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Reuter Yves. L'enseignement de l'écriture. Histoire et problématique. In: Pratiques : linguistique, littérature, didactique, n°61,
1989. Ateliers d'écriture. pp. 68-90;
doi : https://doi.org/10.3406/prati.1989.1503
https://www.persee.fr/doc/prati_0338-2389_1989_num_61_1_1503
L'ENSEIGNEMENT DE L'ÉCRITURE
Histoire et problématique.
Yves REUTER
PRÉALABLES ET ENJEUX.
Le titre de cet article, trop ambitieux sans nul doute, nous condamne au
schématisme. Que le lecteur soit donc prévenu d'emblée des aspects partiel et
partial de ce parcours, de ses lacunes et de ses partis pris, volontaires ou non.
Nous nous sommes assigné trois objectifs. Tout d'abord, essayer de
reconstituer une histoire des pratiques "innovantes" dans l'apprentissage
scolaire de l'écriture. Ensuite, tenter de montrer — au travers de cette histoire —
comment se construit, à partir d'apports hétérogènes, la possibilité d'une didactique.
Chercher enfin à problématiser l'apprentissage de l'écriture aujourd'hui, en
intégrant le maximum d'acquis antérieurs.
Nous avons voulu conserver une perspective historique sur ces trois
dernières décennies (1). Cela n'a pas toujours été facile tant les pratiques et les
apports théoriques tendent à se " chevaucher" chronologiquement. Nos points de
repères principaux ont été les lieux de manifestation de ce que l'on pourrait
appeler l'avant-garde didactique : institutions (I.N.R.P. ...), mouvements et revues
pédagogiques, ouvrages de référence et plus récemment stages dans les P.A.F. ou
Universités d'Eté...
Nous avons choisi de nous situer essentiellement par rapport au collège
qui, contrairement au lycée, ne sacrifie pas prioritairement au commentaire et
demeure un lieu d'expérimentation des pratiques de l'écrit.
Enfin, la quantité de notes est volontairement réduite au profit de
références bibliographiques placées à la fin de cet article et reprenant chacun des points
traités. Nous n'avons conservé que les ouvrages et articles qui nous ont paru
essentiels. Certains contiennent des références complémentaires, utiles à ceux
qui souhaiteraient approfondir telle ou telle piste.
(1 ) Nous avons dû renoncer à l'histoire longue et complexe des premières décennies de l'apprentissage scolaire de
l'écriture. Les débats qui l'accompagnent sont cependant particulièrement intéressants et permettent de
constater que, selon les époques, production et commentaire sont assimilés alternativement & la facilitation de l'écriture
et/ou à sa démocratisation. Le lecteur pourra se référer — outre les articles d'A. Chervel — aux ouvrages de :
- A. Prost : Histoire de l'enseignement en France, 1800-1967, Paris, A. Colin, 1968.
— A. Compagnon : La troisième République des lettres, Paris, Seuil, 1983.
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I. - LE MODÈLE TRADITIONNEL.
Le modèle "traditionnel " — encore dominant à l'heure actuelle — demeure
sans alternative quantitativement notable au collège jusqu'à la fin des années
soixante. Les différents courants, qui s'y sont opposés, en ont produit une critique
sévère. Bien que connue dans ses grandes lignes, celle-ci nous semble à
reprendre inlassablement car les "avancées" théoriques ou pratiques modalisent
et transforment, chacune de façon spécifique, l'analyse de ce modèle. De plus, les
propositions innovantes se justifient en grande partie par les dysfonctionnements
engendrés, selon elles, par les pratiques antérieures.
1. — La rédaction :
Le premier pôle du modèle "traditionnel" est celui de la rédaction (ou
"expression écrite") avec laquelle se confond bien souvent l'écriture scolaire. Il
est intéressant de constater qu'elle n'est pas apprise en tant que telle (2) mais
considérée comme une synthèse, un aboutissement des apprentissages
consacrés aux "sous-systèmes" : grammaire (3), lexique, orthographe, conjugaisons...
Parmi les nombreuses critiques portées à rencontre de la rédaction, nous
en rappellerons sept qui nous semblent particulièrement importantes:
— la situation de communication est artificielle (absence de socialisation ; "
malentendu communicationnel " : la consigne porte sur les contenus, la réponse éva-
luative se fonde sur les "formes"; calculs de communication complexes...) ;
— le statut du texte reste très ambigu voire contradictoire (trop réduit ; purement
scolaire mais devant se garder d'un excès de "scolarisme" ; sans travail sur sa
fonctionnalité...) ;
— il existe une distorsion entre consigne (exigeant un texte) et évaluation (portant
sur les phrases) ;
— l'évaluation est perçue — par les enseignés et les enseignants — comme
ennuyeuse, inefficace et close (s'opposant aux processus d'une évaluation forma -
tive) ;
— le réfèrent quasi-exclusif de la rédaction est le récit littéraire (voir la place des
textes à imiter ou dont il faut "s'inspirer ") : l'accent est mis conséquemment
sur la "légitimité" (non expliquée) du dit et du dire;
— les stratégies d'apprentissage se réduisent bien souvent à l'imitation et à la
répétition (une rédaction tous les quinze jours) ;
— de même les stratégies d'amélioration se limitent fréquemment à des renvois
psychologisants (" Faîtes attention... ", " Réfléchissez... ") ou au retour du même
(on va retravailler tel sous-système puisqu'il ne semble pas avoir été intégré).
Dans cet ensemble, nous soulignerons encore trois faits :
— la rédaction ne repose explicitement sur aucune théorie du texte;
— elle ne dit rien de construit sur l'écriture (4) ;
— elle vit sous le joug d'un réfèrent littéraire, purement scolaire, réduit et archaï-
sant.
(2) Jusqu'à une époque récente, il n'existait ni manuel, ni cours proprement dit.
(3) La grammaire de ressource n'est pas neutre non plus : surnormative, intra-phrastique et centrée sur la
morphologie.
(4) En témoigne le passage du brouillon à la copie rendue qui n'est qu'une mise au propre. Le cours donne — au
mieux — un modèle du texte achevé, sans affirmer d'ailleurs qu'il est achevable, sous cette forme, par un élève.
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2. — Etude des textes et des auteurs :
Le second pôle de ce modèle renvoie à l'étude des textes et des auteurs. Il
renforce le poids du littéraire et, sans doute, les blocages des élèves devant
l'écriture : activité mystérieuse devant laquelle on s'incline, pratiquée par des Auteurs
pourvus d'un don étrange venu d'ailleurs. La révérence devant des textes achevés
et valorisés occulte le travail d'écriture et les problèmes rencontrés. En témoigne
le peu de séquences scolaires sur les brouillons des écrivains. Une contradiction
risque d'émerger: comment apprendre ce qui ne s'apprend pas?
(5) Nous serons bref sur ce point: Pratiques en a déjà longuement traité (voir bibliographie).
(6) Les modèles de la narration ou de la description, convoqués mais implicites par la rédaction, se trouvent ici
formalisés.
(7) L'idée, selon laquelle "démonter" les textes permet de mieux les "monter" s'incarne très fortement dans ce
cadre.
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— de nombreux exercices ont émergé ou se sont multipliés : puzzles, suites de
textes, jeu sur les choix, parodies (8)... ;
— les référents culturels se sont ouverts à des genres auparavant minorés (contes,
fantastique...).
2. — Limites.
Il convient, d'un autre côté, de ne pas sur-estimer les effets de l'émergence
de la narratologie. La focalisation sur le récit littéraire ne disparaît pas: ouverture
des référents ne signifie pas bouleversement des hiérarchies. Complémentaire-
ment les recherches sur les autres types de textes n'auront de "retombées"
didactiques que plus tardivement.
Le travail sur les relations entre micro- et macro-structures demeure limité
(9) : nombre d'enseignants étudient certes différemment le récit mais à côté des
autres rubriques inchangées. Significativement, bien souvent les corrections de
l'écrit ne se modifient pas, portant majoritairement sur la phrase, la syntaxe, le
lexique, l'orthographe...
Dans bien des cas, l'intégration de la narratologie — à l'instar de la
linguistique appliquée — n'a pas transformé les fonctionnements pédagogiques (10).
D'une façon apparemment paradoxale, mais logique en fonction d'usages appli-
cationnistes, des cadres théoriques plus clairs et plus rigoureux ont pu engendrer
des récits d'élèves tout aussi stéréotypés qu'auparavant...
De ce survol nous retiendrons quelques éléments. Tout d'abord, la
narratologie permet sans doute de mieux appréhender les écrits mais elle ne pouvait — en
l'état — éclairer les mécanismes de l'écriture. Héritière du structuralisme, elle
exclut — avec la clôture du texte et l'immanence de l'analyse — les opérations
effectuées par le Sujet. Mais cela ne l'empêchera pas, reprise et modifiée par
d'autres pratiques et d'autres théories (voir points suivants), de favoriser l'écriture
en précisant les problèmes textuels auxquels elle se trouve confrontée, en
objectivant l'architecture des récits (11) et en générant l'image du mécano (cf. la combi-
natoire) moins "écrasante" pour les apprenants. Enfin ceci: les apports sur les
contenus sans réflexion pédagogique conjointe révèlent vite leurs limites en
matière didactique (12), même s'ils peuvent, au moins partiellement, améliorer un
enseignement.
(8) Et aussi fabrication de "matrices "de textes longs (voir les travaux du B.E.L.C.) et, un peu plus tard en France, les
"livres dont vous êtes le héros".
(9) II faudra attendre les "grammaires textuelles". Pour une introduction, voir B. Combattes, Pour une grammaire
textuelle. De Boeck-Duculot, 1983, et l'ouvrage très clair et très riche en exercices de M.-J. Reichler-Béguelin, M.
Denervaud et J. Jespersen, Ecrire en Français, Cohésion textuelle et apprentissage de l'expression écrite, Dela-
chaux et Niestlé, 1988.
(10) Voir, par exemple. Pratiques n° 11-12, Récit (1), novembre 1976.
(11) L'hypothèse suivante se développe massivement : maîtriser la description de l'organisation textuelle doit
favoriser les opérations de production.
(12) Ce qui n'empêche pas en revanche de favoriser la prise de conscience : a contrario, les limites mentionnées
construisent la nécessité d'autres apports.
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sans le détour théorico-universitaire qu'avait connu la narratologie, ce qui peut
expliquer leur succès et leur diffusion plus rapides. Leurs origines très diversifiées
(Oulipo, systématisation de procédés littéraires et rhétoriques, jeux de salon...) et
leur multiplicité rendent difficiles la synthèse et l'organisation de ces pratiques
(13). Il s'agit— à notre sens— d'une réalité protéiforme, hétérogène, cimentée
provisoirement par un lieu institutionnel (l'Ecole) et une conjoncture historique, mais
disponible aux utilisations les plus diverses (14).
2. — Limites.
Les jeux d'écriture vont souffrir de leurs manques théoriques sur deux
points essentiels. Tout d'abord l'image de l'enfant, simple inversion de la
représentation négative de la pédagogie "traditionnelle", se révèle propre aux dérives
mystiques (" l'enfant-poète ") et lourde de conséquences pour l'évaluation.
Comment décider devant certains faits textuels s'il s'agit d'un dysfonctionnement ou
d'une "entorse créatrice" ? Comment aussi évaluer après un tel appel au vécu ?
(13) Voir, dans la bibliographie, les articles de synthèse de J.-P. Goldenstein, J. Verrier et D. Delas.
(14) Voir leur développement et leur utilisation en formation professionnelle, dans des stages sur l'écrit, l'oral, la
communication, les groupes...
(15) Notion elle-même complexe. Se reporter sur ce point aux travaux de Winnicott.
(16) Rôle de "déclencheur" luttant contre l'angoisse de la page blanche.
(17) Déplus, elles permettent de ne pas fouf gérer: en ce sens, elles tendent à limiter ce que l'on appelle aujourd'hui la
surcharge cognitive.
(1 8) L'entrée principale de la narratologie était la lecture-analyse, celle des jeux d'écriture est l'écriture-production.
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Ces problèmes sont aggravés par l'absence de théorie du texte qui entraîne de
nombreux flottements dans la définition des objectifs. Conséquemment ces
activités, souvent vécues comme récréatives, resteront cloisonnées, sans grand lien
avec les autres dimensions du cours de Français (19).
D'autres limites existent. Ainsi le peu de réflexion sur l'origine de ces
pratiques ne permettra pas de développer des liens intéressants avec l'histoire
littéraire (20). De même l'ouverture des référents textuels s'avère restreinte : il s'agit
plus de substitutions (d'auteurs et de valeurs) que d'une réflexion sur la place et
l'usage des auteurs et des valeurs.
Enfin ces jeux restent alors — mais pouvait-il en être autrement
historiquement ? — soit en marge des autres apprentissages, soit conçus comme des
préalables, des "gammes d'écriture" selon l'expression de J.-P. Goldenstein. Il faudra
attendre quelques années pour les voir utilisés selon d'autres modalités : comme
adjuvants dans le cadre de l'écriture longue et de l'amélioration de texte (21),
comme moyen pour apprendre à élaborer d'autres types de textes (22).
Pour conclure sur ce point, nous dirons qu'avec les jeux poétiques,
l'écriture commence à apparaître comme une pratique essentielle de la didactique du
Français, tout en restant à l'horizon des réflexions théoriques. De l'écriture, les
jeux ne proposent encore qu'une image incertaine, hésitant entre la mise en
œuvre de règles et l'investissement psychique.
(19) Pourtant de nombreuses pistes existaient, concernant notamment les rapports jeux poétiques-syntaxe. Voir M.
Yaguello, Alice au pays du langage. Seuil, 1981.
(20) Dimension pourtant esquissée dans la Petite fabrique de littérature (voir bibliographie).
(21 ) Ainsi, A. Petitjean dans Pratiques d'écriture (CEDIC, 1982) montre comment mots-valises et mots-gigognes sont
intégrés à une description, elle-même insérée dans un projet d'écriture longue.
(22) Souvent des pratiques sont longtemps confondues avec l'objet sur lequel elles s'exercent. C'est le cas pour les
jeux poétiques.
(23) Dans les deux cas, nous nous référons à ce qu'ils en disent dans leurs écrits. Notre présentation fort simplifiée se
veut plus invitation à la lecture de ces écrits que substitut.
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1. — Dans la lignée d'E. Bing.
Outre le rôle fondateur de l'ouvrage d'E. Bing (Et je nageai jusqu'à la page),
nous retiendrons la place où se sont élaborées ces activités : un I.M.P. avec des
enfants en grande difficulté. Ce lieu originel a sans doute déterminé l'importance
du psychique, de l'investissement du Sujet (24).
E. Bing a été l'objet de nombreuses critiques. S'il est vrai qu'elle ne décrit
pas explicitement le procès d'écriture, elle mentionne néanmoins constamment la
durée et le re-tra vail nécessaire. Nous ne parlerons donc pas a priori de désaccord
mais d'ellipses qui nous gênent pour nous situer vis-à-vis de son travail.
Nous sommes en tout cas très intéressé par plusieurs dimensions intégrées
dans ses dispositifs:
— le rôle du groupe avec les notions d'écoute bienveillante, de travail de
ré-assurance et la dimension communicationnelle qui encadre et favorise la scription
individuelle;
— la sollicitation de l'investissement du Sujet et le respect de la "langue de
chacun " ;
— la place des activités de présentation, d'activation ("ce que je suis... " ; "ce que
je vois... " ; le portrait chinois...) (25) ;
— le rôle de déclencheur et de support des mythes et légendes (26) ;
— la place du corps et de l'espace intégrés dans certaines pratiques scripturales
(27).
(24) On ne gagne rien à le nier. Pour l'enseignant — qui n'est pas un psychanalyste— tout le problème consiste à gérer
ce fait au mieux des intérêts de l'apprenant et du groupe.
(25) Tous ces points se rapprochent de la construction du "climat" de la classe et delà "gymnastique préparatoire"
sur lesquels P. Bach met l'accent dans un ouvrage plus récent L'écriture buissonnière.
(26) On rencontre ici d'autres courants travaillant avec les enfants sur les contes, ou en thérapie d'adultes en référence
aux thèses jungiennes.
(27) Cela concerne plus l'ouvrage de S. Jedyniak, L'adolescence des mots.
(28) Qui écrit en référence aux travaux de l'Oulipo.
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L'explication précise de la théorie permet de mettre au premier plan la
notion de règle comme adjuvant et composante essentielle du travail (29). La
contrainte objectivée et motivée favorise plus qu'elle ne bloque. Elle sert à entrer
dans l'écriture. Elle permet de diriger mémoire et imagination et d'organiser les
éléments dans un projet textuel.
Elle autorise ensuite des re-lectures et des évaluations plus précises dans la
mesure où le texte est rapporté à ses contraintes initiales. Cela favorise le
repérage et l'analyse des dysfonctionnements qui seront construits avec des
procédures telles que le scripteur-apprenant gardera un pouvoir sur sa production. En
simplifiant toujours, on pourrait énoncer ce dispositif de la manière suivante :
— à partir d'un programme (un vouloir-faire), constitué de règles, est élaboré un
texte;
— cette réalisation, confrontée à son projet, par la mise en œuvre de modalités
précises de lecture et/ou de relecture, permet de mesurer, d'une part ce qui est
réalisé en conformité (l'écrit correspond au vouloir-faire), d'autre part ce qui
diffère;
— dans le second cas, le scripteur aura le choix entre modifier pour retrouver la
conformité au programme ou accentuer ce qui a émergé en produisant donc
une nouvelle règle, une modification du programme et, sans doute, en générant
des changements dans la structure textuelle. Vouloir-faire et faire se
dynamisent mutuellement...
Outre ce qui précède, les apports sont importants quant à l'intégration des
lectures (30), au rôle structurant du groupe, qui peut aider à partir d'un support
précis (la règle) en échappant ainsi — au moins partiellement — à l'envahissement
des affects, quant à l'écriture comme ré-écriture...
Néanmoins, il nous semble que ces ateliers peuvent être soumis à une
triple critique:
— ils demeurent encore au seuil d'une véritable réflexion sur l'écriture : entre le
vouloir-faire et le fait, le faire reste chambre obscure;
— même si, ces dernières années, d'autres types de textes ont été abordés, ces
ateliers sont principalement centrés sur l'écrit littéraire;
— ils se réfèrent à une conception du littéraire, ce qui est certes un avantage dans
la mesure où elle est explicitée, mais qui peut s'avérer dangereux car écrire ne
se réduit pas à écrire du littéraire, envisagé dans le cadre de la production
restreinte, selon les positions de X ou Y...
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La définition serait bien sûr à compléter par les notions de durée, de
ré-écriture et de règle.
Nous verrons dans les points suivants comment, sur le terrain didactique,
d'autres notions ont été ajoutées. Néanmoins, il convient de se demander si
l'atelier d'écriture ne représente pas une structure propre au changement, adaptée
notamment aux enseignants désireux de rompre avec les pratiques traditionnelles
sans pour autant — au moins dans un premier temps — bouleverser la totalité de
leur mode de fonctionnement. Les ateliers d'écriture sont, de fait, possibles à
l'intérieur des horaires de cours ou en dehors (clubs, P.A.E. ...). Ils rompent, par leur
durée et leurs règles, avec les démarches traditionnelles, tout en étant
susceptibles d'intégrer aussi bien jeux d'écriture, qu'exercices de structuration nécessités
par les contenus au programme, dans le cadre de contrats négociés avec les
élèves.
V. - REFORMULATIONS PÉDAGOGICO-DIDACTIQUES.
1. — Pédagogie du projet.
Les déplacements précédents touchant les dispositifs, ainsi que d'autres
réflexions sur l'apprentissage et les démarches, vont être ré-organisés au début
des années quatre-vingt dans le mode de travail pédagogique (M.T.P.) appelé
travail en projet. Il sera en partie élaboré et expérimenté sur le terrain spécifique du
Français (31) sous l'impulsion de différents groupes (Le Grain, le G.F.E.N.,
Pratiques...). Nous en rappellerons ici les grands traits, en nous référant à l'article
fondamental de J.-F. Halte "Travailler en projet" (32).
L'accent se déplace de l'enseignement à l'apprentissage (comment le Sujet
construit le savoir) selon l'idée qu'il faut cesser d'opposer le mode (dominant) de
l'apprentissage scolaire aux modes (dominants) de l'apprentissage social. Dans
cette optique, la production devient centrale. On n'apprend pas avant de faire, en
repoussant ce faire dans un futur hypothétique. On apprend en faisant, parce que
l'on a rencontré des problèmes précis et qu'il faut les surmonter pour continuer le
travail, hic et nunc. Les contenus ne sont donc pas programmés à l'avance mais
appelés par la tâche et finalisés par elle. C'est le projet, dans sa logique, qui
organise exercices et contenus.
Ce type de pédagogie tente aussi de répondre à la construction parfois
difficile de la motivation par son élaboration collective à l'intérieur de l'espace de la
classe. Cela explique les phases indispensables de négociation du projet (33) et
de ses modalités de réalisation, qui doivent faire l'objet d'un contrat explicite.
Tout cela est géré par le collectif -classe, avec des séances de
programmation, de socialisation, de régulation, d'évaluation. Le produit final est socialisé, ce
qui contribue à fonctionnaliser et à finaliser les activités.
Dans ce cadre pédagogique, les formes de travail peuvent être très diverses
(selon les séquences et leurs objectifs), accordant une large place à la
différenciation (34) et aux groupes. Complémentairement, l'hétérogénéité n'est plus
considérée comme un frein mais comme une richesse : des compétences diversifiées
mises au service d'un projet commun et d'une co-formation.
(31) Ce qui sera une source supplémentaire de confusion entre pédagogie et didactique.
(32) Pratiques n° 36, décembre 1982. Voir aussi du même auteur : L 'enseignement du Français dans le travail en projet,
Doctorat d'Etat, Besançon, 1985.
(33) Compromis entre désirs des élèves, faisabilité et nécessités institutionnelles.
(34) Voir, par exemple. Pratiques n° 53, Pédagogie différenciée, mars 1987.
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Nous soulignerons un dernier point de rupture. On considère ici —
contrairement aux conceptions "traditionnelles" — que c'est le pouvoir donné aux élèves
dans cette structure qui motive et nécessite l'appel aux techniques et non
l'inverse.
Il est évident qu'un tel mode de travail pédagogique a des effets importants
sur les contenus. Des domaines spécifiques du Français se trouvent "
naturellement " convoqués plus que dans d'autres modes : les théories de renonciation
et de la communication, la pragmatique (en fonction de l'importance et de la
diversité des situations de communication et de la socialisation...), ainsi que les
différents types de textes correspondant à la diversité des tâches engendrées et
assumées par les élèves...
(35) Voir, par exemple. P. Bouchard, Romanciers à treize ans, Denoél-Gonthier, 1978 ou C. Grenier, C. Besson et R.
Portay, Ecrire des romans à l'école, Magnard-L'Ecole, 1978.
(36) De fait, vu ces conditions et la maîtrise nécessaire des dimensions intra-disciplinaire et pédagogique, qui a — en
réalité — pratiqué le travail en projet, sur plus de deux classes en mâme temps ?
(37) Voir l'article fondamental de Cl. Garcia-Debanc : " Processus rédactionnels et pédagogie de l'écriture ", Pratiques
n° 49, mars 1986.
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Cela nous conduit à avancer deux hypothèses complémentaires. En
premier lieu, l'apprentissage de l'écriture ne saurait être réduit simplement à une
meilleure connaissance des contenus et des opérations scripturales, aussi
indispensable soit-elle. Ce serait un retour à l'applicationnisme (38) qui a montré ses
limites en matière de didactique. En second lieu, l'écriture stricto sensu
qu'avancent certains, serait — en réalité — d'un intérêt limité, au moins sur le terrain
didactique. Comme pour la lecture, il serait préférable de parler de pratiques d'écriture,
diversifiées et multi-dimensionnelles, incluant la représentation de cette pratique,
le rapport que le Sujet entretient avec elle, la façon dont il la situe par rapport à ses
autres pratiques, les moyens qu'il emploie, ce qu'il y investit, ses enjeux et ses
finalités...
Pour conclure le bilan de l'écriture longue en projet, nous soulignerons
qu'elle permet au moins quatre déplacements importants:
— une attention portée sur les sujets apprenants;
— une ouverture des types de textes et des référents ;
— une diversification des références théoriques ;
— une intégration des différents domaines de l'enseignement du Français et des
pratiques antérieures.
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• Etat de texte : un achèvement — provisoire ou non — défini comme tel
pour des raisons d'objectifs, de temps, de séquence pédagogique. En tant que tel,
il est donc toujours arbitraire. Le problème posé est celui de la justification de cet
arbitraire.
Le fait que nous ayons éprouvé la nécessité de mieux définir ces termes
indique que les activités de réécriture restent encore en grande partie, à théoriser.
Nous rappellerons quelques questions en suspens que nous avons déjà signalées
dans d'autres articles (40).
• Quels sont les dispositifs sollicités, les avantages et difficultés liés à
chacun d'entre eux? Plus particulièrement, quelles sont la place et les formes -des
négociations, en vue de l'amélioration, entre scripteurs, groupes et enseignant ?
• Peut-on engager de telles activités en faisant l'économie d'un travail sur
les représentations des textes et de l'écriture qu'ont les apprenants (41) ? Consé-
quemment, comment s'en servir?
• Selon quelle(s) thérorie(s) de l'écriture fait-on réécrire ? Ce qui draine
aussitôt deux autres problèmes. Peut-on se contenter de dire qu'expliciter la
théorie de référence suffit, ou doit-on varier les théories de référence selon les
problèmes et les besoins des apprenants, ou doit-on encore les situer dans le champ
culturel et considérer leur pertinence dans ce cadre (42) ?
• Conséquence des points précédents, comment faire pour que l'élève ne
soit pas désapproprié de son projet d'écriture par le maître, confondant tendan-
ciellement normes d'ordre technique et normes d'ordre idéologique (ses
conceptions de l'écriture) (43). Dans cette optique la définition du projet d'écriture (vou-
loir-dire-quoi et vouloir-dire-comment) est primordiale, ainsi que ses techniques
de repérage: par exemple, ce qui précède ou commente l'écrit, ce qui "résiste"
aux tentatives de modification...
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1. — La pédagogie Freinet et le texte libre.
L'ouvrage important de Pierre Clanché (1988) est venu rappeler le rôle
historique considérable, mais souvent dénaturé (45), du texte libre. Il en restitue
(pp. 20 à 23) les cinq invariants:
— il n'est pas isolé mais en relation avec d'autres pratiques d'expression libre
(musique, dessin...) ; il fonctionne dans une inter-motivation et l'écriture n'est
plus le moyen privilégié de l'expression;
— il repose en aval sur des outils spécifiques (moyens de reproduction, de
conservation, de transmission...) ;
— c'est une pratique de communication avant d'être un moyen d'apprentissage de
la langue (communication réelle; choix du support et des instruments mais
aussi de la taille et de la périodicité ; signalement mais pas de sanction portant
sur orthographe, syntaxe...) ;
— pas de notation mais lecture possible dans le collectif-classe et impression en
fonction de l'intérêt suscité;
— il s'agit enfin d'une pratique parmi de nombreuses autres pratiques
scripturales..
Il est clair que cette activité a influencé — directement ou non — d'autres
courants mentionnés. Parmi les points importants, on peut remarquer la
valorisation, l'écoute et le respect de l'enfant-scripteur, le rôle du groupe, la conception de
l'écriture comme praxis n'excluant aucune dimension matérielle (l'impression)
(46), l'intérêt porté à la construction du besoin d'écrire et le primat accordé au
pourquoi sur le comment, c'est-à-dire à l'élaboration des fonctions de l'écriture
(47).
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Enfin la réintégration de l'histoire et du socio-culturel (50) constitue un
élément central de ce courant, avec des tentatives prometteuses pour articuler social
et psychologique (Vincent de Gaulejac). De ce point de vue, l'attention portée à la
biographie permet de voir ce qui aide ou freine dans l'accès à l'écriture, ce qui
modèle représentations et pratiques. Il peut s'agir d'une entrée particulièrement
efficace pour comprendre réticences et résistances de certains élèves.
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De surcroît, Cl. Garcia-Debanc (54) a montré comment l'on pouvait — en
fonction de ces opérations — concevoir des situations d'apprentissage permettant
d'activer tel ou tel processus, d'automatiser tel niveau de traitement, de favoriser
le contrôle de l'élève sur ses propres activités. Elle a analysé, grâce à ce modèle,
les effets positifs constatés (mais non expliqués) de certains dispositifs
pédagogiques : le projet et le fonctionnement des groupes (qui favorisent la planification et
l'adéquation à l'auditoire), les outils d'évaluation formative (qui favorisent le
contrôle de son activité et la relecture critique...).
Cela permet de mieux utiliser dispositifs, pratiques et outils mentionnés
précédemment en fonction de leur intérêt spécifique par rapport aux difficultés
constatées chez les élèves.
Les approches psycho-linguistiques sont à la fois proches et différentes
des précédentes (55). Plus attentives aux réalisations langagières et aux types
d'écrits, elles se fondent sur l'hypopthése que les faits linguistiques (et les classes
d'unités) renvoient à des opérations articulant extra-langage (espaces référentiel
et contextuel) et langage. Elles reposent sur l'étude précise de textes réalisés.
Les opérations (contextualisation, structuration, textualisation) ne sont pas
homologues à celles postulées par les psycho-cognitivistes malgré certains points
communs (notamment l'opposition "programmation" vs mise en texte): Les
recherches sur l'écriture en sont encore à leur pré-histoire. Cela nécessite une
grande prudence de la part du didacticien qui peut en revanche tirer parti — en
fonction de ses besoins — de chacun des modèles mais aussi des instruments et
méthodes d'observation sur lesquels s'appuient les chercheurs.
Ce second modèle — outre des intérêts proches du précédent — permet en
tout cas de mieux réfléchir aux rapports entre types de texte et écriture d'une part,
types de texte — opérations et faits de langue d'autre part.
2. — La génétique textuelle.
Courant plus ancien, ce type d'approche est resté longtemps cantonné
dans des sphères littéraires et érudites (56). Il étudie la genèse des textes en
suivant minutieusement les transformations qui affectent leurs différents états
(brouillons, "avant-textes"). Si la définition des opérations scripturales est bien à
l'horizon de ces travaux, les " généticiens " se montrent prudents quant aux
extrapolations et intérêts des modèles précédemment mentionnés :
" Dire qu'en gros il faut distinguer les phases de planification, de mise en
langue et de ré-écriture et que, bien entendu, les opérations en question peuvent,
au lieu d'être linéaires, suivre un fonctionnement interactif revient en fait à admettre
à peu près autant de sous-modèles différents qu'il y a de scripteurs. "
(A. Grésillon, 1988, p. 110)
Cela explique pourquoi ils s'attachent avant tout à la construction
précise des types de modifications apportées, indices d'opérations et de
compétences. La réécriture ("retours sur du déjà-écrit") peut ainsi s'analyser en termes de
82 . _
substitution orientée (ajout, suppression, permutation...), de substitutions liées ou
non, de substitutions en cours de procès (variante d'écriture) ou a posteriori
(variante de lecture) etc.. L'organisation de ces transformations peut mener à des
hypothèses concernant la logique de la réécriture.
Plus humble apparemment, ce courant offre néanmoins des intérêts non
négligeables :
— un travail précis sur les copies d'élèves permettant d'émettre des hypothèses
sur leurs stratégies, leurs motivations, leurs avantages et leurs défauts et donc
de les "conscientiser", et de les diversifier;
— des études portant sur la psychogénèse des compétences de réécriture (voir les
travaux de Cl. Fabre) ;
— une attention plus fine accordée à la mise en œuvre de la réécriture ;
— une démythification des auteurs — confrontés eux aussi aux problèmes
d'écriture — et, sans doute, une désacralisation conséquente de l'écriture.
Il nous paraît cependant que ces courants — surtout les deux premiers —
s'ils expliquent mieux, s'ils ouvrent à de nouvelles pratiques pédagogiques
n'offrent néanmoins qu'une vision limitée des activités scripturales en visant un
" noyau " de l'écriture. Cette conception ne peut certes pas être évacuée si l'on ne
veut parler de l'écriture à tout propos. Elle devient dangereuse dès lors qu'elle
supposerait que l'écriture c'est " d'abord cela " ou " uniquement cela ". Epistémolo-
giquement cela manifesterait une volonté de hiérarchisation et de normativité.
Théoriquement cela induirait une confusion entre objet construit et objet réel.
Didactiquement cela pourrait faire croire que les dysfonctionnements ne sont que
d'ordre "technique"...
(57) Qui consisterait à confondre le Sujet avec une machine, l'éclairage de l'objet construit avec celui de l'objet réel, la
partie avec le tout, ou même les écritures avec l'Ecriture.
(58) Ministère de la Culture, Service des études et recherches : Pratiques culturelles des Français, Description socio-
démographique. Evolution 1973-1981, Paris, Dalloz, 1982.
83
D'où la nécessité de se référer à d'autres courants de recherche,
relativement sous-estimés :
— celui qui travaille sur les représentations qu'ont les Sujets (notamment les
élèves) de l'écriture et sur les valeurs qu'ils y investissent (59) ;
— celui qui travaille sur les discours des écrivains-écrivants pour objectiver les
différentes catégories d'écriture selon les sphères sociales de production et
mettre cette diversité au service de apprenants (60) ;
— celui qui travaille sur ces discours pour les situer dans le champ culturel, selon
l'idée que tous (y compris les "experts" chers à certains courants) sont
positionnés et que ces discours et pratiques favorisent ou contrarient
l'apprentissage en fonction des positions des apprenants (61)...
Les enjeux didactiques sont importants:
— meilleure prise en compte de l'apprenant " réel " et des pratiques d'écriture
"réelles";
— analyse
diversification
des discours
des hypothèses
et des pratiques
sur les blocages
susceptibles
et les
d'accentuer
moyens deouremédiation
de lever les;
résistances en fonction du positionnement des élèves (par exemple les phases
solitaires ou en groupe, l'enjeu du plaisir ou de l'efficacité sociale...) ;
— l'ouverture des référents textuels (62)...
Il est clair que dans cette optique la compétence d'écriture est envisagée
comme maîtrise des opérations adaptées à des situations, et non simple maîtrise
des opérations. Un vieux débat resurgit ici...
Il est non moins intéressant de constater que — comme pour la lecture —
ces courants sont utilisés pour faire le bilan, le constat des difficultés. Puis on les
oublie. Comme si le constat n'était pas différencié, impliquant des stratégies elles-
mêmes différenciées.
84
L'autonomie du didacticien et de la didactique réside peut-être ici : en cette
reconnaissance qu'il ne peut se priver d'aucun des pôles, d'aucune des
composantes de chacun de ces pôles. Il travaille dans la tension de cette nécessaire
articulation entre contenus intra-disciplinaires et pédagogie, dans le risque constant
d'une soumission à l'une ou l'autre de ces dimensions.
Se pose alors, inéluctablement, la question de la formalisation de ces
rapports dans une didactique de l'écriture. Plutôt que tenter de la construire —
comment rendre compte de tous les paramètres en jeu et de leurs inter-actions ? —
nous proposerons plus modestement d'en représenter certaines composantes de
base, repérées au travers de notre historique, afin de mieux en objectiver les
intérêts. Ce qui suppose quelques précisions liminaires.
DELA
PERFORMANCE II - ORDRE DE LA III - ORDRE DES
I - ORDRE COMPÉTENCE COMPÉTENCES
DU SCRIPTURALE
PERFORMÉ
1 - Produits finis 1 - Savoirs 1 - Autres compétences
2 - Produits transitoires 2 - Savoirs-faire spécifiées
(états de texte) 3 - Représentations et 2 - Aptitudes —
3 - Opérations de valeurs capacités
production
2. — Explication du schéma.
Ce schéma se lit de la manière suivante : l'ordre de la performance suppose
l'ordre de la compétence qui suppose lui-même l'ordre des compétences.
85
L'ordre de la performance— du performé recouvre aussi bien les opérations
de scription que les écrits. La double désignation s'explique en fonction de ce que
l'on observe et avec quels moyens. Ainsi les "brouillons" (1.2.) ou les opérations
(1.3.) appartiennent à un "faire" (performance) souvent non observé, ou plus
difficilement observable, mais qui peut être, au moins en partie, objectivé (devenant
du performé) pourvu qu'on s'en donne les moyens : questionnaires, protocoles,
enregistrements... Conséquemment l'ordre de la performance-du performé
appartient tendanciellement au registre du concret, du matériel. Il s'analyse en
relation avec la situation au sein de laquelle il se réalise.
3. — Intérêts du schéma.
En premier lieu, ce schéma permet de voir comment fonctionnent les
pratiques. Par exemple, le modèle traditionnel organise son apprentissage sur la
répétition de produits finis (I.1.), sans réflexion ni observation concernant les situations
et leurs effets, les produits transitoires (I.2.) ou les opérations de production (I.3.) ;
il réduit la notion de compétence à certains savoirs (11.1) en connectant
rapidement, dans ses hypothèses sur les dysfonctionnements, les produits finis (1.1.) aux
compétences générales (III) : " il est bête", " il ne fait pas attention ", " il n'est pas
mûr"...
Ce schéma permet ensuite de repérer les composantes traitées par les
théories, les pratiques, les instruments... Ainsi linguistique et sémiotique portent
plus sur les produits finis (1.1.) et les savoirs (11.1.) mais il peuvent servir à l'analyse
des états transitoires (I.2.). La psycho-linguistique traite plus précisément du
rapport textes réalisés (1.1.) — opérations nécessaires (II. 2.). La psycho-cognition
s'attache aux relations opérations effectuées (I.3.) — opérations postulées (II.2.) ; la
génétique textuelle aux rapports textes finis (1.1.) — textes transitoires (I.2.). La
psychanalyse s'intéresse plus aux liens textes réalisés (1.1.) — représentations et valeurs
(II. 3.). Quant aux modes de travail pédagogique, aux dispositifs, ils vont peser sur
la diversité et l'organisation des situations en s'attacha nt aux inter-relations I, II, III
de façon plus globale ou en plaçant en dominante telle composante (par exemple,
représentations et valeurs en II. 3.) à partir d'hypothèses générales sur les
conditions nécessaires au développement des compétences.
86
Enfin, ce schéma va permettre en fonction des analyses précédentes:
(qu'est-ce qui est travaillé dans la pratique, et quelles théories traitent de quels
problèmes), de repérer les manques et les paramètres dominés, de multiplier les
hypothèses sur les dysfonctionnements des apprenants et les stratégies de
remédiation, d'aller puiser dans les références disponibles et adéquates.
Comme on le voit, ce schéma représente - de manière imparfaite et
incomplète — ce que le didacticien de l'écriture travaille. Cela peut l'aider à penser
ce qu'il fait, comment en fonction de quels savoirs et de quelles hypothèses, ce
qu'il pourrait faire, en se servant de quoi.
Aucune théorie, aucune pratique ne recouvre, intégralement et à elle seule,
ce domaine qui les convoque, les intègre, les fait inter-agir...
Le didacticien ne peut s'en priver, il ne peut se soumettre à l'une ou à
l'autre...
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