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4 LE POTENTIEL D’ACTION

Les neurones peuvent recevoir et générer des messages électriques. Pour comprendre
comment ils peuvent générer un tel message, nous allons examiner le fonctionnement du
neurone au repos puis lorsque les évènements conduisent à leur activation.

4.1 Le potentiel de repos

Lorsque le neurone est au repos et que l’on place deux microélectrodes réceptrices, l'une à la
surface de la membrane cytoplasmique du neurone et l'autre à l'intérieur de celui -ci, et
que l'on relie celles-ci à un appareil de mesure du type oscilloscope, on s'aperçoit qu'il existe
une différence de potentiel d'environ - 70 mV (Figure 11). Le milieu intracellulaire est
électriquement négatif par rapport au milieu extracellulaire ! Cette différence de potentiel
est appelée potentiel de repos du neurone ou potentiel de membrane. Cette polarisation
membranaire de repos est stable dans le temps, tant que le neurone ne reçoit pas de
stimulations d’autres neurones.

Figure 11. Schéma de l’enregistrement du potentiel


au repos dans le corps cellulaire d’un neurone. Une
des électrodes du voltmètre doit être placée à
l’intérieur de la cellule tandis que la seconde doit
être placée à l’extérieur. Le signe + représentent les
ions positifs présents dans le milieu, le signe –
représente les ions négatifs.

4.1.1 Pourquoi le potentiel au repos est-il négatif ?

Le milieu neuronal est fortement concentré en ions (c’est-à-dire en charges électriques). On y


trouve essentiellement des cations sodium Na+, calcium Ca2+, potassium K+ et Magnésium
Mg2+ et des anions chlorure Cl-.
Le potentiel de repos est lié aux différences de concentration en ions entre l’intérieur et
l’extérieur de la membrane. Le potentiel au repos est négatif car il y a plus de cations
(donc de charges électriques positives) à l’extérieur de la cellule qu’à l’intérieur.

4.1.2 Comment s’effectue la répartition des ions de part et d’autre de la membrane ?

Les ions peuvent circuler entre l’intérieur et l’extérieur des neurones grâce à des protéines
situées dans la membrane cytoplasmique et qui se comportent comme des portes qui laissent
entrer chacune un type d’ion bien spécifique : on appelle ces protéines des canaux ioniques.

Des canaux ioniques de fuites laissent circuler librement les ions selon deux forces
naturelles :
o Une force chimique qui pousse les ions du milieu le plus concentré vers le milieu le
moins concentré pour tendre vers l’égalité des concentrations entre le milieu intérieur
et le milieu extérieur.
o Une force électrique qui attire les charges opposées entre elles et repoussent les
charges identiques

Si les ions ne circulaient que sous l’influence de ces deux forces, le potentiel au repos devrait
être nul. Il devrait y avoir autant de chaque type d’ions à l’intérieur et à l’extérieur de la
cellule. Or, au repos, le potentiel est bien négatif et on peut notamment observer qu’il y a plus
de Na+ à l’extérieur qu’à l’intérieur et plus de K+ à l’intérieur qu’à l’extérieur de la cellule
(un déséquilibre très important pour que le neurone puisse générer un message nerveux). On
peut donc en conclure que d’autres phénomènes interviennent !!

Pour qu’un déséquilibre de concentration en Na+ et en K+ soit possible entre les milieux
intérieur et extérieur, il y existe un transport actif des ions par l’intermédiaire de protéines
dites pompes sodium/potassium. Celles-ci rejettent activement le Na+ hors de la cellule et
récupèrent le K+ à l’intérieur. A chaque fois qu’elles entrent en action, ces pompes rejettent à
l’extérieur du neurone exactement 3 Na+ en même temps qu’elles font rentrer 2 K+. 70% de
l’énergie consommée par le neurone sert au fonctionnement de ces pompes. Pour fonctionner,
elles consomment énormément d’ATP et pour cette raison elles sont également appelées
pompes Na+/K+ ATPase.
A retenir :

Le potentiel au repos n’est pas une valeur absolue: c’est une valeur relative : il correspond à la
différence de concentration ionique entre l’intérieure et l’extérieur de la cellule.

Sa valeur peut changer (le -70mV est donné à titre indicatif comme valeur moyenne): certains
phénomènes comme la potentialisation à long terme peut changer cette valeur (voir chapitre
5).

4.2 Le potentiel d’action (PA)

Le potentiel d'action (PA) correspond à une inversion brusque, transitoire et locale du


potentiel de repos, l’intérieur de la cellule devenant positif par rapport à l’extérieur : on parle
de dépolarisation. C’est un phénomène qui naît suite à une stimulation électrique de la
cellule et qui permet la propagation d’un influx électrique du soma (zone gâchette) à la partie
terminale de l’axone (synapse). Voyons les différentes phases du PA en un point donné de la
membrane.

4.2.1 Phase 1 : la dépolarisation

Le potentiel d’action repose sur l’ouverture et la fermeture de protéines sensibles au voltage


qui sont nommées canaux sodium voltage-dépendants ou canaux potassium voltage-
dépendants.

Quand un neurone est au repos, les canaux voltage-dépendants sont fermés. Lorsqu’une
stimulation apparaît et qu’elle atteint le seuil d’excitation (environ -40mV), cela entraîne
l’ouverture de canaux sensibles au voltage, les canaux sodium voltage-dépendants, qui
laissent entrer un nombre important d'ions Na+ dans le milieu intracellulaire. Cette entrée
massive dépolarise le neurone (l’intérieur devient positif).

4.2.2 Phase 2 : La repolarisation

Les canaux potassium voltage-dépendants vont alors s’ouvrir et laisser sortir le potassium
intracellulaire, tandis que les canaux Na+ se referment. La sortie des ions potassium va alors
provoquer la repolarisation de la membrane (l’intérieur redevient négatif).

4.2.3 Phase 3 : l’hyperpolarisation

Les canaux potassium vont rester plus longtemps ouverts que ne l’avaient été les canaux
sodium. Il y a donc plus de K+ qui vont sortir du neurone que de Na+ qui y sont rentrés. Ceci
va finir par provoquer une hyperpolarisation de la membrane (négativité plus importante
qu’au repos). Cette phase est également appelée réfractaire. Elle empêche un autre PA de se
produire immédiatement après le premier (voir plus loin).

4.2.4 Phase 4 : retour au potentiel au repos

Enfin, les concentrations au repos vont être rétablies grâce à l’action des pompes Na+/K+. La
membrane va donc retrouver son potentiel de repos. La figure ci-dessous représente les
changements de voltages observés lors de la génération d’un PA en un point de la membrane
(Figure 12).

Figure 12. Schéma des différentes phases d’un potentiel d’action.

4.3 La propagation du potentiel d’action

4.3.1 Le PA est une onde d’échanges ioniques

Le message électrique généré par un neurone est donc différent de celui généré dans un fil
électrique. Dans un fil électrique, les ions circulent en flux continu à la vitesse de la lumière.
Dans le neurone, ce message est plus lent et correspond à une onde d’échange ionique entre
l’intérieur et l’extérieur de la membrane tout le long de celle-ci.

L’influx nerveux est ainsi constitué d’un train de potentiel d’action (PA) le long de l’axone du
neurone. Ainsi, lorsqu’une stimulation atteint le seuil d’excitation, il va y avoir création d’un
potentiel d’action au niveau de la zone gâchette. Cette zone va alors se dépolariser puis se
repolariser. La dépolarisation d’une zone, entraine la dépolarisation de la zone voisine. Ainsi,
pendant que la première zone se repolarise, la zone située juste à côté se dépolarise puis se
repolarise ; cette repolarisation correspondant à une dépolarisation simultanée de la zone
voisine, etc… Ainsi, chaque potentiel d’action déclenche un nouveau potentiel d’action au
niveau d’une partie adjacente de l’axone. Le potentiel d’action ne se déplace donc pas le
long de l’axone mais est généré à différents endroits de l’axone, de proche en proche.

4.3.2 La conduction saltatoire

La vitesse à laquelle se déplace l’influx nerveux est d’autant plus importante que l’axone
présente un diamètre élevé et qu’il est recouvert de myéline. La myélinisation des axones
accélère la conduction de l'influx nerveux d'une façon très originale, sans nécessiter de grands
apports d'énergie supplémentaire et sans occuper beaucoup d'espace supplémentaire. La
myéline entoure l'axone sur des portions de longueur de l'ordre du millimètre. Régulièrement,
la myéline s'interrompt, laissant localement la membrane au contact du milieu extérieur, au
niveau des noeuds de Ranvier. Les canaux sodium et potassium voltage-dépendants sont
confinés aux seuls noeuds de Ranvier et la portion de membrane située entre deux noeuds
peut être considérée comme isolée par rapport au milieu extérieur.

Le mécanisme de propagation est le même que dans le cas de la fibre non myélinisée.
Toutefois, le courant produit par le potentiel d'action ne peut pas agir sur la membrane dans
toute la zone myélinisée. Le courant va donc agir au noeud de Ranvier le plus proche,
dépolarisant au niveau du noeud la membrane, jusqu'au seuil d'ouverture des canaux sodiques.
Le potentiel d'action ainsi saute d'un noeud de Ranvier au noeud suivant, donnant à cette
conduction beaucoup plus rapide que la précédente le nom de conduction saltatoire (par
sauts). Une fibre non myélinisée devrait avoir un calibre de plusieurs centimètres pour
conduire l'influx à la même vitesse (100 m/s) qu'une fibre myélinisée de 20 micromètres de
diamètre (Figure 13).
Figure 13 : Représentation de la conduction saltatoire. Figure adaptée
de http://www.corpshumain.ca/Neurone.php

4.3.3 La loi du tout ou rien

Le potentiel d’action obéit à la loi du tout ou rien : soit il y a lieu et son amplitude est
maximale, soit il n’a pas lieu. Il ne peut pas varier en amplitude. L’intensité d’une stimulation
est alors codée par la fréquence de formation des potentiels d’action. Ainsi, plus l’intensité est
importante, plus la fréquence des potentiels d’action est élevée (figure 14).

Figure 14 : Fréquence des potentiels d’action (PA) d’un neurone impliqué dans la sensation tactile,
pour des objets de différents poids: 30g (A), 20g. (B), 4 g. (C). On peut constater que plus l’objet est
lourd, plus la fréquence* des PA augmente. Par contre, les PA ont toujours la même amplitude. (*
Fréquence de décharge: nombre de fois qu’un PA se produit en 1 seconde).
4.3.4 La période réfractaire

Bien qu’il puisse y avoir plusieurs centaines de potentiel d’action par seconde, il existe une
limite maximale à leur fréquence liée à la période réfractaire (hyperpolarisation de la
membrane). Cette période correspond à une durée au cours de laquelle la membrane n’est plus
excitable. En outre, elle empêche la propagation rétrograde du potentiel d’action. Ainsi,
lorsqu’un potentiel d’action apparaît en un point 1 et donne naissance à un second potentiel
d’action en un point 2, la membrane au point 1 est inexcitable par les courants produits par le
potentiel d’action en point 2. Autrement dit, grâce à la période réfractaire, un PA ne peut pas
se propager de façon bidirectionnelle. A part dans de rares cas, il se propage de façon
unidirectionnelle : de la zone gâchette vers le bouton synaptique.

4.4 Bilan sur les canaux ioniques

On retiendra que les canaux ioniques sont des portes qui permettent aux ions de pénétrer ou
de sortir du neurone. On recense 4 types de canaux ioniques au niveau de la membrane des
neurones:

Les canaux de fuites: constamment ouverts, ils laissent passivement circuler les ions selon
des forces naturelles.

Les pompes Na+/K+: utilisent l’énergie fournie par l’ATP pour transporter activement les
ions K+ et Na+. Elles font entrer les ions K+ dans le neurone et sortir les ions Na+.

Les canaux ioniques voltages dépendants: Situés au niveau de l’axone des neurones, ils
s’ouvrent sous l’action d’un brusque changement de voltage et font activement entrer ou
sortir une catégorie de ions spécifique. On parle alors de canaux ioniques voltages
dépendants potassique (K+), sodique (Na+), calcique (Ca++) ou chlorique (Cl-)

Les canaux ioniques chimio-dépendants (couplés à des récepteurs ionotropiques): Situés


sur les dendrites et le soma des de neurones, ils s’ouvrent sous l’action de
neurotransmetteurs et laissent ainsi entrer un type d’ions précis dans la cellule. On parle
alors de canaux ioniques chimio-dépendants potassique (K+), sodique (Na+), calcique
(Ca++) ou chlorique (Cl-). Nous les aborderons dans le prochain chapitre.

Vidéo 4, le potentiel d’action


http://www.youtube.com/watch?v=cHA5aQH-oJc
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