre. Ceux qui disent (c’est l’opinion dominante) que le vol est
l’infraction principale et le meurtre une circonstance aggravante se basent
notamment sur le fait que cet article figure dans le titre II relatif aux infractions
contre les propriétés et clôture aussi une série des faits qui, tous, aggravent le
vol.

f. Le recours au droit comparé

Lorsque le juge épuise tous les moyens et n’arrive pas à déterminer la


vraie portée de la norme ou même pour vérifier l’exactitude de sa
compréhension de la norme, le juge peut recourir au droit comparer pour savoir
quelles sont les sanctions qui sont proposées dans d’autres lois pour ce
problème-là. Toutefois, cette référence au droit étranger doit se faire avec
prudence. En effet, le droit étranger permet au juge de s’inspirer et non de
copier, car les textes ne sont pas toujours les mêmes et même s’ils étaient
identiques ou proches, ils régissent des pays différents, des peuples, des
situations et des mentalités qui diffèrent. Il doit donc adopter la résolution
puisée en droit comparé aux réalités locales.

g. Les données historiques, politiques et sociales

Elles sont de nature à fournir des renseignements précieux sur le sens


et la portée de la norme.

Il en est ainsi de la notion d’ordre social qui n’a pas le même contenu
dans un pays démocratique que dans un pays au régime totalitaire.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

C. L’analogie

Il y a deux formes d’analogie :


- l’analogie légale ; et
- l’analogie juridique.

I. Analogie légale ou intra-legem

C’est une méthode qui consiste à étendre l’application de la norme des


cas qu’elle a expressément prévus, à d’autres cas qu’elle n’a pas prévus, mais
qui présentent une ressemblance avec les cas prévus(13). Autrement dit, le
législateur ne définit pas un comportement devant lequel le juge se trouve, ce
dernier le traite comme un comportement prévu par la norme quand il y a
ressemblance entre les deux comportements.

II. Analogie juridique ou extra-legem

Elle consiste pour le juge à résoudre un cas non prévu par la norme en
se fondant sur l’esprit général du droit pénal, c’est-à-dire, en recourant aux
fondements de l’ordre juridique pris dans leur ensemble14.

Dans l’un comme dans l’autre cas (légale et juridique), le juge se


transforme en législateur, il crée le droit alors que tel n’est pas son rôle. Son
rôle est d’appliquer la norme. Compte tenu du principe de la « légalité »,
l’analogie est écartée en droit pénal ; elle n’est pas une méthode d’interprétation
en droit pénal. Toutefois, l’analogie intra-legem, peut être admise si elle va dans
le sens de l’intérêt du prévenu.

Paragraphe 3. In dubio pro reo

A la moindre difficulté dans la compréhension du texte normatif, le juge


ne doit pas laisser tomber les bras et retenir l’hypothèse la plus favorable au
prévenu. Il doit jouer un rôle dynamique dans la recherche du sens exact et de
la portée véritable de la norme, faire tout son possible pour découvrir la volonté
du législateur. Mais, il n’est pas dit que ses efforts d’interprétation seront
toujours couronnés de succès. Lorsqu’il a recouru aux usages de la langue, à la
logique, au bon sens, à la raison d’être de la norme pour dégager le but de celle-
ci, lorsqu’il a utilisé toutes les techniques d’interprétation à sa disposition et
que malgré cela la norme reste douteuse ou ambiguë, il doit donner la
préférence à l’interprétation la plus favorable au prévenu.

13
BOUZAT (P) et PINATEL (J), Traité de droit pénal et de criminologie, Tome I, Droit pénal général, Dalloz, Paris, 1963, n°88.
14
JIMENEZ DE ASUA, « L’analogie en droit pénal », in RSC, 1949, 189.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est aussi lorsqu’une norme reste douteuse que le législateur peut


intervenir en promulguant une norme interprétative ou une nouvelle norme
réglementant toute la matière de manière à résoudre le maximum de difficultés
d’interprétation jusque-là rencontrées.

Section 2. L’APPLICATION DE LA NORME PENALE

La norme pénale peut s’appliquer tantôt en tenant compte du temps,


tantôt de l’espace.

Sous-section 1. LAPPLICATION DE LA NORME PENALE DANS LE


TEMPS

Le problème se pose de la manière suivante : lorsqu’une norme pénale


intervient pour abroger ou modifier une norme ancienne en prévoyant ainsi une
nouvelle incrimination, une nouvelle sanction ou en définissant une règle
procédurale, quelle doit être l’attitude du juge lorsque cette norme intervient
entre le jour de la commission de l’infraction et le jour de l’intervention du
jugement définitif.

Il est évident que cette nouvelle norme ainsi conçue s’appliquera à tous
les faits commis après sa promulgation. Mais qu’en sera-t-il des faits commis
sous l’ancienne norme ? Faut-il aussi leur appliquer la nouvelle norme, ou
doivent-ils continuer à être régis par la norme ancienne ?

En RDC, la matière est traitée dans les dispositions ci-après :


- Article 17 alinéas 2 à 5 de la Constitution du 18 février 2006 telle que
modifiée le 20 janvier 2011 : « Nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu
ou condamné qu’en vertu de la loi et dans les formes qu’elle prescrit. Nul
ne peut être poursuivi pour une action ou une omission qui ne constitue
pas une infraction au moment où elle est commise et au moment des
poursuites. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission
qui ne constitue pas une infraction à la fois au moment où elle est
commise et au moment de la condamnation. Il ne peut être infligé de peine
plus forte que celle applicable au moment où l’infraction est commise ».
- Article 1er C.P. : « Nulle infraction ne peut être punie de peines qui
n’étaient pas portées par la loi avant que l’infraction fut commise ».

Pour répondre aux questions ci-haut, il convient d’opérer une


distinction : la loi pénale de fond d’une part et la loi pénale de forme d’autre
part.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 1. L’application dans le temps des normes pénales de


fond

La norme pénale de fond est celle qui définit les infractions et détermine
les sanctions. Dans ce cas, on l’appellera norme pénale parfaite. Si elle ne porte
que soit l’incrimination soit la sanction, elle sera qualifiée de norme pénale
imparfaite

Lorsque deux lois pénales de fond sont en conflit, le principe de solution


est celui de la non rétroactivité de la loi pénale de fond. Cette norme ne
rétroagit pas ; elle dispose pour l’avenir, c’est-à-dire, elle ne régit que l’avenir et
non le passé.

Le deuxième principe est considéré par la doctrine comme une exception


au principe de la non rétroactivité. En effet, la norme pénale de fond (nouvelle)
rétroagit si elle est plus douce pour le prévenu : c’est la « rétroactivité in mitius »
ou « rétroactivité de la lex mitia ».

A. La norme applicable

Pour savoir s’il faut appliquer le principe de la non rétroactivité ou


plutôt la rétroactivité in mitius, il faut comparer le texte en vigueur au moment
des faits et le texte nouveau, et déterminer celui qui est doux, moins sévère. Et
si les faits sont soumis au juge, il faudra savoir si le texte nouveau peut être
applicable en cours de procédure.

I. Comparaison de la sévérité des normes en conflit

Il faut comparer d’abord l’incrimination prévu par chaque norme, avant


d’en arriver aux pénalités.

1. Incriminations

Une norme est plus douce lorsqu’elle abroge une incrimination,


supprime une circonstance aggravante, admet au bénéfice du prévenu un fait
justificatif ou encore lorsqu’elle augmente le nombre des éléments constitutifs
de l’infraction.

Une norme est plus sévère dans les hypothèses inverses.

Lorsque deux normes sont égales au point de vue des incriminations et


ainsi on n’arrive pas à déceler la norme la plus douce, il convient de comparer
les pénalités.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

2. Les pénalités

En comparant les pénalités, l’autorité chargée de l’application du texte


tiendra compte de la hiérarchie des peines prévues à l’article 5 C.P. D’après cet
article, la peine de mort est celle la plus grave, le châtiment suprême. Après
cette peine, viennent les travaux forcés ; la servitude pénale (d’abord à
perpétuité, ensuite à temps) même la plus faible l’emporte sur la peine
d’amende, quel que soit son montant.

Il faut tout de même signaler une difficulté : si le texte établit une


hiérarchie des peines principales, il n’en est pas de même des autres.

En sorte que si de part et d’autre (dans les deux lois) il y a des peines
complémentaires ou accessoires, il n’y aura pas toujours facilité d’apprécier
leur gravité. Le juge est alors contraint de recourir à la comparaison in concreto
(dans le concret).

II. L’effet de la norme nouvelle sur le procès en cours

Lorsqu’un nouveau texte supprime l’infraction ou en réduit les peines


alors que les faits ne sont pas encore définitivement jugés, il doit être appliqué,
à l’exclusion du texte qui existait au moment des faits.

III. L’effet de la norme nouvelle après un jugement définitif

Il est entendu que lorsqu’un jugement définitif est déjà intervenu, la


norme nouvelle, fut-elle la plus douce, ne peut être qu’inopérante. Elle laisse
subsister les condamnations qui sont passées en force de chose jugée, « si elle
ne les abolit pas ou ne les modifie pas par une disposition expresse et
formelle »15.

Cependant, on peut se demander si cette solution demeure valable dans


le cas d’une norme nouvelle qui enlève au fait son caractère infractionnel. Il
n’est ni juste, ni opportun que l’agent continu à exécuter une peine relative à
des actes que la société considère désormais comme licites.

C’est la position du législateur français qui déclare : « la peine cesse de


recevoir exécution quand elle a été prononcée pour un fait qui, en vertu d’une loi
postérieure au jugement, n’a plus le caractère d’une infraction pénale »16.

15
HAUS (J.J.), Principes généraux du droit pénal belge, 3e éd., 2 T., Gand, 1869, réimprimé à Bruxelles, 1979, n°186.
16
Article 112 – 4 Nouveau code pénal français.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Une autre question est de savoir si la norme nouvelle qui supprime ou


réduit la peine peut être appliquée aux personnes irrévocablement condamnées.
La réponse doit être positive, car un châtiment que le pouvoir social lui-même a
déclaré inutile, ne peut plus, sans injustice, continuer de recevoir son
exécution17.

Qu’il s’agisse d’une norme nouvelle qui supprime le caractère


infractionnel des faits ou de celle qui supprime ou réduit la peine, il revient au
législateur, dans les deux cas, d’appliquer aux personnes définitivement
condamnées, par une disposition spéciale, le bénéfice de la norme nouvelle. A
défaut, le Chef de l’Etat y suppliera par la grâce. Sans cette disposition ou cette
grâce, la peine continue à être appliquée.

Ce principe de non rétroactivité ne s’applique pas de manière absolue, il


obéit à quelques tempéraments.

B. Les exceptions aux règles de conflits

I. Les normes interprétatives

Que les normes interprétatives soient sévères ou douces au prévenu,


elles s’appliquent toujours parce qu’elles sont considérées comme faisant partie
intégrante de la loi interprétée. Car, celle-ci est supposée avoir eu dès le départ
le sens que le législateur vient de fixer à la loi interprétative.

II. Les normes portant mesures de sûreté

Les mesures de sûreté sont des mesures restrictives de liberté destinées


à prévenir la délinquance des personnes trouvées en état dangereux pour
l’ordre public et l’ordre social. Dans ces mesures rentrent les mesures
éducatives et thérapeutiques.

La doctrine dominante est que, les mesures de sûreté étant prises dans
l’intérêt des délinquants (elles n’infligent pas une souffrance), elles doivent
toujours rétroagir, c’est-à-dire, elles doivent recevoir application même s’il s’agit
des faits connus antérieurement à la promulgation de la loi nouvelle.

Pour certains auteurs, il faut faire un distinguo entre les mesures


favorables et défavorables. Sont ainsi défavorables au délinquant, les mesures
de sûreté qui infligent une souffrance : la Castration, la stérilisation… ; mais,
pareilles pratiques, étant attentatoires à la dignité humaine, ne peuvent en
aucun cas occuper de place dans une législation pénale moderne.
17
HAUS (J.J.), Op. cit.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

III. Problème posé par les normes temporaires et de circonstances

Les normes temporaires assignent un terme à leur application dans le


temps. Les normes de circonstances sont proches des normes temporaires en
ce sens qu’elles sont aussi prises pour réglementer une situation provisoire.
Cependant, lorsqu’une norme est pour un temps déterminé et qu’elle vient
d’être abrogée, la question est de savoir si un prévenu peut être condamné pour
des faits commis au temps où la norme était encore en vigueur.

Les dispositions de l’article 17 al. 3-4 de la Constitution du 18 février


2006 telle que modifiée le 20 janvier 2011 déclarent que Nul ne peut être
poursuivi pour une action ou une omission qui ne constitue pas une infraction au
moment où elle est commise et au moment des poursuites. Nul ne peut être
condamné pour une action ou une omission qui ne constitue pas une infraction à
la fois au moment où elle est commise et au moment de la condamnation. Ainsi,
le prévenu ne peut être condamné pour des faits commis sous l’empire d’une
norme temporaire ou de circonstance qui vient d’être abrogée. Le législateur ne
saurait y déroger, s’agissant là d’un principe constitutionnellement consacré.

IV. Problème posé par la dérogation « légale »

Bien que la norme nouvelle soit plus sévère que celle ancienne, le
législateur peut-il disposer expressément qu’elle rétroagira ou à l’inverse qu’elle
ne régira que l’avenir. En R.D.C., le principe de la non rétroactivité de la norme
pénale, ainsi que son exception d’application des normes plus douces sont
constitutionnels. En plus, la R.D.C. a adhéré à la Déclaration Universelle des
Droits de l’Homme qui consacre ce principe et qui a une force supérieure à la
loi.

Celle-ci ne saurait donc déroger aux principes du droit pénal transitoire


sans violer les dispositions constitutionnelles (art. 17 de la Constitution) et les
engagements internationaux du pays. Cependant, le juge pénal n’est pas juge
de la constitutionnalité de sorte que l’on peut bien imaginer que le législateur
promulgue une loi disposant expressément qu’elle rétroagit alors qu’elle est
plus sévère, ou qu’elle ne dispose que pour l’avenir alors qu’elle est plus douce.
Dans pareille hypothèse, certains auteurs pensent que le juge pénal sera tenu
d’appliquer la loi nouvelle, même si elle viole la constitution18.

18
STEFANI (G), LEVASSEUR (G) et BOULOC (B), Droit pénal général, 11e éd., Dalloz, Paris, 1980, p.167.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. Application dans le temps des normes pénales de


forme

Le problème de conflit des normes de forme se pose lorsqu’une norme


nouvelle est promulguée alors que la procédure visée par cette norme était déjà
engagée sous l’empire de l’ancienne, mais n’est pas encore terminée, quelle
attitude doit adopter le juge pour donner de suite à ladite procédure ? Prendre
l’ancienne ou la nouvelle norme ?

Pour répondre à cette question, la doctrine a élaboré un principe, celui


de « l’application immédiate des lois pénales de procédure ». Ce principe veut
dire que la partie de la procédure passée qui était régie par l’ancienne loi reste
valable, mais dès l’instant où intervient la nouvelle norme, celle-ci s’applique
immédiatement. Toutefois, ce principe connaît certaines dérogations.

A. Application immédiate des normes nouvelles de procédure

L’application immédiate ne veut pas dire rétroactivité parce que la


nouvelle norme qui entre en vigueur n’annule pas ce qui a été élaboré avant sa
mise en vigueur. Pour mieux comprendre cette différence, considérons les trois
solutions suivantes :

I. La survie de la norme ancienne

Cette solution indique que la norme ancienne continue à régir les


procédures qui ont commencé sous son empire et la nouvelle ne devant
s’appliquer qu’à celles engagées après sa promulgation.

Cette solution doit être écartée, car les lois de procédure sont censées
être faites pour une meilleure administration de la justice et il serait contraire à
cet intérêt de maintenir en vigueur des normes dont, par la promulgation des
nouvelles, on reconnaît les lacunes et les faiblesses.

II. La rétroactivité de la norme nouvelle

Cette solution a comme conséquence d’abolir même pour le passé les


effets de la norme ancienne et de régir les procédures en cours depuis qu’elles
ont commencé. Seules lui échappent les procédures qui ont conduit à un
jugement définitif.

Elle est également écartée si l’on considère le tort qu’elle causerait aussi
bien au délinquant qu’à la société. Elle crée, en effet, une insécurité juridique
pour le justiciable et entraîne des coûts injustifiés pour la justice.

64 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

II. L’application immédiate de la norme nouvelle

Cette solution conduit à ce que jusqu’à sa promulgation, les instances


sont régies par la norme ancienne, et aucun effet de celle-ci n’est mis en cause.
Dès sa promulgation, la norme nouvelle s’applique alors aux procédures en
cours et à toutes celles qui naîtront.

B. Quelques dérogations

1° Quant aux normes de compétence : lorsqu’un texte nouveau


intervient pour modifier une compétence d’une juridiction d’appel alors que
l’affaire a déjà été jugée au premier degré sur le fond, ce texte nouveau de
compétence ne peut s’appliquer.

2° En ce qui concerne les voies de recours : elles doivent être régies,


non par un nouveau, mais plutôt par le texte en vigueur lors du jugement.
Notons aussi qu’un texte nouveau qui supprime une voie de recours ne peut
pas s’appliquer immédiatement, car elle remet en cause les droits acquis des
parties au procès.

3° Les textes relatifs à la prescription donnent lieu à controverse.


Selon que l’on considère la prescription comme relevant du fond ou de la forme,
on estime qu’il faut appliquer le texte nouveau si il est favorable au prévenu, ou
alors qu’il faut immédiatement appliquer le texte nouveau, qu’il soit favorable
ou non.

La tendance dominante considère que les « lois » relatives à la


prescription sont des règles de fond et qu’en conséquence toute norme nouvelle
en la matière ne reçoit application que si elle est favorable au prévenu. Dans le
cas d’espèce, le texte sera considéré comme favorable lorsqu’il réduit la durée
de la prescription.

4° En ce qui concerne les normes relatives aux modes de preuve, la


solution consacrée aux textes de prescription s’applique également aux lois
relatives aux modes de preuve.

5° Les normes relatives à la poursuite sont assimilées à celles de fond


et la norme nouvelle en la matière suit les règles déjà étudiées : non
rétroactivité et application de la loi nouvelle plus douce.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Sous-section 2. L’APPLICATION DE LA NORME PENALE DANS


L’ESPACE

La problématique qui se pose ici peut être formulée en 3 séries


d’interrogations :

1° Quelle loi doit-on appliquer lorsque l’auteur d’une infraction est


appréhendé au moment des poursuites dans un pays autre que celui dans
lequel l’infraction a été commise ? Doit-on appliquer la norme du pays de la
commission de l’infraction ou celle du pays où l’infracteur a été appréhendé ?

2° Quelle attitude doit avoir le juge (quelle norme doit-il appliquer)


lorsqu’une infraction a été perpétrée dans plusieurs pays différents et
successivement ?

3° Quelle norme doit-on appliquer lorsqu’une infraction commise à


l’étranger porte atteinte aux intérêts vitaux d’un Etat déterminé ?

Pour répondre à ces questions, la doctrine a élaboré un certain nombre


de système et le législateur congolais a choisi parmi ces principes ceux qui lui
semblent les meilleurs.

Paragraphe 1. Les systèmes doctrinaux

La doctrine a élaboré trois systèmes :


- la territorialité de la loi pénale ;
- la personnalité de la loi pénale ; et
- l’universalité du droit de punir.

A. LA TERRITORIALITE DE LA NORME PENALE (lex loci delicti


commissi)

C’est un principe qui veut que la norme pénale d’un pays déterminé
s’applique à toutes les infractions commises sur tout le territoire de ce pays
quelle que soit la nationalité du couple pénal. A l’inverse, la norme de ce pays
ne peut pas s’appliquer aux infractions commises hors de son territoire même
par ses nationaux.

La doctrine a soumis à l’analyse ce principe et en est arrivé à la


conclusion qu’il comporte des avantages et inconvénients.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

I. Arguments en faveur de ce système

a. L’intérêt social

Ce système permet une meilleure sauvegarde de l’intérêt social parce


que l’infraction est jugée et sanctionnée le plus près possible de l’endroit où elle
a été commise. De cette manière là, les témoins de l’infraction sont
également les témoins de la sanction et ainsi se réalise non seulement la
prévention individuelle, mais aussi la prévention collective par l’intimidation.

b. Une meilleure justice

Le système de territorialité permet une meilleure administration de la


justice parce que le juge de l’Etat où l’infraction a été commise connaît
mieux la norme de ce pays et se trouve en mesures de bien faire appliquer
cette norme. De plus, l’enquête est facile à mener, le juge pouvant faciliter les
descentes sur le lieu, interroger les témoins et accélérer la procédure.

c. Le respect du principe de légalité

On estime, en effet, que l’agent (l’auteur de l’infraction) connaît


mieux la norme du pays où il a délinqué alors qu’il peut ignorer sa propre loi
nationale.

d. Exercice de la souveraineté par l’Etat de la commission de l’infraction

Une des fonctions essentielles de l’Etat c’est le maintien de l’ordre à


l’intérieur de ses frontières. Lorsque la loi du pays est violée, l’autorité de l’Etat
l’est également. C’est pourquoi l’Etat doit sanctionner ces infractions.

II. Le reproche encouru par le système de la territorialité

Le système de territorialité appliqué de manière rigoureuse peut


conduire à l’impunité de certains délinquants. Il en sera ainsi lorsque le lieu de
l’infraction n’est pas connu ou déterminé ou lorsqu’il ne relève d’aucune
souveraineté. Il en sera de même au cas où un délinquant, après avoir commis
une infraction à l’étranger, regagne son pays.

Ce dernier ne pourra en aucun cas le punir, car le crime n’a pas été
commis sur son territoire. Le pays du lieu de l’infraction ne pourra pas non
plus le punir, car cela supposerait que le pays d’origine extrade le criminel. Or,
il y a des pays qui n’extradent pas leurs propres nationaux. Pour corriger cette
imperfection de l’impunité, on a imaginé d’autres systèmes.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

B. LA PERSONNALITE DE LA NORME PENALE

Ce système veut que la norme d’un pays s’applique à tous ses nationaux
même en dehors de son territoire et ne s’applique qu’à ses nationaux à
l’intérieur de son territoire. Ce principe est en réalité double selon que l’on
considère la nationalité du coupable (personnalité active) ou celle de la victime
(personnalité passive).

I. Principe de personnalité active

C’est un principe qui veut que la norme d’un Etat déterminé s’applique à
toutes les infractions commises par ses nationaux soit à l’intérieur soit à
l’extérieur du territoire. Le délinquant est jugé d’après sa norme d’origine et
relève des tribunaux de son pays.

Ce principe dit aussi « principe de la compétence personnelle active » a


été justifié en se fondant sur l’idée que la norme nationale est mieux adaptée à
la personne du délinquant et que le juge national sera plus juste qu’un juge
étranger.

II. Principe de personnalité passive

C’est ce principe qui veut que la norme pénale d’un Etat déterminé
s’applique à toutes les infractions qui victimisent ses nationaux, où qu’ils se
trouvent. Il est justifié par l’idée que la norme pénale de la victime est la plus à
même d’assurer sa protection. Il peut arriver que la victime de l’infraction en
question soit l’Etat lui-même. Dans cette hypothèse, le principe de personnalité
passive est appelé « principe de réalité ».

Deux types de critiques sont formulés : D’abord, on estime que le juge


de la même nationalité que la victime peut être partial ; ensuite, la justice saisie
peut être inefficace et trop coûteuse.

C. L’UNIVERSALITE DU DROIT DE PUNIR

En vertu du système de l’universalité, c’est le tribunal du lieu


d’arrestation du délinquant qui est compétent pour connaître l’infraction. Ce
principe ne tient donc compte ni du lieu de la commission de l’infraction ni de
la nationalité de l’auteur ou de la victime de l’infraction.

68 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est le principe qui est appliqué par la majorité des Etats modernes
parce qu’il est considéré comme le seul permettant la répression suffisante et
satisfaisante des infractions en même temps que la collaboration des Etats en
matière de lutte contre la criminalité et l’extradition s’inscrivent dans la logique
du principe de l’universalité.

Ce principe est consacré dans nombreuses conventions internationales :


Conventions de 1923 et 1990 sur les publications obscènes ; Convention de
1929 sur le faux monnayage ; Convention de 1948 sur le génocide,…

Paragraphe 2. Principe de solution en droit congolais

Le droit positif congolais consacre comme principe celui de territorialité.


Mais, ce principe de territorialité est corrigé par des emprunts réalisés à la fois
auprès du système de l’universalité et de celui de personnalité.

A. Principe de territorialité

Ce principe est consacré dans trois dispositions légales :


- article 2 Code Pénal Ordinaire porte ce qui suit : « l’infraction
commise sur le territoire de la République est punie conformément à
la loi ».
- article 67 de la Loi organique n°13/011-B du 11 avril 2013
portant organisation, fonctionnement et compétences des
juridictions de l’ordre judiciaire affirme qu’ : « En matière
répressive, le Ministère public recherche les infractions aux actes
législatifs et réglementaires qui sont commises sur le territoire de
la République ».
- l’article 14 du Code Civil Livre I19 stipule que : « les lois pénales
ainsi que les lois de police et de sûreté publique obligent tous ceux
qui se trouvent sur le territoire de l’Etat ».

Le terme « territoire » doit être entendu dans son acception large


(l’espace terrestre, espace aérien et la mer territoriale). De même, sont compris
dans le territoire de la République : les navires et aéroports battant pavillon
congolais, les ambassades congolaises,…

19
. Article 2 du décret du 30 Janvier 1940 portant Code Pénal Congolais, tel que modifié et complété à ces jours. Article 67 de la
Loi organique n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre
judiciaire. Article 14 du décret du 04 mai 1895 portant Code civil, relativement aux personnes (B.O., 1895, p. 138), Décret abrogé
expressément par la loi 87-010 du 1er août 1987 portant Code de la famille, à l’exception du titre II portant des étrangers issu du
décret du 20 février 1891. Actuellement Code Civil Livre I (voir Codes Larciers Tome I Droit Civil et Judiciaire, p. 89).
69 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Relèvent cependant de la compétence des tribunaux congolais, toute


infraction dont l’un des éléments constitutifs a été réalisé au Congo à condition
qu’aucun jugement définitif n’ait été rendu à l’étranger pour les mêmes faits et
à l’endroit du même infracteur parce que le Congo admet le principe Non bis in
idem. On vise là les infractions continues qui s’opposent des infractions
instantanées.

B. Emprunts de correction

L’article 3 du code pénal comprend deux correctifs :

1. Correctif relevant du système de personnalité

Ce correctif est mis en œuvre dans deux hypothèses :

- la première est d’appliquer le système de la personnalité active. En


effet, ce système est adopté pour permettre à la loi congolaise en
l’occurrence, la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant
code judiciaire militaire et la loi n°024/2002 du 18 novembre
2002 portant code pénal militaire de continuer à régir l’unité des
Forces armées de notre pays en stationnement dans un pays
étranger non ennemi ;

- dans l’autre hypothèse est appliqué le système de la personnalité


passive retenu dans les alinéas 4 et 5 de l’article 3 C.P. Ces
dispositions rendent compétent le juge congolais pour connaître
les infractions commises à l’étranger mais portant atteinte à la
sûreté de l’Etat, même si elles ont déjà été jugées à l’étranger.
Compte tenu de la valeur des intérêts qui sont en jeu, les juges
congolais doivent les juger en excluant le principe « non bis in
idem ».

2. Correctif tiré du principe de l’universalité

Le principe de l’universalité est mis en œuvre dans l’article 3 alinéa 1er


du code pénal. Cet article donne le pouvoir au juge congolais de poursuivre
toute personne arrêtée sur le territoire national pour avoir commis une
infraction d’une certaine gravité même si cette infraction a été commise à
l’étranger.

Pour que cette disposition s’applique, l’infraction doit être punie d’une
peine de servitude pénale de plus de deux mois et les poursuites ne peuvent
être intentées qu’à la requête du ministère public.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Il faut souligner que l’inculpé ne doit pas avoir été jugé définitivement à
l’étranger et, en cas de condamnation, n’ait pas subi ou prescrit sa peine ou
obtenu sa grâce (sauf en cas d’atteinte à la sûreté de l’Etat et à la foi publique).

Paragraphe 3. La coopération internationale contre le crime

La dimension internationale qu’acquiert la criminalité fait que le combat


contre celle-ci ne peut réussir sans une grande collaboration entre les Etats.
Cette collaboration trouve son expression la plus ancienne et la plus importante
dans l’extradition. Toutefois, il existe d’autres formes de collaboration
internationale contre les crimes.

A. L’extradition

I. Définition

L’extradition est une procédure internationale par laquelle un Etat


appelé « Etat requis » accepte de livrer un individu réfugié sur son territoire à
un autre Etat appelé « Etat requérant » qui en a fait la demande et qui se
propose soit de juger cet individu, soit l’ayant déjà jugé, le soumettre à
l’exécution de la peine prononcée contre lui.

Lorsque l’extradition est faite en faveur du pays où l’infraction fut


commise, elle permet une justice plus efficace, car le délinquant est jugé par le
pays qui dispose de plus d’atouts pour la recherche et la découverte de la
vérité. L’extradition se base juridiquement sur les traités que les Etats
concluent afin de se livrer mutuellement les délinquants les plus dangereux.

II. Conditions d’extradition

Ce mécanisme pour être déployé exige la réunion d’un certain nombre


des conditions, lesquelles conditions se rapportent à l’Etat requérant, à l’Etat
requis, à la nature de l’infraction commise et à l’individu recherché.

a. L’Etat requérant

L’extradition est accordée sur demande de l’Etat requérant. Qui peut


être Etat requérant ? On admet les trois Etats suivants :
- l’Etat sur le territoire duquel l’infraction a été commise (principe de
territorialité) ;
- l’Etat dont l’auteur de l’infraction est ressortissant (principe de personnalité
active) ; et

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Cours de Droit Pénal Général 2013

- l’Etat dont les intérêts vitaux ont été mis en cause par l’infraction (principe
de réalité).

L’un ou l’autre de ces trois Etats ne peut requérir l’extradition que si ses
tribunaux ont déjà engagé des poursuites contre la personne sollicitée
(délinquant) ou encore si ses tribunaux ont déjà condamné l’agent sollicité.

b. L’Etat requis

La demande d’extradition est adressée à un Etat : l’Etat requis qui est le


pays où séjourne actuellement le délinquant recherché.

1. L’individu recherché

S’agissant de l’individu recherché, il doit être soit l’auteur, soit le


coauteur, soit encore le complice d’une infraction consommée ou tentée que
l’Etat requérant a compétence de réprimer.

C’est ici qu’intervient le principe qu’un Etat ne peut extrader ses propres
nationaux. Mais, il y a des Etats qui acceptent d’extrader leurs nationaux, sous
réserve de réciprocité. Le cas de l’Angleterre, les Etats-Unis et l’Italie acceptent
de livrer leurs propres nationaux, à condition d’une réciprocité qu’ils ne
trouvent presque nulle part.

2. Les infractions extraditionnelles

Les infractions extraditionnelles doivent présenter une certaine gravité.


Pour déterminer cette gravité, deux techniques sont possibles : soit
l’énumération des faits pouvant donner lieu à extradition dans le corps même
du traité, soit la référence à la gravité de la peine encourue ou effectivement
prononcée pour l’infraction dont il s’agit. En d’autres termes, les conventions
d’extradition signées, précisent les abstractions, la gravité de l’infraction dont
les auteurs peuvent faire l’objet d’extradition.

1° Les infractions non extraditionnelles

Il est des infractions d’une certaine nature qui ne sont pas en principe
extradables. Ce sont les infractions purement militaires et les infractions
politiques.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

 Les infractions purement militaires

Ce sont des infractions qui ne peuvent être commises que par des
hommes en uniforme parce que ces infractions consistent en réalité en un
manquement aux devoirs militaires.

Ces infractions sont classées en quatre rubriques :


- Les infractions tendant à soustraire leurs auteurs aux obligations
militaires : Désertion (quitter anarchiquement l’armée).
- Les infractions contre l’honneur et le devoir : Pillage,
démoralisation des forces armées.
- infractions contre la discipline: Refus d’obéissance, violences
contre la population civile
- Les infractions aux consignes. La consigne est une instruction
donnée aux troupes en mission de manière générale ou
individuelle : Abandon de poste.

Toutes ces infractions relèvent de la compétence des juridictions


militaires.

 Les infractions politiques

En doctrine, on rencontre trois catégories d’infractions politiques :

Les infractions politiques pures : ce sont des infractions qui ne portent


atteinte qu’à l’ordre politique sans préjudicier d’autres individus. Exemple :
Infraction de haute trahison ou de complot.

Les infractions politiques complexes ou mixtes : ce sont celles qui


portent atteinte aussi bien à l’ordre commun qu’à l’ordre politique. Ces
infractions sont également appelées infractions politiques par mobile. Il en est
ainsi de l’infraction de pillage qui porte atteinte aux intérêts des particuliers et
qui poursuit comme objectif la déstabilisation du régime politique.

Les infractions connexes à des délits politiques : ce sont des infractions


de droit commun inhérentes à une action politique. Elles se commettent à
l’occasion d’une guerre civile ou d’une insurrection.

Elles sont voisines des infractions politiques mixtes. C’est le cas lors
d’une insurrection, on détruit les monuments de l’adversaire : il y a là
destruction méchante qui se réalise dans un mouvement, dans une
insurrection.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

3. La procédure d’extradition

La procédure d’extradition suit la voie diplomatique. Il revient à l’Etat


requis d’accepter ou non d’extrader la personne recherchée par l’Etat
requérant. S’il estime qu’il y des raisons de craindre le pire par l’application
d’une peine inutilement douloureuse ou inhumaine, il peut souverainement
s’opposer à l’extradition de ladite personne. Le cas du Général Munene Faustin
qui n’a toujours pas été extradé par la République du Congo nonobstant les
demandes lui adressées par le gouvernement de la RDC.

B. Les autres formes de collaboration internationale

1. La Cour Pénale Internationale

Il faut noter que le traité de la C.P.I. a été signé à Rome le 17 juillet


1998. La R.D.C. était le 60e Etat qui ratifiait ce traité par le Décret
n°0013/2002 du 30 mars 2002. Dans le système moniste (qui admet les
conventions comme des lois internes) de la R.D.C., la C.P.I. devient
pratiquement une juridiction qui participe à l’ordonnancement judiciaire
national congolais.

La C.P.I. a la compétence de connaître les crimes les plus graves qui


touchent l’ensemble de la communauté internationale. On peut citer, à cet effet,
le crime de génocide, le crime contre l’humanité, le crime de guerre et le crime
d’agression.

Pour saisir la C.P.I., on doit observer les conditions suivantes :


- l’une des parties doit être un Etat ;
- l’accusé doit être ressortissant d’un Etat partie aux statuts ;
- le crime doit être commis dans un Etat partie.

Ces conditions sont alternatives et non cumulatives. L’Etat non partie


peut accepter la C.P.I. pour un crime spécifique commis sur son territoire ou
par son ressortissant. Si le conseil de sécurité de l’ONU renvoie une affaire au
Procureur en vertu du chapitre VII de la charte, on n’applique pas ces
conditions.

De la remise de ses propres nationaux à la CPI. Il convient de


constater que nonobstant l’obligation incombant aux Etats de collaborer avec la
CPI, certains Etats se refusent tandis que d’autres excellent par des remises de
leurs propres nationaux à la Cour Pénale Internationale.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

A titre d’illustration : A ce jour, sur les huit personnes qui étaient


détenues au centre pénitentiaire de la CPI aux Pays-Bas, à l’exception d’un
rwandais (Callixte Mbarushimana) arrêté en France et déjà libéré pour non
confirmation de charge et du congolais Mathieu Gundjolo transmis par la RDC,
et acquitté depuis le 18 décembre 2012 par la chambre de première instance et
libéré deux jours après alors même que le procureur était allé en appel ; on
trouve d’abord un ivoirien Laurent Gbagbo, ancien président de la république
de cote d’ivoire, arrêté par le régime qui l’a succédé puis remis à la CPI ; ensuite
deux congolais (Thomas Lubanga condamné par la chambre de première
instance et en attente du dénouement en appel, et Germain Katanga en cours
d’instance) qui ont été arrêtés et remis à la CPI par le gouvernement de leur
propre pays la RDC ;

Le troisième congolais en l’occurrence Jean-Pierre Bemba, ayant été


arrêté à Bruxelles par la police belge puis remis à la CPI. Quant à Bosco
Ntaganda qui s’était rendu motu proprio à l’ambassade des États-Unis au
Rwanda puis transféré par les américains à la CPI, il y a lieu de préciser que la
cour lui a notifié ses charges et il attend se défendre à l’audience de
confirmation des charges.

Le constat à faire dans le cadre de cette coopération internationale


contre le crime, c’est que les Etats africains (en l’occurrence deux : la RDC et la
COTE D’IVOIRE) semblent être, jusque là, des bons élèves en la remise de leurs
propres nationaux. Et en cette matière précisément, la RDC en est championne
avec un total de 3 ressortissants en si peu de temps depuis l’existence de la
CPI ; record à ce jour non encore battu.

2. La collaboration policière internationale

Les polices nationales, surtout celles des pays qui partagent les
frontières, collaborent entre elles et s’échangent des informations et même des
délinquants.

La forme la plus élaborée de collaboration policière contre les criminels


internationaux se réalise sans nul doute au niveau de l’Organisation
Internationale de Police Criminelle (O.I.P.C.), couramment appelé « INTERPOL »,
d’après son adresse télégraphique. Celle-ci comprend plus d’une centaine de
pays et a son siège à Paris depuis 1946.

Les Bureaux Centraux Nationaux (B.C.N.) qui peuvent communiquer


entre eux (1 bureau dans chaque pays membre) assurent la liaison entre
l’Organisation et les polices nationales. L’organisation assure à ses membres
une diffusion rapide des renseignements qu’elle détient

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Deuxième Titre

LA COMMISSION DE L’INFRACTION

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Cours de Droit Pénal Général 2013

L’infraction est la source de la responsabilité pénale. Elle doit se réaliser


pour l’établir. C’est que, sans cette commission, nul ne pourra engager sa
responsabilité pénale. Mais à quoi ressemble une infraction et comment se
réalise-t-elle ? c’est à ces préoccupations qu’il va falloir répondre.

Définition. Le code pénal congolais ne définit pas l’infraction. Il ne


définit pas non plus le crime. Car, il estime que ce terme couvre un phénomène
ou des comportements variés. Mais, il faut dire que ni le code pénal français ni
celui belge n’ont pu définir l’infraction. Afin de mieux définir l’infraction, il
convient de faire allusion à la peine. C’est ainsi qu’en recourant à la notion des
peines et à l’article 1382 du code civil belge, on pourra définir l’infraction
comme suit : « est une infraction, tout fait quelconque de l’homme auquel la loi a
attaché une sanction pénale ».

Dans le cadre de la réforme du Code pénal, l’article 45 de l’avant-projet


du code pénal dans sa version du 19 mai 2009 définit l’infraction comme tout
fait, action ou omission, qui viole l’une quelconque des valeurs fondamentales de
la société, et en conséquence trouble ou est susceptible de troubler la paix ou
l’ordre publics en portant atteinte aux droits légitimes des particuliers, des
collectivités privées ou publiques, et auquel la loi attache des sanctions prévues
par le présent code ou par toute autre disposition pénale particulière. 20

De cette définition, il ressort trois éléments essentiels :


- un fait ;
- imputable à l’homme ;
- sanctionné par la loi.

a. Un fait

Le fait suppose tant l’action que l’inaction. C’est ainsi que l’avant-projet
fait allusion tant au fait, à l’action qu’à l’omission. Bref, il s’agit de toute
attitude, tout geste, tout comportement affiché mais qui soit préjudiciable à
autrui.

En principe, la simple pensée criminelle n’est pas punie en droit pénal


mais l’extériorisation ou la matérialisation de l’intention criminelle est exigée.
Dès que la pensée criminelle est extériorisée même en parole, ou en simple
attitude elle devient un fait qui peut être de commission ou même d’omission.

20
Article 2 de l’ancien avant-projet du livre 1er du Code pénal (1974).
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Cours de Droit Pénal Général 2013

b. Imputable à l’homme

Alors que le droit pénal ancien sanctionnait non seulement l’être


humain mais aussi, les animaux ainsi que les choses inanimées et
inconscientes ; le droit pénal moderne, quant à lui, nécessite une certaine
responsabilité morale ou une certaine volonté de la part de l’auteur de
(l’infraction) l’acte incriminé.

En effet, l’on admet que ne peut être auteur d’une infraction qu’une
personne humaine. Ce qui sous-entend son imputabilité. Toute infraction doit
donc être imputable à l’homme.

En revanche, il convient d’ajouter que tout homme n’est pas imputable.


C’est ainsi que le dément, le mineur de 14 ans, la personne placée sous une
contrainte irrésistible excluant ainsi sa propre volonté dans l’appréciation de
l’attitude à adopter, ne peuvent se voir imputer un fait si préjudiciable qu’il soit
lorsqu’il est commis dans ces conditions ci-haut évoquées.

c. Préjudiciable à autrui

Il doit s’agir d’un fait qui préjudicie une autre personne que l’auteur de
l’acte lui-même. C’est ainsi que l’avant-projet souligne que le fait doit avoir
violé l’une quelconque des valeurs fondamentales de la société, et en
conséquence troublé ou, être susceptible de troubler la paix ou l’ordre publics en
portant atteinte aux droits légitimes des particuliers, des collectivités privées ou
publiques

d. Sanctionné par la loi

En droit pénal, toute infraction est sanctionnée par la loi. La sanction


pénale n’est pas à confondre à celle morale ni à celle disciplinaire. Mais, un
même fait peut engendrer une double ou un triple sanction. Les sanctions dont
question doivent être prévues soit par le code pénal soit encore par toute autre
texte pénal particulier.

Ainsi, tenant compte de tout ce qui précède, HAUS a défini l’infraction


comme : « la violation d’une loi pénale, l’action ou l’inaction que la loi frappe
d’une peine ».

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Cours de Droit Pénal Général 2013

CHAPITRE I. LA CLASSIFICATION DES INFRACTIONS

En droit pénal, les infractions sont susceptibles de plusieurs


classifications variant en fonction du critère retenu.

Il convient ainsi de retenir six (6) critères pour gouverner ces


catégorisations. Ces critères sont les suivants :

La gravité : en fonction de ce critère, on peut classifier les infractions en


crimes, délits et contraventions.

La nature intrinsèque de l’infraction : selon la nature de l’infraction, on


peut différencier : les infractions de droit commun des infractions politiques,
militaires, de presse et de service.

L’élément moral de l’infraction : Il existe à ce niveau : les infractions


intentionnelles et les infractions non intentionnelles.

Le mode d’exécution : Lorsqu’un tient compte de leur mode d’exécution,


on classifie à cette catégorie : les infractions de commission ; les infractions
d’abstention ; les infractions instantanées ; les infractions continues ; les
infractions d’habitude ; les infractions collectives ; les infractions complexes ;
les infractions connexes.

Le moment (époque) de la constatation : On retient par rapport à ce


critère : les infractions flagrantes et les infractions non flagrantes.

Le moment de la consommation ou le résultat de l’exécution.

Section 1. CLASSIFICATION FONDEE SUR LA GRAVITE DE


L’INFRACTION

Il convient de dire d’entrée de jeux que le droit pénal congolais ne


connaît aucunement la distinction tripartite caractérisant le droit pénal
européen.

C’est ainsi que la législation congolaise qualifie tout acte incriminé de la


même façon sans pour autant faire une certaine différence sur leur gravité.

Cependant, sous d’autres cieux, l’on rencontre certaines législations qui


consacrent cette division tripartite des infractions en crimes, délits et
contraventions.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est le cas en droit français. C’est ainsi qu’en droit français on


considère que : « L’infraction que les lois punissent de peines de police est une
contravention. L’infraction que les lois punissent de peines correctionnelles est
un délit. L’infraction que les lois punissent d’une peine afflictive ou infamante est
un crime ».

Paragraphe 1. De la classification tripartite des infractions

La gravité d’une infraction découle de la rigueur de la peine à infliger à


son auteur.

En ce qui concerne la contravention : selon l’article 131-12, les peines


contraventionnelles encourues par les personnes physiques sont : l'amende, les
peines privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-14, et la peine
de sanction-réparation prévue par l'article 131-15-1.

Il y a lieu de souligner qu’en droit pénal français constituent des


contraventions les infractions que la loi punit d'une amende n'excédant pas
3 000 euros, les contraventions dont le montant de l'amende est le suivant :
1° 38 euros au plus pour les contraventions de la 1re classe ;
2° 150 euros au plus pour les contraventions de la 2e classe ;
3° 450 euros au plus pour les contraventions de la 3e classe ;
4° 750 euros au plus pour les contraventions de la 4e classe ;
5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5e classe, montant
qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le
prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention
constitue un délit.

L’article 131-14 prévoit que pour toutes les contraventions de la 5ième


classe, une ou plusieurs des peines privatives ou restrictives de droits
suivantes peuvent être prononcées :
- La suspension, pour une durée d'un an au plus, du permis de
conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en
dehors de l'activité professionnelle ; cette limitation n'est toutefois pas
possible en cas de contravention pour laquelle la suspension du
permis de conduire, encourue à titre de peine complémentaire, ne
peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité
professionnelle ;
- L'immobilisation, pour une durée de six mois au plus, d'un ou de
plusieurs véhicules appartenant au condamné ;
- La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est
propriétaire ou dont il a la libre disposition ;

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Cours de Droit Pénal Général 2013

- Le retrait du permis de chasser, avec interdiction de solliciter la


délivrance d'un nouveau permis pendant un an au plus ;

- L'interdiction, pour une durée d'un an au plus, d'émettre des chèques


autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès
du tiré ou ceux qui sont certifiés et l'utiliser des cartes de paiement ;

- La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre


l'infraction ou de la chose qui en est le produit. Toutefois, cette
confiscation ne peut pas être prononcée en matière de délit de presse.

Constitue le délit, toute infraction punie de peine correctionnelle.


De l’article 131-3, les peines correctionnelles encourues par les personnes
physiques sont :
1° L'emprisonnement ;
2° L'amende ;
3° Le jour-amende ;
4° Le stage de citoyenneté ;
5° Le travail d'intérêt général ;
6° Les peines privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-6
;
7° Les peines complémentaires prévues à l'article 131-10 ;
8° La sanction-réparation.

Pour ce qui est du crime, il est puni des peines criminelles. Ainsi,
l’article 131-1 du Code pénal français prévoit ce qui suit : Les peines criminelles
encourues par les personnes physiques sont :
1° La réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité ;
2° La réclusion criminelle ou la détention criminelle de trente ans au
plus ;
3° La réclusion criminelle ou la détention criminelle de vingt ans au plus
;
4° La réclusion criminelle ou la détention criminelle de quinze ans au
plus.

La durée de la réclusion criminelle ou de la détention criminelle à temps


est de dix ans au moins. Les peines de réclusion criminelle ou de détention
criminelle ne sont pas exclusives d'une peine d'amende et d'une ou de plusieurs
des peines complémentaires prévues à l'article 131-10 du même code pénal
français.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Les personnes morales subissent elles aussi des peines telles que
prévues dans le droit pénal français. Les peines criminelles ou
correctionnelles encourues par les personnes morales sont :

1° L'amende ;
2° Dans les cas prévus par la loi, les peines énumérées à l'article 131-
3921.

En matière correctionnelle, les personnes morales encourent également


la peine de sanction-réparation prévue par l'article 131-39-1. Il faut souligner
que le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est égal
au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime
l'infraction. Lorsqu'il s'agit d'un crime pour lequel aucune peine d'amende n'est
prévue à l'encontre des personnes physiques, l'amende encourue par les
personnes morales est de 1.000.000 Euros.

Lorsque la loi le prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou


un délit peut être sanctionné d'une ou de plusieurs des peines suivantes :
1. La dissolution, lorsque la personne morale a été créée ou, lorsqu'il
s'agit d'un crime ou d'un délit puni en ce qui concerne les personnes
physiques d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois
ans, détournée de son objet pour commettre les faits incriminés ;
2. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus,
d'exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités
professionnelles ou sociales ;
3. Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance
judiciaire ;
4. La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des
établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de
l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
5. L'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de
cinq ans au plus ;
6. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus,
de procéder à une offre au public de titres financiers ou de faire
admettre ses titres financiers aux négociations sur un marché
réglementé ;
7. L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des
chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le
tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d'utiliser des cartes
de paiement ;

21
C’est ce que prévoit l’article 131-39 du Code Pénal Français.
82 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

8. La peine de confiscation, dans les conditions et selon les modalités


prévues à l'article 131-21 ;
9. L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par
la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par
voie électronique ;
10. La confiscation de l'animal ayant été utilisé pour commettre
l'infraction ou à l'encontre duquel l'infraction a été commise ;
11. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au
plus, de détenir un animal.

La peine complémentaire de confiscation est également encourue de


plein droit pour les crimes et les délits punis d'une peine d'emprisonnement
d'une durée supérieure à un an, à l'exception des délits de presse.

Cependant, les peines définies aux 1° et 3° ci-dessus ne sont pas


applicables aux personnes morales de droit public dont la responsabilité pénale
est susceptible d'être engagée. Elles ne sont pas non plus applicables aux partis
ou groupements politiques ni aux syndicats professionnels. La peine définie au
1° n'est pas applicable aux institutions représentatives du personnel

Les peines contraventionnelles encourues par les personnes morales


sont prévues à l’article 131-40. Il s’agit de :
1° L'amende ;
2° Les peines privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-
42 ;
3° La peine de sanction-réparation prévue par l'article 131-44-1.

Le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est


égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par le règlement
qui réprime l'infraction.

Pour toutes les contraventions de la cinquième classe, l’article 131-42


affirme que le juge a la possibilité de remplacer la peine d'amende par une ou
plusieurs des peines privatives ou restrictives de droits suivantes :
- L'interdiction, pour une durée d'un an au plus, d'émettre des
chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le
tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d'utiliser des
cartes de paiement ;
- La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à
commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.

Les peines ci-après sont simplement infamantes : le bannissement et la


dégradation civique (art. 6, 7 et 8 du code pénal français).

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Cours de Droit Pénal Général 2013

La réclusion criminelle est une peine afflictive et infamante de


droit commun consistant à la privation de la liberté soit à titre perpétuel
soit à titre temporaire. La détention criminelle, par contre, est une peine
politique privative de liberté consistant à l’incarcération du condamné en
principe dans un quartier spécial.

Paragraphe 2. La législation congolaise et face à la tripartition des


infractions

Par rapport à la classification tripartite des infractions, la législation


congolaise a pris une option différente et particulière. En effet, la position
adoptée en droit pénal congolais est l’une des plus simples, car il consacre
l’unicité conceptuelle découlant ainsi de l’utilisation d’un terme unique
globalisant. Il s’agit bien de l’infraction.

L’on peut ainsi reconnaître que le critère de la gravité n’est pas pris en
considération par la législation congolaise pour procéder à la classification des
infractions. Mais, cela n’est certainement pas le cas en ce qui concerne d’autres
critères, en l’occurrence celui de la nature de l’infraction.

Section 2. CLASSIFICATION FONDEE SUR LA NATURE DE


L’INFRACTION

En prenant en considération la nature de l’infraction, on peut distinguer


les infractions de droit commun, des infractions politiques, militaires, de presse
et de service.

Paragraphe 1. Les infractions de droit commun

Les infractions de droit commun sont celles qui peuvent être perpétrées
par toute personne.

Au XIXe et surtout en 1830, un droit pénal spécial s’est développé en


Europe à l’égard des infractions de droit commun, lesquelles demeurent encore
en droit pénal anglo-américain. En matière criminelle, les peines du code pénal
belge sont moins sévères pour les criminels politiques que pour ceux de droit
commun. Ce qui a fait que même la peine de mort était déjà abolie pour ces
infractions (en 1848 c’était le cas en France). En plus, la contrainte par corps
n’était pas applicable aux criminels politiques. Les condamnations politiques ne
faisaient plus obstacles à l’octroi du sursis et ne pouvaient constituer le
condamné en état de récidive.

84 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Il était admis que les incapacités qui frappaient certains criminels de


droit commun ne pouvaient pas s’appliquer aux criminels politiques.

L’amnistie était plus fréquente pour les crimes politiques que pour ceux
de droit commun.

L’extradition ne pouvait pas jouer contre le criminel politique et le droit


d’asile est une institution quasi indéracinable dans le droit international
moderne.

Paragraphe 2. Les infractions politiques

Le concept d’infractions politiques est composite, car il comprend les


infractions politiques pures, les infractions politiques complexes ou mixtes et
les infractions connexes à des délits politiques.

Par infractions politiques pures, il faut entendre les crimes portant


atteinte uniquement à l’ordre politique22.

Il en est ainsi par exemple du complot et de la haute trahison. Cette


doctrine, défendue notamment par HAUS, est qualifiée d’objective. car le
caractère politique de l’infraction est déterminé par la nature de l’intérêt auquel
cette infraction porte atteinte.

Par infractions politiques complexes ou mixtes, il faut entendre celles


qui portent atteinte aussi bien au droit commun qu’au droit politique23. Ce sont
des infractions qui portent atteinte à l’ordre politique par le moyen d’une
infraction de droit commun.

Elles sont appelées « infractions politiques par mobile ». En effet, le


mobile politique qu’a l’auteur d’une infraction peut également caractériser les
infractions politiques. On peut prendre à titre illustratif les actes de terrorisme
contre les particuliers en vue d’attirer l’attention de l’opinion politique ou de
délivrer un message politique de mécontentement. L’exemple le plus classique
d’une infraction politique par mobile ou infraction politique complexe ou mixte
est celui de l’assassinat d’un Chef d’Etat avec un mobile politique dans le but
d’obtenir un changement de régime24.

22
HAUSS (J.J.), Op. cit., n°345.
23
Idem, n°346.
24
AKELE ADAU (P), Analyse et commentaire du nouveau code pénal militaire congolais, (loi n°024/2002 du 18/11/2002) livre
1er les infractions et de la répression en général, inédit.
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Les infractions connexes à des délits politiques sont des infractions


inhérentes à une action politique. Elles se commettent souvent à l’occasion des
insurrections ou des guerres civiles.

Il en est ainsi par exemple des destructions des propriétés publiques et


privées, massacres des adversaires, enlèvement des armes d’un arsenal… bref,
tous les actes de lutte, autorisés par les usagers de la guerre, doivent être
considérés comme des crimes politiques ou pour mieux dire, ils ne forment
qu’un seul et même crime de cette espèce ; car ils sont les éléments constitutifs
de l’insurrection qui a un caractère essentiellement politique. En tenant compte
de leur objet, les infractions qui peuvent constituer celles politiques, réalisent
les atteintes graves aux intérêts fondamentaux de la nation, la participation
délictueuse à un attroupement, en particulier armé, les délits électoraux, les
infractions à la loi sur la liberté de la presse, les infractions de complot, de
haute trahison d’attentat à la sûreté de l’Etat.

De ce qui précède, il convient de retenir que l’infraction politique est


celle qui, dans l’intention de son auteur comme par ses effets, porte
directement et immédiatement atteinte aux institutions politiques ou à l’ordre
politique.

Paragraphe 3. Les infractions militaires

On entend par infractions militaires, celles qui sont prévues et


réprimées par le code pénal militaire du 18 novembre 2002 et qui ne peuvent
être commises que par des militaires ou assimilés25.

Les infractions d’ordre militaire consistent donc en un manquement au


devoir de leur état.

Alors qu’on entend par « militaire » au sens du code pénal militaire


congolais, tout celui qui fait partie des forces armées nationales, c’est-à-dire :
les officiers, sous-officiers et hommes du rang ; les réformés, les réservistes ; les
militaires en congé… (article 107 du code pénal militaire).

Les assimilés sont, en effet, plutôt les membres de la police nationale et


les bâtisseurs de la Nation pour les faits commis pendant la formation ou à
l’occasion de l’exercice de leurs fonctions au sein du Service National (article
106 al. 2 du code pénal militaire).

25
Voir loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant code pénal militaire.
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Les infractions militaires sont de plusieurs catégories :

Les infractions tendant à soustraire leur auteur de ses obligations


militaires comme la désertion (art. 44 du code pénal militaire), l’insoumission
(art. 41 du code pénal militaire)…

Les infractions contre l’honneur ou le devoir. C’est le cas : de l’outrage au


drapeau ou à l’armée (art. 87 du code pénal militaire) ; du complot militaire
(art. 62 du code pénal militaire).

Les infractions contre la discipline. Il y a : la révolte militaire (art. 89 du


code pénal militaire) ; la constitution illégale d’une juridiction répressive (art.
112 du code pénal militaire).

Les infractions aux consignes. On peut citer : l’abandon de poste (art.


116 du code pénal militaire) ; la violation de consigne (art. 113 du code pénal
militaire).

Paragraphe 4. Les infractions de presse

Ces infractions participent au régime de faveur accordé aux infractions


politiques par suite de la tolérance et du respect des idées d’autrui que respecte
et reconnaît la constitution de la République.

Une certaine immunité, un régime procédural favorable, ainsi que


d’autres dispositions favorables caractérisent les infractions de presse qui
forment un tout autre point intéressant du Droit pénal particulier ou
extraordinaire.

A titre d’illustration, l’on peut prendre le cas d’une personne X qui


impute un fait à Monsieur Y à travers un journal. En matière de presse, (et c’est
ce que prévoit en République Démocratique du Congo la loi n°96-002 du 22
juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse); Y peut
demander seulement son droit de réponse pour ainsi écourter la procédure.
Alors que, ceci constitue déjà une infraction en droit commun.

En bref, il conviendra de considérer que les infractions de presse sont


des infractions de droit commun portant atteinte aux personnes, mais se
perpétrant par voie de presse et pouvant bénéficier d’un régime de sanction
spécial et particulier.

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Section 3. LA CLASSIFICATION FONDEE SUR L’ELEMENT MORAL


DE L’INFRACTION

Tenant compte de ce critère, deux sortes d’infraction peuvent être


retenues. Il s’agit donc des : infractions intentionnelles et celles non
intentionnelles.

Paragraphe 1. Les infractions intentionnelles

Ce sont des infractions qui se commettent avec la conscience et la


volonté d’accomplir un acte illicite. L’auteur d’une infraction intentionnelle doit
donc l’avoir commis avec dessein d’attenter à la personne d’autrui, tout en
sachant que cela est prohibé par la loi.

L’infraction est qualifiée d’intentionnel lorsque dans le chef de son


auteur il est retrouvé et la conscience et la volonté de l’accomplir en dépit de
son illicéité.

L’article 46 du code pénal congolais livre II prévoit et sanctionne


l’infraction de coups et blessures volontaires.

Paragraphe 2. Les infractions non intentionnelles

Ces infractions sont perpétrées sans que l’auteur ne les ait prévu ni
voulu. L’auteur d’une infraction non intentionnelle doit avoir violé la loi et ainsi
préjudicié autrui par défaut de prévoyance ou de précaution. Il ne doit donc pas
avoir l’intention ni de violer la loi ni d’attenter à la personne d’autrui.

L’appréciation de l’infraction non intentionnelle se fait dans le chef d’une


même personne. En effet, cette dernière, auteur de l’infraction, ne doit pas être
consciente de l’acte qu’elle commet (ou du moins de son caractère illicite et
illégal). Elle doit également ne pas vouloir le commettre. C’est ainsi que lorsque
cette conscience et cette volonté ne sont pas retrouvée dans le chef d’une même
personne, l’infraction sera qualifiée de non intentionnel.

L’article 53 C.P.L II prévoit et réprime l’homicide involontaire.

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Section 4. LA CLASSIFICATION FONDEE SUR LE MODE


D’EXECUTION

Selon leur mode d’exécution, les infractions sont classifiées en :


infractions de commission ; infractions d’abstention ; infractions instantanées ;
infractions continues ; infractions d’habitude ; infractions collectives ;
infractions complexes ; infractions connexes.

Paragraphe 1. Les infractions de commission et d’abstention

Par infractions de commission, il faut entendre toute infraction d’action


qui s’exécute par un acte matériel et positif qui contrevient à l’ordre de la loi.
Ces infractions subordonnent leurs consommations à l’exécution matérielle et
positive d’un acte violant la loi.

Il est fait un constat selon lequel ces infractions qui sont pourtant les
plus graves sont cependant les plus fréquemment perpétrées. C’est le cas de
l’infraction de vol (art. 79 C.P.LII) et de l’escroquerie (art. 98 du C.P.LII). En ce
qui concerne les infractions d’abstention, l’on doit dire qu’elles sont aussi
appelées infractions d’omission ou d’inaction.

Ce sont des infractions qui, selon leur définition légale, sont des
commissions ou se commettent, mais qui, concrètement, se réalisent par
omission. L’omission dont question ici est celle d’accomplir l’acte ordonné par la
loi. Pénalement, ces infractions qui se consomment par omission ou abstention
sont punissables si la personne coupable a omis de faire ce qui constitue pour
elle une obligation légale, réglementaire ou contractuelle, mais elle n’est pas
punissable si elle a omis simplement de satisfaire à une obligation morale.

A titre d’exemple, il convient de faire allusion à l’article 66 bis et ter du


code pénal congolais livre II qui prévoient et sanctionnent l’infraction de non-
assistance à personne en danger.

Paragraphe 2. Les infractions instantanées et continues

Les infractions instantanées sont celles qui se réalisent par une action
qui s’exécute en un instant ou en un trait de temps.

Pour déterminer le caractère instantané d’une infraction, il importe de


se situer au moment où l’acte a été posé sans se préoccuper de la durée du mal
causé ou de la prolongation de ses effets dans le temps ; le cas de l’accident de
roulage.

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On entend par infraction continue, celle qui est consommée par une
action ou une omission qui se prolonge dans le temps de par la volonté réitérée
et constante de l’auteur. Elle est donc caractérisée par la volonté réitérée et
persistante de l’agent de commettre un acte prohibé par la loi et de se
maintenir dans une situation contraire à la loi.

L’article 67 du code pénal congolais livre II prévoit l’infraction de


détention illégale. Il s’agit aussi de l’exercice illégal de l’art de guérir.

Paragraphe 3. Les infractions d’habitude et les infractions


collectives

Par infraction d’habitude, il faut entendre l’infraction consommée par


des actes répétés ou d’habitude. L’auteur doit donc avoir l’habitude d’accomplir
ces genres d’actes prohibés par la loi.

Chaque élément isolé ne sera pas considéré comme infraction


consommée. Il doit y avoir donc une réitération. C’est le cas de l’auteur de
l’exploitation habituelle de la débauche ou de la prostitution d’autrui de l’article
174 bis al. 4 du code pénal livre II.

Les infractions collectives sont constituées par un ensemble


d’infractions répétées ou successives et qui doivent être envisagées comme un
fait pénal unique. Parce qu’ils dérivent d’une même conception qui est
persistante et d’une même et seule intention délictueuse. C’est le cas de
l’infraction de vol d’une collection d’un ouvrage dans une bibliothèque. Au
cours d’une rixe, A blesse plusieurs personnes ou une même personne
plusieurs fois (infractions successives ou collectives). C’est ici un même fait qui
a une même intention et un même but.

Paragraphe 4. Les infractions complexes et connexes

L’infraction complexe est celle dont l’élément matériel est constitué d’un
seul acte consommant plusieurs infractions. C’est le cas d’un automobiliste qui
tue plusieurs personnes pour avoir ignoré la priorité. C’est l’homicide ou les
coups et blessures involontaires que l’on retiendra et la peine unique la plus
forte sera ainsi prononcée à cause de l’intention ou du but qui est unique. C’est
la peine de l’infraction la plus sévèrement sanctionnée qui devra ainsi être
retenue.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Lorsqu’il n’y a ni unité d’intention ni celle de fait mais plutôt des (faits)
infractions distinctes qui sont unies par un lien assez étroit les faisant
dépendre ou expliquer les unes par rapport aux autres, on parle alors des
infractions connexes.

Le voleur qui tue pour faciliter le vol ou assurer l’impunité de son acte
(art. 85 du code pénal livre II), sera considéré comme auteur d’infractions
connexes, car il y a unité d’intention. Et c’est le cas du concours idéal.

Section 5. LA CLASSIFICATION FONDEE SUR LE MOMENT DE LA


CONSTATION OU L’EPOQUE DE DECOUVERTE

Lorsqu’on prend en considération le moment de leur constatation


matérielle, on classifiera les infractions en deux catégories : d’une part, les
infractions flagrantes et d’autre, part les infractions non flagrantes.

Paragraphe 1. Les infractions flagrantes

L’infraction flagrante est celle qui se commet actuellement ou qui vient


de commettre. C’est le cas d’un monsieur X qui tue ou vient de tuer Y pendant
que Z était présent ou venait d’arriver. Ce dernier aura dans ce cas le pouvoir
de mettre la main sur X et le déférer devant l’autorité judiciaire compétente la
plus proche.

L’infraction est réputée flagrante lorsqu’une personne est poursuivie par


la clameur publique, ou lorsqu’elle est trouvée porteuse d’effets, d’armes,
d’instruments ou papiers faisant présumer qu’elle est l’auteur ou complice,
pourvu que ce soit dans un temps voisin de celui de la commission de
l’infraction26.

Paragraphe 2. Les infractions non flagrantes

Ce sont les infractions qui ont été commises depuis un certain temps et
dont les preuves sont moins certaines.

Section 6. CLASSIFICATION FONDEE SUR LE RESULTAT DE


L’EXECUTION

Lorsqu’on considère le résultat de l’exécution d’une infraction, on


aboutit à distinguer d’une part l’infraction matérielle et d’autre part, l’infraction
formelle.

26
Article 7 du Décret du 06 Août 1959 portant Code de Procédure Pénale.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 1. Infraction matérielle

Elle est celle qui n’est consommée que par la réalisation du résultat
nuisible. Ce qui signifie que dans une infraction matérielle, le résultat est un
élément constitutif de l’infraction. C’est le cas du meurtre, assassinat, vol,
empoisonnement… prévus dans le code pénal ordinaire (livre II).

Paragraphe 2. Infraction formelle

Elle est celle qui existe indépendamment du résultat. Le législateur


incrimine ici le procédé, peu importe que le résultat voulu par l’agent ne soit
pas réalisé.

On peut évoquer : l’administration des substances nuisibles (art. 50 du


code pénal livre II) ; l’incendie volontaire (art. 103 et 104 du code pénal livre II) ;
empoisonnement des eaux et denrées (art. 170 du code pénal militaire).

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CHAPITRE II. LA REALISATION MATERIELLE DE L’INFRACTION

Alors que la morale peut scruter les consciences et sanctionner les


mauvaises pensées et les mauvaises intentions, le droit pénal ne réprime pas
les simples idées ou intentions criminelles. Ce qui se dit en latin : « NEMO
COGITATIONIS POENAM PATITUR » (nul ne peut être puni de peine pour des
pensées).

Le droit pénal ne sanctionne les pensées que si celles-ci se sont


manifestées extérieurement par un fait ou par un acte. C’est cet acte qui est
appelé l’élément matériel de l’infraction. Cet acte peut être positif lorsqu’il
consiste en une action. Il peut être négatif lorsqu’il consiste en une omission ou
abstention.

L’infraction peut être le produit de l’activité intellectuelle de l’homme. il


est vrai que les infractions non intentionnelles existent du seul fait qu’un
résultat dommageable ait été obtenu. Il va s’en dire que les infractions
intentionnelles exigent une certaine durée, ce qui fait envisager tout
naturellement l’ITER CRIMINIS. C’est-à-dire le processus de formation du crime
qui trouvera son aboutissement dans la réalisation criminelle que l’on qualifie
ainsi d’élément matériel requis.

Section 1. LE PROCESSUS DE L’INFRACTION A CONSOMMER

L’élément matériel de l’infraction constitue l’acte par lequel, l’auteur


extériorise ou fait extérioriser sa pensée criminelle.

En effet, le cheminement par lequel devra passer l’infracteur s’appelle


ITER CRIMINIS. Celui-ci comprend non seulement la conception et la résolution
criminelles mais aussi la manifestation de la cogitation criminelle.

Paragraphe 1. L’ « Iter criminis »

Malgré que le législateur congolais réprime les faits criminels accomplis


tels le meurtre, le vol, le viol… Il est naturel que son intervention répressive ne
puisse pas se cantonner au seul niveau du fait ainsi accompli.

Le droit pénal se doit de protéger la société le plus tôt possible dès que
l’indice ou le signe extérieur pourra annoncer le résultat interdit par la loi.
L’infraction peut être immédiate, provoquée et même la conséquence d’un acte
soudain. Elle peut en revanche être préméditée, préparée et même organisée.

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L’école de criminologie italienne du Moyen-âge fut la première à se


préoccuper non pas seulement du résultat simple, mais aussi de la tentative en
relevant ainsi l’élément matériel qui la constitue. Pour cette école, le délit
consommé a seule la plénitude de l’intervention répressive en général. Mais, le
délit manqué et celui tenté ne sont punis que dans les cas graves et d’une
manière adoucie. C’est le cas d’un voleur qui se fait attraper avant de soustraire
l’argent convoité. Cet acte ne sera pas puni de la même façon que celui
effectivement consommé.

L’acte préparatoire et à plus forte raison la simple manifestation de la


résolution criminelle ne peuvent ainsi être réprimés que tant qu’ils ont été
érigés en infraction à titre particulier par la loi.

Paragraphe 2. Examen des stades du processus criminel

Les stades du processus criminel sous-entendent soit la consommation


soit encore la préparation de l’infraction. On considère que l’infraction est
consommée lorsque tous les éléments exigés sont réunis. On ne fait pas
qu’allusion au résultat matériel. Seul, un examen approfondi permettra de
découvrir si tous les éléments constitutifs sont réunis.

La tentative est ainsi moins sévèrement punie dans la pratique et son


auteur peut éviter toute sanction s’il se désiste volontairement.

La consommation, quant à elle, attire la pleine répression et rend le


désistement volontaire impossible. C’est le cas d’une femme qui présente de la
nourriture empoisonnée à son mari qui la consomme. Lorsqu’après la femme se
déclare n’avoir pas voulu éliminer son mari, cela n’aura pas d’incidence. Les
remords consécutifs à la commission d’une infraction peuvent tout au plus être
retenus comme des circonstances atténuantes.

C’est ainsi que la femme qui, après avoir administré la nourriture


empoisonnée à son mari, l’amènera à l’hôpital pour y être soigné et se fera
arrêter elle-même, pourra bénéficier des circonstances atténuantes si le poison
administré ne cause pas de préjudice à son mari suite à son repentir actif et à
temps qui a consisté à amener ce dernier à l’hôpital.

En qui concerne la préparation de l’infraction, il s’avère important de


reconnaître que la phase de la préparation contient la manifestation et les actes
préparatoires.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Il faut dire que l’élément matériel naît en principe des actes


préparatoires. Ces actes préparatoires sont des actes extérieurs par lesquels
l’agent se procure, apprête et dispose les moyens dont il attend se servir pour
mener à bon port son plan criminel. En pratique, ces actes criminels sont
parfois difficiles à distinguer. C’est ainsi qu’il convient de les catégoriser
soit parmi les actes consommant l’infraction, soit encore dans la catégorie des
actes de l’infraction manquée soit enfin dans la classification des infractions
tentées.

La question fondamentale qui se pose dès lors est celle de savoir à partir
de quel instant l’activité infractionnelle tombe sous le coup de la loi pénale. L’on
cherche ainsi à savoir si la sanction pénale ne doit être prononcée qu’à
l’encontre de l’agent qui serait allé jusqu’au bout de son projet ou si
l’accomplissement de certains actes suffit pour justifier l’application de la
sanction pénale. Ce qui conduit à l’analyse de l’infraction consommée, tentée et
manquée dont l’explication s’inscrit dans le cadre de l’examen d’une question
plus globale : celle de la tentative.

Section 2. L’INFRACTION INACHEVEE : LA TENTATIVE


PUNISSABLE

L’article 4 du code pénal ordinaire livre 1er dispose : « Il y a tentative


punissable lorsque la résolution de commettre l’infraction a été manifestée par
des actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution de cette infraction
et qui n’ont été suspendus ou qui n’ont manqué leur effet que par des
circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur. La tentative est punie de
la même peine que l’infraction consommée ».

C’est également la même opinion qu’a adopté le législateur congolais


dans le code pénal militaire à l’article 4 de la loi n°024/2002 du 18 novembre
2002.

L’analyse de cette disposition légale, laisse entrevoir les deux formes de


la tentative punissable, à savoir : d’une part, celle dont l’exécution a été
suspendue ou interrompue par une cause extérieure à l’agent : c’est l’infraction
tentée ; d’autre part, celle qui a manqué son effet alors que tous les actes
d’exécution ont été accomplis : c’est l’infraction manquée.

Par ailleurs, la doctrine a ajouté une autre variante qu’il importera


également d’examiner : celle de l’infraction impossible.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 1. L’infraction tentée

Alors que l’article 4 du code pénal ordinaire est à tous égards identique
à l’article 4 du code pénal militaire congolais, l’article 51 du code pénal belge
dispose : « Il y a tentative punissable lorsque la résolution de commettre un crime
ou un délit a été manifesté par les actes extérieurs qui forment un commencement
de ce crime ou de ce délit et qui n’ont été suspendu que par des circonstances
indépendantes de la volonté de l’auteur ».

La confrontation des textes ci-haut présentée est illustrative pour trois


questions :
- la classification tripartite des infractions ne figure pas dans le
code pénal congolais ;
- la peine prévue par le code pénal congolais est dans son article 4
alors que celle prévue au code pénal belge est à son article 52 ;
alors que le code pénal congolais prévoit une peine égale ;
- le code pénal belge prévoit l’application immédiate de la peine
inférieure.

De ce fait, il convient de tirer ainsi une double conclusion :


- le législateur colonial laissait au Congolais beaucoup de
discrétions dans son analyse de l’infraction et ne l’obligeait pas à
jouer à la triple clarté de la classification tripartite ;
- le législateur colonial devait punir aussi sévèrement les tentatives
que les infractions consommées indiquant ainsi son désir de
régulariser et de réprimer la criminalité dans la colonie de façon
plus drastique qu’elle semble l’être dans la métropole.

On se rend ainsi compte que l’infraction tentée ou la tentative


punissable proprement dite consiste dans le non aboutissement de l’entreprise
criminelle du fait de la suspension des actes extérieurs de commencement
d’exécution.

Elle suppose donc les éléments suivants :


- la résolution de commettre une infraction ;
- la manifestation de la résolution par des actes extérieurs ;
- la formation du « commencement d’exécution » par les actes
extérieurs ;
- l’interruption de l’entreprise criminelle.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

A. La résolution (criminelle) de commettre une infraction

Il ne s’agit pas seulement de l’intention, mais de la décision de


commettre une infraction déterminée. Deux aspects importants doivent être
soulignés ici : d’une part, les infractions non intentionnelles, c’est-à-dire celles
résultant d’un acte d’imprudence, de négligence ou d’imprévoyance, sont
incompatibles avec la notion de la tentative punissable. D’autre part, ce qui est
puni ce n’est pas la tentative prise dans l’abstrait, mais la tentative d’une
infraction déterminée.

C’est ainsi que l’usage de l’échelle pendant la nuit peut constituer


l’indice d’une résolution de commettre soit un vol, soit un attentat à la pudeur,
soit encore un viol. Si on ne parvient pas à prouver l’une ou l’autre, on ne
pourra pas établir la tentative et punir cet agissement sauf si cet agissement en
lui-même est érigé en infraction.

B. La manifestation de la résolution par des actes extérieurs

La résolution criminelle, qui est purement psychologique, ne suffit pas à


rendre punissable la tentative, car la loi ne punit pas le seul dessein de
commettre une infraction. Pour que l’on retienne la tentative, il faut que cette
résolution de commettre l’infraction soit manifestée par des actes extérieurs.

En d’autres termes, tant que la résolution criminelle reste dans la tête


de l’agent, il n’y a en principe aucune possibilité de mettre en branle le
mécanisme de la tentative punissable. C’est donc la révélation de cette
intention par des actes extérieurs qui va, en quelque sorte, mettre la puce à
l’oreille de l’autorité pénale. Mais, il faut dire que ceci ne règle pas totalement la
difficulté de l’entreprise. Il faut encore déterminer la nature de ces actes
extérieurs.

C. Ces actes extérieurs doivent former « commencement


d’exécution »

Les actes extérieurs ne consistent donc pas en des comportements ou


attitudes quelconques. La résolution criminelle doit se matérialiser dans des
« actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution » de l’infraction,
c’est-à-dire « un ou plusieurs faits dont la série constitue la mise en œuvre des
moyens réunis par l’agent pour aboutir au résultat prohibé ».

Il s’ensuit donc que la tentative punissable exclut les actes


préparatoires. Elle n’est pas non plus possible en matière d’omission. C’est
ainsi qu’il n’y a par exemple pas de tentative de refus d’obéissance.

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Car, en effet, celle-ci s’appuie sur une intention délibérée de manquer à


un devoir déterminé. L’acte extérieur qui manifeste cette intention, c’est
précisément cette abstention d’obéir qui est en soi coupable, donc constitutive
d’une infraction parfaitement consommée. (Articles 93 et 94 du code pénal
militaire).

Il convient ainsi de distinguer les actes préparatoires des actes


d’exécution.

Par actes préparatoires, l’agent se procure les moyens de l’infraction,


lesquels ne manifestent cependant pas avec certitude l’intention de la
commettre ; en revanche, par les actes d’exécution, il met ces moyens en
œuvre. Il existe des critères qui ont été proposés, mais ceux-ci ne rendent pas
nécessairement compte de toutes les situations.

Il s’agit des critères ci-après :


- le critère de l’univocité ;
- le critère de la proximité ; et
- le critère de la tendance objective et subjective.

En ce qui concerne le critère de l’univocité, il faut dire que ne sera pas


considéré comme un acte d’exécution l’acte équivoque qui peut encore faire
l’objet de diverses interprétations.

Quant à celui de la proximité : l’acte trop éloigné de la fin proposée


laisse place à un abandon du projet criminel.

Pour ce qui est du critère tiré de la tendance objective ou de la tendance


subjective, il convient de reconnaître qu’alors que le premier envisage le
commencement d’exécution d’un point de vue matériel, selon lequel celui-ci
réalise lorsque l’agent a commis un des faits qui figurent parmi les éléments
constitutifs de l’infraction. Le second, quant à lui, l’envisage d’un point de vue
psychologique, révélant de façon univoque la volonté de l’agent de commettre
une infraction déterminée.

Face aux limites de ces différents critères de distinction, on peut


prendre en compte à la fois l’activité matérielle et la résolution criminelle. Le
commencement d’exécution doit être déterminé à la fois par la distance
matérielle et morale très courte.

98 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En définitive, l’on doit dire que dans les faits, la frontière est difficile à
tracer. C’est ainsi que le législateur en a laissé le soin aux tribunaux, dans
chaque cas d’espèce. Les principes directeurs issus de la jurisprudence, devant
guider le juge sont ceux-ci :
- le juge recherchera le but poursuivi par le criminel ;
- il devra comparer le but poursuivi à l’acte posé et l’intention de
l’auteur ;
- il décidera si l’acte est nécessaire pour atteindre le but ;
- il décidera aussi si l’acte était moralement si près du point de
réussite que l’agent en parcouru le reste de la distance seul ;
- il interprétera favorablement pour l’accusé lorsque l’acte n’indique
pas clairement l’intention de cet accusé ;
- il se montrera favorable si l’acte est susceptible de deux
interprétations, l’une favorable et l’autre défavorable à l’accusé.

Pour que l’on retienne la tentative, il faut que l’exécution soit


interrompue. Car, autrement l’exécution serait complète, consommée de même
un échec. L’arrêt d’exécution par des circonstances indépendantes de la volonté
de l’auteur de l’acte, forme commencement d’exécution. Il y a pour cela
tentative et elle est punissable.

D. L’interruption de l’entreprise criminelle

Le législateur retient deux moralités d’interruption de l’entreprise


criminelle constitutive de la tentative punissable. Il s’agit de :
- la suspension involontaire des actes d’exécution ; et
- le désistement volontaire.

Le désistement volontaire, quant à lui, n’est opérant que lorsque les


actes d’exécution déjà accomplis ne constituent pas en eux-mêmes une
infraction. Si la renonciation de l’agent est spontanée, c’est-à-dire qu’elle ne
résulte pas d’un événement extérieur comme par exemple, la réaction de la
victime, l’interruption des forces de l’ordre. Enfin, lorsque cette dénonciation
traduit bien évidemment la volonté de l’agent de ne pas conduire à son terme
cette entreprise criminelle et qu’elle ne résulte pas de ce que l’auteur a cru que
ces actes avaient atteint l’effet escompté.

C’est ainsi que le législateur accorde l’impunité au désistement


volontaire spontané. Mais, il faut admettre par ailleurs que le juge reste libre
d’analyser le fait avant d’accorder l’impunité.

99 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. L’infraction manquée

L’infraction manquée est celle dans laquelle l’échec de l’entreprise


criminelle n’est pas imputable à l’agent : les actes extérieurs qu’il a accomplis et
qui manifestent sa résolution criminelle n’ont manqué leur effet qu’en raison de
circonstances indépendantes de sa volonté. C’est que tous les actes extérieurs
réclamés pour l’exécution de l’infraction doivent avoir été accomplis, mais ne
manquer d’effets que suite aux circonstances extérieures à bonne volonté de
l’auteur. A la différence de la tentative où l’exécution est incomplète, l’infraction
manquée suppose l’exécution complète. L’action doit donc se dérouler dans sa
totalité.

Pour parler de l’infraction manquée, deux conditions sont requises : il


faut que l’agent ait accompli tous les actes d’exécution de l’infraction ; ces actes
doivent avoir manqué leur effet à la suite d’une circonstance indépendante de la
volonté de l’agent.

En conséquence, l’infraction manquée n’est concevable que pour les


infractions matérielles, c’est-à-dire celles qui requièrent la réalisation d’un
résultat déterminé. Elle n’est pas concevable en matière d’infractions formelles
(Article 170 du code pénal militaire prévoit l’infraction d’empoisonnement des
eaux ou des denrées consommables).

Il y a infraction manquée lorsqu’un meurtrier blesse mortellement sa


victime qui n’a pu être sauvée que grâce à l’intervention d’un médecin. De
même, il y a crime manqué lorsque l’agent a placé la bombe à l’endroit où la
victime devait passer mais que ladite bombe n’explose pas à l’heure fixée et que
par conséquent, la personne visée n’est pas atteinte.

L’agent doit, en effet, ne pas intervenir pour neutraliser volontairement


les effets de l’infraction. Au cas contraire, il y a désistement volontaire qui le fait
échapper à la sanction. Il en est ainsi d’un agent qui, après avoir noyé sa
victime, se jette lui-même dans l’eau, se précipite et réussit à l’en sortir avant
tout dégât.

Il convient de noter que le désistement volontaire ne peut entraîner


l’impunité que s’il intervient avant que l’infraction n’ait été consommée, c’est-à-
dire avant d’atteindre le résultat recherché. Une fois l’infraction consommée, si
l’auteur s’emploie à en réparer les effets et conséquences, il y a repentir actif et
non désistement. Le repentir actif, à la différence du désistement, est postérieur
à l’accomplissement de l’infraction et n’en efface pas le caractère délictueux.

100 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

L’infraction subsiste donc et l’agent sera poursuivi et condamné. Le


repentir actif, mais tardif, est, quant à lui, inopérant. Le juge peut cependant le
retenir comme circonstance atténuante au bénéfice de l’agent.

Il importe de ne pas confondre le cas de désistement volontaire de


l’hypothèse de l’ERROR PERSONAE (l’erreur sur la personne). L’article 43 du
code pénal ordinaire dispose ce qui suit : « Sont qualifiés volontaires, l’homicide
commis et les lésions causées avec le dessein d’attenter à la personne d’un
individu déterminé ou de celui qui sera trouvé ou rencontré, quand même ce
dessein serait dépendant de quelque circonstance ou de quelque condition et lors
même que l’auteur se serait trompé dans la personne de celui qui a été victime de
l’attentat ».

On se rend ainsi compte, que le législateur vise principalement deux


types d’erreur : D’une part, l’erreur intellectuelle ou psychologique qui consiste
pour l’agent à se méprendre sur l’identité de la victime. C’est le cas d’un agent
qui tue un monsieur X qu’il prend par erreur, pour son ennemi Y. D’autre part,
l’erreur matérielle ou l’ABERRATIO ICTUS qui consiste dans une maladresse
physique, une déviation malencontreuse du coup qui atteint mortellement une
autre personne que celle visée par l’agent.

L’hypothèse de l’erreur sur la personne ne constitue pas un délit


manqué. Il y a meurtre consommé peu importe que l’agent ait visé ou non une
personne déterminée, peu importe que l’agent ait commis une erreur sur
l’identité de la victime ou que par maladresse, il ait atteint une personne autre
que la victime visée. Il faut dire pour cela que la société n’a pas d’intérêt à
préférer tel être déterminé à tel autre. C’est ainsi qu’en plus du meurtre
consommé sur la personne atteinte, le juge peut retenir l’homicide volontaire
manqué sur la personne que l’agent visait27. Comme l’infraction tentée,
l’infraction manquée est punie de la même peine que l’infraction consommée.

La prise en compte du résultat manqué peut donner ainsi lieu à une


autre forme d’infraction manquée appelée « infraction impossible ».

Paragraphe 3. L’infraction impossible

L’infraction est impossible lorsque le résultat recherché par l’agent ne


peut pas être atteint soit par manque d’objet, soit par inefficacité de moyens
utilisés.

27
LIKULIA BOLONGO, Droit pénal spécial zaïrois, LGDJ, Paris, T1, 2ère éd., T.2., L.G.D.J., 1985, pp.58-59.
101 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est que l’infraction ne peut se réaliser soit à défaut d’objet (le cas
d’une tentative d’avortement sur une femme qui en réalité n’est pas enceinte, le
fait pour un agent de mettre sa main dans une poche vide pour réaliser le vol)
soit du fait de l’inefficacité des moyens employés, c’est-à-dire, par défaut de
moyens nécessaires ou de moyens requis par la loi (par exemple une tentative
de meurtre avec une arme non chargée ou chargée à blanc).

Il convient de noter cependant que l’infraction impossible se rapproche


de l’infraction manquée en ce que, dans les deux cas, il y a d’une part exécution
complète de tous les actes matériels du délit, d’autre part, échec de l’entreprise
criminelle en raison de circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur.

Dans l’hypothèse de l’infraction impossible, cette circonstance tient à


l’ignorance dans laquelle se trouve l’agent de l’impossibilité matérielle de
réaliser le crime. La seule différence par rapport à l’infraction manquée réside
dans le fait que dans ce dernier cas, le résultat aurait très bien pu être atteint,
alors que dans l’infraction impossible, il ne pouvait pas être matériellement
obtenu.

Ainsi, l’infraction impossible réunit toutes les conditions de la tentative


punissable que sont : l’intention coupable, les actes matériels d’exécution et
l’absence de désistement volontaire.

Mais, la question fondamentale est celle de savoir si l’impossibilité du


résultat doit rendre cette forme de tentative non punissable, alors même que
l’intention criminelle de l’agent et donc sa dangerosité ne font l’ombre d’aucun
doute.

* CRITERES DE PUNISSABILITE

Répondant à cette question, la doctrine classique hésite entre


l’impunissabilité de l’infraction impossible préconisée par la théorie objective
dégagée par l’Allemand VON FEUERBACH et la répression systématique de
l’infraction impossible proposée par la théorie subjective dont se réclament
notamment Eric GARCON et le mouvement de la défense sociale.

Rejetant ces deux théories pour leur caractère radical, certains auteurs
avancent des solutions de compromis dont les plus célèbres distinguent d’une
part entre l’impossibilité absolue et l’impossibilité relative, d’autre part, entre
l’impossibilité de fait et l’impossibilité de droit.

102 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

a. Impossibilité absolue et impossibilité relative

La paternité de la théorie de compromis (transactionnelle) se rapportant


à la distinction entre l’impossibilité absolue et l’impossibilité relative, est
attribuée à MITTERMAIER.

D’après cette théorie, l’impossibilité absolue entraîne l’impunité de


l’infraction impossible alors que celle relative n’exclue pas la répression.

L’impossibilité est absolue lorsque :


- l’objet n’existe pas ou n’a pas la qualité qui est essentielle pour
l’existence de l’infraction ; ou
- lorsque les moyens employés sont inefficaces et ne peuvent
nullement produire l’effet que l’agent recherche.

A titre illustratif, on peut évoquer (comme exemple d’impossibilité


absolue quant à l’objet) :
- le fait pour l’agent de tuer une personne déjà morte ;
- le fait pour une personne d’étrangler un enfant mort-né ;
- le fait pour un médecin incompétent d’administrer des substances
abortives à une femme qu’il croit enceinte alors qu’elle a
simplement pris du poids…

En ce qui concerne l’impossibilité absolue quant au moyen, l’on retient :


- le fait pour un agent, voulant empoisonner son ennemi,
d’administrer à celui-ci des substances non toxiques ;
- le fait pour une mère d’administrer à sa fille des anodins croyant
que ce sont des abortifs ;
- le fait pour un délinquant de tirer sur sa victime en se servant
d’une arme à feu déchargée.

En revanche, l’impossibilité est relative :


- lorsque l’objet existe mais ne se trouve pas ou plus à l’endroit où
l’agent croyait le trouver ; ou
- lorsque les moyens employés, bien qu’étant en eux-mêmes
efficaces, n’ont pas produit le résultat recherché par suite de leur
utilisation maladroite.

C’est ainsi qu’il y a impossibilité relative quant à l’objet :


- lorsque les pillards s’emploient à vider de son contenu une
boutique dégarnie d’avance à leur insu ;

103 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

- lorsque les bandits pourchassent et arrêtent une fourgonnette


d’une banque pour s’emparer des sacs d’argent, alors que ceux-ci
ont été chargés dans une voiture banale d’un client…

Il y a impossibilité relative quant au moyen dans le cas :


- d’un mauvais tireur qui, se servant d’une arme pourtant bien
chargée, rate sa victime par maladresse ;
- d’une personne qui, pour perpétrer l’infraction de vol, se sert
maladroitement de ses instruments et n’arrive pas à défoncer une
malle d’argent…

b. Impossibilité de droit et impossibilité de fait

D’après les auteurs qui soutiennent cette distinction, seule


l’impossibilité de droit entraîne l’impunité de l’infraction impossible.
L’impossibilité de fait n’influe nullement sur la répression.

Il y a impossibilité de droit lorsqu’un élément constitutif de l’infraction


fait défaut. Ceci n’est, en effet, qu’une conséquence ou une application du
principe de la légalité.

Quand l’impossibilité n’est pas de droit, elle est de fait. Elle est liée à des
circonstances qui ne sont pas un élément de l’infraction. Ainsi, peut-on parler
d’impossibilité de fait lorsqu’un assassin, muni de son arme bien chargée pour
éliminer son ennemi, fait le guet dans un coin de rue où celui-ci passe
habituellement, mais en vain, car la victime potentielle a emprunté une autre
voie.

Il faut dire que dans la pratique, il est souvent difficile d’opérer toutes
ces distinctions entre impossibilité absolue et impossibilité relative, ou
impossibilité de droit et impossibilité de fait. La jurisprudence apprécie
restrictivement les cas d’exonération pour ne retenir l’impunité qu’en cas de
délit absurde et de délit putatif.

c. Le délit absurde et le délit putatif

Délit absurde. Il y a délit absurde, autrement appelé délit surnaturel,


lorsque le moyen mis en œuvre est chimérique et ne présente… aucun rapport
de convenance, d’après l’expérience de vie avec le résultat recherché.

Est absurde par exemple, le fait pour un agriculteur de faire un


pèlerinage pour tuer son ennemi, ou encore le fait pour une femme d’utiliser
une formule magique ou une prière pour obtenir la mort de sa rivale.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Il n’y a donc pas de tentative punissable lorsque l’acte est sans lien avec
le résultat recherché, comme le fait de vouloir tuer quelqu’un par envoûtement,
ou avec un jouet d’enfant.

Délit putatif. Il y a délit putatif, lorsque l’illégalité des faits tels que
l’agent les a accomplis n’existe que dans son imagination.

C’est le cas d’un agent qui croît commettre une infraction en vendant du
diamant, tout simplement parce qu’il ignore les dispositions qui en libéralisent
l’exploitation, la détention, le transport et la vente (Ordonnance-loi n°82-039 du
05 novembre 1982, modifiant et complétant l’ordonnance-loi n°81-013 du 02
avril 1981, portant législation générale sur les mines et hydrocarbures).

Il n’y a ni recel d’évadé, ni tentative de recel d’évadé de la part d’une


personne qui croit avoir pris à son service un militaire recherché pour évasion
(infraction prévue à l’article 186 du code pénal militaire), alors que celui-ci avait
été libéré régulièrement.

105 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

CHAPITRE III. L’ELEMENT MORAL DE L’INFRACTION

Pour que l’infraction existe juridiquement et que son auteur en réponde


pénalement, il ne suffit pas que celui-ci ait accompli un acte matériel (élément
matériel), préalablement défini et sanctionné par le législateur (préalable légal).
Encore faut-il que cet acte matériel ait été l’œuvre de la volonté ou de
l’imprudence de son auteur. C’est ce lien entre l’acte matériel et l’auteur qui
constitue l’élément moral ou intellectuel de l’infraction que l’on appelle MENS
REA (volonté criminelle) par opposition à l’ACTA REUS (acte criminel).

L’élément moral de l’infraction intervient pour mieux juger de la


responsabilité d’une personne. Le cas d’un épileptique qui perd le contrôle de
son véhicule et tue 3 enfants.

Il faut dire que toute infraction n’est constituée et n’est punissable que
si son auteur a eu la volonté ou la conscience de violer la loi pénale.
Néanmoins, cette volonté ne joue pas le même rôle ou n’a pas la même étendue
dans toutes les infractions. Dans certaines infractions, la volonté ne porte que
sur l’acte lui-même. Dans d’autres, elle porte à la fois sur l’acte et sur ses
conséquences.

Ainsi, Georges STEFANI, Georges LEVASSEUR et Bernard BOULOC


affirment que « lorsque l’auteur a voulu l’acte et ses conséquences et qu’il a
accompli l’acte pour les produire, on dit qu’il y a intention criminelle ou dol
pénal (le cas du meurtre, de l’assassinat, du vol…). Quand l’auteur a voulu
l’acte sans en vouloir les conséquences, qu’il aurait dû prévoir et pu éviter, on
dit qu’il y a faute pénale (c’est le cas de l’homicide et blessures par
imprudence).

En tenant ainsi compte de l’élément moral, les infractions peuvent se


regrouper en deux catégories :
- les infractions intentionnelles ; et
- les infractions non intentionnelles.

Section 1. LES INFRACTIONS INTENTIONNELLES

L’infraction est intentionnelle lorsqu’elle est commise avec le dol qui est
la résolution criminelle ou la détermination de commettre une action dont on
connaît le caractère délictuel.

Le dol criminel ou pénal est donc la volonté qui anime l’agent


d’accomplir un acte défendu par la loi ou de s’abstenir d’un acte ordonné par
elle.

106 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Les éléments du dol sont la connaissance et la volonté.

Le dol pénal, qui est la caractéristique des infractions intentionnelles,


comporte plusieurs degrés. On distingue :
- le dol général,
- le dol spécial et le dol plus spécial ;
- le dol simple et le dol aggravé ;
- le dol déterminé et le dol indéterminé ;
- le dol direct et le dol indirect.

Paragraphe 1. De la connaissance et de la volonté

Pour qu’une infraction soit qualifiée d’intentionnelle, il faut que l’agent


ait su que l’action qu’il commettait était contraire à la loi et qu’il ait eu la
volonté de la réaliser tout de même.

A. La nécessité de la connaissance

L’auteur doit avoir su ce qu’il faisait et il devait être à mesure de


contrôler son activité. Il doit être conscient de ce qu’il fait. Il doit jouir de toutes
ses capacités mentales. L’acte lui imputé ne doit pas être le résultat du hasard
ou d’autres circonstances mais bien le résultat réel ou prévisible provenant
d’un homme raisonnable, qui ne doit pas s’abandonner à l’imprévoyance ni au
défaut de précaution.

B. La nécessité de la volonté

L’agent doit non seulement avoir connaissance du caractère délictuel de


l’acte mais aussi vouloir le commettre. Ce qui signifie qu’il ne doit pas être
amené à l’infraction par des circonstances extérieurs. C’est le cas de monsieur
X qui désire tuer Y à 18 h 30 minutes, et qui le tue vers ces heures par des
moyens voulus et mis en place par lui. Mais lorsqu’en voulant tuer Y, X atteint
Z, il y a bien sûr connaissance et conscience du caractère délictuel de l’acte ;
seulement que le résultat voulu n’est pas celui obtenu. L’infraction existe tout
de même (art. 43CP).

Paragraphe 2. Le dol général, le dol spécial et le dol plus spécial

A. Le dol général

Il consiste dans la volonté d’accomplir un acte que l’on sait défendu ou


interdit par la loi.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le dol général est une condition souvent tacite de toutes les infractions.
C’est ainsi qu’il a été jugé que le « dol est un élément essentiel pour l’existence
de toute infraction prévue par les différentes dispositions qui forment le code
congolais, sauf dans le cas où le texte lui-même prévoit expressément la simple
faute, la simple négligence »28.

Pour préciser ce dol général, il arrive par moments que le législateur vise
expressément le dol en ayant recours à certains termes comme : à dessein,
volontairement, sciemment, sachant, connaissant, avec connaissance29.

B. Le dol spécial

Il est aussi appelé dol spécifique. Lorsqu’on prend le cas des infractions
de meurtre et de vol, on se rend ainsi compte que : Dans le meurtre, la volonté
consciente de violer la loi ne suffit pas ; il faut en autre que l’agent ait eu la
volonté de donner la mort. C’est donc l’animus necandi. Cet animus necandi
constitue l’élément intellectuel spécial appelé aussi dol spécifique de l’infraction
de meurtre (articles 44 et 45 CPL II).

En ce qui concerne l’infraction de vol (article 79 CPL II) et généralement


dans toutes les infractions contre les propriétés (abus de confiance,
escroquerie…), la volonté consciente de violer la loi ne suffit pas. Elle ne
constitue donc que le dol général.

Mais, le vol ne pourra être consommé que lorsqu’en plus de ce dol


général il est prouvé que l’agent a eu l’intention de s’approprier injustement la
chose d’autrui.

Il faut noter que la loi ne mentionne pas toujours expressis verbis le dol
spécial. Le juriste dégagera souvent l’existence de celui-ci à partir de la nature
même de l’infraction. C’est ainsi par exemple que l’outrage à un fonctionnaire
(article 136 du CPL II) ne peut pas se réaliser sans animus injuriandi. L’auteur
de l’acte est animé de l’intention de suivre, d’injurier, de faire souffrir le
fonctionnaire. Ce qui ne doit pas se confondre au mobile de l’infraction.

C. Le mobile de l’infraction

Le dol spécial n’est pas à confondre avec le mobile. En effet, le


mobile c’est l’intérêt ou le sentiment personnel qui a déterminé l’agent à
perpétrer l’infraction.

28
Boma, 15 juillet 1902, Jur. Et. I., p.202.
29
Articles 45 du code pénal congolais livre II et 54 du code pénal militaire congolais.
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Il peut s’agir d’un sentiment de haine, de vengeance, de jalousie, d’amour, de


pitié, de cupidité, de convoitise, etc…Le mobile est donc le but ou même le motif
qui se trouve à la base de toute infraction.

Alors que l’intention criminelle est un élément intrinsèque et


fondamental des infractions intentionnelles, le mobile, quant à lui, lui est
individuel, personnel, variable d’une infraction à l’autre. Il est pour cela
extrinsèque à l’infraction. Il peut être louable ou blâmable sans affecter la
détermination du caractère intentionnel de l’acte.

En droit pénal, le mobile est inopérant. Autrement dit, celui-ci ne


tient pas compte du mobile en ce qui concerne l’existence de l’infraction. Ainsi,
sera puni conformément aux articles 44 et 45 du CPL II, tout assassin quel
qu’ait été le sentiment ou le mobile qui a commandé son crime, qu’il ait tué par
pitié (comme c’est le cas dans l’euthanasie), qu’il ait tué par amour (crime
passionnel) ou par vengeance. De même, tout auteur de vol simple se verra
appliquer les peines de l’article 80 du CPL II, peu importe qu’il ait violé par
convoitise, par cupidité ou par manie (le cas des kleptomanes).

En criminologie, le mobile est opérant. Il importe de noter que si en


droit pénal le mobile est inopérant et donc indifférent ; en criminologie, il
présente un certain intérêt. Car le juge en tient souvent compte tant en amont
pour rechercher les preuves qu’en aval pour opérer le choix sur la mesure de la
peine la plus adaptée à la personnalité et à la situation spécifique du
délinquant30.

Il pourra le retenir ainsi comme circonstance atténuante. C’est le cas de


l’agent qui exerce illégalement l’art de guérir. Il est animé de l’intention
criminelle peu importe le mobile qui l’anime.

D. Le dol plus spécial

Il arrive par moments que le législateur érige parmi les différents buts
poursuivis par l’auteur, un but précis et particulier en élément constitutif de
certaines infractions. Un tel mobile est alors qualifié de dol plus spécial.

Il en est ainsi de l’article 68 du Code pénal qui dispose ce qui suit : « Est
puni de … celui qui a enlevé ou fait enlever, arrêté ou fait arrêter, détenu ou fait
détenir des personnes quelconques pour les vendre comme esclaves ». En effet,
pour les vendre comme esclaves constitue donc un intérêt tout à fait
particulier, un mobile érigé en élément constitutif de l’infraction, un dol plus
spécial.
30
LIKULIA BOLONGO, Op. cit., pp.54-58.
109 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est aussi le cas de l’article 200 du C.P. qui dispose ce qui suit :
« L’attentat dont le but aura été de porter le massacre, la dévastation ou le pillage
sera puni de mort ». Dès lors, porter le massacre, la dévastation ou le
pillage, constitue le but poursuivi par l’agent en commettant cette infraction.
Ce but constitue un intérêt personnel mais érigé en élément constitutif de
l’infraction par le législateur lui-même. L’article 164 de la loi n° 024/2002 du
18 novembre 2002 portant Code Pénal Militaire prévoit le crime de Génocide en
ces termes : « Par génocide, il faut entendre l’un des actes ci-après commis dans
l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, politique, racial,
ethnique, ou religieux…». Pour cette infraction de génocide, le dol spécial
consiste en cette « intention » de l’agent, de détruire partiellement ou
totalement un groupe.

Paragraphe 3. Le dol simple et le dol aggravé

Le dol est susceptible de degrés dont la prise en compte peut influer sur
la qualification et la sanction. On oppose ainsi le dol simple qui entraîne la
peine ordinaire, au dol aggravé, réfléchi ou prémédité qui entraîne une peine
plus sévère. Le législateur distingue donc ici le mouvement spontané du
dessein réfléchi (ou prémédité).

Les alinéas 1 et 2 de l’article 46 du C.P. prévoient :


- Alinéa 1er : « quiconque a volontairement fait des blessures ou porté
des coups est puni d’une servitude pénale de huit jours à six mois
et d’une amende de vingt-cinq à deux cents…».

- Alinéa 2 : « En cas de préméditation, le coupable sera condamné à


une servitude pénale d’un mois à deux ans… ».

On se rend ainsi compte que la préméditation à ce niveau constitue une


circonstance aggravante de l’infraction des coups volontaires.

Paragraphe 4. Le dol déterminé et le dol indéterminé

Cette distinction tient compte non plus du degré ou de l’intensité de la


volonté (comme dans les distinctions précédentes) mais plutôt des résultats de
cette volonté.

On parle du dol déterminé lorsque l’agent a voulu d’une façon précise,


commettre telle infraction (meurtre, vol ou viol…) et cela à l’encontre d’une telle
personne déterminée.

110 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En revanche, il est indéterminé lorsque l’agent n’a pas voulu commettre


telle infraction de façon précise ou lorsqu’il n’a pas visé telle personne
particulière. Dans ce cas, l’agent veut simplement tuer quelle que soit la victime
ou encore, il veut simplement voler quelle que soit la personne qui sera prise
dans le filet. En règle générale, la sanction à infliger au délinquant sera
proportionnée au résultat obtenu, c’est-à-dire à la gravité du dommage éprouvé
par la victime. Le législateur congolais décide à l’article 43 du code pénal que
l’identité de la victime est indifférente dès lors que l’intention de tuer est établie.

Ce principe de l’indifférence de l’identité de la victime s’étend à toutes


les infractions (vol, viol, arrestation arbitraire, détention illégale…).

Mais ce principe ne joue pas lorsque la qualité de la victime est un


élément constitutif de l’infraction. L’article 136 du code pénal est illustratif à ce
sujet. Car l’incrimination ne peut être retenue que si la victime est revêtue de la
qualité de fonctionnaire. Si la victime n’a pas cette qualité, l’agent ne pourra
être condamné que pour des coups ou des injures simples.

Paragraphe 5. Le dol direct et le dol indirect

Le dol est direct lorsque l’agent recherche le résultat prohibé par la loi et
pénalement sanctionné. Dans le cas contraire, il est indirect.

Comme dol direct, on peut prendre à titre illustratif le cas d’un


monsieur X qui désire tuer Y et qui le tue effectivement. La mort de Y, dans ce
cas, est le résultat voulu par X et obtenu précisément et exactement. Par
ailleurs, le dol direct peut être déterminé ou indéterminé. C’est le cas d’un
agent qui veut tuer mais pas une personne précise. Lorsqu’il tire dans la foule,
et qu’il réussit à tuer une personne quelconque sans se préoccuper de l’identité
de la personne victime, il s’agit là d’un dol direct mais indéterminé.

Quant au dol indirect, il se présente sous deux formes distinctes :


- dol nécessaire ; et
- dol éventuel.

A. Le dol nécessaire

Le dol est nécessaire lorsque l’agent accepte un résultat comme


nécessairement lié au but réel qu’il recherche.

A titre d’illustration, l’on peut prendre le cas d’un délinquant X, qui


décide l’élimination physique d’un homme politique Y, lors de son passage à 10
heures au Pont Matete (un endroit déterminé), à bord de sa voiture rouge.

111 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

A cet effet, l’agent prépare des explosifs et se poste à l’endroit choisi. Il


faut noter que le délinquant sait très bien que sa victime visée est toujours
conduit par son chauffeur et qu’avec l’arme qu’il a décidé d’utiliser il ne peut
pas atteindre Y sans tuer le chauffeur Z. Il s’obstine, néanmoins, à commettre
son crime et tue non seulement Y mais aussi Z.

A l’encontre de l’homme politique Y, le délinquant aura commis un


homicide avec le dol direct. Tandis que vis-à-vis du chauffeur Z, il aura réalisé
un homicide avec le dol nécessaire31.

B. Le dol éventuel

Il y a dol éventuel lorsque l’agent, sans vouloir en aucune façon le


résultat dommageable qui s’est produit, ou même aucun résultat, l’a
simplement prévu comme possible.

C’est le cas d’un Président directeur général (P.D.G.) d’une compagnie de


transport tant maritime, terrestre qu’aérien qui, poussé par le souci du gain,
fait voyager un engin qu’il sait ne pas être en parfait état de navigabilité ou de
toute autre utilisation. Si un accident survient et que les passagers sont tués,
ce Président directeur général devra répondre de ces homicides volontaires.

De même, « l’employeur qui remet à son chauffeur un véhicule dont il


connaît l’état défectueux de marche pourra répondre d’un homicide ou des
lésions volontaires (dot éventuel) si, par exemple, mû par l’intérêt, il se résignait
à l’éventualité d’un accident que, par ailleurs, son chauffeur lui avait
préalablement rappelée.

Il importe de noter cependant que le dol éventuel se rapproche de


l’infraction préterintentionnelle. Celle-ci comporte plusieurs conséquences
dommageables dont les unes ont été voulues par l’auteur, tandis que d’autres
ont dépassé son intention (article 48 du code pénal congolais livre II). On se
rend ainsi compte du fait que dans le délit préterintentionnel, comme dans le
délit éventuel, le résultat, tel qu’il s’est réalisé, n’a pas été voulu, dans les deux
cas, l’intention n’a pas porté sur le résultat effectivement produit. Tandis que
dans le dol éventuel, le résultat qui n’a pas été réel ou l’a été simplement
comme possible, n’a été voulu ni sous la façon dans laquelle il s’est réalisé, ni
sous une forme moins grave ; dans le délit préterintentionnel au contraire, le
résultat a été partiellement voulu.

31
JIMENEZ de ASUA, « La faute consciente et le dolus eventualis », in R.D.P.C., 1959-1960, pp.603 et s.
112 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est cela qui le rapproche au délit intentionnel, où le résultat qui s’est


produit a été voulu. Il s’en distingue cependant en ce que l’intention n’a porté
que sur un résultat moins grave que le résultat réalisé32.

Du point de vue psychologique, le dol éventuel et l’infraction


préterintentionnelle forment une catégorie intermédiaire entre l’intention
criminelle et la faute. Pour certains auteurs (comme G. STEFANI, G.
LEVASSEUR et B. BOULOC), le dol éventuel est considéré comme une simple
faute. Quant à HAUS, il enseigne cependant que dans l’infraction
préterintentionnel, il y a concours de dol et de faute, le dol portant sur les
coups et blessures et la faute sur la mort de la victime33.

Section 2. LES INFRACTIONS NON INTENTIONNELLES

L’élément moral dans les infractions non intentionnelles consiste dans


une simple faute : « la faute pénale ». Celle-ci connaît deux degrés : la faute
d’imprudence et la faute contraventionnelle.

Paragraphe 1. La faute d’imprudence

La faute d’imprudence caractérise les délits d’imprudence ou les délits


involontaires appelés en droit belge « délits culpeux ».

Le législateur congolais n’a pas définit la faute d’imprudence dans le


code pénal congolais. Cependant, toutes les fois qu’il en fait un élément
constitutif de l’infraction, il utilise les concepts ci-après : involontairement (art.
52, 53, 55 du C.P.L II) ; défaut de prévoyance ou de précaution (art. 52, 109
C.P.L. II) ; imprudemment (art. 56 C.P.L. II).

Aucune disposition du code pénal congolais ne contient la définition de


la responsabilité pénale de la faute contrairement à certaines législations
étrangères. Néanmoins, on peut définir la faute comme le défaut de prévoyance
et de précaution ; une négligence qui a des conséquences préjudiciables. La faute
consiste donc en une action ou une omission d’un acte qui, par suite d’un défaut
de soin, d’attention ou de prudence a effectivement porté atteinte à des intérêts
privés ou publics en occasionnant des dommages que l’auteur n’a peut-être pas
voulu ni directement, ni indirectement mais qu’il aurait pu et dû empêcher.

32
STEFANI (G), LEVASSEUR (G) et BOULOC (B), Droit pénal zaïrois, 13e éd., Dalloz, Paris, 1987, p.277.
33
HAUS, cité par NYABIRUNGU (M.S.), Op. cit., p.233.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

La faute est donc cette erreur de conduite qui permet d’imputer à un agent
une conséquence dommageable d’un fait qu’il n’a pas voulu provoquer.
Autrement dit, le fait de l’agent n’est pas le résultat d’une volonté positive mais
plutôt d’une faute psychologique, intellectuelle ou, mieux encore, d’une inertie
de la volonté.

La loi n’a pas énuméré les faits constitutifs de défaut de prévoyance ou


de précaution. Mais, à la suite de la jurisprudence, Likulia a proposé quelques
définitions que nous reprenons :
- Par défaut de prévoyance ou de précaution, il faut entendre toute faute non
intentionnelle commise par un agent qui a omis d’accomplir un acte qui lui
incombait ou plus généralement celle qui consiste en un manque de soins
pour éviter un mal34. Il s’agit donc de toute faute, quelque légère qu’elle
soit, qui cause un homicide ou des blessures35 ; fautes que l’agent aurait
pu éviter avec plus de prévoyance, d’attention, de soins, d'habileté et de
diligence. A cet égard, la jurisprudence désigne indifféremment cette faute
par les termes : inattention, négligence, imprudence36.

- La négligence consiste dans l’insouciance, le manque de soin,


d’application, d’exactitude ou plus généralement dans les imprudences
caractérisées par l’infraction, l’abstention ou l’omission. C’est le cas
notamment du fait d’omettre de donner par geste ou par signal un
avertissement nécessaire37. Il en est de même du fait pour un infirmier de
négliger de prévenir le médecin de la gravité de l’état de santé d’un malade,
négligence ayant entraîné la mort du patient. Constitue aussi une
négligence coupable le fait pour une mère de laisser entre les mains d’un
tout jeune enfant un objet perçant ou tranchant à l’aide duquel, en jouant
avec ses camarades, il blesse l’un d’eux. En ce qui concerne l’omission de
surveillance, il a été décidé qu’on ne peut retenir cet élément infractionnel
que si le prévenu avait une obligation positive de surveillance 38. Tel est le
fait d’un médecin en cas d’hémorragie causée par l’abandon ou le défaut
de surveillance du malade39 ou d’une mère en cas de la noyade de son
enfant.

34. Trib. Sous-région de Mbuji-Mayi, 25 janvier 1974, in R.J.Z. 1977, p.83.


35. Elis. 21 mai 1914 et 10 décembre 1940, Jur. Col. 1925, p.91 ; R.J.C.B. 1941, p.22.
36. Elis. 7 avril 1936 et 12 octobre 1937, R.J.C.B. 1938, pp.39 et 44.
37. Distr. Congo-Ubangi 10 novembre 1953, R.J.C.B. 1954, p.113.
38. C.S.J. 23 juin 1972 ; R.J.Z. 1973, p.43.
39. Elis. 19 avril 1949, R.J.C.B., p.131.
114 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

- L’inattention vise plus spécialement le manque d’attention ou une


inexcusable légèreté. L’étourderie est considérée comme l’extrême
inattention. C’est le cas pour un médecin de prescrire par inattention à un
malade un produit toxique qui provoque sa mort. Constitue également une
faute d’inattention :
- le fait, pour un infirmier, d’administrer un autre médicament que
celui prescrit par le médecin, erreur ayant entraîné la mort de la
victime ;
- le fait, pour un pharmacien, de remettre à quelqu’un un produit
autre que celui qui figure sur l’ordonnance du médecin, erreur
ayant provoqué la mort du patient ;
- le fait, pour un aide-infirmier, d’administrer de l’ammoniaque pur
au lieu d’une liqueur ammoniacale, erreur ayant provoqué la mort
du patient40.

- L’imprudence consiste dans un défaut de prudence, dans une


imprévoyance ou témérité. L’imprudence sera coupablement établie à
l’égard de celui qui confie sa voiture à une personne qui n’a pas un permis
de conduire ou qui se trouve dans un état apparent de fatigue ou d’ébriété,
défaut de prévoyance ayant provoqué un accident mortel. Il en est de
même de l’excès de vitesse ayant provoqué un homicide et les blessures 41.
Ne peut également échapper à la répression celui qui conduit un véhicule
dans un état de fatigue ou d’ivresse, c’est-à-dire dans un état de
défaillance physique ; défaut de prévoyance ayant causé un accident
mortel. Il a été jugé que l’usage de chanvre à fumer constitue une
imprudence. Ainsi celui qui a porté des coups en état d’ivresse provoquée
par usage de chanvre à fumer se rend coupable de lésions involontaires42.

- La maladresse consiste dans un défaut d’adresse, dans un manque


d'habileté ou de dextérité corporelle. L’exemple classique est celui d’un
ouvrier-maçon qui laisse tomber une pierre et tue un passant, ou celui
d’un chasseur qui atteint mortellement une personne humaine en visant
un gibier. Elle se caractérise également dans la faute morale, ou
intellectuelle de l’architecte, du guérisseur, du chirurgien ou du médecin
qui ne se montre pas habile dans l’exercice de son art ou qui pratique sans
aucune adresse ou finesse de l’esprit.

40. 1ère Inst. Kas. 10 avril 1954, R.J.C.B. 1955, p.128.


41. Trib. Distr. Mbuji-Mayi 11 mai 1971, in R.J.Z., p.90.
42. 1ère Inst. Coq. (App.) 19 janvier 1956, R.J.C.B. 1956, p.379.
115 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

- L’inobservation des règlements de police constitue aussi une faute, même si


elle n’est pas pénalement réprimée en elle-même si elle ne résulte pas de
l’inattention, maladresse ou imprudence. Par règlement il faut entendre
toute loi, toute ordonnance-loi, toute ordonnance, tout décret, ou tout
arrêté réglementaire. Et même le règlement qui n’oblige que certaines
personnes déterminées telles que le médecin. C’est la violation des
prescriptions du code de la route qui constitue le cas le plus fréquent de
l’inobservation des règlements. Il en est ainsi de celui qui tue ou blesse
une personne par excès de vitesse43 ou de celui qui stationne dans un
endroit interdit, défaut de prévoyance ayant provoqué un accident
dommageable. Le défaut de prévoyance ou de précaution est généralement
retenu à charge du conducteur qui se rend compte d’une défectuosité de
son véhicule et qui poursuit néanmoins sa route. Il en est de même de
celui à qui l’usure du mécanisme de direction provenant de la vétusté a été
infailliblement manifestée antérieurement à l’accident par un certain jeu,
dont un conducteur prudent et avisé eût dû s’alarmer44.

Il faut dire que la faute d’imprudence s’apparente à la faute civile.

Paragraphe 2. La faute pénale et la faute civile d’imprudence

Entre les articles 52 et suivants du code pénal ordinaire et l’article 258


du code civil livre III qui rend responsable toute personne qui causerait à autrui
un dommage par son imprudence ou sa négligence ; il existe des similitudes
dont voici les principales :
- Dans les deux cas, pour que la responsabilité de l’agent soit
engagée il est nécessaire qu’il existe un dommage ;

- Dans les deux cas, le dommage doit être la conséquence de la


faute de l’agent. Il faut donc qu’il y ait un lien de causalité entre la
faute commise et le préjudice subi par la victime ;

- Dans les deux cas, la sanction est fixée en fonction de l’étendue


du préjudice causé à la victime.

43. Trib. Distr. Mbuji-Mayi 20 avril 1971, in R.J.Z. 1977, p.89 ; Trib. Distr. Mbuji-Mayi, 11 mai 1971, in R.J.Z. 1977, p.90.
44. Distr. Mbuji-Mayi 1er septembre 1971, in R.J.Z. 1977, p.93.
116 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En effet, en cas de quasi-délit de l’article 259 du CCL III, la réparation


est fixée en considération du dommage causé. De même, en matière du délit
d’imprudence, la répression est organisée en considération de la gravité du
préjudice subi par la victime (lorsque la victime a rendu la faute plus
préjudiciable par ses agissements, la faute du prévenu demeure tout de même
sauf si le dommage est le résultat exclusif des agissements de la victime).

En tenant compte de ces similitudes, le droit congolais consacre l’unité


et l’identité de la faute pénale et de la faute civile.

L’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil vient en quelque sorte


confirmer ce principe d’identité. En effet, la condamnation pénale pour délit
d’imprudence implique nécessairement que l’agent est aussi responsable d’une
faute civile et doit donc aussi être condamné à des dommages et intérêts au
profit de la victime.

117 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Troisième Titre

L’AUTEUR DE L’INFRACTION :
Le Délinquant

Ce ne sont pas les faits qui violent le droit qui sont punissables, ce sont
les personnes45. L’étude sur la loi pénale et l’infraction ont fait comprendre qu’il
est impossible d’analyser sans faire recours à celui qui viole la loi, à celui qui
pose des actes réprimés par la loi, c’est-à-dire, le délinquant.

Le délinquant est, en effet, l’auteur de l’infraction. Considéré comme tel,


c’est à lui qu’incombe donc la responsabilité pénale. Ordinairement, l’infraction
n’est commise que par une personne. Mais, il arrive que l’auteur de l’infraction
soit aidé dans son activité criminelle par d’autres acteurs.

Cela étant, deux questions majeures méritent d’être posées :


- premièrement, quelle est la personne qui peut être retenue comme
pénalement responsable ; et
- deuxièmement quelles peuvent être les causes d’irresponsabilité
en matière pénale.

45
ORTOLAN, Eléments de droit pénal, I, 4e éd., Paris, 1886, n°219.
118 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

CHAPITRE I. LA PERSONNE RESPONSABLE

La personne responsable peut agir individuellement, mais par moments,


l’on peut avoir à faire à un groupe de personne.

Sous-chapitre 1. LE DELINQUANT : PERSONNE PHYSIQUE OU


MORALE ?

De manière générale, comme l’accomplissement de l’infraction requiert


notamment une volonté coupable, en principe, seules les personnes physiques
peuvent être regardées comme pénalement responsables parce que seules les
personnes physiques sont dotées de la capacité de vouloir, c’est-à-dire, seules
ces personnes peuvent avoir la volonté de commettre une infraction.

Mais, la question se pose pour savoir si, on peut néanmoins concevoir la


responsabilité pénale à retenir à l’endroit des êtres moraux. Est-ce qu’ils
peuvent commettre des infractions ?

Section 1. DELINQUANT, ETRE PHYSIQUE

Paragraphe 1. Principe

Le principe posé est que seuls les être physiques sont capables de
délinquer. Ni les choses ni les animaux ne peuvent être sujet de l’infraction.
Seuls des êtres faites de chair, dotés de volonté et d’intelligence peuvent
commettre une infraction et, de ce fait, encourir une peine.

Le législateur en définissant l’infraction dans le texte incriminateur


précise également l’agent qui peut être sujet de l’infraction. Le délinquant
désigné par le législateur c’est toute personne, tout individu, quiconque, celui,
… En revanche, il arrive que le législateur dans certains textes incriminateurs
vise des personnes physiques revêtues d’une certaine qualité pour la
commission d’un nombre d’infractions. Il en est ainsi des articles 145 et
suivants CPL II qui définissent et sanctionnent le détournement des deniers
publics et la corruption.

Paragraphe 2. Les immunités pénales

Pour des raisons d’opportunité politique et de politique criminelle,


certaines personnes physiques sont exclues de l’application de certaines règles
pénales. Les exemples sont donnés dans la Constitution. En vue de préserver
la quiétude, la tranquillité et la cohésion au sein d'une société, certaines
fonctions officielles mais aussi certaines qualités sont protégées par la loi.

119 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Ainsi, par la volonté politique d'un pays, peut-il être organisé des mécanismes
juridiques mettant en mal toute initiative pouvant viser l'établissement de la
responsabilité pénale des individus qui exercent ces fonctions ou portent ces
qualités. Parmi ces mécanismes, il y a les immunités en matière pénale. Ce sont
des exemptions temporaires absolues d’action pénale organisées au profit de
certaines personnes (tenant compte de leur statut : haut responsable ou
membre de famille) en vue de protéger les fonctions qu’elles assument ou leurs
qualités.

On comprend dès lors que ce mot « immunité » est chargé de sens.


Souvent, ce terme est invoqué sans que l'on soit certain de son contenu. La
confusion avec l'impunité ou l'inviolabilité est assez souvent entretenue. Pour
certains, elles sont de plusieurs ordres et selon les cas, elles ont pour effet soit
de suspendre provisoirement, soit d'empêcher définitivement toute action
publique contre les individus qui en bénéficient, selon qu'elles sont d'un côté
temporaires ou relatives et qualifiées d’inviolabilités ; et de l'autre, définitives
ou absolues que l’on qualifie d’immunités au sens strict. Seules les immunités
au sens strict entrainent l’irresponsabilité puisqu’elles enlèvent le caractère
infractionnel de l’acte couvert.

Mais, nous retenons qu’en droit pénal l’immunité (telle que présentée
par le Vocabulaire juridique (PUF)), est une cause d'impunité qui, tenant à la
situation particulière de l'auteur d'une infraction au moment où il commet celle-ci,
s'oppose définitivement à toute poursuite, alors que la situation créant ce privilège
a pris fin. Elle constitue donc, au profit de son bénéficiaire, une entrave à la
qualification même de l’infraction. Elle lui enlève son caractère infractionnel et
l’acte accompli par son bénéficiaire n’entrainera plus de poursuites pénales.

L’immunité des personnels diplomatiques et consulaires est régie par les


conventions de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques et du
24 avril 1963 sur les relations consulaires. Les gouvernants quant à eux,
bénéficient des inviolabilités organisées par des normes internes. En RDC, c’est
la constitution qui consacre les immunités et inviolabilités des parlementaires à
l’article 10746. Les inviolabilités du Président de la République et du Premier
Ministre sont consacrées par le constituant à l’article 167 alinéa 2.

46
Article 107 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée le 20 janvier 2011 : « Aucun parlementaire ne peut être
poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en raison des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Aucun
parlementaire ne peut, en cours de sessions, être poursuivi ou arrêté, sauf en cas de flagrant délit, qu’avec l’autorisation de
l’Assemblée nationale ou du Sénat, selon le cas. En dehors de sessions, aucun parlementaire ne peut être arrêté qu’avec
l’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale ou du Bureau du Sénat, sauf en cas de flagrant délit, de poursuites autorisées
ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un parlementaire est suspendue si la Chambre dont il est membre
le requiert. La suspension ne peut excéder la durée de la session en cours ».
120 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Section 2. DELINQUANT, PERSONNE MORALE

Le problème se pose en ces termes : est-ce que l’on peut parler de la


responsabilité pénale des personnes morales ? Lorsque les dirigeants d’une
société qui sont des personnes physiques ont commis une infraction au nom et
pour le compte de la société, ces organes ou ces dirigeants (personnes
physiques) doivent-ils engager leur propre responsabilité ou faut-il pénalement
sanctionner la personne morale ou encore qu’il faut sanctionner les dirigeants
et la personne morale en même temps ? Bref, la personne morale peut-elle
délinquer ? Peut-on le sanctionner ?

Paragraphe 1. Thèse de rejet de la responsabilité pénale des


personnes morales

Cette thèse de rejet a été défendue pendant tout le 19e siècle. Pendant
cette période de l’évolution du droit pénal, le principe qui était consacré en cette
matière de responsabilité pénale des personnes morales était : « Societas
delinquere non potest ». La société ne peut pas délinquer. Cette thèse a été
construise sur base de l’interprétation rigoureuse du principe de la légalité. Les
auteurs qui la développent avancent quatre arguments :

1. La personne morale ne peut pas délinquer parce qu’elle est une fiction
dénuée de toute volonté personnelle. Or, la volonté personnelle est une
condition de la responsabilité pénale. Celui qui la manque ne peut être
imputé47 ;

2. La personne morale n’acquiert la personnalité juridique que pour réaliser


un objet social déterminé. Lequel objet ne peut naturellement pas
consister en la commission des infractions. C’est pour cette raison que l’on
parle de la spécialité de la personne morale ;

3. Il y a incompatibilité entre la sanction pénale et la nature spécifique de la


personne morale. En effet, l’idée d’une peine ne correspond qu’à la nature
d’une personne physique. Comment concevoir par exemple la peine de
servitude pénale d’une personne morale ? Et la peine de mort ?

4. Lorsqu’on sanctionne pénalement une personne morale, on en arrive à


commettre des injustices à l’égard de certains individus qui n’ont eu
aucune part à la réalisation de l’infraction.

47
. MERLE (R) et VITU (A), Traité de droit criminel, Cujas, Paris, 1967, pp.489 et ss.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. Thèse d’admission de la responsabilité pénale des


personnes morales

Cette thèse est née vers la fin du 19e siècle et début 20ème siècle. Elle est
basée sur un constat : le développement accéléré des affaires commerciales et
la multiplication des textes régissant le monde des affaires (les textes sur le
prix, sur la consommation, sur la protection de l’environnement, sur les
relations du travail, …).

Il se fait que la plupart d’infractions commises à l’encontre de cette


nouvelle législation se réalise dans le cadre des entreprises. Cette doctrine a
constaté que la sanction infligée aux représentants des personnes morales ne
suffit pas à décourager la délinquance de celles-ci. Il importe donc, en plus de
la sanction infligée aux représentants, d’atteindre la personne morale
délinquante elle-même.

Cette doctrine se base sur ces quatre arguments :

1. L’idée de la fiction juridique de l’être moral est à écarter, car l’être moral est
une réalité vivante. Ceci pour deux raisons : L’être moral peut réaliser
l’élément matériel de certaines infractions. C’est le cas de la Fraude fiscale,
la banqueroute, la concurrence déloyale, la contrefaçon, ….etc
L’être moral a sa volonté propre qui s’exprime à travers son assemblée
générale, son conseil d’administration ou comité de gestion et qui se
distingue de la volonté de ses représentants.

2. Même si l’être moral n’a pas été créée pour commettre des infractions, il
peut néanmoins commettre des infractions dans la réalisation de son objet
spécial. Une entreprise créée pour fabriquer la bière peut commettre une
infraction contre l’environnement social.

3. La loi pénale prévoit aussi des peines qui sont compatibles avec des êtres
moraux. Le cas de la peine d’amende, de confiscation, de dissolution d’une
entreprise (équivalent de la peine de mort), d’interdiction d’émettre les
chèques. Les autres membres sont protégés par le code du travail.

4. Le quatrième argument est tiré de la pratique en ce que lorsque pour une


infraction commise dans le cadre professionnel, un chef d’entreprise est
pénalement sanctionné, en l’occurrence, lorsque le patron est condamné à
payer une amende pour une infraction commise dans l’exercice de ses
fonctions, assez souvent, en République Démocratique du Congo, la
pratique est que c’est la personne morale qui paie l’amende.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 3. La tendance actuelle

Dans les pays qui ne consacrent pas le principe de la responsabilité


pénale des personnes morales, c’est la personne physique par laquelle la
personne morale a agi, qui est pénalement responsable de l’infraction commise.
Dans les pays anglo-saxons, la responsabilité pénale des personnes morales est
largement admise. C’est le cas de l’Angleterre, du Canada et des USA.

Dans les pays européens, c’est en droit pénal des affaires qu’on a vu les
premiers textes qui consacrent la responsabilité pénale des groupements.
Depuis plusieurs années, se dessine une évolution favorable à la responsabilité
pénale des personnes morales.

Paragraphe 4. La responsabilité pénale des êtres moraux en droit


congolais

En droit congolais, il est vaguement affirmé que la personne morale ne


peut engager sa responsabilité pénale. On estime donc que la personne morale
ne peut pas commettre une infraction 48 et ne peut par conséquent subir la
sanction pénale. S'il y a des infractions qui sont commises par les
représentants des personnes morales, seuls leurs dirigeants, personnes
physiques, pourront pénalement répondre. C'est ainsi par exemple en matière
de banqueroute prévue aux articles 226 à 246 de l’Acte Uniforme portant
Organisation des Procédures Collectives d’Apurement du Passif 49, actuellement
en vigueur en RDC. L'on considère que ce sont les administrateurs, directeurs
ou gérants qui commettent les faits délictueux et qui doivent en répondre.

Une affirmation partisane de la responsabilité pénale des personnes


morales. Néanmoins, sans affirmer la responsabilité pénale des personnes
morales, l'on constate que certaines lois particulières prévoient la possibilité
d'imputer un fait à une personne morale. C'est que dans certaines lois, la
responsabilité pénale des personnes morales est affirmée quelque peu
spécialement, et pour d'autres il est précisé aussitôt lesquels des organes
devront subir la peine que prévoit la loi50.
48
. Ce qui s'exprime bien en latin par le brocard : societas delinquere non potest.
49
. la banqueroute qui se trouve organisée aux articles 226 à 246 de l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures
Collectives d’Apurement du Passif, adopté le 10 avril 1998, paru au Journal Officiel OHADA n°7 du 1 er juillet 1998 et entré en
vigueur en RDC depuis le 12 septembre 2012.
50
. Donnons à titre d'exemple quelques textes ci-après :

 Le décret du 20 avril 1935 assimile à la banqueroute un certain nombre de faits commis par les dirigeants de personnes
morales qui sont déclarées en faillite. Mais le législateur ne s’est pas arrêté à la répression des agissements de seuls
dirigeants de personnes morales. Il a également érigé en infraction dont il a assimilé à la banqueroute, une série des faits
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Cette situation d'une sorte d'affirmation en partie tacite de la


responsabilité pénale spéciale de la personne morale paraît ambiguë et appelle
modification en vue d’un réajustement. Mais, il y a lieu de reconnaître que la
situation tend fort heureusement à s'améliorer avec la réforme du Code pénal
congolais qui traite notamment de manière explicite de la question de la
responsabilité pénale des personnes morales.

Un projet de consécration d’une responsabilité pénale spéciale des


personnes morales. Dans le texte de 2009 portant avant-projet du Code pénal
congolais, il est affirmé assez clairement que les personnes morales, à
l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement, selon l’un des modes de
participation criminelle, des infractions commises, pour leur compte, par leurs
organes ou leurs représentants.

Trois conditions51 majeures sont requises :


- d'abord, l’infraction doit avoir été commise par la volonté délibérée
des organes de la personne morale concernée.
- Ensuite, les organes doivent avoir agi au nom et pour le compte de
la personne morale.
- Enfin, les organes doivent avoir agi en vue de la réalisation de
l’objet de la personne morale ou pour la défense de ses intérêts,
ou de celles dont les faits concrets démontrent qu'elles ont été
commises pour son compte.

Par ailleurs, ce texte n’admet cette responsabilité pénale à l’endroit des


personnes morales que dans la mesure où cette possibilité est prévue par la loi.
C’est qu’en dehors d’une telle prévision légale, la personne morale ne pourra
engager sa responsabilité pénale. La responsabilité pénale de la personne
morale ne peut être engagée qu’à propos des infractions pour lesquelles un
texte le prévoyait expressément.

se rapportant à la déclaration de la faillite susceptibles d’être commis aussi bien par la personne physique que par celle
morale. Sauf qu’actuellement, la banqueroute n’est retenue qu’à l’égard de la seule personne physique.
 L’Ordonnance-loi n°68/71 du 1er mai 1968, portant réquisition des médecins congolais punit toute personne qui aura
engagé un médecin requis ou l’autre maintenu dans son emploi (article 8, alinéa 1 er). Mais, l’alinéa 2 du même article
dispose aussitôt que si le coupable est une personne morale, les peines seront appliquées aux personnes chargées de la
direction ou de l’administration de l’établissement.
 En matière fiscale, les articles 147 et 148 de l'ordonnance-loi n°69/009 du 10 février 1969 relative aux contributions
cédulaires sur les revenus telle que modifiée par le décret-loi 098 du 3 juillet 2000 portant réforme des pénalités fiscales,
stipule qu’une personne morale peut subir les sanctions pécuniaires.
 La loi n°04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme
prévoit les sanctions applicables aux personnes physiques et aux personnes morales.
51
. Article 87 de l’avant-projet du Code pénal congolais du 19 mai 2009.

124 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Il est évident qu’avec l’évolution de la législation en matière des


infractions à retenir à l’encontre de la personne morale, c’est fort possible
parvienne à abandonner la spécialité pour basculer au principe de généralité,
comme l’a déjà fait la qu’ultérieurement on France par sa loi du 9 mars 2004,
et un certain nombre d’autres législations52.

Personnes morales visées. À côté des personnes morales


traditionnelles, le texte53 assimile les associations momentanées et les
associations en participation, les sociétés commerciales, y compris celles en
formation, les sociétés civiles qui n'ont pas pris la forme d'une société
commerciale et enfin les sociétés de fait. Il y a tout de même lieu de se
demander pour si l’on devra adjoindre à ces personnes citées par la loi, les
personnes morales de droit privé à but non lucratif ci-après : les associations
sans but lucratif, les partis politiques, les congrégations ainsi que les
fondations reconnues d’utilité publique.

Affirmation d’une double culpabilité pour un fait. Il est par ailleurs


proposé une double culpabilité. Ce qui veut dire que la responsabilité retenue
contre une personne morale n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs
ou complices des mêmes faits54. Cependant, un devoir particulier dont la
violation fonde ou aggrave la répression et qui incombe uniquement à la
personne morale, à la société ou à l’entreprise individuelle est imputé à une
personne physique lorsque celle-ci agit : en qualité d’organe d’une personne
morale ou de membre d’un tel organe ; en qualité d’associé ; en qualité de
collaborateur d’une personne morale, d’une société ou d’une entreprise
individuelle disposant d’un pouvoir de décision indépendant dans le secteur
d’activité dont il est chargé ; en qualité de dirigeant effectif qui n’est ni un
organe ou un membre d’un organe, ni un associé ou un collaborateur.

52
. On peut citer par exemple des législations pénales de la Belgique, l’Angleterre, les Pays-Bas où le législateur pose en effet le
principe de la responsabilité pénale des personnes morales sans pour autant indiquer les infractions auxquelles il s’applique et
même sans fournir au juge de critère. Mais, ce système est en réalité ouvert et englobe toutes les infractions, à deux exceptions
près, à savoir : lorsque la nature des choses c’est-à-dire le type d’infraction l’impose, et lorsque la loi prévoit une peine
inapplicable à une personne morale (emprisonnement).
53
. Article 90 de l’avant-projet du Code pénal congolais du 19 mai 2009.
54
. Article 88 de l’avant-projet du Code pénal congolais du 19 mai 2009.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Sous-chapitre 2. LA PARTICIPATION CRIMINELLE

Lorsque l’infraction est réalisée de manière concerte par plusieurs


personnes, on entre dans ce qu’on appelle la participation criminelle. En
d’autres termes, la participation criminelle est concevable lorsque plusieurs
personnes ont contribué à la commission d’une infraction en y prenant une
part plus ou moins active et directe.

La participation criminelle est, cependant, prévue dans le droit congolais


par les articles 21 à 23 du code pénal.

Elle peut se présenter sous deux formes : la coactivité ou la corréité,


lorsque la contribution s’avère directe ou indispensable ; la complicité, lorsque
l’aide apportée, sans être nécessaire, est néanmoins utile. Ces deux formes de
participation criminelle se réalisent selon les modes spécifiques limitativement
énumérés par les articles 21 et 22 du code pénal.

Section 1. CONDITIONS GENERALES DE LA PARTICIPATION


CRIMINELLE

Pour que la participation criminelle soit retenue, ne serait-ce que pour


l’une de ses deux formes, il faut la réunion de trois conditions suivantes :
- l’existence d’une infraction principale ;
- la commission de l’un des actes de participation criminelle tel que
défini par les dispositions des articles 21 et 22 du code pénal ;
- l’existence d’un élément moral.

Paragraphe 1. Existence d’une infraction principale

La participation criminelle n’est concevable et punissable que si elle


consiste à favoriser l’accomplissement d’une infraction, c’est-à-dire, un acte que
la loi condamne et sanctionne d’une peine. Cette infraction principale doit être
consommée ou simplement tentée. Il importe peu que l’infraction soit imputable
à l’auteur principal. Ainsi, un participant pourra être condamné pour une
infraction dont l’auteur matériel a été acquitté pour cause de non imputabilité
ou absence de l’élément moral. Si l’acte principal n’est pas une infraction, on ne
peut parler de la participation criminelle.

On ne peut parler de la participation criminelle dans le chef de celui qui


vient au secours de son prochain injustement agressé. Il en est de même de
celui qui apporte son aide à un individu qui se suicide.

126 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En effet, le droit pénal congolais ne reconnaissant pas le suicide comme


infraction, on peut contribuer à sa commission comme infracteur. Il n’y a pas
aussi participation punissable pour une infraction amnistiée ou prescrite.

Paragraphe 2. Nécessité de commettre un acte de participation

La participation criminelle obéit au principe de la légalité, c’est-à-dire,


cette participation doit être réalisée par un des modes légaux limitativement à
l’article 22 CP pour la complicité.

Les modes légaux de participation sont de stricte interprétation. Ils


n’admettent d’interprétation analogique. C’est ainsi que le simple conseil
criminel ne peut être retenu comme acte de participation car il n’est pas repris
parmi les actes mentionnés par le code pénal.

Quand on analyse tous ces modes, on note que tous ces actes sont des
actes de commission, des actes positifs. On ne peut donc pas participer à une
infraction par omission en principe. C’est pour quoi ne sera pas considéré
comme ayant participé à une infraction un simple spectateur qui ne l’a pas
empêchée. Le simple fait de tolérance ne constitue pas un acte de
participation55.

Toutefois, certaines observations circonstanciées ou qualifiées sont


retenues comme de participation lors que, à l’analyse, elles s’avèrent revêtir un
aspect positif56. Dans une décision rendue par la cour de cassation française
contre un amant qui s’est limité à assister à l’avortement réalisé par un
médecin sur sa maîtresse ; la cour a retenu cette présence passive de l’amant
comme étant une omission positive parce que cette présence a apporté un
soutien moral qui a réalisé l’avortement.

L’abstention peut faire l’objet d’une participation particulière et être


punie comme infraction sui generis. C’est les de l’article 66 ter qui incrimine la
non-assistance à personne en péril.

Pour être punissable, l’acte de participation doit être consommé. Si l’on


peut être poursuivi comme complice d’une infraction tentée par un tiers, on ne
peut pas l’être pour avoir tenté d’être complice. S’il y a une complicité de
tentative, il n’y a pas de tentative de complicité faute de fait principal
punissable.

55
. STEFANI (G) et LEVASSEUR (G), op. cit, n°257.
56
. LAMY (E), Cours de droit pénal spécial, UNAZA, 1971-1972, p.353.
127 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Pour que l’acte soit constitutif de participation, il doit être antérieur ou


concomitant à la commission de l’infraction et non postérieur.

Paragraphe 3. Nécessité d’un élément moral

Lorsqu’il accomplit son acte, le participant ou le complice doit être


animé d’une intention criminelle. Autrement dit, il doit savoir qu’en
accomplissant son acte, il participe à la réalisation d’une telle infraction et il
pose cet acte sciemment, librement pour réaliser cette infraction. L’élément
moral réside précisément dans le concours des volontés de l’auteur principal et
de l’auteur participant.

L’exigence de l’élément moral résulte même des termes légaux : pour le


commettre, sachant qu’ils devaient y servir, avec connaissance, … La
connaissance où il apporte son concours, son aide ou son assistance. Elles
doivent être concomitantes à l’acte de participation.

Section 2. LES MODES LEGAUX DE LA PARTICIPATION


CRIMINELLE

Ils diffèrent selon qu’on se trouve dans l’hypothèse de la coactivité ou de


la complicité.

Paragraphe 1. Les modes légaux de la coactivité ou corréité

La loi détermine limitativement les actes, les modes par lesquels la


coactivité ou la corréité se réalise. Ils sont énumérés à l’article 21 C.P. :
l’exécution matérielle et la coopération directe ; l’aide indispensable ; la
provocation privée et publique.

A. L’exécution matérielle et la coopération directe

Ce mode renferme deux aspects : D’abord, l’exécution matérielle qui


consiste pour le participant à poser les actes qui constituent l’infraction ou une
partie de sa réalisation. L’agent principal administre les coups, le participant
vient en administrer d’autres.

Ensuite, la coopération directe : il faut entendre par là l’intervention


directe de l’agent à la commission de l’infraction même s’il n’a pas posé des
actes matériels. Un agent qui au moyen de son arme tient en respect
(neutralise) les occupants d’une maison pendant qu’un autre opère le vol
coopère directement au vol et en est coauteur. Celui qui immobilise la victime
pendant qu’un autre l’égorge.

128 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

B. L’aide indispensable

Sont également considérés comme coauteurs, toutes les personnes qui


prêtent à l’auteur principal de l’infraction une aide telle sans elle (aide) ou sans
leur assistance, l’infraction ne pouvait pas se réaliser. Si le crime pourrait être
commis sans leur assistance, peut –être avec un peu de difficultés, mais cela
importe peu, ceux qui auront concouru à l’infraction seront des complices. Est
considéré comme coauteur pour aide indispensable le délinquant qui attend
l’auteur principal devant l’entrée d’une parcelle se trouvant dans une voiture,
moteur en marche attendant que l’auteur principal après avoir commis une
infraction se jette dans la voiture et qu’ils prennent la fuite.

C. Provocation privée et publique

Elle consiste à faire naître la résolution criminelle ou à la renforcer.


Dans le contexte de la coactivité, agit par provocation l’agent qui incite l’auteur
principal, auteur matériel à commettre l’infraction. Cet agent qui incite autrui à
commettre l’infraction est appelé auteur intellectuel ou auteur moral.

La corréité par provocation ne peut être sanctionnée pénalement que si


elle a été suivie d’effets, c’est-à-dire, si l’agent provoqué a, soit consommé
l’infraction, soit au moins tenté celle-ci.

I. Deux questions essentielles

Ces questions sont relatives à l’étendue de la responsabilité du


provocateur et à l’incidence du désistement volontaire du provocateur sur la
punissabilité de la participation.

a. Etendue de la responsabilité du provocateur

La responsabilité du provocateur est entière et identique à celle de


l’auteur matériel lorsque celui-ci est resté dans les limites du mandat ou de
l’ordre reçu. Mais, s’il s’en écarte, trois hypothèses sont positives : le
provocateur avait précisé le mode d’exécution, le choix des moyens et leur
usage, il ne répondra que de l’infraction qu’il avait ordonnée ; le provocateur a
donné un ordre indéterminé ; il faut distinguer que d’après les circonstances,
l’agent provoqué avait ou non des raisons de croire qu’il agissait selon l’ordre
reçu.

129 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Au nom de la théorie de l’emprunt de la criminalité, une certaine


doctrine et jurisprudence considère que les circonstances aggravantes réelles
retrouvées dans le chef de l’auteur principal doivent s’étendre à tous les
participants57. Cette théorie est rejetée par la doctrine le plus moderne qui est
fondée sur le principe de culpabilité personnelle. L’ordre est précis, mais l’agent
commet une infraction toute différente. Il est évident qu’il ne saurait être de
déclarer punissable le provocateur. Car, le concours des volontés fait défaut
dans le délit auquel l’auteur intellectuel n’a pas pu songer.

b. Le désistement du provocateur

Le provocateur, après avoir incité au crime, peut changer d’avis. Pour


que ce changement d’avis soit considéré comme ayant rompu la solidarité entre
lui et l’auteur matériel, il faut qu’il ait été révélé à ce dernier de manière
expresse et à temps. L’agent qui, ayant connu ce désistement, poursuit,
néanmoins, la réalisation de l’infraction, agit exclusivement pour son propre
compte.

II. Les formes de provocation

En analysant l’article 21 C.P., on note la présence de deux formes de


provocation : privée et publique qui se réalisent par des modes distincts et
déterminés.

a. La provocation privée (art. 21, al. 4)

Elle se réalise par les quatre modes suivants :


- offres, dons ou promesses ;
- menaces ;
- abus d’autorité et de pouvoir ;
- machinations ou artifices coupables.

Ces moyens doivent avoir déterminé l’auteur matériel à agir pour être
retenus.

1. Offres, dons ou promesses

Un individu qui incite autrui à commettre l’infraction en lui faisant des


dons, promesses ou offres agit par provocation privée, même s’il ne tient pas à
sa parole, c’est-à-dire même s’il ne réalise pas sa promesse. L’essentiel est que
ce soient ces promesses qui aient déterminé l’agent à commettre l’infraction.

57
. LAMY (E), op. cit., p.364.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Ce type de provocation est qualifié en droit pénal de mandat criminel.


Mais, les deux individus agissent égal à égal.

2. L’utilisation des menaces

Celui qui, par menace, détermine autrui à commettre une infraction


agit par provocation privée. Lorsqu’un amant incite sa maîtresse à commettre
l’avortement sous menace de l’abandonner.

3. Abus d’autorité ou du pouvoir

Il y a abus d’autorité, lorsqu’un agent exerçant une certaine puissance


sur un individu incite ce dernier à commettre une infraction. Cette autorité
peut être légale ou des faits (exemple : les instituteurs sur les élèves).

S’agissant de l’abus du pouvoir, le législateur vise l’autorité hiérarchique


s’exerçant sur le subordonné dans un cadre officiel alors que l’abus d’autorité
c’est dans un cadre privé.

4. Mise en œuvre des machinations ou artifices coupables

Par ces termes, il faut entendre les intrigues, les montages, les cabales,
les tromperies, les ruses qui sont réalisées par le provocateur pour déterminer
l’agent matériel à commettre l’infraction. Autrement dit, par des histoires
montées de toute pièce, le provocateur arrive à exciter l’agent et à le déterminer
à commettre l’infraction. Ce sont donc les manipulations.

b. La provocation publique

Elle se distingue de la provocation privée en ce qu’elle s’adresse à un


nombre indéterminé d’agents et ce, au moyen de communication des masses.
En effet, c’est la publicité qui, par l’impact qu’elle peut avoir sur les masses, est
le danger social à combattre. Il y a publicité, lorsque la provocation se réalise
dans un lieu public ou dans une réunion publique. Le lieu peut être public par
nature, c’est-à-dire, qu’il est destiné au public ou est ouvert au public de
manière permanente. Exemple : Rue, route, église, place publique, …

Le lieu peut devenir public par destination, c’est-à-dire que le public y


est admis temporairement, à certaines époques, certains jours et certaines
heures. Dans ce cas, même un lieu privé peut devenir public si le public y est
admis.

131 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

La provocation publique s’exerce, selon l’article 21, par :


- discours tenu dans les lieux publics ou dans les réunions
publiques ;
- placards affichés ou promenés ;
- écrits (en machine ou en manuscrit) ;
- dessins et emblèmes.

Paragraphe 2. Les modes légaux de la complicité

La loi a prévu, de manière limitative à l’article 22 C.P., les modes de


complicité :
- la fourniture des instructions ;
- la fourniture des moyens ;
- la fourniture d’une aide ou d’une assistance utile mais non
indispensable ;
- la fourniture de logement de manière habituelle.

A. Fourniture des instructions (Art. 22, tiret 1)

Par instruction, il faut entendre les indications précises, des


renseignements précis donnés à l’auteur matériel dans le but de lui faciliter la
tâche de commettre telle infraction déterminée. Il ne s’agit pas des simples
informations. L’agent qui donne ces instructions sait qu’il les donne dans le but
de faciliter la commission de l’infraction.

Sera considéré comme complice par fourniture d’instructions, un


individu qui donne les renseignements précis sur le plan d’une maison choisie
comme champ de vol, sur les voies d’accès facile de cette maison, voies de
sorties, heures d’absence des occupants afin de permettre à l’auteur matériel de
volet avec aisance.

B. Complicité par fourniture des moyens (Art. 22, tiret 2)

Son également considérés comme complices, les individus qui auront


fourni à l’auteur matériel les instruments ou tout autre moyen ayant servi à la
commission de l’infraction en sachant très bien que ce moyen allait servir à
l’accomplissement d’une infraction.

Le législateur énumère comme moyens : armes, instruments ou tout


autre moyen. Par tout autre moyen, le législateur veut signifier que
l’énumération faite n’est pas exhaustive. Celui qui fournit à un agent une
fausse clé pour commettre un vol est complice de cette infraction.

132 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C. Complicité par aide ou assistance accessoire (Art. 22, tiret 3)

Cette disposition considère comme complices, les personnes qui, avec


connaissance ont aidé ou assisté l’auteur principal dans les faits qui ont
préparé, facilité ou consommé l’infraction. Il s’agit ici d’une aide accessoire qui
est utile mais non indispensable.

Il importe de souligner que le législateur n’a pas fixé des critères qui
distinguent l’aide utile non indispensable et l’aide nécessaire et indispensable
(de la coactivité). Cela est laissé à l’appréciation souveraine du juge. Toutefois,
cette appréciation a une incidence sur la sanction à infliger au délinquant.

D. Complicité par fourniture habituelle de logement (Art 22, tiret 4)

La loi pénale considère comme complices, les personnes qui connaissant


la conduite criminelle des malfaiteurs exerçant le brigandage ou des violences
contre la sûreté de l’Etat, la paix publique, les personnes ou les biens, leur
auront fourni habituellement logement, lieu de réunion ou de retraite.

La spécificité de ce mode réside dans le fait que ce mode ne concerne


que certaines formes de criminalité qui sont précisément décrites dans cet
article 22, 4ème tiret.

Section 3. REPRESSION DE LA PARTICIPATION CRIMINELLE

Les sanctions de la participation criminelle sont fixées à l’article 23 C.P.


et elles diffèrent selon qu’il s’agit de l’hypothèse de la corréité ou de la
complicité.

Les coauteurs sont des auteurs. Il est donc justice qu’ils encourent les
mêmes peines. Quant aux complices, ils sont passibles d’une peine qui ne peut
excéder la moitié de la peine prévue pour l’auteur qui a exécuté l’infraction.

S’agissant des complices, lorsque la peine prévue pour les auteurs est la
peine de mort ou la servitude pénale à perpétuité, ils encourent la servitude
pénale de 10 à 20 ans (art. 23 al. 4 C.P.). Les prévisions légales n’excluent pas
qu’en fait le complice puisse être condamné à une peine plus rigoureuse que
l’auteur principal, compte tenu de sa culpabilité propre et des circonstances qui
lui sont personnelles58.

58
. STEFANI (G) et LEVASSEUR (G), op. cit., n°272 et s..
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Cours de Droit Pénal Général 2013

Section 4. CAS PARTICULIER DES INFRACTIONS PLURALES

Les infractions plurales se distinguent de la participation criminelle


dans le fait qu’elles exigent pour leur réalisation la présence de deux ou
plusieurs personnes. En d’autres termes, c’est une infraction qu’un seul
individu ne peut en aucun cas réaliser.

A titre indicatif, nous pouvons citer :

- l’adultère : il exige pour sa commission l’activité commune de


deux personnes de sexe opposé. L’une des deux personnes ne
peut être poursuivie sur base des articles 21 à 23 C.P., car
chacune est auteur à part entière de l’infraction. Cela n’exclut
pas, cependant, qu’une troisième personne se rende participant à
l’infraction par aide apportée aux délinquants ;

- la corruption : celui qui corrompt le fonctionnaire ne pose pas un


acte de participation mais se rend bien coupable de corruption
active, tandis que son partenaire est coupable de corruption
passive (articles 147 et S du C.P.) ; l’association des malfaiteurs
exige pour sa réalisation le concours et l’action conjuguée d’au
moins deux personnes ;

- le complot est une infraction plurale, et ce caractère voulu par la


loi écarte l’application des règles de participation prévues à
l’article 21 C.P.59.

Section 5. LA REITERATION OU LE CUMUL D’INFRACTION

Paragraphe 1. Définition

Le concours ou le cumul d’infraction consiste dans la commission de


plusieurs infractions simultanément ou successivement avant d’avoir été
définitivement condamné pour l’une d’entre elle.

Les mots « plusieurs infractions, utilisés dans cette définition sont


susceptibles de plusieurs interprétations :

a) L’infraction peut désigner un fait pénal, c’est-à-dire, l’action ou


(l’inaction) l’omission qui est punie par la loi pénale : A frappe
B et commet les coups et blessures.

59
. C.S.J., 11 février 1972, bull., 1973, 18 ; R.J.Z., 129.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

b) L’infraction peut désigner la base légale de la répression de


l’action ou de l’omission. Il s’agit alors de l’incrimination. C’est
le cas de l’article 79 du code pénal qui prévoit le vol simple et le
sanctionne à l’article 80.

Lorsqu’on parle du concours matériel ou réel, on sous-entend les faits


spéciaux. C’est ainsi que le juge additionnera toutes les peines de chaque
infraction.

Paragraphe 2. Concours des faits pénaux, matériels ou réel


d’infraction

Il y a concours de faits pénaux lorsqu’un délinquant commet 2


infractions distinctes punies par le code pénal. C’est le cas d’un individu qui
tue son voisin et le lendemain, il commet un vol à main-armée.

Paragraphe 3. Concours d’incrimination ou concours idéal

Celui-ci se rencontre lorsqu’un individu par un seul acte se rend


coupable de plusieurs infractions. C’est ainsi qu’en roulant très vite, et de
mauvais côté de la route, l’individu qui parvient à tamponner un piéton qui
mieux est responsable et auteur de 3 infractions réalisées par un fait : excès de
vitesse ; violation du code de la route et homicide involontaire.

Le concours idéal nécessite qu’il y ait d’abord un acte unique. Il s’agit ici
d’un seul acte externe ce qui n’implique pas que cet acte soit subi. Il faut une
activité unique. C’est ainsi que plusieurs actes externes devront être réunis par
une seule activité criminelle. Ce qui fait penser à un fait pénal unique.

Si un délinquant commet plusieurs infractions constituées par des faits


pénaux distincts sans avoir été jugé définitivement pour un seul fait pénal, il y
a alors concours des faits pénaux ou concours réel, matériel de l’infraction. On
parle de concours idéal, lorsqu’un fait pénal unique suffit à réunir les
conditions d’incrimination d’infraction.

En définitive, le juge qui, se retrouve en face d’un cas de concours


matériel, devra faire la sommation des peines de toutes les infractions qui
rentrent dans ledit concours. Quant au concours idéal d’infraction, le juge est
tenu d’établir chaque circonstance tant atténuante qu’aggravante, les causes
d’excuse et donc toutes les peines pour enfin ne retenir que la peine la plus
sévère.

135 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Section 6. LA RECIDIVE

Les deux problèmes de la criminalité moderne sont la délinquance des


mineurs et la récidive.

Pour ce qui est de la délinquance des mineurs de dix huit ans, le souci
du législateur est de mettre sur pied un système de protection susceptible
d’empêcher le jeune coupable de devenir un véritable criminel, c’est-à-dire un
récidiviste.

Il faut dire que cette délinquance des mineurs de dix huit ans n’est pas
à confondre avec la délinquance primaire. Alors que la première sous-entend
une (déviance) attitude déviante d’une catégorie de personnes mineurs de dix
huit ans, la seconde suppose l’état criminel d’une personne, qui peut être à son
premier forfait tout en étant jeune ou adulte. Lorsque l’agent ne cesse de
perpétrer de manière habituelle l’infraction et qu’il est pour cela condamné
définitivement, cette répétition sera caractérisée de récidive.

Il est admis que la récidive constitue la manifestation ou la preuve


(conséquence) de l’inefficacité du premier châtiment infligé au condamné.

Le code pénal (congolais) ordinaire ignore la récidive. Ce qui est une


lacune grave étant donné qu’on ne saurait difficilement laisser au seul juge le
traitement approprié du récidiviste.

Quant au code pénal militaire du 18 novembre 2002, il la prévoit à son


article 23 en affirmant que « les condamnations prononcées pour infraction
militaire ne peuvent pas constituer le condamné en état de récidive ».

Paragraphe 1. Définition de la récidive

La récidive se définit comme étant la rechute dans l’infraction de


l’individu ayant un antécédent judiciaire. Ceci constitue une définition de la
jurisprudence.

A. Analyse de la définition

La définition de la récidive met en exergue quelques éléments qui sont,


en effet, des préalables non moins importants.

136 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

1° La condamnation antérieure est essentiellement.

Elle doit être pénale et même disciplinaire. C’est ainsi le cas de la mise à
la disposition du gouvernement pour vagabondage, et la mise en garde ou toute
autre mesure de sûreté.

Le constat c’est qu’une condamnation civile en dommages et intérêts ne


saurait valoir en condamnation pénale.

2° La condamnation antérieure doit être définitivement encourue avant


la commission d’une infraction nouvelle.

C’est que tant que la condamnation n’a pas la force des choses jugées,
elle ne peut servir de base à la récidive. Tant qu’il y a recours, c’est-à-dire une
opposition, un appel un pourvoir en cassation, la condamnation n’est pas
encore définitive.

Il faut dire qu’ailleurs qu’une circonstance effaçant la condamnation fera


automatiquement disparaître l’antécédent judiciaire : cas de l’amnistie.

3° La condamnation antérieure doit avoir été prononcée par une


juridiction nationale.

4° Une infraction nouvelle est nécessaire comme terme de la récidive.

En principe, toute infraction peut constituer ce deuxième terme. Mais,


elle doit être commise après la première condamnation qui a acquis la force de
choses jugées.

B. Les rapports de deux termes de la récidive dans le temps

La récidive est dite perpétuelle lorsque la loi ne tient pas compte de


temps qui a séparé la commission de l’infraction. Elle peut être temporaire si
l’antécédent judiciaire n’est valable comme terme que pendant un temps. Il ne
se pose pas de problème de prescription.

C. Les rapports entre les deux termes de la récidive relatifs à la


notion des infractions qui se suivent

La récidive est générale, générique ou absolue si on tient compte de


l’antécédent judiciaire quelle que soit la nature de la deuxième infraction, c’est-
à-dire qu’il ne faut pas que ce soit nécessairement la même infraction.

137 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Elle peut être spéciale et spécifique lorsque la loi demande une identité
ou une similitude entre les deux termes. On parlera alors dans ce cas de la
rechute dans la même infraction (récidive spéciale).

Par ailleurs, les condamnations prononcées pour infraction militaire ne


peuvent pas constituer le condamné en état de récidive (Art. 23 du code pénal
militaire).

Paragraphe 2. La conséquence de la récidive

La récidive a pour conséquence directe l’aggravation de la peine. Car, il


est naturel de se montrer beaucoup plus sévère à l’endroit de cet agent qui
après le premier avertissement n’a pas pu éveiller le sens du social et de
l’humain.

Mais, il faut aussi éviter une trop grande sévérité parce que la pénologie
ne le permet pas. La loi prévoit pour cela différentes modalités d’aggravation de
la peine. Elle peut être obligatoire ou facultative selon qu’on veut laisser plus de
discrétion au juge pour individualiser la peine. Si dans certains textes de lois
(code) elle est facultative, dans certaines lois spéciales, elle est obligatoire. La
récidive peut être sanctionnée de la servitude pénale ou même à la mise à la
disposition du gouvernement. C’est le cas de la relégation ou de la mise à la
disposition du gouvernement.

La récidive se distingue des circonstances aggravantes. Leur résultat


seul semble les rapprocher.

Les circonstances aggravantes affectent la matière et les modalités de


l’infraction. Elles entrainent inévitablement l’aggravation de la peine. Cette
aggravation est obligatoire et altère la nature de l’infraction.

La récidive. Un état touchant à la personnalité du délinquant. Elle ne


postule pas dans son essence l’aggravation de la peine et celle-ci est facultative.
Elle est sans influence sur la nature de l’infraction.

Il ne résulte pas de cette comparaison que les 2 notions sont


inconciliables, car elles peuvent se combiner facilement. C’est le cas d’un voleur
(qui aurait été condamné précédemment), qui commet une infraction de vol
(avec effraction qui constitue une circonstance aggravante). Il y aura dans ce
cas et la récidive et la circonstance aggravante à la fois.

138 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Deuxième chapitre

LES CAUSES D’EXONERATION DE LA RESPONSABILITE PENALE

Elles sont de deux sortes, à savoir :


- Les causes subjectives d’irresponsabilité ; qualifiées de causes de
non imputabilité ; ainsi que
- les causes objectives d’irresponsabilité ; appelées causes de
justification.

Chapitre I. LES CAUSES SUBJECTIVES D’IRRESPONSABILITE


PENALE : CAUSES DE NON IMPUTABILITE

L’analyse des causes de non imputabilité renvoie essentiellement en


l’étude de la responsabilité pénale. Il faut dire que cette notion suppose mais se
distingue en même temps de la notion de culpabilité et d’imputabilité alors que
celles-ci la constituent.

La culpabilité consiste dans la faute commise par l’agent, la faute


entendue dans son acception large incluant la faute intentionnelle, la faute
d’imprudence ou de négligence et qui, constitue l’élément de l’infraction.

L’imputabilité quant à elle, consiste dans la possibilité de mettre la faute


au compte de la personne qui l’a commise, c’est-à-dire d’attribuer à celle-ci la
responsabilité de la faute commise. L’imputabilité suppose donc l’existence chez
l’agent d’une conscience, d’une volonté libre. En l’absence de cette capacité de
comprendre et de vouloir (le cas de la démence ou de contrainte), il n’y a pas
d’imputabilité possible et en conséquence, il ne peut y avoir responsabilité
pénale.

G. STEFANI, G. LEVASSEUR et B. BOULOC considèrent, quant à eux,


que pour qu’il y ait responsabilité pénale, il faut que le délinquant ait commis
une faute (culpabilité) et que cette faute puisse lui être imputée (imputabilité). Il
faut donc la réunion des deux éléments : la culpabilité et l’imputabilité.

Les causes de son imputabilité sont donc des circonstances qui


suppriment la volonté libre, l’intelligence lucide, la capacité de comprendre et
de vouloir, rendant ainsi impossible l’imputabilité et donc aussi la
responsabilité pénale.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

L’on reconnaît comme causes de non imputabilité d’abord la minorité


qui est une cause présumée irréfragable de non imputabilité, laquelle est
légalement consacrée (voir la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l’enfant), ensuite les autres causes non présumées de non
imputabilité qui ne sont pas consacrées par aucune disposition légale écrite
mais qui sont appliquées en droit congolais en qualité de principes généraux du
droit.

Il s’agit pour cela de :


- la démence qui se caractérise par l’absence de discernement ;
- la contrainte qui se manifeste par l’absence de liberté ; et
- l’erreur ou même l’ignorance qui se caractérisent par un défaut de
connaissance exacte.

Il convient de les analyser en regroupant d’un côté les causes


pathologiques et celles physiologiques de non imputabilité et de l’autre, les
causes psychologiques de non imputabilité.

Toutes ces causes ont en commun le fait que l’auteur est privé donc de
conscience et de volonté. Il ne peut pas pour cela être légalement tenu de
répondre pénalement de l’acte délictuel par lui commis.

Section 1. LES CAUSES PATHOLOGIQUES ET PHYSIOLOGIQUES DE NON


IMPUTABILITE

Traitons des unes avant les autres.

Paragraphe 1. Les causes physiologiques de non imputabilité

Il est ici tenu compte tant de l’âge que du sexe de l’agent pour ainsi
individualiser la responsabilité.

L’on doit dire qu’aujourd’hui avec est la loi n°09/001 du 10 janvier 2009
qui porte protection de l’enfant et qui crée les tribunaux pour enfants, il n’est
pas possible d’envisager la responsabilité pénale des mineurs de quatorze ans.
Le juge des enfants ne devra donc utiliser, face à l’enfant que cette loi de 2009.
Lorsque les mineurs d’au moins quatorze ans commettent des actes prohibés
par la loi et qu’ils sont responsables de ces faits, le juge devra ordonner un
traitement spécial pour l’intérêt supérieur de l’enfant.

A ce sujet, la loi applicable aux enfants en conflit avec la loi (n°09/001


du 10 janvier 2009), prévoit les mécanismes judiciaires applicables lorsqu’une
infraction implique une personne âgée de moins de 18 ans.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Mais, nous estimons qu’à l’état actuel de notre législation, la non


imputabilité n’est légalement consacrée qu’à l’endroit du mineur de
quatorze ans.

Si en droit pénal congolais l’âge de l’agent a une certaine incidence, il


importe de noter par ailleurs que seulement le mineur de quatorze ans est ici
pris en considération. La vieillesse, quant à elle, ne constitue pas en soi une
excuse en dépit du fait qu’elle affecte par la sénilité les facultés mentales de
certains individus.

Néanmoins, il revient au juge de traiter chaque cas spécialement et


séparément. C’est ainsi que l’atténuation de la peine ou même l’acquittement
pourra intervenir non pas à cause de son âge avancé mais entant que
circonstance atténuante.

En ce qui concerne le sexe, il n’y a aucune différence qui est faite entre
l’homme et la femme dans la commission de l’infraction et dans l’étendue de la
responsabilité pénale. Mais, au niveau de l’exécution de la peine de mort, la
femme se voit accorder un certain avantage. Ce qui fait qu’une femme enceinte
condamnée à la peine de mort ne pourra être exécutée qu’après délivrance. Car,
la peine étant individuelle, il convient de ne l’appliquer qu’à la personne
« auteur » de l’infraction qu’est la mère enceinte. L’enfant devra être protégé
jusqu’à son accouchement même si on s’est rendu compte qu’il naîtra mort.

Paragraphe 2. Les causes pathologiques

Elles altèrent les facultés mentales par des troubles psychiques ou


physiques et elles ont des effets variés que l’on peut distinguer en :
- troubles permanents des facultés mentales ; et
- troubles momentanés des facultés mentales.

En ce qui concerne les troubles permanents, le code pénal belge contient


une seule cause que l’on qualifie de « démence ». Depuis la loi du 09 avril
1930, on a retenu l’anormalité.

La démence désigne au sens général et normal du terme toutes les


causes de perturbation intellectuelle qui ne laissent à l’homme une volonté
presqu’anormale.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

A. Le régime pénal des déments

Il fut un temps où les déments acquittés pour cause d’irresponsabilité


pénale, échappaient au pouvoir judiciaire belge. Mais, depuis la loi du 09 avril
1930, le dément peut être interné dans des établissements spécialisés pour
vous y appliquer des mesures curatives (mesures de traitement).

L’anormalité, quant à elle, constitue un grave état de déséquilibre


mental ou de débilité mentale rendant celui qui en est affligé incapable de
contrôler ses actions.

- Le déséquilibre mental :

Monsieur TROUSSE définit le déséquilibre mental comme un état


psychique permanent qui se manifeste par l’impossibilité pour le sujet de se
donner et de suivre un plan d’existence harmonieux, conforme à ses propres
intérêts et adapté aux exigences de vie en société.

- La débilité mentale :

Monsieur PERRET donne une définition du dictionnaire psychiatrique,


verbo-débilité mentale (où tout est classé par ordre alphabétique).

La débilité mentale est la pauvreté ou la faiblesse native de facultés


mentales mettant les sujets qui en sont atteints en état d’infériorité sociale. Elle
est due à un arrêt ou à une insuffisance du développement des facultés
intellectuelles. Elle (comme l’anormalité) peut être grave lorsque le sujet devient
incapable du contrôle de ses actions.

B. Les troubles momentanés des facultés mentales

Ils sont pathologiques et attaquent l’intégrité des facultés


mentales. Mais, ils sont passagers et temporaires. Souvent, ils n’ont pas de
formes cliniques. C’est le cas de l’ivresse, l’intoxication par des stupéfiants, le
somnambulisme mais aussi l’hypnose.

C. Les difficultés inhérentes aux troubles momentanés

Il faut toujours distinguer les troubles permanents des troubles


momentanés. Alors que l’ivresse est temporaire et donc momentané ; la
toxicomanie est par contre permanente.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Lorsqu’un somnambule qui se reconnaît tel, ne prend aucune


disposition pour éviter de violer la loi, et retombe dans le même fait
infractionnel ; il sera tenu responsable à cause de sa négligence.

Lorsque l’ivresse est totale, elle exclue la responsabilité. Lorsque par


contre, elle a été voulue, l’agent sera responsable de la négligence. Toute ivresse
recherchée constitue un dol et rend l’auteur responsable. L’homicide commis
dans un état d’ivresse totale, ne sera pas considéré comme assassinat, mais
plutôt comme l’homicide involontaire. Ce qui est sanctionné ici, c’est, en effet,
plutôt le résultat dommageable mais pas l’activité criminelle.

Section 2. LES CAUSES PSYCHOLOGIQUES DE NON IMPUTABILITE

Elles sont au nombre de trois :


- la contrainte ;
- l’erreur ; et
- l’ignorance.

Paragraphe 1. La contrainte

L’article 71 du code pénal belge prévoit qu’il n’y a pas d’infraction


lorsque l’accusé ou le prévenu a été contraint par une force à laquelle il n’a pu
résister. La contrainte peut être définie comme une cause psychologique de non
imputabilité de portée générale. Elle consiste dans un événement qui détruit la
volonté de l’agent au moment de son acte et se substitue à elle dans la causalité
de l’infraction. C’est que l’individu mû par cet événement a été poussé
irrésistiblement à l’acte interdit par la loi pénale ou a été absolument empêché
d’accomplir ce que la loi lui commandait. Mais, au point de vue de
l’applicabilité, la contrainte est une exception légitime à toutes les lois, car elle
comprend la force majeure et le cas fortuit. Elle est un principe présent dans
tous les systèmes juridiques et à toute époque et concerne aussi bien le droit
commun que les infractions prévues par les lois particulières.

A. Les conditions de la contrainte

Pour que l’on retienne la contrainte, elle doit être totale, étrangère à
l’accusé ou au prévenu, et antérieure à l’infraction.

1. La contrainte doit être totale

Une simple difficulté se conformer à la loi ne suffit pas. Il faut que la


contrainte ait déterminé l’acte et que le libre arbitre de l’auteur ait été
supprimé. C’est-à-dire que l’auteur ne doit avoir eu le choix en aucun moment.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Dans le cas où l’agent a pu avant ou pendant l’action modifier sa


conduite et qu’il ne l’a pas fait, la contrainte cesse d’être une cause de non
imputabilité mais peut se muer en circonstances atténuantes ou même en
excuse en cas de provocation.

L’irrésistibilité de la contrainte doit être appréciée subjectivement, car la


tendance moderne de droit pénal est l’individualisation de la peine, étant donné
qu’en justice chaque cas est un cas d’espèce.

2. La contrainte doit être étrangère à l’accusé ou au prévenu

Elle doit être imposée à l’individu et la loi ne reconnaît pas l’état de


contrainte à un individu lorsqu’il s’est mis lui-même dans une situation de
subir cette contrainte pour ainsi réussir à éviter la condamnation.

Si par négligence ou défaut de précaution, l’agent s’est trouvé contraint


d’agir criminellement, la contrainte ne sera pas accordée. C’est que l’accusé ne
doit pas l’avoir facilité.

3. La contrainte doit être antérieure

Il ne suffit pas que la contrainte soit totale et étrangère à l’accusé pour


qu’elle soit retenue. En effet, la contrainte doit également être soit antérieure,
soit encore concomitante à l’infraction. Ce qui sous-entend qu’aucune
contrainte postérieure à l’infraction ne pourra être admise comme justifiant
celle-ci.

B. Les espèces de contrainte

Il existe 2 espèces de contraintes :


- la contrainte physique ; et
- la contrainte morale.

1. La contrainte physique

Cette espèce de contrainte est rare et ne présente aucune difficulté au


point de vue de sa détermination. Il y a contrainte physique lorsque l’agent se
trouve matériellement forcé d’accomplir ou matériellement incapable d’arrêter
un acte illicite. Ces autres formes de contrainte sont rencontrées souvent dans
les infractions d’omission.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est le cas d’un témoin qui ne peut pas remplir son devoir à cause
d’une inondation ou d’une maladie grave.

2. La contrainte morale

Celle-ci présente de nombreuses difficultés et controverses qui existent à


son propos. Par moments, la contrainte morale est confondue au trouble des
facultés mentales. Néanmoins, on peut la définir comme étant celle qui résulte
de l’imminence (actuelle) d’un mal mettant une personne dans l’alternative soit
de subir ce mal soit de commettre tel acte illicite qu’on lui impose.

La doctrine classique limite la contrainte morale à la seule crainte qui a


été assez forte pour pousser l’agent d’une façon irrésistible. Cette crainte peut
évidemment être provoquée par des causes naturelles et pour cela les exemples
sont légions où l’on constate que naufrages ou autres catastrophes poussent
les individus à commettre les crimes dont on ne saurait les accuser.

Mais, l’épineux problème est, en effet, plutôt celui de la crainte causée


par le fait de l’homme qui par des actes ou des paroles, parviendrait à menacer
un agent et le conduirait irrésistiblement par la crainte à la commission d’un
acte illicite.

Pour qu’elle soit retenue, la contrainte morale présente quelques


conditions ou préalables nécessaires :
- Le mal dont l’agent est menacé doit être grave. C’est ainsi qu’une
simple pression morale ne suffit pas, car elle ne provoque pas
chez l’agent la crainte.
- Il appartient ainsi au juge de chercher à savoir si la menace était
grave et avait provoqué la crainte auprès de l’agent.
- Le danger doit être certain, actuel et pressant. Le délinquant doit
y croire sans avoir la possibilité de se soustraire autrement.
- Le mal doit être injuste. Si le mal dont on est menacé est juste et
légitime, il n’est pas possible d’alléguer la contrainte morale et être
justifié.
- L’acte doit être imposé à l’auteur de l’extérieur. L’auteur ne peut
pas lui-même se constituer en situation d’une personne qui la
subit.

A côté de la contrainte, il y a la passion et même la suggestion


criminelle.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

1° La passion

Certains auteurs estiment que la passion exerce un tel effet sur la


volonté qu’elle cause une contrainte morale. La doctrine reconnaît par fait, la
passion comme étant une cause de non imputabilité.

La passion provient souvent de la faiblesse humaine.

Les cas pouvant être considérés comme constituant la passion sont :


- la vengeance ;
- la haine ;
- l’ambition ;
- la cupidité ;
- l’amour ; et
- la jalousie et même politique.

Et pour cela, le meurtre causé par l’adultère d’une femme provoquant la


colère du mari ou l’infanticide par la femme enceinte abandonnée, seraient
justifiés ou excusés, car les circonstances dans lesquelles ces infractions sont
perpétrées ont occasionné des répercussions psychologiques telles qu’il y a eu
absence de liberté pour la volonté et par conséquent l’élément moral ou
l’intention criminelle de l’infraction ne pourra pas être retenu.

2° La suggestion criminelle

La question que l’on se pose est celle de savoir si l’on peut dire que la
volonté forte peut contraindre moralement la volonté faible pour ainsi pousser
l’agent à poser un acte illégal.

Il convient de retenir que la suggestion criminelle peut être purement


morale ou physique.

- La suggestion morale :

En principe une telle suggestion n’entraîne pas cause de non


imputabilité par contrainte.
Cependant, on pourra la retenir comme une circonstance aggravante
pour le provocateur et comme circonstance atténuante pour le provoqué. C’est
ainsi que les conseils d’une tierce personne ou l’ordre d’un supérieur ne
pourront pas constituer des excuses. Le fait pour un chauffeur de dépasser la
limite de vitesse permise sur l’ordre de son patron ne pourra pas non plus
constituer une excuse.

146 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

- La suggestion physique :

Elle est aussi appelée HYPNOSE. Il s’agit donc d’une action sur le
cerveau ou sur le système nerveux qui contraint irrésistiblement l’agent et ne
constitue une cause de non imputabilité pour l’hypnotisé qu’à la condition qu’il
n’y ait pas été volontairement ou par négligence.

Paragraphe 2. L’ignorance et l’erreur

A ce niveau, ce n’est plus la volonté mais la connaissance de la loi ou


des faits qui est défectueuse.

En effet, l’ignorance est considérée comme l’absence de toute notion sur


un point donné ; tandis que l’erreur est la présence d’une notion inexacte sur
une notion donnée.

A. Ignorance et erreur de droit et de fait

L’erreur ou l’ignorance peuvent porter sur la loi pénale. C’est le cas d’un
Congolais qui, une fois arrivée en R.D.C., ne connaît pas les règles de la
circulation routière congolaises.

L’erreur ou l’ignorance peuvent également porter sur les circonstances


qui rendent l’acte punissable. C’est dans ce cas soit une erreur, soit une
ignorance de fait. C’est ainsi qu’une personne peut par erreur prendre le
manteau de son voisin au vestiaire.

Mais, il faut dire que l’erreur ou l’ignorance peuvent porter


successivement sur : les éléments constitutifs de l’infraction ou sur une
circonstance aggravante de l’infraction ; et même sur une circonstance
accessoire de l’infraction.

Lorsqu’on considère le cas du vol de manteau ci-haut évoqué, on se rend


ainsi compte que l’erreur porte sur un élément constitutif de l’infraction, car
l’agent n’a pas pris le manteau en sachant qu’il appartenait à autrui mais parce
qu’il pensait que cela lui appartenait.

Dans le meurtre d’un père par son enfant par erreur sur la personne,
alors qu’il voulait, en effet, plutôt tuer une autre personne ; il y a difficulté pour
que l’on retienne le parricide qui constitue la circonstance aggravante du
meurtre (meurtre aggravé). Etant donné l’erreur sur la circonstance aggravante,
on ne retiendra que le meurtre ordinaire, sans pour autant retenir le parricide.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le fait pour un voleur de se tromper du propriétaire de l’objet à voler


(c’est-à-dire, qu’il se trompe en volant) alors qu’il voulait voler la radio de X
mais vole celle de Y, constitue l’erreur de l’ignorance sur une circonstance
accessoire. On devra ainsi sanctionner l’activité criminelle.

B. Les difficultés soulevées par les problèmes impliquant l’erreur et


l’ignorance

Il y en a plusieurs. L’on peut ainsi citer quelques-unes :

En droit pénal congolais, il n’y a pas de dispositions légales qui traitent


de cette question. Il faut donc pour cela recourir aux principes généraux de
droit et traiter ainsi cette question comme élément moral de l’infraction.
L’erreur et l’ignorance ont lieu dans l’esprit qui est insondable et la preuve de
ces états est difficile à faire ou à défaire.

Des difficultés spéciales doivent être résolues lorsque l’erreur ou


l’ignorance porte sur le droit. Car le législateur doit présumer pour le bien
même de la société que le droit pénal est connu.

C. Solutions aux difficultés soulevées par l’erreur et l’ignorance

On a toujours cherché comment résoudre ce problème en distinguant


l’erreur ou l’ignorance de droit de celle de fait.

En effet, s’il y avait erreur de fait, la cause de non imputabilité était


reconnue ; s’il y avait erreur de droit, l’accusé serait condamné, car la
présomption de connaître la loi existe. Or, depuis la deuxième guerre mondiale,
un mouvement s’est dessiné et a affaibli cette présomption de connaissance de
la loi et un nouveau critère a été adopté : INVINCIBILITE. C’est ainsi que :
- la distinction entre l’erreur de fait et de droit ne vaut plus ;
- l’erreur et l’ignorance seront justiciables si elles sont invincibles ;
- si elles sont invincibles, il y a justification. C’est le cas de l’article
71 du code pénal belge qui reconnaît la cause de justification ;
- cette justification est valable pour les infractions intentionnelles
(en Belgique, on écarte le délit et la contravention).

1° L’invincibilité

a) Notions

L’invincibilité s’apprécie souverainement par le juge. Il revient ainsi à ce


dernier de chercher à savoir s’il peut établir l’invincibilité.

148 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Il se posera alors la question ci-après : « Est-ce qu’un homme normal et


raisonnable eu commis cette infraction en se trouvant dans les mêmes
circonstances ? »

b) Effets de l’invincibilité établie

Lorsqu’il y a l’invincibilité (établie), plusieurs effets peuvent se produire


selon qu’il s’agit d’un élément constitutif de l’infraction ou d’une circonstance
aggravante sur laquelle a porté l’erreur.

1° S’il s’agit d’un élément constitutif de l’infraction l’invincibilité établit


la cause de non imputabilité.

2° S’il s’agit d’une circonstance aggravante, celle-ci disparaît mais


l’imputabilité de l’infraction principale demeure. C’est le cas d’un
délinquant A qui tue par erreur son père. Il sera puni pour le meurtre mais pas
pour le parricide.

Cependant lorsqu’un monsieur X épouse Y croyant suite à une


information de l’autorité de la commune que sa femme était morte, alors que
celle-ci vit encore et qu’il est accusé de bigamie, étant donné que cette erreur
invincible porte sur l’élément constitutif de l’infraction ; X ne pourra pas se voir
imputer cette infraction de bigamie.

Lorsque l’erreur ou l’ignorance n’était pas invincible, le fait qu’un accusé


aura par sa faute fait erreur ou ignorance sur un élément de l’infraction, ne
pourra pas être accepté comme une excuse ou une cause de non imputabilité
même si elles peuvent valoir une circonstance atténuante.

Exemple : Le fait pour la personne poursuivie pour bigamie de ne pas


s’être renseigné sur la mort de sa femme et de s’être marié pour la seconde fois
suite aux rumeurs, ne pourra pas constituer une cause de non imputabilité.

Il convient de distinguer, cependant, les infractions intentionnelles de


celles non intentionnelles. Dans les infractions intentionnelles où le dol est
exigé, l’erreur et l’ignorance non invincibles peuvent suffire à faire disparaître le
dol. Le fait pour A de voler un manteau sans vérifier et ainsi vaincre cette
erreur, suffit à disparaître l’intention frauduleuse et le dol. Dans les infractions
non intentionnelles l’erreur et l’ignorance constituent précisément la faute. Est
constitutif d’une faute, la négligence de l’infirmière qui administre du poison à
un patient en lieu et place du produit pharmaceutique. Cette mort constitue bel
et bien une infraction, car son erreur est une faute sanctionnable.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

2° La bonne foi

a) Notions

Le législateur congolais ne définit pas la bonne foi. On peut dire que


c’est l’absence de la mauvaise foi. Etre de bonne foi, c’est agir ou bien dans
l’erreur ou bien sans mauvaise intention.

La bonne foi et le mobile honorable sont souvent invoqués comme


causes psychologiques de non imputabilité. C’est le cas d’une personne qui
agissant avec une intention droite, commet une infraction qu’il n’a pourtant pas
voulu. Pour savoir si c’est un dol, il faut analyser son résultat ?

b) Résultat de la bonne foi

Dans le cas où l’intention délictueuse n’est pas requise comme en


matière d’accident de circulation routière, la bonne foi demeurera sans effet. Le
fait pour un médecin qui, après des examens médicaux se décide de couper la
main à un malade qui selon ses analyses était atteint du cancer ; mais qu’après
imputation, on se rend compte que cela n’était pas le cas ; rentre dans la bonne
foi dudit médecin.

Dans le cas où la notion de bonne foi est inconciliable avec l’intention


requise, elle demeure sans effet. Un agent qui détruit la sépulture d’une autre
personne ne le fait en tout cas pas de bonne foi. La dénonciation calomnieuse
auprès des autorités croyant que ces faits sont exacts (auprès des autorités).
C’est de bonne foi.

3° Le mobile honorable

Le mobile a été défini comme la raison personnelle d’agir, laquelle par sa


complexité échappe à l’analyse du droit avec l’individualisation de la peine et
l’intérêt du droit pénal moderne pour l’homme réel.

Quant à savoir, si le mobile honorable peut être valable comme excuse,


il convient de dire que le droit décide pour des considérations de politique
criminelle de n’accorder aucun effet justificatif ou exclusif d’infraction lorsque
celle-ci est commise avec un mobile honorable. C’est ainsi que sera puni, un
parent qui frappe un enfant désobéissant même s’il bénéficiera des
circonstances atténuantes.

150 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En ce qui concerne l’Euthanasie, le mobile peut être celui d’écourter la


souffrance d’un patient mais le droit congolais ne l’admet pas, car seul le juge
peut condamner quelqu’un à mort en tenant compte des exigences de la loi.

En définitive, les causes de non imputabilité peuvent être regroupées


en : - causes présumées de non imputabilité, à savoir : la minorité qui est
légalement consacrée ; et en causes non présumées de non imputabilité, qui ne
sont consacrées par aucune disposition légale écrite mais qui sont appliquées
en droit congolais en qualité de principes généraux de droit. Il s’agit de : la
démence ou l’absence de discernement, la contrainte irrésistible ou l’absence de
liberté et l’erreur invincible ou l’absence de connaissance.

151 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre II. LES CAUSES OBJECTIVES D’IRRESPONSABILITE


PENALE : CAUSES DE JUSTIFICATION

L’appréciation de la responsabilité pénale se fait par rapport à la


culpabilité de l’agent et à son imputabilité.

Il faut dire que la culpabilité suppose la commission d’une faute au sens


général, soit intentionnelle, soit d’imprudence ou de négligence qui constitue
l’élément moral de l’infraction. S’il n’y a pas de faute, il n’y a pas d’infraction
parce qu’il n’y a pas de culpabilité, et par conséquent, il n’y a pas de
responsabilité pénale. Or, précisément, le caractère fautif de l’acte incriminé
peut dans certains cas se trouver effacé par l’effet d’une justification spéciale ou
générale de la loi. Ce qui fera que l’acte incriminé devienne licite, conforme au
droit, parce que légitimé par un fait justificatif (ou une cause justificative).

Les faits justificatifs (ou causes justificatives) font ainsi obstacles à


l’établissement de la qualification. On dit qu’ils opèrent in rem et agissent
comme des causes objectives d’irresponsabilité pénale.

Il va falloir analyser à ce niveau : d’un côté l’ordre de la loi et le


commandement de l’autorité légitime et de l’autre, la légitime défense sans pour
autant mettre de côté l’état de nécessité ainsi que le consentement de la
victime. On peut ainsi les regrouper en causes fondées sur une injonction et
celles fondées sur une permission.

Section 1. JUSTIFICATIONS FONNDEES SUR UNE INJONCTION

La justification par injonction peut résulter soit d’un ordre de la loi ou


du règlement, soit du commandement d’une autorité légitime.

Paragraphe 1. L’ordre de la loi (du règlement)

L’ordre de la loi est d’autant plus un fait justificatif exonératoire de


responsabilité pénale que la non-exécution de ce que le législateur ordonne est
constitutive d’infraction. Ainsi, l’ordre de la loi justifie à lui seul ceux qui n’ont
d’ordre à recevoir de quiconque et qui ne doivent obéissance qu’à la loi elle-
même.

C’est par exemple le cas d’un magistrat qui peut décerner un mandat
d’arrêt ou un mandat de dépôt sans commettre de délit d’arrestation et
détention arbitraire ; sauf naturellement s’il maintient l’inculpé plus de
quarante-huit heures dans une maison d’arrêt sans l’avoir entendu (Article 188
du code judiciaire militaire).

152 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Lorsqu’on lit les articles 70, 152 et 260 du code pénal belge, on se rend
compte qu’il n’y a pas d’infraction si le fait était ordonné par la loi et commandé
par l’autorité.

L’immunité est ici accordée pour le fait lui-même incriminé. Le fait tire
sa justification de : - l’ordre qui soit – légal. L’article 107 al. 2 du code pénal
militaire congolais prescrit qu’il n’y a pas infraction de voies de fait et outrage à
subordonné en ces termes : « Toutefois, il n’y a pas d’infraction si les violences
ont été commises à l’effet de rallier des fuyards en présence de l’ennemi ou de
bande armée ou d’arrêter soit les pillages, dévastation ou destruction, soit le
désordre grave ».

En ce qui concerne l’ordre ; il faut dire que l’agent ne doit pas prendre
une initiative privée. Il doit s’agir donc d’un ordre reçu au cas contraire, il n’y
aura pas de justification.

Par rapport à cet ordre reçu, l’agent devra rester dans les limites de
l’injonction. C’est ce qui fait que l’exécution d’un ordre ne vaudra plus fait
justificatif lorsque l’agent a dépassé ce qui était nécessaire pour satisfaire aux
impératifs de l’ordre.

L’ordre dont question ici doit être légal. Ainsi, un ordre illégal ne
constitue pas un fait justificatif.

Il convient de relever que cette légalité suppose même le règlement.


D’où, l’ordre tant légal que réglementaire devra être respecté. C’est ainsi que le
commandant d’unité qui, régulièrement saisi d’une réquisition légale de
l’autorité civile, fait agir les forces de l’ordre qu’il fait intervenir en déployant
des moyens disproportionnés par rapport à la situation de terrain et cela contre
l’avis de ses supérieurs hiérarchiques ne pourra voir son agissement justifié.

Paragraphe 2. Le commandement de l’autorité légitime

L’autorité qui donne un commandement doit être légitime. C’est ainsi


que la justification ne sera pas accordée si l’autorité était usurpée.

Il s’avère important, par ailleurs, de reconnaître que : l’ordre ou le


commandement doit être donné à un inférieur par un supérieur. Ce qui
poussera le premier à obéir. Exemple : Le général qui donne des ordres au
colonel. Le contraire est illégitime. L’ordre ou le commandement doit être
également relatif à des objets du ressort de son supérieur.

153 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est ainsi qu’un général ne peut intimer directement l’ordre à un


adjudant même s’il est médecin de formation, de pratiquer la chirurgie (ou
d’opérer) un patient. L’ordre ne doit pas être manifestement illégal. Il faut une
époque où l’obéissance passive était encouragée chez les subalternes.
Aujourd’hui, l’évolution est dans le sens contraire et il est exigé aux inférieurs
d’apprécier la légalité des ordres qu’ils reçoivent. Et en cas de doute sur la
légalité, l’obéissance n’est pas recommandable. Pour ce qui est de l’armée, alors
que le refus d’obéissance constitue une infraction à titre particulier, le militaire
subalterne a donc du mal à apprécier la légalité de l’ordre reçu.

L’article 93 al. 1er du code pénal militaire dispose ce qui suit :


« Quiconque, militaire ou civil, embarqué ou employé par le ministère de la
défense, refuse d’obéir aux ordres de son supérieur ou s’abstient à dessein de
les exécuter ou, hors le cas de force majeure, n’exécute pas l’ordre reçu, est puni
de dix ans au maximum de servitude pénale ».

L’agent qui aura exécuté l’ordre reçu se verra protéger, car les formalités
accomplies créent une présomption de légalité dont il profitera sous forme
d’impunité pour l’acte illicite qu’il aurait commis conformément à l’ordre formel
reçu. L’ordre de commettre les crimes contre l’humanité n’exonère aucunement
de la responsabilité pénale. Il n’y a aucune justification à ce sujet. Ceci suppose
tant les crimes de guerres, que les crimes contre l’humanité et même le crime
de génocide. C’est ainsi que EICHMAN ne pouvait pas alléguer l’ordre reçu de
HITTLER pour justifier les crimes qu’on lui imputait lorsque ceci a été prouvé.

Section 2. JUSTIFICATIONS FONDEES SUR UNE PERMISSION

Deux situations particulières peuvent justifier le comportement


délictueux d’un individu.

Il s’agit ici de : la légitime défense et de l’état de nécessité.

En droit congolais, la légitime défense et l’état de nécessité sont


consacrés par la jurisprudence des cours et tribunaux qui les retiennent à titre
de principes généraux de droit.

Ils justifient l’infraction qu’une personne peut commettre en ceci qu’ils


suppriment le caractère infractionnel d’un acte. Ils consacrent l’absence de
l’élément injuste de l’infraction et rendent en conséquence l’acte licite, légitime
et conforme au droit. Ils ne supposent pas la suppression de la volonté de
l’agent. En effet, dans la légitime défense, l’agent choisit de riposter à une
attaque pour se défendre ; de même, dans l’état de nécessité, il choisit de
commettre une infraction plutôt que de subir un dommage.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 1. La légitime défense

Le législateur congolais n’a pas défini la légitime défense. Quant au


législateur belge, il considère aux articles 416 et 417 du code pénal belge ce qui
suit : « il n’y a ni crime ni délit lorsque l’homicide ou les blessures étaient
commandés par la nécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou
d’autrui ».

A. Fondement de la légitime défense

Elle est basée sur le droit naturel qui accorde à chaque individu le droit
de conservation que la société est impuissante dans certaines circonstances à
les assurer. Malgré que la loi belge la limite aux crimes de sang, c’est-à-dire
homicide et coups et blessures, les causes de justification étant susceptibles,
d’une interprétation exclusive et même analogique, une allégation de légitime
défense serait acceptable pour des violences légères ou pour lésion aux biens
d’autrui si celles-ci est le moyen de repousser une agression.

Le pouvoir du juge d’apprécier l’existence de la légitime défense porte en


particulier sur deux conditions à l’article 416 susmentionnés.

B. Les conditions de la légitime défense

Pour qu’il y ait légitime défense, il faut que : le droit de la défense puisse
exister et que la riposte soit proportionnelle à l’attaque.

1° L’existence du droit de la défense

La légitime défense doit être le seul moyen de repousser l’attaque. Il n’y


aurait pas légitime défense dans le cas où on peut appeler au secours ou
arrêter l’agresseur. Mais, est-ce que la fuite doit être considérée comme cet
autre moyen en cas d’une agression qui nécessite la riposte. Une controverse
existe à ce sujet. Il convient brièvement de dire que toute personne a le droit de
ne pas s’incliner et ainsi de résister à l’injustice.

L’existence du droit de la défense sous-entend un certain nombre de


caractéristiques qui sont : l’imminence de l’agression ; le caractère injuste de
l’agression ; l’attaque ou l’agression doit être dirigée contre les personnes ou les
biens.

155 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

* L’attaque ou l’agression doit être actuelle ou imminente

Il importe que la défense soit simultanée à l’attaque si l’agression ou


l’attaque est déjà passée, il n’y a plus légitime défense, mais vengeance ou
règlement privé des comptes. C’est ainsi que lorsqu’un agresseur s’enfuit toute
riposte ne pourrait être justifiée à titre de légitime défense.

L’agression doit également être sérieuse. C’est ainsi que celui qui se croit
raisonnablement en danger se verra reconnaître par le juge une cause de
justification. Il faut, par ailleurs, ajouter qu’on a élargi la légitime défense aux
notions telles que : l’attentat à la pudeur, la tentative de viol. On l’a élargi aussi
jusqu’aux notions telles que l’enlèvement, la séquestration, l’arrestation
arbitraire qui sont généralement accompagnées de violences auxquelles on peut
appliquer la notion de légitime défense.

* L’attaque doit être injuste

On ne peut pas se défendre contre un acte d’agression juste, autorisé


par la loi. Ce serait de la rébellion. Si l’attaque est objectivement juste et légale,
le droit de légitime défense n’existe pas.

Il est pour cela admis de résister aux actes manifestement illégaux de


l’autorité, d’autant que l’acte posé en exécution d’un ordre manifestement
illégal est considéré comme injuste.

L’agresseur ne peut invoquer à son tour le bénéfice de la légitime


défense. Légitime défense sur légitime défense ne vaut : il n’y a pas de légitime
défense contre une légitime défense, puisque celle-ci est un droit. Celui qui, par
une agression injuste, place un autre dans la nécessité de se défendre, ne peut
pas lui-même prétendre repousser la force par la force.

* L’attaque doit être dirigée contre les personnes ou contre les


biens

La légitime défense est fondée lorsque l’agression est dirigée contre sa


propre personne ou contre la personne d’autrui. La légitime défense en faveur
d’un tiers est consacrée par l’article 66 bis du code pénal ordinaire qui rend
obligatoire la défense d’autrui lorsque cette défense ne comporte aucun risque
pour soi-même ou pour les tiers.

156 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

La légitime défense ainsi consacrée vise la protection physique de la


personne humaine, c’est-à-dire la protection contre les atteintes à la vie
(meurtre, assassinat, …) contre les atteintes à l’intégrité corporelle (coups et
blessures, lésions corporelles) contre les atteintes à l’intégrité sexuelle (viol,
attentat à la pudeur) contre les atteintes à la liberté d’aller et de venir
(enlèvement, arrestation arbitraire).

On ne retient pas de légitime défense contre les atteintes à l’honneur


comme la diffamation, la calomnie ou l’injure. Il est, en effet, admis pour cela
que la victime de ces atteintes n’est pas menacée par un danger grave et
irréparable qui seul justifie une riposte. La victime peut toujours s’en référer à
l’autorité compétente pour solliciter et obtenir réparation.

En ce qui concerne la légitime défense contre les biens ou les propriétés.


Il s’avère important de relever la position de la Cour d’Appel d’Elisabethville qui
a jugé que se trouvent justifiés par la légitime défense, les individus
qui, pouvant prendre la fuite pour éviter le combat, ne l’ont pas fait pour ne pas
laisser à la merci des assaillants leurs cases, leurs biens et leurs plantations.

2° La proportionnalité et la nécessité de la riposte

L’acte de la défense doit réunir deux conditions pour être légitime. Une
condition de proportionnalité et une autre de nécessité.

* La condition de proportionnalité de la riposte

Pour être justifiée, la riposte doit être proportionnée à l’attaque subie ou


dont on est menacé. La défense doit être mesurée, c’est-à-dire proportionnée à
l’attaque. C’est ainsi qu’il n’y aura pas légitime défense lorsqu’on répond à un
gifle par un coup de revolver. Il appartient au juge d’apprécier ce caractère
mesuré ou démesuré de la riposte.

* La condition de nécessité de la riposte

La riposte par le recours à la force doit être le seul moyen de se protéger


ou de protéger autrui.

Le fait justificatif ne peut être admis si l’agent pouvait assurer sa


protection ou la protection d’autrui en faisant appel à l’autorité publique. C’est
encore une fois le cas de l’agent qui aurait pu, devant l’agression, trouver son
salut dans la fuite au lieu d’y riposte. En effet, comme il a été précédemment
admis, la légitime défense sera malgré tout retenue.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Car, on considère que la légitime défense est un droit et que « le droit


n’est pas tenu de céder devant l’injustice ; et la fuite, souvent honteuse ne peut
être une obligation légale »60.

C. Les éléments indifférents à l’appréciation de la légitime défense

D’autres aspects de la légitime défense n’ont aucune importance sur


l’application de cette cause de justification. C’est notamment :

La personnalité de l’agresseur : Peu importe que l’agresseur soit un


agent de l’ordre (Policier). Du moment où il (agit injustement) agresse
injustement.

Le titulaire du bien attaqué : La légitime défense peut être exercée pour


autrui et même pour un inconnu au risque d’être poursuivi de l’infraction de
non-assistance à personne en danger.

La personnalité de la personne attaquée : Qu’il s’agisse d’un agent de


l’ordre (militaire, policier, …) d’un parent, d’un clergé ou de toute autre
personne ; une fois que l’on est attaqué, on est dans le droit de riposter. C’est
ainsi que tant l’enfant de la rue que la prostituée peuvent légitimement se
défendre s’ils sont attaqués injustement.

D. La défense illégitime

Il peut se faire qu’une autre cause de justification soit présente. C’est le


cas de l’agression qui n’est pas assez grave. Ce qui peut avoir occasionné une
contrainte irrésistible.

Le défaut de la légitime défense et celui qui aura été attaqué peut


alléguer la provocation. S’il n’y a ni légitime défense ni provocation, l’attaque
peut être finalement considérée comme une circonstance atténuante. C’est
ainsi qu’on assimile certains cas dans la légitime défense.

L’article 417 du code pénal belge prévoit : La violation nocturne de


domicile… Il appartient au juge d’interpréter le mot « nuit » selon qu’il se trouve
dans tel ou tel autre pays. Mais généralement, on retient que la nuit commence
au-delà de 18 heures et se termine à 6 heures. « Le bâtiment » doit, quant à lui,
être habité, car on suppose qu’il a un maître (et qui n’est pas un res nullius).

60
PRADEL (J), Droit pénal général, n°306, p.335.

158 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Si toutes les conditions sont réunies, il y aura justification de la légitime


défense peu importe le dessein véritable de l’agresseur. Le cas de vol et de
pillage exécuté avec violence si le fait infractionnel (ou l’acte délictuel) est
commis dans le cadre de la défense contre les auteurs de l’infraction de vol ou
de pillage exécutés avec violence envers les personnes, on retiendra la légitime
défense. C’est-à-dire que le droit de légitime défense sera présumé et cette
présomption est irréfragable. On ne pourra pas la renverser et le juge sera
obligé de l’accorder dès que les faits sont établis. Cependant, si la légitime
défense n’est établie, le juge retiendra soit la provocation soit les circonstances
atténuantes.

E. La légitime défense et la responsabilité civile de l’agent

La légitime défense exclut la responsabilité civile de l’agent. Le dommage


causé par son acte infractionnel ou délictuel ne lui est pas imputable mais l’est
au premier agresseur. Toutefois, le défenseur légitime dont la riposte serait
disproportionnée par rapport à l’agression, pourrait répondre pour la partie
excédante du préjudice infligé à son agresseur.

Il faut bien noter que cette solution n’est pas absolue : « malgré l’excès
dans la défense, la demande en réparation par le premier agresseur doit être
rejetée, lorsqu’elle est contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs ».

Paragraphe 2. L’état de nécessité

Le législateur congolais n’a pas défini l’état de nécessité. Il revient ainsi


à la doctrine et à la jurisprudence de la définir.

L’état de nécessité apparaît lorsqu’un danger ne peut être écarté ou


qu’un bien ou même un droit ne peut être sauvegardé que par
l’accomplissement d’une infraction. C’est donc la situation dans laquelle se
trouve une personne qui ne peut raisonnablement sauver un bien, un intérêt
ou un droit que par la commission d’un acte qui, s’il était détaché des
circonstances qui l’entourent, serait délictueux61. C’est la situation de crise
dans laquelle se trouve une personne qui, pour échapper à un danger qui la
menace, ou pour sauver un tiers ou un bien d’un péril actuel et imminent, n’a
d’autre ressource que de commettre une infraction.

Il faut ajouter que cela doit se faire sans démesure, c’est-à-dire sans
disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace.

61
FORIERS (P), De l’état de nécessité en droit pénal, 1951, n°9.
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Cours de Droit Pénal Général 2013

A. La particularité de l’état de nécessité

L’état de nécessité naît d’un conflit entre différents droits ou valeurs


alors que dans la légitime défense le danger naît d’une agression injuste. L’état
de nécessité constitue une cause de justification pour toutes les infractions ce
qui n’est pas le cas en ce qui concerne la légitime défense qui ne concerne que
les crimes de sang. L’état de nécessité est également différent de la contrainte
morale où l’agent n’a pas la liberté de choix alors que dans l’état de nécessité il
est poussé à agir mais en (faisant) opérant un choix entre les droits en conflit. Il
lui appartient donc ici d’opter pour une alternative et de négliger l’autre.

Ce qui paraît si facile à faire sur le plan théorique ne peut pourtant être
le cas dans la pratique. C’est ainsi que le fait pour une femme qui allaite un
enfant de voler du pain pour manger devra être apprécié par le juge pour
chercher à savoir si elle a agi suite à l’irrésistibilité ou à l’état de nécessité.

B. Fondement de l’état de nécessité

Dans une grande controverse, on doit être amené à choisir. L’état de


nécessité est un fait objectif, car l’intérêt de la société exige que le droit ou la
valeur supérieure triomphe. S’il y a égalité entre différends droits en conflit, la
société ne peut prendre parti et doit permettre que le juge apprécie.

L’état de nécessité crée un état subjectif. Les partisans de cette théorie


soutiennent que le conflit entre différends droits crée un tel état d’esprit que la
liberté de choix se trouve même atteinte et que le droit ne peut pas imposer
dans ces circonstances inhumaines un choix plutôt qu’un autre. Cette
interprétation fait passer le pouvoir de contrôle du juge au second plan.

C. Conditions de l’état de nécessité

Pour que l’on retienne l’état de nécessité, il faut : En premier lieu, la


présence d’un droit ou d’un intérêt à sauvegarder. Il doit être de valeur
supérieur ou égale au droit ou à l’intérêt à sacrifier. S’il y a un danger à
accomplir un devoir, on ne peut sacrifier le devoir au simple danger sous
prétexte que la vie l’emporte. C’est le cas d’un militaire qui a le devoir de
défendre la patrie même jusqu’au sacrifice suprême. Il ne peut suite au danger
de la mort, se soustraire du devoir qui pèse ainsi sur lui.

Le droit supérieur à sauvegarder doit être en péril imminent et grave.


C’est-à-dire que la certitude du mal est une condition absolument essentielle de
l’existence de l’état de nécessité (on ne tient pas compte des vagues craintes).
Etablir l’impossibilité d’éviter le mal autrement que par l’infraction.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Il appartient au juge de mieux apprécier. Enfin, l’agent ne doit pas créer


par sa faute la situation qui la met en état de nécessité.

D. Effets de l’état de nécessité

Si cet état est prouvé, il constitue une cause de justification et par


conséquent il n’y aura plus d’infraction.

En revanche, la responsabilité civile ne disparaît pas sous l’effet de cet


état de nécessité. Il est juste équitable que le dommage causé soit réparé et que
la victime soit restaurée dans son droit. C’est ainsi que l’affamé qui vole devrait
indemniser sa victime, s’il revient à meilleure fortune.

E. Les cas d’application

Il convient d’évoquer ici deux cas d’application de l’état de nécessité :


- le cas de l’avortement thérapeutique ;
- les manœuvres d’évitement en matière de roulage.

* L’avortement thérapeutique : c’est le cas où le médecin provoque un


avortement pour sauvegarder la vie de la mère. Cette pratique est admise par la
profession et la science. Quant à la religion catholique et celle protestante, elles
ne sont pas d’accord avec l’avortement. Pour elles, on ne peut pas interférer
avec la volonté de Dieu.

* Les manœuvres d’évitement en matière de roulage : lors de la


circulation routière, il peut se faire que les accidents surviennent à causes des
manœuvres d’évitement celles-ci pourront être évitées que dans le cadre de
l’état de nécessité. Mais, il faut que les accidents survenus le soient dans le
souci pour le chauffeur d’éviter des collisions qui causeraient des conséquences
(dégâts) plus graves.

Paragraphe 3. Le consentement de la victime

Le code pénal congolais ne définit pas ce qu’on entend par


consentement de la victime. Mais, la doctrine et la jurisprudence évoque
souvent cette notion. Ceci implique que le problème ne peut se poser que pour
les infractions contre les particuliers parce que l’Etat ou la société ne saurait
consentir à être lésé.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le consentement de la victime ne peut en principe, être exclusif


d’infraction que lorsque cette dernière porte atteinte à un droit ou à un bien
dont la victime peut librement disposer.

A. L’application en pratique

Le droit de propriété et la liberté individuelle sont des domaines


n’admettant pas l’indisponibilité puisque le titulaire peut régulièrement en
disposer. C’est ainsi que : si la victime consent préalablement, l’acte de
soustraction (ou de prise) de son bien par un tiers ne peut constituer le vol,
l’extorsion, l’arrestation arbitraire ni même le viol ; si le titulaire n’a pourtant
pas la libre disposition de ce droit ou de ce bien, son consentement ne changera
rien dans la consommation de l’infraction qui ainsi persistera.

B. Conditions d’existence

Le consentement de la victime ne pourra justifier la commission d’une


infraction que si elle remplit les conditions ci-après :
1° Il doit être valable : libre et non contraire à la loi. Si la prévoit une
présomption irréfragable de non consentement, le consentement de la victime
ne changera pas le caractère infractionnel de l’acte posé.

2° Il doit être préalable ou tout au moins concomitant à


l’accomplissement de l’action. C’est que le consentement postérieur à l’acte
n’est pas admis.

C. Cas particuliers du consentement de la victime

Il convient d’évoquer à ce niveau deux cas particuliers du consentement


de la victime : les blessures causées lors des interventions chirurgicales et les
coups portés dans la pratique de sport.

1er cas : Les interventions (chirurgicales) médicales

Dans l’exercice de leur profession, les médecins causent des blessures


ou des lésions corporelles et même la mort des patients. Mais tout cela reste
impuni. Il y a le problème de l’intention et du consentement du patient dans cet
exercice de l’art médical.

L’impunité est due à plusieurs raisons. En ce qui concerne l’élément


moral, il faut dire que le médecin qui blesse ou cause des lésions et même la
mort n’a pas à première vue l’intention criminelle à moins que soit prouvé le
contraire.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Il faut dire en suite que les interventions médicales ont une valeur
sociale non négligeable. Il est aussi question de conflit entre différentes valeurs.
C’est ainsi que la guérison même éventuelle du patient doit l’emporter les
blessures ou lésions et même la mort. La profession médicale est réglementée
par la loi. Il y a donc une certaine permission de la loi, accordée aux médecins
dans leur profession. Il leur revient de ne rester que dans le strict nécessaire
sans pour autant extrapoler. C’est pour cela qu’il procède à des chirurgies,
greffes curatives mutilations des personnes en coupant soit la main, soit la
jambe pour lui éviter un risque plus grave.

Les expériences dangereuses sont prohibées même si la victime aurait


consenti.

Sur le plan civil, le médecin n’est lié que par l’obligation de moyen. C’est
ainsi qu’il doit mettre en jeux tous les moyens à sa disposition sans pour
autant être tenu par l’obligation de résultat.

2ème cas : La pratique des sports

Lors des rencontres sportives, il arrive que les adversaires se donnent


des coups ou se blessent sans pour autant être sanctionné.

Il faut dire que la pratique du sport est justifiée tant par la permission
de la loi que par la valeur sociale du sport. La pratique de sport apporte un bien
tant sur le plan individuel que celui collectif, supérieur au risque que l’on court.

La loi, en réglementant le sport oblige les pratiquants à rester dans les


limites légales. C’est ainsi que les coups portés contre son adversaire lors d’une
rencontre de Boxe ne seront pas sanctionnés si et seulement si les coups sont
donnés dans les limites des prévisions réglementaires légales.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

DEUXIEME PARTIE

LA SANCTION PENALE

164 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En règle générale, le droit de la sanction pénale que nous étudions dans


le cadre de ce cours de droit pénal général, devait constituer une matière à part
entière. Puisque la modeste place lui réservée à ce niveau ne parvient plus à
cerner tous ses contours.

Cette position traditionnelle n’est plus satisfaisante pour deux raisons :


- Depuis un certain temps, on assiste au développement d’un véritable
droit de la sanction pénale. Il ne convient ni ne suffit plus de procéder à
l’énumération des différentes peines applicables que l’on peut toujours
retrouver dans la loi. En effet, dans la plupart des Etats, la sanction
pénale est aujourd’hui encadrée par des principes fondamentaux sous
une double influence (CEDH ou CADH d’un côté et la Cour ou le Conseil
Constitutionnel de l’autre).

- L’exécution des peines est aujourd’hui, dans plusieurs pays, entrée


pleinement dans la sphère du droit grâce à la juridictionnalisation de
l’exécution des peines62.

En effet, alors que par le passé, et même aujourd’hui dans certaines


législations (le cas de la RDC), l’exécution des peines était aux mains de
l’administration pénitentiaire ; aujourd’hui, elle revient, dans la plupart des
législations, dans la sphère juridictionnelle avec le juge ou la juridiction de
l’application des peines (JAP).

Cette sphère du droit est encadrée par de grands principes. Il en est


ainsi du principe d’aménagement de la peine comme les libérations
conditionnelles.

Dès lors, l’exécution des peines devient une branche à part du droit
pénal. (Il y a néanmoins rareté de manuels s’y rapportant : P. Poncela a traité
du droit de la peine, il existe aussi un Droit d’application des peines, de
l’édition Dalloz action).

I. Définition de la sanction pénale

Il existe des sanctions juridiques de deux ordres, à savoir : la sanction


pénale et la sanction non pénale. C’est que schématiquement, les sanctions
juridiques recouvrent deux grandes hypothèses : certaines consistent en la
réparation d’un préjudice, et d’autres consistent en une répression de l’acte
accompli par une personne.

62
. Il en est ainsi de la loi française du 15 juin 2000, complétée par la loi du 9 mars 2004

165 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Il convient de souligner en effet que toutes les sanctions que l’on prend
en matières répressives ne sont pas forcement des sanctions pénales. Cette
distinction pose des difficultés d’autant plus que ce pouvoir répressif entretient
avec le droit pénal des liens étroits. En toutes hypothèses, la sanction pénale
est l’archétype de la sanction répressive. Elle peut donc être définie comme la
mesure coercitive prononcée sur la base d’une infraction par le juge pénal. La
sanction pénale est une réponse à la commission d’une infraction infligée par
le juge pénal. Cette sanction pénale n’est pas toujours assimilée à une peine, il
peut s’agir également d’une mesure de sûreté.

La distinction entre peine et mesure de sûreté se fait à travers leurs


fondements. D’abord, le prononcé d’une peine sous-entend, de la part de
l’agent, sa culpabilité ou sa faute (culpabilité prise ici au sens plus large que
l’imputabilité : la responsabilité). La peine est une réponse sociale à la faute
commise par un individu. Elle est associée à l’idée du libre arbitre. La
conséquence d’une responsabilité : c’est bien parce que l’homme est libre qu’il a
conscience qu’il est donc responsable et doit répondre de ses actes.

La peine est donc un mal infligé par la société en réponse et en


adéquation au mal causé par le délinquant ayant commis une faute.

Ensuite, la mesure de sûreté est un concept relativement récent inventé


par les positivistes italiens à la fin du XIXième siècle et qui substitue au libre
arbitre l’idée de déterminisme, qui peut être idéologique, biologique voir
climatique.

Dès lors qu’il est constaté que l’auteur avéré n’avait pas le choix, la
réponse de la société n’est plus la peine mais la mesure de sûreté. On considère
dans ce cas, que ce n’est ni la commission d’une infraction, ni « la
responsabilité qui commandent la réaction sociale mais la dangerosité ou l’état
dangereux de l’individu, aussi connu sous l’appellation de « terribilité ».

Au XIXième siècle, ces mesures de sûreté pouvaient être assez


drastiques : par exemple : l’élimination physique, l’internement à vie des
« délinquants d’habitude » (catégorie considérée comme la plus dangereuse),
la castration des délinquants sexuels. On en trouve une trace à l’article 27 de
la loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code Pénal Militaire qui
prévoit la neutralisation de l’individu à travers la période de sûreté
incompressible, lorsque la peine à subir est celle de mort.

166 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Cet article 27 du code pénal militaire est libellé comme suit : « Dans tous
les cas punissables de mort, la juridiction militaire pourra prononcer la peine de
servitude pénale à perpétuité ou une peine de servitude pénale principale, en
précisant une durée minimale de sûreté incompressible, c'est-à-dire la période de
temps pendant laquelle le condamné ne peut prétendre à aucune remise de
peine ».

Puisqu’elles s’intéressent aussi à l’état dangereux de l’agent, ces


mesures peuvent intervenir à titre préventif et non plus répressif. Certaines
législations (le cas du droit français) prévoient à cet effet notamment l’obligation
de soins pendant la détention provisoire, donc bien avant le jugement. En droit
congolais, le législateur en fait allusion à l’article 26 de la loi n°024/2002 du 18
novembre 2002 portant Code Pénal Militaire en ces termes : « Les peines
applicables par les juridictions militaires et les mesures de sûreté sont : la
mort par les armes, les travaux forcées, la servitude pénale, l’amende, la
confiscation spéciale, la dégradation, la destitution, la privation de grade ou la
rétrogradation, l’interdiction temporaire de l’exercice des droits politiques et
civiques ».

II. Evolution historique de la peine

L’histoire de la peine est celle de son adoucissement constant. En effet,


au fil du temps, la sévérité de la peine qui caractérisait le droit pénal s’effrite
peu à peu.

Cette affirmation se révèle exacte à travers l’usage de la peine.


Aujourd’hui, les peines corporelles ne font que céder la place aux autres peines
moins cruelles et plus humaines ; le cas des coups de fouets et même du projet
d’intégration de l’abolition de la peine de mort en droit congolais.

A l’antiquité

A L’antiquité grecque ou romaine les peines étaient peu connotées de


sanction morale. La sanction pénale était tournée vers une fonction utilitaire
qui se traduisait en termes d’élimination, d’intimidation et d’exemplarité. Il en
était ainsi de la peine d’exile, de la peine de mort et de l’amende.

Une place importante était accordée à la sanction pénale ; les peines


étaient donc diversifiées. Pendant cette période, la caractéristique du droit
pénal en général et de la peine en particulier était la sévérité. Il y avait la peine
de mort, la mutilation, les supplices. On peut citer à titre d’exemple : le cas en
France du châtiment corporel qu’avait subi monsieur Damien pour avoir tenté
d’assassiner Louis XV. Il a été tout simplement écartelé.

167 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est aussi le cas de l’adultère qui fut un crime puni du bannissement


jusqu'à la mort. Le Blasphème public, selon la gravité, pouvait être puni du
bûché ou de la langue coupée. Il y avait manifestement une volonté
d’intimidation.

Au XVIIIième siècle

Deux auteurs ont marqué cette période, à savoir : Cesare Beccaria et


John Howard. En effet, à travers son Traité des délits et des peines, l’italien
Cesare Beccaria développa l’idée originale qui voit la peine comme une garantie
de la loi et non une mise hors la loi. En ce sens, il dénonce la peine de mort et
demande la suppression des châtiments corporels. Il est même parvenu à
proposer le principe de légalité criminelle, proportionné à la gravité de
l’infraction et à l’importance de la célérité de la sanction plutôt que sa sévérité.

Quant à l’anglais John Howard, on constatera que sa pensée penchée à


l’étude des prisons, sera moins diffusée que celle de Beccaria. En 1777, il
publia le résultat de ses recherches en matière pénitentiaire. Il va alors se
consacrer à la réforme des prisons en Europe et proposer d’améliorer l’hygiène,
la salubrité et l’alimentation des prisons ainsi que de développer le travail
pénitentiaire.

Il faut noter que les peines retenues à cette époque étaient multiples : la
peine de mort, la guillotine, la peine de galères, la peine privative de liberté, la
mutilation, la trace au fer rouge. C’est seulement au XIXième siècle qu’arriveront
les circonstances atténuantes, le mouvement de la suppression de la peine de
mort dans certains pays pour les motifs politiques (en 1848 en France) ; en
Europe, il y a eu : l’amélioration du régime pénitentiaire notamment en posant
la règle de l’encadrement individuel, le développement des peines coloniales (le
bagne), la Relégation (éloignement géographique proposé comme traitement des
récidivistes en 1855), création de la liberté conditionnelle (en 1885).

III. Pour la juridictionnalisation de l’exécution des peines

Notions et importance de la juridictionnalisation. La


juridictionnalisation est le fait de donner à des actes qui ne le comporterait pas
le caractère d’authentiques décisions juridictionnelles. Elle concourt dans la
garantie de la séparation des pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire).
Puisqu’en effet, la juridictionnalisation de l’application des peines permet de
rendre au pouvoir judiciaire, en l’occurrence à une juridiction compétente, la
charge d’organiser, de suivre et d’assurer l’exécution de la sanction pénale
prononcée par les juridictions de jugement.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Ce qui, par rapport à la situation congolaise actuelle, constituera


certainement un transfert de compétence actuellement du pouvoir exécutif vers
le pouvoir judiciaire et plus précisément auprès d’une juridiction compétente.

La juridictionnalisation de l’exécution des peines s’inscrit dans une


conception dynamique du processus pénal qui consiste à penser que l’action
judiciaire doit s’exercer des enquêtes, en passant par le jugement, jusqu’à
l’exécution de la peine et que cette action nécessite une intervention
juridictionnelle63.

Humanisation des prisons congolaises. Il est pour le moment


souhaitable, de penser à la refonte du régime pénitentiaire congolais ou plutôt
du système judiciaire tout entier, afin de viser de plus en plus particulièrement
l’humanisation de nos établissements pénitentiaires. Car, ceux qui y sont
placés ne sont pas des sous-humains mais nos semblables qui, pour avoir
troublé l’ordre public, sont temporairement pris en charge par l’Etat en vue de
leur resocialisation.

En effet, dans les Etats véritablement démocratiques tout régime


d’exécution de la peine de privation de liberté est tenu de concilier la protection
de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la
nécessité de préparer l’insertion ou la réinsertion de la personne détenue afin de
lui permettre de mener une vie responsable et de prévenir la commission de
nouvelles infractions64. Pour y parvenir, il s’impose d’organiser des structures
susceptibles de réaliser une telle noble et délicate mission. Les juridictions
d’application des sanctions pénales rajouteraient à la matière la garantie du
procès équitable au niveau de l’exécution des peines.

Alors que jusqu'à ce jour, l'administration pénitentiaire congolaise


continue à assurer l'exécution des peines privatives de liberté sous le contrôle
du parquet, il est préférable d'attribuer cette compétence à un organe
juridictionnel qui devrait intervenir dans l'exécution matérielle des sanctions
pénales. On peut donc créer au niveau de chaque instance judiciaire répressive,
une chambre à laquelle on confierait cette tâche.

63
. Lire avec intérêt Bienvenu Wane Bameme, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits français
et congolais. Thèse de doctorat en droit, Aix-Marseille Université, 2010-2012, pp. 377-780.
64
. Article 1ier de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 portant loi pénitentiaire française.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le juge de la chambre de l'application des peines assurerait


l'aménagement de toutes les peines portées par des décisions devenues
définitives mais également de mesures prononcées à titre provisoire voire des
mesures de sûreté. Il déciderait à la suite d'une audience publique opposant le
parquet au condamné, au sujet des lieux et modalités de l'exécution de la
sanction pénale telle que prononcée et arrêtée par la chambre de jugement ou
toute autre autorité judiciaire compétente. À cet effet, il se prononcerait sur le
transfert du condamné ou du détenu préventif d'un établissement de privation
de liberté à un autre ou d'un lieu d'exécution de la peine à un autre dans les
limites de ses compétences territoriales. Les facteurs que ce juge prendrait en
considération, lors de la détermination des sanctions pénales devraient être
énoncés dans la loi, au moins d'une façon générale65.

Juridiction compétente de l’application de la sanction pénale. Serait


ainsi compétente de connaître de l'aménagement des sanctions pénales, d'abord
la chambre de l'application des peines de la juridiction qui a rendu la décision.
Il pourra être admis par la loi, que cette compétence revienne en suite, pour des
raisons évidentes, à la juridiction du domicile de la personne contre laquelle la
décision est rendue et même enfin, à celle du lieu ou elle sera trouvée. Si au
niveau du tribunal de paix, la chambre siégerait à juge unique, le siège devrait
être toujours collégial66 au second degré. Les mêmes règles et principes
d'organisation et fonctionnement des juridictions seraient donc appliquées à
cette chambre qui serait saisie d'office après le prononcé d'une décision
répressive par les collègues de la chambre de jugement.

Les principes de « légalité » (normativité) et d'individualisation de la


sanction pénale en vue de la réinsertion de la personne humaine qui la subirait
devraient conduire le juge de l'application des peines dans sa décision. Ce juge
devrait se garder à l'esprit qu'il est également appelé à concourir à la lourde
tâche consistant à concilier la protection de la société, la sanction prononcée et
les intérêts de la victime avec la nécessité de préparer la personne contre
laquelle la mesure est prise à sa resocialisation afin de lui permettre d'éviter la
rechute dans la délinquance. Ce qui permettrait tant soit peu de contrôler, de
maîtriser voir de réduire sensiblement le taux de la récidive dans la société.

65
. Voir Association Internationale de Droit Pénal, Résolutions des congrès de l'Association Internationale de Droit Pénal (1926-
2004), Xième Congrès international de droit Pénal, Rome, 29/09-5/10/1969, Editions Erès, numéro 20, 2009, p. 82
66
. Gilles Mathieu, op.cit., p. 369.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le juge de la chambre de l'application des peines, magistrat de carrière,


devrait être, comme tous ses autres collègues magistrats assis, inamovible.
C'est ce qui assurerait à ses fonctions la stabilité nécessaire à son rendement.
Cette chambre de l'application des peines devrait bénéficier de mêmes
compétences territoriale, temporelle et personnelle que celles reconnues aux
autres chambres de la juridiction dont elle est issue. Cependant, ses
attributions matérielles se rapportent à sa nature.

En effet, cet organe judiciaire interviendrait non seulement à l'intérieur


des lieux de privation de liberté (milieux ouvert et fermé) mais également en
dehors de ces lieux pour les exécutions des mesures de traitement en liberté
notamment le suivi d'un libéré conditionnel, l'épreuve du bénéficiaire du sursis,
le contrôle de la mesure d'éloignement de certains lieux, l'exécution du stage à
la citoyenneté, ...etc.

De ce qui précède, il a falloir procéder par l’analyse de :

- l’approche analytique de la sanction pénale ; et

- Les mesures affectant la sanction pénale.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Titre 1. APPROCHE ANALYTIQUE ET EXPLICATIVE DE LA


SANCTION PENALE

Définition de la sanction pénale. La sanction pénale doit s’entendre de


toute sanction prononcée dans le cadre d’une infraction. Il peut s’agir d’une
peine mais aussi d’une mesure de sûreté.

La peine est donc un mal infligé à titre de punition par le juge à celui
qui est reconnu coupable d’une infraction.

Il convient ainsi de dire que cette notion est inséparable de l’idée de


souffrance. La peine constitue une sanction qui se distingue des autres
sanctions. En effet, la notion de la peine (en tant que sanction pénale) diffère de
celle de la mesure administrative de la police qui intervient avant la commission
de l’infraction en vue de la prévenir. Car, l’on reconnaît à la police deux
missions. Alors que la première est administrative (ou d’ordre administratif) et
se rattache à la prévention ; la seconde est, cependant, judiciaire. Celle-ci est
relative aux enquêtes et à toutes les investigations menées par la police.

La peine est également différente de la sanction civile étant donné que


celle-ci résulte de la condamnation aux dommages civils liés aux préjudices
causés à autrui.

Dans son existence, la sanction pénale doit remplir diverses fonctions et


comporter des caractères indispensables au rétablissement de l’ordre au sein
de la société.

Ainsi, faudra-t-il les nommer et les classifier (Chapitre 1) avant de


présenter leurs fonctions et caractères (Chapitre 2).

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre I. NOMENCLATURE ET CLASSIFICATION DES SANCTIONS


PENALES

Les sanctions pénales ne sont pas identiques. Guidées principalement


par le principe de la légalité « normativité » criminelle, les sanctions pénales
sont diversement classifiées dans leurs nomenclatures.

Section 1. LA NOMENCLATURE DES SANCTIONS PENALES

L’article cinq du décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal Ordinaire


prévoit dans son livre 1 que : « les peines applicables aux infractions sont :
- la mort ;
- les travaux forcés ;
- la servitude pénale ;
- l’amende ;
- la confiscation spéciale ;
- l’obligation de s’éloigner de certains lieux ou d’une certaine région ;
- la résidence imposée dans un lieu déterminée ;
- la mise à la disposition du gouvernement ».

En ce qui concerne le code pénal militaire (la loi n°024/2002 du 18


novembre 2002), l’article 26 prévoit ce qui suit : « les peines applicables par les
juridictions militaires et les mesures de sûreté sont :
- la mort par les armes ;
- les travaux forcés ;
- la servitude pénale ;
- l’amende ;
- la confiscation spéciale ;
- la dégradation ;
- la destitution ;
- la privation de grade ou la rétrogradation ;
- l’interdiction temporaire de l’exercice des droits politiques et civiques ».

Paragraphe 1. La peine de mort

1° Notion

La peine de mort peut se définir comme étant la privation de la vie


ordonnée par le juge et exécutée en vertu d’une décision juridictionnelle. Il
convient de retenir que dans l’ancien temps l’application de la peine de mort
était accompagnée de quelques supplices que l’on peut qualifier aujourd’hui
d’inutiles.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

2° Domaines d’application

La peine de mort est prévue par le législateur tant dans le code pénal
ordinaire que dans celui militaire. C’est ainsi que l’on retrouve plusieurs cas,
entre autres :
- les articles 44 et 45 du code pénal ordinaire livre 2 qui prévoit le
meurtre et l’assassinat les réprime par la peine de mort ;
- l’article 49 du code pénal ordinaire livre 2 prévoit l’empoisonnement
et le punit de mort ;
- le vol à mains armées prévu par l’article 81 bis est puni de mort (art.
2 de l’ordonnance-loi n°68/193 du 03 mai 1968, M.C., p.1324) ;
- l’article 182 du code pénal ordinaire livre 2 qui punit de mort tout
auteur de l’infraction de trahison ;
- l’article 185 du code pénal ordinaire livre 2, puni l’espionnage de la
peine de mort ;
- l’article 193 du code pénal livre 2 prévoit la peine de mort contre
l’auteur de l’attentat contre la vie ou la personne du chef de l’Etat ;
- l’article 200 du code pénal livre 2, puni de mort l’attentat dont le but
était de porter le massacre, la dévastation ou le pillage.

En ce qui concerne le code pénal militaire, il convient de noter que


plusieurs infractions sont punies de la peine de mort en tout temps. Il existe
aussi certaines infractions qui sont punies de la peine (d’emprisonnement) de
servitude pénale en temps de paix alors qu’en temps de guerre, elles sont
punies de mort.

Il en est ainsi par exemple de :


- la désertion avec complot prévu par l’article 46 du code pénal
militaire.
- La désertion à l’étranger, à l’ennemi ou en présence de l’ennemi
prévue par les articles 47, 49, 50, 51 du code pénal militaire.
- L’infraction de lâcheté est prévue par l’article 57 du code pénal
militaire et punie de mort.
- L’infraction de capitulation ou du défaitisme prévue par l’article 58
du code pénal militaire est punie de mort.
- Le complot militaire est puni de mort en temps de guerre (article 62
du C.P.M.).
- La trahison et l’espionnage en temps de guerre sont punis de mort
(articles 128 et 129 du C.P.M.).
- Le port d’armes dans un mouvement insurrectionnel ou son usage
est puni de mort (articles 137 et 138 du C.P.M.).

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Cours de Droit Pénal Général 2013

- L’article 143 du code pénal militaire puni de mort tout celui qui
inciterait les militaires appartenant aux forces armées de la RDC à
passer au service d’une puissance étrangère.
- Le code pénal militaire punit l’auteur du terrorisme qui aura entraîné
mort d’homme, de la peine de mort (article 157 du C.P.M.).
- L’auteur du crime de génocide est puni de mort (article 164 du
C.P.M.).
- L’auteur des infractions des crimes contre l’humanité est puni de
mort si ses actes ont soit causé la mort ou une atteinte grave à la
santé des victimes (article 167 al. 2 du C.P.M.).
- L’auteur de la mise à mort par représailles est puni de mort comme
celui de l’assassinat (article 171 du C.P.M.).
- L’article 172 du C.P.M. puni de mort l’emploi des prisonniers de
guerre à des fins de protection contre l’ennemi en temps de guerre ou
des circonstances exceptionnelles.

3° Exécution de la peine de mort

La peine de mort est exécutée soit par pendaison, soit par les armes. En
effet, le militaire condamné à mort devra passer par les armes. Tandis que le
civil ne passera par les armes que lorsqu’il commet lui-même ou participe à la
perpétration d’une infraction prévue et punie de mort par le code pénal militaire
(Article 28 du C.P.M.).

En ce qui concerne le lieu d’exécution, il est choisi par l’organe de la loi.

Quant aux autres préalables, il est admis ce qui suit : on ne peut


exécuter une femme enceinte, jusqu’à la délivrance ; l’exécution se fait en
présence de l’organe de la loi, le médecin, le prêtre… tel que le décidera le
ministère public.

Pour éviter des exécutions hâtives, l’OMP compétent est tenu d’interjeter
appel chaque fois qu’il y a une condamnation à mort et de surseoir à l’exécution
en attendant qu’il soit statué le recours en grâce qu’il doit introduire.

Il peut se faire que la peine de mort ne puisse pas être appliquée à la


suite de la remise dont bénéficiera la personne condamnée. C’est le cas de
l’article 27 du code pénal militaire du 18/11/2002 qui dispose ce qui suit :
« Dans tous les cas punissables de mort, la juridiction militaire pourra prononcer
la peine de servitude pénale à perpétuité ou une peine de servitude pénale
principale, en précisant une durée minimale de sûreté incompressible, c’est-à-dire
la période de temps pendant laquelle le condamné ne peut prétendre à aucune
remise ».

175 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Il faut dire que l’attitude du législateur congolais dans le code pénal


militaire constitue une avancée significative vers la tendance abolitionniste de
la peine de mort.

Mais, il faut également reconnaître que l’abolition de la peine de mort en


République Démocratique du Congo nécessite une autre peine de substitution.
Et c’est la servitude pénale à perpétuité qui est déjà visée. Cependant, il
conviendra de la rendre efficace pour mieux remplir la fonction d’utilité au sein
de la société.

Par ailleurs, des considérations de la défense sociale suggèrent que la


peine à retenir ne soit pas d’une durée telle que le condamné perde tout espoir
de rejoindre la société des hommes libres du moment que son comportement a
cessé d’être un danger pour cette société. Mais, on estime que la libération
conditionnelle, l’amnistie mais aussi la grâce pourront permettre d’atteindre un
tel objectif.

Paragraphe 2. Les travaux forcés

Cette peine est d’une année au minimum et de 20 ans au maximum.


Elle a été introduite en droit congolais en matière de détournement par la loi
n°73-017 du 05 janvier 1973 juste au moment où elle était critiquée et rejetée
dans beaucoup de pays, notamment en France par son ordonnance du 04 juin
1966 qui unifiait les travaux forcés et la réclusion pour donner lieu à la
réclusion criminelle qui peut être perpétuelle ou temporaire.

Etant donné que la loi de mise en application n’a pas encore été prise, la
peine des travaux forcés se voit, dans la pratique des cours et tribunaux,
remplacée par celle de la servitude pénale en droit congolais, alors même que le
troisième alinéa de l’article 6 bis du code pénal congolais affirme que l'exécution
de la peine de travaux forcés ne peut être assimilée, ni confondue avec la peine
de servitude pénale.

Notons enfin que l’article 16 al 5 de la Constitution de la RDC affirme


que « Nul ne peut être astreint à un travail forcé ou obligatoire ». Ce qu’à ce
jour, cette peine semble contraire à la constitution et mériterait d’’être
supprimée du Code. Par ailleurs, la loi de 2009 relative à la protection de
l’enfant crée la sanction de travaux d’intérêt général.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 3. La peine de servitude pénale

C’est une peine qui consiste à priver quelqu’un de sa liberté de


mouvements. Il s’agit donc d’un enfermement infligé à une personne pour toute
la durée de son exécution.

Elle est réglementée par les articles 7, 8 et 9 du code pénal livre I. Le


droit pénal congolais connaît deux sortes de servitude pénale : la servitude
pénale à perpétuité et la servitude pénale à temps.

La servitude pénale à temps peut varier d’un jour à 20 ans et ne peut


jamais dépasser ce seuil même en cas de concours matériel d’infraction.

Il y a possibilité de remplacer la servitude pénale par l’amende, lorsque


l’hypothèse est prévue par le législateur.

- Le sursis et l’approbation.

C’est le régime de semi-liberté entendu comme une mise en liberté sous


condition. En vertu de ce régime, le détenu est tenu de retourner en prison de
temps à autre ou après une période déterminée.

Paragraphe 4. La peine d’amende

Elle consiste en une peine portant sur une somme d’argent que le
condamné est obligé de verser au trésor public.

L’amende est de un franc constant au moins, selon la loi. Elle est perçue
au profit de la République. Elle est prononcée individuellement contre chacun
des condamnés à raison d’une même infraction.

En cas de défaut d’exécution dans le délai de la peine d’amende, cette


dernière peut être remplacée par une servitude pénale dont la durée sera fixée
par le jugement de condamnation, d’après les circonstances et le montant de
l’amende infligée au condamné (Art. 37 du code pénal militaire).

Paragraphe 5. La peine de la confiscation spéciale

L’article 14 du code pénal ordinaire livre 1 prévoit deux cas auxquels


s’applique cette peine de confiscation spéciale. D’un côté, elle s’applique aux
choses formant l’objet de l’infraction et à celles qui ont servi ou qui ont été
destinées à la commettre quand la propriété en appartient au condamné ; et de
l’autre côté, elle s’applique aux choses qui ont été produites par l’infraction.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Il convient de dire, par ailleurs, que la confiscation générale qui était


prévue en vertu de l’article 2 de la loi n°73-017 du 05 janvier 1973 contre les
auteurs de concussion, détournement et corruption, n’existe plus en droit
congolais. Car la loi sus évoquée a été abrogée.

Section 2. LA CLASSIFICATION DES SANCTIONS PENALES

Le législateur congolais prévoit tant dans le code pénal ordinaire que


dans le code pénal militaire, les peines au sens strict et les mesures de sûreté
sans pour autant distinguer ces deux notions ni même laisser une place à part
aux mesures de sûreté.

Paragraphe 1. Les mesures de sûreté

Alors que la peine est une sanction infligée à titre de punition, les
mesures de sûreté constituent des mesures individuelles coercitives sans
coloration morale imposées à un individu dangereux pour l’ordre social afin de
prévenir les infractions que son état rend probable.

Les mesures de sûreté ont des traits et des objectifs variés :


- des mesures éducatives : il en est ainsi des mesures de garde, de
préservation et d’éducation des enfants mineurs.
- des mesures préventives : elles visent à mettre le délinquant
dangereux dans l’impossibilité de commettre l’infraction. Dans
cette catégorie, on trouve : la fermeture d’établissement,
l’interdiction d’exercer une profession.
- des mesures curatives : elles permettent d’interner et de traiter
notamment les alcooliques et les toxicomanes adonnés aux
stupéfiants.

Les mesures de sûreté sont également éliminatrices. Elles peuvent


permettre l’interdiction de séjour dans un lieu déterminé ou l’éloignement de
certains lieux ou même l’expulsion des étrangers.

Il faut dire que l’article 5 du C.P.L.II ne parle que des peines alors que
l’on y trouve aussi les mesures de sûreté. Elles sont invoquées à l’article 27 du
Code Pénal Militaire.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. Les peines au sens strict

Les peines peuvent être classifiées soit par catégorie soit encore en
tenant compte du mal infligé à la personne qui l’aura subi.

A. Classification des peines par catégorie

Lorsqu’on envisage les rapports qui existent entre elles, les peines
prévues par la loi peuvent être catégorisées comme suit : les peines principales,
les peines complémentaires et les peines accessoires.

1° Les peines principales

Ce sont les peines qui sont imposées par le législateur et que le juge ne
peut pas se dispenser de prononcer lorsqu’il déclare le prévenu coupable à
moins qu’il ne retienne en sa faveur une excuse légale absolutoire.

Il s’agit des peines ci-après : la peine de mort, la peine des travaux


forcés, la peine de servitude pénale et la peine d’amende.

2° Les peines complémentaires

Comme l’indique leur appellation, ces peines sont prononcées en sus


des peines principales. Elles s’ajoutent ainsi à ces dernières. Elles peuvent
revêtir deux caractères : obligatoire ou facultatif.

Les peines complémentaires sont obligatoires lorsque la loi impose au


juge de les prononcer. Quoiqu’elles soient obligatoires, si le juge pour une
raison ou une autre a oublié ou omis de prononcer les peines complémentaires,
elles ne pourront être appliquées car on exécute que la peine prononcée par un
juge dans un jugement.

Les peines complémentaires sont facultatives quand le législateur se


limite à en offrir la possibilité au juge. Dans ce cas, il pourra donc prononcer la
peine principale sans pour autant prononcer celle complémentaire.

En droit positif congolais, on peut considérer comme peine


complémentaire : la confiscation spéciale des biens, la privation du droit à la
condamnation conditionnelle et à la réhabilitation, la privation de grade, la
rétrogradation, la dégradation et la destitution (l’article 14 bis du code pénal
livre II donne le cas typique d’une peine complémentaire facultative).

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Cours de Droit Pénal Général 2013

3° Les peines accessoires

Elles sont automatiquement attachées à la peine principale, en sorte


qu’elles suivent celle-ci même si le juge les a oublié, c’est-à-dire que même si
elles n’ont pas été expressément prononcées. Elles sont donc supposées avoir
été prononcées par le juge et s’appliquent par conséquent dès lors que la peine
principale a été prononcée. Il s’agit de : l’interdiction du droit de vote et
d’éligibilité, le cas des condamnations au paiement d’une amende qui sous-
entend accessoirement une servitude pénale subsidiaire pour faute de
paiement.

Il faut noter, par ailleurs, qu’une même mesure peut être à la fois une
peine principale ou une mesure de sûreté ou même une mesure
complémentaire ou accessoire si tel est la volonté du législateur.

B. Classification des peines d’après le mal infligé au délinquant

En tenant compte du mal infligé au délinquant condamné, l’on se rend


compte qu’il existe : les peines corporelles, les peines privatives de liberté, les
peines restrictives de liberté, les peines privatives du patrimoine et les peines
privatives ou restrictives des droits.

Les peines corporelles

En droit pénal congolais, les peines corporelles sont celles qui atteignent
le condamné au corps. Le législateur n’a pour cela prévu aujourd’hui que la
peine de mort.

Les peines privatives de liberté

La législation pénale congolaise prévoit deux peines privatives de liberté.


Il s’agit de la peine de servitude pénale et celle des travaux forcés.

Les peines restrictives de liberté

Ces peines consistent en des sanctions qui, sans conduire à


l’emprisonnement du délinquant restreignent néanmoins sa liberté d’aller et de
venir. Tel est le cas des sanctions prévues à l’article 14 a, b, c du code pénal
ordinaire livre I.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Les peines privatives du patrimoine

Ce sont les peines qui frappent le condamné à partir de son patrimoine.


Ceci suppose que l’agent possède de l’argent ou des biens. Il s’agit donc de : la
peine d’amende et la peine de confiscation spéciale.

Les peines privatives ou restrictives des droits

Le législateur congolais prévoit dans l’arsenal juridique certaines peines


qui, soit réduisent la possibilité et la capacité de pouvoir exercer ses droits, soit
alors les anéantissent tout simplement.

C’est ainsi que l’on retrouve : l’interdiction de droit de vote ou d’élection,


l’interdiction d’accès aux fonctions publiques et para-étatiques, l’expulsion
définitive du territoire de la République et la privation du droit à la
condamnation ou à la libération conditionnelle.

L’article 33 de la loi n du novembre portant code pénal militaire


énumère 7 cas pouvant entraîner l’interdiction de l’exercice des droits civiques,
politiques ou civils. Il est formulé comme suit :
« Les juridictions militaires peuvent, dans certains cas prévus par la loi,
interdire, pour un temps déterminé, en tout ou en partie, l’exercice des
droits civiques, politiques ou civils :
- de vote et d’élection ;
- d’éligibilité ;
- d’être nommé aux fonctions publiques ou aux emplois de
l’administration ou d’exercer ces fonctions ou emplois ;
- du port d’armes ;
- d’être tuteur, curateur, si ce n’est de ses enfants et sur l’avis
seulement de la famille ;
- d’être expert ou employé comme expert dans les actes ;
- de témoigner en justice, autrement que pour y faire des
simples déclarations ».

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre II. LES FONCTIONS ET LES CARACTERES DE LA


SANCTION PENALE

On considère que la peine ne doit pas seulement être juste, elle doit être
aussi utile c'est-à-dire tournée vers l’avenir. Elle remplit diverses fonctions
fondamentales et doit afficher un certain nombre de caractère.

Section 1. LES FONCTIONS DE LA SANCTION PENALE

Il existe :
- La fonction morale ;
- la fonction de prévention spéciale ;
- la fonction de prévention générale ; ainsi que
- la fonction d’élimination.

Paragraphe 1. FONCTIONS MORALE ET DE PREVENTION SPECIALE

La fonction morale est aussi appelée fonction rétributive et celle de


prévention individuelle est spéciale.

A. De la fonction morale ou rétributive

Lorsque le délinquant commet une infraction, il contracte une dette


envers la société et il doit la payer. Le crime constitue donc pour cela une faute
que l’agent doit expier (réparer le tort commis par la peine). Cela répond
valablement à l’exigence de l’idée selon laquelle les bons actes doivent être
récompensés et les mauvais punis.

La fonction rétributive de la sanction mérite d’être affirmée ici car elle


constitue un rappel des valeurs essentielles de la société auxquelles aucun
individu ne peut porter atteinte sans que des comptes ne lui soient demandés.
Cela signifie que les valeurs fondamentales de la société ne peuvent être mises
en cause.

La peine donne en même temps à toute personne le sentiment de


sécurité car chacun peut ainsi, se rendre compte de l’effectivité de la justice
ainsi que de son efficacité dans la pratique.

B. De la Fonction de Prévention Individuelle ou Spéciale

La peine a aussi pour fonction d’empêcher celui à qui elle est appliquée
de recommencer. Elle atteint ce but soit par intimidation pure soit par
l’amendement.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

1° De l’intimidation : on espère que le délinquant qui a déjà subi une


peine, en a pris la mesure car il connaît bien le désagrément qu’elle comporte.
Un tel délinquant a plus intérêt à respecter la loi qu’à la violer. Il est donc pour
cela intimidé par la peine subie.

2° De l’amendement : la peine peut retenir l’ancien délinquant dans la


bonne voie en lui inspirant des sentiments honnêtes vis-à-vis de la société. Et
lorsqu’il s’est amendé, il pourra ainsi être utilement reclassé dans la société.

Paragraphe 2. LA PREVENTION GENERALE ET L’ELIMINATION

Traitons d’abord de la fonction de prévention générale avant de traiter


ensuite de la fonction éliminatrice.

A. De la Fonction de prévention générale

La peine infligée au délinquant constitue un avertissement ou une mise


en garde adressée à toutes les personnes qui sont tentées d’imiter cet agent
délinquant.

Cette fonction est donc appelée « intimidation collective ». Pour réaliser


cette mission et atteindre ainsi le but de l’intimidation collective, les Cours et
Tribunaux rendent leurs jugements (ou prononcent leurs jugements) en public.

B. De la Fonction éliminatrice

Elle consiste en ce que par l'exécution de la peine, le délinquant est mis


hors d’état de nuire. Il est admis que la peine de servitude pénale à perpétuité
remplit cette fonction éliminatrice. Par ailleurs, la peine de mort constitue celle
qui remplit par excellence la fonction éliminatrice car le juge n’a plus besoin de
voir le délinquant condamné amendé.

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Section 2. LES CARACTERES DE LA SANCTION PENALE

La peine est régie par quelques principes qui en déterminent les


caractères. Il s’agit de : la légalité, l’égalité, la personnalité et la dignité humaine

Paragraphe 1. LA LEGALITE « NORMATIVITE » ET L’EGALITE DE LA


SANCTION PENALE

Comme c’est le cas pour les infractions, aucune sanction pénale ne peut
être créée par une toute autre source que la norme pénale. Aussi, selon les
catégories, les sanctions pénales sont et doivent être d’application égale.

A. De la légalité « normativité ou textualité » des sanctions pénales

La légalité ou plus précisément la normativité des sanctions pénales


constitue le socle fondamental du droit pénal. Ce principe a vocation à régir a la
fois l’infraction mais également la répression.

Comme il a été affirmé précédemment, il ne peut y avoir d’infraction ni


de peines sans textes ou en dehors de la norme pénale. Il n’est donc pas
possible de prononcer à l’encontre d’un délinquant une sanction pénale qui n’a
pas été préalablement prévue par un texte.

Ce principe est une garantie contre l’arbitraire. Il assure le respect de la


démocratie. Le principe de légalité que nous avons appelé « normativité ou
textualité » est affirmé par l’article 8 de la DDHC puis dans l’article 17 de la
Constitution. Il a donc valeur constitutionnelle. Il doit s’appliquer à toutes les
sanctions ayant le caractère d’une punition ; il en est ainsi aussi de la sanction
disciplinaire.

Il a pour corolaire : la nécessité d’un texte pour une incrimination


pénale, la non rétroactivité de la loi pénale plus sévère, l’exigence d’un texte
clair et précis, et enfin l’interprétation stricte des normes.

La sanction pénale, entant qu’un mal ou une souffrance infligée au


délinquant, doit avoir sa source dans un texte ou une norme. En effet, le juge
ne pourra retenir qu’une sanction pénale prévue par la norme avant que
l’infraction fût commise. Le principe de la normativité ou de textualité des délits
est complété en droit pénal par la normativité ou textualité des sanctions
pénales. C’est ainsi qu’il est exprimé comme suit : « Nulla poena sine lege », ce
qui signifie : « pas de peine sans loi ».

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B. L’égalité de la peine

Ce principe exclu les privilèges, car on admet que toute personne est
égale devant la loi. Il s’agit d’un principe à valeur constitutionnelle. Pour le
juge, il ne saurait être question d’appliquer aux délinquants des peines
différentes non pas en tenant compte de l’étendue de la responsabilité pénale
de chacun par rapport à l’acte commis, mais en se basant plutôt à la différence
des classes sociales auxquelles ils appartiennent, de race, de religion ou tout
autre critère arbitraire de discrimination.

Paragraphe 2. LA PERSONNALITE ET LA DIGNITE DE LA SANCTION


PENALE

A. Le caractère personnel et individuel de la peine

La peine ne doit frapper que l’auteur même de l’infraction. Mais il faut


noter que dans l’histoire, la responsabilité pénale était collective. On pouvait à
cette époque répondre pénalement de l’acte commis par l’un des membres de
famille (ou la personne se trouvant à sa charge).

Quelques temps plus tard, la responsabilité pénale est devenue


personnelle. C’est ainsi que le temps de la vengeance privée a laissé place au
temps de la justice privée par des pratiques comme l’abandon noxal qui
consistait en un abandon de l’auteur de l’infraction auprès de la famille de la
victime qui pouvait en faire ce qu’elle voulait (en se rendant justice pour soi-
même sur la personne de l’auteur de l’infraction).

Ce principe s’impose également à la peine, c’est l’auteur de l’infraction


qui doit subir la peine prononcée. Toutefois, ce principe peut faire l’objet de
certains tempéraments, de façon exceptionnelle, le législateur peut décider
qu’une sanction puisse être mise à la charge d’une personne qui n’a pas été
déclarée. Il en est ainsi en droit français lorsque le législateur, dans le code du
travail permet aux juges dans certains cas, de mettre à la charge du chef
d’entreprise, les amendes prononcées contre un employé qui a commis une
infraction dans l’entreprise. Il en est ainsi également de l’article L 121-2 du
code français de la route qui permet de mettre à la charge du titulaire du
véhicule certaines contraventions, sauf à prouver que le véhicule était volé, ou
dénoncer l’auteur de l’infraction.

L’idée de la personnalisation de la peine est apparue avec l’évocation de


l’idée d’individualisation (Processus d’adaptation de la sanction pénale a
chaque délinquant en fonction de la gravité de son acte et de sa personnalité).

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Le caractère individuel de la peine suppose que lorsque l’infraction a été


commise par plusieurs personnes, le juge ne pourra prononcer que la peine
méritée par chacune d’entre ces personnes condamnées. Il ne peut donc pas
exister de responsabilité pénale pour une infraction commise par autrui. On ne
peut donc pour cela prononcer une peine contre l’héritier du coupable
condamné ou à condamner, ni même contre le civilement responsable en vertu
de l’article 260 CCL III.

C’est d’ailleurs ce caractère personnel qui fait que le droit pénal se


distingue du droit civil, étant donné que le droit civil admet très largement la
responsabilité du fait d’autrui, alors que le droit pénal reste très attaché au
principe de la responsabilité pénale du fait personnel.

L’individualisation fut de fait instituée par l’abandon de la fixité des


peines. L’individualisation de la sanction pénale ne fut conceptualisée qu’à la
fin du XIXième siècle par l’un des pères fondateurs SALEILLES Raymond (1865-
1912), jurisconsulte français qui était professeur à la Faculté de Droit de Paris
où il enseigna le Droit pénal, le Droit civil et le Droit civil comparé. Cet auteur
publia notamment "l'individualisation de la peine" en 1898, ouvrage réédité en
1908 et en 2001.

Il considère dans cet ouvrage que la loi écrite comprend des


dispositions rigides et que la souplesse du droit doit relever de
l'interprétation du juge judiciaire. Il défend, en précurseur, l'idée d'une
« peine adaptée à la nature de celui qu'elle va frapper »67.

Ces idées sont diffusées par l’école juridique de Marc ANCEL qui fut
l’élève de Saleilles. L’individualisation suppose une plus grande liberté du juge
dans le choix de la sanction pénale. Cette liberté, par le biais de ce principe,
n’est pas illimitée. La peine aujourd’hui doit être systématiquement adaptée à
la personne de l’auteur. C’est ainsi que la juridiction de jugement devra
prononcer les peines et fixer le régime en fonction de la gravité de l’infraction et
de la personne de son auteur.

67
. Oeuvres : L'individualisation de la peine. Étude de criminalité sociale, Paris, 1898. De la déclaration de volonté. Contribution
à l'étude de l'acte juridique dans le Code civil allemand, 1901. Bibliographie L'individualisation de la peine. De Saleilles à
aujourd'hui. Réédition de la troisième édition de l'ouvrage de Raymond Saleilles, suivie de : L'individualisation de la peine : cent
ans après Saleilles, Ed. Eres, coll. Criminologie et sciences de l'homme, 2001.
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Disons, comme en droit français (Le législateur du 12 déc. 2005) que


« La nature, le quantum et le régime des peines prononcées sont fixées de
manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du
condamnée et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser
l’insertion et la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de
nouvelles infractions ».

B. La garantie de la dignité humaine par la peine

La peine doit rester respectueuse de la dignité humaine. La déclaration


universelle des droits de l’homme dispose à son article 5 ce que renchérit le
législateur congolais dans la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée
le 20 janvier 2011, à l’article 16 « La personne humaine est sacrée. L’Etat a
l’obligation de la respecter et de la protéger. Toute personne a droit à la vie, à
l’intégrité physique ainsi qu’au libre développement de sa personnalité dans le
respect de la loi, de l’ordre public, du droit d’autrui et des bonnes moeurs.

Nul ne peut être tenu en esclavage ni dans une condition analogue. Nul ne
peut être soumis à un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Nul ne peut être
astreint à un travail forcé ou obligatoire ».

Ce sont les exigences de la dignité humaine qui ont milité pour


l’abolition des châtiments corporels tels que les coups de fouet, dans la plupart
de législations modernes mais aussi la peine de mort. Ils sont donc considérés
comme avilissants et constitutifs d’un retour inadmissible à la barbarie
ancienne.

En outre, la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment


nécessaires. Elle ne doit pas être inutile ni disproportionnée à la gravité portée
par l’infraction dans l’ordre social. C’est ainsi que la mesure de sûreté
appliquée devra être levée dès qu’elle n’est plus nécessaire.

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TITRE II. LES MESURES AFFECTANT LA SANCTION PENALE

Elles sont plusieurs :


- certaines font varier la sanction pénale soit en l’aggravant, soit
encore en l’atténuant, soit enfin en exemptant spécialement de la
répression ;
- d’autres entravent l’exécution de la sanction pénale, soit
partiellement, soit totalement ;
- il y en a même qui éteignent la sanction alors que d’autres
effacent enfin la condamnation.

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Chapitre 1. LES CIRCONSTANCES QUI FONT VARIER LA PEINE

Au moment où le juge a constaté l’existence de l’infraction dans tous ses


éléments objectifs et qu’il s’est assuré de l’identité de l’auteur et convaincu de la
culpabilité de ce dernier, il faut admettre qu’il n’est pas encore au bout de ses
peines.

En effet, le juge devra évaluer la peine à prononcer. Cette évaluation


tient ainsi compte de tout aspect ayant entouré la commission de l’infraction.

Il pourra ainsi recourir aux circonstances tant atténuantes (section 1)


qu’aggravantes (section 2) et aux excuses légales (section 3).

Section 1. LES CIRCONSTANCES ATTENUANTES

Lorsque le juge considère qu’il y a des raisons évidentes pouvant


avaliser l’atténuation de la peine, il lui est accordé le pouvoir de le faire, ainsi
qu’il a été analysé précédemment. C’est ainsi qu’il retiendra dans ce cas les
circonstances atténuantes.

Paragraphe 1. Notions

Elles consistent en certains aspects qui caractérisent l’infraction et dont


le juge prend compte en vue d’atténuer la peine prévue par la loi dans le cas et
la mesure fixée par la loi.

A la différence des autres causes de variation de la peine telles que la


récidive, les excuses, le concours des infractions, les circonstances
aggravantes…, les circonstances atténuantes sont l’occasion d’une étroite
collaboration entre le législateur et le juge pénal. Dans le but de munir le juge
d’un instrument répressif plus souple, le législateur détermine le maximum de
la peine ainsi que même le minimum. Cependant, le juge peut aller au-dessus
du minimum légal, mais il ne peut condamner à la servitude pénale de moins
d’un jour, c’est-à-dire, qu’il prononcera aux moins la servitude pénale d’un jour
lorsqu’il condamne en dessous du minimum légal (les articles 18 et 19 du code
pénal livre 1).

Il faut dire par contre que le juge ne peut aller au-delà du maximum, car
il aura cette fois-là aggravé la peine, ce qui rentre dans le domaine des
attributions du législateur seul.

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Le code pénal congolais prévoit comment les circonstances atténuantes


sont-elles admissibles et leurs conséquences possibles sur la peine. Le juge ne
peut donc pas, pour des raisons d’équité ou pour satisfaire un quelconque
sentiment de justice personnel, appliquer des peines autres que celles dont le
seuil est vu par la loi. Alors qu’en Belgique, le juge peut appliquer les peines
prévues pour les délits lorsque la loi punit une infraction d’une peine de
servitude pénale supérieure à 5 ans ; en droit congolais, par contre, le juge, en
cas de circonstances atténuantes, peut descendre jusqu’à un jour (24 h) sans
pour autant condamner à moins de 24 heures.

L’article 18 du code pénal ordinaire livre 1er dispose : « s’il existe des
circonstances atténuantes, la peine de mort pourra être remplacée par la
servitude pénale à perpétuité ou par une servitude pénale dont le juge
déterminera la durée. Les peines de servitude pénale et d’amende pourront être
réduite dans la mesure déterminée par le juge ». Le juge apprécie donc les
éléments de fait d’une façon absolue. La loi ne définit donc pas et n’énumère
pas ce qu’elle entend par « circonstances atténuantes » en vertu de
l’inimaginable variété des faits criminels. Le juge est mandaté par le législateur
pour effectivement apprécier et évaluer les circonstances atténuantes.

Il peut se faire qu’elles puissent exister dans le fait lui-même. C’est le


cas d’un agent qui vole mais qui, quelque temps après revient remettre l’objet
volé. Il y a déjà eu vol (par principe de la cristallisation de la qualification).
Lorsqu’on nous attrape, le juge pourra évoquer cette remise comme une
circonstance atténuante. Les moyens employés pour commettre une infraction
lorsqu’un monsieur A veut tuer B mais qu’il lui administre la quantité du
poison assez moindre et inefficace.

Le peu de gravité de dommage. La gravité du trouble social :


Lorsqu’on estime que ce trouble est grave et que le juge constate que le trouble
est minime. C’est à lui seul que revient ce pouvoir d’appréciation. Il allouera
ainsi des circonstances atténuantes. Il y a un rôle social très important dans
les circonstances atténuantes, car leur introduction a déterminé un énorme
progrès vers l’individualisation de la peine.

Les circonstances atténuantes constituent donc l’un des instruments les


plus souples dont dispose le système répressif pour individualiser la peine.
Elles permettent aussi à la conscience collective de faire évoluer la justice
pénale selon les exigences changeantes.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. Les caractéristiques des circonstances atténuantes

Les circonstances atténuantes sont facultatives, c’est-à-dire que le juge


est libre à les trouver (retenir) là où il estime qu’elles sont. Les circonstances
atténuantes sont personnelles, c’est-à-dire que même si elles sont tirées des
faits, le juge peut les appliquer à certains agents et pas aux autres. Les
circonstances atténuantes sont judiciaires, c’est-à-dire que la loi ne les
énumère pas. Il appartient au juge seule autorité compétente, de les évaluer
avant de les retenir.

Section 2. LES CIRCONSTANCES AGGRAVANTES

Ce sont des faits définis par la loi, affectant accidentellement une


infraction et que le législateur examine en vue d’aggraver la peine prévue
par l’infraction simple, parce qu’elles font preuve de perversité ou en
raison de la gravité qu’elles confèrent à l’acte.

Lorsque le juge se rend compte de leur existence au cours du traitement


d’un dossier, il doit s’y conformer en les retenant et en prononçant la sanction
pénale ainsi aggravée. Ceci justifie le fait selon lequel, les circonstances
aggravantes étant la volonté expresse du législateur, ne peuvent être modifiées
par le juge. Elles s’imposent, car non seulement qu’elles sont légales mais aussi
et surtout parce qu’elles sont obligatoires.

Elles ont donc des caractéristiques différentes et peuvent ainsi faire


l’objet d’une classification ou d’une catégorisation spécifique pour enfin
produire des effets particuliers.

Paragraphe 1. Les caractéristiques des circonstances aggravantes

Les circonstances aggravantes ont plusieurs caractéristiques. Elles sont


accidentelles, légales et occasionnent un renforcement de la répression.

A. L’aspect accidentel des circonstances aggravantes

Les circonstances aggravantes peuvent porter sur :


- les moyens utilisés ;
- la personnalité de l’auteur ;
- la perpétration perverse ;
- le mobile ;
- la conséquence pour la victime ;
- la facilité dans la possibilité d’échapper à la répression.

191 | P a g e
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C’est le cas du vol avec l’effraction ou escalade, le vol d’un fonctionnaire


(appelé détournement), vol avec violences ou menaces.

B. légalité (normativité ou textualité) des circonstances aggravantes

Les circonstances aggravantes sont toujours prévues par la norme. Elles


doivent donc être préétablies (dans la norme) par le législateur pour que le juge
puisse les appliquer. Il ne revient pas au juge de les ériger. Il n’a donc pas ce
pouvoir. Puisqu’elles sont légales, la conséquence de cette caractéristique est
que le juge n’a pas la faculté de les appliquer mais une obligation. C’est que, le
juge sera tenu de les appliquer de manière obligatoire.

C. Du renforcement de la répression

Les circonstances aggravantes occasionnent un renforcement de la


répression. Ce renforcement doit être légal. L’aggravation de la répression est en
principe obligatoire. Mais, les circonstances aggravantes peuvent constituer
d’une façon autonome une autre infraction.

C’est le cas des violences et menaces qui accompagnent le vol qui sont
des causes d’aggravation de la peine dans l’infraction de vol. Alors que les
violences seules constituent déjà une autre forme d’infraction (coups et
blessures).

Une circonstance aggravante dont le rapprochement laisse subsister


dans les faits qu’elle définit, le caractère infractionnel, n’est pas nécessairement
le cas. C’est ainsi que la simple injure ne devient pas l’infraction de calomnie,
car la simple injure, de par la volonté du législateur est une infraction moindre
que celle de la diffamation, laquelle n’est pas une injure simple, mais aggravée
par des circonstances.

La circonstance aggravante change le taux de la peine à infliger au


délinquant. On l’appelle circonstance aggravante parce qu’en réalité, elle doit
aggraver la peine.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. Classification et effets des circonstances aggravantes

Traitons d’abord de la classification avant l’examen des effets des


circonstances aggravantes.

A. La classification des circonstances aggravantes

Elles peuvent être générales ou spéciales, réelles ou personnelles, tirées


du résultat ou de l’action.

1. Les circonstances aggravantes générales ou spécialisées

La majorité des circonstances aggravantes concernent une infraction


déterminée. C’est ainsi que la qualité d’un descendant qualifie de parricide le
meurtre du père ou de la mère. Cela constitue une circonstance aggravante
générale ou spéciale.

L’escalade ou l’effraction sont des circonstances aggravantes spéciales


ou générales du vol. La préméditation constitue une circonstance aggravante
spéciale de l’assassinat. Il faut dire que lorsqu’une circonstance se rapporte à
une catégorie de personnes, on l’a qualifie de générale ou spéciale.

L’esprit du lucre est une circonstance aggravante de presque toute


infraction contre la sûreté extérieure d’un Etat et la qualité de fonctionnaire ou
d’officier public pour une série d’infractions constitue une circonstance
aggravante. C’est le cas de détournement.

2. Les circonstances aggravantes réelles et personnelles

Les circonstances réelles sont des faits extérieurs qui ont accompagné la
commission de l’infraction. C’est le cas de l’escalade et l’effraction qui sont des
circonstances extérieures à la commission de l’infraction. Elles se rattachent
donc à l’activité criminelle ou à la modalité de la perpétration (de l’opération) de
l’infraction.

Les circonstances personnelles se rapportent, en effet, plutôt à la qualité


de l’agent ou à un élément psychologique.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

B. Les circonstances aggravantes affectant l’acte ou le résultat

Généralement, la circonstance aggravante est tirée de la gravité de l’acte


qui est révélateur de la pensée criminelle. C’est ainsi que l’allusion est faite
souvent à l’élément moral de l’infraction, du mobile qui aurait poussé l’agent à
agir ou même à l’élément matériel de l’infraction.

Ces circonstances affectent donc l’acte et même le résultat de


l’infraction.

Paragraphe 3. Les effets des circonstances aggravantes

Les effets des circonstances aggravantes sont :


- Elles occasionnent un changement de qualification juridique de
l’infraction originaire. Lorsqu’un délinquant est poursuivi pour vol
simple et que l’on se soit rendu compte qu’il y a eu escalade ou
effraction, le juge pourra le condamner pour vol qualifié (art. 81,
alinéa 1) et non vol simple (art. 79 du code pénal, al. 2).
- Elles déterminent la transformation du caractère de l’infraction.
Dans les pays où la classification tripartite d’infractions est
consacrée, cette transformation du caractère se remarque assez
facilement. C’est ainsi qu’une contravention peut devenir un crime
ou un délit peut devenir une contravention.

Section 3. LES CAUSES D’EXCUSE LEGALE

L’article 78 du code pénal belge dispose : Ni le crime ou délit ne peut être


excusé si ce n’est que dans le cas déterminé par la loi ».

L’index alphabétique du code pénal belge ne contient aucune mention


sur l’excuse ni dans l’ouvrage de MINEUR.

Paragraphe 1. Définition

Selon la doctrine, l’excuse est un fait d’une circonstance définie par la


loi qui laisse subsister l’infraction, mais qui a pour conséquence soit une
diminution soit une exemption de la peine. Ce qui suppose que l’infraction reste
établie.

Les excuses peuvent être donc absolutoires ou péremptoires. Elles


entraînent de ce fait l’exemption de la peine. Dans certaines législations, on les
appelle exemptions spéciales de répression.

194 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Il y a aussi des excuses atténuantes qui sont traitées sous le vocable


« causes d’excuse » par d’autres auteurs.

Paragraphe 2. Caractéristiques

Les caractéristiques des causes d’excuse résultent de la définition et


sont au nombre de 4 :

- Elle est légale : Le principe de la légalité stipule qu’on ne peut ni


proposer ni reconnaître d’excuses qui ne sont pas contenues dans
un texte de loi. C’est le cas de l’excuse de provocation qui ne sera
applicable qu’à l’auteur d’un homicide. L’excuse absolutoire ou
péremptoire dans le cas de vol entre membres de famille en droit
français.
- Elle est obligatoire : Même si moralement le juge hésite à
appliquer l’excuse, la légalité de l’excuse s’impose à lui. C’est ainsi
que même si les dénonciations l’ont été suite à un mobile
blâmable, tel que la vengeance, la cupidité, l’égoïsme, la peur, …
le dénonciateur bénéficiera de l’excuse si les conditions prévues
par la loi sont réunies (art. 164, al. 2 et l’art. 218, al. 1er du code
pénal livre 1er).
- Elle laisse subsister le caractère délictuel et n’enlève pas à
l’acte sa qualité d’infraction. C’est à ce titre que les excuses se
rapprochent des circonstances atténuantes.
- L’excuse diminue la peine et la portée de l’excuse diffère d’un
texte à l’autre.

La criminalité des actes poursuivis demeure mais la répression sera


atténuée pour des raisons de politique criminelle, d’utilité sociale ou
d’opportunité.

A. Excuses absolutoires

Il y en a plusieurs. Citons pour cela 3 :


- la parenté ou l’alliance ;
- la dénonciation, et
- la soumission.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

1° La parenté ou l’alliance (art. 54 al.2 du code pénal militaire)

Elle est une excuse absolutoire. Ici, l’infraction consiste dans l’aide
apportée au criminel pour empêcher l’œuvre de la justice. Il faut dire que, les
parents ou alliés peuvent cacher leur fils mais pas une bande criminelle dont
fait partie leur fils.

Aussi, lorsque les parents sont chargés de la garde d’un détenu, ils ne
seront pas excusés s’ils le font évader. Le vol ou le détournement opéré par un
fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions ne sera impuni du fait que la
victime est sa femme.

2° La dénonciation (art. 184 du code pénal militaire ; art. 150 i du


code pénal ordinaire)

Elle est une cause d’excuse pour plusieurs infractions. La dénonciation


est donc un fait postérieur à l’infraction, mais qui peut valoir excuse lorsqu’elle
est faite à temps et dans les conditions requises par la loi.

La dénonciation doit être faite avant toute poursuite si elle est faite
pendant l’instruction préjuridictionnelle, elle ne devient qu’un AVEU. La
dénonciation doit être faite à l’autorité administrative ou judiciaire. Elle doit
être sincère et complète.

Le dénonciateur ne doit pas dénoncer qu’une partie de l’infraction en


cachant l’autre.

3° La soumission (art. 134 et 278 du code pénal belge et l’art. 205


du code pénal ordinaire congolais)

La participation à une bande séditieuse ou la participation à un


attroupement des rebelles oblige pour bénéficier de l’excuse, à ce que l’on se
soumette volontairement et immédiatement au premier avertissement.

On excuse les participants simples qui n’ont ni commandement, ni


fonction, ni emploi dans la bande. Si, l’intervention de la force publique a été
nécessaire, il n’y a plus soumission mais domination ; d’où, il n’y aura plus
excuse.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

B. Excuses atténuantes

A la différence des excuses absolutoires qui se rapportent à des faits


étrangers ou éléments de l’infraction, les excuses atténuantes sont dictées par
les impératifs de la politique criminelle. C’est qu’elles peuvent atténuer la peine
sans faire disparaître la responsabilité pénale.

Alors que les circonstances atténuantes sont facultatives et judiciaires ;


les excuses atténuantes par contre sont légales et obligatoires, mais produisent
les mêmes effets sur la sanction pénale que les premières.

Les causes d’excuse atténuantes ont comme caractère :


- Elles sont spécifiques et générales : Ces causes d’excuses
atténuantes se rapportent soit à une infraction déterminée soit à
un groupe d’infraction déterminée. C’est ainsi que l’excuse de
provocation par exemple n’est valable que pour les crimes de
sang. Il faut dire que la seule cause d’excuse atténuante générale
c’est la MINORITE.
- Elles ont un caractère personnel ou réel : c’est-à-dire que si
l’excuse porte sur une diminution de la responsabilité de l’agent,
elle est dite personnelle.

C. La provocation

C’est un fait qui a suscité chez un individu un sentiment de colère ou de


crainte et qui l’a poussé à commettre une infraction par réaction spontanée
contre les faits. Le législateur reconnaît à l’auteur de l’infraction, une faiblesse
humaine pourtant justifiée par le code.

Elle est spéciale au crime de sang. L’excuse de provocation est


personnelle parce qu’elle est collée sur un état psychologique particulier de
l’agent et ne saurait servir d’excuse aux autres participants. Elle doit être
constituée de violences.

Elles sont généralement physiques ou corporelles.

Les violences doivent être graves. C’est ainsi que la colère et même la
crainte doivent être sérieusement fondées et l’intensité de la violence devra être
appréciée objectivement et raisonnablement par le juge.

Les violences doivent être illégitimes. Elles doivent avoir été exercées
contre les personnes, car il serait illégal d’être provoqué par les animaux ou
autres objets.

197 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

1. La violation de domicile

La violation nocturne crée une présomption de légitime défense en


conséquence la violation ne donne foi qu’à une excuse de provocation pour les
coups et blessures ou homicide causés en repoussant cette violence.

2. Le flagrant délit d’adultère

Ici, le législateur permet de réprimer l’infidélité d’un conjoint par celui


qui n’a plus de libertés d’esprit et sans froid nécessaire, afin que le mari
(conjoint) offensé puisse résister à l’impétuosité de ressentiment ou de
l’indignation. Dans ce cas, cette excuse est accordée à la femme ou un mari
même quand ils sont séparés de corps. L’excuse est même possible quand
l’époux qui est lui-même infidèle, vient d’être provoqué par le flagrant délit
d’adultère de son conjoint.

En ce qui concerne la condition générale de l’admissibilité de l’excuse de


provocation, on doit dire que l’infraction doit être commise au moment du fait
provocateur, c’est-à-dire immédiatement. Au cas contraire, il n’y aura pas
d’excuse de provocation.

198 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre 2. LES CAUSES DE SUSPENSION DE LA PEINE

En vue de réaliser la politique criminelle, le législateur a prévu des


institutions dont le but est de permettre une exécution des peines plus
individualisée et mieux orientée vers l’amendement et la resocialisation du
délinquant.

Ainsi, rencontre-t-on dans la législation congolaise d’un côté la


libération conditionnelle et de l’autre la condamnation conditionnelle.

Section 1. DE LA LIBERATION CONDITIONNELLE

La libération conditionnelle constitue l’institution à travers laquelle un


condamné à une peine privative de liberté peut être mis en liberté par arrêté
soit du ministre de la justice68 lorsque le bénéficiaire avait été condamné par
une juridiction répressive de droit commun ou spécialisée (de l’ordre judiciaire
ou de la cour constitutionnelle) sauf celle militaire, soit celui du ministre de la
défense69 lorsqu’il s’agit d’une décision rendue par une juridiction militaire,
après avoir rempli certains préalables.

Le condamné doit avoir accompli le quart de la peine, pourvue que la


durée de l’incarcération déjà subie dépasse trois mois. En ce qui concerne le
condamné à la servitude pénale à perpétuité, il pourra bénéficier de cette
libération, lorsque la durée de l’incarcération déjà subie par lui dépasse cinq
ans.

Il faut, par ailleurs, ajouter que pour cause d’inconduite ou d’infraction


aux conditions énoncées dans l’acte de libération (Art. 36 C.P.L. 1), il peut
s’ensuivre la révocation de la mise en liberté. L’article 16 du code pénal
militaire considère que la révocation de la libération conditionnelle peut être
prononcée en cas de punition grave, d’inconduite notoire, de nouvelles
condamnations encourues avant la libération définitive ou en cas d’inexécution
des obligations imposées au bénéficiaire de ladite libération conditionnelle.

Lorsque la révocation n’est pas intervenue avant l’expiration d’un délai


égal au double du terme d’incarcération que celui-ci avait encore à subir à la
date à laquelle la mise en liberté a été ordonnée en sa faveur, la libération
définitive sera acquise.

68
. Articles 35-41 du décret du 30/01/1940 portant Code pénal congolais tel que modifié et complété à ce jour.
69
. Articles 12-19 de la loi n°024/2002 du 18/11/ 2002 portant Code pénal militaire congolais.
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Section 2. LA CONDAMNATION AVEC SURSIS (CONDITIONNELLE)

En réalité, il ne s’agit pas d’une condamnation conditionnelle, mais de


l’exécution conditionnelle de la décision de justice. Il aurait été plus juste de
parler en effet plutôt de l’exécution conditionnelle en lieu et place de
l’expression actuellement utilisée par le législateur.

Lorsqu’elle décide de la condamnation soit à l’emprisonnement, soit à la


servitude pénale, la juridiction y statuant peut décider également par une
décision motivée qu’il sera sursis à l’exécution pendant un certain délai à partir
de la date du prononcé de la décision sans que cette date ne puisse excéder 5
ans.

Pour bénéficier du sursis à exécuter la peine, il faut remplir les


conditions suivantes :
- il ne doit pas être prononcé contre le condamné une peine de
servitude pénale principale supérieure à un an ;
- le condamné ne doit pas avoir antérieurement encouru de
condamnation à la servitude pénale principale, du chef
d’infraction commise dans la République, punissable,
indépendamment de l’amende, d’une servitude pénale de plus de
deux mois (Art 42 CP).

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre 3. LES CAUSES D’EXTINCTION DE LA PEINE

En droit pénal congolais, les peines peuvent disparaître soit parce


qu’elles ont été exécutées, soit parce que le condamné est décédé, soit encore
parce qu’il y a des raisons légales qui s’opposent à son exécution telles que la
prescription et la grâce.

Section 1. L’EXECUTION DE LA PEINE

Elle constitue le mode normal d’extinction de la peine. Mais, il convient


d’ajouter que le décès du condamné éteint également la peine.

Section 2. LA PRESCRIPTION

Le droit pénal congolais connaît deux sortes de prescription : celle de


l’action publique et celle de la peine.

La prescription de l’action publique consiste en ce que ladite action


s’éteigne si après l’écoulement d’un certain délai, les poursuites n’ont pu être
exercées (Art. 24 du Code pénal livre 1). La prescription de la peine consiste
dans le fait pour le délinquant d’échapper aux effets de la condamnation si
celle-ci après l’écoulement d’un certain délai n’a toujours pas été exécutée. A
titre illustratif, on peut prendre le cas d’un monsieur X qui est condamné à 2
ans de servitude pénale et qu’après il réussit à s’enfuir à l’étranger pendant 5
ans, à son retour, il ne sera plus emprisonné.

Notions. La prescription désigne une durée au-delà de laquelle des


poursuites pénales pour une infraction ne sont plus possibles. Elle est
entendue comme un mode d’extinction de l’action publique résultant du non-
exercice de celle-ci avant l’expiration du délai fixé par la loi, dont la survenance
résulte du seul écoulement du temps. On considère qu’il s’agit d’une
irrecevabilité à agir pour le titulaire d’un droit s’il est resté trop longtemps
inactif. En effet, lorsque l’organe chargé d’assurer des poursuites au sein d’une
société omet de le faire dans les délais fixés par la loi (viole ainsi son obligation
professionnelle), l’action publique est prescrite de sorte que l’infraction restera
impunie et donc son auteur non poursuivi70.

70
. Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, pp 486-489.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Si ce premier type de prescription rend caduque toute poursuite, il


existe un autre type qui entraîne l’impossibilité de faire subir sa peine à un
individu ayant été condamné mais pour lequel la sanction n’a pas été mise à
exécution. En effet, l’écoulement d’un certain délai depuis la commission d’une
infraction constitue un obstacle majeur à l’exercice de l’action publique et à
l’exécution de la sanction pénale. Sans toucher le caractère délictueux du
comportement infractionnel, la prescription se contente d’éteindre simplement
l’action publique ou l’exécution de la sanction pénale.

Cette pratique varie selon les systèmes juridiques des Etats. Il faut noter
que les pays de Common law ne connaissent généralement pas la prescription,
alors qu’elle est une pratique assez courante dans les pays du système Romano-
germanique qu’on appelle droit civil71.

Incidence en matière des crimes internationaux. Alors que non


admis dans certains droits, il arrive en tout cas que d’autres la prévoient dans
leurs droits internes. La décriant en matière de crimes internationaux, Pierre
Mertens écrivait :
« On ne conçoit pas d’application de la ‘‘loi de l’oubli’’ pour des crimes qui
ont été perpétrés contre la communauté des Nations et l’humanité en tant
que telle. Ces crimes sont imprescriptibles par nature. Si, pour des raisons
techniques, ces crimes ne peuvent, dans l’état actuel de l’évolution du
droit positif, n’être réprimés que sur le plan interne, ce doit être en
conformité avec le droit international et en reconnaissant à celui-ci la
primauté qui lui est due »72.

Mais, souverainement et pour empêcher l’établissement de la


responsabilité pénale d’une personne protégée par un régime politique en place,
les Etats peuvent l’organiser également pour les appliquer aux violations
internationales du droit international humanitaire. Dans le cas où la
prescription est ainsi organisée par l’Etat sur le territoire duquel se trouve le
présumé auteur des faits, il sera véritablement difficile à tout autre Etat de
poursuivre ladite personne.

71
. « Répression nationale des violations du droit international humanitaire : prescription », in Document de la Croix Rouge, 1999,
http://www.circ.org.
72
. Pierre Mertens, L’imprescriptibilité des crimes de guerre et contre l’humanité, éd. de l’Université de Bruxelles, 1974, p. 226.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Non seulement qu’il sera moins aisé d’appréhender le suspect et de


rassembler les éléments de preuve ; mais aussi, la personne sur laquelle pèsent
des charges infractionnelles peut bien s’en prévaloir devant les organes de
justice, une fois interpellée, bien qu’avec peu de chance d’être entendue. Ceci
est différent du statut des specials Panels timorais qui offre un soutien sans
faille au régime international en prévoyant expressément l’imprescriptibilité de
tous les crimes internationaux entrant dans sa compétence, tout en écartant
les crimes de droit commun73.

Fondement de la prescription. D’abord, elle a sa source dans l’oubli


généré par le temps qui passe. La prescription intègre ainsi l’effet corrosif du
temps sur la mémoire collective en prenant en compte les effets néfastes, «
contre-productifs », d’une répression à retardement par rapport à la fiabilité des
preuves et au risque de troubler l’équilibre social rétabli par la réinsertion des
anciens délinquants. Il devient donc pratiquement inutile de raviver le souvenir
d’une infraction tombée dans l’oubli74.

Ensuite, la crainte et le remords qui ont accompagné le coupable durant


toute la longue période d’évitement des poursuites suffisent à titre de sanction.
Enfin, des poursuites trop tardives démontreraient la négligence mais aussi
l’impuissance de l’appareil judiciaire à agir en temps normal et inquiéteraient
en conséquence le public75.

73
. David Boyle, « L’apport des tribunaux pénaux internationalisés quant au régime du crime », pp. 95-143, in Ascensio (Hervé),
Lambert-Abdelgawad (Elisabeth), Sorel (Jean-Marc) (sous la direction de), Les juridictions pénales internationalisées
(Cambodge, Kosovo, Sierra Leone, Timor Leste), Paris : Société de législation comparée, 2006, 383 p., collection Unité mixte de
recherche de droit comparé de Paris (Université de Paris I/CNRS UMR 8103), vol. 11, p. 131
74
. A. Mihman, Comment réformer la prescription de l’action publique, R.P.D.P., 2007, p. 527, cité par Jean-Pradel dans
Procédure pénale, Paris, édition Cujas, 15ième éd., 31 juillet 2010, p. 183.
75
. Contrairement à ces arguments en faveur de la prescription, il est aussi soutenu d’une part, que l’idée d’une expiation résul tant
de l’angoisse imposé au délinquant par l’écoulement du temps ressort d’un romantisme juridique infirmé par les données de la
psychologie judiciaire, chaque délinquant réagissant à sa manière, le temps n’étant pas le même pour tous. Aussi, l’idée de
négligence est-elle dangereuse pour le coupable plaidant la prescription puisqu’il lui sera très malaisé de prouver la date à laquelle
le Ministère public a eu connaissance de l’infraction. D’autre part, la prescription est pernicieuse à différents égards : elle nuit à la
protection de la société en profitant aussi bien aux grands malfaiteurs qu’aux petits délinquants, alors que le temps ne saurait
atténuer les dangers des premiers. Elle exclut toute mesures de traitement pour certains coupables qui en auraient pourtant besoin ;
il n’est pas moins nécessaire de les traiter parce que leur faute n’a été révélée que tardivement. C’est pourquoi, l’application de la
prescription dépend de chaque société (les droits de la common law l’ignorent, sauf pour les très petites infractions). Pradel
affirme, et c’est vrai, que c’est pour cette raison que le droit français confère à la prescription un régime empreint d’une certaine
défaveur à l’égard du délinquant (Voir Procédure pénale, op. cit., p. 184). Mais, nous constatons de nos jours, que le régime de la
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Cours de Droit Pénal Général 2013

La prescription constituerait ainsi la sanction de cette négligence d’une


partie poursuivante qui, au terme d’un certain délai, perd son droit d’agir76.

En éteignant l’action publique (et par voie de conséquence l’action


civile), la prescription entrave l’établissement de la responsabilité pénale du
présumé auteur et tous ses présumés co-participants dans la commission de
l’infraction. Sur le plan processuel, elle est une exception péremptoire et d’ordre
public77. C’est ainsi que d’abord, le délinquant ne peut y renoncer et demander
à être jugé. Ensuite, le moyen tiré de la prescription doit être invoqué d’office
par le juge si le prévenu ne s’en prévaut pas78. Enfin, il peut être invoqué à
toute hauteur de la procédure, en appel et même pour la première fois devant la
Cour de cassation ou devant la juridiction de renvoi79.

Quant à la prescription de la peine, elle peut s’entendre comme


l’extinction de la peine restée inexécutée en tout ou partie, par l’effet de
l’écoulement d’un certain délai depuis la décision de condamnation80.

Il en existe de deux termes :


- les termes de la prescription de l’action publique ; et
- les termes de la prescription de la peine.

prescription dont bénéficie le criminel de guerre en droit français parait de loin favorable que celui de l’imprescriptibilité organisé
par le droit congolais mais également dans le statut de la CPI. A cet effet, une fois poursuivi pour crime de guerre, il y a
possibilité de plaider la prescription après un temps. Ainsi, tout délinquant poursuivi en France pour crime de guerre a la
possibilité de plaider la prescription et de choisir la loi la plus favorable entre le statut de la CPI et la législation pén ale française.
La CPI se saisira-t-elle des faits déclarés prescrits par la justice française ?
76
. Serge Guinchard et Jacques Buisson, op.cit., p. 666, cité par Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime
de guerre. Etude comparée des droits français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille
Université, France, 2012, op cit.
77
. Crim., 6 mai 2003, B.C., n° 52.
78
. Crim., 20 mai 1980, B.C., n° 156, R.S.C., 1980.459, obs. J.-M. Robert.
79
. Crim., 5 novembre 1970, B.C., n° 291, R.S.C., 1971.90, obs. J.-M. Robert.
80
. Frédéric Desportes et Francis Le Gunehec, Droit pénal général, 12 ième éd., Economica, Paris, 15 septembre 2005, p. 1024.

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Paragraphe 1. Les termes de la prescription de l’action publique

Il existe trois termes de prescription de l’action publique (article 24 du


code pénal) :
- la prescription annale : les infractions qui ne sont punissables que
d'une peine d'amende, ou dont le maximum de la servitude pénale
applicable ne dépasse pas une année se prescrivent après un an
révolu ;
- la prescription triennale : les infractions punissables d’une peine
de servitude pénale ne dépassant pas cinq années se prescrivent
après trois ans révolus ;

- la prescription décennale : les infractions pouvant entrainer plus


de cinq ans de servitude pénale ou la peine de mort se prescrivent
après dix ans.

Comme enseigné en procédure pénale, ces délais de la prescription


commenceront à courir du jour où l'infraction a été commise. Cependant, il
peut être interrompu par des actes d'instruction ou de poursuite faits dans les
délais de un, ou trois, ou dix ans, à compter du jour où l'infraction a été
commise. Le jour où l'infraction a été commise est compris dans le délai de la
prescription.

Paragraphe 2. Les termes de la prescription de la peine

Cette prescription constitue une faveur faite à la personne condamnée


qui n’aura pas subi sa peine pendant une certaine période. En principe, d’une
part, elle court à partir de la date du jugement rendu en dernier ressort ou à
compter du jour où le jugement rendu en première instance ne pourra plus être
attaqué par la voie de l'appel ; et d’autre part, elle se rapport tantôt au type de
sanction, tantôt à la situation du condamnée.

A. La prescription de la peine se rapportant au type de sanction :

En matière d’amende, il convient de retenir qu’il y a deux termes qui


sont prévus : la peine de moins de cinq cents francs se prescrira par deux ans
révolus ; tandis que la peine de cinq cents francs et plus se prescrira par
quatre ans révolus.

L’article 31 du code pénal ordinaire soumet le délai de prescription de la


peine de confiscation spéciale au même délai que celui de la peine dont elle est
l’accessoire.

205 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En matière de servitude pénale, deux termes sont également prévus : la


peine de dix ans ou moins se prescrit par un délai double de la peine
prononcée, sans que le délai puisse être inférieur à deux années. Lorsqu’elle est
de plus de dix ans, elle se prescrit par vingt ans et en cas de perpétuité, le délai
de prescription sera fixé à vingt-cinq ans.

B. La prescription de la peine se rapportant à la situation du


condamné

En cas d’évasion d’un condamné qui subissait sa peine, la prescription


de la peine commencera à courir le jour même de l’évasion et ne s’interrompra
qu’au jour de son arrestation.

Section 3. LA GRACE81

Paragraphe 1. Notion

Elle est une mesure de clémence que le président de la République


prend en faveur d’un délinquant définitivement condamné et qui a pour effet de
le soustraire à l’application d’une partie ou de la totalité de la peine.

Instrument de politique criminelle. De manière discrétionnaire, le


président de la République décide d’accorder la grâce à une ou plusieurs
personnes pourtant, définitivement condamnées82. Elle est plus généralement
l’espoir entretenu chez les condamnés et un motif de bonne conduite. La grâce
peut être accordée à un condamné sérieusement malade ou dont la conduite a
été particulièrement exemplaire. Elle peut bénéficier aussi à une personne en
vue d’atténuer une peine d’une rigueur manifestement excessive ou réparer une
erreur judiciaire.

81
. Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, op cit.
82
. En France, on peut évoquer un certain nombre de cas, notamment : la grâce présidentielle accordée à Alfred Dreyfus, par le
président Émile Loubet le 19 septembre 1899. Paul Touvier fut condamné à mort et a bénéficié de la grâce du président Georges
Pompidou le 23 novembre 1971. Omar Raddad était condamné en 1994 pour meurtre, mais, depuis 1998, il a obtenu la grâce
présidentielle. Maxime Gremetz, député communiste de la Somme, a bénéficié d'une grâce individuelle en 2002, lui permettant de
retrouver son siège de parlementaire. Jean-Charles Marchiani, ancien préfet du Var condamné en 2007 à trois ans de prison pour
corruption et incarcéré en 2008, a bénéficié d'une grâce partielle la même année ; quant bien même que cette décision fut
contestée, car à l'inverse des 26 autres grâces décidées le même jour, la sienne n'a pas été formulée sur proposition des services du
ministère de la Justice pour comportement méritant.

206 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. Autorité compétente

La grâce est une faveur accordée de manière discrétionnaire par


laquelle, le président de la République peut dispenser un condamné d’exécuter
tout ou partie de sa peine ou substituer une peine moins forte à la peine qui lui
a été infligée. En principe, dans tous les pays, elle procède du pouvoir régalien
exercé par le chef suprême du pouvoir exécutif.

Sous l’ancien régime français, cette prérogative relevait de l’ordre des


choses, car le roi était alors : « source de justice ».

Dans un régime républicain, fondé sur la séparation des pouvoirs, elle


est plus surprenante. C’est ce qui entraina sa suppression en 1791. Compte
tenu du système des peines fixes alors en vigueur, le droit de grâce du
souverain apparaissait d’ailleurs moins comme un empiétement sur le pouvoir
judiciaire que comme une atteinte à l’autorité des lois, certainement beaucoup
moins tolérable aux yeux des hommes de la Révolution. Elle fut tout de même
rétablie sous le consulat par un sénatus-consulte du 16 thermidor an X et n’a
pas connu d’éclipse depuis lors. Ainsi, l’article 17 de la Constitution française
du 4 octobre 1958 dispose que « Le Président de la République a le droit de faire
grâce ». On a finalement estimé qu’il est difficile de se passer d’une institution
qui permet d’assurer à l’ensemble du système pénal une indispensable
souplesse83.

En droit congolais, la constitution en vigueur dispose que le Président


de la République exerce le droit de grâce. Il peut remettre, commuer ou réduire
les peines84. C’est justement sur base de cette disposition qu’il prend
discrétionnairement ses ordonnances de grâce, de commutation mais parfois
aussi de réduction de peine85. Relevons néanmoins que la Constitution du 18
février 2006 ne reconnait plus au président de la RDC la qualité de magistrat
suprême.
83
. Frédéric Desportes et Francis Le Gunehec, Droit pénal général, 12ième éd., Economica, Paris, 15 septembre 2005, pp. 1027-
1028.
84
. Article 87 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la Loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de
certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo.
85
. Le 16 mai 2004, un décret n° 04/40 portant mesure collective de grâce a été pris par le président congolais ; un autre décret fut
signé au n° 10/080 en date du 31 décembre 2010.

207 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Car, en effet, bien avant ce texte, le président de la République nommait


et révoquait les magistrats et accordait sa grâce en se fondant sur cette qualité.
De nos jours, le président de la RDC a perdu cette qualité mais dans la
pratique, il conserve ses attributions. Il continue tout de même à nommer et
révoquer les magistrats. Il décide même après un jugement définitif en
accordant sa grâce, il peut modifier la peine retenue définitivement, même
après rejet du pourvoi en cassation, en prononçant la commutation voire, la
réduction de la peine.

Il s’avère impérieux de renvoyer certaines de ces attributions au Conseil


supérieur de la magistrature (nomination et révocation des magistrats), et soit
de supprimer la grâce soit de subordonner son ordonnance à une requête
sollicitant une telle ordonnance à la cour de cassation. On envisage dans ce
cas, une sorte de recours extraordinaire particulièrement ouvert en faveur du
président de la République.

Paragraphe 3. Effets de la grâce

La grâce produit pour effet la dispense de l’exécution de la peine


prononcée par le juge : soit totalement par la remise de la peine ou la
commutation de celle-ci en une peine d’une nature plus douce, soit
partiellement en cas d’une simple réduction. C’est que la grâce a comme effet :
la remise de la peine, la commutation de la peine et la réduction de la peine.

La grâce peut porter aussi sur les peines principales et


complémentaires. Quant aux peines accessoires, on considère qu’elles ne
peuvent en bénéficier que si l’ordonnance du chef de l’Etat qui l’accorde le
mentionne expressément.

La grâce laisse subsister la condamnation. Cela veut dire que la peine


dispensée, commuée ou réduite reste inscrite ultérieure d’un sursis, c’est-à-dire
d’une condamnation conditionnelle. La peine ainsi pourra également constituer
un des termes de la récidive et même de la délinquance d’habitude.

Effet d’extinction totale ou partielle de la sanction pénale.


Lorsqu'elle est accordée, la grâce empêche l'exécution de la sanction pénale
totale ou partielle à son bénéficiaire pourtant déjà condamné.

208 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

La sanction n’est pas supprimée dans son principe, mais la peine n’est
pas exécutée (le bénéficiaire demeurant toutefois tenu -dans certaines
législations- d’indemniser la victime. On considère la grâce comme une mesure
qui procède à l’extinction de la peine sans effacement de la condamnation. Il
faut dire que la grâce accordée corrobore l’existence du crime (lequel est
mentionné dans le casier judiciaire du délinquant) mais atteint, tout en
l’éteignant, uniquement la peine.

L’incidence de la grâce en matière de crimes internationaux86. La


question qui se pose est celle de savoir si les autorités des Etats peuvent, de
manière discrétionnaire et souveraine, prendre des mesures de grâce, en faveur
des personnes convaincues et condamnées définitivement pour crime
international.

Assez souvent, les réponses qui sont données se reportent en effet


plutôt, inconsciemment ou non, vers l’imprescriptibilité des crimes
internationaux. Et pourtant, comme on peut bien s’en rendre compte,
l’imprescriptibilité vise soit l’action publique non exercée, soit la peine non
exécutée frauduleusement. La grâce quant à elle ne produit d’effets que sur
l’exécution totale ou partielle de la peine. On peut donc noter qu’une telle
mesure peut régulièrement être accordée. Car en effet, le condamné n’exécutera
pas la sanction lui infligée, non pas parce qu’il aurait organisé sa fuite de la
vigilance des autorités de justice ou pénitentiaires, mais parce que l’institution
qui constitue le symbole de l’unité nationale, l’aura discrétionnairement décidé.
Aussi constate-t-on, que ni un texte international (traité ou accord
international) ni une législation interne (constitution ou loi) ne lui interdit de le
faire.

Dans les statuts de certaines juridictions pénales internationales87, il est


prévu aussi bien la grâce que la commutation de peine à la seule condition
d’aviser la juridiction qui aura rendu la décision.
86
. Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, pp 507-510.
87
. Article 27 du statut du TPIR énonce ce qui suit : « Si le condamné peut bénéficier d’une grâce ou d’une commutation de peine
en vertu des lois de l’État dans lequel il est emprisonné, cet État en avise le Tribunal international pour le Rwanda. Une grâce ou
une commutation de peine n’est accordée que si le Président du Tribunal international pour le Rwanda, en consultation avec les
juges, en décide ainsi dans l’intérêt de la justice et sur la base des principes généraux du droit ». Voir aussi l’alinéa 1 de l’article
29 du statut du TMIN ; Article 28 du statut du TPIY.

209 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

C’est que l’Etat sur le territoire duquel s’exécute la peine accordera la


grâce tout en ayant tenu informé la juridiction internationale pour l’intérêt de la
justice et dans le respect des principes généraux de droit.

De ce qui précède, on retiendra qu’en dehors des cas où l’Etat se trouve


lié par son engagement avec une juridiction internationale ou une autre
juridiction étrangère, tout Etat peut souverainement décider d’accorder ou non
à certaines personnes la grâce, peu importe la nature du crime pour lequel elles
auraient été condamnées88.

L’affaire Paul Touvier89 en est une illustration en matière de crimes


internationaux. Toute la difficulté sera celle de l’incidence d’une telle mesure de
l’autorité nationale au delà des frontières de son Etat. Un évadé gracié mais
interpellé sur le territoire d’un pays étranger, peut-il se prévaloir de cette grâce
accordé par le pays sur le territoire duquel les faits avaient été connus par les
juges qui ont définitivement clos l’affaire ?

Il s’avère difficilement acceptable, sauf en cas d’un accord de volonté


entre parties (accord international), qu’une juridiction étrangère se constitue
juge des décisions réglementaires (ou judiciaires) d’un autre Etat souverain.

88
. On se souviendra de la grâce présidentielle accordée souverainement en France par le président Georges Pompidou à Paul
Touvier le 23 novembre 1971 ; alors qu’il était condamné (par contumace) à la peine de mort, pour avoir commis le crime contre
l’humanité en ayant d’un côté, organisé l’assassinat du président de la ligue des droits de l’homme Victor Basch et son épouse
Hélène ; et de l’autre, après avoir infiltré la Résistance et interrogé des prisonniers, dirigé des rafles, pillé des biens et vengé
l'assassinat de Philippe Henriot en faisant fusiller sept juifs à Rillieux-la-Pape, le 29 juin 1944.
89
. Accusé de Crimes contre l’humanité pour des faits commis pendant la seconde guerre mondiale, Paul Touvier né en 1915, a
finalement été jugé par la Cour d'assises des Yvelines qui le condamne à la réclusion criminelle à perpétuité le 19 avril 199 4. Il
meurt à la prison de Fresnes le 17 juillet 1996, à l'âge de 81 ans. Après avoir fuit la justice, le 10 septembre 1946, Paul Touvier est
condamné à mort par contumace par la cour de justice de Lyon, et le 4 mars 1947 à la même peine par la cour de justice de
Chambéry. Après 1967, Touvier, qui bénéficie de la prescription des crimes de guerre, vit à Chambéry dans la maison de fami lle.
Il obtint la grâce le 23 novembre 1971. Les associations de résistants portent plainte en novembre 1973 contre Touvier pour
complicité de crime contre l'humanité, étant donné que l’action publique pour crime de guerre était prescrite. Le 13 août 199 2 la
chambre d'accusation conclue par un non-lieu qui suscite une vive émotion. Le procureur général de Paris, Pierre Truche, forme
un pourvoi devant la Cour de cassation qui casse cet arrêt de non-lieu le 27 novembre 1992. La Cour d'assises des Yvelines juge
Touvier et le condamne à la réclusion criminelle à perpétuité. Il mourut en prison.

210 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre 4. LES CAUSES D’EFFACEMENT DE LA CONDAMNATION

La peine peut s’éteindre par l’effacement de la condamnation qui lui


servait de support. Le droit positif congolais connaît les institutions suivantes :
- l’amnistie ;
- la réhabilitation ; et
- la révision.

Ces institutions font disparaître la condamnation tout en éteignant, ipso


facto, les peines.

Section 1. L’AMNISTIE90

Paragraphe 1. Notion

Constituée de la racine grecque « AMNESIA » qui signifie « Perte totale de


la mémoire », l’amnistie est une institution qui permet à la société de reléguer
dans l’oublie les mesures de caractère pénal dont elle ne veut plus se souvenir.

L’amnistie constitue une mesure de clémence ou de pardon, ayant pour


effet d’enlever rétroactivement à certains faits leur caractère délictueux. C’est
que les faits ont bel et bien en lieu et ne sont pas effacés. Cependant, leur
caractère infractionnel est effacé et leur dimension pénale est enlevée.

Les bénéficiaires sont donc pénalement lavés des infractions qui leur
étaient reprochées. Ces infractions ne pourront plus être invoquées à leur
encontre, même en cas de rechute dans la criminalité.

Moment d’intervention. L’amnistie peut intervenir avant l’action


publique, pendant ou après le prononcé de la décision de condamnation. Si
elle a déjà été mise en mouvement, elle devra s’interrompre et dans ce contexte
l'amnistie ne constituera qu'un obstacle partiel à l'exécution de la
condamnation, une cause incomplète d'extinction de la sanction. Si elle ne l’a
pas encore été, elle ne pourra plus l’être. Car dans ce cas, l'amnistie constituera
un véritable obstacle à la qualification du fait91.

90
. Voir Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits français et
congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, op cit.
91
. PRADEL Jean, Droit pénal général, 16è édition, 2006/2007, Editions CUJAS, p. 723

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Autorité compétente. Dans les pays démocratiques, l’amnistie92 relève


le plus souvent de la loi c'est-à-dire d’un texte voté par le Parlement. Elle efface
non seulement les poursuites et la peine, mais également la condamnation.

Amnistie, expression d’une volonté politique de l’Etat. En RDC,


comme dans d’autres pays, la mesure d’amnistie est assez souvent invoquée
après conflit et en vue d’instaurer la « réconciliation nationale93 ». Les autorités
motivent parfois leurs décisions par le prix à payer pour accéder à la paix,
l’unité et la concorde nationales après que les sociétés se soient déchirées par
la violence de la guerre.

Mais, il y a lieu de mentionner que l’application de ces mesures de


clémence est souvent caractérisée par une sélectivité inexpliquée. Le traitement
discriminatoire et même arbitraire des personnes qui devraient en bénéficier,
fait souvent preuve d’un marchandage politique. L’amnistie devient donc
l’expression d’une volonté politique et par ses caractéristiques, elle se présente
comme une « institution à géométrie variable ».

En tant que « décision politique qui fait disparaître ou réduit la dimension


pénale de conduites sanctionnées par la loi », l’amnistie s’analyse comme une
monnaie d’échange, comme le seul compromis acceptable pour parvenir à une
transition politique apaisée. C’est le cas des lois d’amnistie prises dans un
certain nombre de pays94.

92
. Parmi les mesures destinées, périodiquement à aplanir les reliefs de la vie politique des Etats et surtout à apaiser, voire à
pacifier le climat de tension qui a prévalu dans les rapports entre Etats, entre Etats et individus ou entre individus eux-mêmes,
figure également l’amnistie. Historiquement, on signale que la première amnistie, celle de Thrasybule, remonte à l’an 403 avant
Jésus-Christ. En effet, rentré d’exil pour chasser les trente tyrans d’Athènes et rétablir la démocratie dans sa cité, cet homme
proposa à l’assemblée des citoyens de voter une loi pour consacrer l’oubli des divisions antérieures. La loi de Thrasybule donna
ainsi à la notion d’amnistie son caractère d’oubli volontaire puisqu’institué.
93
. Il en est également ainsi de la grâce. En effet, ce fut le cas avec le décret n° 04/40 du 16 mai 2004 portant mesure collective de
grâce qui a été pris par le président congolais en vue de marquer, selon ses propres termes, par un acte de clémence et de cohésion
nationale le 7ième anniversaire (…).
94
. On peut citer : la loi d’amnistie générale prise au Congo-Brazzaville par la Conférence nationale de février 1991, en faveur de
tous les responsables de crimes politiques ou des violations des droits de l’homme afin de favoriser la réconciliation nationale ;
l’Ordonnance-Présidentielle du 26 septembre 1975 accordant amnistie aux officiers responsables dans l’assassinat du Président
Rahman au Bengladesh du 15 août 1975 ; du décret-loi du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerre et insurrection commis
dans le nord et sud-Kivu.

212 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

En revanche, il nous semble que les raisons pour lesquelles elles sont
prises ne soient généralement pas atteintes. Les conflits armés se poursuivent
sans les moindres répits. Il arrive aussi qu’ils reprennent avec une plus grande
intensité, après seulement quelques temps d’accalmie. On constate enfin, que
de nouveaux conflits jaillissent peu importe l’amnistie préalablement
prononcée.

Paragraphe 2. Effets de l’amnistie

Comme tous les autres obstacles à l’établissement de la responsabilité


pénale, l’amnistie consacre l’impunité qui doit s’entendre comme « l’absence, en
droit ou en fait, de la mise en cause de la responsabilité pénale des auteurs de
violations des droits de l’homme, ainsi que leur responsabilité civile,
administrative ou disciplinaire, en ce qu’ils échappent à toute enquête tendant à
permettre leur mise en accusation, leur arrestation, leur jugement et, s’ils sont
reconnus coupables, leur condamnation à des peines appropriées, y compris à
réparer le préjudice subi par leurs victimes 95 ». Elle peut également se définir
comme « l’absence ou l’insuffisance de sanctions répressives et réparatrices de
violations volontaires ou involontaires des droits et libertés de l’individu 96 ».

C’est que les effets de l’amnistie sont très avantageux pour le délinquant
que ceux de la grâce. Car, alors que la grâce ne fait que remettre, commuer ou
réduire la peine sans effacer la condamnation pénale qui reste acquise,
continue à figurer au casier judiciaire du condamné et fait obstacle à l’octroi du
sursis ; l’amnistie, elle, supprime rétroactivement le caractère infractionnel du
fait commis par le délinquant, et éteint aussi bien l’action publique que la peine
qui était en cours d’exécution.

Elle efface donc, même la condamnation prononcée qui n’empêchera


plus l’octroi d’un sursis ultérieur et ne sera plus prise en considération pour la
récidive. Elle interdit même de rappeler ou de laisser subsister dans un
document quelconque les condamnations ainsi complètement effacées. Les
infractions amnistiées ne pourront plus faire encore l’objet des poursuites. Si
elles n’ont pas été effectuées, elles ne pourront plus être engagées.

95
. Louis Joinet, Lutter contre l’impunité - Dix question pour comprendre et agir, Paris, La Découverte, 2002, p. 9.
96
. El Hadji Guisse, « Le procès équitable », in Rencontres internationales sur l’impunité des auteurs de violations graves des
droits de l’homme, organisées par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) et la Commission
internationale des juristes (CIJ) sous les auspices des Nations Unies (du 2 au 5 novembre 1992), Palais des Nations, Genève, p.
172.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Et si les poursuites sont en cours, elles cesseront immédiatement et


l’action publique sera ainsi éteinte.

Si l’individu (le condamné) bénéficiaire de l’amnistie a déjà été


condamné, la condamnation s’efface. S’il exécute déjà la peine, celle-ci va
s’éteindre immédiatement.

Il convient de dire en définitive que la grande loi de l’amnistie c’est


l’oubli. Mais, celui-ci n’est pas absolu. Car il y a des limitations qui existent.

L’amnistie ne s’applique pas aux : mesures de sûreté, droits des


tiers, nominations des personnes aux postes publics.

Amnistie, une mesure pouvant entrainer une irresponsabilité civile.


Il peut arriver que dans certains cas, l’amnistie irresponsabilise non seulement
pénalement mais aussi civilement. Dans ce contexte donc, elle empêchera le
dédommagement pour tout le préjudice moral mais aussi matériel occasionné
par les faits infractionnels à l’origine de cette mesure. Cette irresponsabilité
civile, s’étend sur toute autre forme de responsabilité que pénale. Elle sous-
entend donc l’irresponsabilité disciplinaire et celle administrative. Cependant,
dans d’autres circonstances, ces mêmes actes ou mesures de clémence
excluent de leurs champs, la responsabilité civile globale. Il en a été le cas en
RDC avec le décret de 200997 qui énonce que : « la présente loi ne porte pas
atteinte aux réparations civiles, aux restitutions des biens meubles et immeubles
ainsi qu’aux autres droits dus aux victimes des faits infractionnels amnistiés ».
De telles dispositions d’exclusion, laissent théoriquement la possibilité aux
personnes qui s’estiment victimes de saisir la justice ; afin de postuler
d’indemnisations ou toutes autres réparations des préjudices subis par les
actes infractionnels, couverts pénalement par l’amnistie.

Ce qui, en tout cas en RDC, n’est pas du tout une chose facile dans la
société congolaise, étant donné d’une part, la conception de ces mesures par la
population, et d’autre part, les influences des bénéficiaires de ces mesures
après leur application, et vu pour certains, les postes de responsabilité qu’ils
occupent en « récompense » de leur « offre » de paix.

97
. Article 4 du décret-loi du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerre et insurrection commis dans le Nord et Sud-Kivu.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Illustrations de mesures nationales d’amnistie entrainant une


irresponsabilité pénale. Il faut avouer qu’en pratique, l’extinction de l’action
pénale ou de l’exécution de la peine qu’entraine l’amnistie est diversement
exprimée selon les Etats et les circonstances. C’est ainsi par exemple qu’on
peut épingler quelques cas :
- Au Bengladesh, après les atrocités de la guerre d’indépendance de 1971, des
tribunaux spéciaux jugèrent, à partir de mars 1972, 2850 prévenus dont
seulement 750 furent condamnés. Une amnistie générale au profit des
condamnés fut décrétée le 30 novembre 1973.
- La loi argentine du « Point final », empêchait d’engager, au-delà d’une certaine
période des nouveaux procès contre les responsables de la dictature militaire
qui avait prévalu de 1976 à 1983.
- Une autre loi d’amnistie argentine de juin 1987. Celle-ci est dite : loi du
« Devoir d’obéissance due ». Elle soustrayait les officiers subalternes aux
poursuites en fixant une présomption irréfragable de « non culpabilité » pour
les personnels de troupe comme pour les officiers subalternes, jusqu’au
grade de Lieutenant-colonel « ayant agi en vertu du devoir d’obéissance ». Or,
le devoir d’obéissance est contesté en droit international. Une présomption
semblable était même étendue aux officiers supérieurs, sauf preuve contraire
apportée dans les trente jours.
- La loi uruguayenne de décembre 1986, appelée : « loi de caducité de l’action
punitive de l’Etat ». Elle a couvert d’amnistie les actes de répression commis
par les responsables militaires et policiers au cours de la période de dictature
de 1973 jusqu’au 1ier mars 1985. Cette loi rendait donc caduc l’exercice de la
prérogative punitive de l’Etat en ce qui concerne les délits commis par les
militaires et policiers « équiparados » ou assimilés pour des motifs politiques
ou à l’occasion d’actions ordonnées par les autorités au pouvoir durant la
dictature.
- Le décret-loi chilien du 18 avril 1978 déniait toute justice et tout recours
effectifs aux chiliens victimes de violations massives des droits humains
pendant la période du 11 septembre 1973 au 10 mars 1978 en garantissant
l’amnistie à toutes les personnes ayant commis des violations des droits de
l’homme durant cette période.
- Le décret royal thaïlandais du 20 mai 1992 prévoyait l’impossibilité de
traduire en justice les militaires ayant, dans le même mois, tiré à balles
réelles sur des manifestants qui réclamaient une révision constitutionnelle à
l’effet d’écarter les militaires de la vie politique thaïlandaise.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

- La loi algérienne du 13 juillet 1999, appelée « loi de concorde civile ». En effet,


visant les combattants impliqués dans des actions de terrorisme ou de
subversion, cette loi accordait trois possibilités à ceux qui renonceraient à
l’usage des armes et se présenteraient aux autorités.
Il leur fallait donc choisir soit l’exonération des poursuites pénales, soit
encore la mise sous probation, soit enfin la réduction de peine.
- Le décret-loi congolais 03/001 du 15 avril 2003 portant amnistie pour faits
de guerre, infractions politiques et d’opinion. Ce texte a empêché toute
poursuite contre les auteurs des types d’infractions identifiés sans la
moindre précision (sauf l’exclusion de crime de guerre, crime contre
l’humanité et crime de génocide), perpétrées au cours de la période allant du
02 avril 1998 au 04 avril 2003.
- Le décret-loi congolais en date du 7 mai 2009. Ce dernier portait en effet,
amnistie pour faits de guerre et insurrection commis dans le nord et le sud-
Kivu de juin 2003 à mai 2009. Il y est précisé aussi bien le lieu et la période
de la commission des infractions visées. Comme le précédent, ce dernier
décret-loi écarte les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le crime
de génocide. Il ne couvre donc que les faits de guerre et les faits
insurrectionnels qu’il définit98 limitativement.
- L’ordonnance présidentielle congolaise de 2013. Cette dernière est prise à la
suite des résolutions des concertations nationales tenues en vue de
l’apaisement du climat politique en République Démocratique du Congo.

Section 2. LA REHABILITATION

Elle est prévue par le décret du 21 juin 1937, modifié par le décret du
22 août 1959 et l’ordonnance législative du 28 août 1959.

La réhabilitation est un acte de l’autorité judiciaire à la demande du


condamné en vue de remettre celui-ci dans la situation légale et si possible
sociale qu’il avait perdu suite à une juste condamnation. Elle fait cesser, pour
l’avenir, les effets d’une condamnation. C’est donc une mesure d’indulgence qui
constate et récompense la bonne conduite du condamné ayant exécuté sa
peine, soit totalement soit partiellement.

98
. L’article 2 du décret-loi du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerre et insurrection commis dans le nord et sud-Kivu
définit d’abord les faits de guerre comme des actes inhérents aux opérations militaires autorisées par les lois et coutumes de
guerres qui, à l’occasion de la guerre, ont causé un dommage à autrui ; ensuite, les faits insurrectionnels comme des actes de
violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l’intégrité du territoire
national.

216 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

La condamnation ne figurera plus sur le casier judiciaire et n’empêchera


plus l’octroi du sursis et ne sera pas prise en considération pour déterminer
l’application de la récidive et sur la délinquance d’habitude.

Section 3. LA REVISION DES DECISIONS DE JUSTICE 99

La procédure de révision est prévue et réglementée par les articles 67 à


72 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure
devant la Cour de Cassation. C’est donc dans cette loi que l’on retrouve la
révision. Elle ne se trouve donc pas dans le code de procédure pénale issu du
Décret du 06 août 1959.

Elle est une procédure par laquelle, moyennant les éléments nouveaux
légalement définis, peuvent être annulées des condamnations passées en force
des choses jugées pour toute infraction punissable de plus de deux mois
d’emprisonnement.

La révision constitue un mécanisme destiné à réparer l’erreur judiciaire.


Les requêtes en révision sont en effet adressées à la Cour de Cassation par, le
Procureur Général de la République sur injonction du ministre de la justice soit
par les parties, c’est-à-dire le condamné ou en cas d’incapacité son
représentant ou en cas de décès ou d’absence déclarée du condamné par son
conjoint, ses descendants, ses ascendants, ses ayants-droit coutumier et ses
légataires universels.

Paragraphe 1. Notions

En droit congolais, la révision est une voie de recours extraordinaire


introduite à la cour de cassation, en faveur de toute personne reconnue auteur
d’une infraction relevant de sa compétence, en vue d’obtenir la correction des
erreurs de fait contenues dans les décisions revêtues de l’autorité de la chose
jugée rendues par toutes les juridictions.

Cette voie de recours ne tient à aucun délai. Il convient et il suffit que la


décision soit coulée en force de chose jugée et même si la peine est prescrite.

99
. Les articles 67 à 72 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation.

217 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

De cette définition, il ressort que pour introduire un pourvoi en révision


il faut :
- une décision de condamnation passée en force de chose jugée, ce qui
exclut les décisions d’acquittement et celles qui ne sont pas coulées en
force de chose jugée ;
- une décision rendue par une juridiction congolaise.

Devant la cour de cassation, la demande de révision est possible qu’à


cause de la gravité de l’infraction pour laquelle la condamnation a été
prononcée (punissable d’une servitude pénale supérieure à deux mois).

Paragraphe 2. Cas d’ouverture à révision devant la Cour de


Cassation

La révision peut être demandée :

- lorsqu’après une condamnation, un nouvel Arrêt ou jugement condamne,


pour les mêmes faits, un autre prévenu, et que, les deux condamnations
ne pouvant se concilier, leur contradiction est la preuve de l’innocence de
l’un ou de l’autre condamné ; on parle alors de la contrariété de
jugements ;
- lorsque postérieurement à la condamnation, un des témoins entendus a
été poursuivi et condamné pour faux témoignage contre le prévenu ;
Le témoin ainsi condamné ne peut plus être entendu lors de nouveaux
débats ;
- lorsqu’après une condamnation pour homicide, il existe des indices
suffisants propres à faire croire à l’existence de la prétendue victime de
l’homicide.
- lorsqu’après une condamnation, un fait vient à se révéler ou des pièces
inconnues lors des débats sont présentées et que ce fait ou ces pièces
sont de nature à établir l’innocence du condamné.

Paragraphe 3. L’auteur de la requête en révision ? 100

Le droit de demander la révision appartient :


- au Ministre de la Justice ;
- au condamné ou, en cas d’incapacité, à son représentant,
après la mort ou l’absence déclarée du condamné, à son
conjoint, à ses descendants, ses ascendants, à ses ayants-
droit et à ses légataires universels.

100
. Article 68 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation.

218 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 4. Procédure de la révision.

Saisine de la Cour de Cassation. La Cour de Cassation est saisie par le


Procureur Général en vertu de l’injonction du Ministre de la Justice, ou par la
requête d’une des parties visées au point 2 de l’article 68 de la Loi organique
organisant la procédure devant la cour de cassation.

Cela signifie que, même lorsque l’initiative vient du ministre ou des


parties, c’est le procureur général qui est seul habilité à saisir cette haute
juridiction. Autrement dit, le ministre comme le condamné ou ses
représentants doivent adresser leur injonction ou leur requête à procureur
général afin que celui-ci saisisse la cour de cassation.

Effets de la demande introduite. La demande de révision produit des


effets sur la décision entreprise :
- si l’arrêt ou le jugement de condamnation n’a pas encore été exécuté,
l’exécution de la décision peut être suspendue par la cour ;
- si le condamné est en détention, la suspension de la décision attaquée
peut être décidée avant la transmission du recours par le procureur
général et à partir de la transmission de ce recours par arrêt de la cour
de cassation.

En définitive, on retiendra que la révision a pour effet de rendre nulle la


décision de condamnation et toutes ses conséquences. La partie civile perd
notamment les bénéfices des condamnations prononcées préalablement à son
profit.

La révision réhabilite la mémoire du condamné décédé. Elle alloue des


dommages et intérêts à l’innocent injustement condamné ou s’il est décédé, à
son conjoint, ses descendants, ses ascendants ou ses ayants-droit coutumier
s’ils en font la demande. Mais, ils devront justifier le préjudice matériel subi
suite à cette condamnation.

Déroulement. La procédure devant la Cour de Cassation comprend deux


phases101.

101
. Jean Pradel, Procédure pénale, Ed. Cujas, Paris 1976, n°647 à 649.

219 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

Le rescindant. Il consiste en un examen par la cour de cassation de la


recevabilité et du bien fondé du pourvoi en révision. Si la demande est
recevable, la cour procède directement ou par commission rogatoire à toutes les
enquêtes sur le fond, confrontations, reconnaissances d’identité et moyens
propres à la manifestation de la vérité102.

La Cour rejette la demande si elle l’estime non fondée. Si, au contraire,


elle la juge fondée, elle annule la condamnation prononcée. Elle apprécie, dans
ce cas, s’il est possible de procéder à des nouveaux débats contradictoires.
Dans l’affirmative, elle renvoie le prévenu devant une autre juridiction de même
ordre et de même degré que celle dont émane l’Arrêt ou le jugement annulé, ou
devant la même juridiction autrement composée.

Si l’annulation de l’Arrêt ou du jugement à l’égard d’un condamné vivant


ne laisse rien subsister qui ne puisse être qualifié d’infraction, aucun renvoi
n’est prononcé. Dans ce cas, le condamné en détention est libéré.

Le rescisoire. Si la Cour de Cassation estime qu’il est opportun de


procéder à de nouveaux débats contradictoires, elle renvoie les parties devant la
juridiction qui a rendu la décision entreprise mais autrement composée. Sinon
elle statue au fond, après avoir entendu les parties civiles s’il y en a eu au
procès. Elle annule les condamnations qui ont été injustement prononcées et
décharge s’il y a lieu la mémoire des morts.

C’est le cas lorsqu’il y a décès, absence, démence, défaut d’un ou


plusieurs condamnés, irresponsabilité pénale, prescription de l’action publique
ou de la peine.

Au cas où l’impossibilité de procéder à de nouveaux débats ne se révèle


qu’après l’arrêt d’annulation et de renvoi, la cour de cassation, sur réquisition
du procureur général, rapporte la désignation de la juridiction de renvoi et
statue sur le fond.

Lorsqu’elle statue au fond. La Cour n’annule que les condamnations qui


ont été injustement prononcées. Elle décharge, s’il y a lieu, la mémoire des
morts.

L’annulation prononcée par la cour de cassation sur requête en révision


produit les conséquences ci-après :
- Tous les effets de la condamnation sont anéantis rétroactivement ;
- Toute condamnation à des dommages-intérêts est effacée de plein droit ;
102
. Voir l’article 70 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation.

220 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2013

- En cas de renvoi, la juridiction désignée dans l’arrêt doit, en ce qui


concerne l’objet de l’inculpation, se limiter aux questions indiquées dans
l’arrêt. Néanmoins le président de la juridiction de renvoi peut, avant
l’audience, procéder à un supplément d’instruction ;
- Si l’annulation de la décision entreprise ne laisse subsister aucune
infraction à charge du condamné en vie, aucun renvoi n’est prononcé.

Mais, lorsqu’après renvoi l’annulation laisse subsister quelque chose qui


puisse être qualifié d’infraction, le demandeur en révision peut être condamné
par la juridiction de renvoi et les frais de cette instance de renvoi seront à sa
charge.

La réparation civile. La loi organique relative à la procédure devant la


cour de cassation prévoit la possibilité pour cette haute juridiction d’allouer des
dommages-intérêts à la victime de l’erreur judiciaire lorsque l’innocence du
condamné a été établie.

A cet effet justement, l’article 71 de cette loi organique n° 13/010 du 19


février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation, prévoit ce qui
suit : « l’arrêt d’où résulte l’innocence d’un condamné peut, sur sa demande, lui
allouer des dommages-intérêts en raison du préjudice que lui a causé sa
condamnation. Si la victime de l’erreur judiciaire est décédée, le droit de
demander des dommages-intérêts appartient, dans les mêmes conditions, à son
conjoint, ses descendants ainsi qu’à ses ascendants, et ses ayants-droit. Il
appartient aux autres personnes pour autant qu’elles justifient d’un préjudice
matériel résultant pour elles de la condamnation. La demande en dommage-
intérêt est recevable en tout état de cause de la procédure en révision.

Les dommages-Intérêts sont à la charge de l’Etat, sauf son recours contre


la partie civile, les dénonciateurs ou les faux témoins par la faute desquels la
condamnation a été prononcée ».

Des frais de justice en matière de révision. Aussi, à la fin de la


procédure, les frais de l’instance en révision qui étaient avancés par le Trésor à
partir du dépôt de la demande à la Cour de Cassation ; devront être supportés
par le demandeur en révision qui succombe en son instance.

Si l’Arrêt ou le jugement définitif, après renvoi, prononce une


condamnation, il met à charge du condamné les frais de cette seule instance.

L’Arrêt de la Cour de Cassation, ou le jugement intervenu après révision


d’où a résulté l’innocence d’un condamné est, à la diligence du Greffier, affiché
dans la localité :

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Cours de Droit Pénal Général 2013

1. où a été prononcé la condamnation ;


2. où siège la juridiction de révision ;
3. où l’action publique a été ouverte ;
4. du domicile des demandeurs en révision ;
5. de son dernier domicile lorsque la victime est décédée.

En outre, ils sont, à la requête du demandeur en révision, publiés par


extrait au Journal Officiel et dans deux journaux. Les frais de publicité sont à
charge du Trésor.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

BIBLIOGRAPHIE

I. TEXTES LEGAUX

1 Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée le 20 janvier 2011.


2 Décret du 30 janvier 1940, portant code pénal congolais tel que modifié et complété à ce jour.
3 Le code pénal français issu des lois de 1992 entrés en vigueur en 1994.
4 Le Décret du 06 août 1959, portant code de procédure pénale congolais.
5 Loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation.
6 Loi organique n° 13/010 du 1 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle.
7 Loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire.
8 Loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant code pénal militaire.
9 Loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant.
10 Avant-projet du livre premier du Code Pénal du 25 mai 2009, approuvé par la CPRDC.

II. JURISPRUDENCE

a) C.G., 14 octobre 1901, Jur. Et. I.


b) Boma, 15 juillet 1902, Jur. Et. I.
c) C.S.J., 11 février 1972, bull, 1973, 18, RJZ.

III. DOCTRINE

A. OUVRAGES

1. AKELE ADAU, Analyse et commentaire du nouveau code pénal militaire congolais, inédit.
2. BECCARIA, Traité des délits et des peines, 1764.
3. BOUZAT (P) et PINATEL (J), Traité de droit pénal et de criminologie, T. I, Droit pénal général,
Dalloz, Paris, 1963.
4. DONNEDIEU DE VABRES, Traité élémentaire de droit criminel et de la législation pénale
comparée, 3e éd., Paris.
5. FORIERS (P), De l’état de nécessité en droit pénal, 1951.
6. HAUS (J.J), Principes généraux du droit pénal belge, 3e éd., 2 T., Gaud, 1869, réimprimé à
Bruxelles, 1979
7. LIKULIA BOLONGO, Droit pénal militaire ; T1, Organisation et fonctionnement des juridictions
militaires, L.G.D.J., Paris, 1977, 272 p.
8. LIKULIA BOLONGO, Droit pénal spécial zaïrois, 1ère éd., T.1., L.G.D.J.,
Paris, 1985, 600 pages

9. MERLE (R) et VITU (A), Traité de droit criminel, Cujas, Paris, 1967.

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Cours de Droit Pénal Général 2013

10. MINEUR (G), Commentaire du droit pénal congolais, 2e éd., Larcier, Bruxelles, 1953.
11. MONTESQUIEU, De l’esprit des lois, Liv XI, Chap. VI, 1748.
12. ORTOLAN, Eléments de droit pénal, I, 4e éd., Paris, 1886.
13. PRADEL (J), Droit pénal général, 12e éd., Cujas, Paris, 2010.
14. STEFANI (G), LEVASSEUR (G) et BOULOC (B), Droit pénal général, 11e éd., Dalloz, Paris, 1980
et 13e éd., 1987.

B. REVUES

1. JIMENEZ DE ASUA, « La faute consciente et le dolus eventualis », in Revue de droit pénal


et de criminologie, 1959-1960.
2 TROUSSE (P.E), « Principes généraux du droit positif belge », in Les nouvelles, Larcier, 1972.

C. COURS ET THESE

1 DUGUAY Gilles (H), Cours de droit pénal, ENDA, 1962, Léopoldville.


2 LAMY (E), Cours de droit pénal spécial, UNAZA, 1971-1972.
3 VIDAL (G), Cours de droit criminel et science pénitentiaire, 9e éd., Rousseau, Paris, 1949.
4 Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des
droits français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille
Université, France, 2012, 627 Pages

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Cours de Droit Pénal Général 2013

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE …………………………………………………………………. 2

Section I. LE PHÉNOMÈNE CRIMINEL……………………………………………….…… 2


Paragraphe I. L'existence du phénomène criminel …………………………………. 3
A. La définition du phénomène criminel ………………………………….…………….. 3
B. L'ampleur du phénomène criminel………………………………….……………….. 4
Paragraphe II. La réaction sociale au phénomène criminel………………….……… 8
A. Les fonctions de la réaction sociale………………………………….…………….. 8
B. Les modèles de réactions sociales…………….……………………….…………….. 9
C. Le processus de réaction sociale…………….……………………….…………….. 11

Section II LE DROIT PÉNAL……………………………………………….………………… 12


Paragraphe I. L'ÉVOLUTION DU DROIT PÉNAL………………….………………….. 12
A. La vengeance privée………………….…………………...………………………….. 15
B. La période théologico-politique fondée sur la vengeance divine et publique 17
C. La période humanitaire : siècle de lumière………...……………….………….. 18
D. La période pénitentiaire 20
Paragraphe II. LES CARACTÉRISTIQUES DU DROIT PÉNAL 25
A. L’ENVIRONNEMENT ET CONTENU DU DROIT PÉNAL 25
B. LA NATURE DU DROIT PÉNAL 35
C. L’IMPORTANCE DU DROIT PÉNAL 38
D. LA DÉFINITION DU DROIT PÉNAL 40

PREMIERE PARTIE : L’INFRACTION 43

Titre Premier : LA SOURCE DE L’INFRACTION : La norme pénale 44


Chapitre 1. L’IDENTIFICATION DES SOURCES DE L’INFRACTION 45
Section 1. INVENTAIRE DES SOURCES DE L’INFRACTION 45
Paragraphe 1. Les normes de droit pénal commun 45
A. Le code pénal (Décret du 30 janvier 1940) 45
B. Les normes complémentaires du code pénal 45
C. Les caractères du droit commun 46
Paragraphe 2. Les normes de droit pénal particulier 46
Paragraphe 3. Rapport entre les normes de droit pénal commun et les normes
de droit pénal particulier 46
Section 2. LE PRINCIPE DE « LEGALITE » DES DELITS ET DES PEINES 47
Paragraphe 1. Enoncé du principe 47
Paragraphe 2. Justification du principe 48
A. Dans le domaine de procédure 48
B. Dans le domaine de droit pénal de fond 48
Paragraphe 3. Le contenu du principe 49
A. « La légalité » des incriminations 49
B. « Légalité » des peines 50

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Chapitre II. L’APPLICATION DE LA NORME PENALE 51


Section 1. L’INTERPRETATION DE LA NORME PENALE 51
Paragraphe 1. Les sources d’interprétation 51
A. Interprétation authentique 51
B. Interprétation judiciaire 52
C. Interprétation doctrinale 53
Paragraphe 2. Les méthodes d’interprétation 53
A. L’interprétation littérale 53
B. L’interprétation téléologique 54
C. L’analogie 58
Paragraphe 3. In dubio pro reo 58

Section 2. L’APPLICATION DE LA NORME PENALE 59


Sous-section 1. LAPPLICATION DE LA NORME PENALE DANS LE TEMPS 59
Paragraphe 1. L’application dans le temps des normes pénales de fond 60
A. La norme applicable 60
B. Les exceptions aux règles de conflits 62
Paragraphe 2. Application dans le temps des normes pénales de forme 64
A. Application immédiate des normes nouvelles de procédure 64
B. Quelques dérogations 65
Sous-section 2. L’APPLICATION DE LA NORME PENALE DANS L’ESPACE 66
Paragraphe 1. Les systèmes doctrinaux 66
A. LA TERRITORIALITE DE LA NORME PENALE (lex loci delicti commissi) 66
B. LA PERSONNALITE DE LA NORME PENALE 68
C. L’UNIVERSALITE DU DROIT DE PUNIR 68
Paragraphe 2. Principe de solution en droit congolais 69
A. Principe de territorialité 69
B. Emprunts de correction 70
Paragraphe 3. La coopération internationale contre le crime 71
A. L’extradition 72
B. Les autres formes de collaboration internationale 74

Deuxième Titre : LA COMMISSION DE L’INFRACTION 76

Chapitre I. LA CLASSIFICATION DES INFRACTIONS 79


Section 1. CLASSIFICATION FONDEE SUR LA GRAVITE DE L’INFRACTION 79
Paragraphe 1. De la classification tripartite des infractions 80
Paragraphe 2. La législation congolaise et face à la tripartition des infractions 84
Section 2. CLASSIFICATION FONDEE SUR LA NATURE DE L’INFRACTION 84
Paragraphe 1. Les infractions de droit commun 84
Paragraphe 2. Les infractions politiques 85
Paragraphe 3. Les infractions militaires 86
Paragraphe 4. Les infractions de presse 87
Section 3. LA CLASSIFICATION FONDEE SUR L’ELEMENT MORAL DE
L’INFRACTION 88
Paragraphe 1. Les infractions intentionnelles 88
Paragraphe 2. Les infractions non intentionnelles 88

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Section 4. LA CLASSIFICATION FONDEE SUR LE MODE D’EXECUTION 89


Paragraphe 1. Les infractions de commission et d’abstention 89
Paragraphe 2. Les infractions instantanées et continues 89
Paragraphe 3. Les infractions d’habitude et les infractions collectives 90
Paragraphe 4. Les infractions complexes et connexes 90
Section 5. LA CLASSIFICATION FONDEE SUR LE MOMENT DE LA
CONSTATION OU L’EPOQUE DE DECOUVERTE 91
Paragraphe 1. Les infractions flagrantes 91
Paragraphe 2. Les infractions non flagrantes 91
Section 6. CLASSIFICATION FONDEE SUR LE RESULTAT DE L’EXECUTION 91
Paragraphe 1. Infraction matérielle 92
Paragraphe 2. Infraction formelle 92

Chapitre II. LA REALISATION MATERIELLE DE L’INFRACTION 93


Section 1. LE PROCESSUS DE L’INFRACTION A CONSOMMER 93
Paragraphe 1. L’ « Iter criminis » 93
Paragraphe 2. Examen des stades du processus criminel 94
Section 2. L’INFRACTION INACHEVEE : LA TENTATIVE PUNISSABLE 95
Paragraphe 1. L’infraction tentée 96
A. La résolution (criminelle) de commettre une infraction 97
B. La manifestation de la résolution par des actes extérieurs 97
C. Ces actes extérieurs doivent former « commencement d’exécution » 97
D. L’interruption de l’entreprise criminelle 99
Paragraphe 2. L’infraction manquée 100
Paragraphe 3. L’infraction impossible 101

Chapitre III. L’ELEMENT MORAL DE L’INFRACTION 106


Section 1. LES INFRACTIONS INTENTIONNELLES 106

Paragraphe 1. De la connaissance et de la volonté 107


A. La nécessité de la connaissance 107
B. La nécessité de la volonté 107
Paragraphe 2. Le dol général, le dol spécial et le dol plus spécial 107
A. Le dol général 107
B. Le dol spécial 108
C. Le mobile de l’infraction 108
D. Le dol plus spécial 109
Paragraphe 3. Le dol simple et le dol aggravé 110
Paragraphe 4. Le dol déterminé et le dol indéterminé 110
Paragraphe 5. Le dol direct et le dol indirect 111
A. Le dol nécessaire 111
B. Le dol éventuel 112
Section 2. LES INFRACTIONS NON INTENTIONNELLES 113
Paragraphe 1. La faute d’imprudence 113
Paragraphe 2. La faute pénale et la faute civile d’imprudence 116

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Troisième Titre : L’AUTEUR DE L’INFRACTION : Le Délinquant 118

Chapitre I. LA PERSONNE RESPONSABLE 119


Sous-chapitre 1. LE DELINQUANT : PERSONNE PHYSIQUE OU MORALE ? 119
Section 1. DELINQUANT, ETRE PHYSIQUE 119
Paragraphe 1. Principe 119
Paragraphe 2. Les immunités pénales 119
Section 2. DELINQUANT, PERSONNE MORALE 121
Paragraphe 1. Thèse de rejet de la responsabilité pénale des personnes morales 121
Paragraphe 2. Thèse d’admission de la responsabilité pénale des personnes
morales 122
Paragraphe 3. La tendance actuelle 123
Paragraphe 4. La responsabilité pénale des êtres moraux en droit congolais 123
Sous-chapitre 2. LA PARTICIPATION CRIMINELLE 126
Section 1. CONDITIONS GENERALES DE LA PARTICIPATION CRIMINELLE 126
Paragraphe 1. Existence d’une infraction principale 126
Paragraphe 2. Nécessité de commettre un acte de participation 127
Paragraphe 3. Nécessité d’un élément moral 128
Section 2. LES MODES LEGAUX DE LA PARTICIPATION CRIMINELLE 128
Paragraphe 1. Les modes légaux de la coactivité ou corréité 128
A. L’exécution matérielle et la coopération directe 128
B. L’aide indispensable 129
C. Provocation privée et publique 129
Paragraphe 2. Les modes légaux de la complicité 132
A. Fourniture des instructions (Art. 22, tiret 1) 132
B. Complicité par fourniture des moyens (Art. 22, tiret 2) 132
C. Complicité par aide ou assistance accessoire (Art. 22, tiret 3) 133
D. Complicité par fourniture habituelle de logement (Art 22, tiret 4) 133

Section 3. REPRESSION DE LA PARTICIPATION CRIMINELLE 133

Section 4. CAS PARTICULIER DES INFRACTIONS PLURALES 134

Section 5. LA REITERATION OU LE CUMUL D’INFRACTION 134


Paragraphe 1. Définition 134
Paragraphe 2. Concours des faits pénaux, matériels ou réel d’infraction 135
Paragraphe 3. Concours d’incrimination ou concours idéal 135

Section 6. LA RECIDIVE 136


Paragraphe 1. Définition de la récidive 136
A. Analyse de la définition 136
B. Les rapports de deux termes de la récidive dans le temps 137
C. Les rapports entre les deux termes de la récidive relatifs à la notion des
infractions qui se suivent 137
Paragraphe 2. La conséquence de la récidive 138

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Deuxième chapitre : LES CAUSES D’EXONERATION DE LA RESPONSABILITE 139


PENALE

Chapitre I. LES CAUSES SUBJECTIVES D’IRRESPONSABILITE PENALE :


CAUSES DE NON IMPUTABILITE 139

Section 1. LES CAUSES PATHOLOGIQUES ET PHYSIOLOGIQUES DE NON


IMPUTABILITE 140
Paragraphe 1. Les causes physiologiques de non imputabilité 140
Paragraphe 2. Les causes pathologiques 141
A. Le régime pénal des déments 142
B. Les troubles momentanés des facultés mentales 142
C. Les difficultés inhérentes aux troubles momentanés 142
Section 2. LES CAUSES PSYCHOLOGIQUES DE NON IMPUTABILITE 143
Paragraphe 1. La contrainte 143
A. Les conditions de la contrainte 143
B. Les espèces de contrainte 144
Paragraphe 2. L’ignorance et l’erreur 147
A. Ignorance et erreur de droit et de fait 147
B. Les difficultés soulevées par les problèmes impliquant l’erreur et
l’ignorance 148
C. Solutions aux difficultés soulevées par l’erreur et l’ignorance 148

Chapitre II. LES CAUSES OBJECTIVES D’IRRESPONSABILITE PENALE :


CAUSES DE JUSTIFICATION 152

Section 1. JUSTIFICATIONS FONNDEES SUR UNE INJONCTION 152


Paragraphe 1. L’ordre de la loi (du règlement) 152
Paragraphe 2. Le commandement de l’autorité légitime 153

Section 2. JUSTIFICATIONS FONDEES SUR UNE PERMISSION 154


Paragraphe 1. La légitime défense 155
A. Fondement de la légitime défense 155
B. Les conditions de la légitime défense 155
C. Les éléments indifférents à l’appréciation de la légitime défense 158
D. La défense illégitime 158
E. La légitime défense et la responsabilité civile de l’agent 159
Paragraphe 2. L’état de nécessité 159
A. La particularité de l’état de nécessité 160
B. Fondement de l’état de nécessité 160
C. Conditions de l’état de nécessité 160
D. Effets de l’état de nécessité 161
E. Les cas d’application 161
Paragraphe 3. Le consentement de la victime 161
A. L’application en pratique 162
B. Conditions d’existence 162
C. Cas particuliers du consentement de la victime 162

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Cours de Droit Pénal Général 2013

DEUXIEME PARTIE : LA SANCTION PENALE 164

Titre 1. APPROCHE ANALYTIQUE ET EXPLICATIVE DE LA SANCTION PENALE 172

Chapitre I. NOMENCLATURE ET CLASSIFICATION DES SANCTIONS PENALES 173


Section 1. LA NOMENCLATURE DES SANCTIONS PENALES 173
Paragraphe 1. La peine de mort 173
Paragraphe 2. Les travaux forcés 176
Paragraphe 3. La peine de servitude pénale 177
Paragraphe 4. La peine d’amende 177
Paragraphe 5. La peine de la confiscation spéciale 177
Section 2. LA CLASSIFICATION DES SANCTIONS PENALES 178
Paragraphe 1. Les mesures de sûreté 178
Paragraphe 2. Les peines au sens strict 179
A. Classification des peines par catégorie 179
B. Classification des peines d’après le mal infligé au délinquant 180

Chapitre II. LES FONCTIONS ET LES CARACTERES DE LA SANCTION PENALE 182


Section 1. LES FONCTIONS DE LA SANCTION PENALE 182
Paragraphe 1. FONCTIONS MORALE ET DE PREVENTION SPECIALE 182
A. De la fonction morale ou rétributive 182
B. De la Fonction de Prévention Individuelle ou Spéciale 182
Paragraphe 2. LA PREVENTION GENERALE ET L’ELIMINATION 183
A. De la Fonction de prévention générale 183
B. De la Fonction éliminatrice 183
Section 2. LES CARACTERES DE LA SANCTION PENALE 184
Paragraphe 1. LA LEGALITE « NORMATIVITE » ET L’EGALITE DE LA
SANCTION PENALE 184
A. De la légalité « normativité ou textualité » des sanctions pénales 184
B. L’égalité de la peine 185
Paragraphe 2. LA PERSONNALITE ET LA DIGNITE DE LA SANCTION PENALE 185
A. Le caractère personnel et individuel de la peine 185
B. La garantie de la dignité humaine par la peine 187

TITRE II. LES MESURES AFFECTANT LA SANCTION PENALE 188

Chapitre 1. LES CIRCONSTANCES QUI FONT VARIER LA PEINE 189

Section 1. LES CIRCONSTANCES ATTENUANTES 189


Paragraphe 1. Notions 189
Paragraphe 2. Les caractéristiques des circonstances atténuantes 191
Section 2. LES CIRCONSTANCES AGGRAVANTES 191
Paragraphe 1. Les caractéristiques des circonstances aggravantes 191
A. L’aspect accidentel des circonstances aggravantes 191
B. légalité (normativité ou textualité) des circonstances aggravantes 192
C. Du renforcement de la répression 192

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Cours de Droit Pénal Général 2013

Paragraphe 2. Classification et effets des circonstances aggravantes 193


A. La classification des circonstances aggravantes 193
B. Les circonstances aggravantes affectant l’acte ou le résultat 194
Paragraphe 3. Les effets des circonstances aggravantes 194
Section 3. LES CAUSES D’EXCUSE LEGALE 194
Paragraphe 1. Définition 194
Paragraphe 2. Caractéristiques 195
A. Excuses absolutoires 195
B. Excuses atténuantes 197
C. La provocation 197

Chapitre 2. LES CAUSES DE SUSPENSION DE LA PEINE 199

Section 1. DE LA LIBERATION CONDITIONNELLE 199

Section 2. LA CONDAMNATION AVEC SURSIS (CONDITIONNELLE) 200

Chapitre 3. LES CAUSES D’EXTINCTION DE LA PEINE 201


Section 1. L’EXECUTION DE LA PEINE 201

Section 2. LA PRESCRIPTION 201


Paragraphe 1. La prescription de l’action publique 205
Paragraphe 2. La prescription de la peine 205
A. La prescription de la peine se rapportant au type de sanction : 205
B. La prescription de la peine se rapportant à la situation du condamné 206
Section 3. LA GRACE 206
Paragraphe 1. Notion 207
Paragraphe 2. Effets de la grâce 208

Chapitre 4. CAUSES D’EFFACEMENT DE LA CONDAMNATION 211


Section 1. L’AMNISTIE 211
Paragraphe 1. Notion 211
Paragraphe 2. Effets de l’amnistie 213
Section 2. LA REHABILITATION 216

Section 3. LA REVISION DES DECISIONS DE JUSTICE 217

Paragraphe 1. Notions 217


Paragraphe 2. Cas d’ouverture à révision devant la Cour de Cassation 218
Paragraphe 3. L’auteur de la requête en révision ? 218
Paragraphe 4. Procédure de la révision. 219

BIBLIOGRAPHIE 223

TABLE DES MATIERES 225

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Cours de Droit Pénal Général 2013

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