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www.alimentationsante.doomby.com/rubrique,facons-de-consommer
Document 2 : Philippe Drouin,« Comportement alimentaire et appartenance sociale »,
www.duchampalatable.inist.fr, 11 mai 2010
Document 3 : « S’intégrer au groupe social », www.turmeliere.org
Document 4 : « Famille et alimentation : vers un nouveau modèle ? »,
http://fondation.nestle.fr/comprendre-les-comportements-alimentaires
TEXTE 1
alimentationsante.doomby.com/rubrique,facons-de-consommer,
Ces études mettent en évidence, à notre avis de façon inéluctable, une série de mutations :
Le grignotage
Le grignotage apparait comme un véritable problème de notre époque, il est de plus en plus
fréquent dans la plupart des société dévelopées que ce soit en Amérique du Nord ou dans
les pays européens.
Tout ce qui structurait la table, tout ce qui passait par des rituels, tend aujourd'hui à
disparaître. Gros adeptes du grignotage, les Américains sont ainsi fans des « snack-bars
». Ce sont des barres déclinées en multiples parfums étonnants et dans lesquelles graisses et
chocolat font un retour remarqué. L'alimentation en solo les caractérise, il faut savoir que
les Américains se situent à douze prises alimentaires par jour.
En général, le grignotage touche surtout les jeunes: ceux-ci changent de comportements
alimentaires. En effet avec la croissance et les dérèglements hormonaux, l’appétit augmente.
Les adolescents mangent moins souvent à la maison, parfois même ils ne prennent plus leurs
repas en famille, ne mangent pas à des heures fixes et prennent des repas rapides.
Une réunion qui se termine tard, pas le courage de commencer à sortir les casseroles pour
préparer à dîner, mais au contraire, envie de trouver un bon petit plat mitonné dans son
assiette dans le quart d'heure qui suit le retour à la maison. La tentation est grande. De toutes
les tailles, de toutes les saveurs, les plats préparés nous rendent bien des services. Les boîtes
de conserves ont, par exemple, mauvaise réputation, alors qu'elles présentent un apport
nutritif aussi complet que les aliments frais. Les protides, les glucides ainsi que les lipides
sont toujours aussi présents. Avec l'entrée des femmes sur le marché du travail, le temps
accordé à la préparation des repas a considérablement diminué , les aliments ont désormais
l'avantage lorsqu'ils présentent un aspect pratique et rapide. L'avantage pour les uns est un
danger pour les autres. De plus, la modernité a fait apparaître la restauration dite ‘’rapide’’,
les fast-foods ont beaucoup de succès. Ce secteur est l'un des rares à avoir profité de la crise
économique.
Tous ces changements structurels entrainent des modifications profondes au niveau de nos
choix alimentaires. Par exemple la consommation de fruits et légumes frais ne cesse de
diminuer. Entre 1997 et 2005, les achats de fruits ont reculé de 12 % et ceux de légumes de
14 % (seulement 11,8% des français ont en consommé 5 fois par jour en 2008). Ce recul
s’explique par la présence des conserves et le prix élevé des fruits et légumes (43% évoquent
le prix comme un obstacle contre 15% en 2002). On constate une baisse régulière de la
consommation de produits céréaliers, légumes secs et de féculents qui a chuté au cours des
dernières décennies. Cette chute s'est accompagnée d'une augmentation de la consommation
de produits sucrés + 2,5% (boissons, gâteaux, crèmes, sorbets, glaces, confiserie) .
Quelques données de l'évolution de la consommation de certains aliments en pourcentage par
repas entre 1960 et 2006 :
1960 2006
Viandes 60 56
Oeufs 5 2
Légumes frais 15 11
féculents 9 6
Boissons sucrées 4 30
L'effet du temps sur la consommation est très significatif et se révèle peu positif. Cependant,
les modifications alimentaires ne sont pas prêtent de s'arrêter puisqu'environ 70% des produits
qu'on consommera d'ici quelques décennies n'existent pas encore.
La façon de s'alimenter dépend de nombreux facteurs comme l'âge, le sexe mais également les
revenus.
Une question d'environnement : les maladies liées à l'alimentation touche majoritairement les
populations à faible revenu.
Les cadres ne consomment pas les mêmes aliments que les ouvriers. Les populations
faiblement éduquées ont une consommation élevée d'aliments prêts à manger gras et salés. De
plus, ils consomment moins d'aliments favorables à leur santé que les riches ( moins de fruits,
de légumes, de produits laitiers, de poisson, de produits frais en général ). La principale
explication de cette surconsommation de ces produits les plus denses en calories résident dans
leur prix peu élevé. Une alimentation favorable à la santé coûte plus cher qu'une alimentation
constituée de produits énergétiques ( très riches en lipides et en sucres ). Par conséquent les
maladies liées à l'alimentation résulte de ce que consomment les individus. Ce sont donc les
classes sociales défavorisées les plus touchées par les maladies liées à l'alimentation. Pour
démontrer cette affirmation, voici un tableau réalisé par les données du ministère des affaires
sociales en 2004 :
TEXTE 2 : duchampalatable.inist.fr
Si le surpoids et l’obésité augmentent dans toutes les classes sociales, ils ne suivent
pas le même rythme. La hiérarchie sociale est ici déterminante. Les femmes cadres avec un
indice de masse corporelle, défini comme le poids divisé par le carré de la taille exprimé en
kg/m². Il permet d’estimer la corpulence d’une personne. (IMC) moyen de 23 sont 4 fois
moins touchées par l’obésité (4%) que les ouvrières (16%) dont l’IMC moyen est déjà de 25
(limite basse du surpoids).
La sociologie s’est depuis longtemps intéressée à cette structure sociale des pratiques
de consommation alimentaire, entre poids des revenus, goûts et identité collective, éducation
et reproduction, groupe social et rapport de domination.
Faustine Régnier, sur la base de 85 entretiens dont une grande partie de femmes,
retrouve tout d’abord une catégorisation proche de celle de Bourdieu dans les années 70 [1],
avec 4 positions vis-à-vis des normes de corpulence et d’alimentation saine.
• Les classes populaires, sans ce type d’espoir ou conscientes d’un certain hors jeu de ce point
de vue, adoptent une position critique vis-à-vis de normes qui sont alors perçues comme des
formes de la domination qu’elles subissent. La méfiance, concernant les médias et le corps
médical, renforce et est renforcé par des pratiques alimentaires enchâssées dans l’histoire
familiale et des sociabilités identitaires.
• Enfin, les catégories pauvres et précaires sont trop préoccupées par le simple fait de
se nourrir pour se positionner réellement par rapport à des normes. Essentiellement centrées
sur la famille, il s’agit pour ces femmes très défavorisées de réussir à nourrir les enfants et de
suivre leurs préférences pour « éviter le gâchis ».
Le coût pour le budget des ménages continue de jouer sur le choix alimentaire. Les
légumes et fruits, surtout frais, sont souvent considérés comme trop chers par les catégories
modestes, ce qui en fait donc un marqueur social pour les classes aisées ou moyennes. Si
l’intégration sociale est devenue au fil des dernières décennies de plus en plus liée à la
capacité de participation à la consommation de masse, l’alimentation joue, partiellement, le
rôle d’expression de la liberté, du choix et d’une certaine opulence pour les classes populaires
contemporaines ; rôle qu’il a pu jouer pour la bourgeoisie de la fin du XIX e siècle. Ceci dans
un contexte social difficile de montée continuelle de la précarité et du chômage qui fait de la
consommation une valeur refuge, compensatoire et symbolique.
Les normes de minceur et de santé si elles sont présentes, à tous, par les médias, ne
s’expriment, malgré tout, pas aussi simplement. Le surpoids, voire l’obésité, étant plus
courant dans les classes populaires, est plus proche d’une « norme de classe ». La norme de
minceur est alors plus facilement perçue comme extérieure, et expression d’une domination,
d’une volonté de contrôle sur les corps. La santé est en effet perçue, par les classes aisées,
comme le fruit d’un mode de vie sur la longue durée, d’une hygiène de vie, d’une
alimentation équilibrée et d’activités physiques. Alors qu’elle est comprise, dans les classes
populaires, par le repos et une forte satiété reconstituante de la force de travail. La maladie est
accidentelle (une des personnes interrogées déclare avoir « attrapé le cholestérol en mangeant
trop de beurre »). Le retour à la santé sera alors le produit d’un traitement. Un régime sera
donc vu comme un soin médical spécifique.
Les enfants sont l’objet d’une véritable éducation alimentaire dans les classes aisées.
Une forme de rigueur morale et de contrainte est très tôt mise en place et participe d’une
stratégie éducative globale de la part des parents. Dans les classes populaires la mère est, le
plus souvent, seule chargée de l’éducation, surtout domestique (s’habiller, se laver, se
nourrir...). Le manque, sinon la faim, est un souvenir familial, ou une peur, qui reste très
présent, même lorsqu’il n’est plus justifié depuis parfois plus d’une génération. L’enfant ne
doit pas donner l’air de « manquer » à l’extérieur du foyer. La perception d’une vie à venir
peu amène conduit aussi à ne pas priver l’enfant des plaisirs qu’il peut prendre ainsi à bon
compte. Avoir des rondeurs, c’est ainsi être bien portant. Et l’inquiétude sur les conséquences
de santé d’une obésité précoce, comme le diabète de type 1, ne vient que tardivement, souvent
trop tardivement.
Si les normes nutritionnelles actuelles ont une vraie vocation de santé soulignée par
l’expansion de l’obésité, elles réinstallent aussi une entreprise morale hygiéniste. Ce faisant,
elles tendent à normaliser et homogénéiser des comportements de consommation et des
pratiques alimentaires qui sont fortement liées à des représentations et des identités collectives
de classe. Des classes inégales dans un jeu qui favorise les plus aisés (porteurs de la norme et
intégrés), et semble aux classes populaires une entreprise de discipline, de moralisation des
styles de vie, de contrôle sur les goûts et de domination (une biopolitique pour parler comme
Foucault).
Pour l’auteur, à ignorer cette complexe articulation de la société face aux normes
nutritionnelles, les campagnes de santé publique prennent même le risque d’être contre-
productives.
Source
Philippe Drouin
TEXTE 3 : www.turmeliere.org
Le repérage de ce qui est aliment pour nous est l'un des premiers et des plus
importants apprentissages, il signe en quelque sorte l'entrée dans une communauté.
L'enfant vit cette expérience lorsqu'il fréquente les milieux socio-éducatifs : crèche,
école, centre de loisirs. S'il trouve en ces lieux de quoi élargir son répertoire alimentaire,
il adopte en général les choix de groupe, tout en conservant ses préférences et habitudes
personnelles ou familiales. Faire comme les autres, manger comme eux, c'est s'intégrer
dans le groupe, faire partie de la bande, ne pas être exclu.
Toutes les enquêtes de consommation mettent en évidence la relation qui existe
entre catégories socio-professionnelles et alimentation. Accepter les habitudes
alimentaires du groupe social dans lequel on évolue, les faire siennes, c'est s'intégrer
dans ce groupe, devenir membre de cette communauté. Les menus, la préparation des
aliments, les manières de table, ne seront pas les mêmes si l'on se définit comme
membre de la classe populaire ou de la classe bourgeoise. Tout en étant dépendant de
notre milieu d'origine, notre manière de faire en matière alimentaire révèle notre désir
d'être reconnu comme faisant partie de ce milieu, ou du milieu supérieur.
Le goût, en matière alimentaire dévoile les rapports que nous désirons entretenir au monde,
au corps, et est caractéristique de chaque classe sociale. Pierre BOURDIEU parle ainsi longuement
des critères qui déterminent dans les différentes classes sociales si une nourriture est convenable.
Ces critères ne sont pas seulement liés à la "configuration approuvée du corps perçu et en particulier
de sa grosseur ou de sa minceur" (20). Entre en lignes de compte également la manière de tenir le
corps dans l'acte de manger, elle-même significative de la philosophie caractéristique à chaque
classe. Ainsi dans les classes dites populaires, le repas est placé sous le signe de l'abondance et de
la liberté (plats uniques, pas de mesure de parts, pas de superflu en matière de décoration de la table,
etc…) ; l'important est de prendre du plaisir ensemble et tant pis pour les manières ! A l'inverse,
l'appétit immédiat est réfréné dans la bourgeoisie. Manger dans les formes est une manière de rendre
hommage aux hôtes et à la maîtresse de maison mais aussi "une manière de nier la consommation
dans sa signification et sa fonction primaire, essentiellement communes, en faisant du repas une
cérémonie sociale, une affirmation de tenue éthique et de raffinement esthétique. Ceci tend à déplacer
l'accent de la substance et de la fonction vers la forme et la manière et par là… dénier la réalité
grossièrement matérielle de l'acte de consommation… ou, ce qui revient au même, la grossièreté
bassement matérielle de ceux qui s'abandonnent aux satisfactions immédiates de la consommation
alimentaire" (21).
TEXTE 4 : http://fondation.nestle.fr/comprendre-les-comportements-alimentaires
Le modèle familial
L’une des pistes de recherche à suivre ne réside-t-elle pas dans l’observation
des appartenances familiales ? Parmi les appartenances collectives, la parenté et la
famille sont structurantes à la fois pour la société et pour les manières de manger.
Selon l’enquête Histoire de vie de l’Insee réalisée en 2003, à la question « qu’est-ce
qui permet le mieux de dire qui vous êtes ? », 86% des personnes interrogées citent
leur famille, bien avant d’autres réponses comme leur métier (40%) et leurs amis
(37%).
Si les relations de parenté sont importantes pour comprendre l’alimentation,
c’est aussi parce qu’elles constituent un système de normes qui souvent s’opposent
à celles du travail. Le « modèle » français des repas semble construit en référence à
un environnement familial. Son homologue américain est plus marqué par la sphère
professionnelle.
Si les manières de manger semblent aujourd’hui se diversifier, on constate
une dynamique semblable du côté des structures familiales. Les familles
recomposées représentent 10% de l’ensemble, et leur nombre va croissant. Dès lors,
la variabilité des pratiques alimentaires ne serait-elle pas le reflet de celle des formes
de la famille ? On ne serait plus alors face à une absence de règles, mais face à une
mutation des règles familiales, qui influencent nos manières de manger.