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CM : Approches culturelles, Dario Marchiori

De l’art à la culture : ouverture sur les cultural studies

En parallèle avec le renouveau de l’esthétique et de la philosophie du cinéma, s’affirment de


nouvelles formes de dialogue entre le cinéma et la culture, voire les cultures, sous l’influence des
cultural studies : le cinéma témoigne des dynamiques culturelles d’une époque, et participe alors
d’un contexte plus large d’ordre historique ou anthropologique. La question de la légitimité culturelle
du cinéma n’est plus d’actualité : d’une part il s’intègre dans la culture d’une époque, d’autre part la
notion de culture a été redéfinie par le post-modernisme, en voulant abolir la distance entre culture
« haute » et culture « populaire ». Parmi ces approches des circulations culturelles, commencent à se
définir les visual culture studies, qui s’appuient sur la notion de « culture visuelle » (employée
autrement par Béla Balàzs et Làszlo Moholy-Nagy dans les années 1920) …

1-Mise en perspective du cours

Importance de l’interprétation des films, de façon plus poussée par rapports à des choses extérieurs
aussi au film lui-même, comme d’autres films par exemple ou des théories (féministes), films d’une
même époque, films d’un même auteur.

 Echelle : établir un rapport dynamique entre les cas d’étude (particulier) et les hypothèses
théoriques (générales) qui concerne le contexte culturel
 Approche : établir un rapport dynamique entre l’approche culturelle choisie et les outils
élaborés
 Caractéristique de l’objet d’étude : aborder les différents degrés de singularité d’un film à
l’autre, et d’une dimension à une autre d’un même film (sociale, politique, morale,
esthétique, etc.)

Le « tournant culturel », dans les années 1980/1990

Paradigme interprétatif des théories culturelles. Des discussions sur la limite dans la notion de
culture, par exemple, est-ce qu’il existe une culture militaire ? Idée que la culture n’est pas un
domaine à part. Dimension socio-politique, militaire, économique.

Redéfinition de la place, du rôle et des enjeux des objets culturels en tant qu’objets d’étude.

Valorisation de l’activité culturelle comme interprète et agent dans la société.

Les objets culturels jouent un rôle déterminant, une propagande telle qu’elle soit, agit dans une
culture, est diluée dans une culture et a des effets directs.

A cette époque ont émergé des « études culturelles », permettant de rassembler des recherches sur
la culture, ses possibles échelles et définitions.

Edgar Morin, « le mot culture est, selon l’expression de Heinz von Foerster, le plus vicieux des
caméléons conceptuels. Il a un sens anthropologique (il concerne tout ce qui est acquis et non inné),
un sens sociologique (comme culture d’une société ou d’une ethnie donnée) et un sens élitiste
(« culture des cultivés », humanités, philosophie, arts, etc.) Et nous basculons inconsciemment en
permanence d’un sens à l’autre. On ne connaît la culture qu’à travers les cultures, le langage qu’à
travers les langues, la musique qu’à travers les musiques. »
Moi, un noir (1958) de Jean Rouch

La voix « je » du personnage. Le personnage est lui-même un immigré, venant d’un autre pays, ce qui
complexifie le point de vue dont il est question, notamment vis-à-vis de la culture et du mode de vie
du pays. L’aperçu du film penche vers le documentaire. La porosité échange entre les genres fiction et
documentaire. Souci interculturel de Rouch.

Sois belle et tais-toi (1981) de Delphine Seyrig,

Film militant sur des femmes ayant travaillé dans le cinéma.

Extrait avec Jane Fonda

Les luttes féministes, le film renvoie à un « domaine culturelle » qui est le cinéma de son époque.
Film à visée « culturaliste », qui veut imposer ce sujet féministe, de la peur de rapports lesbiens entre
les femmes dans le cinéma des années 1960-1970.

Question qui dépasse le film mais qui peut être enrichie par les films d’époque. Delphine Seyrig met
en évidence des caractéristiques culturelles particulières dans le cinéma de son époque.

Questions qui demandent de creuser, de faire de longs détours par des questions historiques,
sociologiques, pour comprendre.

Trois notions

 Cultural studies
 Kulturwissenschaft
 Etudes culturelles

Hoggart, La culture du pauvre, 1957

Les cultural studies émergent dans les années 1950 au Royaume-Uni, en commençant par porter une
attention particulière à la culture ouvrière ou populaire, y compris en l’opposant à la culture de
masse.

Approches postcoloniales des films :

Texte de Lénine :

L’impérialisme étant une volonté de suprématie sur le monde, dans différents domaines. Lénine,
considère que ce qui était déjà connu du grand public (épisodes infames de l’histoire occidentale). Ce
texte aura une résonnance énorme au sein des mouvements anticoloniaux et notamment le Parti
communiste.

« Marx a bâti sa doctrine sur une certaine philosophie de l’Histoire. Mais quelle Histoire ? Celle de
l’Europe. Mais qu’est-ce que l’Europe ? Ce n’est pas toute l’Humanité. » Hô Chi Minh

Edward Said, L’Orientalisme (1978)

Comment l’Occident a créé tout un discours qui a structuré profondément nos représentations de
l’Autre.

Les cultures subalternes, la question de la soumission de la culture par une autre culture. Comment
on peut penser notre histoire. Manière dont l’Occident a interrogé sa place dans le monde. Une
culture paritaire est une culture qui sort de son sujet.
Les subalternes sont aussi bien des cultures subordonnées à d’autre. Le plus important se trouve dans
l’entre-deux. La pensée intersectionnelle, entre class, race et gender. Ces trois dimensions sont
reliées. Chez Homi Bhabha, Les lieux de la culture (1994)

Dipesh Chakrabarty, Provincialiser l’Europe (2000), comment penser cette sortie de la « minorité ». Si
le centre n’est plus au centre, si alors l’Inde devient le centre, il convient aussi de s’emparer des
discours occidentaux, en réinventant la culture à son profit.

Enjeux du « Tiers cinéma »


Décoloniser les esprits

 Texte de Glauber Rocha : L’esthétique de la faim (1965), dans lequel il revendique une
esthétique proprement latino-américaine et anti-impérialiste dont l’originalité tiendrait à
cette « faim ».
 Texte de F. Solanas et O. Getino : Vers un tiers cinéma. Notes et expériences pour le
développement du cinéma de libération dans le tiers monde (1969) (Vers un troisième
cinéma (zintv.org)) Manifeste pour un cinéma de la décolonisation
 Texte de Julio Garcia Espinosa : Pour un cinéma imparfait (1969) « De nos jours, un cinéma
techniquement et artistiquement parfait est presque toujours un cinéma réactionnaire. »

3 textes qui vont ensemble, qui se répondent et qui porte la même volonté d’un « tiers cinéma ».

Dans cette perspective, le film peut être symptôme, témoin ou acteur dans le domaine culturel. Les
films qui vont nous intéresser sont des films qui essaient d’agir dans le domaine culturel.

L’Atlantide (1921) de Jacques Feyder

Un film muet franco-belge. Un film symptomatique de la culture colonial. Qui peut être vu comme
une production de l’imaginaire colonial, perpétuant des stéréotypes, à travers le concept d’exotisme,
fantasmant une nature luxuriante. Vision de l’Afrique dans le film comme d’un territoire vierge,
constitué de vastes étendues, une terre sans histoire, sans civilisation. Dans son film, Feyder situe
l’Afrique comme un territoire mystique, inatteignable.

Un film qui se veut aussi acteur au niveau culturel car il souhaite déplacer la perception de l’Afrique
de l’époque.

Afrique 50 (1950) de René Vautier

Premier film anticolonialiste français. (Précède de quelques années Les statues meurent aussi)

Film qui prend parti en faveur du mouvement pour les droits des noirs.

Film qui traite des actualités cubaines.

Forme originale dans le cinéma militant. Film constitué d’images fixes et animées, issues de l’actualité
des révoltes et remontées ensemble. Un film qui se veut à la fois interprète et acteur de ces luttes
anticolonialistes. Des zooms, travellings permettant d’animer les images fixes.

Sècheresse (1963) Nelson Pereira Dos Santos

Titre original : Vidas Secas


Un film brésilien. La misère au centre de la séquence, mais une misère qui est parfois contredite par
les formes filmiques. Quelques principes, le dialogue, le travelling, la scission dans le dialogue, avec
cet élan d’utopie. Premiers plans sur les animaux, en métaphore et comparaison avec la condition
humaine. Une fin ouverte qui ne laisse pas beaucoup d’espoir mais qui relance une nouvelle fois une
énergie de l’espoir, y compris par la musique grinçante, une puissance de vie qui ne se résigne pas.

Esthétique de la faim.

L’heure des brasiers (1968) de Fernando Ezequiel Solanas

Titre original : La hora de los hornos

Un film documentaire argentin, un film politique, dénonçant le néocolonialisme.

Ce qui structure cet extrait est le discours. Trait caractéristique du film-essai. Chaque image renvoyant
au même discours, des images homogènes malgré leur très grande diversité. Un discours fortement
nationaliste. Ce film porte donc un discours décolonial, il est un essai qui porte, qui ouvre un débat
avec le spectateur, avec la salle. Sous l’emprise de l’Espagne, jusqu’au début du XIXe. Film qui pose la
question du tiers-monde. Un film vaste, qui exprime, voulant se faire le porte-parole de l’émergence
du décolonialisme. Rôle oppresseur de l’Occident. Un propos anti-impérialiste, qui le conduit à des
choix esthétiques également.

Le western, un genre qui a accueilli nombre de discours remettant en cause l’ordre des choses. La
question post-coloniale. Le Tiers-cinéma.

Christopher Colombus : the discovery (1992) John Glen

L’indigène en arrière-plan de l’action, comme en arrière-plan de l’Histoire. L’action du film est le


privilège des personnages blancs, les indigènes sont relégués constamment en arrière-plan. La
nécessité est l’évangélisation.

Qu’il était bon mon petit Français (1971) Nelson Pereira dos Santos.

Dans ce film le réalisateur s’interroge sur la relation coloniale mais cette fois en renversant le point de
vue. Puisque c’est un jeune français recueilli par une tribu cannibale tupinamba que l’on va suivre,
comme un étranger en terre autochtone. Ce film s’inscrit dans le contexte des affrontements au XVIe
siècle entre Français et Portugais pour la colonisation du Brésil.

A travers l’anthropophagisme le film traite de la question de l’incorporation de l’autre dans sa propre


culture.

Le point de départ, la violence aveugle des Portugais. Une iconographie des populations indigène. Le
projet de ce film, est de livrer une lecture post-coloniale. Tout autre lecture est critique dans la
manière dont cela est montré.

Un film symptomatique, qui insiste sur l’enjeu de conquête.

Approche post-coloniale du film ethnographique : universalisme, exotisme, relativisme


Comment appréhender l’autre ? Question posée par le film ethnographique

Le cinéma ethnographique : un genre cinématographique et scientifique, qui cherche à déjouer


l’exotisme, qui se donnerai un gage de sérieux au sein d’un champ disciplinaire. Une connaissance
approfondie du terrain. L’approche documentaire. Un paradoxe : un cinéma basé sur l’idée que le
chercheur dispose d’une connaissance approfondie, plus approfondie même que celles des membres
de la communauté étudiée. Le point central du paradoxe est que celui-là même qui fait cette étude
ne fait pas partie de cette société. Bien que ce n’est pas par exemple parce que l’on est français que
l’on sait ce que c’est que d’être français, ce paradoxe n’en reste pas moins problématique lorsqu’on
prétend saisir des connaissances à propos d’individus vivant autrement que nous.

Intégrer aussi des films qui n’ont pas porté ethnographique mais qui servent de témoignages. Pour
résorber au mieux ce paradoxe, une des solutions trouvées par ces cinéastes se traduit par des
tentatives de collaborations avec les sociétés filmées.

The Native American Indian (1907-1930) de Edward Sheriff Curtis

Une collection monumentale de photographie sur les tribus autochtones d’Amérique du Nord réalisée
sur une période de plus de 20 ans par Edward S.Curtis (1868-1952), un photographe ethnologue
américain, dont la volonté était d'immortaliser ce qui pouvait être sauvé de ces cultures sur le point
de disparaître, dans leur forme originelle.

• « Puisées directement dans la Nature, ces images montrent ce qui existe ou ce qui existait
encore récemment »

D’un état innocent l’indigène évolue au moment de la rencontre avec l’Occidental. Curtis cherche ici
cet état originel de l’Indien, cet état pur.

Le paradigme mécanique de la photographie apporte une caution beaucoup plus grande. Un « pur
enregistrement ». Image de quelque chose « qui a été là ». Des images « puisées de la nature » d’un
monde proche de la nature.

Par rapport à cette « vie primitive » Curtis s’attache à en démontrer la dignité. Curtis s’attache à
réaliser des portraits.

Exemples de photographies :

-The Morning Bath – Apache

-Navajo Weaver

-In a Piegan Lodge (photographie retouchée)

Projet de Curtis : documenter ce qui a disparu ou est en train de disparaître

In the Land of Head Hunters (1913) de Edward S.Curtis

Docufiction mettant en scène, par le biais d'une épopée romanesque, l'existence


des Indiens Kwakiutl de la province de la Colombie-Britannique (Canada).

Finalement peut-être que la réalité brute serait plus vivante que le cinéma et la fiction.

Nanouk l’esquimo (1922) de Robert Flaherty

Nanouk remet en scène certains éléments comme la chasse au harpon. Restituer une scène en
enregistrant une image, qui va créer une caution de véracité par sa nature cinématographique, pour
rendre compte témoigner d’un imaginaire.
The Great White Silence (1924) Herbert G. Ponting

• Film sur l’expédition « Terra Nova » en Antarctique menée par Robert Falcon Scott (1910-
1910)

Jean Thévenot, « le cinéma saisit le vif », « la caméra ne fait pas que suppléer l’œil, elle voit mieux
que lui », P.120 dans l’ouvrage dirigé de Georges-Michel Bovay Cinéma : un œil ouvert sur le monde,
Lausanne, La Guilde du livre, (1952)

Le cinéma ethnographique et la réflexion postcoloniale.

Texte de Jean Rouch à propos de Flaherty et de Nanouk l’Esquimo

Jean Rouch, « Le film ethnographique » (1968) repris dans Id., Cinéma et anthropologie, Paris,
Cahiers du cinéma – INA (2009)

The Hunters (1957) de John Marshall

Un film atypique, faisant beaucoup de pas de côté par rapport au cinéma de fiction, mettant
l’emphase sur les moments contemplatifs et descriptifs. La description dans ce film n’est pas une
description conventionnelle prise en charge par une voix savante. La description est prise en charge
par les images. On pose les jalons de ce qui compose la pratique des chasseurs africains, mais de
façon éminemment subtile par les images seulement.

Petit à petit (1971) de Jean Rouch

« Ethnofiction »

Les individus filmés sont pour certains des amis, des connaissances qui se prêtent au jeu mais qui
improvisent. Le renversement de la perspective ethnologique. Inverser le regard colonial.

Par le rire, Rouch cherche à véhiculer des vraies questions. Regarder l’autre comme objet d’étude. Le
comique de cette réduction rend d’autant plus visible la réduction. Les réactions des gens filmés sont
tantôt gênées, tantôt énervées, etc.

Approche géopolitique des films

Eléments bibliographiques (géopolitique)

 Klaus Dodds, Geopolitics. A Very Short Introduction (2007)


 Pierre M. Gallois, Géopolitique : les voies de la puissance (1990)
 Cédric Tellenne, Introduction à la géopolitique (2019)

Géopolitique et géoculture

Le rapport entre culture et phénomènes sociétaux. La manière dont le cinéma se fait interprète de
ces phénomènes. Relation entre géopolitique et géoculture.

Eléments bibliographiques (géoculture)

 Laurent Murawiec, L’esprit des nations : cultures et géopolitiques (2002)


 François Roche, Pour une géopolitique de la culture (2002)
 Immanuel Wallerstein, Geopolitics and geoculture: Essays on the changing World-System
(1991)

Le cinéma comme un "soft-power" (=capacité de modifier la volonté des autres sans recourir à la
coercition).

Sondage (sur la diapo) en France "quelle est, selon vous, la nation qui a le plus contribué à la défaite
de l’Allemagne en 1945"

Hallucinante évolution de l'opinion publique au cours des ans (dû à une propagande états-
unienne ?)

Source : Sondage IFOP 1945, 1994, 2004, 2015

Bibliographie :

 Ignacio Ramonet, Propagandes silencieuses (2000)


 Dominique Moïsi, La géopolitique des séries ou le triomphe de la peur (2016)
 Maxime Didat, Géopolitique et cinéma (2021)
 Pierre Conesa, Hollywar : Hollywood, arme de propagande massive (2018)
 Frederic Jameson, The Geopolitical Aesthetic. Cinema and Space in the World System (1992)
[en français dans les ouvrages archéologie du futur et fictions géo-politiques]

(Bibliographie complète sur la diapo)

Dans son ouvrage Dominique Moïsi défend l’idée que la considération de l'enjeu géopolitique dans
les séries est régie par un sentiment de peur plutôt que par la raison.

The Woman on Pier 13 (1949) de Robert Stevenson

Le film est d’abord sorti sous le nom I married a communist, et traite explicitement de la question du
problème soviétique, dans un contexte de guerre froide.

Invasion of the body snatcher, (1956) de Don Siegel

Film dans lequel la question du problème soviétique est posée de manière plus implicite.

Idée qu’il ne s’agit de personne qui s'emparent de l'âme des autres. Un film qui évoque une question
idéologique par un biais intéressant. Le film traite des enjeux de l'époque, lorsque le personnage
évoque une société "où tout le monde serait pareil", cela renvoie évidemment aux idéaux
communistes. Dans ce film l’invasion extra-terrestre sous-tend une diffusion de « l’idéologie
communiste » au sein même du pays. L'amour et l'individu, l’individualisme, sont des dangers pour
les aliens (=pour les communistes). Le film traite de l’égalitarisme en le représentant dans une
situation paroxystique afin de le dénoncer. Un ennemi qui vient de l'intérieur, idée que n'importe qui
peut être sujet à ces idéaux.

Symbolique du sommeil, c'est durant le sommeil que l'âme est remplacée. Il ne faut pas s'endormir.

La question géopolitique peut être posée de manière diverse. Durant ce contexte de la guerre froide
on voit des productions cinématographiques questionner tantôt de manière indirecte tantôt de
manière directe le « problème soviétique ».

Independance Day (1996) Roland Emmerich


Propagande hollywoodienne. Même le président hollywoodien. La seule défense pour l'humanité,
serait que tous les pays soient unis derrière les Etats-Unis. L'existence de la menace extraterrestre
permet de mettre en valeur la puissance étasunienne.

Les aventures extraordinaires de M. West au pays des bolchéviques (1924) Lev Koulechov

Enjeux de représentation et contre-représentation, dans des cinémas qui dialoguent de façon


conflictuelle.

Critique et détournement de l'impérialisme états-unien : une longue histoire

Les "métaphores politiques" du western italien (I.Ramonet)

« Le western est devenu le genre que l'on pouvait retourner comme un gant, raconter d'autres
histoires, celles des marginaux... » Ramonet dans Propagandes silencieuses, 2002

Le genre du western comme genre procurant un mythe fondateur des origines aux américains est
détourné par le western italien.

Il Mercenario (1968) Sergio Corbucci

Un western italo-espagnol

Extrait : une opposition franche. Une domination d'ingérence sur les autres états, par les Etats-Unis.
Dans le générique du film, réactivation de la culture mexicaine et l'ingérence des puissances
étrangères. Une diversité de la population et un objectif commun d'émancipation d'un impérialisme
américain. Le cas mexicain, dont s'est emparé le western italien.

Les aventures du Juan Quin Quin (1967) de Julio García Espinosa

Un western politique cubain. Un film farcesque qui a une dimension parodique et éminemment
politique.

Dans le western se joue également une reconfiguration du héros, de ce qu’est le héros.

Frederic Jameson et l’esthétique géopolitique

Approches culturelles des films, Nedjma Moussaoui

Bibliographie généraliste :

 George Michel Coissac, Histoire du cinématographe de ses origines à nos jours


 Maurice Bardèche et Robert Brasillach, Histoire du cinéma, (1935)
 George Sadoul, Histoire du cinéma mondial des origines à nos jours, (1949)
 Jean Mitry, Histoire du cinéma
 Robert C. Allen et Douglas Gomay, Faire l’histoire du cinéma (1985)
 Michèle Lagny De l’Histoire du cinéma. Méthode historique et histoire du cinéma (1992)

Durant la décennie des années 1920, (période de transition vers le parlant), on va tenter de montrer
que le cinéma est un art, de le légitimer en tant qu’art.
Des historiens plutôt de droite (Bardèche et Brasillach) vont produire une histoire du cinéma plutôt
axé sur les techniques, une chronique du cinéma plutôt que son histoire. Tandis que des historiens
plutôt de gauche (George Sadoul) vont produire une contre-histoire du cinéma en plusieurs volumes.

Jean Mitry, lui, va produire une histore esthétique du cinéma, avec la volonté de s’inscrire dans la
filiation des théories esthétiques de l’art en général. Théories reposant sur la conception de l’artiste
comme d’un « génie ».

Conception héritée du romantisme avec cette vision du « je » au centre du monde. Préférant le


sentiment à la raison, mettant en avant l’individu et l’œuvre.

Donc une perspective auteuriste essentiellement, c’est-à-dire qui va valoriser l’auteur au sein de son
œuvre. On considère l’auteur comme une exception, un être d’exception. Dans ce genre d’approche
on limite souvent l’apport du contexte. Idée que l’œuvre est intemporelle.

Mais progressivement l’ « Histoire » va apparaître comme une discipline réflexive, qui nécessite qu’on
la questionne, qu’on l’a remette en cause. Des chercheurs vont choisir « l’histoire-problème ».
Comment on interroge le passé ? On va se mettre à envisager le cinéma comme un objet culturel.

Robert C. Allen et Douglas Gomay dans leur ouvrage Faire l’histoire du cinéma (1985) vont justement
s’interroger sur la définition de leur objet même.

Ils vont envisager le cinéma comme un phénomène culturel, p.32 « le cinéma est un système
ouvert », un « phénomène historique complexe ». Plusieurs facettes dans l’histoire du cinéma.

Idée que le cinéma est un nœud, à travers lequel convergent diverses lignes de forces historiques.

4 dimensions dans l’histoire du cinéma :

-L’histoire esthétique

-L’histoire technologique (en quoi le cinéma incarne un renouveau technologique)

-L’histoire économique (en quoi les choix d’un cinéaste sont-ils déterminés par un contexte
économique)

-L’histoire social (ce qu’un public est capable d’accepter ou non)

Comprendre pourquoi certains styles deviennent la norme. Appréhender un film historiquement.

S’intéresser au contexte ou aux « mécanismes génératifs »

Ce dont il est important d’avoir conscience : l’interdépendance de ces catégories

Question de l’environnement intertextuel :

Un intertexte filmique : reprise de convention mise en place par d’autres films

Un intertexte non-filmique

Un intertexte extra-filmique : ce qui ne vient pas du cinéma

La question de la fabrique du film


-La place du réalisateur

-Démarche d’autoproduction

-Production au sein d’un studio

Par exemple dans le cinéma hollywoodien, importance de la « patte » des studios dans le style des
films hollywoodiens.

Le travail de l’historien du cinéma est d’identifier les « limites normatives », ce qui nécessite
d’envisager le film dans l’ensemble de sa production et pas seulement comme une œuvre
intemporelle.

Allen et Gomery vont consacrer un chapitre à l’histoire sociale du cinéma. Qu’est-ce que ça veut dire
d’approcher le cinéma par le prisme social ?

Qui faisait des films ? Et pourquoi ?

Qui regardait des films ? Et pourquoi ?

Allen et Gomery dans ce chapitre touche donc pleinement à la question culturelle.

Ils envisagent le cinéma comme un « moyen », un « document » sur la culture d’un pays.

« L’évolution de l’art cinématographique s’explique en partie par l’intégration entre l’esthétique,


l’économique, la technologie et la culture »

Dans les années 1990 – 2000, dans leur sillage, on observe l’émergence d’une « nouvelle histoire du
cinéma », marquée par une pluridisciplinarité.

Une orientation plus structurelle, cette nouvelle histoire du cinéma prend en compte différents
éléments qu’elle fait dialoguer pour aboutir à une vision plus juste de l’histoire du cinéma.

Notamment l’ouvrage de Michèle Lagny De l’Histoire du cinéma. Méthode historique et histoire du


cinéma (1992), s’inscrit dans cette perspective. « Les chantiers de l’histoire du cinéma : une pratique
sociaux-culturelle. », Michèle Lagny.

M.L dit que cette pluridisciplinarité est complexe, que sa discipline tend vers une approche socio-
culturelle. M.L remarque que dans les années 1990, les études historiennes du cinéma développe
déjà un sens aigu de l’arrière-plan culturel au détriment de l’approche auteuriste stricte. Pour illustrer
son propos elle cite 2 ouvrages :

 D. Bordwell – Ozu and the Poetics of cinema, (1988)


 Geneviève Sellier, Jean Gremillon – Le cinéma est à vous, (1988)

Bordwell dans son ouvrage cherche à se situer à mi-chemin entre l’approche auteuriste et l’approche
culturaliste. Il veut prendre en compte l’interaction entre ces deux approches.

Tandis qu’avec Geneviève Sellier, on sort d’une « histoire panthéon ».

Michèle Lagny va aussi s’intéresser à la perspective « générique ». Car la question des genres
cinématographiques met en évidence le lien indélébile entre cinéma et industrie.

 L’ouvrage de Leutrat, Le western, archéologie d’un genre, (1987)

Cet ouvrage, parmi d’autres met en évidence le fait que le genre n’est pas un système clos, mais qu’il
est un lieu investi par des idées qui débordent largement le cinéma. Leutrat cite les pratiques du
rodéo, des parades, et plus généralement du cirque. Il parle également du lien que le western
entretient avec le genre burlesque.

L’approche de Leutrat vise donc à saisir cette progression et cette évolution de ce genre
cinématographique qu’est le western.

De quoi on parle quand on parle de culture ?

3 niveaux différents dans le mot culture :

1er sens : ensemble de pratiques et d’usages, de comportement d’un groupe (sens anthropologique)

2e sens : ensemble d’idées, de valeurs qui sous-tendent des images qu’un groupe a de lui-même (sens
sociologique)

3e sens : la culture en tant qu’elle se limite aux activités artistiques et consommatrices (ex : aller au
cinéma) (sens élitiste du mot culture)

Michèle Lagny constate que le cinéma participe sous ces trois aspects à la culture d’une société.

Différentes orientations

Orientation sociologique, le cas des cultural studies »

Le cinéma populaire, s’intéresser aux acteurs, aux stars

 Ginette Vincendeau et Richard Dyer, Popular European cinema, (1992)


 Raphaëlle Moine, Les genres du cinéma (2008)

Des exemples d’études à dimension sociologique.

Michèle Lagny pointe la difficulté de ce type d’étude, car celles-ci requièrent des connaissances
solides.

« Laissant une grande part à l’intuition, ces études, qui misent à la fois sur l’analyse filmique et sur
celle du « contexte », doivent se contraindre à une justification rigoureuse des éléments culturels
qu’elles connectent » M.L

L’approche historique du cinéma privilégie aussi le cinéma comme un fait de culture.

Plusieurs niveaux dans l’approche historique :

-Niveau national

-Niveau International

-Niveau comparatiste

Gomery et Allen par exemple traitent du cinéma à travers la question nationale et transnationale.

 Revue 1895, AFRHC : revue d’histoire du cinéma la plus importante de France

Revue qui vient de publier un ouvrage sur le code Hays.

A quels enjeux s’intéresse cette histoire culturelle du cinéma ?

Aux représentations collectives propres à une société

Quelles sont les relations des films avec certains groupes sociaux du public consommateur
Etudier la manière dont un auteur s’intègre dans la société, dans la culture

Importance de l’application de la méthodologie historienne.

Dimitri Vezyroglou, Le cinéma en France à la veille du parlant (2011) : un essai d’histoire culturelle,
dans lequel Vezyroglou choisi d’aborder le film d’Abel Gance Napoléon (1927) pour montrer l’apport
que permet l’histoire culturelle pour penser un film.

Vezyroglou va démontrer que le film d’Abel Gance Napoléon cherche à transmettre l’idée que le
cinéma aussi a des « auteurs » (volonté de légitimation du cinéma en tant qu’art), à travers le
traitement de la figure de Napoléon. A travers le traitement romantique de la figure de Napoléon le
film agit comme l’invention et la mise en œuvre de la conception du statut d’auteur de cinéma,
d’auteur au cinéma.

Film Napoléon, (1927) d’Abel Gance

Les images de la scène d’ouverture se réfèrent à la peinture romantique

Les tableaux de Friedrich, notamment « le voyageur contemplant une mer de nuages »

A propos des images des îles sanguinaires. Un plan qui épouse l’histoire romantique de l’Allemagne.
Vezyroglou va expliquer qu’il n’y a pas seulement « analogie » mais l’histoire de l’art demande d’aller
plus loin que la culture visuelle. Il faut se questionner sur le lien entre Gance et la peinture
romantique. Une intentionnalité de la part de Gance

Une des principales sources de représentation de Napoléon dans le film sont des productions de
Thomas Carlyle (1795-1888), un écrivain et historien écossais.

Carlyle qualifie Napoléon comme le « dernier de nos grands hommes »

La vision de Napoléon par Carlyle est imprégnée de la vision romantique. Pour Carlyle et pour Gance
Napoléon est une figure de la transcendance, un héros romantique.

Gance dit « Napoléon c’est Prométhée. Il ne s’agit pas ici de moral ni de politique, mais d’art. »

La culture de Gance s’est construite avec le romantisme.

Napoléon comme un homme total, idée d’une grandeur individuelle. Un homme capable de dominer
la foule.

Extrait de l’Auberge :

Cette séquence montre comment le héros qui est en danger ressort au milieu de la foule, en
convoquant contre les nationalistes-corses la mère patrie qu’est la France pour tout le monde.

Sa force d’esprit va lui permettre de calmer la foule. Une « volonté surhumaine » répond à l’image de
Bonaparte par Carlyle, qui est une image proprement romantique. Tout est construit dans la mise en
scène pour que ce soit la figure de Napoléon qui donne la mesure de la mise en scène.

Le soleil qui dessine l’auréole au-dessus du chapeau de Napoléon. Dans son analyse, Vezyroglou va
s’attacher à la figure de cinéaste que Gance se dessine en tant qu’artiste.

Pour Gance, comme pour les romantiques au XIXe siècle, celui qui peut est celui qui doit exercer son
pouvoir autant que possible, c’est la métaphore de la puissance qui devient la métaphore de la
création et de l’art. Or, en l’occurrence la figure de Bonaparte renvoie à une figure de créateur, un
héros comme projection de sa propre figure d’artiste démiurge.
Gance construit sa figure d’auteur à travers ce film. L’entreprise du film est pharaonique (au niveau
économique). Dans toutes les photographies de tournage, Gance apparaît la plupart du temps en
surplomb, on peut lire le film comme cette concrétisation de cet être auteur que Gance veut être.

Moment pour le cinéma où celui-ci doit s’affirmer en tant qu’art. En lien avec l’orgueil de Gance

La réception du film a été controversé. Critique partagé, louange sur l’aspect esthétique du film. Un
film critiqué car constituant une irréductible apologie de la dictature. Une vision romantique qui
prend une orientation idéologique.

Vezyroglou constate que même si le film est insituable politiquement, il repose tout entier sur cette
fascination romantique pour les grands hommes. Capacité de l’histoire du cinéma de mettre l’accent
sur les enjeux politiques du cinéma

Extrait de la course poursuite :

Aspect spectaculaire, rythmé

Dans ces images, se dessine une obsession de la puissance hollywoodienne

Pathé « si vous voulez vous imposer au cinéma, il faut aller au Etats-Unis », modèle d’un grand
cinéma américain. Gance tient compte du conseil de Pathé en va passer 5 mois à Hollywood, et
revient en étant persuadé qu’il a tout compris.

Gance développe le montage rapide (ultra-rapide)

Gance aimait les films de Douglas Fairbanks, Le signe de Zorro (1920)

Influence de scènes récurrentes de Zorro

Rappel des films de Zorro.

Le cinéma français est contraint de se situer, film destiné à reconquérir le public américain, une
volonté d’exportation. Des références populaires (les films de Zorro) viennent contrebalancer les
références au romantisme.

Avec cet objet, Vezyroglou plante le fait que le cinéma est à a fois un objet esthétique et culturel, et
que chacune des deux approches a une légitimité, et qu’aucune de ces deux dimensions n’a
l’exclusivité sur l’objet même.

« L’histoire du cinéma n’a pas une méthode mais des méthodes. »

Double empreint culturel chez Gance entre élitisme (références au romantisme, peinture, littérature,
etc.) et culture populaire (référence à Douglas Fairbanks et Zorro).

L’histoire culturelle du cinéma permet donc de penser le rapport qu’entretient le cinéma avec
d’autres formes d’art plus ou moins populaires ou plus ou moins élitistes. Vezyroglou montre que les
pratiques et les objets culturels sont les vecteurs de la culture.

Vezyroglou traite aussi de la question des cinématographies nationales, et de la compétition des


cinémas qui découle de la concurrence internationale, en révélant la volonté de Gance d’imposer une
qualité de cinéma français sur Hollywood. Ce qui amène des questionnements sur l’ancrage
économique de l’industrie cinématographique, puisque c’est toute une industrie culturelle qui va
innerver un film.
Michelle Lagny, elle, parle du film Le Corbeau, Clouzot, 1943

Les Français en regardant le film ont pu se dégouter un peu (d’eux-mêmes)

Même dans Napoléon, une visée didactique davantage destiné à un public français, qui possède des
connaissances sur l’histoire de France, une plus grande connexion avec ce public-là. Il y a dans une
histoire nationale, des spécificités. La culture nationale a ses propres limites.

Il y a aussi un niveau où la culture peut dépasser la stratification géopolitique :

Les films de Visconti par exemple, références à la musique italienne, mais aussi à la musique
allemande, références à des philosophies allemandes, etc.

La circulation des films entrainement un jeu d’influence réciproque.

Par exemple le rôle joué par l’attraction du cinéma Hollywoodien sur le cinéma français

Qu’est-ce qui dans un film dit qqch sur la culture dont il émane et comment le dit-il ?

Si on revient à Gance, son film s’inscrit dans une décennie (1925-1935) cruciale, qui est la période de
passage au parlant. On passe d’un cinéma muet dit « universel », il constituait un langage visuel qui
permettait de dépasser les barrières linguistiques.

Les versions multiples

Dans les versions multiples on voit des différences culturelles. Ce moment de passage au parlant est
un moment particulièrement intéressant

Le rapport à Hollywood, est fondamental pendant cette transition au parlant. Quand on parle de
cinéma national pendant cette période c’est toujours en regard de Hollywood. A l’époque on ne dit
pas « cinéma américain » mais « cinéma Hollywoodien », car Hollywood avait une visée universelle,
de dépasser les frontières.

 Thomas Elsaesser, European Cinema : Face to face with Hollywood (2005)

La question des transferts culturels.

Le passage au parlant : appréhension différente selon les cultures


 Christophe Gauthier, Anne Kerlan, Dimitri Vezyroglou, Loin d’Hollywood ? Cinématographies
nationales et modèles hollywoodiens (2013)

Dans le chapitre de cet ouvrage intitulé « Les voix du succès ou comment le parlant a sauvé le
vedettariat français » (p.115) Myriam Juan explique que, contrairement à ce qui est véhiculé, le
parlant aurait sauvé le vedettariat, en France.

Myriam Juan montre que l’idée selon laquelle le parlant aurait signé la fin de carrière de nombreux
acteurs du muet, ne résiste pas aux études sur le cinéma français.

A cette époque, les vedettes françaises de cinéma ont peu de rayonnement, et le parlant va leur offrir
une nouvelle voie et contribuer à revaloriser leur jeu.

Le cinéma avant la première guerre mondiale, est détenu principalement par la France avant la
guerre. Rapport de dominance qui va s’inverser en faveur des Etats-Unis après la guerre.
Des producteurs français accusés de ne pas en faire assez en France pour promouvoir les vedettes
françaises. Contrairement au star-system mis en place à Hollywood. Les critiques observent
l’importance des moyens financiers mis au service de la réputation de leur acteur et actrice, dans le
cinéma Hollywoodien.

L’Allemagne va essayer d’imiter cette politique des acteurs (avec le studio de la UFA). Ce qui explique
pourquoi les vedettes françaises, très souvent ne vont percer qu’après avoir tourné en Allemagne.

Myriam Juan va se demander s’il y a des fondements culturels qui expliquent ce décalage entre la
politique concernant les vedettes françaises et les autres.

En France, lors du passage au parlant, le problème de la « diction » des acteurs et actrices qui est
traité explicitement dans Chantons sous la pluie de Stanley Donen, ne va pas du tout se poser pour
les vedettes françaises, qui n’auront absolument pas ce souci de diction.

Ce décalage s’explique par le fait qu’en France les acteurs de cinéma ont majoritairement été formé
au théâtre. Donc finalement les acteurs français étaient même bridés dans le cinéma muet, là où avec
le parlant ils peuvent enfin utiliser cet atout qu’est leur voix. Exemple : Michel Simon dans le film Du
haut en bas (1933) de George Wilhelm Pabst. Michel Simon un acteur comme d’autres venant du
monde du théâtre.

Cette question de la voix dans les années 30 : une manière de parler français (Arletty, Jean Gabin,
Michel Simon, etc.)

Expressions populaires, qu’on associe à des films français.

Contrairement aux Etats-Unis donc, l’arrivée du parlant va permettre l’essor du vedettariat en France,
avec des acteurs comme Jean Gabin, Jean Marais, Arletty, et tant d’autres par la suite. Une
connivence culturelle qui passe par la langue, qui participe d’une vigueur du cinéma français.

Les théories féministes


La Chambre (1972) Court-métrage de Chantal Akerman (hw_dungeonroof3a_h_en_120
(youtube.com))

Par un long panoramique à 360°, la caméra filme lentement, mais à différentes vitesses de rotation,
deux pièces d'une habitation, la cuisine et la salle de séjour qui sert également de chambre à coucher.
Sur le lit est allongée une femme.

Le silence vient supporter l’acuité visuelle. Film contemplatif, qui exige un travail du spectateur. Le
film exige un travail du spectateur, le geste de la caméra oblige le spectateur à examiner des détails
de la pièce, par la longueur et la lenteur du panoramique.

Malgré nous on cherche les traces d’une action qui nous serait raconté.

Evènement visuel : le changement de sens du mouvement de la caméra

On attend une action

Le geste de caméra et le féminisme sont liés.

Le fruit renvoie à la féminité, lien entre la femme et la tentation, le péché originel. Repris comme
topos. La femme comme associée au péché
1970 : premiers festivals de films dédiés aux films de femmes

New York, juin 1972

Edimbourg, août 1972 (présence de Laura Mulvey)

Festival international de Créteil « films de femmes »

Il s’agit de s’emparer de la caméra. Phénomène qui touche les arts plastiques/visuels en général. Idée
que les femmes doivent s’emparer des formes artistiques.

 Peinture de Birgit Jügenssen, Récurer le sol, 1975


 Photographie de Birgit Jürgenssen, Ich möchte hier raus ! (« je voudrais sortir de là »), 1976

Œuvre qui pointe l’isolement social de la femme, un regard caméra qui agit comme une adresse au
spectateur, une invitation ou un avertissement ?

Une œuvre marquée par l’humour également et qui s’inscrit dans un mouvement de libération des
femmes dans le cinéma.

Musidora : premier festival de films de femmes à Paris en 1974

Militantes/artistes qui pensent qu’il faut une « révolution du regard », le cinéma étant jusqu’alors
privé, mutilé de la vision féminine.

Œuvre « Les muses s’amusent » en 1975

Photographie de Claude Jourde lors d’une réunion du groupe Les muses s’amusent.

Les « Insoumuses » (ptdr)

1969 – 3% de femmes cinéastes

1980 – 9% de femmes cinéastes

Film Sois belle et tais-toi, (1976) Delphine Seyrig

Les théories féministes dans le cinéma se développe au milieu des années 1970 surtout aux Etats-
Unis et un peu en Angleterre. Cependant ces théories sont encore et seront encore longtemps
absentes en France. Car la tradition auteuriste est très ancré en France et rechigne à intégrer ce biais
analytique.

D’importantes revues de cinéma qui se créent à cette période :

-Revue : Camera Obscura

-Revue : Woman film, 1972

-Revue : Screen

-Revue britannique : mf

-Frauen und Film, une revue de cinéma féministe allemande, fondée en 1974 à Berlin par la
réalisatrice Helke Sander (aussi une théoricienne féministe allemande)
Aux Etats-Unis les théories féministes vont être assez vite institutionnalisées dans les universités. La
place des femmes va enfin être questionnée et repensée dans différentes disciplines.

Emergence des Women Studies

En France, encore rien de tout ça n’arrive à cette époque, il y a uniquement quelques publications
ponctuelles dans des revues.

 Françoise Audé « ciné-modèles cinéma d’elles » (1981)

Des résistances en France à ce type d’étude car le poids de la tradition, le privilège des approches
auteuristes. La perspective féministe va s’imposer en France seulement dans les années 1990.

 Un volume : « 20 ans de théories féministes sur le cinéma » dans la revue CinémAction


 Ouvrage de Noël Burch et Geneviève Sellier, « La drôle de guerre des sexes du cinéma
français »

Ouvrages anglo-saxons sur le féminisme :

 Molly Haskell, From reverance to rape : Treatment of Women in movies

Mise en évidence des systèmes de domination, des schémas d’oppression mais relative pauvreté
de l’étude cinématographique

Laura Mulvey arrive et pose ses couilles sur le cinéma hollywoodien.

Laura Mulvey et Claire Johnson vont être les premières à élaborer des théories à la fois féministes et
cinématographiques. Leurs thèses vont être fondamentales.

Première publication : Plaisir visuel et cinéma narratif en 1975 dans la revue Screen. A ce moment-là
Mulvey n’est pas encore universitaire mais simplement passionnée par le cinéma. La démarche de
Mulvey est pluridisciplinaire mêlant psychanalyse/sémiologie*/etc.

La sémiologie consiste à analyser comment un film produit du sens, signifie. Christian Metz a écrit un
ouvrage fondamental sur le sujet langage et cinéma, dans lequel il introduit la notion de « texte
filmique » et propose d’envisager le film comme un discours signifiant.

Visual pleasure and narrative cinema, Laura Mulvey.

Une analyse des films en tant qu’objets représentatifs de la société patriarcale

Apparition de la notion de « male gaze » ensuite repris par le féminisme en général

Un article qui sera sujet à plusieurs polémiques, et qui va susciter une critique abondante. Mulvey
elle-même va retravailler et revenir sur son article.

Dans son article Mulvey veut faire « un usage politique de la psychanalyse ». Rendre compte dans
une perspective féministe que l’inconscient structure les façons de voir. Mulvey affirme en effet que
« les films grand public ont codé l’érotisme selon le langage de l’ordre patriarcal dominant ». C’est-à-
dire que les films sont en partie construit sur le plaisir du spectateur. Mulvey incite donc dans cet
article à analyser ce plaisir. Elle met en évidence le fait que dans le cinéma hollywoodien classique la
femme est toujours « porteuse de sens » et jamais « créatrice de sens ». Elle empreinte à Freud la
notion de « pulsion scopique », s’emparer des individus comme des objets de plaisir scopophilique,
et postule seulement sa théorie en fonction du spectateur masculin.

Laura Mulvey prône alors un « cinéma alternatif », un cinéma qui défie le cinéma dominant.
[Les grands penseurs agissent sur le langage (je ne sais pas pourquoi j’ai écrit ça mais bon)]

Notion fondamentale : le voyeurisme

Ex : la scène primitive : l’enfant qui surprend ses parents en train de faire l’amour (acte qui peut être
perçu comme une violence). Volonté de l’enfant d’aller vers l’interdit.

Dans son article, Mulvey défend l’idée que le cinéma provoque 2 types de plaisir : le plaisir de voir qui
se mélange à un plaisir narcissique qui découle du processus d’identification au personnage masculin
(possesseur de la femme).

Cette analyse s’appuie sur les travaux de Lacan à propos de la notion d’identification. Lacan théorise
en effet ce qu’il appelle la « phase du miroir », phase qui va intervenir chez l’enfant et participer à la
construction de sa subjectivité propre. Elle correspond au moment où l’enfant se découvre et se
reconnaît dans le miroir comme lui-même, comme sa propre personne.

Une phase qui intervient à partir de 6 mois environ, lors de laquelle on observe des signes de
« jubilation triomphante » lorsque l’enfant se reconnaît dans le miroir. Par le regard l’enfant va donc
pouvoir sortir de cet état de confusion, se constituer son image corporelle et acquérir cette
conscience de l’unité corporelle, lui permettant de se différencier corporellement.

Ainsi cette première identification est donc la matrice de toutes les identifications ultérieures de
l’individu et Mulvey (comme d’autres) va défendre l’idée que le cinéma nous fait rejouer cette phase
du miroir. Le cinéma comme une projection du moi, à travers des personnages on-screen.

Mulvey explique que la fascination peut provoquer une perte du moi en même temps qu’un
renforcement de l’ego.

Le cinéma hollywoodien construit des « moi idéaux », ce qui procure d’autant plus un plaisir
narcissique lorsque le spectateur s’identifie à la star. Le spectateur éprouve une satisfaction de l’ego à
travers l’identification.

Le cinéma produit des plaisirs contradictoires. Le motif de la femme fatale incarne un de ces
paradoxes puisque celle-ci est à la fois source de plaisir et menace. La femme fatale représente le
complexe de la castration chez l’homme.

Ce complexe de la castration intervient au moment de la découverte des sexes, il désigne cette peur
de l’homme de perdre le pénis. Chez la femme ce complexe est plutôt vécu comme un manque de
quelque chose.

« Le cinéma reconduit les structures psychiques de l’ordre patriarcale dominant »

Hitchcock et la théorie féministe


 Tania Modleski, The Woman Who Knew Too Much, Hitchcock and Feminist Theory, (2015)

En Français : Hitchcock et la théorie féministe : les femmes qui en savaient trop.

Hitchcock devient un cinéaste central pour les théories féministes dans les années 1970.

Un critique, Robin Wood : « comment atténuer l’image de Hitchcock comme un cinéaste misogyne »

La conjonction d’une question persistante – qu’en est-il des femmes parmi les spectateurs ?
Ouvrage de Tania Modleski (« The women who knew too much »), dans lequel l’autrice défend l’idée
que le regard féminin ne serait pas seulement envisageable de manière pessimiste. Elle pense qu’on
peut dépasser la question de savoir si Hitchcock est un cinéaste misogyne ou pas.

Hypothèse : une ambivalence à l’égard des femmes chez Hitchcock, quelque chose dans ses films qui
peut aller à l’encontre de l’autorité des personnages masculins. Certains personnages féminins qui
résistent à l’assignation patriarcale. Ces films-là seraient donc une matière intéressante pour les
théories féministes.

Rebecca (1940), un film d’Alfred Hitchcock

A la sortie du film Rebecca (1940) on a reproché à Hitchcock son penchant pour la littérature
féminine et son manque d’humour. Or Selznick explique ce choix de puiser dans une littérature
féminine par le fait que c’est un moyen pour permettre aux femmes de s’identifier au vécu de ses
personnages « il faut que chaque femme se dise : je sais ce qu’elle ressent ».

Tania Modleski dans son ouvrage va défendre le fait que dans le film, Rebecca est un personnage
« inassimilable » par la culture patriarcale.

Ce film témoigne du récit d’une trajectoire œdipienne féminine

Le complexe d’Œdipe, phase complémentaire de la phase du miroir (le petit enfant se reconnaît lui-
même dans le miroir). Cette fois la constitution du sujet va se faire de manière symbolique, le petit
enfant va prendre la mesure de sa singularité par la jalousie qu’il va développer vis-à-vis de son père
concernant sa mère. Le complexe d’Œdipe intervient entre 3 et 5 ans, une phase qui désigne un
ensemble de désirs (la fille pour son père/le garçon pour sa mère) et de la haine pour le parent du
même sexe. Ce schéma se révèle ambivalent, puisqu’en même temps qu’il rejette son père, l’enfant
va s’identifier à lui en tant que désirant la mère.

Dans le film on va retrouver cette ambivalence caractéristique du complexe d’Œdipe, à travers


l’identification au personnage. Puisque le spectateur va pouvoir s’identifier tantôt à l’agresseur, tantôt
à la victime (agresseur : Rebecca/victime : la jeune épouse).

Ce film, poursuit une trajectoire oedipienne féminine, et obéit à une centralité du regard féminin.

Scène d’ouverture :

Une influence du roman gothique anglais, avec ces lieux caractéristiques : les châteaux, les
cimetières, etc. Une voix-over qui s’affirme au féminin, une voix « je » féminine qui lance le récit.

Le flash-back s’ouvre sur les flots impétueux de la mer, une figuration classique des flots (aussi dans
Marnie) qui renvoie à la pulsion de mort

Panoramique vers le haut sur le personnage en haut de la falaise

D’abord de manière implicite puis de manière explicite, une série de gros plan, de plans rapprochés
qui s’ensuivent et le regard du personnage qui se porte sur le hors-champ.

La voix féminine qui arrive comme un deus ex machina et empêche la chute.

Le regard du personnage porté vers le hors-champ, est porté sur un espace vide, or l’héroïne va
remplir ce vide et ainsi l’empêcher d’aller vers la mort.
Ici l’objet du regard est encore implicite, puisque le regard de l’homme est tourné vers le hors-champ.
Par ailleurs si l’on s’en tient à l’idée que l’homme possède la femme par le regard, comme l’affirme les
théories féministes sur le cinéma, on peut aboutir à l’interprétation du fait que ce que regarde
l’homme dans le vide c’est finalement encore une femme, mais cette fois-ci c’est une femme absente.

En réalité la femme qui empêche l’homme de se suicider vient déjà former sans le savoir quelque
chose qui ressemble à un triangle amoureux entre l’homme suicidaire, sa femme décédée/invisible et
elle-même qui deviendra la nouvelle jeune épouse.

Rebecca, la première femme est prise comme un objet de désir du nouveau personnage féminin car
cette dernière va éprouver une jalousie féroce envers elle, en constatant l’obsession de son nouveau
mari pour cette femme de son passé. Ainsi comme il en va pour le complexe d’Œdipe, la figure de
Rebecca va faire l’objet d’une haine en même temps que d’une admiration, d’une volonté
d’identification pour la jeune épouse.

Cette jeune-femme qui d’ailleurs n’a pas de nom, elle doit essayer d’exister avec le fantôme d’une
puissante et écrasante figure maternelle qui est Rebecca. Le film va insister sur la jeunesse du
personnage féminin, sur sa maladresse, pour faire d’elle une enfant, pour l’infantiliser et ainsi
davantage l’inférioriser par rapport à la figure de Rebecca. Une héroïne au stade infantile, par rapport
à une figure féminine puissante.

Une séquence particulièrement intéressante, qui maintient le manque, en recourant à un récit qui
désigne sans cesse l’absence de Rebecca dans le champ, Tania Modleski parle d’une blague
castratrice. La femme absente devient omnisciente dans le film, la force de ce personnage féminin
tient à son absence dans le champ.

Tout cela fait que la fin du film qui est censé être une victoire sur Rebecca, un happy end pour les
deux époux doit être nuancée à l’aube de ces analyses.

Malgré la victoire de l’ordre patriarcale auquel Rebecca s’est attaquée, les séquelles laissées par ce
personnage sont encore présentes.

Rebecca en manipulant son mari, remet en cause l’ordre patriarcal. En effet, le film rappelle que pour
maîtriser l’héritage, il faut maîtriser la femme, or de cette manière en manipulant son mari, Rebecca
met à mal cet ordre patriarcal.

A la force physique masculine de son mari, Rebecca va opposer la puissance de son rire. Rebecca est
aussi bien capable de jouer la bonne épouse à la vue des autres, de la société, que de faire ce qui lui
chante en privée, dans le dos de son mari et de la société.

Ce que défend Tania Modleski est que Rebecca obtient néanmoins une victoire relative par
l’affirmation de sa propre force subversive, par le rire grâce auquel elle défie la force masculine.

Résolution ambigüe : car c’est l’insignifiance de l’héroïne qui lui permet de pouvoir prendre de cette
façon la place de Rebecca. C’est une victoire relative en tant que c’est son insignifiance aux yeux de
son mari qui fait sa valeur.

Ce film révèle aussi la douleur par laquelle la femme doit passer pour correspondre aux attentes du
désir masculin, qui par ailleurs est incertain et ambigu. Modleski dit que ce film montre que le désir
de l’homme est un désir contradictoire, le fait de vouloir à la fois une femme fatale et une femme
domestiquée. « Toute son œuvre témoigne d’une tenson fascinée et fascinante, une oscillation entre
l’attrait du féminin et son identification aux femmes, et … » Tania Modleski.
Tania Modleski montre que Rebecca, contrairement à ce qu’on put affirmer certains critiques est un
film très Hitchcockien car il pointe tous les dangers de l’identification, la terreur, la perte de soi, la
peur de se perdre soi-même.

Enjeu similaire dans la mort aux trousses, avec Cary Grant qui est pris pour Kaplan.

Le cinéma d’Hitchcock permet donc une critique autoréflexive. De plus Rebecca est un film qui
permet l’expression du désir féminin (sans pour autant être progressiste).

Approche culturelle d’un genre cinématographique : le Mélodrame


Les études sur ces questions vont se développer dans le milieu académique américain, des
départements de littérature. Dans ces départements, on comprend que le cinéma est un terrain
intéressant à aborder d’un pt de vue culturel.

Des développements très différents du film musical, une abondance du mélodrame et de formules
mélodramatiques, même à Hollywood, une évolution du mélodrame, nouvelle voie dans les années
1950.

Mélodrames indiens et italiens dans ces années-là

Le mélodrame pétainiste en France

Le mélodrame américain The Cobweb (1955) de Vincente Minnelli

 Essai de Thomas Elsaesser, Tales of sound and Fury : Observation on the family melodrama

Première généalogie du mélodrame remontant au spectacle vivant, au théâtre. Dans cette tradition
théâtrale, des formes de récits populaires où les personnages incarnent le vice et la vertu, et ces
formes possèdent une dimension musicale, la musique peut parfois introduire une distance ironique.

Pour Elsaesser, formes populaires accompagnées de musique ou de chants, formes dénuées de


psychologie, mais une importance du rythme, première grande composante historique du
mélodrame.

Une deuxième grande source du mélodrame familial des années 1950 : les romans du XVIIIe siècle où
on est replié dans la sphère privée (La nouvelle Héloïse par exemple).

Moments de crises intenses. Des relations familiales tournant autour d’amants maudits, de mariages
forcés. Opposition entre le désir et la loi, entre les classes sociales. Des situations qui font référence à
l’XP de toute une société. Avant la révolution française, ces romans finissent mal et après la
révolution française ces romans finissent mieux. Montre le bouleversement sociologique que la
révolution a ouvert et les perspectives nouvelles entrevues.

« Catégories qui sont toujours relatives au contexte historique et social donné. »

Dans tous ces romans, ont des éléments mélodramatiques qui sont en phases avec la société, et les
crises en cours.

Exemple : Les Misérables (1862) d’Hugo = un « super mélodrame »


La forme mélodrame s’impose au XIXe par le roman, proposant une vision incroyable de l’anxiété, liée
aux transformations subies par la société. Hugo a réussi à réunir dans son roman, plein d’expériences
subjectives, en réactions à différentes crises sociales, faisant comme un tableau sociologique de la
société française. Le roman mélodramatique réussit à rendre compte de vérités psychiques,
d’expérience subjectives, liées à un contexte sociétal. On assiste à un combat entre la volonté de
l’individu et l’ordre capitaliste.

Le mélodrame : un équivalent littéraire à un mode d’expérience particulier, cette forme qui permet de
rendre compte des expériences. Un matériau humain et social très riche.

Le mélodrame s’aborde à partir de la question du style, à travers des thématiques, le mélodrame est
un code expressif, qui existait déjà avec le cinéma muet mais qui va surtout évoluer avec l’évolution
de la technique, le technicolor, l’usage des grues.

Un pouvoir de signification plus fort grâce à la technique

Rendre compte des états psychologiques des personnages

Le mélodrame familial : mode de signification le plus élaboré et le plus complexe que le cinéma
américain ait jamais produit.

Le mélodrame est tourné vers l’intérieur : « tout se passe à l’intérieur » comme le dit Sirk.

Extrait Fontaine :

Capacité de concentration via la « métaphore visuelle » (Elsassaer), agitation intérieure figurée par les
multiples plans de la fontaine. Champ-contrechamp spectaculaire de la fontaine. Monumentalité de
l’œuvre statuaire avec le bruit d’eau qui figure par un déchainement de force l’agitation du
personnage. Par le biais de cette statue, le trouble du personnage est rendu visible, l’idée d’implosion
est figurée, la métaphore visuelle renvoie tout à l’intérieur du personnage. Or ce qui se joue à
l’intérieur du personnage passe par l’extérieur. Effet de miroir entre la torsion des corps et la torsion
des émotions du personnage.

Différents codes de moralités. Une constance du style comme signification

Written on the wind, (1946) Douglas Sirk

Séquence d’ouverture :

Musique qui annonce le fatum.

Les trois couleurs primaires, (rouge, jaune et bleu) avec la bouteille, la voiture, et le ciel.

Ce qui se passe à l’extérieur passe par des détails plastiques. Un genre cinématographique qui
revendique l’expressivité. Chaque personnage semble obéir à une chorégraphie, des gestes de
chutes, une série de chute. Un mouvement général d’effondrement qui précède le suicide, tout dit la
catastrophe imminente.

Certains plans relèvent de l’iconographie américaine, association d’une structure monumentale à une
voiture.

« Sirk possède un œil particulièrement vif en ce qui concerne les qualités émotionnelles contrastées
des textures et des matériaux et il les combine ou les fait s’entrechoquer pour obtenir un effet très
frappant » Elsaesser
Le mélodrame familial se caractérise par une pression sociale trop forte pour les personnages.
Enregistrer l’échec des personnages face à la société, à la pression sociale.

« Le monde est clos, les personnages sont agis par d’autres »des personnages écrasés par les
dynamiques sociales. Le mélodrame familial s’inscrit dans la filiation du roman du XIXe siècle, les
romans d’Hugo et de Balzac, on va suivre plusieurs personnages, forme romanesque qui traduit la
diversité des expériences individuelles.

Des personnages tous liés dans une configuration. Une dimension chorale avec un attachement à
chacun des personnages. Une habileté du scénario qui relèverait d’un don musical, d’une partition.
Envisager une structure d’ensemble en incorporant des positions individuelles différentes.

Le mélodrame : partir du privée, de l’intime pour parler du social. Le mélodrame traite donc aussi des
questions de dominance, dans la sphère intime. A partir de l’expérience subjective, le mélodrame
rend visible les forces qui oppressent l’individu. Le personnage est certes victime d’un carcan social
mais participe aussi à ce carcan social dans ce le genre du mélodrame.

Dans le mélodrame, spirale descendante, échec des protagonistes qui répond à un besoin
d’autodestruction. Masochisme même, d’une classe sociale amenée à se faire du mal à elle-même.
Dimension de pathos propre au mélodrame, exprimer la répression psychologique et sexuel, un
sentiment d’infériorité par rapport à une figure particulière.

Ces personnages sont pris entre le paraître et l’être, et sont sujets à des oppressions sociales qui les
entravent.

Des films qui constituent des documents sociocritiques, fines études psychologiques, mettant en
scène des excès propre à ces sociétés, des films qui expriment un refoulé de la société, par le décor, la
musique, la gestuelle, une énergie mélancolique, disant les impasses dans lesquelles sont plongées
les personnages.

Ce genre rend compte de systèmes figés de relations. Une atmosphère claustrophobie dans ces films.

Mirages de la vie (1959) Douglas Sirk

Jeune maman, qui est veuve, une femme rencontre un jeune photographe.

Une retombée brutale après un moment d’émotion qui va avec la demande en mariage, en l’espace
de quelques minutes, en fond conflit de sexe, la domination dans la sphère privée de l’homme sur la
femme.

Question de la discontinuité dramatique, qui se joue aussi dans écrit sur le vent. Un personnage
dévoré par une passion, dans des vêtements rouges, avec le feu, la musique. Elle danse un mambo
toute seule, qui exprime un désir sexuel frustré, une passion furieuse, une cadence de marche

Cadence d’une danse macabre, raccord entre les deux qui donne la charge violente, la violence
émotionnelle, pas sans lien avec le fait que Sirk coupe toujours dans le mouvement. Un corps réduit à
sa pulsion.

La mort du père qui fait retomber l’énergieSpectacle de la mort

Dans le mélodrame, expressivité plastique, idée d’une psyché infantile, une sentimentalité attachée à
la société, sentimentalité banale mise en scène de manière spectaculaire.

Discontinuité associée à des moments clos, idée de la claustrophobie renforcée par le traitement du
décor et des objets.
Passivité forcée, victimisation, espace de domesticité auquel est réduit la femme. Atmosphère
claustrophobe, l’importance des objets (scène cadeau de la télévision à la mère), la violence
intérieure des personnages est figurée par des objets, un style, une gestuelle.

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