RÉGULER L’AIDE MÉDICALE DES PAYS À REVENU INTERMÉDIAIRE :

LE CAS DU MAROC

Abdellatif Moustatraf, Jamal Taoufik

S.F.S.P. | « Santé Publique »

2019/1 Vol. 31 | pages 103 à 112

ISSN 0995-3914
DOI 10.3917/spub.191.0103
Article disponible en ligne à l'adresse :
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 Pratiques et organisation des soins
Réguler l’aide médicale des pays à revenu intermédiaire :
le cas du Maroc
Medical assistance in middle-income countries needs regulation
to ensure its sustainability: case of Morocco
1 1
Abdellatif Moustatraf , Jamal Taoufik
û Résumé
Introduction : La pérennisation de l’assistance médicale, consi-
dérée comme une nécessité dans les pays à revenu intermé-
diaire, requiert une régulation permanente. Au Maroc, le Régime
d’assistance médicale (Ramed) est confronté à l’insuffisance
d’outils de régulation et la difficulté à apposer ces outils effica-
cement en l’absence d’un régulateur. Dans ce sens, il est proposé
de déceler les insuffisances de la pratique actuelle de sa régula-
tion afin de recommander des actions et des outils permettant
d’améliorer sa mise en œuvre et garantir sa continuité.
Méthodes : L’analyse et les recommandations proposées sont
basées sur la revue de la littérature disponible et celle des textes
juridiques encadrant la couverture médicale de base ainsi que
l’état des lieux de la régulation du Ramed.
Résultats : La régulation du Ramed n’a pas été traitée au même
titre que l’assurance maladie obligatoire. Sur la forme, il n’y a pas
de régulateur propre au Ramed comme dans le cas de l’assu-
rance maladie obligatoire. Sur le fond, les outils prévus restent
très insuffisants et éparpillés entre plusieurs acteurs et parfois
difficilement appliqués. Appuyé par un cadre de référence selon
quatre axes : les ressources, les dépenses, l’offre de soins et la
population bénéficiaire, l’analyse a pu dégager quinze outils et
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actions permettant de corriger les insuffisances et soutenir sa
pérennité.
Conclusion : Les recommandations proposées ont besoin d’un
engagement soutenu de l’ensemble des acteurs qui doivent
déclencher le plus rapidement possible des actions urgentes
permettant d’optimiser la mise en œuvre du régime et améliorer
sa perception chez le citoyen.
Mots-clés : Aide médicale ; Accessibilité des services de santé ;
Qualité des soins de santé ; Régulation des systèmes de santé ;
Financement des soins de santé ; Gouvernance ; Pauvreté ; Aide
publique ; Sécurité sociale.
1
Université Mohamed-V – Faculté de médecine et de pharmacie de Rabat – Rabat – Maroc.
Correspondance : A. Moustatraf
moustatraf@gmail.com
Recherche originale
û Abstract
Introduction: The sustainability of medical assistance, considered
necessary in middle-income countries, requires permanent regula-
tion. In Morocco, the medical assistance scheme (MAS) is
confronted with the lack of regulation tools and the difficulty of
affixing these tools effectively in the absence of a regulator. In this
sense, the shortcomings of the current practice of its regulation
should be identified in order to recommend actions and tools to
improve its implementation and guarantee its continuity.
Methods: The analysis and the proposed recommendations are
based on the review of the available literature, the review of the
legal texts framing the basic medical coverage and the analysis of
the current practice of regulation of the MAS.
Results: The regulation of the MAS was not treated in the same
way as the compulsory health insurance. There is no proper regu-
lator as the case of the compulsory health insurance. In substance,
the planned measures remain very insufficient and scattered
between several actors and sometimes difficult to apply. Based on
a reference framework designed along four axes (resources, expen-
ditures, health care offer and population), the analysis identified
fifteen actions and tools to correct deficiencies and support its
sustainability.
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Conclusion: The proposed recommendations need a durable
commitment from all the actors who must trigger as quickly as
possible urgent actions to optimize the implementation of
the medical assistance scheme and improve its perception in the
citizen.
Keywords: Medical assistance; Health services accessibility;
Quality of health care; Health services administration; Healthcare
financing; Governance; Poverty; Public Assistance; Social
security.
Réception : 07/05/2018 – Acceptation : 23/09/2018
Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019 103
 A. Moustatraf, J. Taoufik
Introduction
Le dispositif de la couverture médicale de base au Maroc
(CMB) a institué deux régimes : l’Assurance maladie obliga-
toire (AMO), fondée sur les principes et les techniques de
l’assurance sociale au profit des pensionnés et les personnes
exerçant une activité lucrative, et le Régime d’assistance
médicale (Ramed), fondé sur les principes de l’assistance
sociale et de la solidarité nationale au profit de la population
démunie [1]. Dans un pays à revenu intermédiaire comme
le Maroc, il est nécessaire de concevoir une couverture
médicale pour les personnes ne disposant pas de ressources
suffisantes pour faire face aux dépenses inhérentes aux
soins, et ce pour des raisons économiques, sociales et
humaines. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) œuvre
pour que toutes les personnes aient accès aux services de
santé dont elles ont besoin sans se heurter à des difficultés
financières au moment de les payer. Au Maroc, le Ramed a
pu corriger les insuffisances d’un ancien système qui attri-
buait la gratuité sur la base de critères très subjectifs. Il a
été conçu pour permettre à la population démunie un accès
digne et fluide aux soins de santé à tout moment et renforcer
ainsi leurs capacités d’intégrer le monde du travail.
Après six ans de mise en œuvre, le Ramed, dont la
population qu’il couvre varie entre 7,5 et 11,5 millions de
personnes, est confronté à plusieurs défis, notamment au
niveau de son financement et sa gouvernance, et ce en
l’absence d’une régulation bien appropriée pouvant appuyer
sa mise en œuvre et sa pérennité [2-5]. Sa régulation, au
regard de ses spécificités d’assistance sociale, est caracté-
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risée par l’absence d’un régulateur propre, à l’instar de l’AMO,
et par la difficulté à apposer et mettre en cohérence des
outils et mesures établis par la réglementation, mais épar-
pillés entre plusieurs acteurs. Dans ce contexte, et compte
tenu de la nécessité de pérenniser le Ramed, cet article
propose une analyse de la situation actuelle de sa régulation
afin de mettre en évidence ses lacunes et proposer des
améliorations permettant de contribuer à son optimisation
et d’apporter les garanties nécessaires pour sa continuité.
Pourquoi une assistance médicale au Maroc ?
Malgré son modèle économique relativement fragile, le
Maroc a pu honorer ses engagements vis-à-vis de la réali-
sation des Objectifs du millénaire pour le développement, et
104 Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019
ce à travers des réformes structurantes. Ces réformes ont été
poursuivies pour permettre la mise en œuvre du nouvel
agenda international basé sur les objectifs de dévelop-
pement durable à l’horizon 2030. L’objectif en matière
de santé consiste à permettre à la population de vivre en
bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge.
Néanmoins, le chemin est encore long et nécessite de grands
efforts notamment dans un contexte marqué par des insuffi-
sances de financement et de gouvernance du système de
santé, une couverture médicale universelle (CMU) non
encore achevée et un taux de pauvreté encore élevé. Dans
cette optique, le Maroc a opté dès 2002 pour le parachève-
ment de son expérience en matière de couverture médicale.
Il a également opté pour la consolidation des droits acquis
face à un changement profond au niveau démographique
et socio-économique et une submersion des attentes de la
population par rapport à ses droits. Les appels à la réforme
émanant de population ont été bien entendu par les pouvoirs
publics qui ont accéléré le rythme de son intervention. Dans
ce contexte, une nouvelle constitution a vu le jour en 2011
pour répondre favorablement aux attentes de la population
malgré une économe fragile, caractérisée par la prédomi-
nance du secteur informel et des taux de pauvreté souvent
élevés. Dans un pays à revenu intermédiaire comme le Maroc,
la lutte contre la pauvreté est toujours l’une des préoccupa-
tions de l’État. Ce dernier consacre plus que la moitié de son
budget au social afin d’atténuer l’effet de la pauvreté et
renforcer la capacité des individus à s’intégrer au tissu écono-
mique. Le Ramed est, pour le pays, une des réponses visant
à concrétiser le droit à la santé dans la perspective d’atteindre
la CMU et reconfigurer le financement du système de santé.
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État des lieux de la régulation du Ramed
Au Maroc, la régulation du système de santé est assurée
principalement par le ministère de la Santé (MS) et portait
essentiellement sur l’offre et la demande des soins à travers
différentes mesures : allocation des ressources, fixation des
tarifs, autorisations de mise sur le marché des médica-
ments, d’exercice de la profession et d’installation des
cliniques et des pharmacies, prévention, filière de soins,
panier de soins… C’était beaucoup plus une régulation des
dépenses. Avec la mise en place de la CMB, la fonction de
régulation de l’AMO a été séparée de la gestion et de la pres-
tation de soins de santé en la confiant à l’Agence nationale
de l’assurance maladie (Anam) pour mettre en place une
série d’outils et de mécanismes de régulation. Par contre,

la régulation du Ramed n’a pas suivi la même logique car il
n’y a pas de régulateur propre et les outils sont, d’une part,
partagés entre plusieurs acteurs et, d’autre part, insuffi-
sants. En se référant à la pratique classique de la régulation
et à ce qui est conçu pour l’AMO, la pratique de régulation
du Ramed se fait comme décrit ci-dessous.
Gouvernance
Le Ramed implique plusieurs acteurs : le ministère de
l’Intérieur (MI), le ministère de la Santé (MS), le ministère
de l’Économie et des Finances (MEF), l’Anam et la Chefferie
du Gouvernement.
• Le MI joue un rôle central dans le processus d’identifi-
cation des bénéficiaires. Ses représentants président
les commissions d’éligibilité en plus que les dépôts
des demandes se fait auprès de l’autorité administrative
locale [6]. Ce ministère collecte et centralise toutes
les données des postulants et exerce la tutelle sur les
communes contribuant au financement du Ramed.
• Le MS s’occupe de la prise en charge des bénéficiaires à
travers les hôpitaux publics (HP), exerce la tutelle sur les
centres hospitaliers universitaires (CHU). Les HP sont des
services de l’État gérés de manière autonome, alors que
les CHU sont des établissements publics ayant l’auto-
nomie financière et la personnalité morale.
• Le MEF assure la contribution financière de l’État, via
le Fonds d’appui à la cohésion sociale (Facs) créé en
2012 [7] et transfert les fonds au MS, aux CHU et à l’Anam.
• L’Anam est chargée de la gestion des ressources affectées
au Ramed selon la loi n° 65-00, mais elle ne le fait pas,
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puisque le décret d’application n° 2-08-177 tel qu’il a été
modifié et complété dispose dans ses articles 25 et 26
de transférer les contributions des communes et des
personnes en situation de vulnérabilité au MS [6]. Le rôle
de l’Anam se trouve ainsi réduit à la collecte des contri-
butions des personnes en situation de vulnérabilité, à
l’estimation des contributions des communes, l’immatri-
culation des bénéficiaires et l’attribution des cartes.
• Les bénéficiaires ne sont représentés ni au conseil
d’administration de l’Anam, ni aux commissions d’éligi-
bilité. Il est à signaler que le citoyen a la possibilité
d’informer les commissions d’éligibilité sur la fraude ou
fausse déclaration d’un postulant [6].
• La Chefferie de Gouvernement a mis en place en 2013 un
dispositif pour la réforme de la CMB en créant un comité
interministériel pour le pilotage et le suivi. Les réunions
tenues dédiées au Ramed ont abouti en 2016 à une
recommandation qui consiste à instaurer une gestion
RÉGULATION DE L’AIDE MÉDICALE AU MAROC
financière unifiée et transparente par une instance indé-
pendante au lieu d’une gestion financière éclatée entre
plusieurs acteurs [5].
Population cible
Le Ramed est un régime déclaratif. L’éligibilité est basée
sur le revenu, le patrimoine et les données socio-
économiques du postulant pour s’assurer qu’il ne bénéficie
pas de l’AMO et ne dispose pas de ressources suffisantes.
Avec une population cible estimée à 8,5 millions de
personnes, le nombre d’immatriculations à fin 2017 a
dépassé le seuil de 11 millions, dont 7,5 millions possèdent
des cartes actives [9] puisque la durée d’éligibilité est
renouvelable tous les trois ans [8].
Panier et offre de soins
Conformément à l’article 121 de la loi n° 65-00, le Ramed
fait bénéficier sa population d’un panier de soins théori-
quement généreux. Néanmoins, la disponibilité des presta-
tions est un défi quotidien pour les prestataires de soins
dans un contexte marqué par l’insuffisance de ressources
et des bénéficiaires de plus en plus exigeants [2]. La gratuité
des soins que le régime doit offrir à sa population provoque
souvent l’appétit pour une surconsommation non justifiée.
Filière de soins
Pour bénéficier des prestations, le porteur de la carte doit
commencer, sauf urgence, par le centre de soins de ratta-
chement inscrit sur sa carte. Il est référé ensuite, en fonc-
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tion des prestations médicalement requises par son état de
santé, à la structure hospitalière la plus proche au sein
de la filière de soins. Le respect de la filière de soins est
l’une des contraintes du régime surtout avec une offre de
soins mal répartie et souvent insuffisante [10, 11].
Tarification
Actuellement, les prestations fournies dans le cadre du
Ramed obéissent à la tarification statutaire en vigueur
depuis plus de 15 ans, sachant que l’AMO bénéficie d’une
tarification spécifique arrêtée par voie de conventionne-
ment avec les organismes gestionnaires. Le MS considère
que cette tarification est devenue obsolète et nécessite une
révision. De plus, elle ne suit pas l’évolution de la médecine
et des technologies de santé. Une tentative a été faite en
2013 pour établir une nouvelle tarification simplifiée
adaptée au Ramed mais sans aboutissement.
Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019 105
 A. Moustatraf, J. Taoufik
Prévention
Le bénéficiaire du Ramed bénéficie, comme le reste de la
population, d’une prévention à caractère national. Il béné-
ficie des soins curatifs, préventifs et de réhabilitation, médi-
calement requis par son état de santé selon des programmes
prioritaires entrant dans le cadre de la politique sanitaire
de l’État. Les centres de soins de santé primaires de ratta-
chement assurent la gratuité des soins à toute la population
à travers des programmes et des campagnes de vaccination,
des opérations ciblées de dépistage et de suivi des maladies
chroniques. Au cours de ces dernières années, la priorité a
été donnée à la maternité, au suivi médical de l’enfant et
la lutte contre le cancer.
Nomenclature des actes et normalisation
Les HP et les CHU utilisent la nomenclature des actes
médicaux mis en place par le MS. Cette nomenclature est
en cours d’actualisation depuis 2015 afin qu’elle s’adapte
aux besoins. Du côté de la normalisation, un échange codifié
de données entre l’Anam et le MI en plus d’un échange avec
les organismes gestionnaires de l’AMO pour contrôler le
double bénéficie de l’AMO et du Ramed. Un identifiant
personnel est attribué à chaque bénéficiaire en plus d’un
identifiant national propre aux professionnels de santé et
aux établissements de soins. Il est à signaler que les
systèmes d’information des acteurs sont hétérogènes et
cloisonnés, ce qui a poussé l’Anam en 2017 à proposer la
mise en place d’un Système national intégré avec l’attri-
bution de cartes intelligentes.
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Cadre de référence pour analyser la régulation
Pour analyser l’état des lieux de la régulation du Ramed,
il est utile de concevoir un cadre de référence basé sur des
principes généraux en tenant compte des spécifications de
l’assistance médicale. Il est également fondamental de tenir
compte des spécificités du système national de santé et de la
CMB. La conception de la CMB au Maroc a été agencée sur
la base de la séparation entre le gestionnaire et le prestataire
avec la création d’un régulateur pour l’AMO et son absence
pour le Ramed. L’objectif est de préserver l’équilibre entre
les ressources et les dépenses et l’amélioration continue de
la prise en charge quantitativement et qualitativement ainsi
que l’élargissement de la couverture dans la perspective
106 Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019
d’atteindre la CMU [12]. La particularité marocaine de
séparer la régulation de la gestion et de la prestation de soins
dans le cas de l’AMO vise le respect des principes de bonne
gouvernance. Il s’agit d’une démarche qui consiste à concilier
entre les trois objectifs suivants : gérer un budget défini
permettant d’équilibrer entre les ressources et les dépenses,
assurer une offre de soins suffisante et de qualité et garantir
l’équité dans l’accès aux soins. De ce fait, le cadre de réfé-
rence proposé est bâti sur quatre piliers :
• les ressources, par lesquelles on cherche à assurer la
performance ;
• les dépenses, à travers lesquelles on cherche la rationa-
lisation et l’efficience ;
• l’offre des soins, qui doit être suffisante en respectant les
normes de qualité ;
• la population bénéficiaire, de manière à garantir une
couverture inclusive et équitable.
L’analyse de l’existant selon ce cadre de référence va
permettre de cerner l’ensemble des lacunes et de proposer
des améliorations pouvant contribuer à l’optimisation du
régimeetaurenforcementdesescapacitésfaceauxcontraintes.
Régulation par les ressources
Gouvernance
La gouvernance est l’une des grandes faiblesses actuelles
du Ramed. Si le régime implique plusieurs acteurs, les rôles
ne sont pas bien clarifiés et ne sont pas répartis de manière
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cohérente et efficace. La gestion actuelle du Ramed ne
respecte pas les principes de bonne gouvernance. L’Anam
entant que gestionnaire des ressources est en marge de ses
missions légales et son conseil d’administration n’a pas de
regard, ni sur les ressources, ni sur les prestations fournies
aux bénéficiaires. La gestion est exercée conjointement
entre le MEF et le MS. Ce dernier est gestionnaire et pres-
tataire contrairement aux principes de l’assurance sociale
imposant la séparation des deux fonctions. D’autre part,
l’Anam entant que régulateur de l’AMO et gestionnaire du
Ramed ne peut être efficace dans ses deux missions.
Montage financier
Le financement du régime est confronté à plusieurs
dysfonctionnements qui risquent de mettre le régime
en difficulté dans le court terme et remettre en cause

sa pérennité. Les ressources financières mobilisées ne
permettent pas de faire face aux besoins. La contribution
de l’État est éparpillée entre plusieurs acteurs et ne suit
pas la logique selon laquelle « l’argent suit le patient ». La
collecte des contributions des communes est partielle [11]
et reste loin d’un financement qui doit répondre aux
besoins. Les sommes collectées auprès des personnes en
situation de vulnérabilité sont dérisoires et ne dépassent
pas 30 % des montants dus [5]. D’autre part, le montage
financier initial a tablé sur 8,5 millions de personnes répar-
ties en 34 % en situation de pauvreté et 64 % en situation
de vulnérabilité alors qu’après six ans, plus de 11 millions
bénéficiaires ont été immatriculés répartis respectivement
en 90 % et 10 %. Ce qui a fragilisé le financement du
régime et a généré un endettement des HP et CHU [5]. En
l’absence de traçabilité des fonds et une facturation non
exhaustive, il est difficile d’identifier les dépenses réelles
ou estimer le coût du Ramed. Le financement du régime
doit couvrir les besoins liés à la consommation médicale,
les frais de gestion du régime et la réserve de sécurité.
L’insuffisance des ressources mobilisées doit pousser à une
amélioration au fur et à mesure corrélativement aux objec-
tifs attendus, et ce, à travers deux paramètres essentiels :
l’introduction des outils adéquats de régulation et la capa-
cité des financeurs à mobiliser des fonds supplémentaires.
Si l’État a fait des efforts, la contribution des communes
est loin des attentes, d’où la nécessité d’impliquer les
régions et les préfectures entant que collectivités territo-
riales (CT) au financement du régime, surtout que leurs
capacités financières dépassent celles des communes.
D’autre part, la suppression de la contribution des bénéfi-
ciaires doit laisser la place au ticket modérateur même
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symbolique dans l’objectif de freiner la surconsommation
générée par la gratuité des prestations.
Collecte des ressources
On ne peut pas parler de collecte des fonds du Ramed
en l’état actuel des choses, puisque les contributions de
l’État et des communes sont versées directement aux
prestataires de soins. L’Anam, au titre de gestionnaire de
ressources, ne collecte que les contributions des vulné-
rables sans pouvoir les mettre au profit du Ramed [4, 5].
Afin de corriger cette situation, le gestionnaire doit
récupérer chaque année l’ensemble des contributions
parvenues de l’État, des CT, des HP et des CHU (ticket
modérateur). Dans cette optique, une enveloppe doit être
fixée annuellement en capitalisant sur l’historique et en
tenant compte des besoins. Un ajustement de l’enveloppe
RÉGULATION DE L’AIDE MÉDICALE AU MAROC
doit être opéré chaque année pour garantir l’équilibre
entre les recettes et les dépenses. Pour cela, il faut procéder
au conventionnement afin d’arrêter les modalités de
collecte des ressources.
Allocation des ressources
L’allocation des ressources doit s’opérer essentiellement
selon trois rubriques :
• la prise en charge des bénéficiaires : l’allocation des
ressources doit faire l’objet de conventionnement entre
l’organisme gestionnaire (OG) et les prestataires de
soins sous l’encadrement du régulateur, à l’instar
de l’AMO. Un système intégré de prise en charge et de
facturation est indispensable. Comme étape transitoire,
l’allocation des ressources pour les HP nécessitant
une mise à niveau pourra se faire par capitation pour une
durée limitée ;
• les frais de gestion administrative du régime : il est néces-
saire de s’inspirer de l’AMO qui accorde un prélèvement
de 9,4 % des cotisations collectées au profit des orga-
nismes gestionnaires et 0,6 % au régulateur (Anam),
sachant que ce montant pourra être inférieur avec un
ajustement au fur et à mesure ;
• la constitution d’une réserve de sécurité : l’AMO accorde
10 % à la réserve, sachant que le régime peut être
dispensé au début puisque c’est un régime à financement
majoritairement public.
Accompagnement de la mise en place
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Il est indispensable que l’OG et le régulateur garantissent
de manière permanente le suivi et l’évaluation des opéra-
tions de collecte et d’allocation des ressources. La mise en
place de la régulation et le suivi de son impact est indispen-
sable pour contribuer à l’amélioration des ressources, la
rationalisation des dépenses et le renforcement du panier
de soins tout en veillant à l’amélioration de la qualité
des prestations. Il faut souligner que la rationalisation des
dépenses ne signifie pas la réduction de la consommation
des soins en volume, mais qu’elle consiste à élargir le péri-
mètre des prestations couvertes et augmenter le taux de
couverture tout en maîtrisant l’évolution des dépenses.
Pour y parvenir, le régulateur, appuyé par tous les acteurs,
doit élaborer un rapport global annuel en matière de
ressources et dépenses afin de retracer les opérations y
afférentes ainsi que les mesures prises pour faire face aux
éventuelles contraintes rencontrées.
Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019 107
 A. Moustatraf, J. Taoufik
Régulation par les dépenses
Conventionnement
En l’absence du conventionnement entre les acteurs
impliqués au Ramed, il n’est pas possible de bien cadrer et
encadrer le régime, d’où la nécessité d’un contrat programme
entre l’État et les acteurs impliqués afin de permettre
l’accompagnement du régime. Ce contrat doit fixer les orien-
tations générales et définir les engagements de chaque
partie prenante déclinés en objectifs stratégiques avec la
mise en place des outils de contrôle, de suivi et d’évaluation.
Sur le plan opérationnel, d’autres conventions spécifiques
doivent être conclues entre les acteurs impliqués découlant
du contrat programme. Que ce soit entre deux ou plus
d’acteurs selon le besoin, ces conventions doivent être
établies et partagées entre tous les acteurs pour avis et
suggestions avant d’être soumises au conseil d’administra-
tion du régulateur pour validation. Le conventionnement
considéré comme un des outils essentiels de régulation du
Ramed, doit apporter toutes les garanties nécessaires à la
rationalisation des ressources et la maîtrise des dépenses.
Tarification
En dehors des ajustements opérés sur la tarification
en 1999 et 2004, aucune évaluation ou adaptation n’a été
opérée depuis le temps malgré le besoin exprimé par les
prestataires de soins. L’élaboration d’une tarification
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simplifiée est très utile pour un régime à financement
public comme le Ramed. Il s’agit d’appliquer des forfaits sur
des groupes homogènes de pathologies en se basant sur
les données disponibles ainsi que des expériences réus-
sies [13]. Ce qui peut rendre la facturation plus fluide et
favorable à l’élaboration de relevés agrégés de consom-
mation médicale, en plus qu’elle peut également contribuer
au suivi et au contrôle permettant la rationalisation des
ressources et la maîtrise des dépenses. Avant d’adopter
une nouvelle tarification, il est utile de faire appel à une
expertise pour faire des choix bien fondés. D’autre part, et
tenant compte des spécificités du Ramed, cette tarification
doit être révisée tous les trois ans par négociation entre
les parties prenantes, appuyée par des études médico-
techniques et actuarielles. L’analyse et l’évaluation des
coûts des actes médicaux doivent tenir compte de l’évolu-
tion des technologies de santé, du volume de la consom-
mation et de l’enveloppe globale accordée au régime.
108 Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019
Facturation
Malgré les efforts déployés, de nombreuses difficultés
sont actuellement rencontrées par les HP pour améliorer
la facturation. Il s’agit essentiellement de contraintes liées
aux insuffisances du système d’information, au manque
de ressources humaines et aux difficultés empêchant le
recouvrement des créances. Il est primordial d’adopter un
système intégré et évolutif de prise en charge et de factu-
ration pour l’ensemble des HP et des CHU afin de répondre
aux besoins. En parallèle, il faut mettre en place tous
les prérequis d’une facturation optimale, notamment en
matière de ressources humaines en préconisant un système
de motivation et un programme de formation continue. La
facturation est un élément clé pour assurer la traçabilité
des fonds du Ramed et améliorer le financement de l’hôpital.
Elle permet la maîtrise de l’information relative à la
consommation médicale. C’est un chantier indispensable
pour améliorer le contrôle et permettre une régulation
efficace.
Ticket modérateur
Si l’État a opté pour la gratuité des prestations fournies
aux bénéficiaires, c’est pour permettre à tout moment, un
accès fluide aux soins de santé. Cependant, ni la gratuité est
effective ni le patient est satisfait. Le principe de la gratuité
n’est pas toujours la solution idéale. Elle génère souvent
une consommation abusive et des dépenses en augmen-
tation continue. En se référant aux données disponibles sur
la consommation médicale du Ramed [2, 5, 11], on constate
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que certaines prestations enregistrent une consommation
exagérée et nécessitent d’être maîtrisées. Comme outil de
régulation, le ticket modérateur pourra contribuer à la
maîtrise de la consommation sans qu’il soit un frein à
l’accès aux soins. Des précautions indispensables doivent
être prises pour l’adopter afin d’éviter un effet pervers.
Pour ce faire, le panier de soins peut être réparti en des
groupes homogènes de pathologies [14]. À titre d’exemple,
un groupe pourra bénéficier de la gratuité voire d’une
contribution symbolique (ne dépassant pas 10 à 15 dirhams
par acte médical), un deuxième permettra d’appliquer un
forfait annuel plafonné [13] et un troisième suivra la logique
d’une contribution proportionnelle au coût. L’idée du forfait
progresse dans la politique d’assurance maladie qui reste
cependant fortement basée sur le financement par presta-
tion [13]. Cet exercice nécessite une étude d’expertise pour
se prononcer sur sa faisabilité et faire des propositions
bien fondées.

Prévention
Rappelons qu’à ce jour, il n’y a pas de prévention spéci-
fique pour le Ramed. La prévention est une des mesures
importantes de régulation. Une prévention spécifique ou
complémentaire au programme existant nécessite la
collecte des données et le suivi de la consommation
médicale de manière continue. Dans un premier temps,
et afin de rendre la prévention plus efficace, il convient
d’accompagner l’existant par des programmes de commu-
nication et de sensibilisation bien ciblés surtout pour les
maladies chroniques, chose qui peut apporter un gain
important pour le Ramed notamment en matière de
réduction des dépenses.
Normalisation
Le Ramed profite de la normalisation préconisée par les
HP et CHU (nomenclature des actes médicaux, normali-
sation des outils de gestion et documents…) avec quelques
particularités spécifiques au régime (fiche de liaison,
modèle de facturation…). De plus, le Ramed a permis de
collecter d’autres éléments importants liés à l’éligibilité :
le formulaire de demande de bénéfice, le récépissé de dépôt
de la demande, les procès-verbaux des commissions
d’éligibilité, les listes des bénéficiaires, l’attribution de
l’identifiant personnel aux bénéficiaires… Or, malgré ses
outils mis en place entant qu’outil de régulation, il est indis-
pensable de développer davantage la normalisation pour
toucher d’autres aspects du Ramed.
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Régulation par l’offre de soins
L’offre de soins disponible se heurte à des contraintes
structurelles du Système national de santé, qualifié
de « déficitaire » sur plusieurs niveaux : insuffisance de
ressources humaines, financières et matérielles, insuffi-
sances au niveau du management hospitalier, inégalités
spatiales dans la répartition de l’offre de soins, etc. La situa-
tion a empiré avec la mise en œuvre du Ramed, d’autant
que les besoins croissants des bénéficiaires confrontent
une pénurie de ressources, ce qui a impacté la qualité de
service rendu.
RÉGULATION DE L’AIDE MÉDICALE AU MAROC
En matière de produits de santé
Comme outil de régulation, les produits de santé occupent
une place importante des charges supportées par le Ramed.
Dans le souci de maîtriser cet aspect, il est essentiel de
collecter suffisamment de données sur la consommation
médicale. Dans le contexte actuel, le Ramed est tiraillé entre
une pénurie de ressources et la satisfaction des besoins,
d’où la nécessité d’impliquer les professionnels de santé à
la maîtrise de la consommation médicale du fait qu’ils
jouent un rôle central en matière de prescription des
produits de santé en nature et en volume. Le management
de l’hôpital a également son rôle à jouer à travers un suivi
permanent notamment par le biais du contrôle médical et
l’évaluation médico-économique. Ce suivi doit accorder une
attention particulière aux affections de longue durée (ALD)
et aux affections lourdes et coûteuses (ALC) qui consom-
ment une part importante du budget de l’hôpital (le cas de
l’AMO, la consommation est de 40 % des dépenses totales).
D’autre part, le panier de soins offert dans le cadre du
Ramed doit s’adapter aux besoins mais sans perdre de vue
sur les moyens disponibles. Ainsi, il vaut mieux commencer
par un panier minimal dans l’objectif de l’élargir progres-
sivement selon les moyens disponibles et l’instauration du
ticket modérateur.
En matière d’infrastructure, ressources humaines
et équipements
L’infrastructure hospitalière est globalement suffisante
mais mal répartie sur le territoire national et parfois sous-
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équipée. Plus de 2 700 centres de soins primaires de ratta-
chement sont dénombrés, mais plus d’un tiers ne sont pas
médicalisés ou sous-équipés. Les HP, au nombre de 150,
sont souvent sous-équipés et manquent de ressources
humaines alors que les cinq CHU se trouvent dans une
situation financière meilleure que celle des HP alors que
chacun couvre un périmètre très large. L’État et les CT sont
appelés à multiplier les efforts pour la mise à niveau de
l’existant. Le chantier de la régionalisation avancée inter-
pelle la région à jouer un rôle central en matière de santé.
Elle doit s’impliquer dans la planification du secteur au sein
de son territoire et mobiliser des ressources supplémen-
taires pour la mise à niveau de son offre de soins en concer-
tation avec le MS. Tenant compte de l’existant, il serait
judicieux de prévoir dans l’immédiat un programme
d’urgence qui consisterait à mobiliser des ressources
exceptionnelles pour la mise à niveau des hôpitaux publics
et le renforcement des ressources humaines. Il serait utile
Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019 109
 A. Moustatraf, J. Taoufik
de définir, dans le cadre de ce programme, un paquet
minimum généralisé de l’offre de soins comme base de réfé-
rence, sachant que ledit programme pourra profiter du
cadre juridique instituant le partenariat public-privé pour
l’achat de prestations comblant les insuffisances.
Filière de soins
Comme outil de régulation du Ramed, la mise en place de
la filière de soins est une mesure importante pour favoriser
l’accès aux soins, organiser le flux des patients et faciliter
la mobilité des patients entre les différents niveaux de la
filière. C’est un moyen essentiel pour instaurer la coordi-
nation, la continuité et l’interdisciplinarité des prises en
charge sanitaires. Elle contribue à la rationalisation de
l’utilisation des soins de santé ainsi qu’à la réduction des
coûts y afférents. Néanmoins, la filière de soins doit être
bien étudiée pour s’adapter avec les besoins de la popula-
tion et ne doit pas constituer un frein à l’accès aux soins. Le
respect de la filière des soins est confronté à plusieurs
contraintes liées essentiellement à une répartition inéqui-
table de l’offre de soins, au manque de ressources humaines,
aux insuffisances de certaines prestations, à la vulnérabilité
des équipements, ce qui ne permet pas dans certains cas
d’imposer le respect strict de la filière des soins tel qu’elle
est organisée par le MS. Il est nécessaire de renforcer l’offre
de soins pour permettre une disponibilité à proximité
permettant au patient de ne pas parcourir de longues
distances pour bénéficier d’une simple prestation. Si le
bénéficiaire doit transiter obligatoirement par le centre de
soins de rattachement, ce dernier doit être bien équipé et
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doté de ressources humaines suffisantes pour assurer les
soins primaires.
Taux de couverture
En adoptant la gratuité des soins préconisée par le Ramed,
mal perçue par certains bénéficiaires, le régime a enregistré
une surconsommation de certaines prestations pénalisant
les efforts déployés, ce qui remet en cause l’effectivité de la
gratuité des prestations médicales fournies dans le cadre du
Ramed. Il est indispensable d’introduire un ticket modéra-
teur pour garantir la pérennité du régime. Cela requiert des
choix bien étudiés de prestations nécessitant un ticket
modérateur ou susceptible d’être plafonné, sans que cela
constitue un frein à l’accès aux soins. Si le ticket modérateur
ne semble pas désiré par la population démunie, il y a lieu
également de proposer un plafond global annuel par
110 Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019
personne avec la possibilité d’accorder des dérogations en
cas de dépassement de ce plafond. Il est essentiel de préciser
que le choix entre le ticket modérateur et le plafond global
annuel doit faire l’objet d’une étude approfondie basée sur
l’historique et l’évolution de la consommation médicale.
Régulation par la population bénéficiaire
Taille de la population
Le Ramed a connu une adhésion massive lors de son
démarrage. Ce qui n’a pas permis d’exercer un contrôle
rigoureux des déclarations des postulants. Vers la fin 2017,
plus de onze millions d’immatriculés dont 7,5 millions de
personnes ayant des cartes actives. Au fur et à mesure des
outils de contrôle ont été appliqués mais méritent d’être
renforcés davantage pour éviter des inclusions abusives et
des exclusions. Néanmoins, deux catégories de bénéficiaires
déjà identifiées profitent de manière illégale et pèsent lourd
sur le régime : les assurés de l’AMO ayant provisoirement
des droits fermés et les travailleurs non-salariés assujettis
à l’AMO. Pour ces derniers, il s’agit de ceux qui exercent soit
des professions libérales informelles (cas des petits commer-
çants et ceux qui exercent des métiers informels) soit des
professions libérales formelles mais non structurées (cas du
cordonnier, tailleur, coiffeur, etc.). Une décision doit être
prise pour qu’ils basculent vers l’AMO. Par ailleurs, la révi-
sion des critères d’éligibilité déjà obsolètes est devenue
indispensable pour les adapter aux évolutions du niveau et
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du mode de vie. Néanmoins, la maîtrise de la population
bénéficiaire comme mesure de régulation ne dépend pas
uniquement des critères d’éligibilité mais également de la
démarche préconisée par les commissions d’éligibilité pour
statuer sur l’éligibilité. Ces commissions ne sont pas bien
outillées et doivent être dotées d’un référentiel pour
bien encadrer leur fonctionnement en accordant une marge
d’erreur raisonnable. Précisons qu’il est toujours possible
de fiabiliser ce processus pour plus d’efficience, sachant que
l’éligibilité est renouvelable tous les trois ans.
Communication et sensibilisation
Tous les acteurs impliqués dans le Ramed sont unanimes
quant à l’intérêt de la communication et de la sensibilisa-
tion de la population comme éléments déterminants pour
la réussite et l’optimisation du régime. Devant l’insuffisance

constatée, le Ramed a besoin plus que jamais d’une commu-
nication ciblée comme mesure de régulation permettant de
maîtriser la taille de la population bénéficiaire afin d’adapter
le langage avec chaque cible : postulants, porteurs de carte,
professionnels de soins. C’est l’affaire de tous les acteurs
qui doivent se coordonner avec l’OG pour élaborer de
manière concertée une stratégie de communication et
mettre en œuvre un plan d’action détaillé. En outre, il faut
impliquer le bénéficiaire et prendre en considération son
avis et ses besoins, et ce, à travers une représentation au
sein du conseil d’administration de l’OG et aux commissions
d’éligibilité par le biais de la société civile et les instances
de défense des consommateurs.
Récapitulatif des actions recommandées
pour pérenniser le Ramed
De ce qui précède, l’analyse de l’état actuel de la régula-
tion du Ramed a permis de clarifier les insuffisances et de
proposer des actions qui doivent être concrétisées dans les
meilleurs délais possible afin de permettre au régime une
mise en œuvre optimale et soutenir sa pérennité. Celles-ci
se déclinent en quinze mesures :
• mesures liées aux ressources :
ƒ M1 : créer un organisme gestionnaire propre au Ramed
et confier sa régulation à l’Anam,
ƒ M2 : établir un contrat programme entre l’État et les
autres acteurs pour fixer les orientations stratégiques
et les objectifs à atteindre et clarifier les rôles des
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acteurs en créant une démarche de concertation et de
prise de décisions,
ƒ M3 : impliquer les régions et les provinces au finance-
ment avec une contribution consistante en créant une
solidarité interrégionale et intercommunale ainsi qu’à
la planification de l’offre de soins et des infrastructures
pour contribuer à la mise à niveau de l’offre de soins et
la réduction des inégalités,
ƒ M4 : mettre en place un espace de concertation pour le
suivi et l’évaluation des besoins en ressources humaines
en favorisant la motivation, la formation continue et la
mobilité au sein du territoire de la région,
ƒ M5 : instaurer un mécanisme bien étudié de tiers ticket
modérateur permettant une contribution symbolique
par les bénéficiaires pour accéder à certaines presta-
tions afin de maîtriser la consommation médicale,
ƒ M6 : élaborer un montage financier évolutif qui réponde
aux besoins de la population bénéficiaire et mettre
RÉGULATION DE L’AIDE MÉDICALE AU MAROC
en place un dispositif de collecte et d’allocation des
ressources financières en favorisant l’attribution
des fonds selon la consommation médicale ;
• mesures liées aux dépenses :
ƒ M7 : faire appel au conventionnement entre les
différents acteurs pour mieux organiser les actions
partagées et permettre le suivi et l’évaluation,
ƒ M8 : soutenir l’obligation d’une facturation exhaustive
dans les HP et les CHU et les renforcer par des
ressources humaines supplémentaires et un système
d’information intégré en optant pour une tarification
simplifiée arrêtée par voie de négociation entre l’OG
et les prestataires de soins sous la supervision du
régulateur,
ƒ M9 : renforcer les programmes actuels de prévention
en les adaptant aux besoins de la population du Ramed,
ƒ M10 : mettre en place des outils de normalisation
adaptés, renforcer les normes médico-techniques et
concevoir un cadre approprié du contrôle médical,
ƒ M11 : instaurer les principes de la bonne gouvernance
et renforcer le management hospitalier en établissant
un rapport global annuel sur les ressources et les
dépenses muni des indicateurs de performance ;
• mesures liées à l’offre de soins :
ƒ M12 : donner la priorité aux médicaments génériques
et recourir à l’achat groupé des médicaments et dispo-
sitifs médicaux en préconisant une gestion intégrée
du stock permettant aux professionnels de santé d’être
informés de manière régulière,
ƒ M13 : assurer un service minimum de soins à chaque
niveau de la filière avant d’imposer un strict respect,
ƒ M14 : étudier la possibilité d’instaurer un plafonne-
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ment annuel de consommation par personne pour le
moyen terme ;
• liés à la population bénéficiaire :
ƒ M15 : faire approprier le Ramed à ses bénéficiaires par
le biais de la communication et la représentation au
sein des instances de décisions.
Conclusion
Au-delà de la conception d’outils et de mécanismes de
régulation en tant que composante essentielle de la gouver-
nance du Ramed, et peu importe le schéma adopté pour la
mise en place de ces outils, il est indispensable de clarifier
les rôles de chaque acteur en garantissant le respect
des principes de l’assurance sociale qui recommande la
Santé publique volume 31 / N° 1 - janvier-février 2019 111
 A. Moustatraf, J. Taoufik
séparation entre les trois fonctions : la gestion, la prestation
de soins et la régulation du régime. Il faut créer une complé-
mentarité solidaire entre les trois fonctions de telle sorte
que tous les acteurs œuvrent de manière intégrée pour
atteindre les objectifs escomptés et pérenniser le régime.
Le régulateur doit être bien outillé pour garantir le respect
de l’application stricte des outils et mécanismes de
régulation à travers le suivi, l’évaluation et le contrôle.
Aucun conflit d’intérêts déclaré
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