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COURS :
Droit de l’environnement
2019
I. Introduction générale
- Objectifs et intérêt du cours
- Méthodologie et examen
- Approche conceptuelle (environnement et développement durable)
- Droit de l’environnement et droit à l’environnement
II. Les sources du droit de l’environnement
Section 1 : Les sources internationales
Section 2 : Les sources internes
III. Les principes fondamentaux du droit de l’environnement
Section 1 : Principe d’action préventive et de précaution
Section 2 : Le principe de pollueur-payeur
Section 3 : Principe des responsabilités communes mais différenciées
Section 4 : Le principe de la participation et de l’information
Section 5 : Le principe de l’interdépendance entre l’environnement et le développement
Section 6 : L’obligation de prendre en compte l’environnement
IV. Etude d’impact environnemental et la fiscalité environnementale
V. Les institutions et régimes de protection de l’environnement en RDC
VI. La justiciabilité du droit à l’environnement en RDC
VII. Le cadre légal et règlementaire de la conservation de la nature
VIII. Le cadre légal et règlementaire du secteur forestier
IV. Le cadre légal et règlementaire des mines et hydrocarbures
X. La protection juridictionnelle de l’environnement
IX. Conclusion
3
I. Introduction générale
En effet, dans la longue et laborieuse évolution de la race humaine sur la terre, le moment est
venu où grâce aux progrès toujours plus rapides de la science et de la technologie, l’homme a
acquis le pouvoir de transformer son environnement de plusieurs manières et à une échelle sans
précédent. La conciliation entre le naturel et l’artificiel pose de difficultés énormes pour le bien-
être et la pleine jouissance. Prieur Michel et Doumbé-Billé Stéphane notent avec raison que « le
pouvoir qu’a l’homme de transformer le milieu dans lequel il vit, s’il est utilisé avec
discernement, peut apporter à tous les peuples les bienfaits du développement et la possibilité
d’améliorer la qualité de vie. Utilisé abusivement ou inconsidérément, ce pouvoir peut causer
un mal incalculable aux êtres humains et à l’environnement ».1
1
Prieur Michel et Doumbé Billé Stéphane Recueil francophone des traités et textes internationaux en droit de
l’environnement (1998) Bruylant Bruexelles p. 27.
4
Intérêts du cours
Cet enseignement est d’une importance capitale car il permet aux étudiants tout au long du
cursus académique à acquérir des connaissances des règles et principes juridiques se rapportant
à la protection de l’environnement et la conservation de la nature. Ils sont ainsi outillés à
participer efficacement dans la lutte contre les atteintes à l’environnement en se servant des
moyens de droit. Ils sont ainsi préparés à aborder les questions relatives aux contentieux
environnementaux comme avocats, magistrats ou experts. Par une analyse jurisprudentielle
comparative, il sera possible pour eux de construire une jurisprudence fouillée en matière
environnementale en vue d’éclairer la lanterne de tous.
2
Déclaration faite en Français et traduite en Anglais. Wolgang E. Burhene et W.A Irwin, World Charter of Nature
(1983) Berlin, Erich Schmitt Verlag Gmblt, p. 14.
5
Méthodologie et examen
Tout au long de l’enseignement, l’apprenant pourra occuper une place centrale car solliciter à
partager ses connaissances avec son auditoire et son enseignant. Cela sera favorisé par les
moyens ci-après :
´ Visualiser et discuter un court documentaire sur l’environnement et le changement
climatique ;
´ Présenter un fichier power point ;
´ Examiner quelques dispositions légales relatives à la protection de l’environnement et
la conservation de la nature en RDC ;
´ Discuter et appliquer les textes juridiques à des cas particuliers/sessions des travaux
pratiques ;
´ Un instrument de travail version word et une page bibliographique seront mis à la
disposition des étudiants pour lecture.
Pour ce qui est de l’examen, il sera organisé des séances de travaux pratiques en groupe et un
examen à notes formées à la fin des enseignements. Seront admis à l’examen, les étudiants qui
auront réalisé les ¾ des présences au cours et régulièrement inscrits.
Pour bien cerner les contours du droit de l’environnement, un éclaircissement conceptuel mérite
d’être fait.
L’environnement est une notion « caméléon » qui exprime fortement des passions, des espoirs,
des incompréhensions. L’environnement qualifie au jour d’aujourd’hui une multitude des
réalités : une idée à la mode, un luxe pour pays riches,3 un mythe, … Utilisé parfois à tort et à
travers la notion perd tout son sens.
3
L’environnement est devenu avec la notion de développement durable et la conférence des Nations Unies sur
l’environnement et le développement (Rio, 1992) une préoccupation non seulement des pays riches mais aussi des
pays pauvres. Cfr. Ignacy Sachs, L’écodéveloppement : stratégies pour le XXIème siècle, Syros, Paris 1997 in
Michel Prieur Droit de l’environnement, (2001) 4ème éd. Dalloz, Paris, p. 1.
6
Prieur4 note que l’environnement est un néologisme récent dans la langue française qui exprime
le fait d’environner, c'est-à-dire d’entourer. Issu du substantif anglais « environment » et de son
dérivé « environmental », il fait son entrée dans le grand Larousse de la langue française en
1972 : « ensemble des éléments naturels ou artificiels qui conditionnent la vie de l’homme ».
Le terme « environnement » ne fait pas encore l’objet d’une définition générale universellement
admise en droit positif. Quelques textes nationaux en donnent des définitions partielles ou
limitées à un objet précis, mais bien rares sont les documents juridiques internationaux de
caractère contraignant ou non qui le définissent de façon globale. Il ressort de ce textes que
chaque espèce vivante qu’elle soit végétale, animale ou humaine a besoin des conditions
naturelles fondamentales pour garantir son existence et son développement. C’est dans le
milieu physique ou biologique qu’elle peut les retrouver ou en tous cas les chercher.
Dans son Avis consultatif du 8 Juillet 1996 sur la licéité de la menace ou l’emploi d’armes
nucléaires, la Cour Internationale de justice note que « l’environnement n’est pas une
abstraction, mais bien l’espace où vivent les êtres humains et dont dépendent la qualité de leur
vie et leur santé, y compris pour les générations à venir. »5 C’est donc de manière
complémentaire que la Cour Permanente d’Arbitrage note que « le terme environnement
englobe l’air, l’eau, la terre et la flore, les écosystèmes6 et les sites naturels, la santé et la sécurité
humaine, ainsi que le climat. »7
En effet, de toutes les définitions proposées par les chercheurs en la matière, on retient que la
notion d’environnement doit englober la faune et la flore8 et d’autres éléments de la nature ainsi
que les relations qui existent entre eux. D’autres tendent à y inclure des objets d’origine
humaine s’ils sont importants pour le patrimoine culturel d’un peuple. Kamto considère que
«l’environnement est le milieu, l’ensemble de la nature et des ressources humaines, y compris
le patrimoine culturel et les ressources humaines indispensables pour les activités socio-
4
Michel Prieur Idem.
5
La licéité de la menace ou l’emploi d’armes nucléaires, Avis consultatif de la Cour Internationale de Justice du
8 Juillet 1996, paragraphe 29.
6
Ecosystème : ensemble des éléments vivants et non vivants qui constituent un milieu naturel et interagissent les
uns avec les autres.
7
Arbitrage relatif à la ligne du Rhin de fer (« Ijzeren Rijn ») (Belgique et Pays – Bas), Sentence du Tribunal
arbitral ad hoc, Cour Permanente d’Arbitrage, La Haye, 24 Mai 2005, paragraphe 58.
8
Faune: ensemble des espèces animales vivant dans un espace géographique ou un habitat détermine.
Flore: ensemble des espèces végétales croissant dans une région, un milieu donné.
7
économiques et pour le meilleur cadre de vie »9. Ainsi, il nous revient ici de présenter de façon
élémentaire une définition qui pourra nous servir au cours de cet enseignement.
L’environnement est donc un ensemble constitué par le milieu physique et biologique
renfermant les conditions naturelles fondamentales pour garantir l’existence et le
développement de toute espèce vivante, végétale, animale et même humaine.
L’environnement assure donc les conditions naturelles de vie. L’impératif majeur est de
conserver l’environnement si non de le gérer rationnellement pour l’adapter au mieux à
l’existence humaine.
9
Kamto M Le droit de l’environnement en Afrique (2000) Edicef Paris p. 16.
10
Simple phénomène d’époque à la suite de la notion d’ingérence humanitaire, la question mérite de faire l’objet
d’une attention particulière en Afrique car nombre des pays du continent pourraient être des “victimes” potentielles
d’une telle ingérence. Une telle approche peut donner ouverture à une nouvelle forme de domination des bailleurs
de fonds (institutions ou gouvernements) dans la prise de décisions environnementales. Allons-nous donc vers une
marginalisation verte de l’Afrique à qui le mécanisme de l’échange de dette contre protection de l’environnement
n’a guère profité. Kamto M op. cit p. 59.
11
Comme l’ingérence humanitaire en Droit International Public, la politique de « l’ingérence verte » ou le « droit
d’ingérence écologique » se résume par la faculté pour un ou plusieurs Etats à pouvoir s’immiscer, sans en être
requis, dans le territoire d’un autre Etat pour protéger ou restaurer une partie du patrimoine commun détruit ou en
danger de destruction. Bien qu’elle soit partie de considérations apparemment généreuses de solidarité écologique,
l’ingérence verte ainsi entendue ne peut que susciter des réserves. Certes, sa mise en œuvre pourrait permettre de
faire échec même à certaines formes de coopération qui conduisent à une exploitation effrénée et écologiquement
irrationnelle des ressources naturelles dans certains pays africains. Cependant, il y a lieu de faire remarquer que
cette manière d’agir « assistance à nature en danger » risque de porte en elle ce que d’aucuns qualifieraient de
« cache sexe » d’une sorte d’impérialisme écologique. On peut craindre en effet, que le « droit d’ingérence
verte » ne transforme le Sud, et tout particulièrement l’Afrique, en une « immense arrière-cour écologique
des pays occidentaux, en une réserve où ils n’hésiterons pas à intervenir pour redresser des gouvernements
ou des peuples « braconniers », dont les délits s’apprécieront à l’aune de leur réticence à apporter, par une
application prompte et aveugle sur leur territoire, la légitimité qui fait tant défaut aux solutions que la
« Société Internationale » propose pour résorber la crise écologique. Le danger imminent de voir
institutionnaliser une espèce de « gendarmerie écologique mondiale » qui érigerait les pollueurs en gardiens
du temple et condamnerait les seuls pays pauvres pour délinquance écologique. L’Afrique post coloniale est
appelée à agir et à se tenir convenablement débout sur plusieurs fronts à la fois, ici et maintenant. Kamto
Maurice Droit de l’environnement en Afrique (1996) Edicef Paris P. 60.
8
Le concept de développement durable a été formulé dès 1980 dans le cadre de la stratégie
mondiale de conservation, puis repris, développer et populariser par le Rapport Brundtland en
1987, et consacré solennellement par la Déclaration de Rio à son point 3 à travers la formule
suivante : « le droit au développement doit être réalisé de façon à satisfaire équitablement les
besoins relatifs au développement et à l’environnement des générations présentes et futures ».
Il s’agit d’un concept difficile à transcrire en droit et a fortiori dans la pratique juridique. Il
apparait d’emblée comme une notion économique et a d’ailleurs été appréhendée jusque là
comme tel. La notion de développement durable a, sous ce rapport, un champ plus vaste que
celle, initiale, de développement économique : elle propose un modèle de croissance et
d’activité humaine qui inclut explicitement les considérations environnementales et le principe
d’une allocation et d’une utilisation progressive, et donc durable, des ressources.
leur juridicité : l’idée d’une obligation de gestion écologiquement rationnelle et celle d’une
responsabilité inter temporelle.12
12
M. Kamto op. cit. pp. 54 – 56.
11
Le Juge administratif doit donc passer de la Technique ou théorie du bilan qui ne permet pas
une réelle conciliation entre intérêts économiques et préoccupations environnementales, à une
12
Le droit est indissociable de la protection de l’environnement, parce qu’il est étroitement lié à
toute forme de protection. En effet, il ne peut y avoir de protection ou de prévention sans
interdiction ou, plus largement, sans prescription de comportement. Or le droit, du moins dans
sa représentation la plus simple, n’est rien d’autre qu’un ensemble de prescriptions prohibitives
ou permissives. C’est dire que toute volonté de protection dans le domaine de l’environnement
comme dans tout autre domaine doit nécessairement s’appuyer sur des normes juridiques, c'est-
à-dire des règles obligatoires donc contraignantes. Ces normes peuvent prendre la forme de
conventions internationales, d’actes législatifs et réglementaires nationaux, de directives des
institutions internationales. Nul ne s’astreindrait par exemple à l’étude de l’impact d’un projet
sur l’environnement si une norme juridique ne la rendait obligatoire. Et l’utilité d’une telle étude
serait douteuse si des directives n’indiquaient avec précision comment la conduire. On peut en
dire autant de la chasse, de l’exploitation des forêts, de la lutte contre la pollution, de la
protection des espaces et des espèces, de la conservation des ressources naturelles, etc.
On peut donc dire que le droit norme le comportement des acteurs sociaux vis-à-vis de
l’environnement. C’est son rôle premier en ce domaine. Il s’agit d’un rôle à la fois préventif,
dissuasif et curatif. On peut donc définir le droit de l’environnement comme l’ensemble des
règles juridiques tendues vers la suppression ou, à tout le moins, la limitation des atteintes à
l’environnement.
Traiter de droit de l’environnement consiste donc à approcher les instruments juridiques qui
sont au service de la conservation ou de l’amélioration des conditions naturelles de vie. Les
règles qui sont l’objet du droit de l’environnement doivent avant tout tendre à protéger ou à
restaurer et à gérer l’environnement. Le droit de l’environnement a donc un double visage :
13
droit de la protection contre les pollutions et de valorisation éventuelle des ressources naturelles
d’une part, droit de la conservation de la nature d’autre part.
- Au sens matériel, « Le droit de l’environnement est relatif aux règles juridiques qui
concernent la nature, les pollutions et nuisances, les risques majeurs, les sites, monuments et
paysages, les ressources naturelles » Article 1er de la Loi française du 19 Juillet 1976 sur la
protection de la nature.
Ajoutons aussi la notion de droit à l’environnement qui est devenue une notion fondamentale
du droit de l’environnement. S’interroger sur une telle notion revient à s’interroger sur la
problématique de l’environnement et les droits de l’homme.
13
Olivier SORIA, « Petit vocabulaire du droit de l’environnement », (Septembre 2009) Edition Confluences, p
5 – 57 ; Octave GELINIER, François-Xavier SIMON, Jean-Pierre BILLARD, « Entreprise compétitive et
responsable », (2005), ESF Editeur CEGOS, p. 11 – 157 ; Yves PETIT, « Droit et politiques de
l’environnement », (2009), coll. Les Notices, la documentation française ; Christian HUGLO, Jehan de
MALAFOSSE et Marie-Pierre Maître, «Code de l’environnement et autres textes relatifs au développement
durable » (2010), Edition Lexis Nexis LITEC,. p. 41 – 179.
15
L’idée d’un droit de l’homme à l’environnement14 est admise au plan international dans de
nombreux textes déclaratoires, sans d’ailleurs que l’expression « droit à l’environnement’ soit
toujours employé. On pense généralement que ce nouveau droit a été proclamé pour la première
fois dans le principe 1 de la Déclaration de Stockholm de 1972 selon lequel « l’homme a un
droit fondamental à la liberté, à l’égalité et à des conditions de vie satisfaisante, dans un
environnement dont la qualité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être. Il a le devoir
solennel de protéger et d’améliorer l’environnement pour les générations présentes et futures ».
La Déclaration de Rio de 1992 apparait à cet égard comme un recul dans la mesure où elle se
contente d’une formulation dans laquelle l’idée du droit à l’environnement est par trop
implicite. Le principe 1 de cette Déclaration proclame en effet : les êtres humains ont droit à
une vie saine et productive en harmonie avec la nature ». Rio fait, à cet égard, moins bien que
Stockholm en 1972. La notion de droit à l’environnement n’en a pas moins conservé tout son
intérêt au niveau international mais il a connu un écho aussi favorable au niveau régional et
national.
L’Afrique est le premier continent à avoir donné une consécration juridique formelle au droit à
l’environnement à travers la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de 1981,
dont l’article 24 dispose :
« Tous les peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global, propice à leur
développement. » cette charte, entrée en vigueur en 1986, a introduit désormais le droit à
l’environnement dans le droit international positif, fut-il de portée régionale.
Le droit à l’environnement est d’ailleurs consacré par un certain nombre de constitutions
africaines récentes, soit indirectement à travers la référence à la Charte Africaine des droits de
l’homme et des peuples, soit directement en lui consacrant une disposition explicite, soit enfin
en utilisant les deux techniques à la fois. Certains pays africains paraissent ainsi, sur un plan
purement formel bien sûr, bien en avance sur de nombreux pays développés où la
constitutionnalisation du droit à l’environnement, voire sa simple consécration juridique au
moyen même des catégories normatives inférieures à la constitution, demeure une
revendication ; en dépit de la multitude des règles et procédures existantes en matière de droit
de l’environnement, celui-ci est encore dans ces pays, au stade du « non droit ».
14
Lire Karel Vasak « 30 years struggle – The sustained efforts to give force of law to the universal Declaration of
Human Rights » Unesco Courrier, november 1977, p. 29.
16
Reste une question sous-jacente à cette consécration d’un droit de l’homme à l’environnement.
Ce droit est-il promis à être un droit humain ordinaire, semblable dans sa nature et dans ses
conséquences à ceux qui l’ont précédé ? L’hésitation est permise, car la mise en œuvre du droit
à l’environnement s’avère d’autant plus malaisée que son contenu est mal défini et parait en
tout cas trop englobant, donc extrêmement large : il tend à recouvrir la plupart des droits
économiques et sociaux en plus des droits proprement écologiques. Certes, il existe quelques
efforts de définition plus ou moins élaborée sur le plan doctrinal. Mais la difficulté de cerner
« les contours mouvants et ambigus de ce droit dont le contenu varie au gré des découvertes
scientifiques et fonction des contextes socio-économiques » demeure. Il faudrait en tout état de
cause comprendre le droit à l’environnement comme un « droit bidimensionnel », c'est-à-dire à
la fois comme un droit humain et un droit de la nature. Cette approche écarte
l’anthropocentrisme juridique si fréquent en droit de l’environnement qui, par son objet même,
devrait mettre en avant la nature dans toutes ses composantes.
est destructeur de l’environnement, d’autre part, parce que la pauvreté est l’un des principaux
facteurs de la dégradation de la nature par l’homme et que les pays sous développés se livrent
à une surexploitation des ressources naturelles afin de se donner les moyens de réaliser leurs
objectifs de développement économique et social. La problématique s’énonce en termes fort
simples : si l’environnement n’est pas protégé, le développement sera compromis ; sans
développement, il ne sera pas possible de protéger l’environnement.
également la pierre angulaire « de la position commune » adoptée par les Etats Africains dans
la perspective de la Conférence de Rio.
Ces Etats insistent d’autant plus sur la relation entre le droit à l’environnement et le droit au
développement que la reconnaissance d’une telle relation par la communauté internationale, en
particulier par les pays développés, pourrait leur permettre de réaliser des objectifs qu’ils
n’avaient pu atteindre par le biais du NOEI. Droit à l’environnement et droit au développement
présentent en effet des similitudes d’approche en termes de rapport Nord – Sud et de doctrine
de solidarité. Le droit au développement impose d’éliminer, au niveau international, tous les
obstacles d’ordre juridique qui se dressent devant les efforts des peuples pour sortir du sous-
développement ; surtout, comme le droit à l’environnement vu sous l’angle du principe de la
responsabilité commune promis par la Déclaration de Rio, il met à la charge des pays
développés des efforts financiers plus importants comme réponse à l’obligation de réparer les
préjudices et dommages qu’ils ont causé aux pays du Sud notamment par l’exploitation
coloniale. Quant à la solidarité, elle trouve, en matière de protection de l’environnement comme
en matière du développement, son fondement dans l’exigence pour les acteurs internationaux
de déployer une action collective par voie de concertation et de négociation permanentes dans
le but de réduire les inégalités de développement entre nations et d’abaisser les barrières de
souveraineté afin de rendre possible des actions communes pour une meilleure conservation de
la nature. Si ces notions paraissent ainsi avoir un contenu assez précis, il n’en est pas de même
des diverses autres notions qui ont émergé récemment à la faveur du développement du droit
de l’environnement au niveau international.
droit international se développe à titre préventif ou en tout cas avant la prise de conscience de
la gravité et de l’urgence de la situation, comme en matière de l’air (conventions sur les
changements climatiques – La convention cadre sur les changements climatiques, le protocole
de Kyoto). La production normative internationale en matière environnementale connait
diverses orientations. Certaines sont à l’origine de la création d’institutions dans le domaine de
l’environnement, d’autres ont une portée générale et énoncent des principes. Il convient de noter
qu’il existe aujourd’hui plus de 300 conventions multilatérales consacrées entièrement ou
partiellement à l’environnement et quelque 900 traités bilatéraux ayant un objet similaire, les
Etats Africains étant parties à la plupart de ces accords internationaux.15 Citons à titre illustratif :
- La Déclaration de Stockholm sur l’environnement du 16 juin 1972
- La Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement du 13 juin 1992
- Le programme pour le développement et l’examen périodique du droit de
l’environnement pour les années 1990 du 21 mai 1993.
Un groupe de textes vise les ressources terrestres, marines et atmosphériques, qu’elles soient
utilisées par l’homme ou les espèces animales et végétales. Sont, à ce titre, considérées comme
ressources naturelles l’eau, les forets, le sol, l’énergie, etc. Il convient ici de citer par exemple
- La convention sur la diversité biologique du 5 juin 1992
- La convention Africaine sur la conservation de la nature et les ressources
naturelles du 15 septembre 1968
La plupart des conventions en matière environnementale ont été ratifiés par RDC et ont par voie
de conséquence vocation à s’appliquer en RDC. C’est avec regret que l’on enregistre une
absence d’effectivité pour ceux que le Congo a ratifié. Les mesures que l’Etat Congolais s’est
obligé de prendre pour leur mise en application ne sont pas généralement prises pour une grande
part. Des pistes sont suggérées pour une compréhension des raisons justifiant les difficultés
d’application des conventions. A titre illustratif, on peut mentionner la problématique de la
coexistence ou d’harmonisation entre les conventions universelles et les législations nationales,
une faible maitrise des techniques conventionnelles et d’expertise environnementale.
15
Maurice Kamto op. cit. p. 68
20
16
Article 9 de la Constitution du 18 février 2006 de la RDC.
17
Article 58 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 dispose que : «Tous les Congolais ont le droit de
jouir des richesses nationales. L’Etat a le devoir de les redistribuer équitablement et de garantir le droit au
développement.
18
Article 123 point 15 de la Constitution du 18 février 2006.
21
A la lumière de ces dispositions, les articles 53, 18 et 16 de la loi n°73-021 du 20 juillet 1973
modifiée par la loi 80-008 du 18 juillet 1980 portant régime général des biens, régime foncier
et immobilier et régime des sûretés en République Démocratique du Congo prévoient respective
que :
Le sol est la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’Etat.
L’eau des cours d’eau et des lacs et les eaux souterraines appartiennent à l’Etat. Sous réserve
des dispositions légales ou réglementaires qui en déterminent la jouissance, et des concessions
particulières qui peuvent toujours être accordées par l’autorité publique, la faculté d’en user
est commune à tous.
Le lit de tout lac et celui de tout cours d’eau navigable, flottable ou non, font partie du domaine
public de l’Etat.
19
- Etats-Unis- Prohibition à l’importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes,
WT/DS 58/ AB/ R, 12 octobre 1998, § 130.
20
M. PRIEUR, et S. DOUMBE-BILLE (S/dir.), Op. cit., p. 232.
21
Les ressources naturelles renouvelables, ou non épuisables, sont celles qui sont capables de se reconstituer ou
de se renouveler après leur utilisation, tels que les sols, les eaux, la flore et la faune. En revanche, les ressources
non renouvelables, épuisables, une fois tirées de la nature ne peuvent pas être reconstituées dans un temps court
après leur usage. Ce sont les énergies fossiles et les minéraux en général. On doit aussi faire mention de la catégorie
spécifique, les ressources énergétiques qui comprend une distinction entre celles pouvant être renouvelées, comme
les énergies hydraulique, éolienne ou solaire, et les ressources énergétiques non renouvelables, comme par
exemple, le charbon, le gaz, le pétrole et certains métaux lourds, comme l’uranium. Lire ELIAN G., « Le principe
de la souveraineté sur les ressources nationales et ses incidences juridiques sur le commerce international »,
RCADI, Vol. 149, 1976, P. 11 ; LETICIA SAKAI, La souveraineté permanente sur les ressources naturelles et la
22
Le Protocole sur l’exploitation illégale des ressources naturelles, adopté dans le cadre de la
Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (africains), le 30 novembre 2006,
semble plus expressif lorsque son article 1er définit les ressources naturelles comme «les
substances fournies par la nature, utiles aux personnes humaines, ayant une valeur économique
[…] Les principaux types de ressources naturelles comprennent notamment les minerais, la
flore et la faune, les produits halieutiques et l’eau ».22 Quand bien même controversé, ainsi que
le remarque N. Schrijver23, l’État dispose des pouvoirs souverains permanents, constants,
exclusifs et inaliénables sur ses ressources naturelles et les activités économiques y reliées. En
somme, la souveraineté permanente sur les ressources naturelles entretient des liens avec
d’autres principes du droit international (2.1) et accorde certains droits à l’Etat. (2.2)
protection internationale des droits de l’homme, thèse de doctorat, Université Panthéon-Sorbonne, Paris I, 2014,
p. 18, [en ligne], [référence du 04 juin 2018], disponible sur http//tel.archives-ouvertes.fr/tel-01523109
22
Protocole sur la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles (Conférence internationale sur la
Région des Grands Lacs), [en ligne], [référence du 30 avril 2018] disponible sur
http://www.icglr.org/common/docs/docs_repository/prot_ienr_fr.pdf Ce Protocole est entré en vigueur le 21 juin
2008, date d’entrée en vigueur du Pacte sur la sécurité, la stabilité et le développement dans la Région des Grands
Lacs. En effet, l’article 37, § 1 du Protocole dispose que ce protocole fait partie intégrante du Pacte et ne doit pas
être sujet à une signature et à une ratification séparée des Etats membres.
23
N. SCHRIJVER, Sovereignty over natural resources – Balancing rights and duties, Cambridge, Cambridge
University, 1997, p.1.
24
Dans ses analyses, Kamto M. note que « comme l’ingérence humanitaire en Droit International Public, la
politique de « l’ingérence verte » ou le « droit d’ingérence écologique » se résume par la faculté pour un ou
plusieurs États de pouvoir s’immiscer, sans en être requis, sur le territoire d’un autre État pour protéger ou restaurer
une partie du patrimoine commun détruit ou en danger de destruction. Bien qu’elle soit partie de considérations
apparemment généreuses de solidarité écologique, l’ingérence verte ainsi entendue ne peut que susciter des
réserves. Certes, sa mise en oeuvre pourrait permettre de lutter contre certaines formes de coopération qui
conduisent à une exploitation effrénée et écologiquement irrationnelle des ressources naturelles dans certains pays
africains. Cependant, il y a lieu de faire remarquer que cette sorte « d’assistance à nature en danger » risque de
porter en elle ce que certains qualifieraient de « cache sexe », d’une sorte d’impérialisme écologique. On peut
craindre en effet que le « droit d’ingérence verte » ne transforme le Sud, et tout particulièrement l’Afrique, en une
« immense arrière-cour écologique des pays occidentaux, en une réserve où ils n’hésiteront pas à intervenir pour
redresser des gouvernements ou des peuples « braconniers » dont les délits s’apprécieront à la hauteur de leur
réticence à apporter, par une application prompte et aveugle sur leur territoire, la légitimité qui fait tant défaut aux
solutions que la « Société internationale » propose pour résorber la crise écologique. Le danger imminent de voir
institutionnaliser une espèce de « gendarmerie écologique mondiale » qui érigerait les pollueurs en gardiens du
temple et condamnerait les seuls pays pauvres pour délinquance écologique. L’Afrique post-coloniale est appelée
à agir et à se tenir convenablement debout sur plusieurs fronts à la fois, ici et maintenant. Kamto M. Droit de
23
La souveraineté est souvent avancée pour caractériser un État en Droit International. Dès lors
qu’on est en face d’un État, la conception classique renseigne que la souveraineté est la
traduction juridique de l’indépendance. La tendance générale depuis le début du XXème siècle
a été de considérer les deux expressions comme ayant le même contenu. La jurisprudence
internationale assimile systématiquement souveraineté et indépendance. Ainsi par exemple,
l’arbitre Max Hubert déclare, dans sa sentence du 04 Avril1928, à propos d’un différend entre
les USA et les Pays-Bas sur l’île de Palmas, dans le pacifique : « La souveraineté, dans les
relations entre Etats, signifie l’indépendance. L’indépendance relativement à une partie du
globe est le droit d’y exercer, à l’exclusion de tout autre Etat, les fonctions étatiques. » La
pratique conventionnelle offre aussi des cas où les deux termes sont employés l’un pour l’autre.
L’article 5 paragraphe 6 de la Charte de l’Organisation des Etats Américains, appelée aussi
Charte de Bogota n’énonce-t-il pas que : « L’ordre juridique international est basé
essentiellement sur le respect de la personnalité internationale, de la souveraineté et de
l’indépendance des Etats ainsi que sur le fidèle accomplissement des obligations découlant des
traités et des autres sources du Droit International. » Aujourd’hui, on dira que le terme
souveraineté est d’usage plus courant. Patrick Daillier et Alain Pellet n’ont pas hésité à écrire25
« A travers l’égalité souveraine, c’est l’indépendance de l’Etat qui est affirmée ». On identifie
un souverain comme celui qui a la puissance suprême. En Droit International on a une difficulté
: on n’a pas un souverain, mais des souverains. Être souverain étant le fait d’avoir la suprématie
de la puissance.26
La souveraineté, veut dire que l’Etat est le seul à être la puissance suprême pour gouverner,
commander et décider dans l’ordre interne. Le principe de la souveraineté de l’État assure, dans
l’ordre international, l’indépendance de l’État à l’égard d’autres États.27
Le principe de la souveraineté permanente s’appuie sur le principe de la non-
ingérence dans les affaires intérieures de l’État. Selon ce principe, aucun État ne peut intervenir
l’environnement en Afrique, Edicef, Paris, 1996, p. 60 ; Kennedy KIHANGI BINDU, « La justiciabilité du droit
à l’environnement consacré par la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de 1981 en République
Démocratique du Congo », Revista Catalana de Dret Ambiental, Vol. IV Núm. 1 (2013), p. 30.
25
Patrick Daillier et Alain Pellet, Droit International Public, LGDJ, Paris, 7ème édition. 2008, 424.
26
La souveraineté des Etats en droit international, [en ligne], [référence du 15 juin 20018], disponible sur
http://www.cours-de-droit.net/la-souverainete-des-etats-a121609996
27
A. PELLET, P. DAILLIER; M. FORTEAU, Droit International Public, 8ème éd., Paris, LGDJ, 2009, p. 465.
24
dans les compétences qui sont conférées exclusivement à un État, telles que les compétences
sur son territoire. Autrement dit, ce principe entraîne l’obligation pour tout Etat de respecter le
caractère exclusif des compétences territoriales des autres États.28 Parmi les pouvoirs
souverains de l’Etats sur les ressources naturelles se retrouvant sur son territoire, on doit
distinguer les pouvoirs d’imperium et les pouvoirs de dominium de l’Etat.29.
En ce qui concerne les pouvoirs de dominium de l’Etat, il est un pouvoir exercé par l’Etat sur
les ressources naturelles sur son territoire envisagées en tant que choses. Ainsi, le pouvoir de
dominium confère à l’Etat des droits de nature « réelle »30, similaires aux droits d’un
propriétaire sur ses biens, tels que « le droit de disposer de » ses ressources.31
Selon G. Abi-Saab, même si l’État peut concéder des droits issus de son pouvoir de dominium,
cette concession doit se réaliser pour « une période de durée raisonnable », c’est-à-dire que
l’État ne peut pas l’effectuer de façon permanente, ni pour de très longues périodes, à moins
que l’Etat aliène, de même coup, sa souveraineté territoriale.34 Ainsi, l’État peut concéder des
28
P-M. DUPUY, Y. KERBRAT, Droit international public, 11ème éd., Paris, Dalloz, 2012, p. 131.
29
L. SAKAÏ, La souveraineté permanente sur les ressources naturelles et la protection internationale des Droits
de l’Homme, Thèse de doctorat, Université Panthéon-Sorbonne - Paris I, 2014, p. 16.
30
Les droits réels principaux sont le droit de propriété et de ses démembrements. Le droit de propriété comporte
trois prérogatives : le droit d’user de la chose, le droit d’en percevoir les fruits, le droit d’en disposer. Certains
droits réels ne confèrent à leur titulaire qu’une partie de ces attributs ; on les qualifie de démembrements du droit
de propriété (ex. : servitude, usufruit). Par opposition aux droits réels principaux, il existe des droits réels
accessoires, ils sont liés à l’existence d’une créance dont ils garantissent le recouvrement (ex. : hypothèque). Lire
le Lexique des termes juridiques.
31
Cf. J. SALOMON, Op. Cit., p. 1046.
32
Cf. Ibidem p. 30.
33
L. SAKAÏ, Op. Cit., p.16.
34
G.ABI-SAAB, « La souveraineté permanente sur les ressources naturelles», in M. BEDJAOUI, Droit
international : bilan et perspectives, Paris, Pedone, 1991, p. 646.
25
droits sur ses ressources et disposer de celles-ci, mais il s’agit là d’exceptions circonscrites dans
leur portée et dans le temps.35
Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est un principe du droit international selon lequel
les peuples ont le droit de s’administrer et de décider librement de leurs affaires intérieures et
extérieures, sans ingérence étrangère.36 Ce principe est issu du principe des nationalités,
consacré dans le contexte révolutionnaire de la fin du XVIIIème siècle, au moment de
l’unification des nations européennes, selon lequel chaque nation a le droit de former un État
indépendant.37
Ce principe constitue l’un des fondements de la Charte des Nations Unies38. Et parmi les buts
de l’Organisation des Nations Unies figure celui de « de développer entre les nations les
relations amicales fondées sur le principe de l’égalité des droits des peuples et de leur droit de
disposer d’eux-mêmes ».39
Selon L. Sakaï, deux aspects sont à relever dans le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes :
un aspect politique et un aspect économique. Le premier, composante politique du droit des
peuples à disposer d’eux-mêmes, est le droit à l’autodétermination. Il s’agit alors de
l’indépendance politique des peuples. Le deuxième aspect du droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes est sa composante économique : le principe de la souveraineté permanente sur
les ressources naturelles. Ce dernier renvoie à l’indépendance économique des peuples.40 Ainsi
donc, la souveraineté permanente sur les ressources naturelles est la composante économique
du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes permettant de réaffirmer la souveraineté des États.
Malheureusement, l’expérience africaine révèle que la plupart des Etats dotés d’importantes
ressources naturelles sont dépourvus de structures institutionnelles fortes capables de les
protéger et de les exploiter pour le bien-être de leurs populations : ce qui conduit à une
35
Cf. Ibidem, p.646.
36
COMBACAU, J. et SUR, S. Droit international public, 9ème éd., Paris, Montchrestien, 2010, p. 426.
37
A. PELLET, P. DAILLIER, M. FORTEAU, Droit International Public, op. cit., p. 71.
38
MOREAU DEFARGES, L'Organisation des Nations unies et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. In:
Politique étrangère, n°3 - 1993 - 58ᵉ année. pp. 659-671.
39
Article 1.2 de la Charte des Nations Unies de 1945.
40
L. SAKAÏ, Op. Cit., p.24.
26
exploitation illicite de ces ressources par des intervenants de tous bords dans la région africaine
des Grands Lacs et au bradage de la souveraineté lorsque les Etats doivent courber l’échine
pour négocier les investissements.
41
Ibidem, p.25.
27
ressources sont contrôlées par d’autres acteurs, publics ou privés, mais à condition
d’accorder au propriétaire une indemnisation prompte, juste et adéquate. C’est
l’application de l’expropriation pour cause d’utilité publique.
C’est dans cette philosophie que la Constitution rappelle que « Toute personne a droit à un
environnement sain et propice à son épanouissement intégral. Elle a le devoir de le défendre.
L’Etat veille à la protection de l’environnement et à la santé des populations. »42 Les articles
47 et 48 de la Constitution portent respectivement sur les droits à la santé, à l’eau et à un
logement décent.43
Le droit à l’environnement est un droit fondamental de l’homme qui est ainsi
constitutionnellement garanti, protégé et justiciable. Son caractère procédural sous-entend le
droit d’avoir accès à l’information environnementale, le droit de participer au processus de prise
de décision en matière d’environnement, le droit de recours devant les instances judicaires en
cas de violation et le droit à la réparation (articles 8, 9, 10, 68 – 70 de la loi N°11/009 du 9
Juillet 2011 portant principes fondamentaux relatifs à la protection de l’environnement 2011).
42
Article 53 de la Constitution de la RDC.
43
Article 47 « Le droit à la santé et à la sécurité alimentaire est garanti. La loi fixe les principes fondamentaux et
les règles d’organisation de la santé publique et de la sécurité alimentaire. » Article 48 : « Le droit à un logement
décent, le droit d’accès à l’eau potable et à l’énergie électrique sont garantis. La loi fixe les modalités d’exercice
de ces droits. »
28
En effet, la mise en œuvre du droit à l’environnement implique que chaque personne a le droit
d’entamer une action afin d’influer sur les décisions, actions ou omissions qui portent atteinte
à la qualité de l’air, au niveau sonore, à la qualité des eaux, à l’hygiène au travail, à l’accès aux
ressources naturelles, paysage, parcs, littoral, montagne, etc.), ou qui mettent en péril la vie de
l’homme. Ces mesures sont au minimum l’accès à l’information environnementale, le droit de
participer à certaines procédures de décision concernant l’environnement et, dans certains cas,
le droit de recours devant diverses instances civiles ou administratives, le droit de recours
d’obtenir la cessation d’atteintes à l’environnement lorsqu’elles sont illégales et le droit à la
réparation des dommages. Ainsi, l’article 42 de la Constitution Russe de 1992 précise que :
Everyone shall have the right to a favourable environment, reliable information about its
condition and to compensation for the damage caused to his or her health or property by
ecological violations.
La constitution Belge de 1994 proclame ‘le droit à la protection d’un environnement sain’.
Selon les travaux préparatoires, ceci signifie qu’« il incombe aux pouvoirs publics de protéger
l’environnement. Chacun a droit a un environnement humain, sain et équilibre sur le plan
écologique. »45 La Cour d’Appel de Bruxelles s’est fondée sur la Constitution pour interdire
une activité polluante.46
La Constitution Italienne de 1948, art. 32-1, art. 9-2. G. Piccolo, ‘le droit a l’environnement
dans la constitution Italienne’ RJE No 4 P. 335 (1994). En 1994 et 1995, La cour
44
Article 56 de la Constitution de la RDC.
45
Article 23 – 2 Chacun a le droit de mener une vie conforme a la dignité humaine. A cette fin, la loi, le décret ou
la règle visée a l’article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits
économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice. Ces droits comprennent
notamment : (…) 2- le droit a la protection de la sante, 4- le droit a la protection d’un environnement sain » L P
suetens ‘Le droit a la protection d’un environnement sain (article 23 de la Constitution Belge), Les hommes et
l’environnement (Melanges Kiss), Frison-roche Paris 1998
46
Par un arrêt Gregoire et Consorts (no 49-440 du 5 Octobre 1994), la Cour d’appel de Bruxelles a fondé sa
décision relative a un parc de conteneur sur la reconnaissance constitutionnelle du droit a un environnement sain.
Déjà en 1989, dans l’affaire de la décharge de Mellery (arrêt du 2 Novembre 1989), cette cour avait déclaré que
‘le préjudice (économique que le demandeur d’une autorisation subirait9 ne peut faire obstacle au droit des
habitants de protéger leur sante et d’empêcher la dégradation de leur milieu de vie. »
29
Certes, si les aspects procéduraux du droit à l’environnement peuvent être appliqués des a
présent, les aspects substantiels de ce droit ne peuvent être mis en œuvre que de façon
progressive (comme pour le droit au logement ou le droit à la sante). L’obligation de protéger
l’environnement contient une obligation négative (ne pas agir contre la protection de
l’environnement) et une obligation positive (surveiller les pollueurs, éviter les pollutions,
protéger les personnes).
L’utilité de la loi cadre du 9 Juillet 2011 susmentionnée n’est plus à démontrer. Elle fixe les
principes fondamentaux relatifs à la gestion, à la protection de l'environnement et de la
biodiversité contre toutes les formes de dégradations, afin de promouvoir l’exploitation
rationnelle des ressources naturelles, de lutter contre toutes les formes de pollutions et nuisances
et d'améliorer les conditions de vie des populations, présentes et futures, dans le respect de
31
l'équilibre de leurs relations avec le milieu ambiant. Sous son parapluie, une politique nationale
de l’environnement sera élaborée par le ministre en charge de la question environnementale en
impliquant tous les acteurs tant publics que privés concernés. Cette politique est traduite
notamment par un plan national d’action pour l’environnement adopté par un décret délibéré
en conseil des ministres. Le plan devra comporter entre autres :
- un diagnostic de l’état de l’environnement ainsi qu'une analyse des tendances
évolutives prévisibles compte tenu de l’évolution des facteurs démographiques, économiques
et sociaux, et des écosystèmes naturels ;
- la définition des actions que le Ministère de l'environnement se propose, seul ou
avec le concours d'autres institutions, d'entreprendre en priorité et la justification de tel choix;
- l’énoncé pour chaque action retenue des moyens humains, techniques, juridiques
ou financiers nécessaires, ainsi qu’un calendrier précis.
Ce plan devra être révisé après une bien période bien définie. Cette Loi a le mérite d’apporter
quelques innovations notamment l’obligation d’une étude d’impact environnemental et social,
d’un audit environnemental, d’une évaluation environnementale des politiques, plans et
programmes, la création d’un cadre institutionnel et d’un Fonds d’intervention pour
l’environnement et le renforcement des dispositions pénales.
PS. La jurisprudence reste aussi une des sources importantes du droit de l’environnement. Il est
déplorable de noter la quasi absence d’une jurisprudence en matière environnementale en RDC.
Des actions en justice peuvent être ouvertes pour obtenir la sanction administrative, pénale ou
civile des atteintes aux éléments de l’environnement. Force est pourtant de constater, comme
signaler ci haut, que le contentieux environnemental est quasi inexistant devant les juridictions
congolaises. La jurisprudence n’a donc pas contribué à la définition notamment des régimes de
protection de l’environnement, de l’étendue des droits environnementaux des citoyens, des
obligations de l’Etat, etc.
En tout état de cause, il s’agit également d’un principe d’application générale en tant qu’il est
aisément transposable dans d’autres domaines de l’environnement. Ainsi, par exemple, en
matière d’élimination des déchets nucléaires ou radioactifs, on ne peut prétexter de ce que l’état
actuel de connaissance scientifique ne permet pas d’apprécier les risques que comporte
l’enfouissement de tels déchets pour les générations futures pour persister dans cette méthode
d’élimination d’autant plus aléatoires qu’elles n’éliminent rien du tout puisque elles se
33
contentent d’éloigner les déchets de l’environnement immédiat de l’homme, mais les conserve
à l’état dans le sol.
Un tel principe est prescriptif des normes de comportement exprimant soit une obligation
d’entourer l’opération à entreprendre des garanties, soit une obligation de s’abstenir, c'est-à-
dire de ne pas faire ou stand still.
Enfin, peut être considéré comme un sous principe au principe général d’anticipation et de
prévention, le principe de l’Etude d’Impact énoncé sans doute comme un rappel d’un principe
faisant désormais partie du droit coutumier par le « principe 7 » de la Déclaration de Rio.
Ainsi entendu, le principe a certes l’avantage de faire supporter par l’auteur réel ou potentiel de
la pollution la réparation ou la prévention du dommage causé par son activité. Il n’en reste pas
moins pernicieux dans la mesure où il suggère que l’on peut payer pour polluer. C’est pourquoi
ce principe n’est pas agréé par tous les environnementalistes. On ne peut s’empêcher en effet
d’y voir une certaine dictature de l’argent sur les considérations écologiques. D’aucuns
préfèrent donc à ce principe, le principe de non pollution en ce que il serait plus strict et plus
préventif. Mais est-il réaliste dans un monde où la majeure partie des activités humaines est
inévitablement polluante ? Est il vraiment possible de viser et surtout d’atteindre la pollution
zéro ?
Le principe pollueur – payeur s’est donc imposé par nécessité, comme un pis-aller. A force de
répétition, il est devenu un principe de droit coutumier en l’absence d’une codification
internationale. On constate, en droit comparé, une large réception du principe notamment dans
34
les pays industrialisés. Ainsi, est il largement utilisé en France – où un auteur a accentué son
coté « slogan » en le rebaptisant « principe qui nuit paie » - cependant qu’aucune
réglementation ne l’a expressément repris à son compte ; le Japon utilise la formule « pollution
- taxation » ; la Hollande quant à elle applique le principe d’une manière originale en exigeant
par exemple une compensation en nature en plus d’une amende. Ce principe s’introduit aussi
progressivement dans certaines législations africaines. Il en est ainsi notamment de la loi
Congolaise du 29 juillet 2011 portant principes fondamentaux relatifs à la protection de
l’environnement.
La formulation de ce principe est en fait l’illustration parfaite d’un texte de compromis comme
on en trouve dans la plupart des instruments juridiques récents adoptés par les conférences de
codification. Elles dissimulent à peine les divergences qui existent entre les pays développés et
les pays en voie de développement au sujet de la responsabilité en matière de la dégradation de
l’environnement mondial. Alors que les pays sous développés rejettent l’entière responsabilité
sur les seuls pays industrialisés, ceux-ci soutiennent au contraire l’idée d’une responsabilité
partagée, même si cette dernière se situe à des niveaux différents. Ils estiment que les pays en
développement participent à cette dégradation du milieu soit par la pollution industrielle pour
certains, soit par la déforestation ou une mauvaise gestion de sol et l’atteinte à la diversité
biologique pour d’autres. Il s’en suit donc une responsabilité commune qui implique une
obligation de « coopérer dans un esprit de partenariat mondial en vue de conserver, de protéger
et de rétablir la santé et l’intégrité de l’écosystème terrestre », même si des obligations plus
importantes incombent aux pays développés en raison de ressources financières dont ils
disposent et de la responsabilité plus grande qui leur échoit dans la dégradation de
l’environnement.
35
La revendication de la participation trouve sa source dans un certain nombre des textes et des
documents internationaux de caractère politique ou juridique : principe 4 et 9 de la Déclaration
de Stockholm mais aussi principe 20 de la même Déclaration qui vise à encourager et faciliter
dans tous les pays la libre circulation de l’information ; point 5 du Chapitre de l’économie, de
la science et de la technique de l’acte finale d’Helsinki de 1975 qui déclare que « le souci d’une
politique de l’environnement suppose que toutes les catégories de la population et toutes les
forces sociales conscientes de leur responsabilité contribuent à protéger et à améliore
l’environnement ».
Ce principe est réaffirmé en des termes aussi convaincus dans les instruments déclaratoires de
la conférence de Rio. Sur un plan général, le principe 10 de la déclaration de Rio l’énonce en
ces termes : « la meilleure façon de traiter les questions d’environnement est d’assurer la
participation de tous les citoyens concernés au niveau qui convient ». cette participation
concerne les femmes (principe 20), les jeunes (principe 21) aussi bien que les populations et
communautés autochtones (principe 22).
Sur un plan spécifique, la déclaration sur les forets insiste également sur ce point en indiquant
d’une part, que des conditions appropriées doivent être faites aux populations autochtones, à
leur collectivités et aux autres collectivités ainsi que aux habitants de forets « pour leur
permettre d’être économiquement intéresser à l’exploitation, de mener des activités rentables
et de jouir des moyens d’existence et d’un niveau de vie adéquat notamment grâce à des régimes
36
fonciers incitant à une gestion écologiquement viable des forets » ; d’autre part, que doit être
activement encourager « la participation intégrale des femmes à tous les aspects d’une gestion,
d’une conservation et d’une exploitation écologiquement viables des forets » (principe 5 a et
b).
La participation des communautés locales et des populations autochtones à la préservation ou
à la gestion économiquement rationnelle des ressources environnementales telle que affirmée
par « principe 22 » de la déclaration de Rio et conditionnée par une reconnaissance de « leur
identité, culture, et leurs intérêts » par les Etats, lesquels doivent d’ailleurs leur accordent tout
l’appui nécessaire afin de rendre efficace leur participation à la réalisation d’un développement
durable. Cette participation à la protection de l’environnement implique en contre partie une
participation aux avantages qui pourrait en découler. C’est ce qui ressort du point 12 du
préambule de la convention sur la diversité biologique qui s’accorde à cet égard avec le principe
5 a sus-invoqué de la déclaration sur les forets.
application dans des domaines précis de la protection de l’environnement que cette affirmation
trouve une formulation normative. Il s’agit à tout état des causes d’un principe à deux versants
dont l’un exprime l’idée chère aux pays en voie de développement selon laquelle la protection
de l’environnement ne doit pas constituer un obstacle pour le développement, et dont l’autre
souligne l’idée largement soutenue par les pays développés selon laquelle il ne peut y avoir un
développement durable sans une prise en compte de l’environnement dans l’élaboration et la
mise en œuvre des politiques de développement.
Par rapport au premier versant du principe, le para 21 du préambule de la convention sur les
changements climatiques déclare précisément que « les mesures prises pour parer aux
changements climatiques doivent être étroitement coordonnées avec le développement social
et économique afin d’éviter toute incidence néfaste sur ce dernier, compte pleinement tenu des
besoins prioritaires légitimes des pays en développement, à savoir une croissance économique
durable et l’éradication de la pauvreté ». De même, le principe 2 a de la déclaration sur les forets
reconnait le droit souverain et inaliénable de l’Etat « d’utiliser, de gérer et d’exploiter leurs
forets conformément à leurs besoins en manière de développement et à leur niveau de
développement économique et social … »
Ainsi, pont est il jeté entre l’environnement et le développement, entre la nécessite présente de
préserve la planète d’une catastrophe écologique générale et l’urgence de l’éradication de la
pauvreté et de la promotion du développement.
atteintes à la nature en évaluant à l’avance les effets de l’action de l’homme sur son milieu
naturel. Dans certains cas toutefois, cette prévision des effets néfastes d’un projet peut être très
délicat car certaines modifications de l’équilibre biologiques ne peuvent apparaitre que très tard.
La procédure d’étude d’impact ne autre finalement que la mise en œuvre du vieux principe
« mieux vaut prévenir que guérir ». Pour prévenir il faut connaitre et étudier à l’avance l’impact
c'est-à-dire les conséquences et les effets d’une action. L’étude d’impact est en même temps
une procédure administrative et une règle de bon sens. C’est aux USA que la procédure d’étude
d’impact a pris naissance dans la loi sur l’environnement de 1970. Compte tenu de la spécificité
du système administratif et juridictionnel américain, l’étude d’impact est devenue aux USA une
procédure très sophistiquée, à l’efficacité certaine mais limitée. La procédure est considérée
comme très contraignante et trop lourde pour l’administration qui est jalouse de son pouvoir de
décisions isolées et secrètes.
La protection de l’environnement oblige que des dispositions efficaces soient prises en amont,
à titre préventif, et un accompagnement fiscal nécessaire pour l’intérêt des générations
présentes et futures. A ce titre, il est judicieux qu’une étude d’impact soit réalisée avant
d’entreprendre une activité de grande envergure qui pourrait avoir des conséquences néfastes
sur l’environnement.
39
L’étude d’impact est assurément l’institution la plus spécifique et sans doute aussi la plus
originale du droit de l’environnement. Elle est au cœur du développement durable. On peut
entendre, en première approximation, l’étude comme étant une procédure d’évaluation d’un
projet ou d’une activité. Une telle évaluation peut avoir lieu avant ou après la réalisation de
l’ouvrage ou l’exécution de l’activité. A vrai dire, seule l’évaluation a priori correspond à une
démarche environnementale conséquente : d’une part, elle correspond à la mise en œuvre du
principe fondamental de la prévention, d’autre part, elle traduit aujourd’hui l’intégration dans
la politique environnementale de l’idée très actuelle du développement durable. Au contraire,
une évaluation a posteriori de l’impact environnemental parait inefficiente parce que
probablement tardive, elle peut, au mieux, révéler les dommages causés par l’ouvrage ou les
travaux réalisés, et cette révélation ne peut être que de peu de secours lorsque les dommages
causés sont irréversibles ou irréparables. Cette évaluation a posteriori, qui évoque la situation
d’un pyromane qui joue au sapeur pompier, constitue en fait un audit d’environnement : celui-
ci a pour objet d’apprécier à un moment donné l’impact que l’existence d’une entreprise, d’un
ouvrage ou de tout ou partie d’une activité est susceptible de produire sur l’environnement;47 il
constate donc les dégâts après-coup, mais ne permet plus rectifier le tir, c'est-à-dire de modifier
ou d’adapter le projet aux exigences écologiques.
47
Corinne LEPAGE – JESSUA Audit d’environnement (1992) Paris, p. 25.
48
M. DENOIX de SAINT – MARC, « Le rapport d’impact sur l’environnement », Revue Juridique de
l’Environnement, 1976, N°3-4, p. 250.
49
M. PRIEUR Droit de p l’environnement op. cit. 62 et p. 66.
40
et étude d’impact il y a une différence non de nature mais de degré dans l’approfondissement
de l’appréciation ou de l’évaluation de l’impact environnemental d’un projet.
L’étude d’impact apparait à la fin des années 60 (en 1969) en Amérique du Nord sous
l’appellation d’impact assessment.50 Elle s’est intégrée ensuite peu à peu dans le droit de
l’environnement des pays développés, avant de se généraliser progressivement à partir des
années 80 en s’insérant dans les législations des pays en développement, mais aussi dans les
instruments du droit international. Cette consécration internationale, aussi bien par de
nombreux textes contraignants que par diverses conventions internationales,51 a sans doute
favorisé sa réception explicite par les droits nationaux africains. L’étude d’impact reste
cependant une technique et un phénomène relativement nouveau en Afrique, d’autant plus
difficile à manier que son économie révèle une certaine complexité de l’institution.
Tous les travaux, aménagements et ouvrages ne sont pas, par principe, soumis à l’étude
d’impact. Bien qu’elle soit toujours rassurante en raison de son caractère préventif, l’étude
d’impact est couteuse et ne saurait donc être engagée de manière fantaisiste. C’est pourquoi
l’on procède en pratique à la détermination de la nature de ceux des ouvrages ou
aménagements qui seront effectivement soumis à une étude d’impact ? Cependant certaines
législations prévoient exceptionnellement une telle étude même pour les plans ou
programmes.
1. En ce qui concerne les travaux et ouvrages, on distingue trois catégories de systèmes
pour savoir si une activité, des travaux ou un projet sont soumis ou non à l’obligation
d’étude d’impact : le système d’étude préliminaire, le système de listes (positives ou
négatives) et le système mixte.
- Le système de l’étude préliminaire, adopté notamment aux USA, est celui dans
lequel les ouvrages ou activités ayant un impact important ou significatif sur
l’environnement sont soumis à l’étude d’impact. En cas de doute, il faut procéder
50
J. MORAND – DEVILLER Droit de l’environnement (1993), PUF, Paris (Que sais je ?), 2ème éd. p. 9.
51
Pour plus de détails, lire M. Prieur Evaluation des impacts sur l’environnement pour un développement durable :
Etude juridique (et l’abondante bibliographie que son étude contient réalisée pour le compte de la FAO), Cahiers
FAO : Etudes législatives n°53 Rome, 1994, (en l’occurrence p. 68 et s). Cette étude fait suite a celle conduite par
D. ALHERITIERE Evaluation des impacts sur l’environnement et le développement agricole : étude de droit
comparé, Cahiers FAO : Environnement N°2, Rome, 1981, et celle d’A. MEKOUAR Impacts sur l’environnement
des incitations économiques à la production agricole : étude de droit comparé, FAO, Etudes législatives N°38,
Rome, 1985.
41
d’autre part. La solution à ces difficultés peut varier d’une législation – et donc
d’un pays – à l’autre.
- Le contrôle par le juge, enfin, doit être envisagé et ouvert aux divers intervenants
avec des conditions de recevabilité assez souples. L’intervention des étrangers
doit être possible car leur avis est devenu nécessaire notamment en matière de
pollution transfrontière. Il serait de bonne doctrine que le recours sois suspensif
afin d’empêcher la réalisation du projet, les atteintes à l’environnement étant
présumées irréversibles, donc irréparables ou difficilement réparables.52
Enfin, l’étude d’impact est soumise en principe à la publicité. On peut se demander à priori à
quoi sert l’étude d’impact conduite par l’auteur du projet qui ne doit démontrer que son projet
ne porte pas atteinte à l’environnement et dans la mesure où elle n’est pas systématiquement
contrôlée par un organisme spécialisé. La responsabilisation éthique de l’auteur de l’ouvrage
des effets de son activité sur l’environnement reste un élément déterminant lors de la conduite
de l’étude d’impact. L’étude d’impact n’est qu’un acte de procédure et ne constitue pas un acte
administratif spécial. En plus, si un dommage subvient ultérieurement vis-à-vis des tiers du fait
de l’ouvrage ou des conséquences écologiques non prévues dans l’étude d’impact, le maître de
l’ouvrage engage sa responsabilité dans les conditions habituelles du droit des obligations quel
que soit en réalité le contenu même de l’étude d’impact. Les prévisions de l’étude d’impact
n’exonèrent en aucun cas le pétitionnaire de ses responsabilités futures.53
La plupart des législations Congolaises ne font pas expressément référence à une étude d’impact
environnemental de tout projet avant sa réalisation. Depuis belle lurette, la RDC attache moins
d’importance à l’étude d’impact environnemental. Désormais, la Loi N°11/009 du 9 juillet 2011
portant principes fondamentaux relatifs à la protection de l’environnement fait référence à une
étude d’impact.54 Considérant que les mines constituent un soubassement majeur de l’économie
52
M Prieur Op. Cit. pp. 13 – 18.
53
K. Kihangi Bindu « L’exploitation du Pétrole du Lac Edouard et la Loi environnementale en République
Démocratique du Congo » (2011) in Légal aspects of sustainable natural resources, Legal Working Paper Series,
Centre for International Sustainable Development Law (CISDL), p. 11.
54
Article 21 de la Loi du 29 juillet 2011 dispose :
« Tout projet de développement, d’infrastructures ou d’exploitation de toute activité industrielle, commerciale,
agricole, forestière, minière, de télécommunication ou autre susceptible d’avoir un impact sur l’environnement est
assujetti à une étude d’impact environnemental et social préalable, assortie de son plan de gestion, dument
approuvés.
Cette étude est propriété de l’Etat.
Un décret délibéré en Conseil des ministres détermine les différentes catégories de projets ou d’activités soumis à
cette étude, son contenu, les modalités de son approbation ainsi que la procédure de consultation du public. »
45
Congolaise55 et son impact certain sur l’environnement mais aussi l’attention accordée par la
communauté internationale pour la préservation de la forêt et des sites du patrimoine commun
de l’humanité, le Code Forestier de 2002, le Code Minier de 2002 tel que modifié en Mars 2018
et le Règlement Minier de 2003, désormais, contiennent des dispositions sur la préservation de
l’environnement et la conduite d’étude d’impact environnemental et social.
Ainsi, toute opération ou projet d’exploitation exige la conduite d’une étude d’impact
environnemental et social et un plan de gestion environnementale, exception faite de
l’exploitation de carrières temporaire.56 L’étude d’impact environnemental et le plan de gestion
environnementale du projet doivent être déposés en même temps que la demande du droit
d’exploitation. Leur approbation par l’autorité compétente est une condition d’octroi du droit
d’exploitation. L’autorité compétente pour l’étude d’impact environnemental et social est la
Direction chargée de la protection de l’environnement minier conformément aux dispositions
de l’article 42 du Code Minier. L’étude d’impact environnemental et social inclut la réunion de
plusieurs exigences.57 Au cours de la conduite de l’étude d’impact environnemental et social,
la population doit être consultée et informée au sujet du projet. Cela demeure indispensable afin
de savoir ce que pense la population du projet. Les principes, méthodes et programme de
consultation des intéressés et des parties affectées par le projet doivent être décrits dans une
annexe attachée à l’étude d’impact environnemental et social. Le rapport en annexe doit inclure
55
G. Bakandeja wa Mpungu Droit minier et des hydrocarbures en Afrique Centrale : Pour une gestion rationnelle,
formalisée et transparente des ressources naturelles, Supra, note 7, p. 255.
56
Article 407 du Règlement Minier de 2003 ; Articles 15 et 42 du Code Minier de 2002.
57
L’article 20 du décret du 8 avril 2008 fixe le contenu de l’étude d’impact sur l’environnement en ces termes :
- un résumé non technique du dossier d’étude d’impact sur l’environnement ;
- des informations générales, notamment la description du projet proposé, les caractéristiques et les limites
de la zone d’études ;
- une description de l’environnement du projet proposé : les caractéristiques physiques, biologiques et
socioculturelles, les tendances et menaces pour l’environnement ;
- une compilation des textes législatifs et réglementaires pertinents relatifs au projet proposé ;
- une identification et une évaluation des impacts positifs et négatifs potentiels, directs et indirects,
immédiats et à long terme, importants et secondaires, locaux et éloignés du projet proposé sur
l’environnement ;
- une analyse des solutions de remplacement ;
- une estimation des types et quantités des émissions attendus (pollution de l’eau, de l’air et du sol, bruit,
vibration, etc.) et impact sur la conservation de la diversité biologique occasionné par le projet ;
- une description des mesures permettant de prévenir, réduire ou compenser dans la mesure du possible de
graves détériorations de l’environnement ainsi que la description des mesures alternatives ou
d’intervention non compensables mais prioritaire dans la nature, le paysage et le milieu humain ;
- une brève description de la ou des méthodes utilisées pour la consultation des populations riveraines de
la foret, des collectivités territoriales et organisations concernées et les résultats y afférents ;
- une analyse couts/avantages ;
- un plan de surveillance et de suivi des impacts ;
- les résultats de l’analyse démographique concernant les populations susceptibles d’être affectées.
Lire aussi l’article 430 du Règlement Minier de 2003.
46
des informations sur les questions soulevées au cours des rencontres, les réponses ainsi que les
conclusions des consultations.58 Cette procédure rencontre les exigences légales de plusieurs
pays notamment en République d’Irlande, en Grande Bretagne,59 en Afrique du Sud60 et en
France. En République d’Irlande particulièrement, les lois portant sur l’environnement donnent
aux autorités locales des pouvoirs étendus dans le cadre d’un « planning permission » qui, telle
l’exploitation minière, doit être obtenue pour toute opération modifiant la surface.61 A la
lumière de ce background et les autres exigences définies par le règlement minier, l’autorité
compétente sera édifiée en vue de prendre une décision responsable. C’est dans cette
perspective qu’en août 2010 l’Honorable Célestin Vunabandi, député national, élu de Rutshuru
en province du Nord Kivu, conduisant la délégation de SOCO, s’était adressé aux membres de
la société civile à Goma pour parler de l’exploitation du pétrole au Nord Kivu. Pour la société
civile en matière environnementale du Nord Kivu, cette séance avait consisté plutôt à
convaincre qu’à informer. C’est ainsi que la société civile précitée ne s’est pas privée d’initier
une pétition adressée au premier ministre et chef du Gouvernement à travers laquelle elle
cherche à savoir si l’étude d’impact environnemental conduite par SOCO a suivi les exigences
et étapes légales.62 L’exigence d’une étude d’impact environnemental et social corrobore les
dispositions constitutionnelles environnementales sus présentées en RDC en faisant participer
la communauté locale à la prise des décisions portant sur des questions environnementales. Il
n’est pas seulement question d’informer mais aussi de tenir compte des desideratas de la
population dans son ensemble.
58
Handbook on Environmental Assessment Legislation in the SADC Region, Democratic Republic of Congo, p.
77: available at www.usaid.gov (accessed on 12/5/2009).
59
Local Governmental Planning Act 1963 and the 1976 Water Pollution Act de 1997.
60
In terms of sections 21, 22 and 26 of the Environmental Conservation Act 73 of 1989,60 Environmental Impact
Assessment had become a mandatory legal requirement for a wide range of projects. K. Kihangi Bindu
Environmental and developmental rights in the Southern African Development Community with specific reference
to the Democratic Republic of Congo and the Republic of South Africa (2010) University of South Africa, Pretoria,
Unpublished LLD thesis, p. 301.
61
E. Mukendi Wafwana Droit minier Congolais : Principes de gestion du domaine minier, Supra, note 2, p. 54.
62
L’article 27 de la Constitution du 18 février 2006 reconnait à tout Congolais le droit d’adresser individuellement
ou collectivement une pétition à l’autorité publique qui y répond dans les trois mois. Nul ne peut faire l’objet
d’incrimination, sous quelque forme que ce soit, pour avoir pris pareille initiative. Outres les actions citoyennes
de prestation, les populations locales et la société civile peuvent également introduire des actions judiciaires
tendant à solliciter l’annulation de l’acte règlementaire, par exemple un arrêté d’un ministre, auprès de la section
administrative de la Cour Suprême de Justice pour violation de la loi. G. M. Sakata Tawab Code forestier congolais
et ses mesures d’application : Commentaire pratique (2010) Bruylant, Belgique P. 53.
47
La fiscalité est un instrument complexe et délicat à manier. C’est un des leviers principaux des
finances publiques et, partant, de la politique économique. Les pouvoirs publics l’appréhendent
d’abord sous cet angle en perdant de vue ses implications sur d’autres secteurs d’activité. En
particulier, l’impôt peut jouer, soit positivement comme facteur incitatif à la protection de
l’environnement, soit au contraire négativement comme source de découragement d’une
gestion écologiquement rationnelle. Si les pays développés ont pris la mesure de son rôle dans
ce domaine, il n’en est pas de même de la plupart des pays en développement, en particulier
africains, qui ont encore de la finance – prise en son sens ancien de denier du roi et par extension
de l’Etat – une conception strictement budgétaire.63
La fiscalité est ainsi utilisée comme instrument aussi adéquat d’une politique de gestion
environnementale. Elle est abondamment utilisée dans les pays développés, soit directement,
soit indirectement dans les politiques environnementales. Dans le passé, avant même que la
conscience universelle environnementale se soit affirmée, l’impôt foncier était largement
utilisé, de façon variable d’un pays à l’autre, pour réguler l’exploitation des terres. De façon
générale, l’impôt était assis, soit sur la valeur en capital de la terre, soit sur sa capacité
productive approximative. Cet impôt foncier pouvait cependant avoir des conséquences
négatives sur l’environnement, son impact pouvant être indirect ou accidentel. Mais bien
souvent il a eu des conséquences positives. L’exemple le plus répandu est la taxe sur l’entretien
et l’amélioration des sols, qu’il s’agisse du drainage des terrains marécageux, du nettoyage des
forets, des plages et bords de mer, du défrichage des terres abandonnées, etc.
Plus généralement, le système fiscal est utilisé dans les pays développés pour promouvoir une
utilisation rationnelle des ressources naturelles. Il n’est point douteux que la taxation exerce
une influence sur les activités des contribuables de ce secteur, bien qu’il ne soit pas aisé d’en
mesurer toutes les conséquences. On distingue quatre types de mesures fiscales susceptibles
d’être utilisées comme instruments d’une politique de gestion de l’environnement : les mesures
fiscales incitatives, les mesures fiscales dissuasives, les exemptions fiscales de certaines
activités, et les exemptions fiscales de certaines personnes ou de certains corps.
63
T. TSCHITT « Les mesures incitatives et fiscales de protection des forets » Rapport de synthèse au colloque de
Limoges du Réseau « Droit de l’environnement » de l’AUPELF/UREF in Maurice Kamto op. cit. p. 102.
48
La pleine efficacité de la fiscalité et autres mesures financières comme moyen d’une politique
de gestion rationnelle de l’environnement exige toutefois que ces mesures fiscales tendant à
favoriser la protection de l’environnement ne soient pas des mesures ponctuelles ou isolées,
mais qu’elles s’intègrent dans l’ensemble du système fiscal global. Une réforme dudit système
parait alors nécessaire pour mieux intégrer ces préoccupations. On ne saurait conseiller assez
aux pays africains où la fiscalité écologique est très timide encore, voire inexistante dans
certains pays.
Lire :
Kennedy Kihangi Bindu, « La justiciabilite du droit à l’environnement consacré par la
Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de 1981 en République
Démocratique du Congo », Revista Catalana De Dret Ambiental, Vol. IV, N° 1, 2013, PP.
1-34.
VII. Le cadre légal et règlementaire de la conservation de la nature
Loi N° 11/2002 du 29 Aout 2002 portant Code Forestier en RDC et ses innovations.
de nombreuses années ont dévasté la région. Selon la Cour, le droit à l’alimentation et à la vie
sociale des peuples du delta du Niger a été violé par la détérioration de leur environnement,
détruisant ainsi leur possibilité de gagner leur vie et de jouir d’un niveau de vie sain et
satisfaisant.64
Les actions individuelles et collectives organisées par la loi en RDC doivent respecter toute la
procédure lors de la saisine d’une juridiction. Les conditions générales pour intenter en justice
qui sont la capacité, l’intérêt et la qualité ne les excluent pas les personnes physiques et morales
ainsi que les ONGs à saisir le juge (articles 134 du Code Forestier et 108 de la Loi sur l’eau de
2015). Cela est une évolution impressionnante de la législation congolaise en matière
environnementale. Cependant, il y a encore des efforts à fournir par rapport à la mise en
application des textes existants. La population devra être conscientisée à saisir le juge chaque
fois que de besoin, mais aussi le juge devra développer une expertise et une attention soutenue
en cette matière. Il est fort étonnant que le contentieux environnemental soit quasi inexistant
devant les juridictions congolaises malgré les cas de violations quasi quotidienne de la
législation environnementale. La jurisprudence en RDC n’a donc pas encore contribué,
notamment à la définition des régimes de protection de l’environnement et de l’étendue des
droits environnementaux en ce domaine.
64
Kennedy Kihangi Bindu, « La justiciabilité du droit à l’environnement consacré par la Charte Africaine des
droits de l’homme et des peuples de 1981 en République Démocratique du Congo », RCDA, Vol. IV, Number 1,
2013, P. 27.
51
- Le Statut de Rome
- Et très bientôt, notre ouvrage de droit Congolais de l’environnement.
XI. Conclusion
Travaux Pratiques
14. K. Kihangi Bindu Environmental and developmental rights in the Southern African
Development Community with specific reference to the Democratic Republic of Congo
and the Republic of South Africa (2010) University of South Africa, Pretoria,
Unpublished LLD thesis.
15. Kennedy Kihangi Bindu, « La justiciabilite du droit à l’environnement consacré par la
Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de 1981 en République
Démocratique du Congo », Revista Catalana De Dret Ambiental, Vol. IV, N° 1, 2013.