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panorama général
Éric Barbry, Frédéric Atellian
Dans LEGICOM 1997/1 (N° 13), pages 5 à 16
Éditions Victoires éditions
ISSN 1244-9288
DOI 10.3917/legi.013.0005
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Résumé
L
A musique adoucit les mœurs dit-on. Peut-être est-ce pour cette raison,
qu’en ces temps de crises nous en soyons bercés en permanence. Nul ne Le régime juridique de
l’œuvre musicale est fon-
peut y échapper. Outre ses manifestations les plus classiques telles que cièrement complexe, il
les concerts et autres spectacles, la musique nous accompagne dans nos activi- dépend d’abord de
tés quotidiennes (magasins, restaurants, pour les plus chanceux, au bureau...) et l’œuvre elle-même et de
se trouve déjà confrontée aux nouvelles technologies (multimédia de support ou la reconnaissance de son
sur réseau). originalité pour la protec-
tion par le droit d’auteur.
Celle-ci est soumise à
La musique adoucit à ce point nos mœurs qu’elle arrive même à nous faire l’appréciation par le juge
oublier les réalités juridiques qui président à sa protection en tant qu’œuvre de du caractère original de
l’esprit, à celle de ses auteurs et des bénéficiaires de droits voisins. ses éléments constitutifs
(mélodie, harmonie, ryth-
À titre d’exemple, combien d’entreprises se sont posé la question de savoir si mique, et éventuellement
elles pouvaient librement agrémenter, d’une ou plusieurs œuvres musicales, la
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paroles).
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L’œuvre musicale originale est à elle seule une œuvre complexe qui combine
une mélodie, une harmonie et une rythmique associées ou non à des paroles.
Mais le caractère complexe de la reconnaissance de l’œuvre musicale provient
également du fait que l’œuvre musicale première peut être la source de très
nombreuses œuvres secondes adaptations ou œuvres composites.
L’œuvre musicale, avec ou sans paroles, est donc assurément, par nature, une
œuvre de l’esprit, et ce, qu’elle soit musique de rue ou de chambre... ; qu’il
s’agisse de musique classique, rock, rap, techno ou funk... bien orchestrée ou
cacophonique... (4) ; musique de supermarché, refrain publicitaire ou musique
militaire. Il en sera ainsi, que la musique soit le fruit du labeur de l’homme,
Les compositions musi- seul avec son instrument, ou entouré d’outils informatiques toujours plus per-
cales sont des œuvres formants. Enfin, l’œuvre musicale existe, qu’elle soit le fruit d’un long travail
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3. L 112-2 du code de la propriété intellectuelle de Platas Civ. (1re), 1er juillet 1970, D, 1970. 73,
(CPI). note Edelman.
4. Tout cela étant affaire de goût, de forme 6. Lucas (A.) et Lucas (J.-H.), “Traité de la
d’expression, de genre, de mérite ou de destination. Propriété Intellectuelle”, Litec, 1104 pages, n° 84.
5. Crim., 13 déc. 1995, Mlle Chante le blues, bull. 7. Dictionnaire Robert.
crim., n° 378, RIDA, juillet 1996, 279 & Manitas
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Droits d'auteur et droits voisins en matière musicale : panorama général
L’œuvre musicale est aussi basée sur un rythme. Le rythme est défini comme
« un groupement de sons selon une accentuation régulière, dont la dominante
revient à des intervalles périodiques »(9). Le rythme est indépendant de la
durée d’audition des sons et de la rapidité d’exécution.
Plus simplement, on peut considérer dans un langage commun que le rythme
correspond à la sonorité de base d’un style particulier à chaque catégorie de
musique. Nous avons ainsi des rythmes aussi divers que ceux du rockn’ roll,
du jazz, de la saoul, de la techno, de la house music, de salsa, du blues... Un
même rythme peut varier en fonction du tempo c’est-à-dire de sa vitesse d’exé-
cution.
Mais au sens du droit d’auteur, rares sont les créations stricto sensu de nou-
veaux rythmes. Il est ainsi très difficile, voire impossible, de reconnaître l’émer-
gence d’un nouveau rythme qui serait détaché de tout rythme préexistant et de
se l’approprier. Qui pourrait en effet revendiquer la création du rythme rockn’
roll, du blues ou de la house music. Les unes et les autres étant souvent liées
et la source d’inspiration les unes des autres.
Même s’il n’est pas impensable de croire en l’originalité intrinsèque d’un ryth-
me nouveau, le rythme ne suffit donc généralement pas à conférer à une œuvre
musicale un caractère original. Il lui faut donc être associée aux autres éléments Le caractère original
de l’œuvre que constituent la mélodie et l’harmonie. d’une composition se
définit à partir de sa
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8. Cf. sur ce point l’excellente analyse de Desbois, 179 - Cf. sur ce point Verrecchia (Jacques), Lettre
(H.), Le droit d’auteur en France - 1978, Dalloz. du Disque, n° 26 - 11 avril 1995.
9. Lucas (A.) et .Lucas (J.-H.), précité. 11. Lucas (A.) et Lucas (J.-H.), précité.
10. CA Paris, 28 septembre 1978, RIDA 7989, p.
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La musique et le droit
Rappelons enfin que l’article L 112-4 dispose que : « le titre d’une œuvre de
l’esprit, dès lors qu’il présente un caractère original, est porté comme l’œuvre
elle-même ».
Il n’est pas dans notre propos de traiter de l’ensemble de la jurisprudence, assez
floue du reste quant à la reconnaissance de l’originalité d’un titre, mais il est
Le titre d’une chanson constant que plus le titre empruntera au langage commun, moins il sera pos-
est protégeable dans les sible de lui reconnaître une quelconque originalité.
mêmes conditions d’ori-
ginalité, ce qui exclut les
termes génériques.
Ainsi, si le titre “Amour” n’est assurément pas protégeable, pas plus que “Mon
amour”, il en est autrement d’un titre comme “Parlez moi d’amour”(12) ; il en
sera de même de l’impossible protection de “La joie“ alors que devrait être
reconnue celle de “Y a de la joie”.
Encore qu’en cette matière, il ne soit pas exclu que la notoriété d’un auteur ou
d’une œuvre ne soit pas, malgré tout, de nature à influencer le juge dans la
détermination de l’originalité d’un titre par un critère d’antériorité. Influence
d’autant plus grande que la reprise sera inspirée par une volonté de confusion
ou de parasitisme. Ainsi, on peut s’interroger sur la possible protection de titre
comme La mer de Charles Trenet.
Pour être protégée, l’œuvre doit avoir un auteur. La France ne reconnaît pas, à
l’inverse d’autres pays, de droits d’auteurs sur de simples enregistrements
comme le bruit de la mer, le chant des oiseaux(13) ou des baleines. Même si
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Très souvent en effet l’œuvre est le fruit du travail d’un musicien pour la
musique et d’un parolier pour le texte. L’œuvre finale est donc a priori une
œuvre de collaboration qualifiée ainsi par l’article L 113-2 du code de la pro-
priété intellectuelle(14). Il en sera d’autant plus ainsi que le fruit du travail de
l’un et celui de l’autre sont souvent intimement liés et qu’il devient impossible
d’affecter une paternité distincte des deux auteurs sur l’œuvre. L’œuvre musi-
12. Cass. (1re ch. civ.), 17 décembre 1991 - même note Plaisant ; RTD com. 1980, p. 346, obs. Françon.
si l’arrêt ne porte pas en tant que tel sur la ques- 14. Article L 113-2 : « Est dite de collaboration
tion de l’originalité. l’œuvre à la création de laquelle ont concouru plu-
13. CA Paris (4e), 6 octobre 1979. - D. 1981, p. 190, sieurs personnes physiques ».
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Droits d'auteur et droits voisins en matière musicale : panorama général
cale étant alors : « la propriété commune des coauteurs... qui exercent leurs
droits d’un commun accord »(15). A l’inverse, s’il est établi que l’auteur de la
musique et celui des paroles ont chacun fait un acte de création distinct, et
même si l’œuvre finale reste assurément une œuvre de collaboration, chacun L’œuvre qui allie
d’eux disposera d’un droit distinct sur sa propre création. Chaque auteur pourra musique et textes est le
alors exploiter sa contribution personnelle séparément « sans toutefois porter plus souvent une œuvre
préjudice à l’exploitation de l’œuvre commune »(16). A titre d’exemple, de collaboration, pro-
priété commune des
l’auteur de la musique pourra seul autoriser la réutilisation de celle-ci dans une
auteurs. Dans certains
publicité, l’auteur des paroles, leur possible édition littéraire. cas chaque auteur pour-
La difficulté croît encore lorsque l’œuvre musicale est le fruit d’un travail ra néanmoins utiliser sa
d’équipe, d’un “groupe” selon la terminologie consacrée. Si, à trois ou quatre contribution séparément.
auteurs, les droits peuvent encore être exercés d’un “commun accord”, au-delà,
la mission devient improbable, pour ne pas dire impossible.
Cela explique souvent les nombreuses discordances entre les membres d’un
même groupe et les séparations fréquentes permanentes ou temporaires. Cela
explique également la raison pour laquelle certains groupes optent pour une
solution plus simple même si elle est tout à fait injuste : l’affectation de la
paternité de la création au leader du groupe.
15. L 113-3 CPI. 17. Cf. sur ce point Guenneteau (C), “Musique et
16. Article précité. œuvres audiovisuelles”, dans ce présent Légicom.
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La musique et le droit
Sous réserve de leur caractère original et qu’elles aient été autorisées par
l’auteur de l’œuvre première, ces nouvelles créations seront autant d’œuvres
protégées par le droit d’auteur.
Rappelons en effet que l’article L 112-3 du code de la propriété intellectuelle
dispose que : « Les auteurs de traductions, d’adaptations, transformations ou
arrangements des œuvres de l’esprit jouissent de la protection instituée par le
présent code sans préjudice des droits de l’auteur de l’œuvre originale ».
Les arrangements consistent dans « la transposition d’une œuvre écrite pour un
instrument à un autre, ou de la réduction d’une symphonie à l’usage d’un seul
instrument ou de plusieurs »(18).
L’arrangeur n’introduit aucune mélodie originale et ne se permet aucune varia-
tion. On considère cependant qu’il manifeste sa personnalité par les choix qu’il
opère dans la transposition, qui se traduisent par exemple dans l’éviction ou la
mise en avant de certains thèmes. Sa création personnelle s’ajoute alors à celle
L’arrangeur et le compo-
de l’œuvre première. Il exploite la pensée musicale première sous une autre
siteur d’une variation ne
bénéficient pas des forme. Mais, à défaut de manifester sa puissance créatrice dans la liberté de
mêmes droits, la condi- choix dont il dispose, l’arrangeur n’acquerra peut-être pas le statut d’auteur
tion d’auteur d’une d’une œuvre dérivée.
œuvre dérivée n’est pas
reconnue au premier
alors qu’elle peut l’être Les variations pour leur part relèvent d’un véritable travail de modification ou
pour le second. de transformation partielle, le compositeur est, dans ce cas de figure, beaucoup
moins soumis à l’œuvre première car, « s’il emprunte à une composition pré-
existante un thème ou plusieurs mélodies, il n’asservit pas à un aménagement
prédéterminé »(19).
Plus délicates à manier encore sont les toutes nouvelles formes d’œuvres
secondes que les techniques modernes autorisent. Nous voulons parler des tech-
Les techniques de sam- niques de Sampling ou de l’échantillonnage musical et le développement de
pling ou encore échan- “duos virtuels”.
tillonnage musical qui Qui aurait pu imaginer il y a encore quelques temps Edith Piaf chantant Tu me
permettent une utilisa-
tion détournée de sons
fais tourner la tête en duo avec Etienne Daho ? Aujourd’hui la chose est non
préenregistrés ne don- seulement possible, mais l’œuvre commercialisée ou, pour le moins, radiodif-
nent pas toujours nais- fusée. Il faudra bien évidemment considérer ce duo comme révélant une nou-
sance à des œuvres ori- velle œuvre protégée sous réserve non seulement de bénéficier de l’ensemble
ginales, ce caractère des autorisations nécessaires et de préserver le droit moral des auteurs qui pour-
restant soumis à l’appré- raient sans aucun doute soulever la dénaturation de l’œuvre.
ciation de juges du fond.
18. Lucas (A.) et Lucas (J.-H.), précité, n° 137. 19. Lucas (A.) et Lucas (J.-H.), précité, n° 138.
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Droits d'auteur et droits voisins en matière musicale : panorama général
N’oublions pas enfin que les paroles de l’œuvre peuvent être traduites en toutes
langues. Que dire de la traduction quasi mondiale de Comme d’habitude, dont
la version américaine My way apparaît au plus grand nombre comme la version
originale. L’article L 112-3 là encore rappelle que l’auteur de traductions des
œuvres de l’esprit jouissent de la protection instituée par le présent code.
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La musique et le droit
On parle donc de reproduction à chaque fois que l’œuvre est incorporée dans
un support. C’est notamment le cas en matière musicale lorsque l’on imprime
la partition d’une musique ou les textes d’une chanson, que l’on presse un
disque (autrefois vinyle et maintenant compact), une cassette, ou que l’on
numérise l’œuvre pour qu’elle soit intégrée dans un produit multimédia sur sup-
port ou dans le cadre d’un site Web. La reproduction consiste aussi dans la
fabrication de bandes et cassettes (audio et vidéo) et de pellicules de films
contenant l’œuvre.
Une personne ou une entreprise qui veut reproduire une œuvre musicale doit
au préalable en demander l’autorisation à l’auteur, hors le cas des exceptions
prévues au code et notamment la reproduction à usage privé du copiste et non
destinée à un usage collectif.
b) Le droit de représentation
Le droit de représentation est défini à l’article L 122-2 du code et précise que :
« La représentation consiste dans la communication de l’œuvre au public par
un procédé quelconque, et notamment :
1°/ Par récitation publique, exécution lyrique, représentation dramatique, pré-
sentation publique, projection publique et transmission dans un lieu public de
l’œuvre télédiffusée ;
2°/ Par télédiffusion. La télédiffusion s’entend de la diffusion par tout procédé
de télécommunication de sons, d’images, de documents, de données et de mes-
sages de toute nature.
Est assimilée à une représentation l’émission d’une œuvre vers un satellite ».
Les autorisations pourront tout aussi bien, selon les cas, être accordées par les
sociétés de perception de droits d’auteurs comme la SACEM et la SDRM lorsque
les auteurs en seront sociétaires.
L’auteur qui dispose également des droits de traduction, de transformation,
d’arrangement et d’adaptation devra consentir à toute création d’une œuvre
seconde tel que nous les avons décrites plus haut.
La cession de ses droits par l’auteur de l’œuvre musicale peut être totale ou
La cession des droits si partielle, réalisée à titre gratuit ou onéreux. Mais, comme le rappelle le code
elle est faite à titre oné- dans son article L 131-4, cette cession « doit comporter au profit de l’auteur
reux doit, sauf à de la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de
rares exceptions, être l’exploitation ». La jurisprudence récente nous enseigne que cette rémunération
proportionnelle au prix
doit être proportionnelle au prix de vente au public. Seules quelques exceptions
de vente au public.
sont prévues dans le code de la propriété intellectuelle qui autorisent la rému-
nération forfaitaire.
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Droits d'auteur et droits voisins en matière musicale : panorama général
L’article L 121-2 pour sa part expose que : « L’auteur a seul le droit de divul-
guer son œuvre. Sous réserve des dispositions de l’article L 132-24, il déter-
mine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci. Après sa mort,
le droit de divulgation de ses œuvres posthumes est exercé leur vie durant par
le ou les exécuteurs testamentaires désignés par l’auteur.
A leur défaut, ou après leur décès, et sauf volonté contraire de l’auteur, ce droit
est exercé dans l’ordre suivant : par les descendants, par le conjoint contre
lequel n’existe pas un jugement passé en force de chose jugée de séparation de
corps ou qui n’a pas contracté un nouveau mariage, par les héritiers autres que
les descendants qui recueillent tout ou partie de la succession et par les léga-
taires universels ou donataires de l’universalité des biens à venir. Ce droit peut
s’exercer même après l’expiration du droit exclusif d’exploitation déterminé à
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22. Cass. (1re ch. civ.), 4 avril 1991. (1re ch.), 15 mai 1991 - CA Paris (1re ch A), 20
23. CA Paris (25e ch.), 18 mars 1988 - TGI Paris février 1990.
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Il ne saurait être question de traiter d’un panorama des droits relatifs à l’œuvre
musicale sans aborder le rôle éminemment important d’intervenants tels les
artistes-interprètes, les éditeurs de phonogrammes et de vidéogrammes ou enco-
re les entreprises de communication audiovisuelle, autant de titulaires de droits
voisins.
Malgré un tronc commun d’exceptions, les artistes-interprètes, producteurs de
phonogrammes, de vidéogrammes et entreprises de communication audiovi-
suelle bénéficient de droits trop souvent oubliés.
24. Il semble que ce fut l’option retenue par 26. D’autres cas d’exception sont prévus dans le
Georges Michael. CPI qui n’affectent pas le monde de la musique.
25. L 221-3 CPI.
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Droits d'auteur et droits voisins en matière musicale : panorama général
musiciens, ...) ont droit au respect de leur nom, de leur qualité et de leur inter-
prétation. Ce droit, comme celui des auteurs est inaliénable, imprescriptible et
attaché à la personne de l’artiste. Il n’est toutefois transmis aux héritiers qu’aux
seules fins de « protection de l’interprétation et de la mémoire du défunt »(27).
Au plan du droit patrimonial, l’artiste dispose, à titre exclusif, du droit d’auto-
riser par écrit la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication
au public, ainsi que de toute utilisation séparée du son et de l’image de la pres-
tation lorsqu’elle aura été fixée à la fois pour le son et l’image.
Cette fixation et les rémunérations auxquelles elle donne lieu sont régies par
les articles L 762-1 et L 762-2 du code du travail. En substance, et bien que la
formule soit un raccourci, cela revient à dire que lorsque la présence de l’auteur
est nécessaire (concerts, spectacles, enregistrements en studio...) la prestation de
l’artiste sera considérée comme un travail et sa rémunération comme un salaire. Les artistes-interprètes
Lorsque sa présence ne sera plus requise il conservera, moyennant rémunéra- ont droit à rémunération
tion, l’autorisation ou non d’accorder la fixation de son enregistrement et son au titre de leur presta-
tion puis pour la fixation
exploitation. Il ne s’agira plus là de contrat de travail ni de salaire mais bel et de cette interprétation.
bien de rémunérations au titre des droits voisins.
Notons toutefois que la signature d’un contrat conclu entre un artiste-interprète et
un producteur en vue de la réalisation d’une œuvre audiovisuelle vaut autorisa-
tion de fixer, de reproduire et de communiquer l’interprétation au public.
Encore faut-il, comme le précise l’article L 212-4 du code de la propriété intel-
lectuelle, que le contrat fixe une rémunération distincte pour chaque mode
d’exploitation de l’œuvre. De même les artistes-interprètes ne peuvent interdire la
Si leur prestation s’ins-
reproduction et la communication au public de leur prestation si elle est acces- crit dans une œuvre
soire à un événement constituant le sujet principal d’une séquence d’une œuvre dans laquelle elle n’est
ou d’un document audiovisuel(28). qu’accessoire les droits
Pour leur part, les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes, c’est-à- voisins consentis aux
dire les personnes physiques ou morales qui ont l’initiative et la responsabilité artistes-interprètes ne
leur permettent pas
de la première fixation d’une séquence de sons (phonogramme) ou d’une d’interdire la reproduc-
séquence animée d’images sonorisées ou non (vidéogramme), ont seuls la faculté tion et la communication
d’autoriser toute reproduction, mise à disposition du public par vente, échange, au public de cette pres-
louage ou communication au public. tation.
Ainsi, l’autorisation du producteur sera indispensable avant toute communica-
tion de tout ou partie d’un CD musique ou sa reproduction.
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La musique et le droit
Exception aux droits de toute nature qui n’ont pas le caractère d’une correspondance privée ».
dont sont investis les
Les entreprises de communication audiovisuelle, télévisions, radios et aujour-
artistes-interprètes et les
producteurs, la licence d’hui éditeurs de télématique, disposent du droit d’autoriser la reproduction de
légale prévoit que ceux- leurs programmes, ainsi que leur mise à la disposition du public par la vente,
ci ne peuvent s’opposer le louage ou l’échange, leur télédiffusion et leur communication au public dans
à la communication au un lieu accessible à celui-ci, moyennant paiement d’un droit d’entrée.
public du titre si celui-ci
a été publié à des fins
de commerce.
*
C’est, enfin, en raison de cette complexité que les États, dans leur grande majo-
rité, ont décidé de renforcer, à l’échelon international, la protection des auteurs,
des artistes-interprètes et exécutants des œuvres et particulièrement des œuvres
musicales, notamment pour leur utilisation dans le cadre de nouvelles techno-
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Éric Barbry
Cabinet d’avocats Bitoun et associés
Président de l’association Cyberlex
et Frédéric Atellian
DEA droit des affaires
Paris I, Etudiant EFB
29. Cf. sur ce point l’article de Verrecchia (Jacques) 31. Société pour le droit à la reproduction mécanique.
“Le piratage phonographique” dans le présent 32. Société des auteurs compositeurs dramatiques.
Légicom. 33. Cf. les informations diffusées quant à l’adop-
30. Cf. sur ce point l’article de Bony (L.), “La tion de ces textes sur Internet à l’adresse suivante :
SACEM et les diffuseurs”, dans le présent Légicom. http://www.legalis.net/legalnet.
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