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générale, ensuite une Première partie (la gestion du patrimoine foncier) et enfin
une deuxième partie (les modalités d’accès à ma terre).
Sommaire
Elias Olowale disait à ce sujet que “la terre appartient à une grande famille dont beaucoup de
membres sont morts, quelques-uns vivants et dont le plus grand nombre est à naître“.
Les descendants des premiers occupants ont qualité de propriétaires fonciers coutumiers et ont
pour obligation de gérer les ressources naturelles (terre, eau, forêts, etc.) conformément aux
règles régissant chaque communauté.
Considérées généralement comme des biens sacrés, ces ressourcés étaient inaliénables.
Ce nouvel ordre juridique foncier qui s’applique aussi bien aux terres rurales qu’aux terrains
urbains, repose d’une part, sur des règles de gestion (Titre 1), d’autre part, sur un cadre
institutionnel et technique (Titre 2) qu’il importe d’examiner.
Cette volonté de maîtrise foncière de l’Etat demeure toujours inchangée en milieu urbain et
s’est traduite par un monopole de l’Administration sur la gestion des terrains urbains.
En effet, cette reconnaissance marque la fin du monopole foncier de l’Etat sur les terres non
immatriculé, c’est-à-dire sur la quasi-totalité des terres rurales.
Il résulte que l’étude des règles de gestion foncière porte d’une part, sur les terres du domaine
rural (Chapitre 1) et d’autre part, sur les terres du domaine urbain (Chapitre 2).
C’est sur cette base qui vise à terme la sécurité foncière que l’Etat procède à
l’attribution (Section 2), au retrait (Section 3), au contrôle des transactions foncières (Section
4).
Font enfin partie du domaine foncier de l’Etat les terres sans maître (article 6 de la loi du 23
décembre 1998).
Sous l’empire du décret du 15 novembre 1935 portant réglementation des terres domaniales
en Afrique occidentale française, le concept de terre vacante et sans maître avait permis la
mainmise de l’Administration coloniale sur les terres non mises en valeur, suscitant ainsi le
mécontentement des autochtones et en particulier des autorité et propriétaires fonciers
coutumiers.
En ayant recours au concept de terre sans maître, le législateur ivoirien, pour éviter toute
équivoque a pris soin d’en donner la définition.
Ainsi, dans la version non modifiée de la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au
domaine foncier rural, était d’abord considéré comme des “terres sans maître” :
- les terres objet d’une succession ouverte, mais non réclamée depuis plus de trois ans ;
- les terres du domaine coutumier sur lesquelles des droits coutumiers exercés de façon
paisible et continue n’ont pas été constatés dix ans après la publication de la loi n° 98-750 du
23 décembre 1998 ;
- les terres concédées provisoirement sur lesquelles les droits des concessionnaires n’ont pu
être consolidés trois ans après le délai imparti pour la mise en valeur, à compter de cette
publication.
Les délais précités n’ont pu être respectés par les titulaires de droits fonciers concernés. Aussi,
pour éviter que ceux-ci ne soient dépossédés de leurs terres par application de la théorie des
terres sans maître, le législateur a été amené par la loi n° 2013-655 du 13 septembre 2013, à
proroger les délais initiaux par une modification de l’article 6 de la loi n° 98-750 du 23
décembre 1998 relative au domaine foncier rural.
Cette charge en vertu de l’article 6 de la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 précitée, incombe
à l’administration. Celle-ci doit à cet effet, délivrer un acte administratif constatant le défaut
de maître. Cette disposition qui est conforme à l’article 1315 du Code civil, est à l’avantage
des autorités foncières coutumières, car celles-ci ne disposent pas le plus souvent d’un
document attestant de leurs prérogatives foncières.
Cependant, il convient de relever que les terres objet de conflits interminables et considérées
donc comme sans maître, pourront être incorporées au domaine de l’Etat, au même titre que
les terres concédées n’ayant pas été mises en valeur dans le délai imparti.
Si l’on tient compte du nombre important de conflits fonciers non résolus et du manque de
moyens pour la mise en valeur des terres, l’Etat apparaît d’ores et déjà comme le grand
bénéficiaire de l’application du concept de terre sans maître tout comme ce fut le cas de
l’Administration coloniale.
2/ Les terres des Collectivités publiques
-- Le domaine foncier rural des Collectivités territoriales (districts, régions, communs) est
d’abord composé des terres qui leur sont transférées ou cédées.
En effet, l’Etat peut transférer ou céder à titre gratuit ou onéreux des terres au Collectivités
territoriales. Le transfert ou la cession des terres rurales de l’Etat au profit des Collectivités
territoriales est autorisé par décret pris en Conseil des Ministres soit à l’initiative de l’Etat,
soit à la requête de la Collectivité territoriale concernée.
Les terres transférées ou cédées par l’Etat deviennent la propriété de la Collectivité territoriale
concernée.
-- Le domaine foncier des Collectivités territoriales comprend également les terres acquises.
Les terres acquises le sont à titre gratuit (dons, legs, prescription, saisie, etc.) ou à titre
onéreux (achat, échange, etc.).
Dans certains cas (achat, échange, donation ou legs), l’acquisition est décidée par une
délibération du Conseil et transmise à l’Autorité de tutelle. Dans d’autres (expropriation), la
décision est prise par délibération du Conseil dans les conditions fixées par décret pris en
Conseil des Ministres.
-- Font enfin partie du domaine foncier des Collectivités territoriales les terres déclarées
d’intérêt local par décret pris en Conseil des Ministres.
Les terres rurales ci-dessus énumérées font partie du domaine privé de la Collectivité
territoriale. Elles doivent, conformément, à la réglementation foncière être immatriculées à
leur nom. En conséquence, elles peuvent être gérées dans les mêmes conditions que les terres
rurales de l’Etat (location, concession, bail emphytéotique, etc.).
Tout comme les Collectivités territoriales, les Établissements publics sont admis
conformément à l’article 1er de la loi du 23 décembre 1998 à être propriétaire de terres rurales
dans les conditions fixées par la réglementation foncière en vigueur.
En tout état de cause, ces terres sont de très faible importance en raison essentiellement du
manque d’effectivité de la procédure d’immatriculation.
En effet, en raison de sa complexité et de son caractère onéreux, cette procédure, qui devait
consolider la propriété individuelle des terres, n’a pas connu auprès des populations le succès
escompté, après un siècle de mise en œuvre.
Ce qui explique que seulement 2 % environ des terres aient été immatriculées jusqu’à ce jour.
Aux terres immatriculées, s’ajoutent celles que les particuliers ont pu acquérir sous le régime
du Code civil. En effet, sous ce régime introduit en Côte d'Ivoire par l’arrêté Binger du 10
septembre 1893, l’Administration coloniale avait octroyé de vastes portions de terres
domaniales aux personnes physiques et morales capables de les mettre en valeur.
Mais les droits résultant de ces concessions n’ont pu se maintenir que s’ils ont été publiés au
livre foncier.
Pour le législateur ivoirien, le domaine Coutumier est constitué par l’ensemble des terres sur
lesquelles s’exercent des droites foncières conformes aux modes traditionnels de gestion de la
terre. Sont également visés, les « droits coutumiers cédés aux tiers », c’est-à-dire les terres qui
au mépris des procédures domaniales et foncières ont fait l’objet de transactions coutumières
(vente, location, donation, etc.).
Peu importe que les droits cédés soient antérieurs ou postérieurs à la réforme foncière de
1998.
Faute d’immatriculation au nom d’un ayant-droit, les terres du domaine coutumier conservent
leur statut transitoire. Il en va de même des terres du domaine concédé.
Il Comprend, les terres attribuées provisoirement aux personnes physiques et morales avant la
réforme foncière du 23 décembre 1998. II en est ainsi des terres attribuées sous le régime du
permis d’occuper ou des concessions (concession provisoire pure et simple, concession
provisoire sous réserve des droits des tiers, bail emphytéotique).
Les bénéficiaires de ces concessions provisoires disposent d’un délai de 5 ans à compter de la
date de publication de la loi n° 2013-655 du 13 septembre 201, pour demander
l’immatriculation de leurs terres. Cette immatriculation est d’abord faite au nom de l’Etat qui
peut ensuite céder la parcelle de terre concernée a l’ancien concessionnaire si celui-ci a
qualité à être propriétaire foncier. Dans le cas contraire, une location peut être consentie par
l’Etat à celui-ci.
Faute d’immatriculation, les terres provisoirement concédées demeurent dans le domaine
foncier transitoire. Il en résulte que placé dans une situation transitoire, le domaine foncier
concédé dont la durée de vie est fonction de la diligence des acteurs concernés, est appelé
nécessairement à disparaître. À terme, et conformément à la réforme foncière du 23 décembre
1998, le système de concession des terres domaniales devra faire place à la location.
Exception faite des terres appartenant déjà aux particuliers, les terres du domaine foncier
permanent ou du domaine foncier transitoire peuvent faire l’objet d’attribution, conformément
à la réglementation en vigueur.
Les modes d’attribution des terres rurales se différencient les uns des autres, selon que l’on se
situe soit dans la période antérieure à la réforme foncière du 23 décembre 1998 (A), soit dans
celle postérieure à ladite réforme (B).
Avant la réforme foncière du 23 décembre 1998, les modes d’attribution des terres étaient
essentiellement le permis d’occuper, les concessions et le bail emphytéotique.
1- Le permis d’occuper
Régi essentiellement par le défunt décret n° 71-74 du 16 février 1971, le permis d’occuper
était une autorisation d’occupation délivrée à titre précaire par le préfet ou le sous-préfet. Ce
texte disposait en son article 1 que : « toute occupation de terrain pour être légale doit être
justifiée, pour les terrains ruraux...par une autorisation d’occupation à titre précaire et
révocable délivrée par le Ministre de l’intérieur ou son représentant... ».
Aujourd’hui encore, plusieurs terrains ruraux sont détenus sur la base du permis d’occuper.
Mais leur titulaire tout comme les titulaires de concessions provisoires sous réserve des droits
des tiers, sont tenus de demander l’immatriculation de leurs terres, dans le délai de 5 ans à
compter de la publication de la loi n° 2013-655 du 13 septembre 2013 précitée, au risque de
perdre leurs prérogatives foncières au profit de l’Etat, en vertu de la théorie des terres sans
maître.
Ces deux types de concessions se différencient par le fait que contrairement à la concession
provisoire sous réserve des droits des tiers la concession provisoire pure et simple n’était
accordée que sur un terrain immatriculé ; elle était de ce fait publiée au livre foncier.
Plus d’une décennie après la réforme foncière du 23 décembre 1998, de nombreuses terres
demeurent encore sous le régime de la concession provisoire et font partie du domaine foncier
transitoire.
Pour remédier à cette situation, la réforme foncière oblige les titulaires de concessions
provisoires à immatriculer, dans le délai de 5 ans, leurs terrains, sous peine de les perdre en
application de la théorie des terres sans maître.
3- La concession définitive
La concession définitive réalisait la cession par l’Etat d’un terrain à un particulier ou à une
collectivité.
Elle avait lieu sous la condition résolutoire du paiement par le concessionnaire définitif, au
plus tard le mois qui suit la notification de l’arrêté, du prix de cession (50 000 F CFA par
hectare), des frais d’inscription au livre foncier et des frais d’enregistrement et de timbre.
La concession était accordée si au moins les 2/3 du terrain étaient mise en valeur et après
création du titre foncier. Mais pour limiter les accaparements et le gel stérile des terres, la
concession définitive a été limitée à une superficie de 12 hectares suite à une délibération de
l’Assemblée territoriale du 27 novembre 1948. S’il y a un surplus de superficie, celui-ci était
donné en bail emphytéotique.
4- Le bail emphytéotique
Le bail emphytéotique été institué à l’origine pour mettre fin à l’exploitation anarchique des
terres et à la spéculation foncière consécutive à la faculté d’obtention de la concession
définitive par les sociétés étrangères. C’est un bail qui est accordé par le Ministres chargé de
l’Agriculture pour une durée qui varie de 18 à 99 ans. Mais en pratique, la durée du bail est de
25 ans renouvelables.
Avant la réforme du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural, l’attribution des
terres se réalise désormais à travers le certificat foncier (1), la concession de la propriété (2)
par obtention du titre foncier et le bail emphytéotique (3).
1- Le certificat foncier
Aux termes de la loi du 23 décembre 1998 (Art. 8) l’obtention du certificat foncier est
subordonnée au constat d’existence paisible et continue de droits coutumiers. Ce constat est
établi à l’issue d’enquêtes officielles réalisées conformément à la procédure définie par le
décret n° 99-595 du 13 octobre 1999.
On note ici qu’il y a recours non à un géomètre expert, mais plutôt à un opérateur technique
inscrit sur une liste d’agrément arrêtée par le Ministère chargé de l’agriculture. Cette mesure
vise à réduit les coûts de délimitation du terrain.
Mais cette disposition se concilie difficilement avec la loi n° 70-487 du 03 août 1970
instituant l’ordre des géomètres experts.
D’après cette loi, les géomètres experts sont seuls habilités à établir les documents
topographiques en matière de délimitation et d’établissement de plans parcelles de terres
rurales.
- La validation de l’enquête : l’enquête est validée par le comité de gestion foncière rurale
de la sous-préfecture, après une période de publicité de trois mois qui court à de la séance
publique de présentation des résultats de l’enquête.
La publicité est réalisée par le commissaire enquêteur dans les villages concernés, sous
l’autorité des comités villageois de gestion foncière rurale.
Passé, ce délai, les résultats de l’enquête peuvent être utilisés par tout ayant droit déterminé
par l’enquête.
Après validation de l’enquête, le certificat foncier est signé et publié au journal officiel par le
préfet de département.
À compter de la signature du certificat par le préfet, le titulaire dudit certificat dispose d’un
délai de trois (3) ans pour requérir l’immatriculation du bien foncier concerne.
Cette concession a lieu pour les titulaires de certificats fonciers qui ont fait immatriculer leur
terrain à leur nom. Elle a lieu également pour les occupants des terres antérieurement
attribuées ou concédées à titre provisoire dans les conditions indiquées par la réglementation
en vigueur.
Alors que les terres du domaine coutumier sont immatriculées directement au nom du
demandeur, le bien foncier concédé est d’abord immatriculé au nom de l’Etat (Art. 11 D. n°
99-595 du 13 octobre 1999) qui le rétrocède à l’ancien concessionnaire, soit en pleine
propriété, soit sous forme de location ou de bail emphytéotique.
Il résulte de ce qui précède que les modes d’attribution des terres rurales ont évolué dans le
temps. Cette évolution est l’expression des efforts d’adaptation réalisés par l’Administration,
efforts que l’on observe également dans la définition des critères d’attribution des terres
rurales.
L’attribution des terres du domaine coutumier se fait selon deux critères essentiels définis par
la réforme foncière du 23 décembre 1998. Le premier critère a trait au constat d’existence
paisible et continue de droits coutumiers (1). Quant au second, il se rapporte à la nationalité
du demandeur : c’est le critère personnel (2).
Pour les terres du domaine rural coutumier, le constat d’existence continue et paisible de
droits fonciers constitue le critère essentiel d’attribution du certificat foncier. Ce constat
résulte de l’enquête foncière prévue par le décret n° 99-594 du 13 octobre 1999 fixant les
modalités d’application au domaine foncier rural coutumier de la loi n° 98-750 du 23,
décembre 1998.
Mais ce constat d’existence paisible et continue de droits fonciers suffit-il pour se voir
attribuer la propriété d’un terrain du domaine coutumier ? À cette question, il y a lieu de
répondre par la négative. Car en plus du constat d’existence paisible et continue de droits
fonciers, il faut aussi satisfaire à un critère lié à la personne du demandeur.
2- Le critère personnel
Aux termes de l’article premier de la réforme foncière du 23 décembre 1998, seuls l’Etat, les
collectivités publiques et les personnes physiques ivoiriennes sont admises à être
propriétaires.
Il en résulte que d’une part, les personnes physiques non-ivoiriennes, d’autre part, les
personnes morales, quelle que soit leur nationalité, ne peuvent requérir en leur nom
l’immatriculation d’un terrain du domaine coutumier.
Si ces dispositions d’une importance capitale se justifient par la volonté de l’Etat de mettre un
terme, à la mainmise croissante des non-nationaux sur les terres et à réserver corrélativement
aux nationaux la maîtrise du patrimoine foncier ivoirien, elles posent nécessairement le
problème des droits acquis des personnes physiques non-ivoiriennes et des personnes morales
visées.
En ce qui concerne les personnes physiques non-ivoiriennes, la loi foncière de 1998, dans la
formulation initiale de son article 26, disposait que les droits fonciers que celles-ci avait déjà
pu acquérir étaient maintenus à titre personnel.
Autrement dit, les droits cessaient avec le décès de leur titulaire. Cependant, la loi foncière
dans sa première formulation opérait une discrimination qui permettait aux héritiers de
nationalité ivoirienne de demander l’immatriculation à leur nom.
Dans le cas où ceux-ci n’étaient pas ivoiriens, ils disposaient alors d’un délai de trois ans pour
céder les terres à une personne physique ivoirienne, ou pour requérir à leur profit une location,
après retour des terres concernées au domaine de l’Etat.
De toute évidence, cette disposition de l’article 26 n’est guère en harmonie avec la théorie des
droits acquis. Aussi avait-elle fait l’objet de critiques virulentes à telle enseigne que suite aux
accords de Linas Marcoussis (en France), consécutifs à la crise sociopolitique de 2002, elle a
été modifiée par le législateur ivoirien à travers la loi n° 2004-412 du 4 août 2004.
Cette modification qui a pris forme à travers l’article 26 nouveau de la loi du 23 décembre
1998, indique clairement que les droits de propriétés foncières que les personnes physiques
non-ivoiriennes ont pu déjà acquérir sont maintenus. Autrement dit, ces droits fonciers n’ont
plus un caractère personnel et peuvent être transmis aux héritiers, quelle que soit leur
nationalité.
La récente Constitution du 8 novembre 2016 va plus loin dans la protection des droits acquis.
En vertu de l’article 12 alinéa 1er de la loi fondamentale, « les droit acquis sont garantis ».
Mais en ce qu’elle ne précise pas la nature juridique de ces droits, cette disposition de la loi
fondamentale semble équivoque.
Au regard des enjeux en matière foncière, une clarification de la nature juridique des droits
acquis, objet de cette garantie, aurai été utile. Car si le droit de propriété acquis ne concerne
qu’une minorité de personnes (quelques centaines).
Le droit d’usage acquis pourrait renvoyer à la grande majorité des acteurs du monde rural qui
ont mis les terres en valeur sans disposer d’un titre de propriété.
En ne précisant pas que les droits acquis concernés sont les droits de propriété foncière, la loi
fondamentale ne fait qu’ajouter la fumée au brouillard dans une matière foncière
suffisamment complexe et sujette à conflits récurrents plus ou moins graves.
En ce qui concerne les personnes morales maintenues dans leur droit de propriété en vertu de
la règle des droits acquis, elles ne peuvent céder leurs droits à un cessionnaire qui n’a pas
accès à la propriété foncière qu’à la condition de déclarer le retour de leurs terres au domaine
de l’Etat.
Dans une telle hypothèse, le concessionnaire désigné peut bénéficier d’un bail emphytéotique
ou d’une location de la part de l’Etat.
Si les personnes physiques non-ivoiriennes et les personnes morales n’ont pas accès à la
propriété foncière, rien n’interdit qu’elles puissent obtenir un certificat foncier.
Il suffit pour cela qu’elles puissent justifier de l’existence paisible et continue de droit sur le
domaine coutumier. Mais le certificat foncier qui leur est délivré dans ces conditions ne peut
en aucun cas leur ouvrir la voie à la propriété foncière ; tout au plus, peut-il, après
immatriculation du terrain au nom de l’Etat, leur permettre de bénéficier d’une location ou
d’un bail emphytéotique.
Cette procédure demeure encore valable pour les titulaires de concessions provisoires, à
travers la consolidation de leurs droits, conformément au décret n° 99-595 du 13 octobre 1999
fixant la procédure de consolidation des droits des concessionnaires provisoires de terres du
domaine foncier rural.
Mais, depuis la réforme foncière du 23 décembre 1998, le constat de mise en valeur ne suffit
plus pour obtenir la pleine propriété du foncier concédé. Il faut en plus que l’ancien
concessionnaire soit une personne physique ivoirienne. Au critère de la mise en valeur,
s’ajoute donc, comme cela a été précédemment indiqué, le critère personnel de la nationalité.
L’attribution d’une terre rurale à une personne déterminée crée au profit de celle-ci des droits
fonciers. Mais ces droits ne mettent pas leurs titulaires à l’abri d’un retrait des terres à eux
attribuées.
C’est une opération de puissance publique par laquelle l’Administration procède à l’encontre
des particuliers à l’acquisition forcée et moyennant une indemnité juste et préalable, des
immeubles, terrains et bâtiments nécessaires à l’usage du public ou au fonctionnement du
service public. Cette procédure, qui est réglementée par le décret du 26 décembre 1930, est à
la fois administrative et judiciaire.
Passe le délai ci-dessus, la parcelle concernée peut être immatriculée au nom de l’Etat sans
qu’il ne faille recourir à une quelconque procédure d’expropriation.
Ce faisant, l’Etat retire ou prend possession d’une parcelle déjà attribuée à un particulier
n’ayant pu immatriculer son bien foncier dans le délai imparti.
Un dernier recours est accordé au titulaire du certificat foncier : celui-ci dispose en effet d’un
délai de trois (3) mois, à compter de la notification à lui faite de la procédure, pour requérir le
transfert à son nom de l’immatriculation, moyennant le remboursement des frais exposés par
l’Etat.
En pareille hypothèse, le titulaire qui n’est pas admis à être propriétaire, peut bénéficier d’un
contrat de location.
Ces contrats comportent obligatoirement des clauses de mise en valeur dont le non-respect
peut être sanctionné par la résiliation.
Ce qui entraîne naturellement le retrait de la parcelle de terre au profit de l’Etat. Dans ce cas,
les impenses réalisées par le locataire sont cédées par l’Etat à un nouveau locataire
sélectionné par vente des impenses aux enchères. À défaut d’une résiliation de la location, la
parcelle louée peut être ramenée à la superficie effectivement mise en valeur.
Outre les locations de courte durée, les baux emphytéotiques consentis par l’Etat peuvent
également être résiliés soit en cas d’abandon de mise en valeur pendant plus de dix (10) ans,
soit en cas de non-paiement des redevances par l’emphytéote pendant deux années
consécutives. Dans les deux cas, le bien foncier objet du bail est retiré à l’emphytéote
défaillant.
Les bénéficiaires de ces concessions provisoires disposent aujourd’hui d’un délai de cinq (5)
ans à compter de la date de publication de la loi du 13 septembre 2013 pour consolider leurs
droits. Cette disposition concerne aussi bien les bénéficiaires de concession provisoire pure et
simple que les bénéficiaires de concessions provisoires sous réserve des droits des tiers.
Ceux-ci sont tenus avant l’immatriculation de leur terre de satisfaire à l’obligation de mise en
valeur.
En l’absence de mise en valeur, les terres concernées sont considérées comme des terres sans
maître ; ce qui entraîne leur retour au domaine foncier de l’Etat.
De ce point de vue, la théorie des terres sans maître apparaît comme une épée de Damoclès
pour les concessionnaires provisoires dont les droits fonciers ne sont pas encore consolidés,
conformément à la réglementation foncière.
À travers, plusieurs mécanismes, l’Etat s’est aussi assigné un rôle de contrôle de l’accès à la
terre.
Cette situation qui est source d’incertitudes et d’interminables conflits fonciers a amené l’Etat
à interdire les actes sous seing privé à travers le décret du 16 février 1964 et à imposer la
forme notariée pour ces transactions. Cette interdiction sera renforcée par la loi des finances
du 20 mars 1970 laquelle prescrit la nullité absolue des transactions foncières effectuées hors
de l’intervention d’un notaire.
En fait, cette survivance des actes sous seing privé ne devrait guère surprendre.
D’abord, les pénalités prévues sont dérisoires et donc non dissuasives. Ensuite, la
jurisprudence considère que seules les transactions portant sur les terres appropriées
conformément à la réglementation en vigueur, doivent être passées par devant notaire ; ce qui
exclut les conventions foncières coutumières.
Enfin, bien que les cessions découlant de ces actes sous seing privé aient été effectuées en
marge des procédures domaniales et foncières, la jurisprudence reconnaît les droits fonciers
des cessionnaires. Ce qui pose le problème de l’opportunité des dites procédures.
Pour Albert LEY, le bail emphytéotique constitue en outre, le meilleur moyen d’empêcher
que la spéculation foncière n’absorbe un pourcentage important de l’épargne consacrée à
d’autres investissements. Le bail emphytéotique permet notamment aux collectivités
territoriales d’éviter la tentation de la vente des terres de leur domaine privé, une situation qui
à terme aurait pour inconvénient le renchérissement du foncier.
L’étude des règles de gestion du domaine foncier rural a mis en évidence le fossé entre le
droit et la réalité. En effet, les pratiques foncières coutumières constituent un défi pour
l’Administration domaniale dans sa mission de gestion du domaine foncier rural. La situation
ne semble pas différente en matière de gestion du foncier urbain.
À la fin du texte, il a été ajouté une définition synthétique prévue pour le cas où des omissions
se seraient glissées dans l’énumération (B).
Ce décret du 20 juillet 1900 spécial à la Côte d'Ivoire a été remplacé par un décret du 23
octobre 1904 applicable à l’ensemble de l’ex-AOF puis par celui du 29 septembre 1928
encore applicable en Côte d’Ivoire.
Contrairement à certains Etats issus du bloc AOF comme le Sénégal et le Bénin qui ont
adopté une nouvelle réglementation relative au domaine public, la Côte d’Ivoire n’innove pas.
Elle reproduit la réglementation coloniale issue du décret du 29 septembre 1928, laquelle fait
une distinction entre le domaine public naturel (1) et le domaine public artificiel (2).
Il s’agit du rivage de la mer jusqu’à la limite des plus hautes marées ainsi qu’une zone de 100
mètres mesurée à partir de cette limite. Tel qu’identifié, le domaine public maritime pose le
problème de sa consistance et de sa délimitation.
En cas d’annulation de l’acte, le propriétaire lésé retrouve son bien et peut même obtenir une
indemnisation.
Lorsque la délimitation est régulière, il n’y pas lieu d’accorder une indemnité aux
propriétaires dont la maison ou la propriété est restée dans les limites du domaine public.
Ce domaine comprend :
- les cours d’eau navigables ou flottables dans les limites déterminées par la hauteur des eaux
coulant à plein bord avant de déborder ainsi qu’une zone de passage de vingt-cinq (25) mètres
de large à partir de ces limites sur chaque rive et sur chacun des bords avant des îles ;
- les sources et cours d’eau non-navigables ni flottables dans les limites déterminées par la
hauteur des eaux coulant à plein bord avant de déborder ;
- les lacs, étangs et lagunes dans les limites déterminées par le niveau des plus hautes eaux
avant le débordement avec une zone de vingt-cinq (25) mètres de large à partir de ces limites
sur chaque rive extérieures et sur chacun des bords des îles ;
- les nappes aquifères souterraines, quelle que soient leur provenance, leur nature et leur
profondeur.
Ainsi sont considérés comme dépendances des voies publiques, les nombreux éléments
compris dans l’emprise des routes comme par exemple, les caniveaux, les accotements, les
panneaux de signalisation, les trottoirs, etc.
B- La définition synthétique
Aux biens énumérés comme faisant partie du domaine public, l’article premier du décret de
1928 ajoute les biens de toute nature que le Code civil et les lois françaises déclarent non-
susceptibles de propriété privée.
Mais que recouvre cette notion de biens insusceptibles de propriété privée ? Au-delà des
controverses que cette question peut susciter, il faut simplement préciser que la définition
synthétique vient rappeler que l’énumération n’est pas exhaustive. Avec cette approche, le
législateur a la possibilité tout comme la jurisprudence, d’allonger la liste et d’élargir le
champ des biens du domaine public en tenant compte des besoins de l’Etat et des collectivités
territoriales.
C’est chose faite par exempte avec la loi n° 2002-102 du 11 février 2002 relative à la création,
à la gestion et au financement des parcs nationaux et des réserves naturelles.
En son art. 7, la loi précise que “les réserves naturelles intégrales et les parcs nationaux font
partie du domaine public inaliénable de l’Etat”.
L’alinéa 3 dispose que “le domaine public des réserves naturelles intégrales et des parcs
nationaux comprend, selon le cas indistinctement le domaine public terrestre, maritime,
lagunaire, fluvial ou aérien”.
Comme on le constate, l’objectif de la loi est la volonté de l’Etat de conférer aux biens
fonciers des parcs nationaux et réserves naturelles, la domanialité publique afin d’assurer leur
gestion durable.
En milieu urbain, plus qu’en zone rurale, la gestion du domaine public fait intervenir plusieurs
acteurs (Etat et collectivités territoriales) qui entretiennent des relations de complémentarité.
Mais avec l’avènement des collectivités territoriales, il faut pouvoir établir une distinction
entre le domaine public e l’Etat et celui des collectivités territoriales dès lors que l’art. 90 de
la loi n° 2012-1128 du 13 décembre 2012 portant organisation des collectivités territoriales
dispose que "le domaine des collectivités territoriales comprend le domaine public et le
domaine privé".
Les textes, ci-dessus fixent les règles actuelles de répartition des biens entre l’Etat et les
collectivités territoriales (A). Mais au-delà, il faut un mécanisme d’actualisation régulière du
fichier des biens des deux entités afin d’éviter les conflits de compétence (B).
475. II résulte de l’art. 91 de la loi du 13 décembre susvisée que le domaine public des
collectivités territoriales comprend :
1) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et qui ont reçu, de droit ou de
fait, une affectation comme rues, routes, places et jardins publics.
En sont exclus, les ouvrages ci-dessus énumérés dont la création et l’entretien incombent à
l’Etat ou à une autre collectivité territoriale ;
2) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et qui supportent des ouvrages
d’intérêt public chaque fois que la charge incombe à la collectivité territoriale ;
3) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et constituant l’assiette d’un
ouvrage prévu aux plans d’aménagement ou d’urbanisme régulièrement approuvés ou ayant
fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique
4) tous les autres biens compris dans le domaine public lorsqu’ils ont été transférés à la
collectivité territoriale conformément aux dispositions légales et règlementaires relatives au
domaine public.
De ce qui précède, il faut retenir que le critère géographique prit isolement semble inopérant
pour déterminer le lien de rattachement du bien à l’Etat ou à la collectivité, car un bien public
situé sur le territoire d’une collectivité territoriale donnée peut appartenir à une autre
collectivité ou à l’Etat dès lors que sa création ou son entretien incombe à ce dernier.
Il convient de combiner le critère géographique et celui de la création ou de l’entretien pour
déterminer à qui appartient le bien public.
Dans la pratique, la distinction entre le domaine public de l’Etat et celui des collectivités
territoriales dans l’espace urbain, n’est pas toujours précise. Aussi, importe-t-il que les
collectivités territoriales et l’Etat unissent leurs efforts afin que leur domaine public respectif
soit précisément inventorié pour une gestion plus efficace.
Le décret n° 84-852 du 4 juillet 1984 portant déclaration des voiries et des réseaux divers
d’intérêt national et d’intérêt départemental dans les limites des communes autres que celles
composant la ville d’Abidjan permet pour les vingt-sept (27) communes citées, de préciser le
statut du domaine public de chaque collectivité par rapport à l’Etat. C’est une avancée
significative mais insuffisante dans la mesure où ce texte ne prend en compte que la voirie et
les réseaux divers.
Aujourd’hui, la Côte d'Ivoire compte cent quatre-vingt- dix-sept (197) communes, quatorze
(14) districts, trente et une (31) régions et cinq cent neuf (509) sous-préfectures.
C’est le lieu de relever que la loi déterminant les limites de chaque commune ou collectivité
devrait également inventorier les biens publics de chaque entité afin que leurs gestionnaires
aient une idée précise de l’assiette des domaines tant publics que privés. C’est un gage de
bonne gouvernance.
L’inventaire permettrait à chaque acteur — Etat, collectivités territoriales et usagers —
d’affirmer et d’exercer ses droits dans le respect des textes.
Par ailleurs, dans le cadre de la politique de décentralisation qui emporte gestion des entités
territoriales par des élus locaux, les populations apprécieraient à la juste valeur l’idée d’avoir
un seul interlocuteur quant aux actes portant sur un bien public en milieu urbain.
Paragraphe 3 : L’utilisation et la protection du
domaine public
Le domaine public est affecté à l’usage tant du public que des services publics. Dans les deux
(2) cas, les règles bien établies assurent son utilisation rationnelle.
La protection du domaine public (B) sera analysée après avoir étudié l’utilisation de celui-ci
(A).
Dans le premier cas, il s’agit du domaine public affecté au service public (1), contrairement à
celui qui est utilisé par les administrés (2).
Lorsque la personne publique utilise elle-même son domaine a priori cela ne pose pas de
problèmes particuliers. Cependant, l’administration propriétaire ne doit pas en principe
détourner le bien public de son affectation.
Le concessionnaire peut également consentir des occupations du domaine public à des tiers et
percevoir des redevances.
Le domaine publie portuaire en est une parfaite illustrations. Ainsi, dans l’affaire qui a opposé
le PAA et la société E.A, la chambre administrative de la Cour Suprême dans l’arrêt n° 81
du 28 juillet 2010 a jugé que les actes par lesquels le PAA donne et retire une autorisation
d’occuper un bien immobilier du domaine public sont des actes administratifs par
détermination de la loi, que le contentieux qui en résulte relève de la chambre administrative
de la Cour Suprême suivant la procédure du recours excès de pouvoir ; dès lors, le juge des
référés et la Cour d’Appel sont incompétents pour en connaître.
Cette décision est riche d’enseignement. Au-delà de la concession du domaine public, les
juges précisent clairement que les actes pris en exécution de la convention par le
concessionnaire sont des actes administratifs par détermination de la loi.
L’utilisation commune de ces biens est en principe libre, gratuite et égale pour tous.
La liberté d’utilisation
En principe, toute personne peut accéder librement au domaine public sans avoir besoin d’une
autorisation et sans limitation. C’est l’expression de la liberté d’aller et venir garantie par la
Constitution ivoirienne.
Cependant — c’est l’exception — cette liberté d’utilisation du domaine public ne fait pas
obstacle à la mise en place d’une règlementation. Ainsi, les mesures des autorités municipales
interdisant le stationnement des véhicules automobiles sur certains emplacements ou à
certains endroits sont compatibles avec la liberté d’utilisation du domaine.
L’utilisation du rivage de la mer des plans d’eau lagunaires et fluviaux constituant des
dépendances du domaine public, respecte le même principe de liberté. En effet, tout le monde
a le droit de circuler, de stationner et de se reposer sur le rivage de la mer.
Ce libre accès se trouve néanmoins contrarié dans son exercice par des personnes ou parfois
des communautés riveraines qui apposent des panneaux indiquant le caractère privé de la
plage. En dehors de tout acte de concession ou autorisation administrative, les auteurs de ces
indications, violent les libertés publiques.
Sur les plans d’eau lagunaire et fluviaux, la navigation est libre de sorte que l’administration
ne peut instituer un monopole au profit d’un concessionnaire chargé de l’exploitation des
transports lagunaires au détriment de transporteurs privés n’ayant pas de lien de droit avec
l’Etat ou la collectivité territoriale.
Le principe de gratuité est la contrepartie nécessaire de son usage collectif. Les particuliers
ont le droit de jouir du domaine public — jouir gratuitement — suivant les conditions
spéciales à chaque nature de biens.
Ainsi, en s’appuyant sur cet arrêté, les péages institués sur l’autoroute du Nord et le pont
HKB se justifient par leur utilité, le coût élevé des ouvrages et le mode de gestion utilisé. En
plus du péage, l’Etat peut instituer une taxe à l’essieu pour les véhicules routiers de fort
tonnage afin de compenser les dépenses élevées d’entretien et de renforcement de la voirie
occasionnées par la circulation de ces véhicules.
C’est l’une des manifestations du principe d’égalité des citoyens devant la loi ou les charges
publiques. Les personnes utilisant une même dépendance du domaine public sont traitées sur
un pied d’égalité. Elles ont les mêmes droits.
Ainsi, l’égal traitement des citoyens dans l’utilisation du domaine public commande que les
autorisations de manifester sur la voie ou place publique ne peuvent être délivrées à certaines
associations ou groupements politiques et refusées à d’autres.
Toutefois, pour des raisons de sécurité publique voire de prévention des troubles à l’ordre
public, des discriminations peuvent être instituées entre les manifestants.
Ainsi, le principe d’égalité comporte des exceptions qui visent les usagers dont la situation
n’est pas identique ou lorsqu’un intérêt général le justifie.
C’est dans ce cadre que dans l’agglomération d’Abidjan, des couloirs sont spécialement
réservés aux autobus et aux véhicules des services d’urgence.
Par occupation privative, il faut entendre l’occupation par une personne physique ou morale
d’un terrain faisant partie du domaine public, d’une dépendance de la voirie de sorte que cette
utilisation, empêche au même moment, l’usage de ladite parcelle, à toute autre personne,
rompant ainsi la liberté et l’égalité de tous les citoyens dans l’utilisation du domaine public.
Cette occupation personnelle est soumise à autorisation. Elle est précaire et constitue une
source de revenus pour les Collectivités.
De ce texte, deux grandes formes d’occupation sont envisagées, celle issue d’un acte
unilatéral ou permission de voirie ou celle résultant d’une convention ou concession de voirie.
L’une et l’autre forme obéissent au même principe de précarité qui caractérise l’utilisation
privative du domaine public. En Côte d'Ivoire, les deux formes sont connues avec une
prédominance de la permission de voirie.
Les propriétés privées sont placées sous la protection des tribunaux. Ainsi, lorsqu’un
propriétaire subit un préjudice — empiètement ou dégradation — il ne peut se faire justice
lui-même. Il doit obtenir du tribunal une condamnation du responsable du dommage. Une
telle procédure n’est pas compatible avec les nécessités de la protection du domaine public.
Si une route est obstruée ou une dépendance de la voirie est occupée irrégulièrement par des
constructions, il n’est pas possible d’attendre la fin du procès pour rétablir la circulation ou
l’ordre public qui est troublée.
Pour ce faire, le législateur a prévu une protection pénale du domaine public (1) à laquelle
s’ajoute une protection civile (2).
L’art. 8 du décret du 29 septembre 1928 dispose que les infractions à la règlementation sur le
domaine public “sont déférées aux tribunaux de simple police et passibles de peines de 1 à
500 frs d’amende”.
Dès lors, une distinction doit être faite entre la protection contre les dégradations (a) et celle
mise en œuvre contre les occupations sans titre(b).
En Côte d’Ivoire, il y a une seule catégorie qui se résume aux contraventions de voirie pour
toutes les atteintes portées au domaine public.
En cas de contravention de voirie, s’applique l’art. 8 du décret de 1928 qui prévoit une
amende ou lorsqu’il y a récidive dans les douze mois ou non-exécution des travaux prescrits
dans le laps de temps déterminé par le tribunal, l’amende peut être triplée et le contrevenant
peut encourir une peine d’emprisonnement, sans préjudice de la réparation des dommages
causés.
En tout état de cause, le contrevenant doit être condamné à la remise en l’état du bien
domanial, c’est l’action domaniale qui rattache au contentieux de la répression, la réparation
civile.
Le décret précité prévoit également que les travaux prescrits pour la remise en état du
domaine public peuvent être exécutés par l’administration aux frais du contrevenant.
Sont également des contraventions de voirie, toutes les occupations du domaine public sans
titre.
Est occupant sans titre, celui qui n’a jamais bénéficié d’une autorisation quelconque, ou
encore celui dont l’occupation donne lieu à un titre qui a expiré ou que le titre lui a été retiré.
L’occupation sans titre constitue donc une situation illégale et illicite à laquelle il doit être mis
fin.
En dehors de ces cas, si la personne publique procède à une expulsion sans recours au juge,
elle commet une voie de fait qui engage sa responsabilité.
Celle-ci résulte de deux principes dégagés par les textes et la jurisprudence, ce sont
l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité du domaine public.
Une personne privée peut disposer, dans le respect de la loi, comme elle le veut de la propriété
de ses biens qui peuvent être aliénés. Il n’en va pas de même quant aux biens relevant du
domaine public.
En France, le Code général de la propriété des personnes publiques dispose que « les biens
des personnes publiques (...) qui relèvent du domaine public sont inaliénables et
imprescriptibles ».
Plus récemment, la loi n° 84-1244 du 8 novembre 1984 portant régime domanial des
communes et de la ville d’Abidjan, précisera que “le domaine public de la commune ou de
la ville d’Abidjan est inaliénable et imprescriptible“.
Ce principe protège l’autorité administrative contre elle-même et contre les agissements des
particuliers. En effet, les actes de cession qui auraient été établis par l’administration sont
nuls, de même sont nulles de nullité absolue, les ventes conclues par erreur ou par fraude
entre particuliers et portant sur un bien du domaine public.
Selon l’art. 2262 du Code civil, un occupant même de mauvaise foi, devient propriétaire après
un délai de trente (30) ans.
L’art. 93 précise que “les domaines public et privés de la collectivité territoriale sont soumis
au même régime juridique que le domaine de l’Etat. Ainsi, au contraire du domaine public,
le domaine privé de l’entité décentralisée peut être, aliéné, cédé et prescrit”.
Dans les agglomérations, chaque collectivité territoriale dispose d’un domaine qu’elle se
constitue conformément aux dispositions des lois et règlements en vigueur en la matière,
notamment les articles 202 à 205 de la loi n° 2003-489 du 26 décembre 2003 portant régime
financier, fiscal et domanial des collectivités territoriales.
Quels sont les modes de constitution de ce domaine privé (paragraphe 1) et comment les
entités décentralisées gèrent ledit domaine ? (paragraphe 2)
Ils peuvent soit s’engager dans la voie contractuelle (A), soit utiliser les modes exceptionnels
liés à leurs prérogatives de puissance publique (B).
En milieu urbain, l’Etat et les entités décentralisées peuvent devenir propriétaires d’immeuble
comme de simples particuliers par achats, échanges, donations ou legs.
Selon l’art. 204 de la loi susvisée, le domaine privé de la commune est constitué par transfert
ou cession des biens du domaine l’Etat, d’une autre collectivité territoriale, à titre onéreux ou
gratuit.
La cession ou le transfert des biens de l’Etat est autorisé par décret pris en Conseil des
ministres, soit à la requête de la collectivité territoriale, soit à l’initiative de l’Etat.
Les biens acquis dans ces conditions deviennent la propriété de la collectivité territoriale qui
en assure la gestion ou l’administration conformément aux lois et règlements en vigueur. Le
transfert est réalisé au moment de la création de l’entité décentralisée ou après.
Cependant, à défaut de Plan d’Urbanisme Directeur pour chaque ville ou commune de Côte
d’Ivoire, les gestionnaires des cités sont toujours confrontés à ces difficultés liées à
l’impossibilité de connaître la consistance de leur patrimoine privé.
Cette affaire met en exergue, les difficultés rencontrées dans la gestion des terrains urbains.
Le domaine privé de l’Etat et des collectivités territoriales est également constitué par
acquisition soit à titre gratuit à la suite de dons et legs reçus et acceptés, soit à titre onéreux
notamment par suite d’achat, d’échange, de marché.
L’acquisition d’un bien par une collectivité territoriale est décidée par une délibération du
Conseil et transmise à l’autorité de tutelle. Selon l’al. 2 de l’art. 218 de la loi n° 2003-489 du
26 décembre 2003, cette acquisition est conclue par le Maire, le Président du conseil ou le
Gouverneur.
Les biens obtenus dans ces conditions entrent définitivement dans le patrimoine de la
collectivité qui peut en disposer librement. Ainsi, les biens du domaine privé peuvent être
vendus dans les mêmes conditions que les biens appartenant à l’Etat.
Outre la voie contractuelle décrite ci-dessus, les personnes publiques peuvent recourir à des
procédés, relevant de leur prérogative de puissance publique pour contraindre des particuliers
à leur céder leurs biens.
Il faut distinguer à cet effet, les cessions forcées à la suite d’une procédure d’expropriation
pour cause d’utilité publique et les autres modes exceptionnels que sont la confiscation pénale
d’un bien foncier appartenant à un condamné, le droit de préemption consécutif à l’aliénation
d’un bien immobilier et la purge des droits coutumiers suivie de l’immatriculation au nom de
la personne publique.
Aujourd’hui, l’ordonnance du 2 juillet 2013 fixant les règles d’acquisition de la propriété des
terrains urbains et ses textes d’application déterminent les règles d’acquisition de la propriété
des terrains urbains (B), mettant un terme à la méthode de gestion antérieure (A).
L’art. 4 du décret du 16 février 1971 renseigne sur les formalités à remplir par l’attributaire
d’un terrain urbain. À cette époque, l’octroi de la concession définitive, sous la forme de
transfert de propriété était considéré comme la récompense de la mise en valeur du terrain,
l’immatriculation ayant déjà été faite au nom de l’Etat pour garantir l’origine de la propriété.
Les opérations de morcellement ou lotissement sont réalisées sur des terrains appartenant à
l’Etat ou aux collectivités territoriales (Adjamé, Abobo, Attiécoubé, Cocody, Koumassi,
Macory, Plateau, Port-Bouët, Treichville et Yopougon).
À Abidjan, les morcellements après aménagement sont quasiment réalisés sur des terrains
propriétés de l’Etat. Il s’agit des terrains ayant fait l’objet de purge des droits coutumiers,
conformément au décret n° 2013-224 du 22 mars 2013 et déjà immatriculer au nom de
l’Etat.
La délivrance de la lettre d’attribution ne peut porter que sur les terrains des lotissements
réalisé par la commune ou cédé à celle-ci. Le dossier de demande d’attribution de terrain à
usage d’habitation porte sur le domaine privé ; il est déposé auprès des services techniques de
la commune contre récépissé. La commune a également le pouvoir de retrait des lots à usage
d’habitation insuffisamment ou non mise en valeur.
À partir de la loi n° 2002-156 du 15 mars 2000 partant loi de finance de l’année 2000, ces
conditions de transfert de la propriété de l’Etat au profit des acquéreurs ont été simplifiées
pour les terrains urbains immatriculés au nom de l’Etat.
À Abidjan, toute mise à disposition commence par le paiement préalable par l’acquéreur à la
recette des domaines du prix de vente du terrain et des diverses taxes foncières. Ce qui n’est
pas le cas dans les autres agglomérations.
La procédure d’attribution commence par plusieurs opérations qui sont la réception des
dossiers de demande à la Préfecture ou à la Sous-préfecture selon le cas ; le contrôle et
l’examen des dossiers, le choix des demandeurs à satisfaire, l’envoi d’une lettre de promesse
d’attribution aux attributaires retenus, le paiement des frais requis et la remise de la quittance
de paiement à la Préfecture ou à la Sous-préfecture.
Ces opérations débouchent sur la délivrance de la lettre d’attribution par le Préfet ou le Sous-
préfet, Président de la commission. L’attributaire est invité également, par cette lettre à
déposer dans un délai de quatre mois, au service du domaine urbain du ministère chargé e la
construction et de l’urbanisme à Abidjan, un dossier technique de bornage-morcellement
dressé par un géomètre privé agréé, en vue de l’obtention d’un arrêté de concession
provisoire. Il est prescrit que l’installation sur les lieux est subordonnée à l’obtention de cet
arrêté.
Il est aussi indiqué dans la lettre d’attribution qu’aucune cession du lot n’est admise avant
l’obtention de l’arrêté de concession provisoire, voire du titre foncier. La lettre d’attribution
ne constitue pas un titre de propriété.
Ils sont personnels à ceux qui les exercent et ne peuvent être cédés à quelque titre que ce soit.
Se pose alors la question de la validité d’une telle transaction quand on sait que de
nombreuses acquisitions de terrains urbains se réalisent sur des terrains dits villageoises.
La demande croissante de terrains urbains pour la réalisation de projets immobiliers à Abidjan
et dans les grandes agglomérations est à l’origine des lotissements “villageois”.
Il s’agit des villages qui ont été phagocytés par la ville ou la commune. Cependant, dans la
conscience des populations originaires de ces villages, l’espace d’habitation demeure sous
l’emprise des règles coutumières quand bien même ces villages sont dans le périmètre urbain
ou les règles d’urbanismes s’imposent à tous sans distinction.
À défaut de plan d’urbanisme directeur dans la plupart des grandes agglomérations, c’est au
vu et au su de tout le monde que ces morcellements parcellaires sont réalisés et cédés aux
éventuels acquéreurs.
Nombreux sont les acquéreurs qui sont dans l’attente d’une régularisation au niveau du
lotissement pour entamer la procédure qui doit leur permettre d’avoir le titre définitif de
propriété.
L’art. 36 de l’annexe fiscale de la loi n° 2002-156 du 15 mars 2002 portant loi de finance
de l’année 2002 permettait d’établir le titre de propriété d’un terrain urbain sans recourir à la
mise en valeur.
- les détenteurs d’actes administratifs de vente émanant de l’ex Direction du contrôle des
Grands
Travaux (DCGTx), de l’ex Service des Ventes Immobilières (SVI), du Bureau National
d’Étude Technique et Développement (BNETD) ou de l’Agence de Gestion Foncière
(AGEF).
Dans la pratique, l’intervention de plusieurs acteurs pour l’établissement des différents actes
relatifs à l’attribution d’un terrain en milieu urbain constituait une source de difficultés dans la
gestion des terres.
En dehors du District, l’Arrêté est pris par le Préfet sur délégation de pouvoir du Ministre
chargé de la Construction et de l’Urbanisme.
L’appropriation des terrains par l’arrêté de Concession définitive sera examinée dans le cadre
de l’appropriation des terrains urbains.
Cette gestion se fait en liaison avec d’autres Ministères concernés peu ou prou par l’utilisation
ou l’exploitation des ressources foncières (B). Pour assurer une meilleure gestion du foncier
rural, il a été créé depuis 2016 l’Agence foncière Rurale ou AFOR (C).
De façon générale, la Direction du foncier rural assure les missions régaliennes de l’Etat qui
sont notamment : la gestion du domaine foncier rural de l’Etat, l’élaboration et la mise en
œuvre de la réglementation foncière, la participation à la mise en œuvre de stratégies de
gestion durable des ressources foncières et de l’espace rural sans oublier la participation à la
mise en place du cadastre rural.
À l’échelle locale, les opérations techniques relatives à la gestion du domaine foncier rural
relèvent de la compétence de chaque direction départementale du Ministère chargé de
l’agriculture. La direction départementale de l’Agriculture est véritablement l’interface entre
l’Administration territoriale et les usagers.
L’ensemble de ces tâches sont accomplies par le conservateur de la propriété foncière et des
hypothèques à qui la réglementation assigne trois tâches principales : création des titres
fonciers, inscription sur lesdits titres de droits réels y afférant et conservation des documents
d’archives relatifs aux titres fonciers créés.
Quant au service du cadastre, son rôle consiste à constituer des documents officiels qui
donnent des informations sur le patrimoine immobilier national.
À ce titre, plusieurs missions lui sont assignées : créer et conserver le cadastre en zones
urbaines et rurales, coordonner les activités cadastres des services extérieurs de la Direction
Générales des impôts, coordonner les opérations d’assiette, contrôler l’impôt foncier, etc.
Ce Ministre intervient dans la gestion du domaine foncier à travers ses représentants locaux
que sont les préfets et sous-préfets disposent en la matière d’une compétence propre.
À l’échelle locale, les préfets et sous-préfets jouent notamment un rôle important en matière
d’attribution des terres et de délivrance des titres d’occupation foncière. Par exemple, les
comités de gestion foncière rurale institués par le décret n° 99-593 du 13 octobre 1999 sont
créés par arrêté préfectoral et présidés par le sous-préfet.
De même en ce qui concerne l’attribution des terres du domaine coutumier, c’est le préfet qui
signe le certificat foncier et assure sa publication au journal officiel. Il lui revient également
de transmettre au Ministre chargé de l’agriculture, les requêtes d’immatriculation à lui
adresser.
Créée par le décret n° 2016-590 du 3 août 2016, l’Agence de gestion Foncière Rurale est une
structure d’exécution dotée de la personnalité morale qui a pour mission de mettre en
œuvre la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural et ses textes
subséquents.
À ce titre, elle est chargée des tâches pratiques qui antérieurement étaient dévolues à la
Direction du Foncier rural et du cadastre. Il s’agit entre autre multiples tâches :
- de mobiliser les ressources pour la mise en œuvre des actions de sécurisation du domaine
foncier rural ;
- de conseiller les pouvoirs publics sur toutes les questions liées à la gestion du domaine
foncier rural ;
L’AFOR comprend deux organes qui sont le Conseil de surveillance et la Direction Générale.
Le Conseil de surveillance assure la supervision des activités de l’AFOR conformément aux
orientations politiques de l’Etat en matière foncière. Il est composé de 12 membres
représentant les Ministères concernés, la Chambre Nationale d’Agriculture et la Chambre des
Rois et Chefs traditionnels.
Quant à la Direction Générale, elle assure au quotidien l’exécution des décisions prises par le
Conseil de surveillance.
La mise en place de l’AFOR est attendue dans l’espoir qu’elle pourra contribuer à sécuriser la
propriété foncière en milieu rural.
1- Organisation
Le comité de gestion foncière rurale est organisé par le décret n° 593 du 13 octobre 1999.
Créé dans chaque sous-préfecture par arrêté préfectoral, il est composé d’une part, des
représentants des Ministères et services qui interviennent dans la gestion des ressources
foncières, d’autre part des représentants des communautés rurales, des villages et des autorités
coutumières, désignes pour une période de trois ans renouvelable.
Le comité de gestion foncière rurale est présidé par le sous-préfet. Celui-ci est chargé de créer
des comités villageois de gestion foncière rurale, chargés de la gestion des terroirs. Il est
également chargé de transmettre au préfet les dossiers de délibération.
La décision finale revient au préfet qui dispose alors de deux semaines pour donner une suite
aux avis et propositions formulés par le comité.
Si le décret précité a le mérite de fixer une répartition paritaire des acteurs étatiques et des
représentants des communautés rurales au sein du comité, il faut veiller à éviter une sous-
représentation des femmes et des jeunes.
Car, au regard des tenures foncières coutumières, la gestion des terres est plutôt une
prérogative des autorités foncières coutumières (chefs de famille, chefs de villages, chefs de
lignage, etc.).
2- Attributions et fonctionnement
La création des comités de gestion foncière rurale répond au souci de l’Etat d’associer
davantage les populations locales à la gestion des ressources foncières.
Elle est en corrélation avec le Programme National de Gestion des Terroirs (PNGTER) dont
l'un des objectifs majeurs est d’accroître la participation et la responsabilisation des
populations dans la gestion de leur terroir.
Le décret précité portant organisation et attributions des comités de gestion foncière rurale
associe non seulement les populations au processus décisionnel mais aussi, il élargit le
domaine d’intervention desdites populations dans la gestion des ressources foncières.
Car à travers les comités mis en place, les représentants de ces populations interviennent
obligatoirement avec voix délibératives, sous forme d’avis conforme, sur des questions telles
que la validation des enquêtes officielles de constat de droits fonciers coutumiers, les conflits
non résolus au cours des enquêtes foncières, les demandes de cessions de droits fonciers
coutumiers, l’implantation des projets d’urbanisation ou des opérations de reboisement, etc.
Le Comité peut également être saisi pour avis simple par les autorités compétentes de toute
question relative au domaine foncier rural.
Les comités constituent les organes essentiels de gestion foncière rurale ; ils sont censés être
la cheville ouvrière en matière d’enquêtes foncières et de délivrance des certificats fonciers,
l’objectif visé étant la sécurisation foncière. Mais après plus d’une décennie de mise en œuvre
de la réforme foncière du 23 décembre 1998, peu de comités ont été créés. La lenteur dans la
mise en place des comités constitue naturellement une tentative notable au processus de
sécurisation foncière.
- suivre la mise en œuvre de la loi du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural ;
La Commission foncière rurale est composée des représentants des principaux acteurs du
secteur agricole : Ministères techniques, Institution nationales, producteurs agricoles, autorités
coutumières et religieuses, centres de recherche universitaire, partenaires techniques et
financiers du monde rural.
La Commission foncière rurale est dotée, d’une part, d’un secrétariat permanent assuré par le
Directeur du foncier rural du Ministère de l’Agriculture, d’autre part, de deux groupes de
travail (comité juridique et comité technique).
Malgré ses missions et sa composition qui suggère une participation effective des acteurs
concernés à la gestion du domaine foncier rural, la Commission ne constitue qu’un simple
organe consultatif.
Elle n’a guère l’autonomie, nécessaire pour donner une vision extérieure de la gestion du
domaine foncier rural. Car le Ministère de l’Agriculture qui est chargé de la gestion du
domaine foncier rural joue un rôle déterminant au sein de la commission apparaissant à la fois
comme juge et partie.
À ces limites s’ajoute le caractère non opérationnel de la commission. Alors qu’elle est censée
se réunir au moins une fois tous les six mois, la Commission foncière rurale n’a eu qu’une
seule séance de travail depuis sa création.
1- Les directions
Ainsi, la direction du domaine urbain assure la gestion du domaine de l’Etat en milieu urbain.
Cette compétence emporte des tâches plus spécifiques d’instruction de dossier, de rédaction
d’actes et de suivi de la mise en œuvre de la règlementation et des procédures de gestion
foncière.
2- Les services
Au titre des services, il faut retenir le service de la recherche du foncier pour les grands
projets de l’Etat, le service de vérification et de sécurisation des actes administratifs et le
service du Guichet unique du foncier et de l’habitat. Ces services sont rattachés au cabinet du
Ministre en charge de la construction et de l’urbanisme.
C’est une activité primordiale quand on sait que l’extension des zones urbaines s’opère sur les
terres appartenant aux personnes exerçant sur lesdites terres un droit coutumier. À la fin des
opérations d’aménagement foncier, le service de la recherche du foncier, en liaison avec les
aménageurs et l’Agence de Gestion Foncière, va informer les populations sur la disponibilité
de terrains urbains et préciser leurs modalités d’acquisition.
Ce service fait donc de la recherche-développement et gère une base de données sur les
ressources foncières de l’Etat.
À ce titre, il est chargé notamment de prospecter et de négocier les parcelles dédiées aux
projets de l’Etat, d’identifier les détenteurs des droits coutumiers sur l’ensemble du territoire
national et de tenir un répertoire de ceux-ci, de programmer les opérations de constitution de
réserves foncières sur le territoire national, etc.
- de transmettre pour traitement les dossiers de demandes d’actes aux services compétents ;
Il gère le domaine public de l’Etat à travers la Direction du domaine public. Cette Direction
est chargée de :
II gère le domaine public et le domaine privé de l’Etat. Il est chargé de la gestion patrimoniale
des biens de l’Etat. Le Ministère en charge du Budget intervient à travers la Direction
générale des impôts dont la mission consiste à :
À côté de ces structures décentralisées que sont les Districts et les Communes (A), il faut
mentionner également, les organismes qui ont été spécialement créés pour faire face à une
situation donnée, ce sont les structures parapubliques (B).
Elle consiste notamment à prendre des mesures pour empêcher l’occupation anarchique et
illégale des terrains ainsi que la prolifération des quartiers précaires, veiller au respect par les
villes, les communes, les promoteurs immobiliers et les particuliers, des schémas et plans
d’urbanisme et d’aménagement approuves et en vigueur, etc.
De 1987 à 1996, la Direction des Ventes Immobilières (DVI) s’est occupée de l’aménagement
et de la vente des terrains. Cette Direction est devenue plus tard le Service des Ventes
Immobilières (SVI) lequel sera rattaché au Cabinet du Ministère du Logement, du Cadre de
Vie et de l’Environnement.
Créée en 1999, l’AGEF prend la relève pour assurer la gestion du patrimoine foncier après la
SETU, la DVI et le SVI. Agissant pour le compte de l’Etat, l’Agence de gestion foncière
(l’AGEF), est chargée de constituer des réserves foncières et de faire des aménagement
fonciers sur toute l’étendue du territoire ivoirien en confiant ces opérations à des sociétés
d’aménagement par voie de concession.
Dans le cadre de cette mission, elle procède à la purge des droits coutumiers conformément
au décret n° 2013-224 du 22 mars 2013 qui réglemente la purge des droits coutumiers sur le
sol pour intérêt général.
Cependant, dans la pratique, l’AGEF rencontre des difficultés dans l’accomplissement de ses
missions en raison de l’interférence non seulement du Ministère de ta Construction et de
l’Urbanisme qui délivre à des opérateurs économiques des documents administratifs en
violation des textes en vigueur, mais également des personnes privées ou des promoteurs
immobiliers qui interviennent dans la chaîne foncière pour acheter directement des parcelles
de terrain aux détenteurs de droits coutumiers.
Ainsi, des personnes morales et/ou physiques, en dehors de l’Etat, de ses démembrements et
des structures créées pour gérer son domaine foncier, acquièrent des terres qui, en principe,
devaient d’abord être immatriculées au nom de l’Etat avant toute cession à un tiers.
Malgré ces difficultés, l’AGEF a à son actif plusieurs réserves foncières et concessions
d’aménagement. Dans la recherche d’une saine gestion des terres en milieu urbain, l’AGEF
constitue sans aucun doute, par son statut et ses missions, une structure salutaire en matière de
sécurisation des droits fonciers.
En Côte d'Ivoire, les opérations d’aménagement sont définies au niveau urbain comme rural
par divers plans. À partir du cadre général d’intervention défini par les plans, des actions
spécifiques vont être exécutées sur le terrain, ce sont les techniques de gestion (section
1). Des instruments de gestions sont également mis en place pour garantir les droits des
occupants des terres (section 2).
Ils comprennent souvent un état des lieux, une évaluation environnementale au regard du
développement durable. Ces documents sont périodiquement mise à jour dans le cadre de la
loi.
Il définit également le domaine urbain de l’Etat à soumettre à la purge des droits coutumiers
en vue de la constitution de réserve foncière nécessaire extension de la ville.
Le schéma directeur d’aménagement du territoire voté est valable pour cinq ans.
Cependant, il peut être révisé dans le but d’éventuelles améliorations, et ce, dans les mêmes
formes et conditions que celles prévues pour son élaboration.
Après son adoption, le schéma directeur d’aménagement du territoire est décliné en autant de
schémas directeurs régionaux d’aménagement qu’il existe de régions en Côte d’Ivoire.
Il apporte un cadre d’aménagement qui met un terme aux improvisations dans les villes. Il
définit les grands axes de développement de l’agglomération dans un contexte aussi large que
possible qui permet de prendre en considération les nécessités de l’environnement humain,
économique, biologique ou naturel.
Dans ces conditions, le plan est important parce qu’il annonce et par ce qu’il prescrit, mais il
l’est encore plus par ce qu’il empêchera de faire, ici ou là, pour des raisons de sauvegarde
durable des espaces naturels.
Le plan d’urbanisme directeur peut être révisé dans les mêmes formes et conditions que celles
prévues pour son élaboration.
A- Le lotissement
Le lotissement est une opération de création volontaire d’un tissu parcellaire qui consiste à
diviser un terrain en plusieurs parcelles destinées à la construction.
Le lotissement est le mode d’aménagement du sol en milieu urbain qui s’appuie sur un
principe (1) à partir duquel les différents types de lotissements seront déclinés (2).
1- Le principe du lotissement
La réalisation de l’opération de lotissement comporte deux étapes qui sont d’une part,
l’élaboration du plan de lotissement, d’autre part, la procédure de lotissement sur le terrain ou
mise en application du plan.
Le plan de lotissement est le résultat d’une recherche ou étude intégrant les contraintes les
plus diverses.
L’analyse de ces contraintes fait appel à plusieurs données qui ont trait notamment à la
vocation de la zone, aux données générales de l’insertion dans la ville, à la densité de la
population, aux contraintes réglementaires, aux données géographiques et hydrogéologiques,
etc.
À la suite de cette étude, il faut procéder à l’élaboration proprement dite du plan dont les
principales étapes sont :
3°) Détermination des zones pouvant recevoir certains éléments du programme en fonction
des caractéristiques du relief,
6°) Mise au net et découpage parcellaire. En même temps que le dessin définitif du plan, sera
précisé, il faut établir le canevas de la réglementation (cahier de charges).
Après l’élaboration du plan, il faut passer à la mise en application. Il s’agit d’une procédure
qui comporte plusieurs étapes.
Dans ce cas, les procédures sont conduites par une commission présidée par le Maire.
Les règles de base du lotissement servent de boussole pour les différents types de lotissement.
Il est initié soit par le Sous-Préfet (lotissement public de l’Etat), soit par le Maire (lotissement
communal).
Le lotissement communal est également régi par la loi n° 2003-208 du 7 juillet 2003 portant
répartition et transfert de compétences de l’Etat aux collectivités territoriales et le Décret n°
2005-261 du 21 juillet 2005 fixant les modalités d’application de cette loi en matière
d’urbanisation et d’habitat.
Quant au lotissement privé, il est régi par le décret 70-294 du 13 mai 1970 relatif aux
lotissements privés. Le lotissement privé est initié par des personnes physiques ou morales qui
procèdent à des morcellements et à la vente de parcelles selon les règles en vigueur et sous le
contrôle du Ministère de la contraction.
Les lots peuvent avoir plusieurs destinations, soit d’habitation, de jardins ou d’établissements
industriels ou commerciaux.
Le Directeur Régional de l’urbanisme procède au contrôle des travaux avec l’aide des services
de la mairie ou de la Sous-préfecture.
B- La restructuration urbaine
Elle est régie par l’ordonnance n° 77-615 du 24 août 1997 relative aux opérations de
restructuration urbaine.
La décision de restructuration est prise en Conseil des ministres sur proposition du Ministre
chargé de l’Urbanisme. Le District a l’initiative et la réalisation de ces plans de restructuration
urbaine, après avis consultatif des villes et communes qui le composent et de la Région dont il
relève.
Le dossier foncier fait l’état des droits existants, du nouveau plan de lotissement, de l’état
futur des droits, du programme de relogement et de réinstallation des personnes et activités
devant être éventuellement déplacées. Le dossier dresses également la liste des propriétés et
parcelles dont l’expropriation et la reprise sont déclarées d’utilité publique. L’enquête
publique préalable à l’approbation du plan de restructuration vaut enquête de commodo et
incommodo.
Chaque immeuble à l’immatriculation fait l’objet d’une feuille ouverte dans le livre foncier.
L’ensemble des mentions ainsi consignées sur une feuille constitue le titre foncier lequel est
définitif, inattaquable et imprescriptible.
Chaque feuille est divisée en cinq sections destinées chacune à recevoir des mentions
spécifiques faisant l’objet de bordereaux analytiques inscrits sur le livre foncier suivant un
numéro d’ordre, avec précision de la date d’inscription.
Ces mentions portent essentiellement sur :
Outre le livre foncier et les dossiers qui les accompagnent, la réglementation en vigueur
prévoit d’autres registres destines soit à la vérification de la suite de la procédure
d’immatriculation, soit à la constatation des demandes d’inscription sur les livres fonciers,
soit enfin à la communication des informations aux usagers.
B- Évolution
Dans tous les cas, pour améliorer le fonctionnement des services de la conservation foncière
et faciliter l’accès des usagers aux informations du titre foncier, la tendance actuelle est à
l’informatisation de certaines données du livre foncier.
C’est dans cette optique que par ordonnance du 24 mars 2015, le Conseil des Ministres a
institué le livre foncier électronique. Cette option vise à accompagner le dynamisme des
transactions immobilières en sécurisant au mieux les données du livre foncier et en améliorant
l’accès aux informations qu’il contient.
Paragraphe 2 : Le cadastre
La définition, les missions et l’évolution du cadastre méritent d’être examinées (A), de même
que sa nature juridique (B). Il convient également de faire le rapprochement entre le cadastre
et le plan foncier (C).
Que recouvre la notion de cadastre (1) ? Et quelle est son évolution (2) ?
1- Définition et missions
Le cadastre peut être défini comme un ensemble de documents officiels donnant des
informations sur les propriétés bâties et non bâties et sur l’identité de leurs propriétaires. Au
sens large, c’est un inventaire de la propriété foncière dont il donne une description plus ou
moins détaillée en vue de répondre aux besoins individuels et collectifs de la société.
Cet inventaire ce fait généralement par l’établissement d’une documentation graphique (plans
cadastraux) et d’une documentation littérale contenue dans un registre. La mise en relation
des données graphiques et littérales se fait à travers l’utilisation d’un numéro d’identification
qui permet de passer de l’information graphique à l’information littérale.
Au sens strict, le cadastre affecte la forme d’un démembrement foncier établi par l’Etat.
- l’opération juridique qui a pour finalité de préciser le statut des terres de même que les droits
et obligations des propriétaires ou occupants.
II résulte des missions ci-dessus que la documentation graphique du cadastre comporte trois
éléments :
- le plan de titre foncier qui fait partie de l’annexe du livre foncier portant sur les
caractéristiques de l’immeuble et dont le caractère définitif dépend de l’accomplissement des
formalités de bornage réalisées en présence du géomètre assermenté du service de la
conservation foncière ;
- le plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage qui a pour objectif d’identifier les terrains
qui font l’objet de titres fonciers résultant de l’immatriculation ;
- le plan cadastral fiscal qui recense toutes les parcelles imposées et définit l’assiette de
l’impôt foncier.
- une meilleure connaissance des limites foncières ; ce qui facilite le règlement des conflits
fonciers, les études de planification et de développement et l’inventaire du domaine de l’Etat,
des collectivités et des particuliers ;
- la fiabilité des investissements, notamment en milieu rural où les droits fonciers coutumiers
sont souvent sujets à conflits ;
Cette volonté de prélèvement est à l’origine de l’impôt foncier. Mais bien évidemment,
l’imposition suppose que chaque portion de terres soit localisée, identifiée et validée. Or, cette
tâche n’est pas toujours aisée pour des raisons techniques, juridiques ou financières.
Mais le caractère facultatif de l’immatriculation n’a guère favorisé la mise en place d’un
cadastre général.
Consciente de cet obstacle, l’Administration coloniale a pris le décret du 20 mai 1955, lequel
a permis de procéder à l’immatriculation obligatoire de toutes les parcelles situées dans les
périmètres urbains à cadastrer ayant fait l’objet d’un plan d’urbanisme.
Si en milieu urbain, notamment à Abidjan, le cadastre a connu une application, il n’en est pas
de même en milieu rural. Il faut dire que contrairement au milieu urbain où du fait de la forte
pression foncière, le coût du cadastrage est facilement amorti par l’Etat, en milieu rural, il en
va autrement.
Pour remédier à cette situation, le Ministère de l’Agriculture a créé dès 2002 un service du
cadastre rural rattaché à la Direction du foncier rural. Ce service est notamment charge de la
délimitation des terroirs villageois laquelle constitue une étape vers la stabilisation des droits
coutumiers et le cadastrage des terres en liaison avec les services compétents du Ministère de
l’Économie et des Finances.
Ces documents peuvent être consultés par les contribuables qui peuvent en obtenir des extraits
leur permettant de s’informer sur leur situation foncière ou fiscale. D’où l’intérêt de
s’interroger sur la nature juridique des documents cadastraux.
En d’autres termes, les documents cadastraux peuvent-ils par exemple, être utilisés par les
contribuables pour apporter la preuve de leurs prérogatives foncières ?
À cette question, il convient de répondre par la négative. En effet, les documents cadastraux
sont des documents purement administratifs qui décrivent des situations de propriété
apparentes ; ils ne peuvent en aucun cas constituer une preuve ou même une présomption de
propriété.
Il résulte de ce qui précède que le plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage n’a aucune
valeur juridique. Il en est de même du plan cadastral fiscal dont le caractère non contradictoire
exclut toute opposabilité aux tiers qui peuvent d’ailleurs le contester dans le cadre d’un
recours administratif.
En revanche, en ce qu’ils sont considérés comme faisant partie intégrante des données du livre
foncier, les plans de titre foncier sont opposables au tiers dès lors que les limites qu’ils
indiquent ont été reconnues et approuvées en présence du géomètre assermenté du Cadastre,
après une procédure contradictoire de bornage.
S’il est admis que les documents cadastraux ne peuvent établir la propriété, ils peuvent
cependant fournir un commencement de preuve de la propriété et des droits réels y relatifs.
En vue de collecter des données fiables sur l’occupation des terres en milieu rural, l’Etat a
initié depuis 1988, le Plan foncier rural. Le Plan foncier rural est une opération qui consiste en
une vaste enquête foncière menée en zone rurale sur la base de photos aériennes, complétées
par des enquêtes au sol.
Il vise notamment à faciliter le règlement des conflits fonciers, à constituer une base pour
l’aménagement et la gestion des terroirs villageois et à faciliter l’accès au crédit.
Après une phase pilote (1990-1996) suivie successivement d’une phase de consolidation
(1996-1997) et d’une phase d’extension (1997-1999), le plan foncier rural a couvert au total
neuf zones.
A la fin du projet en 2002, 1 117 000 hectares ont été délimités, 44 201 parcelles ont été
élevées, 708 villages ont été couverts pour une superficie numérisée s’élevant à 638 550
hectares.
- La mise au point d’un outil technique fiable et peu coûteux de levée de parcelles et de
recensement des droits, basé sur la cartographie ;
Après 2002, le plan foncier rural est devenu une composante du programme national de
gestion des terroirs et de l’équipement rural (PNGTER), programme visant à rationaliser
l’utilisation des ressources foncières par l’association et la responsabilisation des
communautés rurales dans la gestion de leur terroir.
À la différence du cadastre qui porte sur des parcelles aux délimitations plus précises et sur
lesquelles s’exercent des droits de propriété, le Plan foncier rural a pour objectif d’établir une
cartographie du territoire national.
Cette cartographie précise les limites foncières à l’intérieur de chaque terrain villageois et
recense pour chaque parcelle identifiée, l’ensemble des droits qui s’y exercent et les
détenteurs de ces droits.
De ce point de vue, le plan foncier rural apparaît comme un dispositif technique embryonnaire
du cadastre. En effet, la documentation graphique du Plan foncier rural comprend deux
éléments essentiels qui sont d’une part, le plan parcellaire et d’autre part, le plan du terroir.
Or, à l’analyse, le plan parcellaire s’apparente au plan de titre foncier du cadastre ; tandis que
le plan du terroir se rapproche du plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage.
Faut-il en déduire que les documents du plan foncier rural ont la même valeur juridique que
ceux du cadastre ? Une telle déduction ne semble guère possible, car les documents
cartographiques du plan foncier rural sont réalisés sans les éléments essentiels du cadastre que
sont le bornage, la présence d’un géomètre assermenté et le dossier technique de chaque plan
de parcelle.
Il résulte de ce qui précède que si les résultats du plan foncier rural présentent des avantages
certains, leur articulation à la réglementation foncière n’a pu se réaliser donnant ainsi la
sensation d’une symphonie inachevée.
Ainsi, aux termes de l’article 119 de la loi béninoise, la confirmation des droits fonciers en
milieu rural se fait principalement à partir du plan foncier rural.
C'est ici, que s'achève la première partie (La gestion du patrimoine foncier) de ce cours de
droit foncier. Vous pouvez consulter l'introduction ou la deuxième (les modalités d’accès à
ma terre).
Cours de droit foncier du professeur Gago Shélom Niho, enseignant de Droit à l'université
Félix Houphouet Boigny de Cocody/Abidjan. Ce cours n'est qu'une introduction générale de
cette matière (Droit foncier). L'intégralité de cette matière (Partie I et Partie II), vous sera
proposée sous la forme d'un résumé détaillé.
INTRODUCTION
En Côte d’Ivoire, la terre est au centre d’une problématique aux enjeux multiples dont la
complexité et le caractère récurrent font penser à un nœud gordien.
Ainsi, il ne se passe pas un seul jour sans que les instances de régulation que sont les autorités
coutumières administratives et judiciaires ne soient saisies de conflits fonciers opposant
différents acteurs dont les intérêts, les stratégies et les logiques d’occupation ou
d’appropriation sont divergentes, voire antagoniques.
Multiformes de par la diversité des protagonistes (autochtones, allochtones, allogènes,
administration forestière ou foncière, agriculteurs, éleveurs, villages limitrophes, etc.), et des
secteurs concernés (foncier urbain, foncier agricole, foncier forestier, foncier pastoral, etc.),
ces conflits qui sont quelques fois violents et meurtriers constituent aujourd’hui, au-delà de
l’insécurité foncière qu’ils traduisent, une menace pour la paix et la cohésion sociale.
-- Au plan socio-culturel, la terre dans la société africaine n’est pas seulement le support de
la production et de la reproduction, mais aussi le point de rencontre du visible et de
l’invisible.
En réalité, ce n’est pas la terre qui appartient à l’homme, mais c’est l’homme qui appartient à
la terre. Le même constat avait fait dire à A.ROBERT que la terre en Afrique noire,
n’appartient à personne parce qu’elle s’appartient à elle-même.
Mieux, la terre est considérée comme une déesse à qui l’homme doit respect et soumission.
Ce contexte socio-cosmogonique, dont les valeurs sont aux antipodes de celles véhiculées par
la civilisation occidentale, confère à la propriété des traits particuliers. Ceux-ci se rapportent
essentiellement au caractère collectif, inaliénable et imprescriptible de la propriété foncière
coutumière.
Ces valeurs, qui caractérisent la gestion coutumière des terres, sont aux antipodes de celles
introduites par la réglementation foncière étatique. Ainsi, avec l’avènement de la colonisation
et ensuite de l’Etat ivoirien, la propriété foncière coutumière va connaître des mutations plus
ou moins profondes caractérisées d’une part, par la minoration ou marginalisation de la
propriété foncière coutumière, d’autre part par la diffusion de la propriété individuelle ou
privée.
-- Au plan économique, l’Administration coloniale française avait pour des motifs d’ordre
économique privilégié la mise en valeur des terres aux dépens des tenures foncières
coutumières.
KOUASSIGAN disait à ce sujet que « la colonisation qui pour se justifier devant l’histoire se
présentait comme une initiative historique de culture des hommes en vue de leur
revalorisation était aussi et surtout culture des terres en vue de leur rentabilité ».
Dès l’accession de la Côte d’Ivoire à l’indépendance (7 août 1960), l’Etat ivoirien emboîté le
pas au colonisateur pour les mêmes motifs économiques et précisément dans le but de se
procurer les devises nécessaires au développement du pays. Le président Houphouët-Boigny
disait à ce propos que « la Côte d’Ivoire n’a pas de terres à repartir, mais à mettre en valeur
».
Cette option, qui visait à orienter le droit foncier vers le développement, s’est traduite au plan
agricole, par la création en zone forestière de grandes plantations de cultures pérennes (café,
cacao, hévéa, palmier à huile, etc.).
En milieu urbain, les enjeux sont les mêmes pour l’Etat, et les populations : l’urbanisation
galopante et la prolifération des habitats précaires constituent de sérieuses préoccupations
pour l’Etat qui a dû à plusieurs reprises, dans un contexte de marché informel et inorganisé du
foncier, réglementer et renforcer l’accès au foncier urbain.
Si la politique de développement mise en place par l’Etat ivoirien a pu générer des devises et
contribuer dans les deux premières décennies suivant l’indépendance, à une réelle croissance
économique (taux de 6 à 7 % en moyenne), à telle enseigne qu’on a pu parler de « miracle
ivoirien », elle a en revanche favorisé une exploitation abusive et anarchique des terres.
L’abus se traduit par une utilisation non durable des ressources foncières à travers notamment,
un système cultural inadapté caractérisé par un recours marginal aux intrants et par la
prédominance de l’agriculture itinérante sur brûlis.
Pour remédier à cette situation qui entraîne une baisse de productivité agricole, les paysans
ont eu recours à la colonisation de nouveaux espaces de culture.
Ainsi, près de 200 000 ha de forêts ont été défrichés par an jusqu’à la fin des années quatre-
vingt (80). De 16 millions d’hectares au début du siècle dernier, la forêt dense humide
ivoirienne est passée à 12 millions d’hectares à l’indépendance (1960) et à environ 3,7
millions d’hectares en 1999.
Cette disparition progressive des ressources forestières entraîne au plan national, non
seulement des perturbations de l’écosystème et de la biodiversité, mais aussi, elle a un impact
négatif sur le bilan de production agricole.
Ces acteurs opèrent selon les logiques et stratégies variables qui sont le reflet de leurs intérêts
actuels ou futurs.
Cette forte croissance démographique est consécutive à un taux de natalité élevé et à une forte
immigration de populations venant des pays limitrophes (Burkina Faso, Mali, Liberia, Guinée,
etc.).
De 1955 à 1990, la population rurale par exemple, a été multipliée par quatre ; d’où une forte
pression sur les terres, et de façon générale sur l’ensemble des ressources naturelles
(ressources forestières, pastorales, halieutiques, minières, etc.).
Cette forte pression foncière est surtout perceptible en milieu urbain, mais aussi en milieu
rural dans le sud forestier, zone agro-économique propice aux cultures d’exportation, les plus
rentables (cacao, café, palmier à huile, etc.). Elle est à l’origine d’une « marchandisation
» croissante du fond de terre (cacao, café, palmier à huile, etc.).
Il en résulte pour les autochtones des régions concernées, de réelles contraintes foncières dont
les premières victimes sont les jeunes et les femmes.
Aussi, de plus en plus, les autochtones revendiquent la propriété des terres cédées en se
fondant sur le droit coutumier quand les allogènes de leur côté, excipent des prérogatives liées
à la mise en valeur.
Il s’ensuit périodiquement des conflits fonciers plus ou moins violents dont la fréquence et la
gravité constituent aujourd’hui une menace pour l’ordre public et la cohésion sociale.
Entre nationaux, la question foncière constitue l’une des toiles de fond de conflits politico-
ethniques quelques fois meurtriers opposant les autochtones des terres colonisées aux paysans
originaires d’autres régions du pays.
Dans la sous-région ouest africaine, cette question constitue une pierre d’achoppement entre
les autorités ivoiriennes et les pays limitrophes dont sont originaires, les paysans allochtones
concernés.
Il résulte de ce qui précède que les ressources foncières sont au centre d’enjeux énormes et
multiformes. Qu’il s’agisse du milieu rural ou du milieu urbain, la terre est un bien immeuble
d’une importance vitale aussi bien pour les populations que pour les pouvoirs publics.
Elle est l’objet d’une quête permanente et effrénée que l’Etat, après l’administration coloniale
a jugé nécessaire de réglementer en vue de préserver la paix et la cohésion sociale : c’est la
dimension juridique de la problématique foncière.
Il s’agissait de tirer profit des immenses ressources foncières de la colonie, ressources qui
comme l’a écrit Albert Sarrault, devrait être livrées à la circulation mondiale.
En effet, le Code civil prévoit deux modes de transfert de la propriété qui sont d’une part, le
juste titre juridique, d’autre part, la prescription acquisitive trentenaire ou décennale.
Dans un contexte socio-culturel basé sur l’oralité, le recours à un juste titre juridique était
voué à l’échec.
Suivant la théorie du domaine éminent, l’Etat colonial était en droit de succéder, du fait de la
conquête ou de l’annexion, aux droits de souveraineté et de domanialité, exercés
antérieurement par les chefs locaux.
Quant à la théorie des terres vacantes et sans maître, elle résultait des termes de l’ article
premier du décret du 15 novembre 1935 portant réglementation des terres domaniales en
Afrique occidentale française.
Ce texte qui est en fait une reprise des dispositions du code civil, disposait que les terres
vacantes et sans maître appartiennent à l’Etat.
Il en était de même des terres non mises en valeur depuis plus de 10 ans. Il s’en est suivi une
marginalisation ou minoration des tenures foncières coutumières.
C’est dans ce contexte mercantile que Arthur Verdier et Dumas se verront respectivement
attribuer 5,5 millions et 11 millions d’hectares avant de se contenter de superficies plus petites
(270 000 ha pour Verdier).
système de concession des terres a été sans cesse dénoncé par les autochtones. Tout à tout, la
théorie du domaine éminent de l’Etat et la théorie des terres vacantes et sans maître seront
combattues par les leaders locaux.
Face aux revendications des autochtones et dans le but d’amener les populations à recourir
aux procédures domaniales et foncières en vigueur, l’Etat colonial a, à certaines périodes, pris
des dispositions pour assurer le respect des tenures coutumières.
Plusieurs méthodes ont été ainsi utilisées pour identifier et constater ces droits coutumiers en
vue de favoriser leur évolution vers la propriété foncière individuelle.
Successivement des tentatives seront faites soit pour les transformer à terme en concessions
domaniales, soit pour consacrer les conventions coutumières, soit enfin pour les constater par
la délivrance d’un certificat administratif.
Avec ce décret, l’Etat colonial n’était plus propriétaire que des terres acquises conformément
aux dispositions du Code civil ou de la procédure d’immatriculation.
De même, les particuliers pouvaient, après la mise en valeur de leur terre, en demander
l’immatriculation à leur nom. Enfin, les dispositions du décret du 15 novembre 1935 sur les
terres vacantes et sans maître avaient été abrogées, entraînant ainsi une renonciation de l’Etat
aux dites terres.
Mais le décret n° 55-580 du 20 mai 1955 n’a pas connu d’application en raison de l’accession
de la Côte d’Ivoire à l’autonomie interne et plus tard à l’indépendance (7 août 1960).
En somme, toutes les difficultés d’application en matière foncière, des dispositions du Code
civil ou des théories susindiquées (domaine éminent de l’Etat, terres vacantes et sans maître),
ont amené l’Administration coloniale à privilégier le système de l’immatriculation foncière,
système régi par le décret du 26 juillet 1932 portant réorganisation du régime de la
propriété foncière en Afrique Occidentale Française (A.O.F).
Cette solution permet rapidement aux investisseurs de connaître la situation juridique du bien
foncier qu’ils veulent acquérir ou exploiter.
Dès lors, la reconnaissance des tenures coutumières en ce qu’elle implique une indemnisation
des personnes dépossédées, aurait constitué un obstacle à sa politique de développement
agricole.
C’est pourquoi l’Etat s’était employé à marginaliser les tenures coutumières, mais aussi, il
s’était réservé de façon exclusive, pour des raisons évidentes de maîtrise foncière, le privilège
de gérer les terres.
Cette volonté de maîtrise foncière va amener l’Etat à distiller la propriété foncière aux
compte-gouttes et à fermer pendant longtemps les yeux sur l’ineffectivité de la procédure
d’immatriculation.
Pour justifier au plan juridique ses prétentions foncières, l’Etat ivoirien a, au lendemain de
l’indépendance, conçu la loi non promulguée portant Code domanial et foncier du 20 mars
1963. Cette loi reposait sur le principe de l’affirmation des droits de l’Etat sur les terres non
immatriculées ; c’est-à-dire pratiquement sur l’ensemble des terres coutumières.
Par exception à ce principe, les terres déjà mises en valeur par les personnes physiques et
morales n’étaient pas concernées.
Ayant compris les effets de la mise en valeur en matière d’accès à la terre et de peur d’être
dépossédés de ce qu’elles considéraient comme leur patrimoine foncier, les populations
locales avaient alors procédé à des mises en valeur superficielles.
Pour aller, plus vite, certains avaient mis le feu à la brousse, embrasant ainsi la moitié de la
Côte d’Ivoire.
Cette situation, qui était également accentuée par la levée de boucliers des autorités foncières
coutumières, avait alors amené le chef de l’Etat à surseoir à la promulgation de la loi du 20
mars 1963, bien que celle-ci fût adoptée par l’Assemblée nationale à une écrasante majorité.
Après l’échec de la loi incendiaire du 20 mars 1963, l’Etat ivoirien a eu recours à diverses
pratiques administratives (décrets, arrêtés, circulaires, etc.) pour asseoir et concrétiser sa
maîtrise foncière, en méconnaissance de la défunte constitution de 1960 qui indiquait que
c’est au législateur qu’il appartient de déterminer les principes fondamentaux du régime de
propriété et des droits réels.
Il reprendra ainsi à son compte les dispositions foncières coloniales qui lui étaient favorables,
rejetant par la même occasion celles qui constituaient des contraintes juridiques à sa politique
de développement agricole.
Par exemple, les dispositions du décret du 20 mai 1955 qui réalisaient la renonciation de
l’Etat aux terres vacantes et sans maître seront écartées.
Par contre, les dispositions qui indiquaient que les terres devaient d’abord être immatriculées
au nom de l’Etat avant toute rétrocession aux tiers, ont été maintenues.
Or, suivant le droit coutumier, l’absence de mise en valeur d’une terre n’implique pas qu’elle
soit sans maître.
Comme l’a écrit Elias Olawale, « affirmer que la brousse africaine n’appartient à personne
est contraire à toute la tradition. Le coin le plus reculé de la brousse est sous la juridiction
d’un chef quelconque ».
Se situant dans la logique de l’appropriation des terres non immatriculées, l’Etat va prendre le
décret n° 71-74 du 16 février 1971.
Ce décret, qui dissimule mal une forme foncière, soumet obligatoirement toute convention ou
opération relative à des droits mobiliers à une procédure domaniale et foncière.
Il réalise par ailleurs la minoration des droits coutumiers an indiquant dans son article 2 que
les droits portant sur l’usage du sol « dits droits coutumiers, sont personnels à ceux qui les
exercent et ne peuvent être cédés à quelques titres que ce soit ».
Cette disposition vient ainsi conforter l’interdiction en matière foncière des actes sous seing
privés édictée par le décret n° 64-164 du 16 avril 1964.
Il résulte de ce qui précède que l’Etat s’est efforcé de trouver un fondement légal à sa
mainmise sur les terres non immatriculées, mais ce fondement a été contesté par la doctrine
qui le trouve illégitime.
Pour celle-ci, l’appropriation par l’Etat des terres régies par le droit coutumier ne saurait se
justifier en principe que par l’immatriculation à son nom des dites terres.
Or, en pratique, l’Etat a eu très peu recours à cette procédure.
L’approbation par l’Etat des terres non immatriculée, d’une part, et l’imposition du primat de
la mise en valeur, en lieu et place de l’antériorité de l’occupation, d'autre part, n’ont pas
rencontré l’adhésion des populations autochtones et en particulier des propriétaires fonciers
coutumiers.
En fait, si ces populations ont toléré l’approbation par l’Etat desdites terres, elles ont en
revanche rejeté et combattu le primat de la mise en valeur.
Cette situation qui est le reflet de l’antagonisme entre l’ordre juridique coutumier, d’une part,
et l’ordre juridique étatique, d’autre part a cependant évolué.
En effet, au fur et à mesure que la terre perdait son caractère sacré pour devenir un bien
susceptible d’appropriation privée, un droit hybride fruit de la cohabitation entre les deux
ordres juridiques a pris naissance.
Cependant, parce qu’il n’emprunte pas les formes et procédures requises par les textes en
vigueur, ce droit offre peu de garantie en matière de sécurisation foncière.
D’où la fréquence des conflits fonciers.
En outre, face à la grogne incessante des autorités foncières coutumières et la persistance des
conflits fonciers, l’Etat va changer le fusil d’épaule en reconnaissant de jure les droits fonciers
coutumiers à travers la réforme foncière du 23 décembre 1908 relative au domaine foncier
rural.
Mais cette reconnaissance n’élude pas la procédure d’immatriculation foncière.
Cette insécurité qui s’observe aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural constitue
aujourd’hui une entrave aux transactions foncières, au crédit et aux investissements. Il s’agit
ensuite de multiplication des conflits fonciers ; toute chose qui a amené A. Dumont à dire
que « qui acquiert une terre, achète un procès ou une guerre ».
C’est pour remédier à cette situation préoccupante que d’aucuns considèrent comme une
bombe à retardement, que l’Etat n’a de cesse de réglementer le foncier en vue de préserver la
paix et la cohésion sociale, paramètres essentiels à un développement durable.
Il s’agit là d’autant d’interrogations auxquelles l’étude du droit foncier tentera d’apporter des
réponses.
Vu sous cet angle, le droit foncier peut se définir comme « l’ensemble des dispositions
réglementaires relatives à l’accès à la terre et à sa gestion ».
Partant de cette définition sélective, la présente étude portera d’une part, sur la gestion des
terres (Première partie), d’autre part sur les modalités d’accès à celles-ci (Deuxième
partie).
Ce cours de Droit de droit foncier ivoirien est constitué en trois parties : une introduction
générale, ensuite une Première partie (la gestion du patrimoine foncier) et enfin
une deuxième partie (les modalités d’accès à ma terre).
Sommaire
Elias Olowale disait à ce sujet que “la terre appartient à une grande famille dont beaucoup de
membres sont morts, quelques-uns vivants et dont le plus grand nombre est à naître“.
Les descendants des premiers occupants ont qualité de propriétaires fonciers coutumiers et ont
pour obligation de gérer les ressources naturelles (terre, eau, forêts, etc.) conformément aux
règles régissant chaque communauté.
Considérées généralement comme des biens sacrés, ces ressourcés étaient inaliénables.
Ce nouvel ordre juridique foncier qui s’applique aussi bien aux terres rurales qu’aux terrains
urbains, repose d’une part, sur des règles de gestion (Titre 1), d’autre part, sur un cadre
institutionnel et technique (Titre 2) qu’il importe d’examiner.
Cette volonté de maîtrise foncière de l’Etat demeure toujours inchangée en milieu urbain et
s’est traduite par un monopole de l’Administration sur la gestion des terrains urbains.
En effet, cette reconnaissance marque la fin du monopole foncier de l’Etat sur les terres non
immatriculé, c’est-à-dire sur la quasi-totalité des terres rurales.
Il résulte que l’étude des règles de gestion foncière porte d’une part, sur les terres du domaine
rural (Chapitre 1) et d’autre part, sur les terres du domaine urbain (Chapitre 2).
Alors que les premières comportaient un titre foncier définitif et inattaquable, les secondes,
composées de terres coutumières ou de terres concédées provisoirement ne conféraient que
des droits incertains ou précaires.
C’est sur cette base qui vise à terme la sécurité foncière que l’Etat procède à
l’attribution (Section 2), au retrait (Section 3), au contrôle des transactions foncières (Section
4).
Font enfin partie du domaine foncier de l’Etat les terres sans maître (article 6 de la loi du 23
décembre 1998).
Sous l’empire du décret du 15 novembre 1935 portant réglementation des terres domaniales
en Afrique occidentale française, le concept de terre vacante et sans maître avait permis la
mainmise de l’Administration coloniale sur les terres non mises en valeur, suscitant ainsi le
mécontentement des autochtones et en particulier des autorité et propriétaires fonciers
coutumiers.
En ayant recours au concept de terre sans maître, le législateur ivoirien, pour éviter toute
équivoque a pris soin d’en donner la définition.
Ainsi, dans la version non modifiée de la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au
domaine foncier rural, était d’abord considéré comme des “terres sans maître” :
- les terres objet d’une succession ouverte, mais non réclamée depuis plus de trois ans ;
- les terres du domaine coutumier sur lesquelles des droits coutumiers exercés de façon
paisible et continue n’ont pas été constatés dix ans après la publication de la loi n° 98-750 du
23 décembre 1998 ;
- les terres concédées provisoirement sur lesquelles les droits des concessionnaires n’ont pu
être consolidés trois ans après le délai imparti pour la mise en valeur, à compter de cette
publication.
Les délais précités n’ont pu être respectés par les titulaires de droits fonciers concernés. Aussi,
pour éviter que ceux-ci ne soient dépossédés de leurs terres par application de la théorie des
terres sans maître, le législateur a été amené par la loi n° 2013-655 du 13 septembre 2013, à
proroger les délais initiaux par une modification de l’article 6 de la loi n° 98-750 du 23
décembre 1998 relative au domaine foncier rural.
Cette charge en vertu de l’article 6 de la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 précitée, incombe
à l’administration. Celle-ci doit à cet effet, délivrer un acte administratif constatant le défaut
de maître. Cette disposition qui est conforme à l’article 1315 du Code civil, est à l’avantage
des autorités foncières coutumières, car celles-ci ne disposent pas le plus souvent d’un
document attestant de leurs prérogatives foncières.
Cependant, il convient de relever que les terres objet de conflits interminables et considérées
donc comme sans maître, pourront être incorporées au domaine de l’Etat, au même titre que
les terres concédées n’ayant pas été mises en valeur dans le délai imparti.
Si l’on tient compte du nombre important de conflits fonciers non résolus et du manque de
moyens pour la mise en valeur des terres, l’Etat apparaît d’ores et déjà comme le grand
bénéficiaire de l’application du concept de terre sans maître tout comme ce fut le cas de
l’Administration coloniale.
-- Le domaine foncier rural des Collectivités territoriales (districts, régions, communs) est
d’abord composé des terres qui leur sont transférées ou cédées.
En effet, l’Etat peut transférer ou céder à titre gratuit ou onéreux des terres au Collectivités
territoriales. Le transfert ou la cession des terres rurales de l’Etat au profit des Collectivités
territoriales est autorisé par décret pris en Conseil des Ministres soit à l’initiative de l’Etat,
soit à la requête de la Collectivité territoriale concernée.
Les terres transférées ou cédées par l’Etat deviennent la propriété de la Collectivité territoriale
concernée.
-- Le domaine foncier des Collectivités territoriales comprend également les terres acquises.
Les terres acquises le sont à titre gratuit (dons, legs, prescription, saisie, etc.) ou à titre
onéreux (achat, échange, etc.).
Dans certains cas (achat, échange, donation ou legs), l’acquisition est décidée par une
délibération du Conseil et transmise à l’Autorité de tutelle. Dans d’autres (expropriation), la
décision est prise par délibération du Conseil dans les conditions fixées par décret pris en
Conseil des Ministres.
-- Font enfin partie du domaine foncier des Collectivités territoriales les terres déclarées
d’intérêt local par décret pris en Conseil des Ministres.
Les terres rurales ci-dessus énumérées font partie du domaine privé de la Collectivité
territoriale. Elles doivent, conformément, à la réglementation foncière être immatriculées à
leur nom. En conséquence, elles peuvent être gérées dans les mêmes conditions que les terres
rurales de l’Etat (location, concession, bail emphytéotique, etc.).
Tout comme les Collectivités territoriales, les Établissements publics sont admis
conformément à l’article 1er de la loi du 23 décembre 1998 à être propriétaire de terres rurales
dans les conditions fixées par la réglementation foncière en vigueur.
En tout état de cause, ces terres sont de très faible importance en raison essentiellement du
manque d’effectivité de la procédure d’immatriculation.
En effet, en raison de sa complexité et de son caractère onéreux, cette procédure, qui devait
consolider la propriété individuelle des terres, n’a pas connu auprès des populations le succès
escompté, après un siècle de mise en œuvre.
Ce qui explique que seulement 2 % environ des terres aient été immatriculées jusqu’à ce jour.
Aux terres immatriculées, s’ajoutent celles que les particuliers ont pu acquérir sous le régime
du Code civil. En effet, sous ce régime introduit en Côte d'Ivoire par l’arrêté Binger du 10
septembre 1893, l’Administration coloniale avait octroyé de vastes portions de terres
domaniales aux personnes physiques et morales capables de les mettre en valeur.
Mais les droits résultant de ces concessions n’ont pu se maintenir que s’ils ont été publiés au
livre foncier.
Pour le législateur ivoirien, le domaine Coutumier est constitué par l’ensemble des terres sur
lesquelles s’exercent des droites foncières conformes aux modes traditionnels de gestion de la
terre. Sont également visés, les « droits coutumiers cédés aux tiers », c’est-à-dire les terres qui
au mépris des procédures domaniales et foncières ont fait l’objet de transactions coutumières
(vente, location, donation, etc.).
Peu importe que les droits cédés soient antérieurs ou postérieurs à la réforme foncière de
1998.
Faute d’immatriculation au nom d’un ayant-droit, les terres du domaine coutumier conservent
leur statut transitoire. Il en va de même des terres du domaine concédé.
Il Comprend, les terres attribuées provisoirement aux personnes physiques et morales avant la
réforme foncière du 23 décembre 1998. II en est ainsi des terres attribuées sous le régime du
permis d’occuper ou des concessions (concession provisoire pure et simple, concession
provisoire sous réserve des droits des tiers, bail emphytéotique).
Les bénéficiaires de ces concessions provisoires disposent d’un délai de 5 ans à compter de la
date de publication de la loi n° 2013-655 du 13 septembre 201, pour demander
l’immatriculation de leurs terres. Cette immatriculation est d’abord faite au nom de l’Etat qui
peut ensuite céder la parcelle de terre concernée a l’ancien concessionnaire si celui-ci a
qualité à être propriétaire foncier. Dans le cas contraire, une location peut être consentie par
l’Etat à celui-ci.
Exception faite des terres appartenant déjà aux particuliers, les terres du domaine foncier
permanent ou du domaine foncier transitoire peuvent faire l’objet d’attribution, conformément
à la réglementation en vigueur.
Les modes d’attribution des terres rurales se différencient les uns des autres, selon que l’on se
situe soit dans la période antérieure à la réforme foncière du 23 décembre 1998 (A), soit dans
celle postérieure à ladite réforme (B).
Avant la réforme foncière du 23 décembre 1998, les modes d’attribution des terres étaient
essentiellement le permis d’occuper, les concessions et le bail emphytéotique.
1- Le permis d’occuper
Régi essentiellement par le défunt décret n° 71-74 du 16 février 1971, le permis d’occuper
était une autorisation d’occupation délivrée à titre précaire par le préfet ou le sous-préfet. Ce
texte disposait en son article 1 que : « toute occupation de terrain pour être légale doit être
justifiée, pour les terrains ruraux...par une autorisation d’occupation à titre précaire et
révocable délivrée par le Ministre de l’intérieur ou son représentant... ».
Aujourd’hui encore, plusieurs terrains ruraux sont détenus sur la base du permis d’occuper.
Mais leur titulaire tout comme les titulaires de concessions provisoires sous réserve des droits
des tiers, sont tenus de demander l’immatriculation de leurs terres, dans le délai de 5 ans à
compter de la publication de la loi n° 2013-655 du 13 septembre 2013 précitée, au risque de
perdre leurs prérogatives foncières au profit de l’Etat, en vertu de la théorie des terres sans
maître.
Ces deux types de concessions se différencient par le fait que contrairement à la concession
provisoire sous réserve des droits des tiers la concession provisoire pure et simple n’était
accordée que sur un terrain immatriculé ; elle était de ce fait publiée au livre foncier.
Plus d’une décennie après la réforme foncière du 23 décembre 1998, de nombreuses terres
demeurent encore sous le régime de la concession provisoire et font partie du domaine foncier
transitoire.
Pour remédier à cette situation, la réforme foncière oblige les titulaires de concessions
provisoires à immatriculer, dans le délai de 5 ans, leurs terrains, sous peine de les perdre en
application de la théorie des terres sans maître.
3- La concession définitive
La concession définitive réalisait la cession par l’Etat d’un terrain à un particulier ou à une
collectivité.
Elle avait lieu sous la condition résolutoire du paiement par le concessionnaire définitif, au
plus tard le mois qui suit la notification de l’arrêté, du prix de cession (50 000 F CFA par
hectare), des frais d’inscription au livre foncier et des frais d’enregistrement et de timbre.
La concession était accordée si au moins les 2/3 du terrain étaient mise en valeur et après
création du titre foncier. Mais pour limiter les accaparements et le gel stérile des terres, la
concession définitive a été limitée à une superficie de 12 hectares suite à une délibération de
l’Assemblée territoriale du 27 novembre 1948. S’il y a un surplus de superficie, celui-ci était
donné en bail emphytéotique.
4- Le bail emphytéotique
Le bail emphytéotique été institué à l’origine pour mettre fin à l’exploitation anarchique des
terres et à la spéculation foncière consécutive à la faculté d’obtention de la concession
définitive par les sociétés étrangères. C’est un bail qui est accordé par le Ministres chargé de
l’Agriculture pour une durée qui varie de 18 à 99 ans. Mais en pratique, la durée du bail est de
25 ans renouvelables.
Avant la réforme du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural, l’attribution des
terres se réalise désormais à travers le certificat foncier (1), la concession de la propriété (2)
par obtention du titre foncier et le bail emphytéotique (3).
1- Le certificat foncier
Aux termes de la loi du 23 décembre 1998 (Art. 8) l’obtention du certificat foncier est
subordonnée au constat d’existence paisible et continue de droits coutumiers. Ce constat est
établi à l’issue d’enquêtes officielles réalisées conformément à la procédure définie par le
décret n° 99-595 du 13 octobre 1999.
On note ici qu’il y a recours non à un géomètre expert, mais plutôt à un opérateur technique
inscrit sur une liste d’agrément arrêtée par le Ministère chargé de l’agriculture. Cette mesure
vise à réduit les coûts de délimitation du terrain.
Mais cette disposition se concilie difficilement avec la loi n° 70-487 du 03 août 1970
instituant l’ordre des géomètres experts.
D’après cette loi, les géomètres experts sont seuls habilités à établir les documents
topographiques en matière de délimitation et d’établissement de plans parcelles de terres
rurales.
La publicité est réalisée par le commissaire enquêteur dans les villages concernés, sous
l’autorité des comités villageois de gestion foncière rurale.
Passé, ce délai, les résultats de l’enquête peuvent être utilisés par tout ayant droit déterminé
par l’enquête.
Après validation de l’enquête, le certificat foncier est signé et publié au journal officiel par le
préfet de département.
À compter de la signature du certificat par le préfet, le titulaire dudit certificat dispose d’un
délai de trois (3) ans pour requérir l’immatriculation du bien foncier concerne.
Cette concession a lieu pour les titulaires de certificats fonciers qui ont fait immatriculer leur
terrain à leur nom. Elle a lieu également pour les occupants des terres antérieurement
attribuées ou concédées à titre provisoire dans les conditions indiquées par la réglementation
en vigueur.
Alors que les terres du domaine coutumier sont immatriculées directement au nom du
demandeur, le bien foncier concédé est d’abord immatriculé au nom de l’Etat (Art. 11 D. n°
99-595 du 13 octobre 1999) qui le rétrocède à l’ancien concessionnaire, soit en pleine
propriété, soit sous forme de location ou de bail emphytéotique.
Il résulte de ce qui précède que les modes d’attribution des terres rurales ont évolué dans le
temps. Cette évolution est l’expression des efforts d’adaptation réalisés par l’Administration,
efforts que l’on observe également dans la définition des critères d’attribution des terres
rurales.
L’attribution des terres du domaine coutumier se fait selon deux critères essentiels définis par
la réforme foncière du 23 décembre 1998. Le premier critère a trait au constat d’existence
paisible et continue de droits coutumiers (1). Quant au second, il se rapporte à la nationalité
du demandeur : c’est le critère personnel (2).
Pour les terres du domaine rural coutumier, le constat d’existence continue et paisible de
droits fonciers constitue le critère essentiel d’attribution du certificat foncier. Ce constat
résulte de l’enquête foncière prévue par le décret n° 99-594 du 13 octobre 1999 fixant les
modalités d’application au domaine foncier rural coutumier de la loi n° 98-750 du 23,
décembre 1998.
Mais ce constat d’existence paisible et continue de droits fonciers suffit-il pour se voir
attribuer la propriété d’un terrain du domaine coutumier ? À cette question, il y a lieu de
répondre par la négative. Car en plus du constat d’existence paisible et continue de droits
fonciers, il faut aussi satisfaire à un critère lié à la personne du demandeur.
2- Le critère personnel
Aux termes de l’article premier de la réforme foncière du 23 décembre 1998, seuls l’Etat, les
collectivités publiques et les personnes physiques ivoiriennes sont admises à être
propriétaires.
Il en résulte que d’une part, les personnes physiques non-ivoiriennes, d’autre part, les
personnes morales, quelle que soit leur nationalité, ne peuvent requérir en leur nom
l’immatriculation d’un terrain du domaine coutumier.
Si ces dispositions d’une importance capitale se justifient par la volonté de l’Etat de mettre un
terme, à la mainmise croissante des non-nationaux sur les terres et à réserver corrélativement
aux nationaux la maîtrise du patrimoine foncier ivoirien, elles posent nécessairement le
problème des droits acquis des personnes physiques non-ivoiriennes et des personnes morales
visées.
En ce qui concerne les personnes physiques non-ivoiriennes, la loi foncière de 1998, dans la
formulation initiale de son article 26, disposait que les droits fonciers que celles-ci avait déjà
pu acquérir étaient maintenus à titre personnel.
Autrement dit, les droits cessaient avec le décès de leur titulaire. Cependant, la loi foncière
dans sa première formulation opérait une discrimination qui permettait aux héritiers de
nationalité ivoirienne de demander l’immatriculation à leur nom.
Dans le cas où ceux-ci n’étaient pas ivoiriens, ils disposaient alors d’un délai de trois ans pour
céder les terres à une personne physique ivoirienne, ou pour requérir à leur profit une location,
après retour des terres concernées au domaine de l’Etat.
De toute évidence, cette disposition de l’article 26 n’est guère en harmonie avec la théorie des
droits acquis. Aussi avait-elle fait l’objet de critiques virulentes à telle enseigne que suite aux
accords de Linas Marcoussis (en France), consécutifs à la crise sociopolitique de 2002, elle a
été modifiée par le législateur ivoirien à travers la loi n° 2004-412 du 4 août 2004.
Cette modification qui a pris forme à travers l’article 26 nouveau de la loi du 23 décembre
1998, indique clairement que les droits de propriétés foncières que les personnes physiques
non-ivoiriennes ont pu déjà acquérir sont maintenus. Autrement dit, ces droits fonciers n’ont
plus un caractère personnel et peuvent être transmis aux héritiers, quelle que soit leur
nationalité.
La récente Constitution du 8 novembre 2016 va plus loin dans la protection des droits acquis.
En vertu de l’article 12 alinéa 1er de la loi fondamentale, « les droit acquis sont garantis ».
Mais en ce qu’elle ne précise pas la nature juridique de ces droits, cette disposition de la loi
fondamentale semble équivoque.
Au regard des enjeux en matière foncière, une clarification de la nature juridique des droits
acquis, objet de cette garantie, aurai été utile. Car si le droit de propriété acquis ne concerne
qu’une minorité de personnes (quelques centaines).
Le droit d’usage acquis pourrait renvoyer à la grande majorité des acteurs du monde rural qui
ont mis les terres en valeur sans disposer d’un titre de propriété.
En ne précisant pas que les droits acquis concernés sont les droits de propriété foncière, la loi
fondamentale ne fait qu’ajouter la fumée au brouillard dans une matière foncière
suffisamment complexe et sujette à conflits récurrents plus ou moins graves.
En ce qui concerne les personnes morales maintenues dans leur droit de propriété en vertu de
la règle des droits acquis, elles ne peuvent céder leurs droits à un cessionnaire qui n’a pas
accès à la propriété foncière qu’à la condition de déclarer le retour de leurs terres au domaine
de l’Etat.
Dans une telle hypothèse, le concessionnaire désigné peut bénéficier d’un bail emphytéotique
ou d’une location de la part de l’Etat.
Si les personnes physiques non-ivoiriennes et les personnes morales n’ont pas accès à la
propriété foncière, rien n’interdit qu’elles puissent obtenir un certificat foncier.
Il suffit pour cela qu’elles puissent justifier de l’existence paisible et continue de droit sur le
domaine coutumier. Mais le certificat foncier qui leur est délivré dans ces conditions ne peut
en aucun cas leur ouvrir la voie à la propriété foncière ; tout au plus, peut-il, après
immatriculation du terrain au nom de l’Etat, leur permettre de bénéficier d’une location ou
d’un bail emphytéotique.
Cette procédure demeure encore valable pour les titulaires de concessions provisoires, à
travers la consolidation de leurs droits, conformément au décret n° 99-595 du 13 octobre 1999
fixant la procédure de consolidation des droits des concessionnaires provisoires de terres du
domaine foncier rural.
Mais, depuis la réforme foncière du 23 décembre 1998, le constat de mise en valeur ne suffit
plus pour obtenir la pleine propriété du foncier concédé. Il faut en plus que l’ancien
concessionnaire soit une personne physique ivoirienne. Au critère de la mise en valeur,
s’ajoute donc, comme cela a été précédemment indiqué, le critère personnel de la nationalité.
L’attribution d’une terre rurale à une personne déterminée crée au profit de celle-ci des droits
fonciers. Mais ces droits ne mettent pas leurs titulaires à l’abri d’un retrait des terres à eux
attribuées.
C’est une opération de puissance publique par laquelle l’Administration procède à l’encontre
des particuliers à l’acquisition forcée et moyennant une indemnité juste et préalable, des
immeubles, terrains et bâtiments nécessaires à l’usage du public ou au fonctionnement du
service public. Cette procédure, qui est réglementée par le décret du 26 décembre 1930, est à
la fois administrative et judiciaire.
Passe le délai ci-dessus, la parcelle concernée peut être immatriculée au nom de l’Etat sans
qu’il ne faille recourir à une quelconque procédure d’expropriation.
Ce faisant, l’Etat retire ou prend possession d’une parcelle déjà attribuée à un particulier
n’ayant pu immatriculer son bien foncier dans le délai imparti.
Un dernier recours est accordé au titulaire du certificat foncier : celui-ci dispose en effet d’un
délai de trois (3) mois, à compter de la notification à lui faite de la procédure, pour requérir le
transfert à son nom de l’immatriculation, moyennant le remboursement des frais exposés par
l’Etat.
En pareille hypothèse, le titulaire qui n’est pas admis à être propriétaire, peut bénéficier d’un
contrat de location.
Ces contrats comportent obligatoirement des clauses de mise en valeur dont le non-respect
peut être sanctionné par la résiliation.
Ce qui entraîne naturellement le retrait de la parcelle de terre au profit de l’Etat. Dans ce cas,
les impenses réalisées par le locataire sont cédées par l’Etat à un nouveau locataire
sélectionné par vente des impenses aux enchères. À défaut d’une résiliation de la location, la
parcelle louée peut être ramenée à la superficie effectivement mise en valeur.
Outre les locations de courte durée, les baux emphytéotiques consentis par l’Etat peuvent
également être résiliés soit en cas d’abandon de mise en valeur pendant plus de dix (10) ans,
soit en cas de non-paiement des redevances par l’emphytéote pendant deux années
consécutives. Dans les deux cas, le bien foncier objet du bail est retiré à l’emphytéote
défaillant.
Les bénéficiaires de ces concessions provisoires disposent aujourd’hui d’un délai de cinq (5)
ans à compter de la date de publication de la loi du 13 septembre 2013 pour consolider leurs
droits. Cette disposition concerne aussi bien les bénéficiaires de concession provisoire pure et
simple que les bénéficiaires de concessions provisoires sous réserve des droits des tiers.
Ceux-ci sont tenus avant l’immatriculation de leur terre de satisfaire à l’obligation de mise en
valeur.
En l’absence de mise en valeur, les terres concernées sont considérées comme des terres sans
maître ; ce qui entraîne leur retour au domaine foncier de l’Etat.
De ce point de vue, la théorie des terres sans maître apparaît comme une épée de Damoclès
pour les concessionnaires provisoires dont les droits fonciers ne sont pas encore consolidés,
conformément à la réglementation foncière.
À travers, plusieurs mécanismes, l’Etat s’est aussi assigné un rôle de contrôle de l’accès à la
terre.
Cette situation qui est source d’incertitudes et d’interminables conflits fonciers a amené l’Etat
à interdire les actes sous seing privé à travers le décret du 16 février 1964 et à imposer la
forme notariée pour ces transactions. Cette interdiction sera renforcée par la loi des finances
du 20 mars 1970 laquelle prescrit la nullité absolue des transactions foncières effectuées hors
de l’intervention d’un notaire.
En fait, cette survivance des actes sous seing privé ne devrait guère surprendre.
D’abord, les pénalités prévues sont dérisoires et donc non dissuasives. Ensuite, la
jurisprudence considère que seules les transactions portant sur les terres appropriées
conformément à la réglementation en vigueur, doivent être passées par devant notaire ; ce qui
exclut les conventions foncières coutumières.
Enfin, bien que les cessions découlant de ces actes sous seing privé aient été effectuées en
marge des procédures domaniales et foncières, la jurisprudence reconnaît les droits fonciers
des cessionnaires. Ce qui pose le problème de l’opportunité des dites procédures.
L’étude des règles de gestion du domaine foncier rural a mis en évidence le fossé entre le
droit et la réalité. En effet, les pratiques foncières coutumières constituent un défi pour
l’Administration domaniale dans sa mission de gestion du domaine foncier rural. La situation
ne semble pas différente en matière de gestion du foncier urbain.
Ainsi, font partie du domaine public, les éléments énumérés dans le texte (A). Il s’agit d’une
simplification considérable par rapport aux controverses doctrinales et jurisprudentielles du
19 ème siècle en France.
À la fin du texte, il a été ajouté une définition synthétique prévue pour le cas où des omissions
se seraient glissées dans l’énumération (B).
Ce décret du 20 juillet 1900 spécial à la Côte d'Ivoire a été remplacé par un décret du 23
octobre 1904 applicable à l’ensemble de l’ex-AOF puis par celui du 29 septembre 1928
encore applicable en Côte d’Ivoire.
Contrairement à certains Etats issus du bloc AOF comme le Sénégal et le Bénin qui ont
adopté une nouvelle réglementation relative au domaine public, la Côte d’Ivoire n’innove pas.
Elle reproduit la réglementation coloniale issue du décret du 29 septembre 1928, laquelle fait
une distinction entre le domaine public naturel (1) et le domaine public artificiel (2).
Il s’agit du rivage de la mer jusqu’à la limite des plus hautes marées ainsi qu’une zone de 100
mètres mesurée à partir de cette limite. Tel qu’identifié, le domaine public maritime pose le
problème de sa consistance et de sa délimitation.
En l’absence d’une jurisprudence bien établie en Côte d’Ivoire, la délimitation du domaine
public maritime naturel est réalisée conformément à une circulaire du 17 septembre 1942
fixant les règles générales.
La procédure de délimitation s’ouvre avec l’arrêté du Ministre en charge des travaux publics
(actuellement, le Ministère des infrastructures Économiques) qui désigne une commission de
délimitation comprenant des agents de l’administration et des techniciens (géomètre du
service topographique).
En cas d’annulation de l’acte, le propriétaire lésé retrouve son bien et peut même obtenir une
indemnisation.
Lorsque la délimitation est régulière, il n’y pas lieu d’accorder une indemnité aux
propriétaires dont la maison ou la propriété est restée dans les limites du domaine public.
Ce domaine comprend :
- les cours d’eau navigables ou flottables dans les limites déterminées par la hauteur des eaux
coulant à plein bord avant de déborder ainsi qu’une zone de passage de vingt-cinq (25) mètres
de large à partir de ces limites sur chaque rive et sur chacun des bords avant des îles ;
- les sources et cours d’eau non-navigables ni flottables dans les limites déterminées par la
hauteur des eaux coulant à plein bord avant de déborder ;
- les lacs, étangs et lagunes dans les limites déterminées par le niveau des plus hautes eaux
avant le débordement avec une zone de vingt-cinq (25) mètres de large à partir de ces limites
sur chaque rive extérieures et sur chacun des bords des îles ;
- les nappes aquifères souterraines, quelle que soient leur provenance, leur nature et leur
profondeur.
Ainsi sont considérés comme dépendances des voies publiques, les nombreux éléments
compris dans l’emprise des routes comme par exemple, les caniveaux, les accotements, les
panneaux de signalisation, les trottoirs, etc.
B- La définition synthétique
Aux biens énumérés comme faisant partie du domaine public, l’article premier du décret de
1928 ajoute les biens de toute nature que le Code civil et les lois françaises déclarent non-
susceptibles de propriété privée.
Mais que recouvre cette notion de biens insusceptibles de propriété privée ? Au-delà des
controverses que cette question peut susciter, il faut simplement préciser que la définition
synthétique vient rappeler que l’énumération n’est pas exhaustive. Avec cette approche, le
législateur a la possibilité tout comme la jurisprudence, d’allonger la liste et d’élargir le
champ des biens du domaine public en tenant compte des besoins de l’Etat et des collectivités
territoriales.
C’est chose faite par exempte avec la loi n° 2002-102 du 11 février 2002 relative à la création,
à la gestion et au financement des parcs nationaux et des réserves naturelles.
En son art. 7, la loi précise que “les réserves naturelles intégrales et les parcs nationaux font
partie du domaine public inaliénable de l’Etat”.
L’alinéa 3 dispose que “le domaine public des réserves naturelles intégrales et des parcs
nationaux comprend, selon le cas indistinctement le domaine public terrestre, maritime,
lagunaire, fluvial ou aérien”.
Comme on le constate, l’objectif de la loi est la volonté de l’Etat de conférer aux biens
fonciers des parcs nationaux et réserves naturelles, la domanialité publique afin d’assurer leur
gestion durable.
En milieu urbain, plus qu’en zone rurale, la gestion du domaine public fait intervenir plusieurs
acteurs (Etat et collectivités territoriales) qui entretiennent des relations de complémentarité.
Les textes, ci-dessus fixent les règles actuelles de répartition des biens entre l’Etat et les
collectivités territoriales (A). Mais au-delà, il faut un mécanisme d’actualisation régulière du
fichier des biens des deux entités afin d’éviter les conflits de compétence (B).
475. II résulte de l’art. 91 de la loi du 13 décembre susvisée que le domaine public des
collectivités territoriales comprend :
1) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et qui ont reçu, de droit ou de
fait, une affectation comme rues, routes, places et jardins publics.
En sont exclus, les ouvrages ci-dessus énumérés dont la création et l’entretien incombent à
l’Etat ou à une autre collectivité territoriale ;
2) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et qui supportent des ouvrages
d’intérêt public chaque fois que la charge incombe à la collectivité territoriale ;
3) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et constituant l’assiette d’un
ouvrage prévu aux plans d’aménagement ou d’urbanisme régulièrement approuvés ou ayant
fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique
4) tous les autres biens compris dans le domaine public lorsqu’ils ont été transférés à la
collectivité territoriale conformément aux dispositions légales et règlementaires relatives au
domaine public.
De ce qui précède, il faut retenir que le critère géographique prit isolement semble inopérant
pour déterminer le lien de rattachement du bien à l’Etat ou à la collectivité, car un bien public
situé sur le territoire d’une collectivité territoriale donnée peut appartenir à une autre
collectivité ou à l’Etat dès lors que sa création ou son entretien incombe à ce dernier.
Dans la pratique, la distinction entre le domaine public de l’Etat et celui des collectivités
territoriales dans l’espace urbain, n’est pas toujours précise. Aussi, importe-t-il que les
collectivités territoriales et l’Etat unissent leurs efforts afin que leur domaine public respectif
soit précisément inventorié pour une gestion plus efficace.
Le décret n° 84-852 du 4 juillet 1984 portant déclaration des voiries et des réseaux divers
d’intérêt national et d’intérêt départemental dans les limites des communes autres que celles
composant la ville d’Abidjan permet pour les vingt-sept (27) communes citées, de préciser le
statut du domaine public de chaque collectivité par rapport à l’Etat. C’est une avancée
significative mais insuffisante dans la mesure où ce texte ne prend en compte que la voirie et
les réseaux divers.
Aujourd’hui, la Côte d'Ivoire compte cent quatre-vingt- dix-sept (197) communes, quatorze
(14) districts, trente et une (31) régions et cinq cent neuf (509) sous-préfectures.
C’est le lieu de relever que la loi déterminant les limites de chaque commune ou collectivité
devrait également inventorier les biens publics de chaque entité afin que leurs gestionnaires
aient une idée précise de l’assiette des domaines tant publics que privés. C’est un gage de
bonne gouvernance.
L’inventaire permettrait à chaque acteur — Etat, collectivités territoriales et usagers —
d’affirmer et d’exercer ses droits dans le respect des textes.
Par ailleurs, dans le cadre de la politique de décentralisation qui emporte gestion des entités
territoriales par des élus locaux, les populations apprécieraient à la juste valeur l’idée d’avoir
un seul interlocuteur quant aux actes portant sur un bien public en milieu urbain.
La protection du domaine public (B) sera analysée après avoir étudié l’utilisation de celui-ci
(A).
Dans le premier cas, il s’agit du domaine public affecté au service public (1), contrairement à
celui qui est utilisé par les administrés (2).
Lorsque la personne publique utilise elle-même son domaine a priori cela ne pose pas de
problèmes particuliers. Cependant, l’administration propriétaire ne doit pas en principe
détourner le bien public de son affectation.
Le concessionnaire peut également consentir des occupations du domaine public à des tiers et
percevoir des redevances.
Le domaine publie portuaire en est une parfaite illustrations. Ainsi, dans l’affaire qui a opposé
le PAA et la société E.A, la chambre administrative de la Cour Suprême dans l’arrêt n° 81
du 28 juillet 2010 a jugé que les actes par lesquels le PAA donne et retire une autorisation
d’occuper un bien immobilier du domaine public sont des actes administratifs par
détermination de la loi, que le contentieux qui en résulte relève de la chambre administrative
de la Cour Suprême suivant la procédure du recours excès de pouvoir ; dès lors, le juge des
référés et la Cour d’Appel sont incompétents pour en connaître.
Cette décision est riche d’enseignement. Au-delà de la concession du domaine public, les
juges précisent clairement que les actes pris en exécution de la convention par le
concessionnaire sont des actes administratifs par détermination de la loi.
Dans les agglomérations, et même en dehors, certains biens sont directement affectés à
l’usage des administrés. La voie publique et le rivage de la mer pour ne citer que ces biens
sont des dépendances du domaine publiques plus utilisés en Côte d’Ivoire.
L’utilisation commune de ces biens est en principe libre, gratuite et égale pour tous.
La liberté d’utilisation
En principe, toute personne peut accéder librement au domaine public sans avoir besoin d’une
autorisation et sans limitation. C’est l’expression de la liberté d’aller et venir garantie par la
Constitution ivoirienne.
Cependant — c’est l’exception — cette liberté d’utilisation du domaine public ne fait pas
obstacle à la mise en place d’une règlementation. Ainsi, les mesures des autorités municipales
interdisant le stationnement des véhicules automobiles sur certains emplacements ou à
certains endroits sont compatibles avec la liberté d’utilisation du domaine.
L’utilisation du rivage de la mer des plans d’eau lagunaires et fluviaux constituant des
dépendances du domaine public, respecte le même principe de liberté. En effet, tout le monde
a le droit de circuler, de stationner et de se reposer sur le rivage de la mer.
Ce libre accès se trouve néanmoins contrarié dans son exercice par des personnes ou parfois
des communautés riveraines qui apposent des panneaux indiquant le caractère privé de la
plage. En dehors de tout acte de concession ou autorisation administrative, les auteurs de ces
indications, violent les libertés publiques.
Sur les plans d’eau lagunaire et fluviaux, la navigation est libre de sorte que l’administration
ne peut instituer un monopole au profit d’un concessionnaire chargé de l’exploitation des
transports lagunaires au détriment de transporteurs privés n’ayant pas de lien de droit avec
l’Etat ou la collectivité territoriale.
Toutefois, l’administration chargée de la gestion du domaine public lagunaire peut
subordonner la circulation des embarcations par la possession de document ou aménagement
spécial pour assurer la sécurité des usagers utilisant ce mode de transport.
La gratuité de l’utilisation
Le principe de gratuité est la contrepartie nécessaire de son usage collectif. Les particuliers
ont le droit de jouir du domaine public — jouir gratuitement — suivant les conditions
spéciales à chaque nature de biens.
Ainsi, en s’appuyant sur cet arrêté, les péages institués sur l’autoroute du Nord et le pont
HKB se justifient par leur utilité, le coût élevé des ouvrages et le mode de gestion utilisé. En
plus du péage, l’Etat peut instituer une taxe à l’essieu pour les véhicules routiers de fort
tonnage afin de compenser les dépenses élevées d’entretien et de renforcement de la voirie
occasionnées par la circulation de ces véhicules.
C’est l’une des manifestations du principe d’égalité des citoyens devant la loi ou les charges
publiques. Les personnes utilisant une même dépendance du domaine public sont traitées sur
un pied d’égalité. Elles ont les mêmes droits.
Ainsi, l’égal traitement des citoyens dans l’utilisation du domaine public commande que les
autorisations de manifester sur la voie ou place publique ne peuvent être délivrées à certaines
associations ou groupements politiques et refusées à d’autres.
Toutefois, pour des raisons de sécurité publique voire de prévention des troubles à l’ordre
public, des discriminations peuvent être instituées entre les manifestants.
Ainsi, le principe d’égalité comporte des exceptions qui visent les usagers dont la situation
n’est pas identique ou lorsqu’un intérêt général le justifie.
C’est dans ce cadre que dans l’agglomération d’Abidjan, des couloirs sont spécialement
réservés aux autobus et aux véhicules des services d’urgence.
Par occupation privative, il faut entendre l’occupation par une personne physique ou morale
d’un terrain faisant partie du domaine public, d’une dépendance de la voirie de sorte que cette
utilisation, empêche au même moment, l’usage de ladite parcelle, à toute autre personne,
rompant ainsi la liberté et l’égalité de tous les citoyens dans l’utilisation du domaine public.
Cette occupation personnelle est soumise à autorisation. Elle est précaire et constitue une
source de revenus pour les Collectivités.
De ce texte, deux grandes formes d’occupation sont envisagées, celle issue d’un acte
unilatéral ou permission de voirie ou celle résultant d’une convention ou concession de voirie.
L’une et l’autre forme obéissent au même principe de précarité qui caractérise l’utilisation
privative du domaine public. En Côte d'Ivoire, les deux formes sont connues avec une
prédominance de la permission de voirie.
Si une route est obstruée ou une dépendance de la voirie est occupée irrégulièrement par des
constructions, il n’est pas possible d’attendre la fin du procès pour rétablir la circulation ou
l’ordre public qui est troublée.
Pour ce faire, le législateur a prévu une protection pénale du domaine public (1) à laquelle
s’ajoute une protection civile (2).
L’art. 8 du décret du 29 septembre 1928 dispose que les infractions à la règlementation sur le
domaine public “sont déférées aux tribunaux de simple police et passibles de peines de 1 à
500 frs d’amende”.
Dès lors, une distinction doit être faite entre la protection contre les dégradations (a) et celle
mise en œuvre contre les occupations sans titre(b).
En Côte d’Ivoire, il y a une seule catégorie qui se résume aux contraventions de voirie pour
toutes les atteintes portées au domaine public.
En cas de contravention de voirie, s’applique l’art. 8 du décret de 1928 qui prévoit une
amende ou lorsqu’il y a récidive dans les douze mois ou non-exécution des travaux prescrits
dans le laps de temps déterminé par le tribunal, l’amende peut être triplée et le contrevenant
peut encourir une peine d’emprisonnement, sans préjudice de la réparation des dommages
causés.
En tout état de cause, le contrevenant doit être condamné à la remise en l’état du bien
domanial, c’est l’action domaniale qui rattache au contentieux de la répression, la réparation
civile.
Le décret précité prévoit également que les travaux prescrits pour la remise en état du
domaine public peuvent être exécutés par l’administration aux frais du contrevenant.
Sont également des contraventions de voirie, toutes les occupations du domaine public sans
titre.
Est occupant sans titre, celui qui n’a jamais bénéficié d’une autorisation quelconque, ou
encore celui dont l’occupation donne lieu à un titre qui a expiré ou que le titre lui a été retiré.
L’occupation sans titre constitue donc une situation illégale et illicite à laquelle il doit être mis
fin.
- lorsque l’autorité ne dispose d’aucune voie pénale, administrative ou civile pour obtenir la
libération du domaine public ;
En dehors de ces cas, si la personne publique procède à une expulsion sans recours au juge,
elle commet une voie de fait qui engage sa responsabilité.
Celle-ci résulte de deux principes dégagés par les textes et la jurisprudence, ce sont
l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité du domaine public.
Une personne privée peut disposer, dans le respect de la loi, comme elle le veut de la propriété
de ses biens qui peuvent être aliénés. Il n’en va pas de même quant aux biens relevant du
domaine public.
En France, le Code général de la propriété des personnes publiques dispose que « les biens
des personnes publiques (...) qui relèvent du domaine public sont inaliénables et
imprescriptibles ».
En Côte d’Ivoire, le caractère inaliénable du domaine public se déduit de sa définition
synthétique donnée par le dernier alinéa de l’article premier du décret du 29 septembre 1928
qui classe dans le domaine public, les biens de toute nature que le Code civil et les lois
françaises déclarent non-susceptibles de propriété privée. Un bien insusceptible de propriété
privée est un bien inaliénable.
Plus récemment, la loi n° 84-1244 du 8 novembre 1984 portant régime domanial des
communes et de la ville d’Abidjan, précisera que “le domaine public de la commune ou de
la ville d’Abidjan est inaliénable et imprescriptible“.
Ce principe protège l’autorité administrative contre elle-même et contre les agissements des
particuliers. En effet, les actes de cession qui auraient été établis par l’administration sont
nuls, de même sont nulles de nullité absolue, les ventes conclues par erreur ou par fraude
entre particuliers et portant sur un bien du domaine public.
Selon l’art. 2262 du Code civil, un occupant même de mauvaise foi, devient propriétaire après
un délai de trente (30) ans.
Ainsi, selon le texte susvisé “le domaine privé des collectivités territoriales comprend les
biens meubles et immeubles n’ayant pas le caractère public et lui ayant été affectés“.
L’art. 93 précise que “les domaines public et privés de la collectivité territoriale sont soumis
au même régime juridique que le domaine de l’Etat. Ainsi, au contraire du domaine public,
le domaine privé de l’entité décentralisée peut être, aliéné, cédé et prescrit”.
Dans les agglomérations, chaque collectivité territoriale dispose d’un domaine qu’elle se
constitue conformément aux dispositions des lois et règlements en vigueur en la matière,
notamment les articles 202 à 205 de la loi n° 2003-489 du 26 décembre 2003 portant régime
financier, fiscal et domanial des collectivités territoriales.
Quels sont les modes de constitution de ce domaine privé (paragraphe 1) et comment les
entités décentralisées gèrent ledit domaine ? (paragraphe 2)
Ils peuvent soit s’engager dans la voie contractuelle (A), soit utiliser les modes exceptionnels
liés à leurs prérogatives de puissance publique (B).
En milieu urbain, l’Etat et les entités décentralisées peuvent devenir propriétaires d’immeuble
comme de simples particuliers par achats, échanges, donations ou legs.
Avec la communalisation, l’Etat se désengage de la gestion foncière au profit des collectivités
territoriales. Dans ce cadre, la loi autorise le transfert de certains biens immobiliers de l’Etat à
la commune (1), ce qui n’exclut pas que la collectivité territoriale acquiert elle-même des
terres (2).
Selon l’art. 204 de la loi susvisée, le domaine privé de la commune est constitué par transfert
ou cession des biens du domaine l’Etat, d’une autre collectivité territoriale, à titre onéreux ou
gratuit.
La cession ou le transfert des biens de l’Etat est autorisé par décret pris en Conseil des
ministres, soit à la requête de la collectivité territoriale, soit à l’initiative de l’Etat.
Les biens acquis dans ces conditions deviennent la propriété de la collectivité territoriale qui
en assure la gestion ou l’administration conformément aux lois et règlements en vigueur. Le
transfert est réalisé au moment de la création de l’entité décentralisée ou après.
Cependant, à défaut de Plan d’Urbanisme Directeur pour chaque ville ou commune de Côte
d’Ivoire, les gestionnaires des cités sont toujours confrontés à ces difficultés liées à
l’impossibilité de connaître la consistance de leur patrimoine privé.
Cette affaire met en exergue, les difficultés rencontrées dans la gestion des terrains urbains.
L’acquisition d’un bien par une collectivité territoriale est décidée par une délibération du
Conseil et transmise à l’autorité de tutelle. Selon l’al. 2 de l’art. 218 de la loi n° 2003-489 du
26 décembre 2003, cette acquisition est conclue par le Maire, le Président du conseil ou le
Gouverneur.
Les biens obtenus dans ces conditions entrent définitivement dans le patrimoine de la
collectivité qui peut en disposer librement. Ainsi, les biens du domaine privé peuvent être
vendus dans les mêmes conditions que les biens appartenant à l’Etat.
Outre la voie contractuelle décrite ci-dessus, les personnes publiques peuvent recourir à des
procédés, relevant de leur prérogative de puissance publique pour contraindre des particuliers
à leur céder leurs biens.
Il faut distinguer à cet effet, les cessions forcées à la suite d’une procédure d’expropriation
pour cause d’utilité publique et les autres modes exceptionnels que sont la confiscation pénale
d’un bien foncier appartenant à un condamné, le droit de préemption consécutif à l’aliénation
d’un bien immobilier et la purge des droits coutumiers suivie de l’immatriculation au nom de
la personne publique.
Avant l’ordonnance du 2 juillet 2013, les modes d’attribution des terrains urbains étaient
d’abord la concession (1), ensuite la lettre d’attribution des terrains urbains (2) et enfin la
délivrance du certificat de propriété (3).
L’art. 4 du décret du 16 février 1971 renseigne sur les formalités à remplir par l’attributaire
d’un terrain urbain. À cette époque, l’octroi de la concession définitive, sous la forme de
transfert de propriété était considéré comme la récompense de la mise en valeur du terrain,
l’immatriculation ayant déjà été faite au nom de l’Etat pour garantir l’origine de la propriété.
Après les opérations de morcellement, lesdits terrains sont mis à la disposition des opérateurs
immobiliers et des particuliers pour leur mise en valeur.
Les opérations de morcellement ou lotissement sont réalisées sur des terrains appartenant à
l’Etat ou aux collectivités territoriales (Adjamé, Abobo, Attiécoubé, Cocody, Koumassi,
Macory, Plateau, Port-Bouët, Treichville et Yopougon).
À Abidjan, les morcellements après aménagement sont quasiment réalisés sur des terrains
propriétés de l’Etat. Il s’agit des terrains ayant fait l’objet de purge des droits coutumiers,
conformément au décret n° 2013-224 du 22 mars 2013 et déjà immatriculer au nom de
l’Etat.
La délivrance de la lettre d’attribution ne peut porter que sur les terrains des lotissements
réalisé par la commune ou cédé à celle-ci. Le dossier de demande d’attribution de terrain à
usage d’habitation porte sur le domaine privé ; il est déposé auprès des services techniques de
la commune contre récépissé. La commune a également le pouvoir de retrait des lots à usage
d’habitation insuffisamment ou non mise en valeur.
À partir de la loi n° 2002-156 du 15 mars 2000 partant loi de finance de l’année 2000, ces
conditions de transfert de la propriété de l’Etat au profit des acquéreurs ont été simplifiées
pour les terrains urbains immatriculés au nom de l’Etat.
À Abidjan, toute mise à disposition commence par le paiement préalable par l’acquéreur à la
recette des domaines du prix de vente du terrain et des diverses taxes foncières. Ce qui n’est
pas le cas dans les autres agglomérations.
b- Les terrains à usage d’habitation des autres agglomérations
Pour les terrains à usage d’habitation des agglomérations autres qu’Abidjan leur attribution
est faite par une commission présidée par le Préfet pour le chef-lieu de département et par le
Sous-préfet pour le chef-lieu de la Sous-préfecture.
La procédure d’attribution commence par plusieurs opérations qui sont la réception des
dossiers de demande à la Préfecture ou à la Sous-préfecture selon le cas ; le contrôle et
l’examen des dossiers, le choix des demandeurs à satisfaire, l’envoi d’une lettre de promesse
d’attribution aux attributaires retenus, le paiement des frais requis et la remise de la quittance
de paiement à la Préfecture ou à la Sous-préfecture.
Ces opérations débouchent sur la délivrance de la lettre d’attribution par le Préfet ou le Sous-
préfet, Président de la commission. L’attributaire est invité également, par cette lettre à
déposer dans un délai de quatre mois, au service du domaine urbain du ministère chargé e la
construction et de l’urbanisme à Abidjan, un dossier technique de bornage-morcellement
dressé par un géomètre privé agréé, en vue de l’obtention d’un arrêté de concession
provisoire. Il est prescrit que l’installation sur les lieux est subordonnée à l’obtention de cet
arrêté.
Il est aussi indiqué dans la lettre d’attribution qu’aucune cession du lot n’est admise avant
l’obtention de l’arrêté de concession provisoire, voire du titre foncier. La lettre d’attribution
ne constitue pas un titre de propriété.
Ils sont personnels à ceux qui les exercent et ne peuvent être cédés à quelque titre que ce soit.
Se pose alors la question de la validité d’une telle transaction quand on sait que de
nombreuses acquisitions de terrains urbains se réalisent sur des terrains dits villageoises.
Il s’agit des villages qui ont été phagocytés par la ville ou la commune. Cependant, dans la
conscience des populations originaires de ces villages, l’espace d’habitation demeure sous
l’emprise des règles coutumières quand bien même ces villages sont dans le périmètre urbain
ou les règles d’urbanismes s’imposent à tous sans distinction.
À défaut de plan d’urbanisme directeur dans la plupart des grandes agglomérations, c’est au
vu et au su de tout le monde que ces morcellements parcellaires sont réalisés et cédés aux
éventuels acquéreurs.
Nombreux sont les acquéreurs qui sont dans l’attente d’une régularisation au niveau du
lotissement pour entamer la procédure qui doit leur permettre d’avoir le titre définitif de
propriété.
Au regard de la complexité de tous ces modes d’attribution, la loi de finance n° 2002-156 du
15 mars 2002 viendra simplifier la procédure d’accès à la propriété foncière urbaine par
l’institution du certificat de propriété foncière.
L’art. 36 de l’annexe fiscale de la loi n° 2002-156 du 15 mars 2002 portant loi de finance
de l’année 2002 permettait d’établir le titre de propriété d’un terrain urbain sans recourir à la
mise en valeur.
- les détenteurs d’actes administratifs de vente émanant de l’ex Direction du contrôle des
Grands
Travaux (DCGTx), de l’ex Service des Ventes Immobilières (SVI), du Bureau National
d’Étude Technique et Développement (BNETD) ou de l’Agence de Gestion Foncière
(AGEF).
Dans la pratique, l’intervention de plusieurs acteurs pour l’établissement des différents actes
relatifs à l’attribution d’un terrain en milieu urbain constituait une source de difficultés dans la
gestion des terres.
À la lumière de ce qui précède et compte tenu des conflits fonciers quotidiens qui menacent la
paix sociale, le Ministère en charge de la Construction et de l’Urbanisme a pris d’autres
dispositions pour sécuriser la gestion du foncier par la mise en place du guichet unique et la
reconnaissance d’un seul acteur dans la délivrance d’un seul acte qui consacre le transfert
d’un terrain issu du domaine foncier urbain de l’Etat à une personne privée, c’est l’Arrêté de
Concession Définitive (ACD).
En dehors du District, l’Arrêté est pris par le Préfet sur délégation de pouvoir du Ministre
chargé de la Construction et de l’Urbanisme.
L’appropriation des terrains par l’arrêté de Concession définitive sera examinée dans le cadre
de l’appropriation des terrains urbains.
Cette gestion se fait en liaison avec d’autres Ministères concernés peu ou prou par l’utilisation
ou l’exploitation des ressources foncières (B). Pour assurer une meilleure gestion du foncier
rural, il a été créé depuis 2016 l’Agence foncière Rurale ou AFOR (C).
De façon générale, la Direction du foncier rural assure les missions régaliennes de l’Etat qui
sont notamment : la gestion du domaine foncier rural de l’Etat, l’élaboration et la mise en
œuvre de la réglementation foncière, la participation à la mise en œuvre de stratégies de
gestion durable des ressources foncières et de l’espace rural sans oublier la participation à la
mise en place du cadastre rural.
À l’échelle locale, les opérations techniques relatives à la gestion du domaine foncier rural
relèvent de la compétence de chaque direction départementale du Ministère chargé de
l’agriculture. La direction départementale de l’Agriculture est véritablement l’interface entre
l’Administration territoriale et les usagers.
L’ensemble de ces tâches sont accomplies par le conservateur de la propriété foncière et des
hypothèques à qui la réglementation assigne trois tâches principales : création des titres
fonciers, inscription sur lesdits titres de droits réels y afférant et conservation des documents
d’archives relatifs aux titres fonciers créés.
Quant au service du cadastre, son rôle consiste à constituer des documents officiels qui
donnent des informations sur le patrimoine immobilier national.
À ce titre, plusieurs missions lui sont assignées : créer et conserver le cadastre en zones
urbaines et rurales, coordonner les activités cadastres des services extérieurs de la Direction
Générales des impôts, coordonner les opérations d’assiette, contrôler l’impôt foncier, etc.
Ce Ministre intervient dans la gestion du domaine foncier à travers ses représentants locaux
que sont les préfets et sous-préfets disposent en la matière d’une compétence propre.
À l’échelle locale, les préfets et sous-préfets jouent notamment un rôle important en matière
d’attribution des terres et de délivrance des titres d’occupation foncière. Par exemple, les
comités de gestion foncière rurale institués par le décret n° 99-593 du 13 octobre 1999 sont
créés par arrêté préfectoral et présidés par le sous-préfet.
De même en ce qui concerne l’attribution des terres du domaine coutumier, c’est le préfet qui
signe le certificat foncier et assure sa publication au journal officiel. Il lui revient également
de transmettre au Ministre chargé de l’agriculture, les requêtes d’immatriculation à lui
adresser.
Créée par le décret n° 2016-590 du 3 août 2016, l’Agence de gestion Foncière Rurale est une
structure d’exécution dotée de la personnalité morale qui a pour mission de mettre en
œuvre la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural et ses textes
subséquents.
À ce titre, elle est chargée des tâches pratiques qui antérieurement étaient dévolues à la
Direction du Foncier rural et du cadastre. Il s’agit entre autre multiples tâches :
- de mobiliser les ressources pour la mise en œuvre des actions de sécurisation du domaine
foncier rural ;
- de conseiller les pouvoirs publics sur toutes les questions liées à la gestion du domaine
foncier rural ;
L’AFOR comprend deux organes qui sont le Conseil de surveillance et la Direction Générale.
Le Conseil de surveillance assure la supervision des activités de l’AFOR conformément aux
orientations politiques de l’Etat en matière foncière. Il est composé de 12 membres
représentant les Ministères concernés, la Chambre Nationale d’Agriculture et la Chambre des
Rois et Chefs traditionnels.
Quant à la Direction Générale, elle assure au quotidien l’exécution des décisions prises par le
Conseil de surveillance.
La mise en place de l’AFOR est attendue dans l’espoir qu’elle pourra contribuer à sécuriser la
propriété foncière en milieu rural.
1- Organisation
Le comité de gestion foncière rurale est organisé par le décret n° 593 du 13 octobre 1999.
Créé dans chaque sous-préfecture par arrêté préfectoral, il est composé d’une part, des
représentants des Ministères et services qui interviennent dans la gestion des ressources
foncières, d’autre part des représentants des communautés rurales, des villages et des autorités
coutumières, désignes pour une période de trois ans renouvelable.
Le comité de gestion foncière rurale est présidé par le sous-préfet. Celui-ci est chargé de créer
des comités villageois de gestion foncière rurale, chargés de la gestion des terroirs. Il est
également chargé de transmettre au préfet les dossiers de délibération.
La décision finale revient au préfet qui dispose alors de deux semaines pour donner une suite
aux avis et propositions formulés par le comité.
Si le décret précité a le mérite de fixer une répartition paritaire des acteurs étatiques et des
représentants des communautés rurales au sein du comité, il faut veiller à éviter une sous-
représentation des femmes et des jeunes.
Car, au regard des tenures foncières coutumières, la gestion des terres est plutôt une
prérogative des autorités foncières coutumières (chefs de famille, chefs de villages, chefs de
lignage, etc.).
2- Attributions et fonctionnement
La création des comités de gestion foncière rurale répond au souci de l’Etat d’associer
davantage les populations locales à la gestion des ressources foncières.
Elle est en corrélation avec le Programme National de Gestion des Terroirs (PNGTER) dont
l'un des objectifs majeurs est d’accroître la participation et la responsabilisation des
populations dans la gestion de leur terroir.
Le décret précité portant organisation et attributions des comités de gestion foncière rurale
associe non seulement les populations au processus décisionnel mais aussi, il élargit le
domaine d’intervention desdites populations dans la gestion des ressources foncières.
Car à travers les comités mis en place, les représentants de ces populations interviennent
obligatoirement avec voix délibératives, sous forme d’avis conforme, sur des questions telles
que la validation des enquêtes officielles de constat de droits fonciers coutumiers, les conflits
non résolus au cours des enquêtes foncières, les demandes de cessions de droits fonciers
coutumiers, l’implantation des projets d’urbanisation ou des opérations de reboisement, etc.
Le Comité peut également être saisi pour avis simple par les autorités compétentes de toute
question relative au domaine foncier rural.
Les comités constituent les organes essentiels de gestion foncière rurale ; ils sont censés être
la cheville ouvrière en matière d’enquêtes foncières et de délivrance des certificats fonciers,
l’objectif visé étant la sécurisation foncière. Mais après plus d’une décennie de mise en œuvre
de la réforme foncière du 23 décembre 1998, peu de comités ont été créés. La lenteur dans la
mise en place des comités constitue naturellement une tentative notable au processus de
sécurisation foncière.
- suivre la mise en œuvre de la loi du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural ;
La Commission foncière rurale est composée des représentants des principaux acteurs du
secteur agricole : Ministères techniques, Institution nationales, producteurs agricoles, autorités
coutumières et religieuses, centres de recherche universitaire, partenaires techniques et
financiers du monde rural.
La Commission foncière rurale est dotée, d’une part, d’un secrétariat permanent assuré par le
Directeur du foncier rural du Ministère de l’Agriculture, d’autre part, de deux groupes de
travail (comité juridique et comité technique).
Malgré ses missions et sa composition qui suggère une participation effective des acteurs
concernés à la gestion du domaine foncier rural, la Commission ne constitue qu’un simple
organe consultatif.
Elle n’a guère l’autonomie, nécessaire pour donner une vision extérieure de la gestion du
domaine foncier rural. Car le Ministère de l’Agriculture qui est chargé de la gestion du
domaine foncier rural joue un rôle déterminant au sein de la commission apparaissant à la fois
comme juge et partie.
À ces limites s’ajoute le caractère non opérationnel de la commission. Alors qu’elle est censée
se réunir au moins une fois tous les six mois, la Commission foncière rurale n’a eu qu’une
seule séance de travail depuis sa création.
1- Les directions
Ainsi, la direction du domaine urbain assure la gestion du domaine de l’Etat en milieu urbain.
Cette compétence emporte des tâches plus spécifiques d’instruction de dossier, de rédaction
d’actes et de suivi de la mise en œuvre de la règlementation et des procédures de gestion
foncière.
2- Les services
Au titre des services, il faut retenir le service de la recherche du foncier pour les grands
projets de l’Etat, le service de vérification et de sécurisation des actes administratifs et le
service du Guichet unique du foncier et de l’habitat. Ces services sont rattachés au cabinet du
Ministre en charge de la construction et de l’urbanisme.
C’est une activité primordiale quand on sait que l’extension des zones urbaines s’opère sur les
terres appartenant aux personnes exerçant sur lesdites terres un droit coutumier. À la fin des
opérations d’aménagement foncier, le service de la recherche du foncier, en liaison avec les
aménageurs et l’Agence de Gestion Foncière, va informer les populations sur la disponibilité
de terrains urbains et préciser leurs modalités d’acquisition.
Ce service fait donc de la recherche-développement et gère une base de données sur les
ressources foncières de l’Etat.
À ce titre, il est chargé notamment de prospecter et de négocier les parcelles dédiées aux
projets de l’Etat, d’identifier les détenteurs des droits coutumiers sur l’ensemble du territoire
national et de tenir un répertoire de ceux-ci, de programmer les opérations de constitution de
réserves foncières sur le territoire national, etc.
- de transmettre pour traitement les dossiers de demandes d’actes aux services compétents ;
Il gère le domaine public de l’Etat à travers la Direction du domaine public. Cette Direction
est chargée de :
II gère le domaine public et le domaine privé de l’Etat. Il est chargé de la gestion patrimoniale
des biens de l’Etat. Le Ministère en charge du Budget intervient à travers la Direction
générale des impôts dont la mission consiste à :
À côté de ces structures décentralisées que sont les Districts et les Communes (A), il faut
mentionner également, les organismes qui ont été spécialement créés pour faire face à une
situation donnée, ce sont les structures parapubliques (B).
Elle consiste notamment à prendre des mesures pour empêcher l’occupation anarchique et
illégale des terrains ainsi que la prolifération des quartiers précaires, veiller au respect par les
villes, les communes, les promoteurs immobiliers et les particuliers, des schémas et plans
d’urbanisme et d’aménagement approuves et en vigueur, etc.
De 1987 à 1996, la Direction des Ventes Immobilières (DVI) s’est occupée de l’aménagement
et de la vente des terrains. Cette Direction est devenue plus tard le Service des Ventes
Immobilières (SVI) lequel sera rattaché au Cabinet du Ministère du Logement, du Cadre de
Vie et de l’Environnement.
Créée en 1999, l’AGEF prend la relève pour assurer la gestion du patrimoine foncier après la
SETU, la DVI et le SVI. Agissant pour le compte de l’Etat, l’Agence de gestion foncière
(l’AGEF), est chargée de constituer des réserves foncières et de faire des aménagement
fonciers sur toute l’étendue du territoire ivoirien en confiant ces opérations à des sociétés
d’aménagement par voie de concession.
Dans le cadre de cette mission, elle procède à la purge des droits coutumiers conformément
au décret n° 2013-224 du 22 mars 2013 qui réglemente la purge des droits coutumiers sur le
sol pour intérêt général.
Cependant, dans la pratique, l’AGEF rencontre des difficultés dans l’accomplissement de ses
missions en raison de l’interférence non seulement du Ministère de ta Construction et de
l’Urbanisme qui délivre à des opérateurs économiques des documents administratifs en
violation des textes en vigueur, mais également des personnes privées ou des promoteurs
immobiliers qui interviennent dans la chaîne foncière pour acheter directement des parcelles
de terrain aux détenteurs de droits coutumiers.
Ainsi, des personnes morales et/ou physiques, en dehors de l’Etat, de ses démembrements et
des structures créées pour gérer son domaine foncier, acquièrent des terres qui, en principe,
devaient d’abord être immatriculées au nom de l’Etat avant toute cession à un tiers.
Malgré ces difficultés, l’AGEF a à son actif plusieurs réserves foncières et concessions
d’aménagement. Dans la recherche d’une saine gestion des terres en milieu urbain, l’AGEF
constitue sans aucun doute, par son statut et ses missions, une structure salutaire en matière de
sécurisation des droits fonciers.
En Côte d'Ivoire, les opérations d’aménagement sont définies au niveau urbain comme rural
par divers plans. À partir du cadre général d’intervention défini par les plans, des actions
spécifiques vont être exécutées sur le terrain, ce sont les techniques de gestion (section
1). Des instruments de gestions sont également mis en place pour garantir les droits des
occupants des terres (section 2).
Ils comprennent souvent un état des lieux, une évaluation environnementale au regard du
développement durable. Ces documents sont périodiquement mise à jour dans le cadre de la
loi.
Il définit également le domaine urbain de l’Etat à soumettre à la purge des droits coutumiers
en vue de la constitution de réserve foncière nécessaire extension de la ville.
Le schéma directeur d’aménagement du territoire voté est valable pour cinq ans.
Cependant, il peut être révisé dans le but d’éventuelles améliorations, et ce, dans les mêmes
formes et conditions que celles prévues pour son élaboration.
Après son adoption, le schéma directeur d’aménagement du territoire est décliné en autant de
schémas directeurs régionaux d’aménagement qu’il existe de régions en Côte d’Ivoire.
Il apporte un cadre d’aménagement qui met un terme aux improvisations dans les villes. Il
définit les grands axes de développement de l’agglomération dans un contexte aussi large que
possible qui permet de prendre en considération les nécessités de l’environnement humain,
économique, biologique ou naturel.
Dans ces conditions, le plan est important parce qu’il annonce et par ce qu’il prescrit, mais il
l’est encore plus par ce qu’il empêchera de faire, ici ou là, pour des raisons de sauvegarde
durable des espaces naturels.
Le plan d’urbanisme directeur peut être révisé dans les mêmes formes et conditions que celles
prévues pour son élaboration.
A- Le lotissement
Le lotissement est une opération de création volontaire d’un tissu parcellaire qui consiste à
diviser un terrain en plusieurs parcelles destinées à la construction.
Le lotissement est le mode d’aménagement du sol en milieu urbain qui s’appuie sur un
principe (1) à partir duquel les différents types de lotissements seront déclinés (2).
1- Le principe du lotissement
La réalisation de l’opération de lotissement comporte deux étapes qui sont d’une part,
l’élaboration du plan de lotissement, d’autre part, la procédure de lotissement sur le terrain ou
mise en application du plan.
Le plan de lotissement est le résultat d’une recherche ou étude intégrant les contraintes les
plus diverses.
L’analyse de ces contraintes fait appel à plusieurs données qui ont trait notamment à la
vocation de la zone, aux données générales de l’insertion dans la ville, à la densité de la
population, aux contraintes réglementaires, aux données géographiques et hydrogéologiques,
etc.
À la suite de cette étude, il faut procéder à l’élaboration proprement dite du plan dont les
principales étapes sont :
3°) Détermination des zones pouvant recevoir certains éléments du programme en fonction
des caractéristiques du relief,
6°) Mise au net et découpage parcellaire. En même temps que le dessin définitif du plan, sera
précisé, il faut établir le canevas de la réglementation (cahier de charges).
Après l’élaboration du plan, il faut passer à la mise en application. Il s’agit d’une procédure
qui comporte plusieurs étapes.
Dans ce cas, les procédures sont conduites par une commission présidée par le Maire.
Les règles de base du lotissement servent de boussole pour les différents types de lotissement.
Il est initié soit par le Sous-Préfet (lotissement public de l’Etat), soit par le Maire (lotissement
communal).
Le lotissement communal est également régi par la loi n° 2003-208 du 7 juillet 2003 portant
répartition et transfert de compétences de l’Etat aux collectivités territoriales et le Décret n°
2005-261 du 21 juillet 2005 fixant les modalités d’application de cette loi en matière
d’urbanisation et d’habitat.
Quant au lotissement privé, il est régi par le décret 70-294 du 13 mai 1970 relatif aux
lotissements privés. Le lotissement privé est initié par des personnes physiques ou morales qui
procèdent à des morcellements et à la vente de parcelles selon les règles en vigueur et sous le
contrôle du Ministère de la contraction.
Les lots peuvent avoir plusieurs destinations, soit d’habitation, de jardins ou d’établissements
industriels ou commerciaux.
Le Directeur Régional de l’urbanisme procède au contrôle des travaux avec l’aide des services
de la mairie ou de la Sous-préfecture.
B- La restructuration urbaine
Elle est régie par l’ordonnance n° 77-615 du 24 août 1997 relative aux opérations de
restructuration urbaine.
La décision de restructuration est prise en Conseil des ministres sur proposition du Ministre
chargé de l’Urbanisme. Le District a l’initiative et la réalisation de ces plans de restructuration
urbaine, après avis consultatif des villes et communes qui le composent et de la Région dont il
relève.
Le dossier foncier fait l’état des droits existants, du nouveau plan de lotissement, de l’état
futur des droits, du programme de relogement et de réinstallation des personnes et activités
devant être éventuellement déplacées. Le dossier dresses également la liste des propriétés et
parcelles dont l’expropriation et la reprise sont déclarées d’utilité publique. L’enquête
publique préalable à l’approbation du plan de restructuration vaut enquête de commodo et
incommodo.
Chaque immeuble à l’immatriculation fait l’objet d’une feuille ouverte dans le livre foncier.
L’ensemble des mentions ainsi consignées sur une feuille constitue le titre foncier lequel est
définitif, inattaquable et imprescriptible.
Chaque feuille est divisée en cinq sections destinées chacune à recevoir des mentions
spécifiques faisant l’objet de bordereaux analytiques inscrits sur le livre foncier suivant un
numéro d’ordre, avec précision de la date d’inscription.
Ces mentions portent essentiellement sur :
Outre le livre foncier et les dossiers qui les accompagnent, la réglementation en vigueur
prévoit d’autres registres destines soit à la vérification de la suite de la procédure
d’immatriculation, soit à la constatation des demandes d’inscription sur les livres fonciers,
soit enfin à la communication des informations aux usagers.
B- Évolution
Dans tous les cas, pour améliorer le fonctionnement des services de la conservation foncière
et faciliter l’accès des usagers aux informations du titre foncier, la tendance actuelle est à
l’informatisation de certaines données du livre foncier.
C’est dans cette optique que par ordonnance du 24 mars 2015, le Conseil des Ministres a
institué le livre foncier électronique. Cette option vise à accompagner le dynamisme des
transactions immobilières en sécurisant au mieux les données du livre foncier et en améliorant
l’accès aux informations qu’il contient.
Paragraphe 2 : Le cadastre
La définition, les missions et l’évolution du cadastre méritent d’être examinées (A), de même
que sa nature juridique (B). Il convient également de faire le rapprochement entre le cadastre
et le plan foncier (C).
Que recouvre la notion de cadastre (1) ? Et quelle est son évolution (2) ?
1- Définition et missions
Le cadastre peut être défini comme un ensemble de documents officiels donnant des
informations sur les propriétés bâties et non bâties et sur l’identité de leurs propriétaires. Au
sens large, c’est un inventaire de la propriété foncière dont il donne une description plus ou
moins détaillée en vue de répondre aux besoins individuels et collectifs de la société.
Cet inventaire ce fait généralement par l’établissement d’une documentation graphique (plans
cadastraux) et d’une documentation littérale contenue dans un registre. La mise en relation
des données graphiques et littérales se fait à travers l’utilisation d’un numéro d’identification
qui permet de passer de l’information graphique à l’information littérale.
Au sens strict, le cadastre affecte la forme d’un démembrement foncier établi par l’Etat.
- l’opération juridique qui a pour finalité de préciser le statut des terres de même que les droits
et obligations des propriétaires ou occupants.
II résulte des missions ci-dessus que la documentation graphique du cadastre comporte trois
éléments :
- le plan de titre foncier qui fait partie de l’annexe du livre foncier portant sur les
caractéristiques de l’immeuble et dont le caractère définitif dépend de l’accomplissement des
formalités de bornage réalisées en présence du géomètre assermenté du service de la
conservation foncière ;
- le plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage qui a pour objectif d’identifier les terrains
qui font l’objet de titres fonciers résultant de l’immatriculation ;
- le plan cadastral fiscal qui recense toutes les parcelles imposées et définit l’assiette de
l’impôt foncier.
- une meilleure connaissance des limites foncières ; ce qui facilite le règlement des conflits
fonciers, les études de planification et de développement et l’inventaire du domaine de l’Etat,
des collectivités et des particuliers ;
- la fiabilité des investissements, notamment en milieu rural où les droits fonciers coutumiers
sont souvent sujets à conflits ;
Cette volonté de prélèvement est à l’origine de l’impôt foncier. Mais bien évidemment,
l’imposition suppose que chaque portion de terres soit localisée, identifiée et validée. Or, cette
tâche n’est pas toujours aisée pour des raisons techniques, juridiques ou financières.
Mais le caractère facultatif de l’immatriculation n’a guère favorisé la mise en place d’un
cadastre général.
Consciente de cet obstacle, l’Administration coloniale a pris le décret du 20 mai 1955, lequel
a permis de procéder à l’immatriculation obligatoire de toutes les parcelles situées dans les
périmètres urbains à cadastrer ayant fait l’objet d’un plan d’urbanisme.
Si en milieu urbain, notamment à Abidjan, le cadastre a connu une application, il n’en est pas
de même en milieu rural. Il faut dire que contrairement au milieu urbain où du fait de la forte
pression foncière, le coût du cadastrage est facilement amorti par l’Etat, en milieu rural, il en
va autrement.
Pour remédier à cette situation, le Ministère de l’Agriculture a créé dès 2002 un service du
cadastre rural rattaché à la Direction du foncier rural. Ce service est notamment charge de la
délimitation des terroirs villageois laquelle constitue une étape vers la stabilisation des droits
coutumiers et le cadastrage des terres en liaison avec les services compétents du Ministère de
l’Économie et des Finances.
Ces documents peuvent être consultés par les contribuables qui peuvent en obtenir des extraits
leur permettant de s’informer sur leur situation foncière ou fiscale. D’où l’intérêt de
s’interroger sur la nature juridique des documents cadastraux.
En d’autres termes, les documents cadastraux peuvent-ils par exemple, être utilisés par les
contribuables pour apporter la preuve de leurs prérogatives foncières ?
À cette question, il convient de répondre par la négative. En effet, les documents cadastraux
sont des documents purement administratifs qui décrivent des situations de propriété
apparentes ; ils ne peuvent en aucun cas constituer une preuve ou même une présomption de
propriété.
Il résulte de ce qui précède que le plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage n’a aucune
valeur juridique. Il en est de même du plan cadastral fiscal dont le caractère non contradictoire
exclut toute opposabilité aux tiers qui peuvent d’ailleurs le contester dans le cadre d’un
recours administratif.
En revanche, en ce qu’ils sont considérés comme faisant partie intégrante des données du livre
foncier, les plans de titre foncier sont opposables au tiers dès lors que les limites qu’ils
indiquent ont été reconnues et approuvées en présence du géomètre assermenté du Cadastre,
après une procédure contradictoire de bornage.
S’il est admis que les documents cadastraux ne peuvent établir la propriété, ils peuvent
cependant fournir un commencement de preuve de la propriété et des droits réels y relatifs.
En vue de collecter des données fiables sur l’occupation des terres en milieu rural, l’Etat a
initié depuis 1988, le Plan foncier rural. Le Plan foncier rural est une opération qui consiste en
une vaste enquête foncière menée en zone rurale sur la base de photos aériennes, complétées
par des enquêtes au sol.
Il vise notamment à faciliter le règlement des conflits fonciers, à constituer une base pour
l’aménagement et la gestion des terroirs villageois et à faciliter l’accès au crédit.
Après une phase pilote (1990-1996) suivie successivement d’une phase de consolidation
(1996-1997) et d’une phase d’extension (1997-1999), le plan foncier rural a couvert au total
neuf zones.
A la fin du projet en 2002, 1 117 000 hectares ont été délimités, 44 201 parcelles ont été
élevées, 708 villages ont été couverts pour une superficie numérisée s’élevant à 638 550
hectares.
- La mise au point d’un outil technique fiable et peu coûteux de levée de parcelles et de
recensement des droits, basé sur la cartographie ;
Après 2002, le plan foncier rural est devenu une composante du programme national de
gestion des terroirs et de l’équipement rural (PNGTER), programme visant à rationaliser
l’utilisation des ressources foncières par l’association et la responsabilisation des
communautés rurales dans la gestion de leur terroir.
À la différence du cadastre qui porte sur des parcelles aux délimitations plus précises et sur
lesquelles s’exercent des droits de propriété, le Plan foncier rural a pour objectif d’établir une
cartographie du territoire national.
Cette cartographie précise les limites foncières à l’intérieur de chaque terrain villageois et
recense pour chaque parcelle identifiée, l’ensemble des droits qui s’y exercent et les
détenteurs de ces droits.
De ce point de vue, le plan foncier rural apparaît comme un dispositif technique embryonnaire
du cadastre. En effet, la documentation graphique du Plan foncier rural comprend deux
éléments essentiels qui sont d’une part, le plan parcellaire et d’autre part, le plan du terroir.
Or, à l’analyse, le plan parcellaire s’apparente au plan de titre foncier du cadastre ; tandis que
le plan du terroir se rapproche du plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage.
Faut-il en déduire que les documents du plan foncier rural ont la même valeur juridique que
ceux du cadastre ? Une telle déduction ne semble guère possible, car les documents
cartographiques du plan foncier rural sont réalisés sans les éléments essentiels du cadastre que
sont le bornage, la présence d’un géomètre assermenté et le dossier technique de chaque plan
de parcelle.
Il résulte de ce qui précède que si les résultats du plan foncier rural présentent des avantages
certains, leur articulation à la réglementation foncière n’a pu se réaliser donnant ainsi la
sensation d’une symphonie inachevée.
Ainsi, aux termes de l’article 119 de la loi béninoise, la confirmation des droits fonciers en
milieu rural se fait principalement à partir du plan foncier rural.
C'est ici, que s'achève la première partie (La gestion du patrimoine foncier) de ce cours de
droit foncier. Vous pouvez consulter l'introduction ou la deuxième (les modalités d’accès à
ma terre).
Ce cours de Droit de droit foncier ivoirien est constitué en trois parties : une introduction
générale, ensuite une Première partie (la gestion du patrimoine foncier) et enfin
une deuxième partie (les modalités d’accès à ma terre).
Sommaire
Les descendants des premiers occupants ont qualité de propriétaires fonciers coutumiers et ont
pour obligation de gérer les ressources naturelles (terre, eau, forêts, etc.) conformément aux
règles régissant chaque communauté.
Considérées généralement comme des biens sacrés, ces ressourcés étaient inaliénables.
Mais cette marginalisation des tenures coutumières reste inopérante, car en pratique, les droits
fonciers coutumiers restent encore vivaces et continuent de résister à l’hégémonie foncière de
l’Etat ; ce qui a fait dire au professeur H. SARASSORO qu’ils sont « des morts-vivants ».
Ce nouvel ordre juridique foncier qui s’applique aussi bien aux terres rurales qu’aux terrains
urbains, repose d’une part, sur des règles de gestion (Titre 1), d’autre part, sur un cadre
institutionnel et technique (Titre 2) qu’il importe d’examiner.
Cette volonté de maîtrise foncière de l’Etat demeure toujours inchangée en milieu urbain et
s’est traduite par un monopole de l’Administration sur la gestion des terrains urbains.
Il résulte que l’étude des règles de gestion foncière porte d’une part, sur les terres du domaine
rural (Chapitre 1) et d’autre part, sur les terres du domaine urbain (Chapitre 2).
Alors que les premières comportaient un titre foncier définitif et inattaquable, les secondes,
composées de terres coutumières ou de terres concédées provisoirement ne conféraient que
des droits incertains ou précaires.
C’est sur cette base qui vise à terme la sécurité foncière que l’Etat procède à
l’attribution (Section 2), au retrait (Section 3), au contrôle des transactions foncières (Section
4).
Font enfin partie du domaine foncier de l’Etat les terres sans maître (article 6 de la loi du 23
décembre 1998).
Sous l’empire du décret du 15 novembre 1935 portant réglementation des terres domaniales
en Afrique occidentale française, le concept de terre vacante et sans maître avait permis la
mainmise de l’Administration coloniale sur les terres non mises en valeur, suscitant ainsi le
mécontentement des autochtones et en particulier des autorité et propriétaires fonciers
coutumiers.
En ayant recours au concept de terre sans maître, le législateur ivoirien, pour éviter toute
équivoque a pris soin d’en donner la définition.
Ainsi, dans la version non modifiée de la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au
domaine foncier rural, était d’abord considéré comme des “terres sans maître” :
- les terres objet d’une succession ouverte, mais non réclamée depuis plus de trois ans ;
- les terres du domaine coutumier sur lesquelles des droits coutumiers exercés de façon
paisible et continue n’ont pas été constatés dix ans après la publication de la loi n° 98-750 du
23 décembre 1998 ;
- les terres concédées provisoirement sur lesquelles les droits des concessionnaires n’ont pu
être consolidés trois ans après le délai imparti pour la mise en valeur, à compter de cette
publication.
Les délais précités n’ont pu être respectés par les titulaires de droits fonciers concernés. Aussi,
pour éviter que ceux-ci ne soient dépossédés de leurs terres par application de la théorie des
terres sans maître, le législateur a été amené par la loi n° 2013-655 du 13 septembre 2013, à
proroger les délais initiaux par une modification de l’article 6 de la loi n° 98-750 du 23
décembre 1998 relative au domaine foncier rural.
Cependant, il convient de relever que les terres objet de conflits interminables et considérées
donc comme sans maître, pourront être incorporées au domaine de l’Etat, au même titre que
les terres concédées n’ayant pas été mises en valeur dans le délai imparti.
Si l’on tient compte du nombre important de conflits fonciers non résolus et du manque de
moyens pour la mise en valeur des terres, l’Etat apparaît d’ores et déjà comme le grand
bénéficiaire de l’application du concept de terre sans maître tout comme ce fut le cas de
l’Administration coloniale.
-- Le domaine foncier rural des Collectivités territoriales (districts, régions, communs) est
d’abord composé des terres qui leur sont transférées ou cédées.
En effet, l’Etat peut transférer ou céder à titre gratuit ou onéreux des terres au Collectivités
territoriales. Le transfert ou la cession des terres rurales de l’Etat au profit des Collectivités
territoriales est autorisé par décret pris en Conseil des Ministres soit à l’initiative de l’Etat,
soit à la requête de la Collectivité territoriale concernée.
Les terres transférées ou cédées par l’Etat deviennent la propriété de la Collectivité territoriale
concernée.
-- Le domaine foncier des Collectivités territoriales comprend également les terres acquises.
Les terres acquises le sont à titre gratuit (dons, legs, prescription, saisie, etc.) ou à titre
onéreux (achat, échange, etc.).
Dans certains cas (achat, échange, donation ou legs), l’acquisition est décidée par une
délibération du Conseil et transmise à l’Autorité de tutelle. Dans d’autres (expropriation), la
décision est prise par délibération du Conseil dans les conditions fixées par décret pris en
Conseil des Ministres.
-- Font enfin partie du domaine foncier des Collectivités territoriales les terres déclarées
d’intérêt local par décret pris en Conseil des Ministres.
Les terres rurales ci-dessus énumérées font partie du domaine privé de la Collectivité
territoriale. Elles doivent, conformément, à la réglementation foncière être immatriculées à
leur nom. En conséquence, elles peuvent être gérées dans les mêmes conditions que les terres
rurales de l’Etat (location, concession, bail emphytéotique, etc.).
Tout comme les Collectivités territoriales, les Établissements publics sont admis
conformément à l’article 1er de la loi du 23 décembre 1998 à être propriétaire de terres rurales
dans les conditions fixées par la réglementation foncière en vigueur.
En tout état de cause, ces terres sont de très faible importance en raison essentiellement du
manque d’effectivité de la procédure d’immatriculation.
En effet, en raison de sa complexité et de son caractère onéreux, cette procédure, qui devait
consolider la propriété individuelle des terres, n’a pas connu auprès des populations le succès
escompté, après un siècle de mise en œuvre.
Ce qui explique que seulement 2 % environ des terres aient été immatriculées jusqu’à ce jour.
Aux terres immatriculées, s’ajoutent celles que les particuliers ont pu acquérir sous le régime
du Code civil. En effet, sous ce régime introduit en Côte d'Ivoire par l’arrêté Binger du 10
septembre 1893, l’Administration coloniale avait octroyé de vastes portions de terres
domaniales aux personnes physiques et morales capables de les mettre en valeur.
Mais les droits résultant de ces concessions n’ont pu se maintenir que s’ils ont été publiés au
livre foncier.
Pour le législateur ivoirien, le domaine Coutumier est constitué par l’ensemble des terres sur
lesquelles s’exercent des droites foncières conformes aux modes traditionnels de gestion de la
terre. Sont également visés, les « droits coutumiers cédés aux tiers », c’est-à-dire les terres qui
au mépris des procédures domaniales et foncières ont fait l’objet de transactions coutumières
(vente, location, donation, etc.).
Peu importe que les droits cédés soient antérieurs ou postérieurs à la réforme foncière de
1998.
Faute d’immatriculation au nom d’un ayant-droit, les terres du domaine coutumier conservent
leur statut transitoire. Il en va de même des terres du domaine concédé.
B- Le domaine foncier concédé
Il Comprend, les terres attribuées provisoirement aux personnes physiques et morales avant la
réforme foncière du 23 décembre 1998. II en est ainsi des terres attribuées sous le régime du
permis d’occuper ou des concessions (concession provisoire pure et simple, concession
provisoire sous réserve des droits des tiers, bail emphytéotique).
Les bénéficiaires de ces concessions provisoires disposent d’un délai de 5 ans à compter de la
date de publication de la loi n° 2013-655 du 13 septembre 201, pour demander
l’immatriculation de leurs terres. Cette immatriculation est d’abord faite au nom de l’Etat qui
peut ensuite céder la parcelle de terre concernée a l’ancien concessionnaire si celui-ci a
qualité à être propriétaire foncier. Dans le cas contraire, une location peut être consentie par
l’Etat à celui-ci.
Exception faite des terres appartenant déjà aux particuliers, les terres du domaine foncier
permanent ou du domaine foncier transitoire peuvent faire l’objet d’attribution, conformément
à la réglementation en vigueur.
Avant la réforme foncière du 23 décembre 1998, les modes d’attribution des terres étaient
essentiellement le permis d’occuper, les concessions et le bail emphytéotique.
1- Le permis d’occuper
Régi essentiellement par le défunt décret n° 71-74 du 16 février 1971, le permis d’occuper
était une autorisation d’occupation délivrée à titre précaire par le préfet ou le sous-préfet. Ce
texte disposait en son article 1 que : « toute occupation de terrain pour être légale doit être
justifiée, pour les terrains ruraux...par une autorisation d’occupation à titre précaire et
révocable délivrée par le Ministre de l’intérieur ou son représentant... ».
Aujourd’hui encore, plusieurs terrains ruraux sont détenus sur la base du permis d’occuper.
Mais leur titulaire tout comme les titulaires de concessions provisoires sous réserve des droits
des tiers, sont tenus de demander l’immatriculation de leurs terres, dans le délai de 5 ans à
compter de la publication de la loi n° 2013-655 du 13 septembre 2013 précitée, au risque de
perdre leurs prérogatives foncières au profit de l’Etat, en vertu de la théorie des terres sans
maître.
Ces deux types de concessions se différencient par le fait que contrairement à la concession
provisoire sous réserve des droits des tiers la concession provisoire pure et simple n’était
accordée que sur un terrain immatriculé ; elle était de ce fait publiée au livre foncier.
Plus d’une décennie après la réforme foncière du 23 décembre 1998, de nombreuses terres
demeurent encore sous le régime de la concession provisoire et font partie du domaine foncier
transitoire.
Pour remédier à cette situation, la réforme foncière oblige les titulaires de concessions
provisoires à immatriculer, dans le délai de 5 ans, leurs terrains, sous peine de les perdre en
application de la théorie des terres sans maître.
3- La concession définitive
La concession définitive réalisait la cession par l’Etat d’un terrain à un particulier ou à une
collectivité.
Elle avait lieu sous la condition résolutoire du paiement par le concessionnaire définitif, au
plus tard le mois qui suit la notification de l’arrêté, du prix de cession (50 000 F CFA par
hectare), des frais d’inscription au livre foncier et des frais d’enregistrement et de timbre.
La concession était accordée si au moins les 2/3 du terrain étaient mise en valeur et après
création du titre foncier. Mais pour limiter les accaparements et le gel stérile des terres, la
concession définitive a été limitée à une superficie de 12 hectares suite à une délibération de
l’Assemblée territoriale du 27 novembre 1948. S’il y a un surplus de superficie, celui-ci était
donné en bail emphytéotique.
4- Le bail emphytéotique
Le bail emphytéotique été institué à l’origine pour mettre fin à l’exploitation anarchique des
terres et à la spéculation foncière consécutive à la faculté d’obtention de la concession
définitive par les sociétés étrangères. C’est un bail qui est accordé par le Ministres chargé de
l’Agriculture pour une durée qui varie de 18 à 99 ans. Mais en pratique, la durée du bail est de
25 ans renouvelables.
Avant la réforme du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural, l’attribution des
terres se réalise désormais à travers le certificat foncier (1), la concession de la propriété (2)
par obtention du titre foncier et le bail emphytéotique (3).
1- Le certificat foncier
Aux termes de la loi du 23 décembre 1998 (Art. 8) l’obtention du certificat foncier est
subordonnée au constat d’existence paisible et continue de droits coutumiers. Ce constat est
établi à l’issue d’enquêtes officielles réalisées conformément à la procédure définie par le
décret n° 99-595 du 13 octobre 1999.
On note ici qu’il y a recours non à un géomètre expert, mais plutôt à un opérateur technique
inscrit sur une liste d’agrément arrêtée par le Ministère chargé de l’agriculture. Cette mesure
vise à réduit les coûts de délimitation du terrain.
Mais cette disposition se concilie difficilement avec la loi n° 70-487 du 03 août 1970
instituant l’ordre des géomètres experts.
D’après cette loi, les géomètres experts sont seuls habilités à établir les documents
topographiques en matière de délimitation et d’établissement de plans parcelles de terres
rurales.
- La validation de l’enquête : l’enquête est validée par le comité de gestion foncière rurale
de la sous-préfecture, après une période de publicité de trois mois qui court à de la séance
publique de présentation des résultats de l’enquête.
La publicité est réalisée par le commissaire enquêteur dans les villages concernés, sous
l’autorité des comités villageois de gestion foncière rurale.
Passé, ce délai, les résultats de l’enquête peuvent être utilisés par tout ayant droit déterminé
par l’enquête.
Après validation de l’enquête, le certificat foncier est signé et publié au journal officiel par le
préfet de département.
À compter de la signature du certificat par le préfet, le titulaire dudit certificat dispose d’un
délai de trois (3) ans pour requérir l’immatriculation du bien foncier concerne.
Cette concession a lieu pour les titulaires de certificats fonciers qui ont fait immatriculer leur
terrain à leur nom. Elle a lieu également pour les occupants des terres antérieurement
attribuées ou concédées à titre provisoire dans les conditions indiquées par la réglementation
en vigueur.
Alors que les terres du domaine coutumier sont immatriculées directement au nom du
demandeur, le bien foncier concédé est d’abord immatriculé au nom de l’Etat (Art. 11 D. n°
99-595 du 13 octobre 1999) qui le rétrocède à l’ancien concessionnaire, soit en pleine
propriété, soit sous forme de location ou de bail emphytéotique.
Il résulte de ce qui précède que les modes d’attribution des terres rurales ont évolué dans le
temps. Cette évolution est l’expression des efforts d’adaptation réalisés par l’Administration,
efforts que l’on observe également dans la définition des critères d’attribution des terres
rurales.
L’attribution des terres du domaine coutumier se fait selon deux critères essentiels définis par
la réforme foncière du 23 décembre 1998. Le premier critère a trait au constat d’existence
paisible et continue de droits coutumiers (1). Quant au second, il se rapporte à la nationalité
du demandeur : c’est le critère personnel (2).
1- Le constat d’existence paisible et continue de droits fonciers
Pour les terres du domaine rural coutumier, le constat d’existence continue et paisible de
droits fonciers constitue le critère essentiel d’attribution du certificat foncier. Ce constat
résulte de l’enquête foncière prévue par le décret n° 99-594 du 13 octobre 1999 fixant les
modalités d’application au domaine foncier rural coutumier de la loi n° 98-750 du 23,
décembre 1998.
Mais ce constat d’existence paisible et continue de droits fonciers suffit-il pour se voir
attribuer la propriété d’un terrain du domaine coutumier ? À cette question, il y a lieu de
répondre par la négative. Car en plus du constat d’existence paisible et continue de droits
fonciers, il faut aussi satisfaire à un critère lié à la personne du demandeur.
2- Le critère personnel
Aux termes de l’article premier de la réforme foncière du 23 décembre 1998, seuls l’Etat, les
collectivités publiques et les personnes physiques ivoiriennes sont admises à être
propriétaires.
Il en résulte que d’une part, les personnes physiques non-ivoiriennes, d’autre part, les
personnes morales, quelle que soit leur nationalité, ne peuvent requérir en leur nom
l’immatriculation d’un terrain du domaine coutumier.
Si ces dispositions d’une importance capitale se justifient par la volonté de l’Etat de mettre un
terme, à la mainmise croissante des non-nationaux sur les terres et à réserver corrélativement
aux nationaux la maîtrise du patrimoine foncier ivoirien, elles posent nécessairement le
problème des droits acquis des personnes physiques non-ivoiriennes et des personnes morales
visées.
En ce qui concerne les personnes physiques non-ivoiriennes, la loi foncière de 1998, dans la
formulation initiale de son article 26, disposait que les droits fonciers que celles-ci avait déjà
pu acquérir étaient maintenus à titre personnel.
Autrement dit, les droits cessaient avec le décès de leur titulaire. Cependant, la loi foncière
dans sa première formulation opérait une discrimination qui permettait aux héritiers de
nationalité ivoirienne de demander l’immatriculation à leur nom.
Dans le cas où ceux-ci n’étaient pas ivoiriens, ils disposaient alors d’un délai de trois ans pour
céder les terres à une personne physique ivoirienne, ou pour requérir à leur profit une location,
après retour des terres concernées au domaine de l’Etat.
De toute évidence, cette disposition de l’article 26 n’est guère en harmonie avec la théorie des
droits acquis. Aussi avait-elle fait l’objet de critiques virulentes à telle enseigne que suite aux
accords de Linas Marcoussis (en France), consécutifs à la crise sociopolitique de 2002, elle a
été modifiée par le législateur ivoirien à travers la loi n° 2004-412 du 4 août 2004.
Cette modification qui a pris forme à travers l’article 26 nouveau de la loi du 23 décembre
1998, indique clairement que les droits de propriétés foncières que les personnes physiques
non-ivoiriennes ont pu déjà acquérir sont maintenus. Autrement dit, ces droits fonciers n’ont
plus un caractère personnel et peuvent être transmis aux héritiers, quelle que soit leur
nationalité.
La récente Constitution du 8 novembre 2016 va plus loin dans la protection des droits acquis.
En vertu de l’article 12 alinéa 1er de la loi fondamentale, « les droit acquis sont garantis ».
Mais en ce qu’elle ne précise pas la nature juridique de ces droits, cette disposition de la loi
fondamentale semble équivoque.
Au regard des enjeux en matière foncière, une clarification de la nature juridique des droits
acquis, objet de cette garantie, aurai été utile. Car si le droit de propriété acquis ne concerne
qu’une minorité de personnes (quelques centaines).
Le droit d’usage acquis pourrait renvoyer à la grande majorité des acteurs du monde rural qui
ont mis les terres en valeur sans disposer d’un titre de propriété.
En ne précisant pas que les droits acquis concernés sont les droits de propriété foncière, la loi
fondamentale ne fait qu’ajouter la fumée au brouillard dans une matière foncière
suffisamment complexe et sujette à conflits récurrents plus ou moins graves.
En ce qui concerne les personnes morales maintenues dans leur droit de propriété en vertu de
la règle des droits acquis, elles ne peuvent céder leurs droits à un cessionnaire qui n’a pas
accès à la propriété foncière qu’à la condition de déclarer le retour de leurs terres au domaine
de l’Etat.
Dans une telle hypothèse, le concessionnaire désigné peut bénéficier d’un bail emphytéotique
ou d’une location de la part de l’Etat.
Si les personnes physiques non-ivoiriennes et les personnes morales n’ont pas accès à la
propriété foncière, rien n’interdit qu’elles puissent obtenir un certificat foncier.
Il suffit pour cela qu’elles puissent justifier de l’existence paisible et continue de droit sur le
domaine coutumier. Mais le certificat foncier qui leur est délivré dans ces conditions ne peut
en aucun cas leur ouvrir la voie à la propriété foncière ; tout au plus, peut-il, après
immatriculation du terrain au nom de l’Etat, leur permettre de bénéficier d’une location ou
d’un bail emphytéotique.
Cette procédure demeure encore valable pour les titulaires de concessions provisoires, à
travers la consolidation de leurs droits, conformément au décret n° 99-595 du 13 octobre 1999
fixant la procédure de consolidation des droits des concessionnaires provisoires de terres du
domaine foncier rural.
Mais, depuis la réforme foncière du 23 décembre 1998, le constat de mise en valeur ne suffit
plus pour obtenir la pleine propriété du foncier concédé. Il faut en plus que l’ancien
concessionnaire soit une personne physique ivoirienne. Au critère de la mise en valeur,
s’ajoute donc, comme cela a été précédemment indiqué, le critère personnel de la nationalité.
L’attribution d’une terre rurale à une personne déterminée crée au profit de celle-ci des droits
fonciers. Mais ces droits ne mettent pas leurs titulaires à l’abri d’un retrait des terres à eux
attribuées.
C’est une opération de puissance publique par laquelle l’Administration procède à l’encontre
des particuliers à l’acquisition forcée et moyennant une indemnité juste et préalable, des
immeubles, terrains et bâtiments nécessaires à l’usage du public ou au fonctionnement du
service public. Cette procédure, qui est réglementée par le décret du 26 décembre 1930, est à
la fois administrative et judiciaire.
Passe le délai ci-dessus, la parcelle concernée peut être immatriculée au nom de l’Etat sans
qu’il ne faille recourir à une quelconque procédure d’expropriation.
Ce faisant, l’Etat retire ou prend possession d’une parcelle déjà attribuée à un particulier
n’ayant pu immatriculer son bien foncier dans le délai imparti.
Un dernier recours est accordé au titulaire du certificat foncier : celui-ci dispose en effet d’un
délai de trois (3) mois, à compter de la notification à lui faite de la procédure, pour requérir le
transfert à son nom de l’immatriculation, moyennant le remboursement des frais exposés par
l’Etat.
En pareille hypothèse, le titulaire qui n’est pas admis à être propriétaire, peut bénéficier d’un
contrat de location.
Ce qui entraîne naturellement le retrait de la parcelle de terre au profit de l’Etat. Dans ce cas,
les impenses réalisées par le locataire sont cédées par l’Etat à un nouveau locataire
sélectionné par vente des impenses aux enchères. À défaut d’une résiliation de la location, la
parcelle louée peut être ramenée à la superficie effectivement mise en valeur.
Outre les locations de courte durée, les baux emphytéotiques consentis par l’Etat peuvent
également être résiliés soit en cas d’abandon de mise en valeur pendant plus de dix (10) ans,
soit en cas de non-paiement des redevances par l’emphytéote pendant deux années
consécutives. Dans les deux cas, le bien foncier objet du bail est retiré à l’emphytéote
défaillant.
Avant la réforme foncière de 1998, l’Administration avait concédé à titre provisoire, à des
particuliers, des parcelles de terre, avec pour obligation de les mettre en valeur, sous peine de
déchéance.
Les bénéficiaires de ces concessions provisoires disposent aujourd’hui d’un délai de cinq (5)
ans à compter de la date de publication de la loi du 13 septembre 2013 pour consolider leurs
droits. Cette disposition concerne aussi bien les bénéficiaires de concession provisoire pure et
simple que les bénéficiaires de concessions provisoires sous réserve des droits des tiers.
Ceux-ci sont tenus avant l’immatriculation de leur terre de satisfaire à l’obligation de mise en
valeur.
En l’absence de mise en valeur, les terres concernées sont considérées comme des terres sans
maître ; ce qui entraîne leur retour au domaine foncier de l’Etat.
De ce point de vue, la théorie des terres sans maître apparaît comme une épée de Damoclès
pour les concessionnaires provisoires dont les droits fonciers ne sont pas encore consolidés,
conformément à la réglementation foncière.
À travers, plusieurs mécanismes, l’Etat s’est aussi assigné un rôle de contrôle de l’accès à la
terre.
Cette situation qui est source d’incertitudes et d’interminables conflits fonciers a amené l’Etat
à interdire les actes sous seing privé à travers le décret du 16 février 1964 et à imposer la
forme notariée pour ces transactions. Cette interdiction sera renforcée par la loi des finances
du 20 mars 1970 laquelle prescrit la nullité absolue des transactions foncières effectuées hors
de l’intervention d’un notaire.
En fait, cette survivance des actes sous seing privé ne devrait guère surprendre.
D’abord, les pénalités prévues sont dérisoires et donc non dissuasives. Ensuite, la
jurisprudence considère que seules les transactions portant sur les terres appropriées
conformément à la réglementation en vigueur, doivent être passées par devant notaire ; ce qui
exclut les conventions foncières coutumières.
Enfin, bien que les cessions découlant de ces actes sous seing privé aient été effectuées en
marge des procédures domaniales et foncières, la jurisprudence reconnaît les droits fonciers
des cessionnaires. Ce qui pose le problème de l’opportunité des dites procédures.
Pour Albert LEY, le bail emphytéotique constitue en outre, le meilleur moyen d’empêcher
que la spéculation foncière n’absorbe un pourcentage important de l’épargne consacrée à
d’autres investissements. Le bail emphytéotique permet notamment aux collectivités
territoriales d’éviter la tentation de la vente des terres de leur domaine privé, une situation qui
à terme aurait pour inconvénient le renchérissement du foncier.
L’étude des règles de gestion du domaine foncier rural a mis en évidence le fossé entre le
droit et la réalité. En effet, les pratiques foncières coutumières constituent un défi pour
l’Administration domaniale dans sa mission de gestion du domaine foncier rural. La situation
ne semble pas différente en matière de gestion du foncier urbain.
Ainsi, font partie du domaine public, les éléments énumérés dans le texte (A). Il s’agit d’une
simplification considérable par rapport aux controverses doctrinales et jurisprudentielles du
19 ème siècle en France.
À la fin du texte, il a été ajouté une définition synthétique prévue pour le cas où des omissions
se seraient glissées dans l’énumération (B).
Ce décret du 20 juillet 1900 spécial à la Côte d'Ivoire a été remplacé par un décret du 23
octobre 1904 applicable à l’ensemble de l’ex-AOF puis par celui du 29 septembre 1928
encore applicable en Côte d’Ivoire.
Contrairement à certains Etats issus du bloc AOF comme le Sénégal et le Bénin qui ont
adopté une nouvelle réglementation relative au domaine public, la Côte d’Ivoire n’innove pas.
Elle reproduit la réglementation coloniale issue du décret du 29 septembre 1928, laquelle fait
une distinction entre le domaine public naturel (1) et le domaine public artificiel (2).
Il s’agit du rivage de la mer jusqu’à la limite des plus hautes marées ainsi qu’une zone de 100
mètres mesurée à partir de cette limite. Tel qu’identifié, le domaine public maritime pose le
problème de sa consistance et de sa délimitation.
La procédure de délimitation s’ouvre avec l’arrêté du Ministre en charge des travaux publics
(actuellement, le Ministère des infrastructures Économiques) qui désigne une commission de
délimitation comprenant des agents de l’administration et des techniciens (géomètre du
service topographique).
En cas d’annulation de l’acte, le propriétaire lésé retrouve son bien et peut même obtenir une
indemnisation.
Lorsque la délimitation est régulière, il n’y pas lieu d’accorder une indemnité aux
propriétaires dont la maison ou la propriété est restée dans les limites du domaine public.
Concernant sa consistance, le domaine public maritime est constitué du rivage de la mer, du
plateau continental, des eaux intérieures et du sous-sol de la mer compris entre la limite haute
du rivage.
Ce domaine comprend :
- les cours d’eau navigables ou flottables dans les limites déterminées par la hauteur des eaux
coulant à plein bord avant de déborder ainsi qu’une zone de passage de vingt-cinq (25) mètres
de large à partir de ces limites sur chaque rive et sur chacun des bords avant des îles ;
- les sources et cours d’eau non-navigables ni flottables dans les limites déterminées par la
hauteur des eaux coulant à plein bord avant de déborder ;
- les lacs, étangs et lagunes dans les limites déterminées par le niveau des plus hautes eaux
avant le débordement avec une zone de vingt-cinq (25) mètres de large à partir de ces limites
sur chaque rive extérieures et sur chacun des bords des îles ;
- les nappes aquifères souterraines, quelle que soient leur provenance, leur nature et leur
profondeur.
B- La définition synthétique
Aux biens énumérés comme faisant partie du domaine public, l’article premier du décret de
1928 ajoute les biens de toute nature que le Code civil et les lois françaises déclarent non-
susceptibles de propriété privée.
Mais que recouvre cette notion de biens insusceptibles de propriété privée ? Au-delà des
controverses que cette question peut susciter, il faut simplement préciser que la définition
synthétique vient rappeler que l’énumération n’est pas exhaustive. Avec cette approche, le
législateur a la possibilité tout comme la jurisprudence, d’allonger la liste et d’élargir le
champ des biens du domaine public en tenant compte des besoins de l’Etat et des collectivités
territoriales.
C’est chose faite par exempte avec la loi n° 2002-102 du 11 février 2002 relative à la création,
à la gestion et au financement des parcs nationaux et des réserves naturelles.
En son art. 7, la loi précise que “les réserves naturelles intégrales et les parcs nationaux font
partie du domaine public inaliénable de l’Etat”.
L’alinéa 3 dispose que “le domaine public des réserves naturelles intégrales et des parcs
nationaux comprend, selon le cas indistinctement le domaine public terrestre, maritime,
lagunaire, fluvial ou aérien”.
Comme on le constate, l’objectif de la loi est la volonté de l’Etat de conférer aux biens
fonciers des parcs nationaux et réserves naturelles, la domanialité publique afin d’assurer leur
gestion durable.
En milieu urbain, plus qu’en zone rurale, la gestion du domaine public fait intervenir plusieurs
acteurs (Etat et collectivités territoriales) qui entretiennent des relations de complémentarité.
Mais avec l’avènement des collectivités territoriales, il faut pouvoir établir une distinction
entre le domaine public e l’Etat et celui des collectivités territoriales dès lors que l’art. 90 de
la loi n° 2012-1128 du 13 décembre 2012 portant organisation des collectivités territoriales
dispose que "le domaine des collectivités territoriales comprend le domaine public et le
domaine privé".
Les textes, ci-dessus fixent les règles actuelles de répartition des biens entre l’Etat et les
collectivités territoriales (A). Mais au-delà, il faut un mécanisme d’actualisation régulière du
fichier des biens des deux entités afin d’éviter les conflits de compétence (B).
475. II résulte de l’art. 91 de la loi du 13 décembre susvisée que le domaine public des
collectivités territoriales comprend :
1) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et qui ont reçu, de droit ou de
fait, une affectation comme rues, routes, places et jardins publics.
En sont exclus, les ouvrages ci-dessus énumérés dont la création et l’entretien incombent à
l’Etat ou à une autre collectivité territoriale ;
2) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et qui supportent des ouvrages
d’intérêt public chaque fois que la charge incombe à la collectivité territoriale ;
3) les parcelles situées sur le territoire de l’entité décentralisée et constituant l’assiette d’un
ouvrage prévu aux plans d’aménagement ou d’urbanisme régulièrement approuvés ou ayant
fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique
4) tous les autres biens compris dans le domaine public lorsqu’ils ont été transférés à la
collectivité territoriale conformément aux dispositions légales et règlementaires relatives au
domaine public.
De ce qui précède, il faut retenir que le critère géographique prit isolement semble inopérant
pour déterminer le lien de rattachement du bien à l’Etat ou à la collectivité, car un bien public
situé sur le territoire d’une collectivité territoriale donnée peut appartenir à une autre
collectivité ou à l’Etat dès lors que sa création ou son entretien incombe à ce dernier.
Dans la pratique, la distinction entre le domaine public de l’Etat et celui des collectivités
territoriales dans l’espace urbain, n’est pas toujours précise. Aussi, importe-t-il que les
collectivités territoriales et l’Etat unissent leurs efforts afin que leur domaine public respectif
soit précisément inventorié pour une gestion plus efficace.
Le décret n° 84-852 du 4 juillet 1984 portant déclaration des voiries et des réseaux divers
d’intérêt national et d’intérêt départemental dans les limites des communes autres que celles
composant la ville d’Abidjan permet pour les vingt-sept (27) communes citées, de préciser le
statut du domaine public de chaque collectivité par rapport à l’Etat. C’est une avancée
significative mais insuffisante dans la mesure où ce texte ne prend en compte que la voirie et
les réseaux divers.
Aujourd’hui, la Côte d'Ivoire compte cent quatre-vingt- dix-sept (197) communes, quatorze
(14) districts, trente et une (31) régions et cinq cent neuf (509) sous-préfectures.
C’est le lieu de relever que la loi déterminant les limites de chaque commune ou collectivité
devrait également inventorier les biens publics de chaque entité afin que leurs gestionnaires
aient une idée précise de l’assiette des domaines tant publics que privés. C’est un gage de
bonne gouvernance.
L’inventaire permettrait à chaque acteur — Etat, collectivités territoriales et usagers —
d’affirmer et d’exercer ses droits dans le respect des textes.
Par ailleurs, dans le cadre de la politique de décentralisation qui emporte gestion des entités
territoriales par des élus locaux, les populations apprécieraient à la juste valeur l’idée d’avoir
un seul interlocuteur quant aux actes portant sur un bien public en milieu urbain.
La protection du domaine public (B) sera analysée après avoir étudié l’utilisation de celui-ci
(A).
Dans le premier cas, il s’agit du domaine public affecté au service public (1), contrairement à
celui qui est utilisé par les administrés (2).
1- Le domaine public affecté au service public
Lorsque la personne publique utilise elle-même son domaine a priori cela ne pose pas de
problèmes particuliers. Cependant, l’administration propriétaire ne doit pas en principe
détourner le bien public de son affectation.
Le concessionnaire peut également consentir des occupations du domaine public à des tiers et
percevoir des redevances.
Le domaine publie portuaire en est une parfaite illustrations. Ainsi, dans l’affaire qui a opposé
le PAA et la société E.A, la chambre administrative de la Cour Suprême dans l’arrêt n° 81
du 28 juillet 2010 a jugé que les actes par lesquels le PAA donne et retire une autorisation
d’occuper un bien immobilier du domaine public sont des actes administratifs par
détermination de la loi, que le contentieux qui en résulte relève de la chambre administrative
de la Cour Suprême suivant la procédure du recours excès de pouvoir ; dès lors, le juge des
référés et la Cour d’Appel sont incompétents pour en connaître.
Cette décision est riche d’enseignement. Au-delà de la concession du domaine public, les
juges précisent clairement que les actes pris en exécution de la convention par le
concessionnaire sont des actes administratifs par détermination de la loi.
La nature de ces actes est indépendante du statut d’entreprise privée du concessionnaire,
aspect juridique que la Cour d’Appel a ignoré, faisant prévaloir le caractère commercial de
l’acte pris par le PAA, société commerciale par la forme.
Dans les agglomérations, et même en dehors, certains biens sont directement affectés à
l’usage des administrés. La voie publique et le rivage de la mer pour ne citer que ces biens
sont des dépendances du domaine publiques plus utilisés en Côte d’Ivoire.
L’utilisation commune de ces biens est en principe libre, gratuite et égale pour tous.
La liberté d’utilisation
En principe, toute personne peut accéder librement au domaine public sans avoir besoin d’une
autorisation et sans limitation. C’est l’expression de la liberté d’aller et venir garantie par la
Constitution ivoirienne.
Cependant — c’est l’exception — cette liberté d’utilisation du domaine public ne fait pas
obstacle à la mise en place d’une règlementation. Ainsi, les mesures des autorités municipales
interdisant le stationnement des véhicules automobiles sur certains emplacements ou à
certains endroits sont compatibles avec la liberté d’utilisation du domaine.
L’utilisation du rivage de la mer des plans d’eau lagunaires et fluviaux constituant des
dépendances du domaine public, respecte le même principe de liberté. En effet, tout le monde
a le droit de circuler, de stationner et de se reposer sur le rivage de la mer.
Ce libre accès se trouve néanmoins contrarié dans son exercice par des personnes ou parfois
des communautés riveraines qui apposent des panneaux indiquant le caractère privé de la
plage. En dehors de tout acte de concession ou autorisation administrative, les auteurs de ces
indications, violent les libertés publiques.
Sur les plans d’eau lagunaire et fluviaux, la navigation est libre de sorte que l’administration
ne peut instituer un monopole au profit d’un concessionnaire chargé de l’exploitation des
transports lagunaires au détriment de transporteurs privés n’ayant pas de lien de droit avec
l’Etat ou la collectivité territoriale.
La gratuité de l’utilisation
Le principe de gratuité est la contrepartie nécessaire de son usage collectif. Les particuliers
ont le droit de jouir du domaine public — jouir gratuitement — suivant les conditions
spéciales à chaque nature de biens.
Ainsi, en s’appuyant sur cet arrêté, les péages institués sur l’autoroute du Nord et le pont
HKB se justifient par leur utilité, le coût élevé des ouvrages et le mode de gestion utilisé. En
plus du péage, l’Etat peut instituer une taxe à l’essieu pour les véhicules routiers de fort
tonnage afin de compenser les dépenses élevées d’entretien et de renforcement de la voirie
occasionnées par la circulation de ces véhicules.
C’est l’une des manifestations du principe d’égalité des citoyens devant la loi ou les charges
publiques. Les personnes utilisant une même dépendance du domaine public sont traitées sur
un pied d’égalité. Elles ont les mêmes droits.
Ainsi, l’égal traitement des citoyens dans l’utilisation du domaine public commande que les
autorisations de manifester sur la voie ou place publique ne peuvent être délivrées à certaines
associations ou groupements politiques et refusées à d’autres.
Toutefois, pour des raisons de sécurité publique voire de prévention des troubles à l’ordre
public, des discriminations peuvent être instituées entre les manifestants.
Ainsi, le principe d’égalité comporte des exceptions qui visent les usagers dont la situation
n’est pas identique ou lorsqu’un intérêt général le justifie.
C’est dans ce cadre que dans l’agglomération d’Abidjan, des couloirs sont spécialement
réservés aux autobus et aux véhicules des services d’urgence.
Par occupation privative, il faut entendre l’occupation par une personne physique ou morale
d’un terrain faisant partie du domaine public, d’une dépendance de la voirie de sorte que cette
utilisation, empêche au même moment, l’usage de ladite parcelle, à toute autre personne,
rompant ainsi la liberté et l’égalité de tous les citoyens dans l’utilisation du domaine public.
Cette occupation personnelle est soumise à autorisation. Elle est précaire et constitue une
source de revenus pour les Collectivités.
De ce texte, deux grandes formes d’occupation sont envisagées, celle issue d’un acte
unilatéral ou permission de voirie ou celle résultant d’une convention ou concession de voirie.
L’une et l’autre forme obéissent au même principe de précarité qui caractérise l’utilisation
privative du domaine public. En Côte d'Ivoire, les deux formes sont connues avec une
prédominance de la permission de voirie.
Les propriétés privées sont placées sous la protection des tribunaux. Ainsi, lorsqu’un
propriétaire subit un préjudice — empiètement ou dégradation — il ne peut se faire justice
lui-même. Il doit obtenir du tribunal une condamnation du responsable du dommage. Une
telle procédure n’est pas compatible avec les nécessités de la protection du domaine public.
Si une route est obstruée ou une dépendance de la voirie est occupée irrégulièrement par des
constructions, il n’est pas possible d’attendre la fin du procès pour rétablir la circulation ou
l’ordre public qui est troublée.
Pour ce faire, le législateur a prévu une protection pénale du domaine public (1) à laquelle
s’ajoute une protection civile (2).
L’art. 8 du décret du 29 septembre 1928 dispose que les infractions à la règlementation sur le
domaine public “sont déférées aux tribunaux de simple police et passibles de peines de 1 à
500 frs d’amende”.
De façon générale, la police nationale tend à assurer le maintien de l’ordre, de la sécurité, de
la salubrité et de la tranquillité publique. Mais à côté de celle-ci, est instituée une police
spéciale dite police de la conservation qui a pour but la protection de l’intégrité du domaine
public contre les dégradations.
Dès lors, une distinction doit être faite entre la protection contre les dégradations (a) et celle
mise en œuvre contre les occupations sans titre(b).
En Côte d’Ivoire, il y a une seule catégorie qui se résume aux contraventions de voirie pour
toutes les atteintes portées au domaine public.
En cas de contravention de voirie, s’applique l’art. 8 du décret de 1928 qui prévoit une
amende ou lorsqu’il y a récidive dans les douze mois ou non-exécution des travaux prescrits
dans le laps de temps déterminé par le tribunal, l’amende peut être triplée et le contrevenant
peut encourir une peine d’emprisonnement, sans préjudice de la réparation des dommages
causés.
En tout état de cause, le contrevenant doit être condamné à la remise en l’état du bien
domanial, c’est l’action domaniale qui rattache au contentieux de la répression, la réparation
civile.
Le décret précité prévoit également que les travaux prescrits pour la remise en état du
domaine public peuvent être exécutés par l’administration aux frais du contrevenant.
Sont également des contraventions de voirie, toutes les occupations du domaine public sans
titre.
Est occupant sans titre, celui qui n’a jamais bénéficié d’une autorisation quelconque, ou
encore celui dont l’occupation donne lieu à un titre qui a expiré ou que le titre lui a été retiré.
L’occupation sans titre constitue donc une situation illégale et illicite à laquelle il doit être mis
fin.
- lorsque l’autorité ne dispose d’aucune voie pénale, administrative ou civile pour obtenir la
libération du domaine public ;
En dehors de ces cas, si la personne publique procède à une expulsion sans recours au juge,
elle commet une voie de fait qui engage sa responsabilité.
Celle-ci résulte de deux principes dégagés par les textes et la jurisprudence, ce sont
l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité du domaine public.
Une personne privée peut disposer, dans le respect de la loi, comme elle le veut de la propriété
de ses biens qui peuvent être aliénés. Il n’en va pas de même quant aux biens relevant du
domaine public.
En France, le Code général de la propriété des personnes publiques dispose que « les biens
des personnes publiques (...) qui relèvent du domaine public sont inaliénables et
imprescriptibles ».
Plus récemment, la loi n° 84-1244 du 8 novembre 1984 portant régime domanial des
communes et de la ville d’Abidjan, précisera que “le domaine public de la commune ou de
la ville d’Abidjan est inaliénable et imprescriptible“.
Ce principe protège l’autorité administrative contre elle-même et contre les agissements des
particuliers. En effet, les actes de cession qui auraient été établis par l’administration sont
nuls, de même sont nulles de nullité absolue, les ventes conclues par erreur ou par fraude
entre particuliers et portant sur un bien du domaine public.
Selon l’art. 2262 du Code civil, un occupant même de mauvaise foi, devient propriétaire après
un délai de trente (30) ans.
Ainsi, selon le texte susvisé “le domaine privé des collectivités territoriales comprend les
biens meubles et immeubles n’ayant pas le caractère public et lui ayant été affectés“.
L’art. 93 précise que “les domaines public et privés de la collectivité territoriale sont soumis
au même régime juridique que le domaine de l’Etat. Ainsi, au contraire du domaine public,
le domaine privé de l’entité décentralisée peut être, aliéné, cédé et prescrit”.
Dans les agglomérations, chaque collectivité territoriale dispose d’un domaine qu’elle se
constitue conformément aux dispositions des lois et règlements en vigueur en la matière,
notamment les articles 202 à 205 de la loi n° 2003-489 du 26 décembre 2003 portant régime
financier, fiscal et domanial des collectivités territoriales.
Quels sont les modes de constitution de ce domaine privé (paragraphe 1) et comment les
entités décentralisées gèrent ledit domaine ? (paragraphe 2)
Ils peuvent soit s’engager dans la voie contractuelle (A), soit utiliser les modes exceptionnels
liés à leurs prérogatives de puissance publique (B).
En milieu urbain, l’Etat et les entités décentralisées peuvent devenir propriétaires d’immeuble
comme de simples particuliers par achats, échanges, donations ou legs.
Selon l’art. 204 de la loi susvisée, le domaine privé de la commune est constitué par transfert
ou cession des biens du domaine l’Etat, d’une autre collectivité territoriale, à titre onéreux ou
gratuit.
La cession ou le transfert des biens de l’Etat est autorisé par décret pris en Conseil des
ministres, soit à la requête de la collectivité territoriale, soit à l’initiative de l’Etat.
Les biens acquis dans ces conditions deviennent la propriété de la collectivité territoriale qui
en assure la gestion ou l’administration conformément aux lois et règlements en vigueur. Le
transfert est réalisé au moment de la création de l’entité décentralisée ou après.
Cependant, à défaut de Plan d’Urbanisme Directeur pour chaque ville ou commune de Côte
d’Ivoire, les gestionnaires des cités sont toujours confrontés à ces difficultés liées à
l’impossibilité de connaître la consistance de leur patrimoine privé.
Cette affaire met en exergue, les difficultés rencontrées dans la gestion des terrains urbains.
Le domaine privé de l’Etat et des collectivités territoriales est également constitué par
acquisition soit à titre gratuit à la suite de dons et legs reçus et acceptés, soit à titre onéreux
notamment par suite d’achat, d’échange, de marché.
L’acquisition d’un bien par une collectivité territoriale est décidée par une délibération du
Conseil et transmise à l’autorité de tutelle. Selon l’al. 2 de l’art. 218 de la loi n° 2003-489 du
26 décembre 2003, cette acquisition est conclue par le Maire, le Président du conseil ou le
Gouverneur.
Les biens obtenus dans ces conditions entrent définitivement dans le patrimoine de la
collectivité qui peut en disposer librement. Ainsi, les biens du domaine privé peuvent être
vendus dans les mêmes conditions que les biens appartenant à l’Etat.
Il faut distinguer à cet effet, les cessions forcées à la suite d’une procédure d’expropriation
pour cause d’utilité publique et les autres modes exceptionnels que sont la confiscation pénale
d’un bien foncier appartenant à un condamné, le droit de préemption consécutif à l’aliénation
d’un bien immobilier et la purge des droits coutumiers suivie de l’immatriculation au nom de
la personne publique.
Aujourd’hui, l’ordonnance du 2 juillet 2013 fixant les règles d’acquisition de la propriété des
terrains urbains et ses textes d’application déterminent les règles d’acquisition de la propriété
des terrains urbains (B), mettant un terme à la méthode de gestion antérieure (A).
Avant l’ordonnance du 2 juillet 2013, les modes d’attribution des terrains urbains étaient
d’abord la concession (1), ensuite la lettre d’attribution des terrains urbains (2) et enfin la
délivrance du certificat de propriété (3).
Après les opérations de morcellement, lesdits terrains sont mis à la disposition des opérateurs
immobiliers et des particuliers pour leur mise en valeur.
Les opérations de morcellement ou lotissement sont réalisées sur des terrains appartenant à
l’Etat ou aux collectivités territoriales (Adjamé, Abobo, Attiécoubé, Cocody, Koumassi,
Macory, Plateau, Port-Bouët, Treichville et Yopougon).
À Abidjan, les morcellements après aménagement sont quasiment réalisés sur des terrains
propriétés de l’Etat. Il s’agit des terrains ayant fait l’objet de purge des droits coutumiers,
conformément au décret n° 2013-224 du 22 mars 2013 et déjà immatriculer au nom de
l’Etat.
La délivrance de la lettre d’attribution ne peut porter que sur les terrains des lotissements
réalisé par la commune ou cédé à celle-ci. Le dossier de demande d’attribution de terrain à
usage d’habitation porte sur le domaine privé ; il est déposé auprès des services techniques de
la commune contre récépissé. La commune a également le pouvoir de retrait des lots à usage
d’habitation insuffisamment ou non mise en valeur.
À partir de la loi n° 2002-156 du 15 mars 2000 partant loi de finance de l’année 2000, ces
conditions de transfert de la propriété de l’Etat au profit des acquéreurs ont été simplifiées
pour les terrains urbains immatriculés au nom de l’Etat.
À Abidjan, toute mise à disposition commence par le paiement préalable par l’acquéreur à la
recette des domaines du prix de vente du terrain et des diverses taxes foncières. Ce qui n’est
pas le cas dans les autres agglomérations.
Pour les terrains à usage d’habitation des agglomérations autres qu’Abidjan leur attribution
est faite par une commission présidée par le Préfet pour le chef-lieu de département et par le
Sous-préfet pour le chef-lieu de la Sous-préfecture.
La procédure d’attribution commence par plusieurs opérations qui sont la réception des
dossiers de demande à la Préfecture ou à la Sous-préfecture selon le cas ; le contrôle et
l’examen des dossiers, le choix des demandeurs à satisfaire, l’envoi d’une lettre de promesse
d’attribution aux attributaires retenus, le paiement des frais requis et la remise de la quittance
de paiement à la Préfecture ou à la Sous-préfecture.
Ces opérations débouchent sur la délivrance de la lettre d’attribution par le Préfet ou le Sous-
préfet, Président de la commission. L’attributaire est invité également, par cette lettre à
déposer dans un délai de quatre mois, au service du domaine urbain du ministère chargé e la
construction et de l’urbanisme à Abidjan, un dossier technique de bornage-morcellement
dressé par un géomètre privé agréé, en vue de l’obtention d’un arrêté de concession
provisoire. Il est prescrit que l’installation sur les lieux est subordonnée à l’obtention de cet
arrêté.
Il est aussi indiqué dans la lettre d’attribution qu’aucune cession du lot n’est admise avant
l’obtention de l’arrêté de concession provisoire, voire du titre foncier. La lettre d’attribution
ne constitue pas un titre de propriété.
Ils sont personnels à ceux qui les exercent et ne peuvent être cédés à quelque titre que ce soit.
Se pose alors la question de la validité d’une telle transaction quand on sait que de
nombreuses acquisitions de terrains urbains se réalisent sur des terrains dits villageoises.
Il s’agit des villages qui ont été phagocytés par la ville ou la commune. Cependant, dans la
conscience des populations originaires de ces villages, l’espace d’habitation demeure sous
l’emprise des règles coutumières quand bien même ces villages sont dans le périmètre urbain
ou les règles d’urbanismes s’imposent à tous sans distinction.
À défaut de plan d’urbanisme directeur dans la plupart des grandes agglomérations, c’est au
vu et au su de tout le monde que ces morcellements parcellaires sont réalisés et cédés aux
éventuels acquéreurs.
Lorsque le lotissement a été approuvé par le Ministère chargé de la Construction et de
l’Urbanisme, l’appropriation du terrain cédé par un détenteur coutumier de droit foncier se
fait conformément à la pratique administrative qui nécessite d’abord des formalités au niveau
du village consistant en l’établissement d’une attestation villageoise et en l’inscription dans
un registre de toutes les attributions ou mutations qui sont effectuées à partir du “lotissement
villageois”.
Nombreux sont les acquéreurs qui sont dans l’attente d’une régularisation au niveau du
lotissement pour entamer la procédure qui doit leur permettre d’avoir le titre définitif de
propriété.
L’art. 36 de l’annexe fiscale de la loi n° 2002-156 du 15 mars 2002 portant loi de finance
de l’année 2002 permettait d’établir le titre de propriété d’un terrain urbain sans recourir à la
mise en valeur.
- les détenteurs d’actes administratifs de vente émanant de l’ex Direction du contrôle des
Grands
Travaux (DCGTx), de l’ex Service des Ventes Immobilières (SVI), du Bureau National
d’Étude Technique et Développement (BNETD) ou de l’Agence de Gestion Foncière
(AGEF).
Dans la pratique, l’intervention de plusieurs acteurs pour l’établissement des différents actes
relatifs à l’attribution d’un terrain en milieu urbain constituait une source de difficultés dans la
gestion des terres.
À la lumière de ce qui précède et compte tenu des conflits fonciers quotidiens qui menacent la
paix sociale, le Ministère en charge de la Construction et de l’Urbanisme a pris d’autres
dispositions pour sécuriser la gestion du foncier par la mise en place du guichet unique et la
reconnaissance d’un seul acteur dans la délivrance d’un seul acte qui consacre le transfert
d’un terrain issu du domaine foncier urbain de l’Etat à une personne privée, c’est l’Arrêté de
Concession Définitive (ACD).
L’appropriation des terrains par l’arrêté de Concession définitive sera examinée dans le cadre
de l’appropriation des terrains urbains.
De façon générale, la Direction du foncier rural assure les missions régaliennes de l’Etat qui
sont notamment : la gestion du domaine foncier rural de l’Etat, l’élaboration et la mise en
œuvre de la réglementation foncière, la participation à la mise en œuvre de stratégies de
gestion durable des ressources foncières et de l’espace rural sans oublier la participation à la
mise en place du cadastre rural.
À l’échelle locale, les opérations techniques relatives à la gestion du domaine foncier rural
relèvent de la compétence de chaque direction départementale du Ministère chargé de
l’agriculture. La direction départementale de l’Agriculture est véritablement l’interface entre
l’Administration territoriale et les usagers.
L’ensemble de ces tâches sont accomplies par le conservateur de la propriété foncière et des
hypothèques à qui la réglementation assigne trois tâches principales : création des titres
fonciers, inscription sur lesdits titres de droits réels y afférant et conservation des documents
d’archives relatifs aux titres fonciers créés.
Quant au service du cadastre, son rôle consiste à constituer des documents officiels qui
donnent des informations sur le patrimoine immobilier national.
À ce titre, plusieurs missions lui sont assignées : créer et conserver le cadastre en zones
urbaines et rurales, coordonner les activités cadastres des services extérieurs de la Direction
Générales des impôts, coordonner les opérations d’assiette, contrôler l’impôt foncier, etc.
À l’échelle locale, les préfets et sous-préfets jouent notamment un rôle important en matière
d’attribution des terres et de délivrance des titres d’occupation foncière. Par exemple, les
comités de gestion foncière rurale institués par le décret n° 99-593 du 13 octobre 1999 sont
créés par arrêté préfectoral et présidés par le sous-préfet.
De même en ce qui concerne l’attribution des terres du domaine coutumier, c’est le préfet qui
signe le certificat foncier et assure sa publication au journal officiel. Il lui revient également
de transmettre au Ministre chargé de l’agriculture, les requêtes d’immatriculation à lui
adresser.
C’est la raison pour laquelle son intervention a toujours été nécessaire en matière d’attribution
des terres pour vérifier si la parcelle de terre demandée n’est pas située dans le domaine
forestier classé de l’Etat.
Créée par le décret n° 2016-590 du 3 août 2016, l’Agence de gestion Foncière Rurale est une
structure d’exécution dotée de la personnalité morale qui a pour mission de mettre en
œuvre la loi n° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural et ses textes
subséquents.
À ce titre, elle est chargée des tâches pratiques qui antérieurement étaient dévolues à la
Direction du Foncier rural et du cadastre. Il s’agit entre autre multiples tâches :
- de mobiliser les ressources pour la mise en œuvre des actions de sécurisation du domaine
foncier rural ;
- de conseiller les pouvoirs publics sur toutes les questions liées à la gestion du domaine
foncier rural ;
L’AFOR comprend deux organes qui sont le Conseil de surveillance et la Direction Générale.
Quant à la Direction Générale, elle assure au quotidien l’exécution des décisions prises par le
Conseil de surveillance.
La mise en place de l’AFOR est attendue dans l’espoir qu’elle pourra contribuer à sécuriser la
propriété foncière en milieu rural.
1- Organisation
Le comité de gestion foncière rurale est organisé par le décret n° 593 du 13 octobre 1999.
Créé dans chaque sous-préfecture par arrêté préfectoral, il est composé d’une part, des
représentants des Ministères et services qui interviennent dans la gestion des ressources
foncières, d’autre part des représentants des communautés rurales, des villages et des autorités
coutumières, désignes pour une période de trois ans renouvelable.
Le comité de gestion foncière rurale est présidé par le sous-préfet. Celui-ci est chargé de créer
des comités villageois de gestion foncière rurale, chargés de la gestion des terroirs. Il est
également chargé de transmettre au préfet les dossiers de délibération.
La décision finale revient au préfet qui dispose alors de deux semaines pour donner une suite
aux avis et propositions formulés par le comité.
Si le décret précité a le mérite de fixer une répartition paritaire des acteurs étatiques et des
représentants des communautés rurales au sein du comité, il faut veiller à éviter une sous-
représentation des femmes et des jeunes.
Car, au regard des tenures foncières coutumières, la gestion des terres est plutôt une
prérogative des autorités foncières coutumières (chefs de famille, chefs de villages, chefs de
lignage, etc.).
2- Attributions et fonctionnement
La création des comités de gestion foncière rurale répond au souci de l’Etat d’associer
davantage les populations locales à la gestion des ressources foncières.
Elle est en corrélation avec le Programme National de Gestion des Terroirs (PNGTER) dont
l'un des objectifs majeurs est d’accroître la participation et la responsabilisation des
populations dans la gestion de leur terroir.
Cependant, leur rôle en pratique était plus consultatif que décisionnel et se limitait qui plus
est, à l’attribution des terres.
Le décret précité portant organisation et attributions des comités de gestion foncière rurale
associe non seulement les populations au processus décisionnel mais aussi, il élargit le
domaine d’intervention desdites populations dans la gestion des ressources foncières.
Car à travers les comités mis en place, les représentants de ces populations interviennent
obligatoirement avec voix délibératives, sous forme d’avis conforme, sur des questions telles
que la validation des enquêtes officielles de constat de droits fonciers coutumiers, les conflits
non résolus au cours des enquêtes foncières, les demandes de cessions de droits fonciers
coutumiers, l’implantation des projets d’urbanisation ou des opérations de reboisement, etc.
Le Comité peut également être saisi pour avis simple par les autorités compétentes de toute
question relative au domaine foncier rural.
Les comités constituent les organes essentiels de gestion foncière rurale ; ils sont censés être
la cheville ouvrière en matière d’enquêtes foncières et de délivrance des certificats fonciers,
l’objectif visé étant la sécurisation foncière. Mais après plus d’une décennie de mise en œuvre
de la réforme foncière du 23 décembre 1998, peu de comités ont été créés. La lenteur dans la
mise en place des comités constitue naturellement une tentative notable au processus de
sécurisation foncière.
- suivre la mise en œuvre de la loi du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural ;
- suggérer les études nécessaires à une bonne évolution du domaine foncier rural ;
La Commission foncière rurale est composée des représentants des principaux acteurs du
secteur agricole : Ministères techniques, Institution nationales, producteurs agricoles, autorités
coutumières et religieuses, centres de recherche universitaire, partenaires techniques et
financiers du monde rural.
La Commission foncière rurale est dotée, d’une part, d’un secrétariat permanent assuré par le
Directeur du foncier rural du Ministère de l’Agriculture, d’autre part, de deux groupes de
travail (comité juridique et comité technique).
Malgré ses missions et sa composition qui suggère une participation effective des acteurs
concernés à la gestion du domaine foncier rural, la Commission ne constitue qu’un simple
organe consultatif.
Elle n’a guère l’autonomie, nécessaire pour donner une vision extérieure de la gestion du
domaine foncier rural. Car le Ministère de l’Agriculture qui est chargé de la gestion du
domaine foncier rural joue un rôle déterminant au sein de la commission apparaissant à la fois
comme juge et partie.
À ces limites s’ajoute le caractère non opérationnel de la commission. Alors qu’elle est censée
se réunir au moins une fois tous les six mois, la Commission foncière rurale n’a eu qu’une
seule séance de travail depuis sa création.
1- Les directions
Ainsi, la direction du domaine urbain assure la gestion du domaine de l’Etat en milieu urbain.
Cette compétence emporte des tâches plus spécifiques d’instruction de dossier, de rédaction
d’actes et de suivi de la mise en œuvre de la règlementation et des procédures de gestion
foncière.
Les attributions ainsi énoncées ont pour but de permettre d’assurer une gestion rationnelle et
non conflictuelle des terrains urbains. Mais dans la pratique, l’on observe une prolifération et
une récurrence des conflits fonciers liées essentiellement à l’inobservation de la foncière en
vigueur.
2- Les services
Au titre des services, il faut retenir le service de la recherche du foncier pour les grands
projets de l’Etat, le service de vérification et de sécurisation des actes administratifs et le
service du Guichet unique du foncier et de l’habitat. Ces services sont rattachés au cabinet du
Ministre en charge de la construction et de l’urbanisme.
C’est une activité primordiale quand on sait que l’extension des zones urbaines s’opère sur les
terres appartenant aux personnes exerçant sur lesdites terres un droit coutumier. À la fin des
opérations d’aménagement foncier, le service de la recherche du foncier, en liaison avec les
aménageurs et l’Agence de Gestion Foncière, va informer les populations sur la disponibilité
de terrains urbains et préciser leurs modalités d’acquisition.
Ce service fait donc de la recherche-développement et gère une base de données sur les
ressources foncières de l’Etat.
À ce titre, il est chargé notamment de prospecter et de négocier les parcelles dédiées aux
projets de l’Etat, d’identifier les détenteurs des droits coutumiers sur l’ensemble du territoire
national et de tenir un répertoire de ceux-ci, de programmer les opérations de constitution de
réserves foncières sur le territoire national, etc.
- d’informer les usagers sur la constitution des dossiers de demandes d’actes administratifs sur
le foncier et l’habitat ;
- de transmettre pour traitement les dossiers de demandes d’actes aux services compétents ;
Il gère le domaine public de l’Etat à travers la Direction du domaine public. Cette Direction
est chargée de :
II gère le domaine public et le domaine privé de l’Etat. Il est chargé de la gestion patrimoniale
des biens de l’Etat. Le Ministère en charge du Budget intervient à travers la Direction
générale des impôts dont la mission consiste à :
À côté de ces structures décentralisées que sont les Districts et les Communes (A), il faut
mentionner également, les organismes qui ont été spécialement créés pour faire face à une
situation donnée, ce sont les structures parapubliques (B).
Elle consiste notamment à prendre des mesures pour empêcher l’occupation anarchique et
illégale des terrains ainsi que la prolifération des quartiers précaires, veiller au respect par les
villes, les communes, les promoteurs immobiliers et les particuliers, des schémas et plans
d’urbanisme et d’aménagement approuves et en vigueur, etc.
De 1987 à 1996, la Direction des Ventes Immobilières (DVI) s’est occupée de l’aménagement
et de la vente des terrains. Cette Direction est devenue plus tard le Service des Ventes
Immobilières (SVI) lequel sera rattaché au Cabinet du Ministère du Logement, du Cadre de
Vie et de l’Environnement.
Créée en 1999, l’AGEF prend la relève pour assurer la gestion du patrimoine foncier après la
SETU, la DVI et le SVI. Agissant pour le compte de l’Etat, l’Agence de gestion foncière
(l’AGEF), est chargée de constituer des réserves foncières et de faire des aménagement
fonciers sur toute l’étendue du territoire ivoirien en confiant ces opérations à des sociétés
d’aménagement par voie de concession.
Dans le cadre de cette mission, elle procède à la purge des droits coutumiers conformément
au décret n° 2013-224 du 22 mars 2013 qui réglemente la purge des droits coutumiers sur le
sol pour intérêt général.
Cependant, dans la pratique, l’AGEF rencontre des difficultés dans l’accomplissement de ses
missions en raison de l’interférence non seulement du Ministère de ta Construction et de
l’Urbanisme qui délivre à des opérateurs économiques des documents administratifs en
violation des textes en vigueur, mais également des personnes privées ou des promoteurs
immobiliers qui interviennent dans la chaîne foncière pour acheter directement des parcelles
de terrain aux détenteurs de droits coutumiers.
Ainsi, des personnes morales et/ou physiques, en dehors de l’Etat, de ses démembrements et
des structures créées pour gérer son domaine foncier, acquièrent des terres qui, en principe,
devaient d’abord être immatriculées au nom de l’Etat avant toute cession à un tiers.
Malgré ces difficultés, l’AGEF a à son actif plusieurs réserves foncières et concessions
d’aménagement. Dans la recherche d’une saine gestion des terres en milieu urbain, l’AGEF
constitue sans aucun doute, par son statut et ses missions, une structure salutaire en matière de
sécurisation des droits fonciers.
En Côte d'Ivoire, les opérations d’aménagement sont définies au niveau urbain comme rural
par divers plans. À partir du cadre général d’intervention défini par les plans, des actions
spécifiques vont être exécutées sur le terrain, ce sont les techniques de gestion (section
1). Des instruments de gestions sont également mis en place pour garantir les droits des
occupants des terres (section 2).
À côté de ces documents qui ont un caractère général (paragraphe 1), il faut retenir les
opérations d’urbanisme à travers le lotissement et la restructuration urbaine (paragraphe 2).
Ils comprennent souvent un état des lieux, une évaluation environnementale au regard du
développement durable. Ces documents sont périodiquement mise à jour dans le cadre de la
loi.
Il définit également le domaine urbain de l’Etat à soumettre à la purge des droits coutumiers
en vue de la constitution de réserve foncière nécessaire extension de la ville.
Le schéma directeur d’aménagement du territoire voté est valable pour cinq ans.
Cependant, il peut être révisé dans le but d’éventuelles améliorations, et ce, dans les mêmes
formes et conditions que celles prévues pour son élaboration.
Après son adoption, le schéma directeur d’aménagement du territoire est décliné en autant de
schémas directeurs régionaux d’aménagement qu’il existe de régions en Côte d’Ivoire.
Il apporte un cadre d’aménagement qui met un terme aux improvisations dans les villes. Il
définit les grands axes de développement de l’agglomération dans un contexte aussi large que
possible qui permet de prendre en considération les nécessités de l’environnement humain,
économique, biologique ou naturel.
Dans ces conditions, le plan est important parce qu’il annonce et par ce qu’il prescrit, mais il
l’est encore plus par ce qu’il empêchera de faire, ici ou là, pour des raisons de sauvegarde
durable des espaces naturels.
Le plan d’urbanisme directeur peut être révisé dans les mêmes formes et conditions que celles
prévues pour son élaboration.
A- Le lotissement
Le lotissement est une opération de création volontaire d’un tissu parcellaire qui consiste à
diviser un terrain en plusieurs parcelles destinées à la construction.
Le lotissement est le mode d’aménagement du sol en milieu urbain qui s’appuie sur un
principe (1) à partir duquel les différents types de lotissements seront déclinés (2).
1- Le principe du lotissement
La réalisation de l’opération de lotissement comporte deux étapes qui sont d’une part,
l’élaboration du plan de lotissement, d’autre part, la procédure de lotissement sur le terrain ou
mise en application du plan.
Le plan de lotissement est le résultat d’une recherche ou étude intégrant les contraintes les
plus diverses.
L’analyse de ces contraintes fait appel à plusieurs données qui ont trait notamment à la
vocation de la zone, aux données générales de l’insertion dans la ville, à la densité de la
population, aux contraintes réglementaires, aux données géographiques et hydrogéologiques,
etc.
À la suite de cette étude, il faut procéder à l’élaboration proprement dite du plan dont les
principales étapes sont :
3°) Détermination des zones pouvant recevoir certains éléments du programme en fonction
des caractéristiques du relief,
6°) Mise au net et découpage parcellaire. En même temps que le dessin définitif du plan, sera
précisé, il faut établir le canevas de la réglementation (cahier de charges).
Après l’élaboration du plan, il faut passer à la mise en application. Il s’agit d’une procédure
qui comporte plusieurs étapes.
Dans ce cas, les procédures sont conduites par une commission présidée par le Maire.
Les règles de base du lotissement servent de boussole pour les différents types de lotissement.
Il est initié soit par le Sous-Préfet (lotissement public de l’Etat), soit par le Maire (lotissement
communal).
Le lotissement communal est également régi par la loi n° 2003-208 du 7 juillet 2003 portant
répartition et transfert de compétences de l’Etat aux collectivités territoriales et le Décret n°
2005-261 du 21 juillet 2005 fixant les modalités d’application de cette loi en matière
d’urbanisation et d’habitat.
Quant au lotissement privé, il est régi par le décret 70-294 du 13 mai 1970 relatif aux
lotissements privés. Le lotissement privé est initié par des personnes physiques ou morales qui
procèdent à des morcellements et à la vente de parcelles selon les règles en vigueur et sous le
contrôle du Ministère de la contraction.
Les lots peuvent avoir plusieurs destinations, soit d’habitation, de jardins ou d’établissements
industriels ou commerciaux.
Le Directeur Régional de l’urbanisme procède au contrôle des travaux avec l’aide des services
de la mairie ou de la Sous-préfecture.
B- La restructuration urbaine
Elle est régie par l’ordonnance n° 77-615 du 24 août 1997 relative aux opérations de
restructuration urbaine.
La décision de restructuration est prise en Conseil des ministres sur proposition du Ministre
chargé de l’Urbanisme. Le District a l’initiative et la réalisation de ces plans de restructuration
urbaine, après avis consultatif des villes et communes qui le composent et de la Région dont il
relève.
Le dossier foncier fait l’état des droits existants, du nouveau plan de lotissement, de l’état
futur des droits, du programme de relogement et de réinstallation des personnes et activités
devant être éventuellement déplacées. Le dossier dresses également la liste des propriétés et
parcelles dont l’expropriation et la reprise sont déclarées d’utilité publique. L’enquête
publique préalable à l’approbation du plan de restructuration vaut enquête de commodo et
incommodo.
Chaque immeuble à l’immatriculation fait l’objet d’une feuille ouverte dans le livre foncier.
L’ensemble des mentions ainsi consignées sur une feuille constitue le titre foncier lequel est
définitif, inattaquable et imprescriptible.
Chaque feuille est divisée en cinq sections destinées chacune à recevoir des mentions
spécifiques faisant l’objet de bordereaux analytiques inscrits sur le livre foncier suivant un
numéro d’ordre, avec précision de la date d’inscription.
Outre le livre foncier et les dossiers qui les accompagnent, la réglementation en vigueur
prévoit d’autres registres destines soit à la vérification de la suite de la procédure
d’immatriculation, soit à la constatation des demandes d’inscription sur les livres fonciers,
soit enfin à la communication des informations aux usagers.
B- Évolution
Au plan institutionnel, le livre foncier est tenu et mis à jour par les services de la conservation
foncière. En France par contre, dans les régions de l’Alsace et de la Moselle notamment, le
service du livre foncier est assuré au sein des tribunaux d'instance et dépend du Ministère de
la Justice.
Dans tous les cas, pour améliorer le fonctionnement des services de la conservation foncière
et faciliter l’accès des usagers aux informations du titre foncier, la tendance actuelle est à
l’informatisation de certaines données du livre foncier.
C’est dans cette optique que par ordonnance du 24 mars 2015, le Conseil des Ministres a
institué le livre foncier électronique. Cette option vise à accompagner le dynamisme des
transactions immobilières en sécurisant au mieux les données du livre foncier et en améliorant
l’accès aux informations qu’il contient.
Le livre foncier électronique réalise au moyen des nouvelles technologies de l’information et
de la communication, une centralisation des données relatives aux opérations
d’immatriculation et de publicité des droits réels effectuées par l’ensemble des conservations
foncières du territoire national. Il s’agit de cette façon de contribuer à l’amélioration de
l’environnement des affaires en Côte d’Ivoire, dans l’intérêt de l’Administration et du
contribuable.
Paragraphe 2 : Le cadastre
La définition, les missions et l’évolution du cadastre méritent d’être examinées (A), de même
que sa nature juridique (B). Il convient également de faire le rapprochement entre le cadastre
et le plan foncier (C).
Que recouvre la notion de cadastre (1) ? Et quelle est son évolution (2) ?
1- Définition et missions
Le cadastre peut être défini comme un ensemble de documents officiels donnant des
informations sur les propriétés bâties et non bâties et sur l’identité de leurs propriétaires. Au
sens large, c’est un inventaire de la propriété foncière dont il donne une description plus ou
moins détaillée en vue de répondre aux besoins individuels et collectifs de la société.
Cet inventaire ce fait généralement par l’établissement d’une documentation graphique (plans
cadastraux) et d’une documentation littérale contenue dans un registre. La mise en relation
des données graphiques et littérales se fait à travers l’utilisation d’un numéro d’identification
qui permet de passer de l’information graphique à l’information littérale.
Au sens strict, le cadastre affecte la forme d’un démembrement foncier établi par l’Etat.
- l’opération juridique qui a pour finalité de préciser le statut des terres de même que les droits
et obligations des propriétaires ou occupants.
- mission fiscale : détermination de l’impôt foncier à partir des déclarations souscrites par les
contribuables ;
II résulte des missions ci-dessus que la documentation graphique du cadastre comporte trois
éléments :
- le plan de titre foncier qui fait partie de l’annexe du livre foncier portant sur les
caractéristiques de l’immeuble et dont le caractère définitif dépend de l’accomplissement des
formalités de bornage réalisées en présence du géomètre assermenté du service de la
conservation foncière ;
- le plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage qui a pour objectif d’identifier les terrains
qui font l’objet de titres fonciers résultant de l’immatriculation ;
- le plan cadastral fiscal qui recense toutes les parcelles imposées et définit l’assiette de
l’impôt foncier.
- une meilleure connaissance des limites foncières ; ce qui facilite le règlement des conflits
fonciers, les études de planification et de développement et l’inventaire du domaine de l’Etat,
des collectivités et des particuliers ;
- la fiabilité des investissements, notamment en milieu rural où les droits fonciers coutumiers
sont souvent sujets à conflits ;
2- Évolution du cadastre
Cette volonté de prélèvement est à l’origine de l’impôt foncier. Mais bien évidemment,
l’imposition suppose que chaque portion de terres soit localisée, identifiée et validée. Or, cette
tâche n’est pas toujours aisée pour des raisons techniques, juridiques ou financières.
Consciente de cet obstacle, l’Administration coloniale a pris le décret du 20 mai 1955, lequel
a permis de procéder à l’immatriculation obligatoire de toutes les parcelles situées dans les
périmètres urbains à cadastrer ayant fait l’objet d’un plan d’urbanisme.
Si en milieu urbain, notamment à Abidjan, le cadastre a connu une application, il n’en est pas
de même en milieu rural. Il faut dire que contrairement au milieu urbain où du fait de la forte
pression foncière, le coût du cadastrage est facilement amorti par l’Etat, en milieu rural, il en
va autrement.
Pour remédier à cette situation, le Ministère de l’Agriculture a créé dès 2002 un service du
cadastre rural rattaché à la Direction du foncier rural. Ce service est notamment charge de la
délimitation des terroirs villageois laquelle constitue une étape vers la stabilisation des droits
coutumiers et le cadastrage des terres en liaison avec les services compétents du Ministère de
l’Économie et des Finances.
En d’autres termes, les documents cadastraux peuvent-ils par exemple, être utilisés par les
contribuables pour apporter la preuve de leurs prérogatives foncières ?
À cette question, il convient de répondre par la négative. En effet, les documents cadastraux
sont des documents purement administratifs qui décrivent des situations de propriété
apparentes ; ils ne peuvent en aucun cas constituer une preuve ou même une présomption de
propriété.
Il résulte de ce qui précède que le plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage n’a aucune
valeur juridique. Il en est de même du plan cadastral fiscal dont le caractère non contradictoire
exclut toute opposabilité aux tiers qui peuvent d’ailleurs le contester dans le cadre d’un
recours administratif.
En revanche, en ce qu’ils sont considérés comme faisant partie intégrante des données du livre
foncier, les plans de titre foncier sont opposables au tiers dès lors que les limites qu’ils
indiquent ont été reconnues et approuvées en présence du géomètre assermenté du Cadastre,
après une procédure contradictoire de bornage.
S’il est admis que les documents cadastraux ne peuvent établir la propriété, ils peuvent
cependant fournir un commencement de preuve de la propriété et des droits réels y relatifs.
En vue de collecter des données fiables sur l’occupation des terres en milieu rural, l’Etat a
initié depuis 1988, le Plan foncier rural. Le Plan foncier rural est une opération qui consiste en
une vaste enquête foncière menée en zone rurale sur la base de photos aériennes, complétées
par des enquêtes au sol.
Il vise notamment à faciliter le règlement des conflits fonciers, à constituer une base pour
l’aménagement et la gestion des terroirs villageois et à faciliter l’accès au crédit.
Après une phase pilote (1990-1996) suivie successivement d’une phase de consolidation
(1996-1997) et d’une phase d’extension (1997-1999), le plan foncier rural a couvert au total
neuf zones.
A la fin du projet en 2002, 1 117 000 hectares ont été délimités, 44 201 parcelles ont été
élevées, 708 villages ont été couverts pour une superficie numérisée s’élevant à 638 550
hectares.
- La mise au point d’un outil technique fiable et peu coûteux de levée de parcelles et de
recensement des droits, basé sur la cartographie ;
Après 2002, le plan foncier rural est devenu une composante du programme national de
gestion des terroirs et de l’équipement rural (PNGTER), programme visant à rationaliser
l’utilisation des ressources foncières par l’association et la responsabilisation des
communautés rurales dans la gestion de leur terroir.
À la différence du cadastre qui porte sur des parcelles aux délimitations plus précises et sur
lesquelles s’exercent des droits de propriété, le Plan foncier rural a pour objectif d’établir une
cartographie du territoire national.
Cette cartographie précise les limites foncières à l’intérieur de chaque terrain villageois et
recense pour chaque parcelle identifiée, l’ensemble des droits qui s’y exercent et les
détenteurs de ces droits.
De ce point de vue, le plan foncier rural apparaît comme un dispositif technique embryonnaire
du cadastre. En effet, la documentation graphique du Plan foncier rural comprend deux
éléments essentiels qui sont d’une part, le plan parcellaire et d’autre part, le plan du terroir.
Or, à l’analyse, le plan parcellaire s’apparente au plan de titre foncier du cadastre ; tandis que
le plan du terroir se rapproche du plan cadastral foncier ou tableau d’assemblage.
Faut-il en déduire que les documents du plan foncier rural ont la même valeur juridique que
ceux du cadastre ? Une telle déduction ne semble guère possible, car les documents
cartographiques du plan foncier rural sont réalisés sans les éléments essentiels du cadastre que
sont le bornage, la présence d’un géomètre assermenté et le dossier technique de chaque plan
de parcelle.
Il résulte de ce qui précède que si les résultats du plan foncier rural présentent des avantages
certains, leur articulation à la réglementation foncière n’a pu se réaliser donnant ainsi la
sensation d’une symphonie inachevée.
Ainsi, aux termes de l’article 119 de la loi béninoise, la confirmation des droits fonciers en
milieu rural se fait principalement à partir du plan foncier rural.
C'est ici, que s'achève la première partie (La gestion du patrimoine foncier) de ce cours de
droit foncier. Vous pouvez consulter l'introduction ou la deuxième (les modalités d’accès à
ma terre).