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Zoubida GUELDI
Le financement de son acquisition représente ainsi un enjeu important à la fois pour les
organismes de crédit qui fournissent les fonds destinés à payer le prix d’achat et pour les
compagnies aériennes dont le souci est de disposer d’avions qui répondent aux besoins de leur
exploitation.
Cet objectif commun se traduit par des relations juridiques souvent complexes selon le mode
de financement retenu par les parties ; lorsque l’avion sert lui-même de garantie au
remboursement du prêt utilisé pour son acquisition, l’on évoque la notion anglo-saxonne de
"aircraft asset based financing" ou financement basé sur l’actif, dont cette synthèse présente
les principaux aspects juridiques qui le caractérisent.
I. - Introduction
1. – Financement classique – Jusqu’à une période relativement récente, le financement
d’acquisition des aéronefs n’engendrait pas de particularité juridique autre que la conclusion
d’un contrat d’achat conclu entre une compagnie aérienne et un constructeur, suivie de la
souscription d’un prêt auprès d’établissements financiers, destiné à en financer l’acquisition.
La compagnie aérienne acquerrait ainsi la propriété de l’aéronef, moyennant dans certains cas
une garantie (i)de l’État ou bien (ii)d’un organisme de crédit à l’export comme l’agence
américaine Export Import Bank ou les agences européennes (Coface, Hermès et Export
Guarantee Credit Department), selon que le produit à financer est d’origine américaine ou
européenne, ou bien encore dans d’autres cas, moyennant la constitution d’une hypothèque
sur aéronef en garantie du prêt consenti.
La trésorerie générée par l’exploitation ne suffisant pas pour autofinancer à la fois les
investissements et les remboursements de dettes, le recours au financement externe pour
conserver un niveau convenable de liquidités disponibles est dès lors apparu comme une
alternative intéressante.
Dans ce contexte hostile, le recours au modèle de financement basé sur l’actif, constitué par
l’aéronef lui-même, ou "leasing financier est apparu comme une solution de rechange,
permettant d’inscrire les opérations en résultant hors bilan national.
L’avion n’est en effet pas un actif comme les autres : il est de grande valeur et il est mobile : il
peut ainsi constituer une garantie intéressante pour un investisseur.
Le vocable de leasing est cependant utilisé pour les financements internationaux au lieu de
crédit-bail, réservé aux opérations réglementées par la loi marocaine (C. com. marocain, art.
431 et s.).
Il est généralement soumis au droit des pays anglo-saxons (ou de common law, i.e Angleterre
ou États Unis d’Amérique) dont il tire l’essentiel des notions.
La plupart des conventions portant sur un financement d’avion basé sur l’actif sont rédigées
en langue anglaise, ce qui les rend d’autant plus complexes à l’égard des pays de tradition
civiliste ou fonctionnant avec des législations codifiées.
6. – Double aspect du leasing financier – L’opération se traduit (i) d’une part par un transfert
des droits de propriété de l’avion et des risques y attachés que l’intermédiaire financier
pourrait encourir, mais dont il prend soin de se prémunir dans la documentation contractuelle
et (ii) d’autre part par une location financement permettant à la compagnie aérienne
d’exploiter l’avion avec faculté de l’acquérir pour sa valeur résiduelle.
Mettre en place un leasing financier n’est pas chose aisée : ceci se traduit par de nombreuses
heures de négociation y consacrées, pour obtenir les meilleures conditions tant financières que
contractuelles. Cette phase dure généralement plusieurs semaines, voire mois.
Ensuite, il reste à gérer le financement pendant dix à quinze ans, avec toutes les incertitudes
que les changements d’environnement et/ou les nombreux cas de défaut y prévus, peuvent
faire peser en particulier sur la compagnie aérienne.
Elle acquiert ainsi les droits de propriété sur l’avion et s’engage simultanément à le louer à la
compagnie aérienne, en leasing ou crédit-bail, pour une durée correspondant à la durée
d’utilisation économique de l’avion et au prêt qui lui aura été consenti par une ou plusieurs
banques.
Le prix de l’avion se paye en plusieurs fois : le délai -souvent de quelques années- entre
commande et livraison exige le paiement d’acomptes pouvant représenter le quart du prix de
l’appareil, avec paiement du solde lors de la livraison.
Les acomptes sont payés par la compagnie aérienne, le solde par la SPC, au moyen du prêt
souscrit auprès des banques retenues pour financer l’acquisition, une fois qu’elle s’est
substituée à la compagnie aérienne dans le contrat d’achat en vertu d’une cession du contrat
d’achat avec l’accord du constructeur.
Lorsque l’option d’achat intervient à l’expiration du contrat, sa levée constitue en fait une
simple formalité pour la compagnie aérienne, qui devient propriétaire de l’avion sur paiement
d’une somme symbolique, en raison de l’amortissement tant économique de l’avion que
financier du bailleur.
Les parties accorderont un intérêt particulier au régime fiscal applicable au paiement des
loyers, notamment en ce qui concerne les questions de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de
retenue à la source.
[…]
35°- les opérations de transport international, les prestations de services qui leur sont liées
ainsi que les opérations de réparation, d’entretien, de maintenance, de transformation,
d’affrètement et de location portant sur les différents moyens dudit transport… »).
À titre de comparaison, l’ article 262, II, 4° du Code général des impôts français prévoit cette
exonération comme suit : « …Les opérations de livraison, de transformation, de réparation,
d'entretien, d'affrètement et de location portant sur les aéronefs utilisés par des compagnies
de navigation aérienne dont les services à destination ou en provenance de l'étranger ou des
collectivités et départements d'outre-mer, à l'exclusion de la France métropolitaine,
représentent au moins 80 % des services qu'elles exploitent…».
En vertu du contrat de location avec option d’achat, la SPC demeure propriétaire de l’avion
dont le locataire –la compagnie aérienne- assume tous les risques d’utilisation.
Le contrat exigera du preneur de souscrire les assurances appropriées couvrant aussi bien
l’avion contre tous risques de dommages (en risques ordinaires et risques de guerre), que sa
responsabilité civile en tant qu’utilisateur et celle de la SPC en sa qualité de propriétaire.
11. – Constructeur – Il fabrique et vend l’avion à la compagnie aérienne au titre d’un contrat
d’achat qui est cédé à la SPC concernant le paiement du prix, au moment de la livraison.
Le constructeur et la compagnie aérienne demeurent toutefois en relation directe dans tous les
domaines techniques comprenant notamment la livraison de l’avion et les garanties
applicables à celui-ci.
Le constructeur livre l’avion à la compagnie aérienne qui l’accepte au nom et pour le compte
de la SPC, devenue désormais propriétaire après en avoir payé le prix d’achat.
Dans le but de faciliter la vente de son avion, le constructeur peut être amené à accorder une
garantie et un engagement de re-commercialisation de l’avion en cas de défaut de la
compagnie aérienne. De telles garanties sont en général rémunérées.
Il assiste la compagnie aérienne dans la présentation de son dossier aux organismes de crédit à
l’export, en vue de l’obtention de leur garantie du prêt que consentiront les banques
sollicitées.
12. – Banques – Elles peuvent assumer deux fonctions : la première est de financer
l’acquisition de l’avion par la SPC au prix convenu entre le constructeur et la compagnie
aérienne. Les prêts sont généralement réservés à des clients de bon standing, consentis au taux
du marché et assurent une marge habituelle aux banques. Il s’agit en général d’un financement
d’environ 85 % de l’investissement ; le solde étant réglé par la compagnie aérienne entre le
moment de la signature du contrat d’achat et la date de livraison de l’avion.
Lorsque le financement comporte la garantie d’une agence de crédit à l’export en faveur des
banques, les conditions financières sont plus compétitives.
La particularité du financement réside dans le fait qu’il est accordé pour financer l’achat de
l’actif. Ceci signifie qu’en cas de défaillance de la compagnie aérienne, la SPC n’est plus en
mesure de rembourser le prêt qui lui a été consenti par la ou les banques. Dans ce cas, l’avion
qui a été donné en garantie aux prêteurs pourra être récupéré par ces derniers ou pour leur
compte, afin de le vendre et se faire rembourser le montant du prêt.
Dans ce cas, la banque sera dénommée « arrangeur » et agira au nom des autres membres du
syndicat ou consortium, en percevant une commission de gestion à ce titre.
Les gouvernements offrent au public, par le biais des agences de crédit à l'exportation (ACE),
des crédits à l'exportation bénéficiant d'un soutien à l'appui des exportateurs nationaux qui se
concurrencent pour la vente à l'étranger. Un tel soutien peut prendre la forme soit de « soutien
financier public », comme les crédits directs à des acheteurs étrangers, de refinancement ou de
taux d'intérêt de soutien, ou de « soutien garantie pure », tels que des crédits à l'exportation
d'assurance ou de couverture de la garantie des crédits accordés par des institutions
financières privées. Les ACE peuvent être des institutions gouvernementales ou des
entreprises privées opérant pour le compte des gouvernements.
En matière de financement d’avion, il est difficile pour une compagnie aérienne d’envisager
d’emprunter sur les marchés financiers, sans garantie sur actif, dans de bonnes conditions
(intérêt, durée).
Aussi, l’existence de financements export accessibles aux compagnies aériennes achetant des
Airbus ou des Boeing leur permet de trouver des crédits à des taux plus compétitifs que dans
le cadre d’un financement classique.
14. – Security Trustee/Security Agent ou Agent des sûretés – Le Security Trustee est utilisé
comme un moyen de détenir et conserver les sûretés sur les avions d’un débiteur de prêt, au
profit d’un certain nombre de créanciers comme dans le cas par exemple, d’un prêt syndiqué
d’un financement basé sur l’actif avec garantie d’une ACE.
Le recours au Security Trustee permet notamment d'éviter l'octroi des sûretés séparément à
tous les créanciers lorsqu’il y en a plusieurs, ce qui serait coûteux et peu pratique.
En cas de défaut de paiement, il pourra ainsi faire jouer le droit du créancier sur le matériel
loué. Il a la capacité d’exercer l’ensemble des droits octroyés aux banques et aux ACE.
Au Maroc, il n’existe pas de texte législatif sur la notion de Security Trustee ; à titre
comparatif, l’ article 2328-1 du Code civil français ( L. n° 2007-211, 19 févr. 2007 ) a prévu la
notion d’Agent de sûretés mais qui ne fonctionne pas de la même manière que le Security
Trustee : en effet, l’Agent des sûretés est un simple mandataire des prêteurs, qui doivent tous
être inscrits en tant que bénéficiaires des sûretés, à la différence du Security Trustee.
15. – Garanties – La structure du financement révèle les objectifs des bailleurs de fonds :
ayant fourni les sommes pour payer le solde du prix d’achat de l’avion, ils s’attèleront à
prévoir les droits nécessaires qui leur permettraient d’en assurer le remboursement.
16. – Conditions suspensives – Au préalable, de nombreuses conditions suspensives ou
« conditions precedent » doivent être remplies par la compagnie aérienne et le cas échéant les
autres intervenants tels que la SPC ou le Security Trustee, avant l’entrée en vigueur du
financement.
Par ce biais, les financiers cherchent à s’assurer de la validité des engagements pris par les uns
et/ou les autres.
Les conditions concernent notamment (i) les documents sociaux (extrait de registre des
sociétés, autorisations des organes sociaux),(ii) la capacité du signataire (pouvoirs), (iii) les
autorisations administratives (office des changes pour les obligations de paiement en devises,
direction de l’aéronautique civile pour les formalités d’immatriculation/inscription de
sûretés/radiation) et (iv) les opinions juridiques ou fiscales sur telle ou telle question d’intérêt
pour les financiers.
17. – Droits réels sur l’avion – Ces droits consistent essentiellement dans le droit de propriété
de l’avion et de l’hypothèque consentie.
18. – Droit de propriété de l’avion – Les financiers s’assurent que le titre de propriété qui sera
détenu par la SPC au lieu de la compagnie aérienne, sera libre de tout droit ou autre charge
susceptible de le grever.
Pour éviter de le mettre en péril, il est exigé de la SPC qu’elle n’ait aucune autre activité que
celle de détenir la propriété de l’avion objet du financement : le but étant que la SPC ne puisse
avoir aucun autre créancier que les parties à l’opération de financement concernée, qui serait
susceptible d’exercer un quelconque droit, le cas échéant, sur l’avion.
Toutefois, il n’est opposable à l’égard des tiers que par son inscription au registre
d'immatriculation des aéronefs tenu par les services de la direction en charge de
l’aéronautique civile du pays dont le dit aéronef détient la nationalité. Au Maroc, l’article 25
du décret susvisé, dispose que « toute mutation de propriété d'un aéronef par acte entre vifs
ou par décès, tout jugement translatif, constitutif ou déclaratif de propriété, toute constitution
ou radiation d'hypothèque, tout contrat de location ainsi que tout procès-verbal de saisie
conservatoire ou de saisie-exécution ne produisent effet à l'égard des tiers que par inscription
au registre d'immatriculation».
Le registre public des aéronefs permet l’enregistrement du droit de propriété de l’aéronef et,
par voie de conséquence, son opposabilité aux tiers, participant ainsi à sa sécurité juridique.
Comme dans la plupart des autres pays, la loi marocaine n’autorise que le propriétaire ou son
représentant dûment mandaté à accomplir ces formalités.
Le droit de propriété sur l’avion constitue ainsi le droit réel le plus complet dans la mesure où
il confère à son titulaire l’ensemble des prérogatives pouvant être exercées. Il emporte droit de
suite et droit de préférence.
Détenant le titre de propriété, la SPC bénéficie d’une protection légale qui préserve ses
intérêts contre les abus de tout tiers et contre les risques de violation du contrat de
financement.
De la même manière, en droit marocain, l’hypothèque doit être rédigée par écrit, mais l’écrit
peut être fait par acte sous seing privé. Pour être opposable aux tiers, elle doit être inscrite sur
le registre des aéronefs. Le rang de l’hypothèque est déterminé par l'ordre de priorité de sa
date d’'inscription.
L'inscription conserve l'hypothèque pendant cinq ans, à compter du jour de sa date: son effet
cesse si l'inscription n'a pas été renouvelée avant l'expiration de ce délai.
Sous cette réserve les créanciers hypothécaires suivront l’aéronef hypothéqué en leur faveur
en quelque main qu’il soit pour être payés par préférence à tout autre créancier.
Les financiers exigeront que les formalités requises au regard de la loi applicable pour
immatriculer l’avion au nom du propriétaire et inscrire l’hypothèque au nom des créanciers
soient effectuées aussitôt que l’avion aura atterri sur le territoire de la compagnie aérienne.
La lenteur et les aléas des procédures nationales de réalisation des hypothèques ont conduit
les financiers à œuvrer pour que ces dernières puissent être reconnues, voire exercées, à un
niveau international : les conventions de Genève du 19 juin 1948, puis celle du Cap du 16
novembre 2001 devaient répondre à ces préoccupations.
21. – Convention de Genève du 19 juin 1948 – Cette convention tend à favoriser l’utilisation
de l’avion comme instrument de crédit, en garantissant aux prêteurs (essentiellement les
banques) qui détiennent des droits sur les avions objet des prêts, la reconnaissance de ces
droits dans les pays que les avions desservent.
Le Maroc a adhéré à cette convention signée à Genève le 19 juin 1948, par dahir n° 1-94-234
portant sa publication, en 1994.
La Convention de Genève porte sur la reconnaissance internationale des droits sur aéronefs:
autrement dit, elle ne crée pas elle-même l’hypothèque, mais organise la reconnaissance et
l’opposabilité devant toute juridiction signataire, d’un droit constitué conformément à la loi
d’un autre État contractant.
22. – Convention du Cap du 16 novembre 2001 – Ce sont les ACE qui incitent les
compagnies aériennes à œuvrer pour l’adhésion de leur pays à la Convention du Cap du 16
novembre 2001 relative aux garanties internationales sur les matériels d’équipements mobiles,
et son protocole additionnel de même date concernant les questions spécifiques aux matériels
d’équipements aéronautiques.
Elle a pour objectif d’établir des règles internationales offrant aux créanciers la sécurité jugée
utile à la préservation de leurs droits.
● la création d’une garantie internationale reconnue dans tous les États contractants;
● la mise à la disposition des organismes de financement/ créanciers d’un éventail de
mesures leur permettant d’obtenir rapidement, et avant règlement du litige au fond,
des assurances (Conv. Du Cap, art. 13), y compris la radiation de l’immatriculation de
l’avion et son exportation sur le territoire d’un autre État (Prot. additionnel à la Conv.
du Cap, art. IX) ; l'annexe au protocole et aussi à la convention en application de son
article 25, propose le formulaire portant autorisation irrévocable de la compagnie
aérienne et du propriétaire (la SPC), donnée au créancier, de radier l'immatriculation
de l'avion et de demander le permis d'exportation;
● l’établissement d’un registre international d’inscription électronique des garanties
internationales, les rendant opposables à tous , y compris en cas de procédure
collective à l’encontre du débiteur.
Ce faisant, les garanties existant en vertu du droit national se trouveront primées par celles
dites internationales et inscrites selon les prescriptions de la convention du Cap.
Cette convention est entrée en vigueur le 1er mars 2006 pour les États qui l’ont ratifiée et dont
le Maroc ne fait pas partie, en raison semble-t-il d’incompatibilités avec certaines dispositions
législatives nationales d’ordre public, telles que par exemple, celles résultant des procédures
collectives en cas d’insolvabilité, ou encore de la nécessité d’une procédure judiciaire dans les
cas où la convention prévoit les mesures dites de "self-help", autorisant les créanciers à se
faire justice eux-mêmes.
23. – Autres droits – À côté des droits ci-dessus, les financiers cherchent par ailleurs à se
prémunir contre tout risque éventuel au cours de l’opération de financement, en prévoyant
d’autres droits à leur profit. À cet effet, plusieurs techniques juridiques sont utilisées.
24. – Nantissement des actions de la SPC – S’agissant de droits incorporels, les actions de la
SPC sont nanties au profit des organismes de financement, essentiellement pour aboutir à un
transfert à ces derniers –à titre de garantie supplémentaire- des pouvoirs des organes sociaux
de la SPC. La dépossession sur laquelle repose en principe le nantissement, est remplacée par
les formalités d’inscription au registre de commerce et des sociétés de la juridiction dont la
SPC relève.
C’est pour cela que ces derniers exigeront qu’une cession (ou délégation) des loyers leur soit
octroyée par la SPC, en garantie du remboursement du prêt qu’ils lui ont consenti.
26. – Cession des indemnités d’assurance – Dans le cadre du contrat de location de l’avion, la
compagnie aérienne locataire est tenue de souscrire auprès d’une ou plusieurs compagnies
d’assurance notoirement solvables les couvertures d’assurance notamment pour une valeur
agréée contre les risques de dommages pouvant survenir à l’aéronef.
En cas de survenance d’un sinistre d’une certaine importance, il est demandé au locataire (i)
de reverser aux organismes de financement les indemnités perçues ou (ii) d’exiger des
assureurs de les verser directement auxdits organismes.
Il est dès lors normal dans ce type de financement que les bailleurs de fond y accordent un
intérêt tout particulier : ceci peut être constaté non seulement par les nombreuses dispositions
contractuelles consacrées (i) à la maintenance de l’aéronef et sa documentation, (ii) aux
conditions de restitution de l’aéronef le cas échéant, mais également au droit d’inspection
technique que se réservent les organismes de financement pendant la durée de la location.
L’exercice de ce droit est généralement prévu selon une périodicité convenue avec la
compagnie aérienne de manière à ne pas perturber l’exploitation de l’aéronef.
Il a pour objectif de s’assurer que l’aéronef est entretenu de manière appropriée pour répondre
aux impératifs de sécurité et pour maintenir sa valeur à un niveau élevé, afin de permettre le
cas échéant, sa nouvelle commercialisation dans de bonnes conditions.
L’ensemble des droits ci-dessus sont destinés à mettre les organismes de financement en
mesure de récupérer l’aéronef en cas de défaillance de la compagnie aérienne à remplir ses
engagements contractuels, en vue de le revendre et se faire rembourser le montant du prêt
octroyé. Ils constituent de ce fait, autant de garanties sur lesquelles est basé le financement.
Du point de vue de la compagnie aérienne locataire, l’opération est une location financement,
qui lui assure certains droits.
Ainsi, lorsque le contrat de location a un caractère financier, tous les risques découlant de
l’usage du bien sont à la charge de la compagnie aérienne.
Il en est de même de l’ensemble des autres risques y compris financiers (risque taux de
change, risque fiscal), juridiques (changement de législation, propriété de l’avion), aspects
techniques, usage auquel le bien est loué, etc., que le contrat fera peser sur la compagnie
aérienne locataire, avec une renonciation à tous recours contre la SPC propriétaire.
33. – Droits du locataire – Bien que ténus au regard des obligations mises à la charge de la
compagnie aérienne, des droits importants sont prévus en sa faveur. Trois principaux méritent
d’être soulignés.
34. – Droit à une paisible jouissance de l’aéronef – Sous réserve du respect de ses propres
engagements, la compagnie aérienne demandera à utiliser l’aéronef selon les besoins de son
exploitation, sans restriction ni empêchement du bailleur et/ou des organismes de
financement, voire de leurs créanciers éventuels.
Ce droit constitue notamment une préoccupation du locataire lorsque les bailleurs de fonds
choisissent de se substituer d’autres organismes de financement en cours de contrat : le
locataire qui ne peut s’opposer à de tels transferts, demandera généralement qu’une lettre
portant engagement des nouveaux bailleurs de respecter la paisible jouissance de l’avion à
laquelle il a droit, lui soit au préalable remise. ("letter of quiet enjoyment of lessee’s use and
possession of the aircraft").
35. – Droit de sous-location – De la même manière, la compagnie aérienne s’attachera à
obtenir le droit de sous louer l’avion. La sous-location est en effet un instrument de souplesse
dans l’industrie du transport aérien et permet aux compagnies aériennes de moduler leurs
flottes selon les besoins de leur exploitation (période de pointe /saison basse, utilisation au
sein de sociétés du même groupe, etc.).
Or, les organismes de financement considèrent une telle possibilité comme une augmentation
des risques et imposent des contraintes notamment sur la qualité du sous-locataire, la région
où il est basé, la durée de sous location par exemple, même si la compagnie aérienne demeure
en tout état de cause responsable de l’ensemble des obligations à leur égard.
Généralement, il est plus facile d’obtenir la faculté de sous louer l’aéronef avec équipage
("wet lease") qu’en coque nue (" dry lease "), en raison du maintien sous la responsabilité du
locataire de la direction technique de l’avion.
36. – Libre exercice de l’option d’achat – Ce droit comporte un double intérêt pour le
locataire: d’une part, il exigera du propriétaire le respect d’une interdiction de grever l’avion
de quelque droit ou charge que ce soit, autre que ceux convenus en faveur des bailleurs des
fonds destinés à le financer.
D’autre part, l’un des objectifs de la compagnie aérienne qui recourt au financement d’avion
basé sur l’actif, est de pouvoir en acquérir la propriété en levant l’option d’achat. En
conséquence, elle souhaitera s’assurer que ce faisant, le titre de propriété puisse lui être
immédiatement transféré, sans aucune charge qui en diminuerait la valeur.
Tels sont quelques-uns des nombreux aspects juridiques du leasing financier d’aéronef
("aircraft asset based financing"), conséquence directe des réalités économiques actuelles.
Textes
Conv. de Genève, 19 juin 1948 relative à la reconnaissance internationale des droits sur
aéronef, pub. : da. n° 1-94-234, 25 juill. 1994.
Conv. du Cap, 16 nov. 2001 et son protocole, relative aux garanties internationales sur les
matériels d'équipement mobiles (non en vigueur au Maroc).
Bibliographie
J. Gueguen, Le leasing fiscal aéronautique : mémoire DESS Banques & Finances, Université
Paris V-René Descartes, Faculté de Droit, 1998/99
Ph. Michaux, Leasing mode de financement de l’aviation civile : RFDA 1979, p. 261
B. Poulain, Impact économique sur le financement des aéronefs civils : RFD aérien 2006, p.
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