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Sujet n° 1 : Le XIXe siècle a-t-il été le siècle

du libre-échange ? (Oral ESCP)


Introduction : Une mise en perspective historique

Le libre-échange = Système dans lequel les échanges commerciaux entre États sont libres, cela
concerne les flux commerciaux à l’importation et à l’exportation. C’est une démarche d’ouverture des
frontières qui s’oppose au protectionnisme.
Il n’est pas une évidence historique, elle s’est développée avec une volonté de valorisation de
production interne.
Il faut distinguer le protectionnisme tarifaire (1) et non-tarifaire (2).
(1). C’est une taxe prélevée par l’Etat du pays importateur = droit de douane. Ils sont calculés en %
de la valeur des importations. Ils augmentent artificiellement les prix à l’importation. Il y a une
distorsion de la concurrence, ce qui diminue la concurrence en dépend des consommateurs.
Il y a deux types de consommations qui se répercute finalement sur le consommateur :
-consommations final (s’adresse directement au ménage)
-consommations intermédiaire (s’adresse aux entreprises).
Du fait de la décomposition de la chaine de valeur, le prix se répercute sur toute la production.
(2). L’aspect qualitatif, avec la question des normes, tel que celles pour la santé, l’environnement, la
protection des consommateurs.
L’aspect quantitatif, avec le cas extrême étant la prohibition, ou d’autre comme l’établissement
de quota.

GRAPHIQUE Indice de l’ouverture commerciale : somme des exportations et importations mondiales divisée par le PIB
mondial (en %)

Source : Douglas A. Irwin, The pandemic adds momentum to the deglobalization trend, PIIE, Realtime
Economic Issues Watch (blog), 23 Avril 2020.

Taux d’ouverture = (X + M) / 2Y.


X= exportation ; M=importation ; Y=PIB
Analyse graphique :

1-ère phase : 1870-1914, il est appelé la « première mondialisation ».


2-ème phase : entre 2 guerres, notamment après la crise de 1929, durant la dépression des années 30.
3-ème phase : entre 1945-1980, « internationalisation », le terme actuel est « mondialisation ».
4-ème phase : après 1980, « la globalisation », assiste à un replie progressif (PIB augmente plus que les
importations et les exportations) recule du taux d’ouverture.

Problématique : Dans quelle mesure les apports théoriques au libre-échange ont-ils été appliqués au
XIXe siècle ?

I. Le XIXe siècle a été le siècle d’une rupture théorique majeure et d’une propagation
inédite du libre-échange…

1. Une rupture classique à l'égard du mercantilisme (pp 158-159)

- Des gagnants et des perdants

Antoine de Montchrestien ‘’nul ne gagne ce que d’autres ne perde’’. Cette citation confirme le point
de départ de l’histoire était le protectionnisme, il paraissait comme une évidence pour ne pas être les
perdants. On peut faire un parallèle avec le modèle colbertiste en France.
Pour Smith, il va aborder la thèse de la loi de l’avantage absolue qui s’oppose au mercantilisme.

Avantage absolue = désigne la capacité d'une entreprise, d'un pays ou d'un individu à produire un bien
en plus grande quantité par rapport aux autres avec un nombre de facteurs de production égal, voire
moindre
Mercantilisme = Ancienne doctrine économique (des xvie et xviie siècles) fondant la richesse des États
sur l'accumulation des réserves en or et argent.

Pour lui, il n’y a pas de raison de s’interdire d’importer, afin de bénéficier d’avantages absolue. Son
raisonnement est limité car si on ne fait qu’importer, on ne produit plus.

Mais son raisonnement a permis d’inspirer et donc l’arrivé de la thèse de Ricardo avec sa loi des
avantages comparatifs
.
- Un jeu “gagnant-gagnant” : le modèle ricardien

Un désavantage absolu peu se transformer en avantage comparatif. Même un pays qui n’aurait que
des désavantages absolus, aurai tout de même intérêts à s’investir dans la mondialisation afin de
pouvoir bénéficier d’avantages comparatifs.
Ricardo développe sa thèse avec un exemple entre l’Angleterre et le Portugal.

Angleterre Portugal
Drap 100 90
Vin 120 80

Malgré le désavantage absolu de l’Angleterre, elle a tout intérêt à être investie dans la mondialisation.
Le Portugal va pouvoir concentrer son activité de production dans une seule branche, celle ou il est le
plus productif et avec un meilleur rendement une meilleure efficacité (le vin). L’Angleterre quant à
elle va produire des Draps car c’est la branche ou elle est le moins pire.

Angleterre Portugal
Drap 100 (1 unité + 120/100 unité) = 2.2 90 (0 unité)
Vin 120 (0 unité) 80 (1 unité + 90/80 unité) = 2.125

La spécialisation permet globalement de dégager un surplus. La question qui se pose va alors être
comment va se passer l’échange entre l’Angleterre et le Portugal, autrement dit il est question de
savoir les termes de l’échange.
Pour que l’Angleterre soit gagnante, il faut que pour 1.2 unité de drap, elle obtienne au moins 1 unité
de vin. Et il faut suivre le même raisonnement pour le Portugal.

2. Une influence concrète (pp 192-193)

- La théorie de la rente foncière

Ricardo s’intéresse à la répartition du revenu au niveau national, il distingue 3 grandes catégories :


-propriétaire terrien
-salarié des industries Depuis la R.I
-propriétaire du capital productif

L’élément clé étant le prix du blé.


La rente à l’unité c’est : le prix – les coût. La variable étant ici le prix, qui fluctue suivant le marché.
Donc les gagnants sont les propriétaires terriens, les salariés sont quant à eux dans une position
neutre.
Si le prix augmente, les rentes augmentent, les salaires augmentent également, donc les profits
diminuent, donc les propriétaires du capital sont perdants.
Quand il y a une croissance démographique, on met en valeur les terres les moins fertiles, qui sont
plus couteuses à entretenir. Et par conséquent les prix du blé ont tendance à augmenter. Le
protectionnisme aussi peut influencer sur le prix du blé.

- Une abolition des corn laws

En 1846, à la mort de Ricardo qui a lutté contre ces lois, les corn laws sont abolis.
C’est une loi protectionniste qui se met en place quand le prix du blé avait tendance à trop baisser,
afin de protéger le producteur. Elle se caractérise par une fermeture des frontières.
C’est en 1815, à la suite des guerres Napoléonienne que vont être remise en cause les corn laws. Car
durant le premier empire, l’Angleterre connaissait un blocus, donc il n’y avait pas d’échanges, et par
conséquent le prix du blé était élevé. Mais, suite à la réouverture des échanges suites à la fin du
blocus, le prix du blé a été divisé par 2. Les corn laws ont donc été appliqués.
Ricardo critique ces lois car il estime qu’elles ne sont pas favorables aux consommateurs et qu’elles
profitent uniquement à la bourgeoisie. (pour l’industrie secteur secondaire).
A cette pensée, Malthus va s’y opposer, car il est favorable au propriétaire de terre. (pour l’agriculture
secteur primaire).
Par ailleurs, c’est le siècle ou le libre-échange va se mettre en place.
3. Une diffusion du libre-échange (pp 193-194, pp 195-196)

- Une multiplication des traités

L’Angleterre est un pays pionnier dans le développement du libre-échange, et pas seulement dans le
secteur du blé.
Lorsqu’un pays est sûr de sa puissance, ils ont tendance à être libre-échangiste (unilatéral).
L’Angleterre va également bénéficier de l’ouverture de la France. Avec la signature du traiter de
commerce franco-britannique de 1860, couramment appelé traité Cobden-Chevalier, qui est un traité de libre-
échange signé le 23 janvier 1860 entre l'Empire français et le Royaume-Uni, destiné à abolir les taxes
douanières sur les matières premières et la majorité des produits alimentaires entre les deux pays.
Mais l’Angleterre va également pratiquer du libre-échange avec d’autre pays tel que la Chine ou elle va imposer
l’échange de l’opium.

La France va elle aussi développer sa politique libre-échangiste avec d’autre pays par le biais d’accord
(bilatéral).

- Une clause de la nation la plus favorisée

Quand un pays bénéficie de cette clause, il va automatiquement bénéficier de toute accord plus
avantageux qui sera signé entre le pays de la clause et un autre pays.

II. … mais il faut attendre l’après-seconde Guerre mondiale pour voir émerger les
premières institutions multilatérales capables de pérenniser le phénomène

Il existe deux raisons, une première qui est institutionnelle et une autre qui est factuelle.

1. Une évolution plus significative du libre-échange (pp 196-197)

- Du projet de l’OIC au GATT

Après la 2 G-M, il y a une volonté d’internationaliser le commerce avec la création de l’OIC. Le


président des Etats-Unis, en sortant avec une économie renforcer de la 2 G-M, va se mettre à défendre
le libre-échange. Mais le projet de libre-échange ne va pas être appliqué dû au vote défavorable du
Congrès (chartre de la Havane en 1948).
Donc comme l’organisation ne ce n’est pas créée, on va se reposer sur un accord provisoire (le
GATT), en l’attente d’une organisation, normalement OIC qui n’est pas venu. Il va donc tenir durant
50 ans, jusqu’à la création en 1995, de l’OMC.
Cet accord (le GATT) va avoir besoin d’être réactualisé durant son application pendant 50 ans. Et
c’est souvent les USA qi vont être à l’origine de ces réformes.
NCM = négociation commercial multilatéral. On peut observer une augmentation du nombre
d’adhérents.

- Une extension de la Clause de la Nation la Plus Favorisée


Lié à une évolution, une augmentation du nombre d’adhérents au GATT. Cette clause va impacter
beaucoup plus les pays.
Pour les premières dates, on négocie produit par produit et elles sont très courte. Mais avec le temps,
les négociations vont s’allonger, c’est surement dû à une négociation plus difficile. Il va y avoir une
baisse forfaitaire des droits (plus produit par produit). Ex : Kennedy round.
Dans le GATT, tous les acteurs ne sont pas au premier plan. Donc tous les produits vont alors
connaitre une baisse des droits (du plus haut prix, au plus faible).
Les Etats-Unis sont pour une application de la même baisse sur tous les produits, contrairement à
l’Europe qui trouve que le protectionnisme très sélectif. Il propose de baisser d’avantage les droits les
plus élevés, que les droits les plus faibles.

2. Une “consolidation” du phénomène

- Une alternance entre libre échange et protectionnisme à la fin du XIXe siècle


(pp 171-172)

Le but du GATT n’est pas de détruire le protectionnisme, mais qu’il ne revienne pas.
L’histoire est marquée par une alternance entre libre-échange et protectionnisme, à partir du milieu du
XIX -ème siècles avec le premier traité franco-britannique.
L’Angleterre est resté fidèle au libre-échange, toute la fin du XIX -ème siècles, il faudra attendre la
dépression des années 30 pour que l’Angleterre retrouve une politique protectionnisme avec la
dépression.

Pour Bairoch, il y a des ilots de libre-échange parmi des champs de protectionnisme.

Pour l’Allemagne, lors du retour de l’empire, ils vont d’abord mener une politique de libre-échange
pour ensuite retrouver une politique protectionnisme.

Quant au USA, ils n’ont jamais mené une politique de libre-échange durant la 2 -ème partie du XIX -
ème siècles, dû à la guerre de sécession. Alors que le sud était préférable à une politique libre-
échangiste dû à leur spécialisation dans l’agriculture. Quant au nord, il était spécialisé dans l’industrie
moderne, donc ils étaient favorables dû au protectionnisme.
Comme c’est le nord qui s’impose, c’est la raison pour laquelle les Etats-Unis menaient des lois
protectionnistes.

La Russie et le Japon ont le point commun de s’industrialiser tardivement au XIX -ème siècles.
Le déclencheur de ce processus au Japon, est le phénomène d’otarsie entrainé par les USA. Obligeant
le Japon à s’ouvrir, donc à se modernisé. En copiant l’occident pour éviter de subir l’ouverture (le
libre-échange). Pour la Russie, ils vont favoriser le protectionnisme.

Aux XIX -ème siècles, le libre-échange est donc instable, ce qui est conforté durant les années 1930,
avec la mutation. Dont le premier pays à avoir augmenter son tarif douanier est les Etats-Unis, avec
plus de 60%. Puis, à la suite, tous les pays partenaires vont appliquer la même politique. (Modèle qui
s’auto-entretient).
Pas comparable avec les chocs pétroliers, car cela n’entraine pas de dépression, mais les pays
développés vont avoir une croissance plus faible et plus chaotique.

- Une réponse aux erreurs des années 1930 (p 197)

3. Une régulation du fair trade

- Une problématique évoquée dès le XIXe siècle par les théoriciens (p 171) et
les acteurs (p 195)

List, avec le protectionnisme éducateur = un pays qui n'a pas atteint le dernier stade de son
développement sera perdant s'il s'ouvre au commerce international car son industrie sera
trop faible.
Il considère que si les états germaniques ont voulu même une politique libre-échangiste
avec l’Angleterre, elle risque d’être perdante. Car l’industrialisation Anglaise est déjà bien
développé contrairement à l’Allemagne qui était une industrie naissante.
C’est un auteur libéraliste qui prône le libre-échange mais pas dans toute les conditions, ex :
celui-ci-dessus.
Ex : industrie du rail face à la concurrence Britannique.
Le protectionnisme éducateur est un protectionnisme temporaire.
L’acteur en question c’est Jule Melin s’applique essentiellement à l’agriculture. Selon lui, la
France risque d’être trop facilement concurrencé, si elle ne se protège pas, face au pays
neufs (émergents) ex : la Russie. Il existe des pays avec de meilleur condition que la
France.

Source : Krugman, Obstfeld, Economie internationale, 1987


- Un ORD (p 200-201)

C’est une entité qui fait partie de l’OMC. Il existe 2 axes :


-conférence ministérielle (réunisse tous les pays membres) doivent avoir un lien tout les 2 ans.
Opposé au GATT, dans lequel il n’y a pas de date précise de réunion. Chaque pays représente une
voie, et pour qu’une mesure soit effective, il faut que tous les pays soient d’accord.
-ORD, organe règlement des différends, il ne fonctionne que si on le sollicite. Souvent, il y a
des plaintes qui concerne le caractère déloyal de la concurrence, ex : la plainte de l’UE envers les
entreprises de panneau photovoltaïque chinoise, qui pratiquaient le dumping.
Ces procédures existaient déjà dans le cadre du GATT, la différence est qu’avec l’OMC, la procédure
est très encadrée, clairement établie, on considère qu’elle ne peut pas durer plu sde 15 mois.
Il s’agit de fixer des règles plus équitables.

Conclusion : Non ! Au moins pour 2 raisons :


-institutionnelle, pas émergence de régulation globale du commerce
-le libre échange à très souvent été mis en cause.
Sujet n° 2 : Etat-nation et FMN (Oral
ESCP)
“Les FMN (...) sont apatrides, et ne brandissent que la bannière de leurs clients. “ K. Ohmae, The borderless
world - Power and strategy in the interlinked economy, 1990 (pp 113-114)

Introduction : Les déterminants de la multinationalisation des firmes. (pp 118-120)

Ohnaé, année 1980, triade, émergence d’un troisième pôle : asiatiques qui vient concurrencer pôle
européen et américain, il parle de monde multipolaire. But est expliqué qu’il y a une certaine
homogénéisation des niveaux de vie. Les FMN vont également contribuer à cette homogénéisation.
Les FMN sont sans partis, elles oublient leur terre d’origine.
Dunning propose un modèle afin de synthétiser les différentes manières pour une entreprise de
s’internationaliser. Pour lui, il existe 4 manières principales, dont l’une qui sont les IDE qui réunissent
3 avantages :
-ownership advantage
-location advantage
-internationalisation advantage
Le commerce entre FMN représente un tiers des échanges commerciaux mondiaux.

Problématique : Dans quelle mesure les FMN menacent-elles la souveraineté économique des Etats ?

I. Des firmes qui échappent largement au cadre de l’Etat-nation

1. Une contribution essentielle à la mondialisation

S’il y a eu un passage de l’internationalisation à la mondialisation, c’est en parti dû aux FMN, avec la


progression exponentielle dans les années 1980 d’IDE (Investissement Direct à l’Etrange).
Si on évalue ce ratio sur une longue période :
A la vieille de la 1 G-M, on était à 10%.
En 1960, on était à 4% rapporté aux PIB. (cela confirme que les IDE ont vécu, comme les
flux commerciaux, un repli).
En 1995, on retrouve le niveau de 1914,
Aujourd’hui on est à plus de 40%
Ce qui montre bien cette croissance exponentielle des IDE. Sachant que depuis 2008, il y a une
tendance à la stabilisation.

- Des firmes “globales” (p 139)

C’est Porter qui a fait référence à ce terme, ou il oppose les firmes globales et les multidomestiques.
Firmes globales = entreprise qui tente d’imposer leurs produits sur le marché international.
Firmes multidomestiques = entreprise qui s’adapte à la spécificité de chaque marché.
Du point de vue capitaliste, la firme globale est meilleure car elle permet de réaliser une plus grande
économie d’échelle.
Existe firme qui sont un peut entre les deux avec McDonald’s, = glocalisation.

- Une harmonisation des normes comptables (p 137)

Les entreprises externalisent les services de comptabilité. Depuis les années 1980, il y a une volonté
de la part des actionnaires avoir plus de visibilité sur l’activité économique.
On arrive alors à une standardisation, dont l’origine sont les différents cabinets d’audit qui sont eux
aussi des firmes. C’est une logique d’homogénéisation, de standardisation.

2. Une organisation de la DIT qui transcende les frontières nationales (p 176)

L’organisation de la DIT transcende les frontières nationales. Se pose la question de la part de la


valeur ajouté faite dans chaque territoire.
Dans la théorie classique et néo-classique, il n’y a pas de mobilité de facteur de production.

- Des délocalisations massives

Il est difficile de délimiter lorsqu’un IDE est une délocalisation. L’un des critères est la prise en
compte des importations.
En France, les FMN semblent avoir plus d’impact sur l’économie, que d’autres pays européen
comparable, du fait des délocalisations inégales.

Sur le rôle des FMN dans la désindustrialisation en France, cf “La force de ses multinationales est-elle une
chance pour la France ?”, TELOS - 2 avril 2021

- Une “optimisation fiscale”

Le terme est employé par les entreprises, dans une logique de rentabilité.
L’Union Européenne n’a pas été capable d’établir une homogénéité fiscale. Ex : les impôts sur les
bénéfices ; 12% en Ireland 30% en France.
Donc les FMN sont capables de mettre en concurrence les états.
Gabriel Zuckman a cherché à rendre plus transparent ce qui ne l’était pas.

Graphique : Profits des multinationales transférés dans les paradis fiscaux et perte en recettes fiscales
occasionnées par ce transfert
source : Ludvig WIER & Gabriel ZUCMAN (2022), « Global profit shifting, 1975–2019 », WIDER, working
paper, n° 2022/121.

Le contexte était favorable pour les FMN.

II. Des FMN face aux Etats

1. Accords et désaccords à l’échelle internationale

- Une entente secrète entre les “sept soeurs” : les accords d’Achnacarry (p 131)
- Une contribution au blocage du protocole de Kyoto (p 67)

2. Des actions judiciaires contre les Etats

- Une augmentation du poids des FMN avec la bénédiction des Etats


(pp 174-175 )
- Une influence des juridictions privées (p 202)

III. Mais des limites au pouvoir des FMN

1. Des firmes qui restent attachées à leurs territoires d’origine

- Des firmes apatrides ?


Pour une illustration des liens pérennes entre Etats et FMN, cf “La force de ses multinationales est-elle une
chance pour la France ?”, TELOS - 2 avril 2021
- Des spécificités nationales (p 137, p 139)

2. Des Etats qui ne restent pas inactifs

- Des réglementations (p 68)


- Des actions judiciaires (p 132)
Sur l’établissement d’un taux minimal d’imposition sur les FMN, cf “Qu'est-ce que l'impôt mondial sur les
multinationales ?”, Toute l’Europe - le 18.01.2022
La force de ses multinationales est-elle une chance pour la France ?

Pierre-André Buigues - TELOS - 2 avril 2021


Professeur à Toulouse Business School, ancien conseiller économique de la Commission Européenne

Tous les ans, le magazine Fortune publie le classement des 500 plus grandes multinationales dans le
monde sur base de leur chiffre d’affaires. Avec 31 entreprises, la France conserve depuis plus de deux
décennies le quatrième rang mondial après les Etats-Unis, la Chine et le Japon, mais devant
l’Allemagne (29 multinationales), et la Grande-Bretagne (17 multinationales). La performance
remarquable des grandes multinationales françaises est à l’opposé du déclin de la France qui apparaît
clairement à travers d’autres indicateurs économiques.
La part de marché mondiale de la France pour l’exportation de biens est passée de 6,3 % en 1990 à
5,1% en 2000, et seulement 3,0 % en 2019, la balance commerciale française, solde entre les
exportations et importations de biens, est déficitaire depuis 2004, et en 2019, ce déficit atteignait près
de 59 milliards d’euros. Le trou du commerce extérieur s'est même aggravé en 2020, à 65,2 milliards
d'euros. Enfin, depuis 1980, la part de l’industrie dans le PIB a reculé de 10 points, s’établissant à
13,4% en 2018. Comment expliquer ce paradoxe français, des multinationales très fortes et une
économie en déclin ?
La réponse tient en une phrase: les multinationales françaises sont les championnes européennes de la
délocalisation. Elles réalisent la majeure partie de leur activité et de leurs profits hors de France. Nos
multinationales ont beaucoup plus délocalisé que celles des autres pays européens à tous les niveaux.
Ce choix stratégique de développer les investissements directs à l'étranger plutôt que d’investir sur le
sol national et d’exporter, explique pour une large part le déficit commercial de la France.
Ainsi, le rapport de France Stratégie sur Les politiques industrielles en France et en Europe révèle
que l’emploi des filiales industrielles à l’étranger des groupes français correspond à 62% de l’emploi
dans le secteur industriel en France, contre 52% au Royaume-Uni, 38% en Allemagne, 26% en Italie
et 10% en Espagne. Si on considère seulement l'activité des groupes du CAC 40, 70% de leur chiffre
d'affaires est localisé à l'étranger ainsi que les deux tiers de leurs effectifs. De plus, ce processus de
délocalisation des multinationales françaises s’est fortement accentué dans la dernière décennie. Le
stock d’investissements directs étrangers détenu par les groupes français représente près de 63% du
PIB en 2019, alors qu’il était seulement de 25% en 2000.
Les multinationales françaises sont ainsi de moins en moins sensibles à la conjoncture économique de
la France. Malgré la crise du Covid, selon le baromètre des grandes entreprises françaises réalisé par
Eurogroup Consulting fin novembre et début décembre 2020, 68% des grandes entreprises françaises
interrogées se déclarent optimistes pour 2021. Elles prévoient une reprise forte de leurs activités hors
de France, mais à l'inverse, la France constitue leur principale variable d'ajustement, avec une forte
probabilité de réduction de l’emploi dans notre pays. Comment expliquer ces choix stratégiques ?
Les dirigeants de ces « multinationales françaises » sont redevables devant leurs seuls actionnaires,
comme le montre le cas récent de Sanofi. Or, dans le cas des « multinationales françaises », les
investisseurs étrangers sont très présents. Selon l'étude annuelle 2019 de la Banque de France, sur les
36 sociétés du CAC 40 résidentes en France, les investisseurs étrangers détenaient en moyenne 42,2%
du capital. Comme les autres multinationales, les multinationales du CAC 40 soignent leurs
actionnaires. Elles leur ont versé 57,4 milliards d'euros en 2018, un montant qui a augmenté de 62%
en dix ans. Ces « multinationales françaises » vont donc localiser leurs activités sur les marchés
géographiques les plus profitables, sans accorder de priorité particulière à la France.
Ce qui est alors tout à fait paradoxal, c’est alors l’intérêt du gouvernement français à mettre en avant
son patriotisme économique pour « sauver ces multinationales françaises » d’un rachat par un groupe
étranger, comme l’illustre de nombreux exemples, ou de leur éviter la faillite par des aides publiques
massives.
Contrairement aux discours de certains économistes qui considèrent que la France a abandonné « dans
des conditions hallucinantes, que l’on ne retrouve nulle part ailleurs, Pechiney, Lafarge, Arcelor,
Alcatel, d’Alstom » (Cahier du Cercle des économistes), la France a toujours défendu avec force ses
champions nationaux. Cette détermination du gouvernement français s’est traduite à de nombreuses
reprises. En 2004, Sanofi lance une OPA hostile sur Aventis, un groupe franco-allemand deux fois
plus gros que lui. Le Suisse Novartis, à la demande d’Aventis, veut intervenir comme chevalier blanc.
Le gouvernement Raffarin soutient ouvertement la création d’un champion français mondial et l’OPA
de Sanofi sur Aventis est un succès. En 2005, circule une rumeur d’OPA de l’américain Pepsi sur
Danone. Dominique de Villepin, Premier ministre, annonce alors la publication d’un décret sur la
protection des entreprises françaises appartenant à onze secteurs, dont l’agroalimentaire. Plus
récemment, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, s’est opposé à une éventuelle acquisition du
groupe Carrefour par la société canadienne Couche-Tard, et cette décision a été approuvée par
l’ensemble du monde politique.
Bizarrement, si le soutien du gouvernement français pour ses « champions nationaux » s’est rarement
démenti, la France, à de rares exceptions près, a laissé des start-up technologiques françaises être
rachetés par des groupes étrangers
Les entreprises françaises savent aussi qu’elles peuvent compter sur l’argent public en cas de crise.
Selon des données de la Commission européenne, avec 155,36 milliards d’euros, la France est le pays
de l’Union européenne à avoir alloué le plus d’argent aux entreprises touchées par la crise du Covid-
19. Ce chiffre porte sur la période allant de mi-mars à fin 2020 et concerne les aides d’État accordées
sous forme de subventions directes, de prêts, de garanties et d’autres dispositifs. L’Allemagne,
troisième pays européen dans ce classement, a accordé pour le moment aux entreprises un montant
d’aides bien inférieur à la France, 104,25 milliards d’euros.
Si les « multinationales françaises » continuent de se classer dans les premières mondiales, il n’en est
pas de même pour les autres entreprises industrielles françaises. Dans la nouvelle compétition
mondiale, il y a d’un côté les gagnants, « ces multinationales françaises », qui sont choyés par le
gouvernement, et de l’autre, les PME, les ETI françaises qui produisent dans une large majorité sur le
sol national, mais dont un grand nombre disparaît chaque année, et des start-ups rachetées par des
groupes étrangers. Entre le début des années 2000 et 2016, le nombre d’entreprises industrielles de
plus de 20 salariés en France a diminué de près de 40% quand il progressait de 2% en Allemagne et
reculait de 23% en Italie dans l’intervalle (Cahier du Cercle des économistes). Concernant les start-
ups, depuis 2017, quelque 500 entreprises de la French Tech ont été rachetées par des géants de la
Silicon Valley.
Ne serait-il pas plus conforme à l’intérêt bien compris de la France de se préoccuper de la production
sur le sol national plutôt que des « multinationales françaises », qui n’ont pas grand-chose de
français ? Imaginons que les aides considérables destinées à ces « multinationales françaises » soient
redirigées vers des entreprises de taille intermédiaire, et aux start-up de la French Tech.
Ce n’est pas le cas aujourd’hui : une seule de ces « multinationales françaises », Sanofi, a reçu du
gouvernement français au titre du Crédit impôt recherche 160 millions d’euros. Ce chiffre est à
comparer aux aides à l’exportation que le gouvernement français consacre cette année pour toutes les
PME, 250 millions d'euros. Le CIR qui représente un montant de 6,5 milliards d’euros ne devrait-il
pas être réservé aux PME ?
Baptisé « France Relance », le plan de 100 milliards d’euros du gouvernement français pour relancer
l’économie française comporte heureusement 35 milliards d’euros destinés à l’industrie, et en
particulier 10 milliards de baisse pérenne des impôts de production qui va bénéficier à toutes les
entreprises quelle que soit leur taille. Cependant, face à la crise économique actuelle, les grandes «
multinationales françaises » ont été les premières servies. Le ministère de l’Économie a accordé des
prêts garantis par l’État pour un montant de 5 milliards d’euros à Renault et de 7 milliards à Air
France, deux grands groupes touchés de plein fouet par la crise. Subventionner Renault, c’est en
réalité subventionner la Roumanie, le Maroc ou la Turquie, en Espagne puisque les plus grosses
usines Renault sont désormais dans ces pays, et 80% des mécaniques de Renault sont produites hors
de France. Ce soutien financier du gouvernement français à Renault n’a pas empêché cette «
multinationale française » d’annoncer en mai 2020, la suppression de 15 000 emplois dans le monde,
dont 4 600 en France. Air France envisagerait aussi de couper drastiquement dans ses effectifs dans
notre pays.
On peut s’interroger sur les raisons de ce soutien sans faille du gouvernement français à ces «
multinationales françaises ». Est-ce que la proximité personnelle des dirigeants des « multinationales
françaises » et des membres du gouvernement joue un rôle dans ce soutien ? Ils appartiennent tous au
noyau dur des élites françaises, des personnes ayant les mêmes formations, se connaissant, et
montrant hélas, souvent tous la même arrogance résultant du prestige de leur diplôme.
L’arrogance méritocratique des élites formatées sur le même modèle fait aujourd’hui l’objet de
critiques nombreuses dans les démocraties occidentales. Comme le souligne le professeur de
philosophie politique à Harvard, Michael J. Sandel, dans son dernier livre La Tyrannie du mérite, le
ressentiment des classes moyennes, comme des petits patrons, à l’égard des élites, ministres et
dirigeants de multinationales, est alimenté par l’idéologie de la méritocratie. Ces gagnants de la
globalisation se sont mis à croire que leur réussite était le fruit de leur seul travail, que ce qu’ils
gagnaient était à la mesure de leur mérite mesuré par leur diplôme.
Qu'est-ce que l'impôt mondial sur les multinationales ?

Toute l’Europe - le 18.01.2022

Le 8 octobre, 136 pays se sont accordés sur le lancement d’un impôt mondial sur les entreprises
multinationales. Fixé au taux de 15 % et prévu pour 2023, il pourrait mettre fin aux paradis
fiscaux et avoir d’importantes répercussions en Europe.

“Ensemble, nous pouvons instaurer un impôt minimum mondial pour assurer la prospérité de
l’économie mondiale sur la base de règles du jeu plus équitables”. Le 5 avril 2021, la secrétaire
d’Etat américaine au Trésor Janet Yellen proposait de “mettre fin à la course vers le bas” en
matière d’impôt sur les sociétés. Avec un principe simple : dès qu’une multinationale paierait
moins de 21 % d’impôts à l’étranger, son pays d’origine récupèrerait la différence.
Après plusieurs mois de négociations sous l’égide de l’OCDE (l’Organisation de coopération et
de développement économiques), c’est finalement le taux de 15 % d’imposition qui a été retenu.
Le 8 octobre, 136 (137 aujourd’hui) des 140 pays réunis dans le “cadre inclusif” de l’OCDE et
du G20 ont ainsi approuvé cette vaste réforme de la fiscalité des multinationales, dont l’entrée
en vigueur est prévue pour 2023.

Impôt mondial à 15 %
En principe, toute entreprise de l’un des pays de l’accord sera in fine imposée à 15 % sur ses
bénéfices, quels que soient les pays dans lesquels elle opère. Ainsi, une société américaine dont les
profits sont localisés dans un paradis fiscal, et qui à ce titre ne paie aujourd’hui pas d’impôts, sera
désormais contrainte d’en reverser 15 % aux Etats-Unis. Autre exemple : une entreprise française,
taxée quant à elle au taux de 9 % dans un autre pays à faible fiscalité, devra verser la différence à la
France, soit 6 % d’impôts supplémentaires.
Les entreprises concernées sont nombreuses : il s’agit de toutes celles qui génèrent plus de 750
millions d’euros de recettes annuelles et qui ont leur siège dans l’un des 137 pays signataires,
dont 26 des 27 des Etats membres de l’Union européenne à l’exclusion de Chypre.
Plusieurs aménagements ont été prévus, en partie pour convaincre les Etats récalcitrants. Les
entreprises pourront ainsi déduire, la première année, 10 % de leur masse salariale et 8 % du
montant de leurs actifs corporels (les biens qu’elles possèdent et utilisent effectivement) de leur
base imposable. Des taux qui diminueront progressivement pour atteindre 5 % dans les deux
cas au bout de cinq ans. Ainsi, une société du web réalisant 10 milliards d’euros de bénéfices en
Irlande, dont la masse salariale représenterait 4 milliards d’euros et les actifs incorporels 3 milliards
d’euros, devra verser 1,4 milliard d’euros d’impôts à l’Etat irlandais en 2023.
Les entreprises chinoises présentes dans cinq pays maximum et détenant moins de 50 millions
d’euros d’actifs à l’étranger seront quant à elles exemptées de cet impôt mondial pendant 5 ans.
Enfin, les entités publiques, organisations internationales, organisations à but non lucratif,
fonds de pension et fonds d’investissement ne sont, sauf exception, pas concernés par ce volet de
la réforme.
Selon l’OCDE, la mesure devrait fortement limiter l’évasion fiscale des multinationales et générer
chaque année “150 milliards de dollars de recettes fiscales supplémentaires”.

Mieux répartir les bénéfices


Ce taux minimum de 15 % représente le “pilier 2” de l’accord. Pour faciliter les négociations,
l’administration Biden avait également proposé de remettre à plat l’autre volet du projet de
l’OCDE : taxer les multinationales non plus en fonction de leur seule présence physique dans un
pays mais des activités - et des bénéfices - qu’elles y réalisent. Ou, pour l’écrire comme l’OCDE,
“réattribuer une partie des droits d’imposition sur les grandes entreprises multinationales de leurs pays
d’origine aux pays de marché dans lesquels elles exercent des activités commerciales et réalisent des
bénéfices, qu’elles y aient ou non une présence physique”.
Si l’Europe, et notamment la France, prônaient depuis quelques années une taxe spécifique aux géants
du numérique, les Etats-Unis y sont restés opposés. Le gouvernement américain a préféré élargir cette
imposition aux “grands vainqueurs de la mondialisation”, soit les quelques sociétés qui concentrent
aujourd’hui l’essentiel des profits mondiaux.
Le 8 octobre, les pays signataires se sont entendus sur un meilleur partage de l’impôt des 100
multinationales les plus rentables, celles dont le chiffre d’affaires dépasse 20 milliards d’euros.
Les grandes entreprises américaines du numérique en font aujourd’hui partie, mais également
des sociétés d’autres secteurs (Nike, Coca-Cola, Cargill…) ou d’autres continents (Carrefour,
LVMH, Nestlé ou encore Heineken, pour ne citer que l’Europe). Au-delà de sept ans, le seuil
diminuerait à 10 milliards d’euros. En revanche, les industries extractives et les services
financiers réglementés, dont certains réalisent des chiffres d’affaires de plusieurs centaines de
milliards de dollars, sont exclus de ce premier pilier de l’accord.
Pour les entreprises concernées, 25 % des “surprofits” (les bénéfices supérieurs à 10 % de leur
chiffre d’affaires) seront répartis vers les pays dans lesquels leurs biens et services sont utilisés
et consommés (la part dépend du chiffre d’affaires réalisé dans chaque pays), et non plus
seulement vers ceux dans lesquels leurs bureaux sont situés. Pour une société du web réalisant par
exemple 15 milliards d’euros de bénéfices, sur un chiffre d’affaires de 100 milliards d’euros
(rentabilité de 15 %), 1,25 milliard d’euros d’impôt sera donc théoriquement réparti entre les
différents pays où elle agit.
Certains aménagements viennent simplifier l’application de ce volet : seuls les Etats dans
lesquels les entreprises concernées réalisent plus d’un million d’euros de chiffre d’affaires
bénéficieront de la mesure. Le seuil passe à 250 000 euros si le PIB de l’Etat est inférieur à 40
milliards d’euros, afin de favoriser les pays les moins riches (au-delà des seuls pays du Sud, quatre
pays de l’UE sont également concernés : la Lettonie, l’Estonie, Chypre et Malte).
Ce sont ainsi 125 milliards de dollars qui seraient, selon l’OCDE, plus équitablement distribués. Les
entreprises seraient quant à elles incitées à cesser de domicilier artificiellement leurs revenus
dans des États à la fiscalité avantageuse.
Si l’impôt mondial de 15 % (second pilier) peut directement être introduit par chaque Etat dans
sa législation, la répartition des surprofits (premier pilier) nécessite quant à elle une convention
multilatérale. Celle-ci doit être élaborée par l’OCDE en 2022, puis ratifiée par l’ensemble des
Parlements nationaux, dont le Congrès américain.

Révolution fiscale
Paradoxalement, ce qui s’annonce comme une révolution fiscale a été initié par l’administration
Trump, dont le mandat a pourtant été marqué par d’importantes baisses d’impôts. Depuis 2017, les
entreprises américaines sont déjà taxées à l’étranger, à deux différences près toutefois avec le
projet actuel : le taux en vigueur est de 10,5 % et non 15 %, tandis que les profits sont imposés
en moyenne et non pays par pays. Ainsi, une multinationale dont les profits sont domiciliés pour
moitié en France (taxés à 30 %) et pour l’autre moitié aux îles Caïman (0 %) est quitte : son taux
moyen d’imposition dépasse déjà les 10,5 %. En revanche, avec un système pays par pays et un taux
de 10,5 %, elle aurait dû verser 10,5 % d’impôts aux Etats-Unis sur ses profits enregistrés aux îles
Caïman.
Les propositions formulées par l’administration Biden en avril ont donné un nouveau départ aux
négociations entre la majeure partie des pays de la planète sous l’égide de l’Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE) et du G20, inaugurées en 2016. Celles-ci
étaient jusque-là bloquées par les hésitations américaines et leur refus de viser spécifiquement les
entreprises du numérique. Outre le changement de doctrine américaine, la pandémie de Covid-19 a
également conduit beaucoup d’Etats à mobiliser des dépenses publiques conséquentes, y compris pour
aider les multinationales qui parviennent à éviter l’impôt. Et l’Europe comme les Etats-Unis ont
besoin de ressources importantes pour financer leurs plans de relance.
De manière plus générale, l’érosion de la base d’imposition des Etats, contre laquelle luttent l’OCDE
et le G20, est en partie due à l’effondrement de l’impôt sur les sociétés depuis plusieurs décennies. Un
phénomène initié par le tournant libéral des années 1980, accentué avec la crise économique de 2008
et la numérisation de l’économie. Au niveau mondial, le taux moyen d’impôt sur les sociétés est
passé de 45 % dans les années 1980 à 20 % aujourd’hui, soulignait en février dans Le Monde
Gabriel Zucman, professeur d’économie à Berkeley. Ce qui réduit d’autant la capacité des Etats
à financer des dépenses publiques, fait davantage peser le poids de l’impôt sur les individus et
accroît les inégalités.

- Depuis une décennie, plusieurs mesures limitant l’évasion fiscale des entreprises ont été
prises sous l’égide de l’OCDE et du G20, dont le “cadre inclusif BEPS” rassemblant
aujourd’hui 140 pays. Un grand nombre d’entre eux ont modifié leurs régimes fiscaux pour
les rendre moins “dommageables” vis-à-vis de leurs partenaires, procèdent à des échanges
automatiques de renseignements (fin du secret bancaire), obligent leurs entreprises à déclarer
le montant des impôts payés dans l’ensemble des pays où des filiales exercent une activité
(reporting pays par pays) ou encore à payer une TVA sur la vente de produits en ligne.

Concurrence fiscale européenne


Au sein de l’Union européenne, les quelques tentatives visant à limiter le dumping fiscal n’ont
peu ou pas abouti, les propositions en la matière devant être adoptées à l’unanimité des Etats
membres. En témoigne le projet d’harmonisation de l’assiette fiscale des sociétés (ACCIS) :
évoqué dès le début des années 2000 par la Commission européenne pour fixer une base taxable
des entreprises commune aux Etats membres, c’est-à-dire les revenus pris en compte pour
calculer cette taxe (sans même parler d’un taux commun), il a été enterré après deux
propositions de directive en 2011 et 2016, suite au blocage de quelques Etats.
Les pays qui parviennent à tirer parti de la concurrence fiscale pour attirer les entreprises avaient tout
intérêt à maintenir le statu quo. A côté de la France et de l’Allemagne dont les taux effectifs moyens
d’impôt sur les sociétés avoisinent les 30 %, de plus petits pays comme l’Irlande (12,5 %), la Bulgarie
(10 %) ou encore la Hongrie (9 %) pratiquent jusqu’à maintenant des taux deux à trois fois moins
élevés. Sans compter les nombreux “accords de complaisance” qui permettent, dans certains
Etats, aux entreprises d’échapper à tout ou partie de cet impôt. Apple par exemple, qui comme
beaucoup d’autres entreprises du numérique a son siège européen en Irlande, n’y a longtemps
payé que 1 % d’impôt : l’essentiel de ses bénéfices était enregistré aux Bermudes. Et la presse a
révélé, à travers des enquêtes comme LuxLeaks et OpenLux, les montages dont bénéficiaient de
nombreuses entreprises au Luxembourg.

- Selon l’ONG Tax Justice Network (qui s’appuie sur les chiffres de l’OCDE), les pays
européens auraient, dans l’ensemble, perdu près de 80 milliards de dollars de recettes fiscales
en 2020 en raison de l’évasion fiscale des entreprises (celle des particuliers, sur laquelle la
coopération internationale est bien moins avancée, dépasserait quant à elle les 100 milliards
de dollars). La France en est l’un des principaux perdants, avec plus de 14 milliards de dollars
de recettes qui lui échappent chaque année.

Quelle traduction en Europe ?


Un accord international rassemblant un nombre conséquent de pays, dont les Etats-Unis et les
membres du G20, devrait avoir de profondes répercussions sur l’ensemble du monde, y compris sur
les Etats non signataires. Car avec un impôt mondial, les entreprises qui déclarent leurs bénéfices dans
des paradis fiscaux seront, in fine, taxées par leur pays d’origine.
Les paradis fiscaux n’auront alors plus d’intérêt pour ces entreprises, imposées à des taux équivalents
quels que soient les pays dans lesquels elles sont implantées. Et si, selon l’OCDE, l’accord “n’a pas
pour objectif de mettre fin à la concurrence fiscale”, celle-ci devrait grandement s’atténuer. Les Etats -
notamment européens - pourraient chercher à aligner leurs régimes fiscaux. Ainsi qu’à jouer sur
d’autres facteurs pour attirer les entreprises : infrastructures, niveau d’éducation, recherche mais aussi
coût du travail ou exemptions fiscales, comme les zones franches en Chine et le crédit d’impôt
recherche en France.
Le 22 décembre 2021, la Commission européenne a présenté un projet de directive visant à appliquer
le pilier 2 de l’accord (taux minimum de 15 %) au niveau de l’Union. Celui-ci reprend pour l’essentiel
les règles définies au niveau de l’OCDE, en y ajoutant quelques éléments. Ainsi, alors que l’accord de
l’OCDE s’applique uniquement aux sociétés multinationales, l’exécutif européen propose d’y inclure
également, au niveau de l’UE, les groupes purement nationaux. Ce “afin de respecter les libertés
fondamentales de l’UE, en particulier la liberté d’établissement”.
Pour faire face au cas des sociétés-mères situées dans des pays non signataires de l’accord (ou qui de
fait ne l’appliquent pas correctement), la Commission veut également autoriser les Etats membres de
l’UE, dans lesquels leurs filiales sont présentes, à percevoir eux-mêmes une part de l’impôt
supplémentaire normalement dû par le groupe dans le pays de son siège.
Cette directive doit désormais obtenir un accord unanime du Conseil de l’Union européenne. Le
Parlement européen (ainsi que le Comité économique et social européen) n’a qu’un rôle consultatif en
la matière.
Sur l’application du premier pilier de l’accord (réattribution des droits d’imposition là où les bénéfices
sont réalisés), la Commission européenne prévoit de présenter une seconde directive cet été, après la
signature par les 137 pays de l’accord d’une convention multilatérale à cet effet.

Quid des autres projets fiscaux européens ?


La Commission européenne souhaite par ailleurs lancer, d’ici la fin de l’année 2023, une réforme de
la répartition des droits d’imposition entre les Etats membres intitulée “BEFIT”.
Face aux demandes insistantes des Etats-Unis, la Commission européenne a décidé le 12 juillet
de suspendre son projet de taxe européenne sur le numérique. L’administration Biden
considère en effet que cette “taxe GAFA” européenne, imaginée pour contribuer à partir de
2023 au remboursement du plan de relance européen de 750 milliards d’euros, serait
discriminatoire vis-à-vis des entreprises américaines. Du point de vue états-unien, le maintien de
cette mesure, qui suscite une forte opposition du Congrès outre-Atlantique, aurait pu faire
échouer l’accord sur l’impôt mondial.
Par ailleurs, plusieurs pays européens ont déjà instauré leurs propres taxes numériques nationales :
c’est le cas de la France, de l’Italie, de l’Espagne, de l’Autriche ou encore du Royaume-Uni. Le 21
octobre, ceux-ci se sont engagés à les retirer lors de l’entrée en vigueur de l’impôt mondial, et à
déduire de leurs futurs impôts les sommes versées d’ici là par les entreprises américaines. De leur
côté, les Etats-Unis ont annulé rétroactivement (à compter du 8 octobre 2021) les sanctions
commerciales qu’ils avaient imposées à ces pays en représailles à ces taxes.

Vincent Lequeux

En Europe, les positions sur ce nouveau projet, qui ne faisait pas l’unanimité au départ, ont fini par
converger. Après avoir plaidé pour maintenir le taux minimum de 12,5 % qui servait de base aux
précédentes discussions, Bruno Le Maire s’était prononcé en faveur du seuil fixé à 21 % “si tel était le
résultat de négociations”. La proposition américaine à 15 % a ensuite été considérée comme un “bon
compromis” par le ministre français de l’Economie. En Allemagne, le ministre des Finances Olaf
Scholz avait qualifié le projet américain de véritable “percée”.Dans les pays à la fiscalité plus
avantageuse, les réactions ont été moins enthousiastes : l’Irlande, la Hongrie et l’Estonie, hostiles au
projet initial, ont fini par s’y rallier face à la pression internationale et à la suite de modifications dans
le texte. Celui-ci mentionne désormais un impôt sur les sociétés au taux effectif minimum de 15 % et
non plus d’ “au moins 15%”, une formulation à laquelle Dublin était opposée car elle laissait la porte
ouverte à de futures hausses. De son côté, Budapest maintient que “le taux d’imposition des sociétés
de 9 % en Hongrie ne changera pas, car il y aura une solution ciblée pour collecter l’impôt
mondial”.Le Luxembourg et les Pays-Bas (lequel a profondément réformé son système fiscal depuis
quelques années), ont en revanche fait partie assez tôt des Etats signataires. La Suisse y avait
également adhéré sous réserve de prendre en compte “les intérêts des petits pays innovants” dans “la
formulation finale des règles” et de respecter “les procédures législatives des pays concernés”.La
Commission elle-même précise que “les membres du cadre inclusif ne sont pas tenus d’adopter les
règles” de l’accord mondial, mais que grâce à celles qu’elle prévoit dans son projet de directive, “les
juridictions ne seront pas pour autant dispensées d’appliquer une imposition effective correspondant
au moins au taux minimum convenu”.
Sujet n° 3 : Gagnants et perdants de la
mondialisation (Oral HEC)
Introduction : La courbe de l'éléphant (p 178)

Inspiré par un auteur Milanovic, elle décrit la distribution des revenus mondiaux entre 1988 et 2008,
quand la mondialisation a décollé. Courbe de l’éléphant

Les gagnants sont les classes moyennes des pays émergents et les élites
Les perdants sont les classes moyennes des pays développés et les pauvres

Pour une synthèse par Milanovic, cf “Qui sont les gagnants et les perdants de la mondialisation ?”, traduit par
Martin Anota - Annotations, 30 octobre 2013
Sur la déformation récente de la courbe de l'éléphant, cf « Global income inequality : time to revise the
elephant », décembre 2022, publié par le site Social Europe. Traduction de Cédric Rio de l’Observatoire des
inégalités.

Problématique : Comment la mondialisation a-t-elle favorisé globalement une convergence à


l’échelle internationale et plutôt aggravé les inégalités internes ?

I. La mondialisation favorise…
1. … les pays “émergents” parmi les PED…

Cf : sujet 2 chapitre 2.
- Une convergence conditionnelle (p 23, pp 182-183)

Ce terme est employé lorsque certaines caractéristiques permettent de les rapproché, on parle alors des
trois conditions de la convergence :
Démographie
Impact sur l’offre mais également possible sur la demande, accumulation capitale
humain
Épargne
Ex dragons, ce qui ont su mobiliser une épargne importante  investissement 
produits
Technologie
Pays qui ont su faire évoluer leur spécialisation. Ces pays ont eu recourt à une
croissance extravertie.

- Un recul de la pauvreté (pp 52-53)

Donc on a un recul de la pauvreté à l’échelle mondiale durant cette période


Les pays se sont vue être appliquer des objectifs établis en 2000 par l’ONU. « Objectifs du millénaire
pour le développement » pour les 189 états membres.

Certes on a une convergence entre pays émergent (en développement) et pays développé. Mais on a
aussi une divergence entre les pays en développement.

2. … ainsi que les classes les plus aisées parmi les pays développés…

- Une “grande divergence” (p 370)

Employer par Krugman qui évoque la situation aux USA, sachant que de manière plus globale, il y a
un renouveau des inégalités à partir 1980, dans pays développés. Mais la ou elle se creuses le plus
c’est au états unis. Parmi les éléments qui témoigne de cette divergence c’est ce qui se passe au sein
des grandes entreprises, avec une disparition des salaires entre les différents employés. En 2000, le
revenu moyen des 150 dirigeants les mieux payés possèdent un salaire 367 fois plus élevé que certains
des employés.

- Une déconnexion des revenus de la finance (p 371)


Aborde le thème de la globalisation financière, ce qui nous relie directement avec le décloisonnement
(plus en plus facile de faire passer des produits d’un coté et de l’autre d’une frontière). De plus, celle-
ci à accentuer la volatilité des marchés, avec le marché des actions, car cette volatilité va donc créer
des phases d’euphorie et donc pour les Tradeurs de réaliser des plus-values.
Dérèglementation  volatilité  phase euphorie  plus-values  revenu spéculatif
Ce sont les USA qui ont initié cette dérèglementation financière, qui sera ensuite repris par la plupart
des pays européens.

Pour une évocation plus générale des incidences de la financiarisation de l’économie sur les inégalités aux
Etats-Unis, cf “Les inégalités aux rythmes de la financiarisation”, à propos de : Ken-Hou Lin, Megan Tobias
Neely, Divested. Inequality in the Age of Finance, Oxford University Press, La vie des idées - 22 février 2021

II. … aux dépens…

1. … des pays les plus en retard…

Car certains pays ont eu plus de difficulté à s’intégrer à la mondialisation, Ex : Afrique. Représente
moins de 3% du commerce international.

- Des handicaps structurels

*demande : pays avec niveau de vie assez faible en moyenne  pas suffisamment moteur pour la
demande  dynamise pas suffisamment les importations. ( Effet revenu)
*offre : matière première, manque de diversité, et donc on a des courts qui sont plus volatiles.
*relation entre offre et demande : l’état des infrastructures, la complexité des règles administratives
(auquel viennent se greffer de la corruption).

Sur la situation en Afrique, cf F Candau, Marginalisation commerciale de l'Afrique, Racines d’Afrique,


05/10/2019,

- Un modèle asiatique difficilement reproductible en Afrique

Inspiration de la Banque Mondiale qui se pose la question de se qui à été expérimenté dans certains
pays d’Asie peut être réalisé sur l’ensemble du continent asiatique. L’auteur va alors réutiliser cette
démarche mais en l’appliquant à l’Afrique.
Ces pays d’Asie ont connu et subie une DIPP, ce qui entraine une intégration accélérée, du au début
de la mondialisation.
Mais pour l’auteur cela va être difficile pour les pays d’Afrique de connaitre une intégration tardive à
la DIPP et par conséquent à la mondialisation.

Pour une analyse de la transposition du modèle asiatique en Afrique, cf “Le modèle asiatique, difficile à
reproduire en Afrique”, Bruno Cabrillac, Telos - 20 novembre 2018

2. … et des classes moyennes des pays développés… (pp 177-178)


- Une exposition au chômage
- Une exposition à la baisse de pouvoir d’achat

Thèse de pierre René Giraud, années 1990 très proche de celle de Robert Reich économiste américain.
A cette époque débat entre économiste sur les inégalités, s’oppose à celle de Krugman. D’une part
ceux qui pensent que ce retour des inégalités du a l’accélération du progrès technique. De l’autre, ce
qui pense qu’elle est dû à la mondialisation.
Giraud distingue trois catégories de salariés par rapport à la mondialisation :
-les exposés
Nomade
-les compétitifs
-les protégés Sédentaire
Ces des salariés exposés connaissent risques de chômage (dû au délocalisation), contrairement à ceux
étant des compétitifs. De plus, une fois au chômage, il se pose la question de la reconversion.
*mondialisation entraine également principe de destruction créatrice
Les protégés eux sont pour Giraux protégé de la concurrence, qui travaillent dans des branches qui ne
sont pas exposé à la concurrence internationale. Pour cela, malgré leur faible qualification ils ont plus
de probabilité de garder leur emploi, mais ils sont plus exposés à une baisse de leur pouvoir d’achat.
Car ceux qui vont bénéficier, consommer ces services sont les exposés et compétitifs, mais pour qu’il
puisse continuer à les consommer, il faut que le prix proposer soit attractif.

III. … ce qui nécessite des réponses elles-mêmes problématiques…

1. … parmi lesquelles le régionalisme en Afrique…

C’est un ensemble de moyen d’ordre institutionnelle, censée favoriser la régionalisation, (le


développement d’échange commerciaux avec les pays proches géographiquement).

- Une relance du processus

En 2018, on parle de 44 pays qui sont partie prenante en Afrique, puis suite à sa présentation de plus
en plus crédible, on parle de 54 pays. Donc ce qui pourrai devenir une zone de libre-échange qui est
pour ce cas de figure continental.

Def libre-échange = zone avec une abolition de protectionnisme tarifaire.

Mais pas aussi simple et rapide de l’appliquer.

Mais l’accord dirai même plus loin que la zone de libre-échange, avec la mise en place d’IDE.

- Une réussite conditionnelle


Le commerce intrarégional en Afrique est très en retard par rapport à d’autres contient. Ex : taux de
15% de la part des échanges commerciaux se réalisent parmi tous leurs échanges internationaux
(parmi elle, 4% d’entre eux sont des échanges de biens intermédiaires). Contrairement à L’Asie qui à
un commerce intrarégional beaucoup plu développé, à hauteur de 60%.

En effet, par parce que on s’organise et on créer du régionalisme que forcément on va connaitre le
même succès que l’Asie. (cf II. 1.)

Autre défi : la faiblesse de leur chaine de valeur.

Sur le projet d'intégration commerciale en Afrique, cf , L’Afrique, nouvelle frontière du libre-échangisme ?,


TELOS, 18 septembre 2018, et Quel avenir pour le libre-échange en Afrique ?, Julien Gourdon, The
Conversation, 9 février 2022

2. … ou le protectionnisme dans les pays développés

Le mercantilisme, courant antérieur aux XIX -ème siècles qui a prôné le protectionnisme. Donc
évoquer des perdants et des gagnant est un discours qui peut résonner comme mercantilisme. Ce
discours revient suite au phénomène de mondialisation qui s’emballe. Ex : Donald Trump dans ses
discours avec si la Chine est gagnante alors, les Etats-Unis sont perdants. Donc pourrai entrainer une
quête de souveraineté. (donc avec mondialisation  si il y a un gagnant, il y a forcément un perdant)

- Une quête de souveraineté

Existe 3 combinaisons possibles car on appelle souvent ce type de triangles, le triangle des
incompatibilités.

 Le compromis de Bretton Woods, fait référence à une conférence en 1944 pour discuter de
l’avenir des décisions monétaires internationales. Ce système a fonctionné entre 1944 et 1971.
Cette période correspond à l’internationalisation des échanges (cf. graphique intro sujet 1).
Rodrick considère qu’il n’y a pas d’intégration des économies car il considère que l’on n’est
pas encore au stade de mondialisation.
 Situation postérieure au années 1980, il l’appelle « les camisoles de force dorée », correspond
à la période de mondialisation (entre 1980 et 2000). Ce qui entraine une chute de la
démocratie vivante. Car no vote n’ont pas d’impact sur l’économie. Dorée car la
mondialisation à fait des heureux.
 Dernière situation qui na jamais existé, le fédéralisme, cette situation existerai avec la création
d’une gouvernance mondiale.
Source : Dani Rodrik, « Feasible Globalizations », NBER, 2002

Martin Anota évoque le fait que à partir des années 2000, il y a une prise de conscience que la Chine allait
bouleverser l’ordre mondial, illustré par l’entrée dans l’OMC de la Chine. Ces études témoignent de l’impact de
la mondialisation sur le chômage, les inégalités, etc.

Pour une évaluation empirique des effets de la mondialisation sur l’augmentation des inégalités internes
aux pays développés, cf “Le commerce international a créé des gagnants et des perdants dans les pays
développés”, Martin Anota, “ A la marge” - 09/01/2022

- Des limites

Le retour à une souveraineté à des limites. Qui va mettre en évidence les limites : les libéraux, dont la
pensée s’illustre par « laisser faire, laisser passer ».
Le New Deal, en 1933 prononcé par Roosevelt, dont l’une des mesures est le buy Américain Act,
soutien entreprises locale de la concurrence étrangère lorsqu’il s’agit de marché public. Mais, en
2021, Joe Biden poursuit ce protectionnisme américain avec le renforcement de ce buy Américain
Act.

Pour une analyse graphique de la critique néo-classique du protectionnisme tarifaire, cf “L'analyse


économique des échanges internationaux”, Melchior
Pour une analyse libérale du Buy American Act, cf “Buy American Act : un protectionnisme qui cache son
nom”, E Combe, L’Opinion - 14/04/2021
Conclusions : La mondialisation, concerne une période relativement courte à l’échelle de
l’histoire, même si on l’associe à d’autres phénomènes semblables. Sur cette période, les
travaux de Milanovic et d’autres ont permis de trouver des gagnants au niveau international
(ce qui arrive à rattraper les pays développé). Mais aussi au sein des pays ce qui on le plus
profité de ce phénomène en termes de catégories de revenue. Pays en développement sont
la catégorie moyenne, et pour les pays développés ce sont les riches. Mais depuis 2008, la
courbe se déforme notamment car la crise a révélé les revers de la mondialisation, ex : la
dérèglementation des DIPP et les gagnant ne sont plus les mêmes. Puis enfin, les pays en
généraux ont connu un recul avec non pas une démondialisation mais plutôt une stagnation.
Qui s’illustre par le recours au protectionnisme, mais un recours mesuré, pas autant que
durant années 1930. Mais les USA a tout de même connu une stagnation voire même une
petite baisse, Slowbalization.
Qui sont les gagnants et les perdants de la mondialisation ?

Par Martin Anota - Annotations, le mercredi 30 octobre 2013

« On pense généralement qu'il y a deux groupes qui sont les grands gagnants de ces deux dernières
décennies de mondialisation : d'abord, les très riches, ceux au sommet de la répartition nationale et
mondiale du revenu, mais aussi les classes moyennes des pays émergents, en particulier de la Chine,
de l'Inde, de l'Indonésie et du Brésil. Est-ce vrai ? Le graphique 1 fournit une réponse en montrant la
variation du revenu réel (mesuré en dollars constants internationaux ou PPA) entre 1988 et 2008 pour
différents centiles de la répartition mondiale des revenus.

GRAPHIQUE 1 Variation du revenu réel entre 1988 et 2008 pour différents centiles de la répartition mondiale
du revenu (calculée en dollars internationaux de 2005)

Quelles parts de la distribution mondiale des revenus ont enregistré les plus fortes hausses entre 1988
et 2008 ? Comme le montre le graphique 1, c’est en effet au sommet de la répartition mondiale
des revenus et parmi les "classes moyennes mondiales émergentes", qui comprennent plus d'un
tiers de la population mondiale, que nous observons les plus fortes hausses du revenu par
habitant. Le 1 % supérieur a vu son revenu réel augmenter de plus de 60 % au cours de ces
deux décennies. Les plus fortes hausses ont toutefois été enregistrées autour de la médiane : une
hausse réelle de 80 % à la médiane et de presque 70 % à ses alentours. C'est là, entre le 50ème
et 60ème centiles de la distribution mondiale des revenus que nous trouvons quelque 200
millions de Chinois, 90 millions d'Indiens et environ 30 millions de personnes en Indonésie, au
Brésil et en Egypte. Ces deux groupes (le 1 % des plus riches et les classes moyennes des pays
émergents) sont en effet les principaux gagnants de la mondialisation.
La surprise est que ceux qui sont au tiers inférieur de la répartition mondiale du revenu ont
aussi réalisé des gains importants, avec la hausse des revenus réels comprise entre 40 % et 70
%. La seule exception est les 5 % les plus pauvres de la population dont les revenus n’ont pas
varié. C'est cette augmentation de revenus au bas de la pyramide mondiale qui a permis à la
proportion de ce que la Banque mondiale appelle la pauvreté absolue (les personnes dont le
revenu par habitant est inférieur à 1,25 dollars PPA par jour) de passer de 44 % à 23 % au
cours des deux décennies.
Mais le plus grand perdant (mis à par 5 % les plus pauvres), ou tout du moins les "non-
gagnants" de la mondialisation sont ceux entre le 75ème et 90ème centiles de la distribution
mondiale des revenus dont les gains en termes de revenu réel ont été pratiquement nuls. Ces
personnes, qui constituent une sorte de classe moyenne supérieure mondiale, proviennent d’un
grand nombre d'anciens pays communistes et d'Amérique latine, ainsi que des citoyens des pays
riches dont les revenus stagnent. La répartition mondiale du revenu mondial a donc changé
d'une manière remarquable. C'était sans doute le plus profond bouleversement de la situation
économique de la population mondiale depuis la Révolution industrielle. D'une manière générale,
le tiers inférieur, à l'exception des plus pauvres, est devenu nettement plus aisé, et beaucoup de ces
gens-là ont échappé à la pauvreté absolue. Le tiers médian s'est enrichi, en voyant ses revenus réels
augmenter d'environ 3 % par habitant et par an. Les évolutions les plus intéressantes, cependant, ont
eu lieu parmi le quartile supérieur (c’est-à-dire le quart le plus riche de la population mondiale) : le 1
% le plus riche et, plus largement quoiqu’à un moindre degré, les 5 % les plus riches ont réalisé des
gains significatifs, tandis que le reste du quartile supérieur a soit très peu gagné, soit vu ses revenus
stagner. Cela s’est traduit par une polarisation au sein du quartile le plus riche de la population
mondiale, ce qui a permis au 1 % le plus riche de devancer les autres riches et de réaffirmer (surtout
aux yeux du public) leur place en tant que gagnants de la mondialisation.
Qui sont les personnes dans le 1 % le plus riche ? (…) Le 1 % le plus riche est composé de plus
de 60 millions de personnes (…). Ainsi, parmi le centile supérieur mondial, nous trouvons les 12
% des Américains les plus riches (plus de 30 millions de personnes) et entre 3 et 6 % des
Britanniques, des Japonais, des Allemands et des Français les plus riches. Il s'agit d'un "club"
encore largement composé des "vieux riches" de l'Europe occidentale, de l’Amérique du Nord et du
Japon. Le 1 % le plus riche (…) en Italie, en Espagne, au Portugal et en Grèce font tous partie du 1 %
le plus riche de la population mondiale. Cependant, le 1 % des Brésiliens, Russes et Sud-Africains
les plus riches en font également partie.
A quels pays et groupes de revenu les gagnants et perdants appartiennent-ils ? Considérons les
personnes à la médiane de la distribution de leur revenu national en 1988 et en 2008. En 1988, une
personne avec un revenu médian en Chine était plus riche que 10 % seulement de la population
mondiale. Vingt ans plus tard, une personne à la même position dans la distribution des revenus
chinoise était plus riche que plus de la moitié de la population mondiale. Ainsi, il ou elle a
devancé plus de 40 % des personnes dans le monde. Pour l'Inde, l'amélioration a été plus
modeste, mais tout de même remarquable. Une personne avec un revenu médian est passée du
10ème au 27ème centile de la répartition mondiale. Une personne à la même position en
Indonésie est passée du 25ème au 39ème centile mondial. Une personne ayant le revenu médian
au Brésil a réalisé le même gain. Elle est passée d'environ le 40ème centile de la distribution
mondiale des revenus à peu près le 66ème centile. Pendant ce temps, la position des grands pays
européens et des États-Unis est restée sensiblement la même (…). Mais si la crise économique qui
affecte actuellement les pays avancés persiste, nous ne devrions pas être surpris de trouver l’individu
médian dans le "monde riche" s’appauvrir en termes relatifs.
Alors, qui a perdu entre 1988 et 2008 ? La plupart des gens en Afrique, certains en Amérique latine et
dans les pays postcommunistes. Le Kenyan moyen est passé du 22ème au 12ème centile au niveau
mondial, tandis que le Nigérien moyen passait du 16ème au 13ème centile. (…) En 1988, un Africain
avec le revenu médian avait un revenu égal aux deux tiers de la médiane mondiale. En 2008,
cette proportion a chuté à moins de la moitié. Une personne avec le revenu médian dans les pays
postcommunistes est passée du 75ème au 73ème centile mondial. Les déclins relatifs de l'Afrique, de
l'Europe orientale et de l'ex-Union soviétique confirment l'échec de ces parties du monde à s'adapter à
la mondialisation, du moins jusqu’aux premières années du vingt-et-unième siècle. (…)

GRAPHIQUE 2 Les courbes de Lorenz pour les répartitions du revenu mondial en 1988 et en 200 8

Les courbes de Lorenz, qui présentent le pourcentage du revenu cumulé (allant de 1 à 100) sur l'axe
vertical par rapport au pourcentage de la population cumulée (allant également de 1 à 100) sur l'axe
horizontal pour 1988 et pour 2008 se croisent (…) (cf. le graphique 2). Aucune des deux courbes de
Lorenz n’est dominante. Les gains de revenu réalisés au-dessous et autour de la médiane permettent à
la courbe de Lorenz de 2008 d’être au-dessus de la courbe de Lorenz de 1988 jusqu’au 80ème centile.
Par exemple, les deux tiers inférieurs de la population mondiale ont reçu 12,7 % du revenu mondial en
2008 contre 9,3 % en 1988. Mais en raison, d’une part, de la stagnation ou du déclin des revenus réels
de la classe mondiale moyenne supérieure et, d’autre part, des gains importants réalisés par le 1 % le
plus riche, les courbes de Lorenz se sont inversées pour le dernier cinquième de la distribution. Ici, le
1 % le plus riche recevait en 2008 près de 15 % du revenu global contre 11,5 % vingt ans plus tôt.
(…) Ces résultats montrent un changement remarquable dans la distribution mondiale des revenus
sous-jacente. Nous vivons maintenant dans un monde avec un renflement autour de la médiane en
raison de la hausse significative des revenus pour l'ensemble du deuxième tiers (…) de la distribution
mondiale des revenus. (…) Nous voyons aussi l’accroissement de la richesse (et probablement aussi
du pouvoir) des personnes au sommet et, chose remarquable, la stagnation des revenus tant pour les
personnes juste en dessous des 5 % les plus riches que pour les plus pauvres dans le monde. »

Branko Milanovic, « Global income inequality by the numbers : In history and now. An overview »,
Banque mondiale, 2012. Traduit par Martin Anota
La nouvelle dynamique mondiale des inégalités de revenus

De nouvelles données font apparaître un bouleversement majeur dans la répartition des revenus
dans le monde. Au cours des 20 dernières années, les revenus ont progressé plus vite pour les
plus pauvres que pour les plus riches à l’échelle de la planète. Une analyse de l’économiste
Branko Milanovic.

Observatoire des inégalités - 14 FÉVRIER 2023

Si on observe la période qui va des années 1980 à la fin des années 2000, l’évolution des revenus dans
le monde prend la forme d’une « courbe de l’éléphant », comme nous l’avions qualifiée avec
Christoph Lakner, en jaune dans notre graphique [1]. La période a été marquée par une très forte
augmentation des revenus pour la classe d’habitants du monde proche du revenu médian [2] mondial
(le point A). La croissance des revenus a été plus modeste, voire proche de zéro, pour les personnes
situées entre les 20 % et les 10 % les plus riches (les classes moyennes inférieures des pays riches) (le
point B) et pour les 5 % les plus pauvres, et montre une augmentation soudaine pour le 1% le plus
riche (le point C).
Au cours de la décennie 2008-2018, l’éléphant a disparu : la croissance des revenus est plus forte
pour les plus modestes, comme le montre la courbe violette de notre graphique. Que s’est-il
passé ?
Pour le comprendre, il nous faut revenir aux effets de la crise financière et économique de 2008.
Cette crise est restée localisée dans les pays occidentaux, dont certains ont même vu leurs
revenus diminuer. La croissance en Asie, en particulier en Chine, n’a pratiquement pas été
affectée. Selon des études du Luxembourg Income Study (LIS) sur les revenus aux États-Unis,
les 5 % les plus riches de la population des États-Unis ont perdu environ 10 % de revenus entre
2008 et 2010 si l’on tient compte de l’inflation. Pour le 1 % le plus riche, cette baisse atteint près
de 20 %. Ils ont récupéré leur niveau de revenus dans les années suivantes, mais ils n’ont
retrouvé l’équivalent de leur niveau de 2007 qu’en 2015. Cela explique pourquoi la partie de la
courbe qui représente la croissance des revenus des plus riches du monde (la trompe de l’«
éléphant ») est moins prononcée sur la période la plus récente.
La tendance se poursuit aux États-Unis ces dernières années. Le très large programme public
de soutien pour faire face au coronavirus lancé en 2020 a conduit à une réduction substantielle
des inégalités de revenus après redistribution et impôts. Le coefficient de Gini – qui va de 0 pour
une égalité parfaite à 100 pour une inégalité totale – a baissé de plus d’un point aux États-Unis,
ce qui correspond à la chute la plus importante de la moitié du siècle. Paradoxalement, ce déclin
important est survenu durant la dernière année de la présidence de Donald Trump.

Croissance continue en Asie


Entre 2008 et 2018, la Chine a bénéficié d’une croissance de son produit intérieur brut (PIB)
par habitant de 7,5 % par an, l’Inde de 6 %. Cette croissance s’observe également à l’appui de
leurs enquêtes sur les ménages. Par exemple, pour les zones urbaines et rurales de Chine, les études
donnent une croissance annuelle moyenne par habitant de 10 % environ, de 8 % pour les zones
urbaines indiennes et proche de 5 % pour les zones rurales indiennes. Cette croissance des revenus
en Asie a transformé la distribution mondiale des revenus : elle a fait basculer toute une partie
de la population d’Asie du bas de la distribution vers les classes moyennes de la planète.
Inversement, une partie de la population des pays occidentaux est descendue dans le classement
mondial. On peut comprendre cette évolution en prenant le cas italien, pays dont le revenu
national n’a pas augmenté sur les deux décennies. Du coup, le niveau des 10 % les plus pauvres
des Italiens correspondait en 1988 au 73 e centième de la population mondiale, classée des plus
pauvres aux plus riches. Vingt ans plus tard, les revenus asiatiques ont augmenté et de larges
groupes de la Chine urbaine ont atteint des revenus supérieurs à ceux des Italiens. Les Italiens à
plus faibles revenus ont baissé dans la hiérarchie pour atteindre le seuil des 56 % au niveau
mondial. Un mouvement descendant similaire, mais moins profond, a touché le tiers inférieur des
populations allemandes et des États-Unis, par exemple. Un tel mouvement descendant sur l’échelle
des revenus mondiale ne veut pas dire que ces populations ont vu leurs revenus baisser en valeur
absolue. Cela signifie toutefois une croissance de revenus plus lente pour les populations des pays
riches.
La transformation actuelle est probablement la plus importante depuis la révolution industrielle. Elle
introduit une dynamique mondiale totalement nouvelle, dans la mesure où les personnes provenant
des pays occidentaux et du Japon ont monopolisé presque totalement les positions du top 20 %
mondial durant les deux derniers siècles. Ce contrôle des meilleures places s’est déjà affaibli avec
l’entrée de la Chine au sein de ce cercle et il continuera à s’affaiblir encore plus si les différences de
taux de croissance perdurent entre les autres pays de l’Asie « émergente » et les pays occidentaux.
La transformation du classement mondial des revenus n’implique pas une réduction des inégalités
globales à l’avenir. Depuis le début de l’actuelle ère de mondialisation, la diminution des écarts
de revenus s’explique presque entièrement par la forte croissance chinoise. Mais maintenant
que la Chine est un pays de classe moyenne supérieure, sa croissance – si elle se poursuivait – ne
réduirait plus mathématiquement les inégalités mondiales. Au contraire, ce phénomène
augmenterait probablement les inégalités mondiales puisque les écarts de revenus entre la
Chine et les pays africains très peuplés continueraient de grandir.
Par conséquent, alors que nous pouvons attendre un renforcement plus important de la classe
moyenne mondiale durant la prochaine étape de la mondialisation, l’évolution des inégalités globales
dépendra de manière cruciale de la croissance des pays les plus pauvres : l’Inde et les pays peuplés
africains : Nigéria, Égypte, Éthiopie, Tanzanie, Congo. Nous devrions diriger toute notre attention
vers l’Afrique.
Branko Milanovic, économiste, professeur invité à l’université CUNY de New York et chercheur
associé au Luxembourg Income Study.
Cet article est une version adaptée de « Global income inequality : time to revise the elephant »
publié par le site Social Europe. Traduction de Cédric Rio de l’Observatoire des inégalités.
Photo / CC Euan Cameron

[1] Pour la période 1988-2008 et la courbe de l’éléphant, voir « Global Income Distribution : from the
Berlin Wall Fall to the great Recession », Christoph Lakner, Branco Milanovic, Policy Research
Working Paper N° 6719, Word Bank, 2013.
[2] Le revenu qui partage en deux les habitants de la planète, autant gagnent moins, autant gagnent
plus.
Les inégalités aux rythmes de la financiarisation

À propos de : Ken-Hou Lin, Megan Tobias Neely, Divested. Inequality in the Age of Finance, Oxford
University Press

par Olivier Godechot , La vie des idées - le 22 février 2021

La financiarisation qui envahit aujourd’hui toutes les sphères de l’économie n’est pas un phénomène
uniforme et monolithique. C’est en distinguant soigneusement les différents mécanismes par lesquels
elle se déploie qu’on pourra comprendre en quoi elle produit des inégalités sociales.
À rebours de l’analyse classique qui fait de la hausse des inégalités contemporaines avant tout le
résultat d’un progrès technologique biaisé (soit un type de croissance où la demande de travail qualifié
augmente plus vite que son offre), l’ouvrage Divested. Inequality in the Age of Finance propose une
autre piste d’explication. L’augmentation des inégalités résulte de la financiarisation de l’économie
entendue non seulement comme une croissance rapide de l’activité du secteur financier, mais aussi
comme le résultat d’une transformation financière des revenus, de l’investissement, de l’endettement
et de l’épargne des autres acteurs de l’économie, notamment des entreprises non-financières et des
ménages. Ken-Hou Lin et Megan Tobias Neely proposent ainsi une synthèse cohérente et inspirante
des travaux des quinze dernières années sur la financiarisation, tout en ajoutant aussi des perspectives
nouvelles sur certaines de ses dimensions les moins étudiées comme la dette étudiante ou la crise des
retraites par capitalisation.

Une synthèse sur la financiarisation des États-Unis


L’ouvrage propose de démontrer la relation consubstantielle entre la financiarisation du capitalisme
contemporain et l’explosion des inégalités en prenant comme exemple empirique les États-Unis. Il
commence en présentant dans les deux premiers chapitres ces deux transformations majeures et
poursuit par quatre chapitres centrés sur différents espaces où la relation se noue : le secteur financier,
les firmes non-financières, l’endettement des ménages et leur patrimoine. Un dernier chapitre porte
sur les inflexions liées à la crise financière de 2008 et à sa régulation. L’ouvrage est clair et bien
structuré. Il combine habilement une analyse historique des transformations institutionnelles avec une
analyse statistique riche de nombreux graphiques représentant cinquante ans d’évolution des
différents indicateurs de financiarisation ou d’inégalité.
La fin du système de Bretton Woods, qui réactive le marché financier international, la crise des
années 1970, qui décrédibilise la régulation étatique keynésienne et favorise la dérégulation, et
l’inflexion libérale des années 1980, qui remet au centre l’entreprise privée et les actionnaires ont
permis la financiarisation de l’économie. Le démantèlement des régulations issues du New Deal,
loin de bénéficier aux consommateurs, favorise au contraire un désencastrement marchand des
services bancaires et une concentration grandissante du secteur : la part des actifs des trois
premières banques passe de 10 % des actifs bancaires en 1990 à 35 % en 2007 (p. 62). La
financiarisation se décline au-delà en quatre tendances majeures : a) l’augmentation du secteur
financier dans la valeur ajoutée de l’économie (tant sous forme de profit que de salaire), b) la
réorientation des entreprises non-financières vers des activités financières, c) la soumission des
entreprises aux impératifs de la valeur actionnariale et d) l’expansion de l’endettement,
notamment des ménages. Lin et Tobias Neely en analysent systématiquement les conséquences en
matière d’inégalité de distribution de revenus et de patrimoines à la fois entre les différents groupes de
revenus, mais aussi en tenant compte de l’impact intersectionnel en termes de genre, de situation
parentale et d’origine ethno-raciale.
L’ouvrage souligne que l’augmentation des inégalités liée à la financiarisation tient avant tout
au fait que la finance est une niche salariale où l’on verse des salaires très élevés à une toute
petite minorité de banquiers de Wall Street, principalement des hommes blancs. La structure de
la rente salariale financière s’inverse. Au début des années 1970, les salariés du bas de la
hiérarchie salariale bénéficient plus fortement d’un emploi en finance (+35 % de salaire en plus
par rapport aux autres secteurs) que ceux du haut (+20 %). Au contraire, quelques décennies
plus tard, l’emploi en finance favorise plus le haut de la hiérarchie (+60 %) que le bas (10 %).
Au-delà du secteur financier, les entreprises non-financières se bancarisent et accroissent les
revenus d’origine financière, notamment en couplant, comme dans le secteur automobile, la
vente de biens à la distribution de crédit. Elles se soumettent aussi de plus en plus aux
impératifs de la « révolution actionnariale ». Au nom de la création de valeur pour l’actionnaire,
elles restructurent l’activité sur leur cœur de métier, externalisent les activités annexes, délocalisent la
production vers des pays à faible salaire, suppriment les avantages sociaux, notamment les plans de
retraite à prestation définie et essayent de briser le pouvoir des syndicats. Alors même que les
dirigeants salariés d’entreprise auraient pu aussi être fragilisés par le retour en force de l’actionnaire,
ils réussissent à renouveler et renforcer leur pouvoir en prétendant agir en leur nom. Ainsi, dans les
années 1990, les salaires des 350 PDG les mieux payés passent de 3 à 20 millions de dollars.
L’endettement constitue la principale manifestation de la financiarisation des ménages.
Longtemps, les ménages étasuniens les plus pauvres n’avaient que peu accès au crédit bancaire, ce qui
les maintenait dans une trappe à pauvreté. Le développement du crédit, soutenu par la dérégulation et
la titrisation, aurait pu permettre une plus grande inclusion financière et tempérer les inégalités.
Toutefois, l’amélioration de l’accès au crédit a bénéficié d’abord aux classes moyennes,
notamment aux ménages situés entre le 60e et le 80e percentile. Le haut de la distribution utilise
le crédit essentiellement pour des acquisitions immobilières qui entrent dans le patrimoine,
alors que le bas de la distribution a plus recours au crédit à la consommation, plus onéreux, et
qui ne permet aucune accumulation patrimoniale. Le cinquième des ménages le plus pauvre est
alors plus souvent confronté (et ce de manière croissante au cours des années 2000) aux
incidents de remboursement et au surendettement (p. 132). Leur inclusion dans le crédit
étasunien semble donc coûteuse, ou sinon, moins bénéfique que pour les autres groupes de
revenu.
Outre les inégalités entre groupes de revenu en termes d’accès au crédit et de constitution d’un
patrimoine, l’ouvrage démontre aussi l’accroissement des inégalités patrimoniales selon
l’origine ethno-raciale (p. 144) et surtout le différentiel de destin selon les générations, liés à
deux crises profondes pour la société étasunienne : la crise des retraites et la crise de la dette
étudiante. Ainsi la proportion de salariés bénéficiant d’un plan de retraite a diminué de 55 à 40
% entre 1980 et 2014 (p. 105). En outre, la transformation des plans de retraite de prestations
définies en plans à contributions définies les rend plus incertains et généralement moins
rémunérateurs. De même, l’augmentation considérable du coût des études supérieures a conduit
à une très forte augmentation de l’endettement étudiant préjudiciable à la constitution d’un
patrimoine. À l’âge de 30-34 ans, le patrimoine de la cohorte née entre 1977 et 1982 est de 20
(pour le top 10 %) à 80 % (pour le quartile du bas) inférieur à celle née entre 1971 et 1976. Et
pour cause : elle doit rembourser des prêts étudiants plus lourds et plus longtemps.
Le livre examine dans le dernier chapitre les évolutions consécutives à la crise. Les tentatives de
régulation de l’administration Obama, largement démantelées par la présidence Trump, n’ont guère
changé le constat. Les inégalités se sont au contraire accrues après la crise. Les auteurs concluent
l’ouvrage par quelques propositions de transformation de l’industrie et plaident notamment en faveur
de la déconcentration du secteur financier. La diffusion de nouvelles valeurs issues de
l’investissement responsable pourrait aussi, mais dans de modestes proportions, produire des
inflexions.

Unité et variété des processus de financiarisation


Cette analyse détaillée et complète des liens entre les multiples formes de la financiarisation et les
inégalités aux États-Unis invite à reposer la question du caractère unitaire du processus de
financiarisation à la fois dans l’espace, dans le temps et au sein des différents secteurs de l’économie.
L’ouvrage suggère que la financiarisation décrite pour les États-Unis est aussi à l’œuvre dans les
autres pays développés. Certains chocs mondiaux comme la fin du système de Bretton-Woods (1971)
qui réactive brutalement le marché des changes touchent effectivement l’ensemble des économies de
marché. La place centrale des États-Unis dans l’économie-monde favorise la diffusion globale des
tendances comme la « révolution actionnariale » qui émergent sur son sol. Néanmoins, il ne faut pas
sous-estimer la spécificité du système bancaire étasunien et de son mode d’attribution du crédit
consécutif aux régulations strictes imposées par le Glass-Steagall Act (1933) : fragmentation bancaire,
séparation stricte des banques commerciales et des banques d’investissement et externalisation du
credit scoring. Au contraire, dans de nombreux pays d’Europe, le secteur financier des trente
glorieuses était déjà structuré par de grandes banques quasi-universelles. Le fait que la finance
contribue de manière équivalente en Europe à la hausse des inégalités dans les années 1990-2000
invite donc à nuancer la piste du démantèlement du Glass-Steagall Act. En revanche, cette
comparaison invite à mettre plus l’accent sur la transformation radicale des marchés des titres dans les
années 1970-1980 qui conduit à une extension sans précédent du domaine de l’arbitrage et de la
spéculation. Elle a pour pilier la suppression des régulations corporatistes des anciens agents de
change, l’informatisation des transactions et la dérégulation du commerce des produits dérivés.
Une comparaison précise des rythmes des différentes dimensions de la financiarisation étasunienne
invite enfin à nuancer l’unité du phénomène, voire à remplacer cette notion par des concepts
intermédiaires.
Ainsi les premiers travaux sur la financiarisation, souvent d’inspiration marxiste, insistaient sur la
financiarisation des revenus des entreprises non financières comme révélateur d’une phase financière
du capitalisme où les entreprises placeraient en bourse plutôt que d’investir dans l’activité réelle. Les
revenus financiers ont beaucoup crû dans les années 1970 et 1980. Mais ils ont tout autant décru dans
les années 1990 et 2000 (p. 14). Cette dimension ne semble donc pas si cruciale pour penser la
financiarisation contemporaine et son lien avec la croissance des inégalités.
Il est de même classique d’insérer la maximisation de la valeur actionnariale comme une composante
importante de la financiarisation. Si cette tendance se manifeste par un accroissement constant des
dividendes versés aux actionnaires depuis le début des années 1970 (p. 13) et par un accroissement
des rémunérations des dirigeants, on pourrait discuter de son caractère intrinsèquement financier.
Même si elle ne prenait pas une forme aussi radicale que celle théorisée par Jensen et Meckling, la
maximisation des profits a toujours été au cœur du capitalisme et peut être accentuée
indépendamment des évolutions du secteur financier. Au contraire, le développement spectaculaire de
quelques entreprises de gestion d’actifs comme BlackRock laisse entrevoir de possibles tensions entre
le développement du secteur financier et la valeur actionnariale. En effet, les ménages, échaudés par
la crise boursière de 2001, ont largement déserté la possession directe d’actions au profit de parts de
fonds commun de placement ou de fonds de pension. L’actionnaire est de moins en moins une
personne physique. C’est une entité abstraite au nom de laquelle parlent des salariés de l’industrie
financière. En outre, dès lors que ces entreprises de gestion d’actifs possèdent une large part de
l’économie (les trois plus grosses possédant 22 % des actions du S&P500 en 2018), elles
pourraient à l’avenir abandonner la logique de maximisation de la valeur actionnariale firme
par firme et au contraire agir en « propriétaire universel » (universal owner). Cette idée
novatrice a été formulée originellement par Hawley et Williams. Selon eux, les fonds de pension
pourraient être une pièce clef d’un capitalisme démocratique. Ils représentent les retraités
actuels ou futurs. En possédant l’ensemble des entreprises, ils peuvent favoriser la croissance à
long terme de l’économie dans son ensemble, en tenant compte des externalités négatives et des
complémentarités positives de telle ou telle activité. Les travaux récents montrent que ces
entreprises de gestions d’actifs forment une oligarchie capitalistique peu démocratique et, pour
l’instant, guère soucieuse du long terme. Celles-ci, une fois assurées de leur pouvoir, pourraient
néanmoins s’éloigner des canons de la maximisation de création de valeur.
Ainsi, même si la financiarisation a été un concept commode et fécond pour penser les
transformations du capitalisme contemporain et les développements des inégalités, au terme de 15 ans
de travaux, il pourrait être plus utile de développer et articuler des concepts plus spécifiques tels que
la priorisation de la valeur actionnariale dans les entreprises non-financières, la généralisation de
l’endettement des ménages et l’emprise croissante des marchés financiers comme mode
d’intermédiation financière. En effet ces trois transformations majeures ont chacune un rythme propre
et une articulation spécifique avec le développement des inégalités.
Marginalisation commerciale de l'Afrique

L’Afrique est-elle en marge de la mondialisation ? Si l’on regarde la part du commerce Africain


dans le commerce mondial, la réponse est clairement affirmative puisque le commerce Africain
représente à peine 2.7% du commerce mondial. Certes le processus de désintégration observé
entre les années 1970 et 2000, où la part de ces échanges avait chuté de 4% à 1.5% a été stoppé,
mais le poids de l’Afrique dans le commerce mondial reste faible.

Cette faiblesse, s’explique avant tout par la faiblesse des revenus et par la structure des pays
très spécialisés sur des produits agricoles dont la valeur pèse peu dans les exportations
mondiales. Enfin les coûts commerciaux, qui comprennent les tarifs mais aussi toutes les
barrières non tarifaires (coûts administratifs, passage de frontière, infrastructure de transport),
sont relativement plus élevés en Afrique (et pour les biens agricoles) que dans le reste du monde.
Étudions ces déterminants gravitaires (poids économiques des pays et distance au marché) expliquant
la marginalisation de l’Afrique du commerce international.

Le difficile accès au marché

Outre les infrastructures de transport qui sont souvent en mauvais états, les formalités
administratives pour exporter (ou encore le temps de passage à la frontière) représentent des
entraves importantes pour les exportateurs Africains. En 2018, il fallait par exemple en
moyenne 97 heures en Afrique (indicateur « time to export : border compliance » basé sur
enquête de la Banque Mondiale), contre 22 heures en Europe et en Asie Centrale pour passer les
formalités de la frontière.

Si l’on observe désormais les tarifs, qui sont plus facilement mesurables, mais qui ne
représentent qu’une part des coûts commerciaux (environ un quart du coût total) nous
constatons qu’ils sont de l’ordre de 9% pour les exportateurs de biens agricoles (voir tableau ci-
dessous basé sur une moyenne de 55 pays africains). Ce taux de protection est moins important
que les coûts tarifaires rencontrés par exemple par les exportateurs européens (11%)
principalement en raison des préférences commerciales accordées aux pays les moins avancés
(Candau et Jean, 2009).
En analysant l’accès au marché Africain, il est frappant de constater que les importations de
biens agricoles sont lourdement taxées, avec un équivalent ad-valorem de l’ordre de 18%
(contre 13% en Asie et 7% en Europe).

Ce protectionnisme Africain s’explique à la fois par la nécessité de faire rentrer des recettes
fiscales, et par le pouvoir de lobbying de certains producteurs associé à une volonté de protéger
une agriculture qui occupe une grande part de la population.

La production

La production agricole représente en moyenne 65% des emplois selon les estimations de Diao et
al. (2017), ce qui est sans aucun doute une borne basse qui ne concerne d’ailleurs que 11 pays
Africains.
Les avantages comparatifs des pays Africains au sein de ces produits agricoles sont le cacao
(21% du marché mondial), le café (6% des exports mondiale), le thé (1/5 du marché mondial), le
sucre (5%), le coton (16%), les fruits (agrumes:16%, raisins: 4%), les fruits à coques (noix de
cajou: 20%), divers légumes et poissons. En dehors de ces avantages comparatifs, une grande
partie de l’agriculture est une agriculture de subsistance.

La productivité du secteur agricole est d’une façon générale extrêmement faible par rapport aux biens
manufacturés. Il faut noter aussi que ce secteur industriel ne représente qu’une faible part de la
production, entre 4 et 8% du PIB des pays Africains.
Cette faible industrialisation est problématique, elle signifie que l’on observe en Afrique une
urbanisation sans industrialisation (Gollin et al., 2016), c'est-à-dire un déversement de la force
de travail d’un secteur agricole peu productif à un secteur tertiaire urbain informel qui l’est
tout autant. Il y a certes en Afrique des secteurs ultra-rentables tel que le secteur minier, mais
qui sont fortement capitalistique et emploient donc peu de main d’œuvre.

Cette évolution diffère de la transformation structurelle observée en Europe au siècle derniers


et en Asie actuellement où urbanisation, industrialisation et mondialisation sont allées de pair
expliquant une partie non négligeable de la croissance au sein de ces continents (Candau et
Dienesch, 2013). Les leçons économiques du passé, nous enseignent que la façon la plus efficace
pour converger rapidement vers les pays riches est de se spécialiser dans le secteur industriel où
les gains de productivité sont les plus forts et les plus faciles à obtenir (Rodrik, 2013). En effet, il
n'est pas nécessaire d'un point de vue économique (sans doute nécessaire à d'autres égards) d'avoir un
état providence finançant l’éducation, la santé et la solidarité pour développer les premiers chaînons
d’un secteur industriel. La donne est tout autre pour construire une économie tertiaire développée.

Conclusion

Si l’Afrique est d’une façon générale marginalisée du commerce mondial c’est parce que les revenus
y sont faibles, que les spécialisations ne permettent pas de s’insérer de façon diversifiée dans le
commerce international et enfin que l’accès aux marchés internationaux reste difficile en raison des
différentes barrières tarifaires et non tarifaires qui font obstacles aux exportations Africaines. Dans un
récent article nous avions tenté d’analyser si les accords régionaux Africains étaient en train de
modifier cette marginalisation, avec l’idée en arrière plan qu’une intégration interne pouvait
être un marche pied à une diversification des économies Africaines (Candau, Guepie and
Schlick, 2019). Nous avons notamment regardé si la demande interne naissante avait stimulé les
activités à rendements croissants souvent porteurs de croissance. Hélas nous n’avons pas trouvé
de signe d’une telle dynamique, espérons cependant qu’elle soit en cours mais pas encore visible
dans les données.q

F. Candau

PS: Si vous souhaitez imprimer ce post, vous trouverez une présentation soignée en version pdf sur
HAL qui a eu la bonne idée de créer une section "article de blog".

Références

● Bouët A, L Cosnard, C. S. Fall, 2019. African in Global Agricultural Trade in Africa


Agriculture Trade Monitor.
● Candau, F., Guepie, G., Schlick, J., 2019. Moving to autarky, trade creation and home market
effect: an exhaustive analysis of regional trade agreements in Africa, Applied Economics,
51:30, 3293-3309.
● Candau F, E Dienesch, 2013. Does Globalization explain Urbanization in the World and in
Asia? hal-01847940
● Candau F., S. Jean, 2009. What are EU Trade Preferences Worth for Sub-Saharan Africa and
other Developing Countries? Published in Trade Preference Erosion: Measurement and Policy
Response edited by B Hoekman, W Martin and C Primo Braga, World Bank and Palgrave-
Macmillian series.
● Diao, X., K., Harttgen, M., McMillan, 2017. The Changing Structure of Africa's Economies,
The World Bank Economic Review.
● Rodrik, D., 2013. Unconditional Convergence in Manufacturing. Quarterly Journal of
Economics.128 (1) :165-204.
Le modèle asiatique, difficile à reproduire en Afrique

Bruno Cabrillac
Sciences Po
Telos - 20 novembre 2018

Depuis qu’en 1991, la Banque mondiale a, dans un célèbre rapport, caractérisé le décollage
économique d’une partie de l’Asie orientale (les Tigres et les Dragons) comme un miracle et en a mis
en évidence les causes, le contraste avec les autres parties du monde en développement et,
notamment, l’Afrique a trouvé une explication consensuelle. Un investissement élevé dans le capital
physique et surtout dans le capital humain, une épargne forte, une gestion économique prudente, un
développement porté par les industries exportatrices ont permis de tirer les bénéfices en termes de
croissance d’un dividende démographique particulièrement élevé, tout en assurant une réduction des
inégalités et de la pauvreté. Pourtant, les économistes se posent la question de savoir si le reste du
monde en développement et singulièrement l’Afrique peut et doit adopter ce modèle. Plus d’un quart
de siècle après, bien que ce modèle ait été revisité fréquemment notamment par une partie des
économistes à l’origine du rapport initial, dont Joseph Stiglitz, la question reste entière. Et alors que le
miracle chinois, plus impressionnant encore que celui des Tigres et des Dragons parce qu’il est à
l’échelle de l’humanité, offre à l’Afrique une variante différente, mais dont l’efficacité est aussi
prouvée, du modèle asiatique, on ne sait si le continent peut et doit s’en saisir.
Le dernier rapport de la Banque mondiale sur le miracle asiatique (« Chevaucher la vague, un miracle
est-asiatique pour le 21e siècle », 2018) apporte indirectement une réponse partielle à cette question,
en examinant la situation des pays les plus pauvres en Asie orientale. Il note ainsi que le choix d’une
croissance tirée par les exportations de produits manufacturés qui est un des piliers du modèle
asiatique et celui auquel s’intéresse ce billet sans pour autant ignorer les autres, est moins accessible
aujourd’hui. D’une part, la concurrence chinoise reste redoutable, même pour les produits à forte
intensité de main d’œuvre et à faible valeur ajoutée. D’autre part, il devient de plus en plus difficile
d’entrer dans des chaînes de valeur toujours plus performantes et toujours plus intégrées. Enfin, la
Banque mondiale souligne que les marges de manœuvre pour mener la même politique de soutien aux
exportations que les Tigres et les Dragons (sous évaluation du change, droits de douanes réduits sur
les importations des exportateurs, incitations aux IDE…) se sont réduites. Ces arguments valent
naturellement, mutatis mutandis, pour l’Afrique et encore plus pour l’Afrique Sub-saharienne.
De fait, si les exportations de marchandises du continent ont connu une progression sensible au cours
de la première décennie, leur part dans les exportations mondiales s’est stabilisée à un niveau très bas
(2,4% en 2017 contre 7,3% en en 1948 et encore 4,5% en 1983, selon l’OMC). La marginalisation de
l’Afrique dans le commerce mondial de biens est donc concomitante à la montée en puissance de
l’Asie (14% en 1948, 19,1% en 1983, 34% en 2017). En outre, la part des exportations de biens
manufacturés dans les exportations de l’Afrique sub-saharienne reste très faible (25% contre plus de
66% pour l’ensemble du monde et plus de 80% pour l’Asie orientale). De fait, le miracle asiatique a
contribué à conforter la spécialisation de l’Afrique dans les matières premières (plus de 50% en 2016)
et ce n’est que grâce à l’augmentation du prix relatif des matières premières que l’Afrique a pu
maintenir sa part dans le commerce mondial depuis 2008. La faiblesse de l’intégration de l’Afrique
dans les chaînes de valeur globales est une des raisons de cette marginalisation. La part de l’Afrique
dans les exportations de services (moins de 2 % en 2017, selon l’OMC) et, notamment, la part dans
les exportations de services aux entreprises qui est un marqueur du rôle dans les chaînes de valeur est
encore plus faible. Comme le note le rapport 2017 sur les chaînes de valeurs internationales et sur la
base d’un autre marqueur, la part des produits intermédiaires dans le commerce, l’Afrique est
nettement en retard sur toutes les régions du monde et encore plus sur l’Asie orientale.
Ce phénomène est-il réversible ? Rien n’est moins sûr à moyen terme. D’une part, les politiques de
soutien aux exportations de produits manufacturés n’ont plus la même efficacité, dans un monde plus
ouvert et avec des systèmes de changes plus flexibles, d’autre part la concurrence de l’Asie orientale
et, singulièrement de la Chine en termes d’attractivité des investissements directs étrangers reste tout
aussi redoutable qu’en matière de compétitivité prix. Enfin, comme le note la Banque mondiale, si les
salaires nominaux sont plus faibles en Afrique, les coûts unitaires du travail y restent beaucoup plus
élevés. Or c’est cet indicateur qui est l'élément clé de l’intégration dans les chaînes de valeur. Même
si le développement des échanges intra continentaux ouvre un espoir de développer une chaîne de
valeur africaine, cet espoir est ténu et incertain, comme les projets d’intégration régionale et,
notamment, de Zone de libre échange continentale.
À plus long terme, évidemment, rien n’est joué, mais on peut se poser la question de savoir si ce
modèle de développement extraverti n’aura pas fait long feu. D’ores et déjà, des indicateurs
convergents semblent indiquer que l’âge d’or du commerce international a pris fin. Les organisations
internationales s’accordent pour pronostiquer que l’élasticité de la croissance du commerce
international à celle du PIB mondial qui était de plus de 2 au cours des dernières décennies devrait
revenir à l’unité. L’épuisement des effets de la baisse des tarifs et des coûts de transports, le
raccourcissement des chaînes de valeur, voire leur stagnation (l’indice global des chaîne de valeur est
stable depuis 2010, selon le rapport 2017 de l’OMC sur le développement des chaînes de valeur)
poussent en ce sens.
On peut aussi s’interroger sur ce que sera la prochaine phase de la globalisation. Comme le prédit
Richard Baldwin, cette nouvelle phase qui est déjà en route sera fondée sur les nouvelles technologies
qui permettent d’abolir la nécessité de la présence physique dans l’essentiel du processus de
production de services, voire de biens. Dans cette nouvelle phase, il ne s’agira plus d’attirer les
investisseurs pour construire des usines mais de former, retenir ou attirer les talents. Le montant des
investissements physiques nécessaires pour la localisation de la production sera beaucoup plus réduit,
mais la quantité et la qualité de l’investissement en ressources humaines sera, avec un cadre de vie
attractif et une forte connectivité, la clé de la localisation de la production. Sur ce plan, l’Afrique a
sans doute aussi un déficit de compétitivité avec le reste du monde émergent, mais il paraît plus facile
de le combler que de réussir à reproduire le modèle de développement par les exportations de produits
manufacturiers qui a fait la fortune de l’Asie orientale.
L’Afrique, nouvelle frontière du libre-échangisme ?
Bruno Cabrillac
18 septembre 2018

Au moment où le mouvement multilatéral de libéralisation des échanges ploie sous les coups de
boutoir américains, l’annonce par l’Union africaine, le 21 mars 2018, de la création d’une zone
de libre-échange continentale (ZLEC) en Afrique paraît d’autant plus décalée que c’est là que
se trouvent les plus grands perdants de la mondialisation. Le paradoxe n’est qu’apparent puisque
c’est le constat de l’échec de l’intégration dans l’économie mondiale à travers le commerce Nord-Sud,
comme via les échanges avec les émergents, qui est le meilleur argument, avec la faible taille de la
plupart des marchés nationaux, en faveur du développement de et par le commerce intra-africain.
Comme le souligne un récent rapport conjoint de l’OCDE et de l’Union africaine, l’intégration
de l’Afrique dans le commerce mondial n’est pas un problème quantitatif, mais qualitatif. Le
taux d’ouverture de l’économie (importations + exportations/PIB) est en Afrique d’environ
50%, un taux comparable à l’Asie et supérieur à celui de l’Amérique latine (44% en 2017). Mais
la part des matières premières dans les exportations africaines était supérieure à 50% en 2016
et la part des produits finis, inférieure à 20%. À l'inverse, la part des produits finis dans les
importations était de 63% et la part des produits semi-finis d’à peine 25%. Enfin, pour
compléter ce tableau, on notera que, selon le même rapport, le degré de complexité (ie la part de
connaissance incluse, selon la méthode de Hausmann et Hidalgo) des importations africaines est
très significativement inférieur à celui des importations en Asie ou en Amérique latine. En
grossissant le trait, si l’Afrique a, depuis une décennie, réussi à stabiliser sa part dans le
commerce mondial, à un niveau faible (2,2% en 2016 selon les statistiques de l’OMC), cela n’a
pas altéré la structure de ces échanges: matières premières contre produits finis de qualité
inférieure. Et la forte progression des échanges avec les émergents dont le poids dans le
commerce africain est devenu équivalent à celui des partenaires traditionnels a plutôt conforté
cette structure.
Dans ce contexte, le développement du commerce intra régional en Afrique constitue une voie plus
aisée que celle de l’insertion dans les flux mondiaux pour stimuler les exportations de produits finis et
créer des chaînes de valeur continentales et au-delà participer à l’industrialisation de l’Afrique qui est
un des piliers de l’agenda 2063 de l’Union africaine. Les économies africaines et, notamment, leurs
PME peuvent en effet bénéficier d’avantages comparatifs sur les marchés voisins, pour des raisons de
proximité géographique et culturelle, mais aussi des modes de consommation. Toutefois, le potentiel
de développement du commerce intra régional en Afrique reste incertain: sa part dans le commerce
total (un peu en dessous de 20% selon la CNUCED, un chiffre sans doute significativement sous
évalué en raison de l’importance du commerce informel, très largement sous régional) est du même
ordre de grandeur qu’en Amérique latine où les économies sont pourtant plus développées et plus
diversifiées. De même, la part du commerce intra régional dans les échanges de biens
intermédiaires, qui est un indicateur de l’importance des chaînes de valeur régionales est très
faible en Afrique (4%), contre 24% en Asie (16% si on exclut la Chine), mais du même ordre de
grandeur qu’en Amérique latine.

Une zone de libre échange continentale permettrait-elle de réaliser ce potentiel ? L’OCDE et


l’Union africaine l’affirment en avançant que le libre échange pourrait permettre une
croissance additionnelle d’un tiers du commerce intra régional, d’autres estimations vont même
jusqu’à avancer une croissance de 50% (Commission économique pour l'Afrique). Ces chiffres
doivent être analysés avec prudence. Les unions douanières qui ont accompagné les unions
monétaires depuis plus de 60 ans et qui se transforment progressivement en marchés uniques
ont eu des résultats contrastés en UEMOA (ou la part du commerce intra zone est trois fois
supérieure à la moyenne du continent) et en CEMAC où le commerce intra zone reste
anecdotique. Dans le contexte africain, les barrières tarifaires (6,1% en moyenne pour le
commerce intra-africain selon l’UA) ne constituent souvent qu’un obstacle secondaire au
commerce, loin derrière l’insuffisance des infrastructures, le coût des transports, l’insécurité,
les difficultés de financement et de paiement, la corruption et les dysfonctionnements des
services douaniers.
L’expérience de la Communauté de l’Afrique de l’Est montre cependant qu’une zone de libre
échange appuyée sur une démarche volontariste d’intégration, favorisant notamment les
interconnexions de communication peut avoir un effet très stimulant sur le commerce intra
pourvu qu’il y ait un niveau minimum de diversification des économies qui y participent. Reste
à savoir si cette volonté d’intégration économique existe au niveau du Continent. Que 44 pays
sur les 54 membres de l’UA soient parvenus à adhérer à la ZLEC, après un processus
relativement court de six ans, est certes un signe encourageant, malgré les hésitations de poids
lourds du continent, notamment du Nigéria. Il est vrai que le commerce intra régional est
aujourd’hui si peu développé que la perspective d’un abaissement des barrières tarifaires ne gêne pas
beaucoup d’avantages acquis à l’inverse des accords de partenariats économique avec l’Union
Européenne qui ont tant de mal à se mettre en place et à essaimer des zones de libre-échange sous-
régionales. Un autre signe encourageant est le pragmatisme de cet accord (suppression des
barrières tarifaires sur 90% des biens mais avec des clauses de sauvegarde, libéralisation
progressive des services, mise en place d’une coopération pour la reconnaissance mutuelle des
normes et des réglementations et ouverture d’une deuxième phase de négociations sur les droits
de propriété intellectuelle, les politiques de concurrence et les investissements)
Pour autant, tant d’utopies panafricaines, dont par exemple le Fonds monétaire africain, créé
en 2014, n’ont jamais dépassé le stade des bonnes intentions, qu’il faut attendre la mise en
œuvre opérationnelle de la ZLEC pour voir si l’Afrique portera l’étendard du multilatéralisme
commercial.
Quel avenir pour le libre-échange en Afrique ?

Julien Gourdon
Économiste, Agence française de développement (AFD)

The Conversation, 9 février 2022

La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) a été officiellement lancée le 1 er


janvier 2021. Cet instrument stratégique vise à soutenir les économies africaines, à favoriser
leur développement et à faciliter leur intégration.
S’il est trop tôt pour dresser un bilan de son action, cet article entend examiner les bénéfices
potentiels et les défis relatifs à la mise en place de cet accord.

Pourquoi l’agenda « intégration régionale » a été relancé en 2018


Entre 2000 et 2015, l’Afrique a bénéficié d’une croissance soutenue, portée par une forte vague
d’investissements directs étrangers, et marquée par un net recul de la pauvreté.
Cependant, il restait à intensifier une transformation structurelle permettant à la fois
d’absorber le surplus de main-d’œuvre agricole, de réduire la dépendance du continent aux
ressources naturelles et ainsi de lui garantir une croissance moins vulnérable. La chute des
cours des matières premières depuis 2015 et son effet négatif sur la croissance du continent ont
réaffirmé cette nécessité.
Plusieurs facteurs sont susceptibles d’accélérer le changement structurel (urbanisation,
infrastructures, etc.), dont l’intégration commerciale. En particulier, la nouvelle organisation
du commerce international avec la segmentation des processus de production offre, on le
pensait, des opportunités intéressantes pour développer un modèle basé sur l’intégration dans
les chaînes de valeur.
En effet, les chaînes de valeur mondiales confèrent aux pays la possibilité de s’intégrer dans
l’économie globale à un moindre coût en ne produisant que certains composants ou en
n’accomplissant que certaines tâches. Cela leur permet de profiter de leurs avantages
comparatifs, tout en diversifiant et en sophistiquant leurs paniers d’exportations.
Cependant, en Afrique, le commerce avec le reste du monde reste très orienté sur les ressources
naturelles, quand le commerce intra-Afrique repose davantage sur les biens transformés.

À quoi ressemble l’intégration commerciale aujourd’hui en Afrique


Il est primordial de distinguer le commerce intra-africain de celui avec le reste du monde. Les
exportations infrarégionales sont en effet plus diversifiées et ont un contenu technologique plus
important que les exportations vers le reste du monde. Les ressources naturelles représentent à
elles seules 65 % des exportations africaines vers l’extérieur du continent (graphique 1).
D’après le rapport sur l’investissement mondial, 40 % des investissements directs étrangers en
Afrique se font en direction des industries liées aux ressources naturelles, principalement dans
le secteur minier. Ce dernier est doté d’une faible valeur ajoutée et est intensif en capital, ce qui
a empêché le développement des chaînes de valeur mondiales dans le secteur manufacturier.
Cela contraste fortement avec le commerce intra-Afrique qui repose davantage sur les biens
manufacturiers (pour plus de la moitié), mais aussi agricoles (pour près de 20 %).
Graphique 1. Composition du commerce sur 1995-2018 (intra-africain et avec le reste du monde). calcul des
auteurs à partir de la base World Integrated Trade Solution 2021 (Banque mondiale)

Renforcer l’intégration régionale permettrait de développer des chaînes de valeur régionales,


puis mondiales
Le commerce infrarégional ne représente que 15 % du commerce total en Afrique, contre plus
de 60 % sur autres continents. Les communautés économiques régionales existantes présentent
un degré d’intégration encore trop faible (Graphique 2), car elles se concentrent principalement
sur la baisse des tarifs douaniers sans proposer de réduire les autres obstacles au commerce et
sans lier la politique commerciale des pays à leur politique industrielle.
Or il existe donc à présent cette communauté économique continentale (déjà évoquée dans les
annexes du traité d’Abuja de 1991 sur l’intégration régionale et relancée par l’Agenda UA 2063) qui
pourrait faciliter le commerce intra-africain en permettant une meilleure intégration des économies du
continent dans les chaînes de valeur.

Graphique 2. Commerce intra-Afrique en 2019 (en pourcentage du commerce total). Calcul des auteurs avec les
données d’UnctadStat2019 (CNUCED), Fourni par l'auteur

Regardons d’abord le contenu car s’il est trop tôt pour dresser un bilan, on peut tout de même
s’interroger sur la capacité de ce dispositif à soutenir les performances économiques des pays du
continent.
On constate que la ZLECAf entend prendre en charge les sujets déterminants pour
l’intégration dans les chaînes de valeur, ceux qui n’ont jamais ou rarement été abordés dans les
précédents accords régionaux du continent. L’accord propose des protocoles afin que les 54
pays s’entendent sur différentes règles de commerce liées aux normes des produits, des services,
de l’e-commerce, des droits de propriété intellectuelle, de la concurrence et de l’investissement.
L’objectif étant de ne pas être un simple accord commercial, mais un instrument stratégique
pour le développement et l’intégration de l’Afrique.
Les secteurs fréquemment cités comme potentiels bénéficiaires de ce nouveau cadre se situent
principalement dans l’industrie, puis dans les services et enfin dans l’agriculture. L’agro-industrie
pourrait se développer au niveau régional, en particulier si les pays parviennent à s’accorder sur les
normes sanitaires et phytosanitaires.
L’émergence du secteur pharmaceutique, apparue nécessaire avec la pandémie Covid-19,
dépendra également du progrès sur le chapitre des normes phytosanitaires, mais aussi des
accords sur le protocole des droits de propriété intellectuelle. Le secteur du textile pourrait voir se
réaliser sur le continent l’entièreté du cycle de production des vêtements, si les pays s’entendent sur
les règles d’origine des biens et sur le protocole régissant les investissements.
Les attentes sont également importantes dans les cinq secteurs des services inclus dans l’accord et
plus particulièrement pour les services aux entreprises, le tourisme, mais aussi les transports. Les
résultats dans ces secteurs seront aussi dépendants des progrès sur les annexes de l’accord liées à la
libre circulation des personnes et des protocoles d’accord sur l’investissement et le commerce
électronique.
L’étude de la Banque mondiale indique que la demande de services à des fins d’exportation de biens
devrait également progresser et bénéficier de l’instauration de la zone de libre-échange.
Les défis de l’intégration régionale et de la ZLECAf
Néanmoins, il faudra relever certains défis afin que la ZLECAf tienne ses promesses de
développement économique et parachève cet objectif d’intégration avec des politiques
d’accompagnement pour aboutir à une transformation structurelle au bénéfice du plus grand nombre.
● Trouver des terrains d’entente entre les 54 États membres
L’agenda UA 2063 porte en lui trois objectifs difficilement compatibles pour la mise en place de la
ZLECAf. Ces trois objectifs sont une intégration profonde, une large adhésion de pays et une
solidarité panafricaine. Cela forme ce que de Melo et al. appelle le « trilemme » de l’intégration
régionale en Afrique. Trouver un équilibre entre un accord avec le maximum de membres hétérogènes
et avancer en profondeur sur des questions sensibles tout en offrant un traitement plus favorable aux
pays les moins avancés sera déterminant.
● Gérer l’harmonisation avec les accords régionaux existants sur le continent
L’agenda d’intégration régionale ayant été lancé il y a presque trente ans, les pays de l’Union
africaine adhèrent à des communautés économiques régionales (CER), qui ont déjà leurs propres
règles, et parfois à des organisations (type unions douanières) qui comprennent un niveau
d’intégration supérieur à celui de la zone de libre-échange. Il faudra que les CER harmonisent leurs
règles de fonctionnement pour être au maximum en cohérence avec celles de la ZLECAf.
La mise en place de la ZLECAf créera des gagnants et des perdants au sein de chaque pays et entre les
différents États membres. Un mécanisme de compensation est prévu, mais rien n’est encore élaboré.
Nul doute que de la mise en place effective de cet accord dépendra la satisfaction des États membres
vis-à-vis de ce mécanisme. Le secrétariat de la ZLECAf anticipe déjà de proposer de l’assistance
auprès de chaque État membre pour établir des politiques d’accompagnement, afin d’offrir des
compensations à ceux qui bénéficieront le moins économiquement de cet accord. Cela sera nécessaire
afin d’éviter des blocages des pays signataires.
Surtout, les ambitions suscitées et les aspirations énoncées par la ZLECAf ne peuvent se concrétiser
sans une vraie transformation structurelle – inclusive – des économies africaines. Il faudra d’autres
réformes et des politiques d’accompagnement en lien avec les Objectifs de développement durable au
niveau national et continental (infrastructures, transformation numérique, énergies renouvelables,
genre, éducation) afin que la ZLECAf serve effectivement à la transformation structurelle en faveur
d’une plus grande productivité, d’une meilleure croissance et de création d’emplois décents, entre
autres.
Le commerce international a créé des gagnants et des perdants dans les pays développés

● MARTIN ANOTA
● A la marge - 09/01/2022

Depuis les années 1980, les inégalités de salaires et, plus largement, de revenu ont eu tendance à
se creuser dans les pays développés, en particulier aux Etats-Unis. En l’occurrence, les
travailleurs très qualifiés ont vu leurs revenus augmenter plus rapidement que les travailleurs
peu qualifiés.

GRAPHIQUE 1 Deux grandes évolutions du commerce international depuis les années 1980

source : Dorn et Levell (2021)

Ce creusement des inégalités de revenu coïncide avec une nouvelle vague de la mondialisation
que certains ont qualifiée d’« hypermondialisation » [Subramanian et Kessler, 2013]. En
l’occurrence, les échanges internationaux de marchandises ont explosé, notamment sous l’effet du
retrait des barrières tarifaires : entre 1993 et 2008, les exportations mondiales de biens sont passées
de 13,8 % à 25,0 % du PIB mondial (cf. graphique 1). En outre, les pays en développement ont
contribué à une part croissante de ces échanges : celle-ci a quadruplé entre 1990 et 2015. Ces
évolutions tiennent toutes deux en grande partie à l’essor de l’économie chinoise, devenue la
dernière décennie la plus grande exportatrice au monde (cf. graphique 2).
GRAPHIQUE 2 Volume des exportations de marchandises chinoises à destination des Etats-Unis et de l’UE à
15 (en milliards de dollars 2019)

source : Dorn et Levell (2021)

La théorie suggère depuis longtemps que l’ouverture commerciale des pays en développement
est susceptible de creuser les inégalités de revenu dans les pays développés. Par exemple, le
modèle Heckscher-Ohlin et ses diverses déclinaisons impliquent que l’ouverture internationale
pousse les pays à se spécialiser selon leurs dotations en facteurs. En l’occurrence, les pays
développés, relativement bien dotés en travail qualifié, se spécialiseraient naturellement dans les
tâches de production nécessitant essentiellement du travail qualifié, tandis que les pays en
développement, comme la Chine, relativement abondants en travail non qualifié, se
spécialiseraient dans les productions nécessitant pour l’essentiel du travail non qualifié. Mais en
conséquence de cette division internationale du travail, la théorie amène à prédire un
creusement des inégalités au sein des pays développés : dans ces derniers, les travailleurs
qualifiés, davantage demandés, voient leurs salaires augmenter, tandis que les travailleurs non
qualifiés, moins demandés, voient leurs salaires diminuer. Ce résultat est connu dans la
littérature sous le nom de théorème Stolper-Samuelson.
Pour autant, les estimations empiriques du lien entre commerce international et répartition du revenu
ne datent vraiment que des années 1990. C’est au cours de cette décennie que les économistes prirent
vraiment conscience que les inégalités salariales tendaient à se creuser depuis les années 1980 dans les
pays développés et qu’ils se mirent à rechercher les causes de ce phénomène. Au tournant du siècle,
le consensus était que la mondialisation commerciale n’avait au mieux qu’un effet limité sur la
répartition des revenus [Krugman, 1995 ; Feenstra et Hanson, 1999]. Le progrès technique était
considéré comme le principal coupable derrière la hausse des inégalités de revenu, si bien que la
recherche porta ensuite moins d’intérêt aux effets distributionnels de la mondialisation [Wood,
2018]. Mais cette première vague de travaux a été réalisée avant que l’économie chinoise ne
prenne véritablement son essor ou, tout du moins, à partir de données antérieures à cet essor.
Elle n’a ainsi pas pu saisir les effets que celui-ci exercerait en définitive sur la répartition des
revenus dans les pays développés.
Il a fallu attendre les années 2010 pour que la recherche étudie à nouveau minutieusement la question
du lien entre commerce international et inégalités de revenu [Rodrik, 2021b]. Les études empiriques
plus récentes portant sur les pays européens et les Etats-Unis suggèrent que l’intensification de
la concurrence chinoise à l’importation a affecté les salaires et l’emploi des travailleurs dans les
secteurs les plus exposés au commerce extérieur et pour les résidents des régions les plus
exposées au commerce international. C’est ce que confirment David Dorn et Peter Levell (2021)
dans leur nouvelle étude : l’emploi manufacturier domestique a décliné bien davantage dans les
pays qui ont connu une forte croissance des importations nettes en provenance de Chine
(comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Islande) que dans les pays qui ont gardé un
commerce relativement équilibré avec la Chine (comme l’Allemagne, la Suisse et le
Luxembourg) (cf. graphique 3). En outre, cette littérature conclut que les effets négatifs du «
choc chinois » se sont diffusés au-delà des seuls secteurs industriels exposés à la concurrence
étrangère, qu’ils ont été les plus prononcés pour les individus les moins qualifiés et qu’ils se sont
révélés être durables. Ce fut le cas aux Etats-Unis, [Autor et alii, 2013 ; Autor et alii, 2014 ;
Autor et alii, 2015 ; Autor et alii, 2021], mais aussi en France [Malgouyres, 2017a].

GRAPHIQUE 3 Evolution de l’emploi manufacturier et de la concurrence chinoise à l’importation dans les


pays de l’OCDE

source : Dorn et Levell (2021)

En se penchant sur le Royaume-Uni, Dorn et Levell confirment que le commerce avec la Chine a
contribué à détruire des emplois dans l’industrie britannique. Cela dit, ils notent aussi qu’il a
également fortement réduit les prix à la consommation. Cela s’explique non seulement par le
fait que les résidents ont eu accès, grâce à la mondialisation, à un éventail plus large de produits
à bas coût, mais aussi par la plus forte concurrence à laquelle celle-ci a soumise les entreprises
domestiques. Dans tous les cas, cette baisse des prix a pu compenser, en termes de pouvoir
d’achat, la stagnation des revenus pour les personnes affectées par la désindustrialisation :
celles-ci ont pu gagner en tant que consommateurs ce qu’ils ont perdu en tant que travailleurs
[Fontagné, 2021]. Ce n’est malheureusement pas le cas : Dorn et Levell observent que les effets
négatifs sur l’emploi et les salaires se sont concentrés sur des groupes spécifiques de travailleurs
et des régions en particulier, tandis que les gains pour les consommateurs ont été largement
dispersés parmi l’ensemble de la population.
La mondialisation commerciale a certainement contribué à ce que les pays en développement
amorcent leur rattrapage sur les pays riches à partir des années 1990 et ainsi à ce que les inégalités
entre les pays diminuent [Lakner et Milanovic, 2016 ; Milanovic, 2020 ; Chancel et Piketty, 2021].
Mais elle a également eu tendance à accroître les inégalités en leur sein, en y a créant des gagnants et
des perdants [Bourguignon, 2012].
Les récents travaux empiriques indiquent aussi que, dans les pays développés, les résidents des
territoires affectés par la concurrence étrangère n’ont pas seulement subi des pertes
financières : ils ont également souffert d’une plus forte criminalité, d’une détérioration de leur
situation sanitaire et d’un éclatement des structures familiales traditionnelles. Par le biais de ces
divers effets, la mondialisation a ainsi favorisé l’essor du populisme dans les pays développés
[Rodrik, 2021a]. Aux Etats-Unis, l’intensification de la concurrence chinoise semble ainsi avoir
fait basculer le vote en faveur de Trump lors des élections en 2016 [Dorn et alii, 2016]. En
France, elle a contribué à la progression du Rassemblement national [Malgouyres, 2017b]. Les
effets de la mondialisation sur l’emploi et le revenu s’étant révélés particulièrement persistants, il faut
s’attendre à ce qu’elle continue d’alimenter les mouvements populistes.

Références
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WOOD, Adrian (2018), « The 1990s trade and wages debate in retrospect », in voxEU.org, 25 avril.
L'analyse économique des échanges internationaux

Graphique proviennent des visions néoclassiques.

« (...) L’Etat peut décider de mettre en place un protectionnisme tarifaire en introduisant une taxe sur
le bien importé. On observe que la taxe induisant une augmentation du prix entraîne une perte de
surplus du consommateur (zone coloriée) relativement à la situation sans taxe.

Graphique 2.a : La taxe baisse le surplus du consommateur dans le pays

Graphique 2.b : Le gain de surplus du producteur natio

Graphique 2.c. : L’apparition d’un surplus de l’Etat issu de la taxe


Graphique 2.d : Les triangles de HARBERGER, la perte de surplus global induite par l’effet distorsif
de la taxe

Cependant, cette augmentation du prix du bien dans le pays induit une baisse de la demande
domestique (on passe de D1 à D2).
Ces deux triangles nommés « triangle d’Harberger » correspondent donc à la baisse du surplus global
induit par l’effet de distorsion produit par la taxe. (....) Cette situation est sous-optimale au sens de
« éPareto, car elle diminue le surplus collectif relativement à la situation libre-échangiste. Dans ce
cas, il est possible d’augmenter le surplus collectif en supprimant la mesure protectionnisme afin de
tendre à nouveau vers un optimum économique. La théorie néoclassique démontre ainsi la supériorité
relative du libre-échange.
(...) dans l’article écrit en 1994 par Gene Grossman et Elhanan Helpman intitulés « Protection for
sales » que l’on trouve les arguments principaux de cette école sur le protectionnisme. Ces deux
économistes se demandent pourquoi le protectionnisme persiste en dépit de la supériorité démontrée
du libre-échange ?
Les éléments de réponse se trouvent dans l’analyse des stratégies individuelles menées par les
hommes politiques qui poursuivent leurs intérêts particuliers en dépit de l’intérêt général. Ainsi, pour
être réélus, ils acceptent volontiers les demandes de protection des lobbies issus des secteurs ayant un
poids politique important. Ces mesures sont rarement contestées par les consommateurs malgré leur
effet délétère sur le pouvoir d’achat, car leur coût est dilué sur un nombre important d’individus, qui a
du mal à s’organiser collectivement pour mener une action contestataire du fait même de la taille du
groupe auquel ils appartiennent. Ainsi, en s’appuyant sur les travaux de Mancur Olson (Logic of
Collective Action, 1965)), ils montrent que les groupes d’intérêts de petite taille se mobilisent plus
facilement et avec d’importants moyens (comme les grandes firmes), tandis que d’autres comme les
consommateurs ont moins de facilités à se coaliser car leur bénéfice est dispersé et la tentation de
passager clandestin est augmentée par la taille du groupe. Par conséquent, le degré de protection d’un
secteur est une fonction croissante du poids politique du groupe d’intérêt. C’est ainsi que l’on peut
expliquer la forte protection du secteur agricole au Etats-Unis. Dans cette approche, le
protectionnisme est bien supposé sous-optimal économiquement car il répond à des raisons
électoralistes, qui ne sont en rien des fondements de l’efficience économique.”
Buy American Act : un protectionnisme qui cache son nom
r
L’Opinion - 14/04/2021

Depuis son investiture, Joe Biden affiche clairement son ancrage réformiste et keynésien, au travers
d’une ambitieuse politique de relance et de lutte contre la précarité, en rupture avec celle de son
prédécesseur. Pour autant, il serait hâtif d’en conclure que ce virage porte sur tous les aspects de la
politique économique américaine. En particulier, la continuité entre les deux présidents apparaît
particulièrement forte sur le front du protectionnisme : Joe Biden reste fidèle à la ligne définie par
Donald Trump dès 2016 avec son slogan du « Buy American ». Certes, le ton est moins direct et
agressif vis-à-vis des partenaires commerciaux mais, sur le fond, on relèvera que l’un des
premiers décrets signés par Joe Biden, le 25 janvier 2021, a consisté à renforcer le Buy
American Act.
De quoi s’agit-il exactement ? Le Buy American Act, promulgué en 1933 par Hoover, prévoit que
les administrations fédérales privilégient, lors de leurs appels d’offres, des produits américains.
Ce texte contenait toutefois plusieurs lacunes et exemptions, permettant aux administrations de
le contourner. Désormais, pour être qualifié d’américain, le produit final devra incorporer au
moins 55 % de composants fabriqués sur le sol américain.
De plus, le Buy American Act renforcé permettra à l’administration de choisir une entreprise
américaine, même si le prix de sa prestation est 20 % plus élevé que celui de son concurrent
étranger, alors que ce surprix était jusqu’ici limité à + 6 %.
Quel pourrait être l’effet d’une telle politique ? Une étude du Peterson Institute a estimé, avant même
le renforcement du texte en 2021, l’impact du Buy American Act sur l’économie américaine : les
résultats ne sont à vrai dire guère convaincants. Les auteurs relèvent tout d’abord que les achats des
administrations américaines, fédérales comme locales, sont d’un montant assez impressionnant : 1
809 milliards de dollars en 2017. Ce chiffre se compose de 1 674 milliards d’achats domestiques et de
136 milliards d’importations.
En second lieu, les auteurs montrent qu’en l’absence du Buy American Act, le niveau des
importations aurait été supérieur de 68 milliards. En troisième lieu, l’étude montre que cette politique
conduit à augmenter le prix d’achat des administrations de 5,6 %, ce qui s’est traduit par une facture
supplémentaire de 94 milliards de dollars. On pourrait se rassurer en se disant que ce surcoût payé par
l’administration – et in fine par le contribuable — a permis en contrepartie de sauver des emplois aux
Etats-Unis ; c’est d’ailleurs l’argument mis en avant par Donald Trump puis Joe Biden. Selon l’étude
du Peterson Institute, 358 360 emplois auraient été sauvés, notamment dans le secteur du bâtiment.
Une simple règle de trois permet alors de savoir combien coûte chaque année le fait de sauver un
emploi avec cet instrument : il suffit de diviser 94 milliards par 358 360. Cela fait un coût annuel de
250 000 dollars par emploi sauvé.
Autant dire que le « Buy American Act » a les mêmes effets qu’une politique protectionniste
classique : il équivaut en réalité à imposer un droit de douane, qui fait monter les prix et sauve
des emplois à un coût élevé pour le contribuable américain. Le renforcer risque d’amplifier ce coût
demain.

Emmanuel Combe est professeur à Skema business school et vice-président de l’Autorité de la


concurrence
Sujet n° 4 : Le commerce international est-
il un échange de différences ? (Oral ESCP)
Introduction : “Là où tout est semblable, il est inutile de rien échanger. L’échange ne peut
s’expliquer que par une différence quelconque. “ (B. Lassudrie-Duchêne, “La demande de différence et
l'échange international”, Économie et Sociétés, Cahiers de l'ISEA, 1971)

C’est l’économiste qui a le plus considéré cette théorie, il pense que la différence elle-même est un
produit. Au début année 70, stade dans lequel la société de consommation est mature. Donc les
consommateurs ont un besoin de différenciation. Il se place du côté de la demande, c’est elle qui
stimule l’échange, et plus précisément la demande de différentiation. Lui aurai répondu OUI, mais la
citation laisse entendre qu’elle ne vient pas seulement des différences. Pour lui si tous les produits
étaient les mêmes il n’y aurai pas d’intérêts pour le consommateur d’aller acheter ailleurs.

Problématique : Comment l’échange de différences se manifeste-t-il dans les principales théories du


commerce international ?

I. Un échange direct dans le cadre du commerce intrabranche (pp 164-166)

Les économistes ont même créé un indicateur au milieu des années 70’, avec Grubel et Lloyd, qui
permet de mesurer ce commerce.

I = 1 – [(Xi - Mi) / (Xi + Mi)] avec Xi et Mi qui sont les importations et les exportations de
produits.

Avec important commerce intra-branche  1


Avec important commerce inter-branches  0 Ex : modèle de Ricardo

1. De la “demande domestique représentative” à la “demande de différence”

- Du marché intérieur aux exportations

Linder, pour lui les exportations sont le prolongement du marché intérieur [Y + M = (C + I) + X].
Possible parallèle avec le cycle de vie du produit. Qui sera repris par Vernon qui a formalisé le fait
que les entreprises en avance avaient tout intérêt à valoriser ses produits sous formes d’IDE, à un
certain moment spécifique.

- Une nécessaire différenciation

Car sans différenciation, les entreprises ne pourront plus exporter du fait que sur le territoire, il
existera déjà une entreprise qui produirai déjà ce produit. C’est pour cela que pour un commerce
international, il est donc nécessaire qu’il y ait une différentiation.
2. Un commerce dominant entre pays développés

Théorie de Ngale.
- Un “goût pour la diversité”

Citation de Krugman, Ex entre Général Motors qui va vouloir se diversifier pour toucher toutes les
strates de la population et Ford qui a poursuivi son modèle unique.

- Des économies d’échelle

Krugman fait donc référence à l’économie d’échelle, et reprend modèle de Chamberlain avec le
modèle de concurrence monopolistique, qui ne prend pas en compte le marché international. Et donc
pour Krugman cela entraine des possibilités d’échange international.

II. Un échange indirect dans la théorie des dotations factorielles (pp 162-164)

Explication néoclassique, dotations factorielles établie par Heckscher, Ohlin, Samuelson.


= quantité des facteurs de production présents dans un pays (travail, capital, terre). L’abondance dans
l’un de ces facteurs justifie la spécialisation d’un pays.

1. Un échange de dotations

- Le théorème Heckscher-Ohlin

Le modèle d’Heckscher-Ohlin vise à expliquer la présence d’échanges internationaux par les


différences de dotations en facteurs de production (capital et travail) de chaque pays.
Chaque pays doit valoriser leur abondance en facteurs de production en se spécialisant
dans la production pour laquelle il possède une meilleure dotation en facteurs (capital,
travail, ressources...).

Solow a ajouté à ce théorème l’idée de dotation en capital naturel.

- Une explication de la DIT traditionnelle

Modèle qui explique largement la DIT traditionnelle : pays sous développé exporte des matières
premières et les pays développés exportes produits transformés.
Donc on peut caractériser la DIT comme une DIT inter-sectoriel.
2. Une substitution à l’immobilité des facteurs de production

- Un capital naturel immobile

Une des hypothèses de la théorie du modèle des dotations factorielle. Elle était déjà présente dans la
théorie de Ricardo. Donc mobilité des marchandises se substitue à une mobilité des facteurs qui n’est
pas prise en compte. C’est ce que Olin déclare, « un échange de facteurs rares contre des facteurs
abondants », exemple entre Australie et Angleterre.
Limite du capital naturel qui est immobile, c’est d’ailleurs l’unique. Il n’y a que le capital foncier
que l’on ne peut pas exporter, on ne pourra exporter que le produit de ce capital.

- Des facteurs travail et capital plus ou moins mobiles

Si on prend on compte facteur travail et capital l’hypothèse est beaucoup moins crédible. Le plus
mobile dans le temps est le facteur capital qui est plus probable. Qui se caractérise par des IDE. Donc
les états peuvent donc freiner les sorties et entrées de capital. On parle donc de migration du capital.
Ce plus les différences de culture peuvent influencer l’immigration (ex : l’Allemagne, avec une
volonté d’intégration linguistique).

III. Un échange implicite dans la théorie des avantages comparatifs (pp 158-162)

1. Une loi de l'avantage absolu inopérante

- Une comparaison qui reste d'actualité

Compare couts d’importation et exportation et si le prix importation plus faibles, il ne faut pas avoir
de scrupule à avoir recours aux importations. Il aborde également le terme de valeur travail.

- Une impasse théorique

Mais il y a une impossibilité d’établir des critères de base d’une DIT. Il s’intéresse à la DT mais
seulement du point de vue manufacturière, et non pas International.

2. Une réponse par les avantages comparatifs

- Des avantages relatifs (Ricardo).

Dans son modèle fictif, l’Angleterre n’a que des désavantages absolus, malgré cela, l’Angleterre a
tout de même à se spécialiser, s’intégrer à ce qui ressemble à une DIT. Un désavantage absolu peut se
transformer en avantage relatif. Ils vont faire le choix de production dans le secteur ou le désavantage
absolue est le plus faible, c’est-à-dire le drap. Ce désavantage s’illustre par le nombre de travailleur
exploité pour réaliser une même quantité de production. Par conséquent, il est question de la
productivité, (qui n’est pas le vocabulaire employé par Ricardo). Si la productivité des deux pays était
la même les deux pays n’aurai pas intérêt à entrer dans la DIT. Donc il y a une DIT, seulement parce
qu’il y a des écarts de productivité. Le but étant qu’avec cette DIT, les deux pays connaissent un
surplus. Donc au sein du même territoire, il va y avoir une mobilité du facteur travail. Cette notion de
DIT tient uniquement avec la notion de terme de l’échange.
- Une application au commerce RU-EU

Longue Exemple :
Etude de l’après 2 G-M Concerne commerce entre Etats-Unis et Royaume-Uni, reprend étude que
Krugman cite dans son livre. Il considère que les avantages relatifs (la théorie de Ricardo) sont les
éléments déterminants dans le commerce inter-branche.
D’un coté on a les USA, qui sorte renforcer de la 2 G-M. C’est le prolongement d’une tendance qui
remonte à la fin du 19 siècle.
De l’autre, l’Angleterre, a connu une perte de leadership, avec une perte d’avantage.
Cette opposition va être marqué par une productivité nettement supérieure aux USA. C’est que va
vérifier Obstfeld produit par produit. Donc Les USA ne vont avoir que des avantages absolus. Et donc
l’Angleterre ne va avoir que des désavantages absolus, mais ce n’est pas ce qui va les empêcher de
s’investir dans le DIT et donc d’exporter.

Conclusion : Oui ! comme la déclaré Lassudrie-Duchêne, de manière quasi systématique. Ces


échanges de ne se situe pas au même niveau, parfois la différenciation se situe au niveau de la
demande et on prend surtout en compte les échanges entre pays développé, car ces dans eux qu’il y a
le plus de préférence pour la diversité, que la consommation offre la panelle de produit la plus large
(question qualitative). Parfois la différenciation se fait sur les conditions de productions, donc sur les
conditions d’offres, c’est le cas dans le modèle de Ricardo. Donc on retrouve deux schémas qui sont
complémentaire pour expliquer le commerce international.
Sujet n° 5 : Régionalisme et
multilatéralisme (Oral HEC)
Introduction : Régionalismes et multilatéralismes (p 191)

Régionalisme insiste davantage sur la dimension institutionnelle. La typologie de Balassa ressence


différents niveau intégration régional. Le premier niveau d’intégration c’est la zone de libre-échange
(vise à supprimer le droit de douane au sein d’une région). Ex l’ALENA est une zone de libre-
échange entre USA Canada et Mexique. Deuxième niveau d’intégration est l’union douanière
(question de droit de douane en plus à la périphérie de la zone). Donc partage même politique
douanière quelque soit le pays avec lequel il échange. Ex : le Solverain. Troisième niveau
d’intégration c’est l’étape du marché commun (libre circulation des biens, des services, des capitaux,
et du capital travail). But éliminer obstacle non-tarifaire. Ex : U-E. Quatrième stade, une union
économique, qui partage les mêmes politiques économiques. Ex : U-E (la PAC). Enfin, l’union
monétaire, monnaie partagée au sein d’une même région. Ex : la zone euro.

Jean-Marc Siroën  travaux sur le régionalisme


Régionalisme fédérateur aboutissement ultime, se caractériserai par une Europe fédérale.
Régionalisme minimaliste.

Il distingue 2 formes de multilatéralisme :


-universaliste peut s’appliquer à un plus grand nombre.
-coopératif plus pragmatique

Problématique : Le régionalisme est-il une entrave au multilatéralisme ?

I. Un régionalisme potentiellement problématique…

1. Une profusion des ACR (pp 204-206)

Cette profusion des ACR (accords commerciaux régionaux) remonte à la fin du 20 siècle, avec
augmentation accords régionaux. Mais limite de la portée de ces accords.

- Un effet domino

Baldwin  Régionalisme génère régionalisme


Ex : L’ALENA, était un accord à l’initiative des USA, et réalisé avec le Mexique qui était de base
plutôt protectionniste. Il a réalisé cet accord par substitution aux importations. Le but des états unis
étant donc d’ouvrir un peu plus le pays, pour favoriser les intérêts de leurs entreprises car a cette
période 1980, les USA ont accumulé des déficits qu’ils vont essayer de combler.
Sauf que le Canada va se dire qu’il risquerait d’être pénaliser par cette accord, développement des
entreprises Mexicaines et américaines au dépend des entreprises canadiennes. Afin qu’elle puisse
bénéficier des mêmes avantages.
Seul 3 pays en 2012, ne participaient à aucun accord.
- Un “bol de spaghettis”

Bhagwati, économiste libre-échangiste, pense qu’on a intérêt à promouvoir le libre-échange, mais


plutôt à l’échelle multilatéral. Car le problème du régionalisme selon lui, est que si chaque pays en
moyenne est impliqué dan s13 accords, il y a une multiplication des cas spécifiques. Rendant alors le
système plus opaque. Et donc cette complexité peut nuire à la transparence des conditions, donc au
développement des échanges.

2. Une Union douanière ambivalente (pp 202-204)

Car à l’intérieur on favoris le libre-échange et à l’extérieur on applique des mesures protectionnisme.


Jacob Viner

- Une destruction de flux commerciaux

Par le fait qu’une entreprise national peut retrouver de la compétitivité uniquement grâce a ce prix de
TEC (tarif extérieur commun). Par conséquent en dépit de pays extérieurs et donc également du
consommateur.
Parallèlement, parce qu’il y a une zone de libre-échange, il y a la création de nouveau flux au sein de
cette zone régionale. En favorisant les échanges entre les pays de la zone.
Donc de par l’ambivalence, on créer des flux mais on en détruit aussi. Se pose la question du ratio
entre la création et la destruction. Celle-ci dépend de la TEC.
Ex : la CE, les pays on créer une zone douanière, mais la TEC n’était pas haut car la CE était parti
prenant du GATT.

- Un “nouveau protectionnisme” ? (JM Jeanneney, 1978)

S’applique souvent au frontière de l’état nation, donc le protectionnisme pouvait être attribué comme
nouveau car il s’appliquait au frontière de la région.
Peur de l’émergence des 4 dragons qui avaient comme volonté de se développer sur les marchés
extérieurs = croissance extravertie.

Pour une argumentation en faveur d’un renforcement de la politique commerciale européenne, cf Face au
retour du bilatéralisme, l’Europe doit renforcer sa politique commerciale, Emmanuel Combe et Antoine
Michon, l’Opinion, 11 décembre 2019

Compare politique américaine à la politique européen en prenant 3 fois plus de mesures pour la
défense commerciales, qui vise à compenser ce que les partenaires s’imposent aux USA. Le handicap
est que l’U-E n’est pas un état fédéral. Donc laisse place à des arbitrages entre les états. Donc certains
pays vont plus valoriser le protectionnisme, quant à d’autre, qui seront plus libre-échangiste.
L’Europe reproche à la Chine de pratiquer du dumping, il va y avoir une négation de l’Europe pour
connaitre les pénalités de la Chine. Donc la Chine à alors négocié avec l’Allemagne, pays qui importe
beaucoup de produit de Chine. En échange davantage de la Chine, l’Allemagne consentait à négocier
pour accorder à la Chine une peine moins forte.
II. … mais un régionalisme compatible avec un multilatéralisme “coopératif”...

1. Un équilibre de second rang

- Des zones de libre-échange tolérées par les institutions multilatérales


(p 204)
- Un préalable à l’intégration dans la mondialisation

Ex : le Gatt accepte que les pays passent des accords régionaux. La seule condition était de les en
informer. Donc pour les créateurs de GATT, le régionalisme n’était donc pas contraire à une structure
multiculturalisme. C’est la raison pour laquelle le régionalisme peut être perçu comme préalable pour
mieux s’intégrer au multilatéralisme.
C’est le cas de l’Afrique, qui pourrai donc appliquer dans un premier temps du régionalisme,
permettant aux entreprises de pouvoir réaliser des économies d’échelles dû à l’élargissement du
marché. Et donc par la suite de devenir plus compétitives.

2. La CEE, puis l'Union Européenne, acteurs essentiels dans le fonctionnement des


institutions multilatérales
- La CEE, acteur central des NCM dans le cadre du GATT (pp 196-200)

En 1947 – 1994, La CEE à été un acteur central dans la carde de la signature d’un accord multilatéral.
Don cil y avait des représentant de la CEE, est non pas de chaque pays, la CEE est donc un
intermédiaire dans les négociations. Qui lors de sa création était seulement 6.
NCM = cycles de négociations, lancés à l’initiative des USA. Ils vont considérer très vite l’Europe
comme un partenaire privilégié. Le premier cycle est lancé des 1947, en négociants sur la diminution
du protectionnisme tarifaire (droit de douane). En passant de 40% à près de 5% actuellement. Ce qui
signifie que le TEC est donc très faible. Le dernier cycle de négociation commence en 1986, nommé
Uruguay et s’achève à la fin du fonctionnement du GATT. Le dossier le plus discuté durant cette
phase est l’agriculture, car jusque-là ce secteur était à l’écart des négociations, car on pensait qu’il
fallait le préserver. La raison est la caractéristique première de marché des matières premières, elle est
très volatile. Ces mesures ont permis éviter la baisse des prix, et donc des revenus. Elle s’illustre par
la PAC qui est apparue en 1962. Le point de départ provient des pays ayant une agriculture non
protectionniste de leur agriculteur. Donc pour cela ils vont réguler les prix en établissant des taxes à
l’entré. Mais également des aides avec des subventions à l’exportations.

- L’UE, acteur majeur de l’ORD (pp 200-201)

On parle maintenant d’Union Européen depuis 1990s, depuis la création d’une monnaie commune.
ORD = organe de règlement des différends. L’un des principaux mécanismes mis en place par
l’OMC. (« composante judiciaire de l’OMC »).
Lors d’une pratique commerciale non loyale, les pays peuvent déposer une plainte. Tout d’abord, un
accord est cherché. Si un accord n’est pas trouvé, on emploie trois espères durant 15 mois pour dire
leur verdique. Mais à la fin si la procédure est en la défaveur du pays accusé, il peut faire appel.
Or l’UE est aujourd’hui à la hauteur des USA face au nombre de plainte (20%).
Ex : le bœuf aux hormones des USA, face à l’Europe et leur dépôt de plainte.
III. … et un impact relatif

1. Une régionalisation sans régionalisme (pp 207-208)

- Des taux d’intégration significatifs ?

Ratio entre % intrarégionaux et ensemble des échanges des pays de la région.


Ex : UE taux de 60%.
Ex : ALENA moins évoluer que UE dont 50% inférieur.
Ex : ACAN taux de 25% logique car zone de libre échange très tardive.
Ex : le Mercosur 12% or cette zone est une union douanière. Comprend Argentine, Brésil, Uruguay.
Ces pays avaient une tradition protectionniste.
Il n’y a pas forcément un lien entre régionalisme et régionalisation.

- Un “modèle de gravitation”

Inspiration de la science physique. Tinbergen a établi ce modèle de gravitation, qui est comparable à
la science. C a/b = c . Ya * Yb / D a/b
Avec c = constante ; D = distance ; Y = niveau de vie ; a,b = deux pays

Pa nécessairement besoin d’institution régional pour privilégier des échanges avec des pays proches
au dépend d’échanges avec des pays lointain.

2. Une réponse possible aux limites du multilatéralisme

Conférence ministérielle qui concerne tous les pays membres de l’OMC, qui a lieu tous les ans. Ces
conférences ont des résultats décevants car la politique est l’unanimité. Donc arrive jamais à un
accord.

- Une implication de l’Union européenne : l’exemple du CETA

= accord entre UE est Canada.


Négociations prennent du temps début négociations en 2009 et négociations se termine en 2016.
Avant que l’accord se conclue, il y avait déjà une proximité entre les deux régions. Pour le Canada,
l’UE était déjà le deuxième pays partenaire des USA.
Caractérise par annulation des droits de douane, entente sur les normes de produits, accès au marché
public, développement des opportunités d’investissement. (Accord de nouvelle génération).
Elément de fixions, sur la possibilité pour les FMN de mettre en cause les états. De base on voulait
faciliter ces types de procédure. Qui a été enlevé par la suite.
Également par rapport à l’agriculture, avec Canada qui est plus laxiste sur les produits agricoles.

Projet d’accord entre Mercosur et UE, remonte à mais idée bloque avec tentative ressente de relance,
mais difficile avec l’Argentine.

- Un “plurilatéralisme sans régionalisme”

C’est un accord entre plusieurs pays, c’est donc un régionalisme modulable, qui peut donc évoluer
avec le temps. Donc accord sans institution.
Pour une analyse du plurilatéralisme, cf “L’OMC face au défi du plurilatéralisme”, Michel Dupuy,
The Conversation - 1er mai 2022

Conclusion : On peut dire qu’historiquement, ça ne l’a pas était, même si potentiellement, le


fait de créer des institutions avec nombre limité de pays, peut laisser penser que les autres
pays seront laisé. Le régionalisme a diminué car le multilatéralisme a progressé.
Le régionalisme peut être une solution de secours quand le multilatéralisme est confronté à
des limites. Rejoins le triangle des incompatibilités de Rodrick.
Face au retour du bilatéralisme, l’Europe doit renforcer sa politique commerciale.

Emmanuel Combe et Antoine Michon viennent de publier à la Fondation pour l’Innovation Politique (Fondapol)
une étude en trois volumes sur L’Europe face aux nationalismes économiques américain et chinois. Les propos
exprimés dans ce texte rédigé pour l’Opinion n’engagent en rien les institutions auxquelles les auteurs
appartiennent.

Au cours des dix dernières années, la contribution européenne à la valeur ajoutée industrielle mondiale a chuté
de 27 % à 19 %, tandis que le nombre d’entreprises européennes parmi les 500 plus importantes du monde
passait de 171 à 122. Dans le même temps, de nouveaux géants ont émergé aux Etats-Unis et en Chine dans le
numérique, les transports ou l’électronique grand public. Si la nécessité de trouver une explication à ce
décrochage européen semble faire consensus, les solutions à apporter font quant à elles l’objet de vifs débats.
À l’occasion de l’affaire Alstom/Siemens en février, tous les regards et critiques se sont tournés vers la politique
européenne de contrôle des concentrations : trop stricte, elle empêcherait l’émergence de « champions
européens » capables de conquérir les marchés mondiaux. Qu’en est-il réellement ? Rappelons tout d’abord que
le maintien d’une forte intensité concurrentielle sur le marché intérieur conditionne souvent la performance à
l’exportation. En effet, une entreprise en concurrence sur son propre marché est incitée à être efficace et
innovante en permanence. Sa productivité augmente alors au même rythme que sa capacité à se différencier de
ses compétiteurs étrangers sur les marchés internationaux. A contrario, autoriser des fusions dans le seul but de
créer des géants et en réduisant la concurrence sur le marché domestique risquerait d’entraîner une baisse des
investissements en R&D et in fine de la compétitivité. La concurrence interne n’est nullement l’ennemi de la
compétitivité externe.
De plus, un examen des données disponibles montre que le contrôle des concentrations en Europe n’est pas
aussi sévère qu’on le pense. Tout d’abord, le nombre de fusions-acquisitions notifiées à la Commission
européenne n’a cessé de progresser, pour atteindre un rythme de croissance annuelle moyen de +8,5 % ces cinq
dernières années. Ces opérations ont permis la formation de géants européens dans de nombreux secteurs, à
l’instar de l’énergie avec l’acquisition du britannique British Gas par le néerlandais Royal Dutch Shell, de
l’industrie brassicole avec l’acquisition du britannique SABMiller par le belge Anheuser-Busch InBev ou
encore des verres optiques avec la fusion entre le français Essilor et l’italien Luxottica.
Ajoutons que l’indulgence supposée des autorités américaines en matière de contrôle des concentrations n’est
pas corroborée par les statistiques. Alors que seules trois concentrations ont été interdites par la Commission
européenne au cours de la période 2014-2018, les administrations américaines ont tenté d’en faire annuler dans
le même temps vingt-deux devant les tribunaux compétents.

Seuils de notification.
Le contrôle européen des concentrations est-il pour autant exempt de toute amélioration ? Les exemples récents
d’acquisitions dans le secteur numérique n’ayant pas fait l’objet d’un examen à Bruxelles, à l’instar de l’achat
d’Instagram par Facebook, invitent à ajuster les seuils de notification. Dans une note publiée récemment par la
Fondation pour l’innovation politique, nous proposons d’octroyer un droit d’auto-saisine à la Commission
européenne sur la totalité des transactions comme cela se pratique déjà outre-Atlantique, de façon à ce qu’en
principe plus aucune ne puisse passer sous son radar. Nous suggérons également de mieux prendre en compte
les gains d’efficacité dans les concentrations, en complétant les lignes directrices existantes. Enfin, le principe
de la défense commerciale n’a malheureusement jamais fait consensus parmi les Etats membres. Les pays du
nord, de tradition libérale, voient d’un mauvais œil ces instruments qu’ils considèrent volontiers comme du
protectionnisme déguisé.
Pour autant, ce constat sur la politique de contrôle des concentrations n’enlève rien à l’acuité du problème initial
: comment protéger l’industrie européenne de pratiques anticoncurrentielles étrangères déloyales ? Pour
répondre à ce défi, l’Union européenne dispose déjà de dispositifs de défense commerciale, parfaitement
compatibles avec les règles de l’OMC. Ils permettent de corriger des situations avérées de concurrence déloyale
en taxant les importations en provenance d’entreprises étrangères pratiquant du dumping ou bénéficiant de
subventions ciblées dans leur pays d’origine.
Si ces instruments ont été récemment modernisés, leur utilisation en Europe demeure timorée comparativement
aux usages qu’en font certains de nos partenaires commerciaux. Les Etats-Unis, par exemple, se démarquent de
l’Union européenne par un recours nettement plus marqué à ces moyens de défense. Contrairement à l’idée
reçue, cette plus grande fermeté de l’administration américaine ne date pas de l’élection du président Trump.
Avant même son investiture, le nombre de mesures de défense commerciale en vigueur aux Etats-Unis était trois
fois plus important qu’en Europe, pour un volume d’importations en provenance du reste du monde à peine
supérieur.
Comment expliquer une telle différence ? Tout d’abord, l’administration européenne en charge des enquêtes sur
ces pratiques de concurrence déloyale dispose de trois à quatre fois moins de ressources que son homologue
américain. Nous proposons donc de renforcer significativement les moyens alloués à la défense commerciale.
En outre, le principe de la défense commerciale n’a malheureusement jamais fait consensus parmi les Etats
membres. Les pays du nord, de tradition libérale, voient d’un mauvais œil ces instruments qu’ils considèrent
volontiers comme du protectionnisme déguisé. Au contraire, les pays du sud, plus interventionnistes, ont parfois
tendance à qualifier de « déloyale » toute forme de concurrence étrangère (en particulier venant de pays
émergents). Ces divergences idéologiques ont un impact important, dans la mesure où les Etats membres
doivent valider toute entrée en vigueur de mesures de défense commerciale par un vote à majorité qualifiée au
sein du Conseil. Le pouvoir qu’ils ont de s’opposer à l’instauration d’un instrument constitue selon nous une
faiblesse institutionnelle importante.
L’exemple du cas de 2013 sur le dumping chinois dans l’industrie photovoltaïque en atteste : en menaçant
successivement les principaux Etats membres de l’Union de représailles, Pékin est parvenu à obtenir un accord
qui a été jugé nettement plus favorable à ce qui aurait dû prévaloir si les règles habituelles avaient été
appliquées. Nous proposons d’accorder à la Commission une totale indépendance en matière de défense
commerciale, afin de ne plus prêter le flanc à ce type de stratégie consistant à diviser pour mieux régner.
Enfin, l’Union européenne a « sur-transposé » les règles multilatérales de l’OMC relatives aux instruments de
défense commerciale, en y ajoutant des conditions additionnelles à vérifier avant d’instaurer une mesure. Les
autorités bruxelloises doivent notamment s’assurer que tout instrument de défense commerciale est dans «
l’intérêt de l’Union », c’est-à-dire qu’il ne pénalise pas plus les consommateurs qu’il ne bénéficie aux
producteurs européens. Nous proposons de supprimer cette condition pour montrer à nos partenaires
commerciaux notre volonté d’appliquer les mêmes règles qu’eux.
Un tel renforcement de la défense commerciale européenne nous semble d’autant plus réaliste qu’il s’inscrirait
dans le cadre des règles actuelles de l’OMC. Cela n’empêcherait pas par ailleurs l’Europe de continuer à œuvrer
en faveur d’une ambitieuse réforme du système multilatéral, afin que l’OMC puisse redevenir le lieu privilégié
de règlement des différends entre partenaires commerciaux. Mais dans l’attente, l’Europe ne doit pas oublier de
défendre au mieux ses propres intérêts.

Emmanuel Combe est professeur à Skema Business School. Antoine Michon est polytechnicien et ingénieur des
Mines.
L’OMC face au défi du plurilatéralisme

Michel Dupuy
Professeur d'économie internationale, Université de Bordeaux
The Conversation - 1er mai 2022

L’accord signé en décembre dernier par 67 des 164 pays membres de l’Organisation mondiale
du commerce (OMC) a fait la joie de João Aguiar Machado, représentant permanent de l’Union
européenne auprès de l’organisme. La conclusion des négociations est venue comme une
respiration pour un organisme qui n’était pas parvenu à un résultat significatif depuis 2013. Le
texte vise à simplifier les procédures administratives et réglementaires relatives aux échanges de
services, qui représentent aujourd’hui plus de 20 % du commerce mondial.
Une respiration, car l’OMC traverse aujourd’hui une crise profonde, incapable de conclure le cycle de
Doha, ouvert en 2001, et de réguler le commerce mondial. Celle qui a pris le relais du General
agreement on tariffs and trade (Gatt) au 1 er janvier 1995 ne semble également plus en mesure de
remplir sa fonction de règlement des conflits commerciaux. Les États-Unis, en particulier, se sont
opposés au renouvellement des juges d’appel de son Organe de règlement des différends.
De nombreux observateurs voient l’avenir de l’OMC dans le développement du
plurilatéralisme. Par accord plurilatéral, on désigne un traité signé entre un nombre limité de
pays en vue de libéraliser les échanges dans un secteur en particulier. Cette libéralisation peut
se faire « à géométrie variable », étant donné que disparaît le besoin d’un consensus entre un
panel très large de pays comme c’est le cas à l’OMC. La généralisation de ces accords mettrait
également fin au principe de l’engagement unique, en vertu duquel aucun thème de négociation ne
peut faire l’objet d’un accord séparé. C’est l’adage « rien n’est conclu tant que tout n’est pas conclu ».
Les accords plurilatéraux en vigueur reconnus par l’OMC sont à ce jour au nombre de quatre.
Les deux premiers sont entrés en vigueur au début des années 1980, à la suite du Tokyo round.
Ils concernent le commerce des aéronefs civils et l’octroi de marché publics et unissent
respectivement 33 et 48 parties. Le troisième, signé à l’origine par 29 participants de la
Conférence ministérielle de l’OMC qui s’est tenue à Singapour en décembre 1996, porte sur les
technologies de l’information. Outre la signature de l’accord de décembre dernier, des
négociations plurilatérales sont en cours sur le commerce électronique (86 pays participants),
les biens environnementaux (46 pays participants), les services (50 pays participants) et la
participation des Micro, petites et moyennes entreprises (MPME) au commerce international
(91 pays participants).
Avec la multiplication des accords plurilatéraux, l’OMC deviendrait alors un « club de clubs »,
selon l’expression de Robert Z. Lawrence, professeur à Harvard et ancien conseiller
économique du président Clinton. Cette dynamique de « petits pas » semble cependant conduire
à une libéralisation globale des échanges autant qu’elle risque, au contraire, de déboucher sur
une nouvelle fragmentation du multilatéralisme. Plusieurs arguments plaident en fait pour
chacune des deux thèses.

Préparer le terrain au multilatéralisme


La première thèse est celle du « plurilatéralisme ouvert » ou « plurilatéralisme inclusif ». Les
accords plurilatéraux conclus dans le cadre de l’OMC ont, par définition, une vocation
multilatérale : tout membre de l’OMC non-signataire d’un accord plurilatéral existant pourra y
adhérer par la suite.
Par effet domino, un nombre croissant de pays ont donc adhéré aux différents accords
plurilatéraux existants. Ainsi, l’Accord sur les Marchés Publics et surtout l’Accord sur les
Technologies de l’Information ont exercé un effet d’attraction sur les pays tiers. Le second,
signé au départ par 29 pays, comprend aujourd’hui 82 pays réalisant 97 % du commerce des
produits des technologies de l’information.
Pareil accord peut, à titre expérimental, préparer le terrain au multilatéralisme. Il permet en effet de
mesurer l’intérêt des pays membres de l’OMC pour un sujet que l’on envisage de mettre à l’ordre du
jour de l’agenda. La « multilatéralisation » des accords plurilatéraux se trouve d’ailleurs facilitée
lorsque la clause de la nation la plus favorisée est incorporée. Dans ce cas, les pays tiers ou non
membres bénéficient en effet des avantages qui sont accordés aux pays membres.

Logique d’exclusion
Il y a cependant un revers à la médaille. La multiplication des accords plurilatéraux présente
également des risques pour le multilatéralisme. Comme nous le soulignions dans une recherche
récente, le danger principal est celui d’une fragmentation du système commercial mondial.
Coexisteraient en effet deux types de pays, les « insiders », c’est-à-dire les pays membres des
accords plurilatéraux, et les « outsiders », ceux qui en seraient exclus. Parmi ces derniers,
devraient figurer la plupart des pays les moins développés. Dans les premières expériences
d’accords, il apparaît déjà que les sujets des négociations sont choisis par les pays ayant un
poids important dans le commerce mondial. Les services, le commerce des produits des
technologies de l’information, ou les marchés publics sont des sujets d’un grand intérêt pour ces
pays mais qui restent peu pertinents pour la très grande majorité des pays les moins développés.
Les pays en développement les plus pauvres ne souhaitent d’ailleurs pas adhérer à l’accord sur
les technologies de l’information, de crainte que leurs entreprises du secteur ne soient
rapidement éliminées par la concurrence d’entreprises étrangères plus compétitives.
Autre symbole de cette logique d’exclusion, aucune proposition de négociation commerciale
plurilatérale ne porte, à ce jour, sur les produits agricoles. Il s’agit pourtant là d’un secteur
dans lequel bon nombre de pays en développement sont très compétitifs.
On pourrait objecter à l’argument selon lequel les accords plurilatéraux visent à marginaliser les pays
les moins développés que ces derniers pays auront tout loisir d’y adhérer quand leurs économies se
seront développées. Soulignons cependant qu’il est difficile de rejoindre après coup un accord
commercial déjà négocié, car il devient alors difficile de faire prévaloir ses intérêts.

Éviter le « bol de spaghettis »


Une règle émergente tend également à dire qu’un accord plurilatéral ne peut être «
multilatéralisé » que si une « masse critique » de pays en est partie prenante. Cette masse
critique permet de se prémunir du risque de comportement de passager clandestin de la part
des principaux acteurs.
Cela favorise la marginalisation et l’exclusion des pays les moins développés. En effet, en raison
de leur faible poids dans les échanges mondiaux, ces pays ne sont pas en mesure de constituer de
masse critique et sont donc exclus a priori des négociations en vue de conclure des accords
plurilatéraux à vocation multilatérale.
En résumé, face à la crise de l’OMC et au risque de démantèlement du système multilatéral actuel, le
cadre de négociation plurilatéral constitue une étape intermédiaire pouvant conduire à terme à un
multilatéralisme consolidé et renforcé. Ce but ne peut cependant être atteint que si les pays en
viennent à s’accorder sur un certains nombres de principes.
Les accords plurilatéraux semblent devoir être ouverts à tous les membres, y compris, et surtout, aux
pays les moins développés. Ceux-ci doivent faire l’objet d’une attention particulière, participer aux
négociations et pouvoir adhérer aux accords existants lorsqu’ils le souhaitent.
Par ailleurs, une coordination doit être établie entre les différents accords plurilatéraux afin
d’éviter tout chevauchement pouvant déboucher sur l’adoption de règles divergentes sur des
questions proches, voire identiques. On parle de « bol de spaghetti de règles ». Une place doit, pour
cela, être réservée pour des études d’impacts ex ante et des évaluations ex post des accords
plurilatéraux.
Il paraît, enfin, important que les négociations soient menées de manière transparente. Le succès de la
dynamique plurilatérale en cours semble dépendre dans une large mesure de l’adoption et du respect
de ces principes.
Sujet n° 7 : Du GATT à l’OMC :
continuités et ruptures. (Oral ESCP)
Introduction : De l’OIC au GATT ( p 196)

Problématique : Dans quelle mesure l’OMC a-t-elle permis de faire progresser le libre échange par
rapport au GATT ?

I. Une continuité idéologique et historique

1. Une continuité idéologique

- Un jeu “gagnant-gagnant” (pp 158-159)


- Un “multilatéralisme coopératif” (p 191)

2. Une continuité historique

- Une extension géographique continue (p 197, p 200)


- Une reprise des dossiers du GATT (pp 197-200)

II. Des ruptures institutionnelles

1. Des conférences ministérielles régulières pour des pays devenus membres

- Des cycles de négociation inspirés par les Etats-Unis au sein du GATT


(p 197)
- Un rééquilibrage du pouvoir en faveur des pays émergents (p 200)

2. Une régulation encadrée des procédures judiciaires (pp 200-201)

- Des plaintes ainsi-dumping au sein du GATT


- Une mise en place de l’ORD

III. Des ruptures paradoxales

1. Une organisation en crise

- Un consensus problématique (p 201)


- Des dysfonctionnements dans l’ORD (pp 201-202

2. Une relance du multilatéralisme ?

- De multiples défis
Pour un exposé des différents dossiers, cf “OMC : ces dossiers qui attendent Ngozi Okonjo-Iweala”, Le Point
Afrique - Publié le 18/02/2021, et
- Un bilan de la dernière conférence
Pour un point sur l'avancement des différents dossiers, cf “Entre pêche et Covid, l'OMC adopte à l'arrachée
un paquet de mesures "sans précédent"”, L’Express - le 17/06/2022
OMC : ces dossiers qui attendent Ngozi Okonjo-Iweala

DÉFIS. Dans une économie mondiale ravagée par le Covid-19 et marquée par la montée des réflexes
protectionnistes, la nouvelle directrice générale aura fort à faire.

Par Le Point Afrique - Publié le 18/02/2021

Première femme à être nommée à la tête de l'Organisation mondiale du commerce, Ngozi Okonjo-
Iweala va devoir remettre de l'ordre dans un chantier presque à l'arrêt du fait des coups de boutoir qu'a
assénés à l'OMC l'ex-président Trump avec ses multiples initiatives contre les organismes
internationaux symboles du multilatéralisme. La Nigériane devra en effet vite relancer une OMC
paralysée dans un contexte rendu difficile par les assauts de la pandémie du Covid-19 et les ravages
insidieux d'un protectionnisme rampant sur fond de guerre commerciale entre les États-Unis, la Chine,
l'Europe et des pays émergents ou producteurs de matières premières en difficulté. Voici les défis qui
l'attendent :

- Relancer l'OMC
Ngozi Okonjo-Iweala espère apporter un nouveau souffle à une organisation affaiblie qui doit renouer
avec l'objectif d'améliorer les niveaux de vie des populations et favoriser l'accès des pays pauvres aux
vaccins contre le Covid-19. « Je pense que l'OMC est trop importante pour être ralentie, paralysée et
moribonde », estime-t-elle dans un entretien à l'AFP mardi, ajoutant : « Ce n'est pas juste. »
Ses objectifs immédiats : faire en sorte que les vaccins soient produits et distribués dans le monde
entier, pas seulement dans les pays riches, mais aussi résister à la tendance au protectionnisme qui
s'est amplifiée avec la pandémie, afin que le libre-échange puisse contribuer à la reprise économique.
Ngozi Okonjo-Iweala prend la tête d'une institution torpillée, on ne le répétera jamais assez, par
l'administration de Donald Trump, qui était ouvertement hostile à l'organisation et avait même
bloqué le fonctionnement de l'organe de règlement des différends. En plein cœur de la tempête,
son prédécesseur Roberto Azevedo avait démissionné un an avant la fin de son mandat. Donald
Trump avait mis l'année dernière son veto à la nomination de Ngozi Okonjo-Iweala à la tête de
l'OMC. C'est le nouveau président américain Joe Biden qui a débloqué la situation en
annonçant son soutien appuyé à la candidature de la Nigériane.

- Tenir la conférence ministérielle


La conférence ministérielle, organe de décision suprême de l'OMC, se réunit une fois tous les
deux ans, habituellement en fin d'année. Cette réunion est d'autant plus importante que de
nombreuses capitales l'utilisent comme date butoir pour faire avancer les négociations
commerciales. Après la conférence ministérielle de décembre 2017 en Argentine, la suivante
aurait dû avoir lieu, en raison des conditions hivernales rigoureuses, en juin 2020 au
Kazakhstan. Mais le Covid-19 a forcé à repousser l'échéance sine die. Ngozi Okonjo-Iweala
plaide pour une réunion avant fin 2021, mais ce sont les membres de l'OMC qui devront en décider,
par consensus, sans doute les 1er et 2 mars.

- Redonner du souffle au multilatéralisme


Diplomates et experts s'accordent à dire que l'OMC s'avère être depuis des années impuissante
à relancer des négociations d'envergure. Pourtant, les thèmes ne manquent pas. Certaines
discussions (coton, subventions à la pêche) piétinent, tandis que celles sur des thématiques plus
actuelles, comme les négociations sur le commerce électronique lancées en janvier 2019 au
niveau plurilatéral, peinent à décoller, risquant de placer l'OMC en décalage avec son temps.
Ngozi Okonjo-Iweala a elle évoqué la thématique de l'environnement et fait de l'accord sur les
subventions à la pêche – pour l'heure au point mort – une de ses priorités immédiates pour montrer
que l'OMC peut encore produire des avancées multilatérales. Son prédécesseur, Roberto Azevedo, a
également assisté, impuissant, aux hostilités commerciales entre les États-Unis, la Chine et
l'Union européenne. Les États-Unis et l'UE pressent d'ailleurs l'OMC de réviser le statut de la
Chine, qui selon Washington usurpe son statut de pays en développement pour en tirer un
avantage économique. Certains espèrent que la dimension plus politique de la nouvelle directrice
générale va aider à réinjecter de la confiance dans le système entre les partenaires. « Elle peut
contribuer à renforcer le multilatéralisme en utilisant son influence, mais, en fin de compte, les
solutions doivent venir des membres », commente auprès de l'AFP Peter Ungphakorn, ancien membre
du personnel du secrétariat de l'OMC.

- Remettre sur pied la cour d'appel de l'OMC


Roberto Azevedo n'a pas réussi non plus à empêcher les États-Unis de tordre le bras juridique
de l'OMC. L'organe d'appel du gendarme du commerce mondial, dont la nomination des juges
a été bloquée par Washington, n'est plus opérationnel depuis décembre 2019 faute de magistrats
en nombre suffisant. La nouvelle cheffe de l'OMC entend trouver un accord à ce sujet avant la
prochaine ministérielle. Les critiques américaines à l'égard de la cour d'appel ne sont pas
nouvelles, l'administration de l'ex-président américain Barack Obama (2009-2017) ayant déjà
bloqué la nomination de juges. Elles se sont accentuées depuis l'arrivée de Donald Trump, qui
l'a accusé d'outrepasser ses pouvoirs en émettant des jugements, qui, selon Washington, violent
la souveraineté nationale.
« Identifier les problèmes de l'OMC avec le président Trump a été une erreur courante. Il serait tout
aussi faux de croire que si le président Biden vient à débloquer la sélection des nouveaux membres de
l'organe d'appel, cela rétablira la confiance dans l'ensemble actuel des règles commerciales de l'OMC
», indique à l'AFP Hector Torres, ancien conseiller juridique du secrétariat de l'organe d'appel.

- Régler la question des droits de propriété autour du Covid-19


La pandémie a mis à nu les désaccords au sein de l'OMC, dont les membres sont divisés à
propos d'une exemption des droits de propriété intellectuelle sur les traitements et vaccins anti-
Covid, une proposition déposée par l'Inde et l'Afrique du Sud et soutenue par une centaine de
pays. Ngozi Okonjo-Iweala entend régler cette question au plus vite. Elle envisage plus généralement
que l'OMC fasse entendre sa voix dans la lutte contre la pandémie de Covid-19, en soutenant
notamment le dispositif international Covax mis en place par l'OMS et Gavi pour distribuer des
vaccins, en particulier dans les pays défavorisés. Forte de son expérience au sein de Gavi et de la
Banque mondiale, elle souhaite également œuvrer pour que les pays en développement produisent
davantage de vaccins anti-Covid sur leurs territoires, afin de pallier la pénurie.

- Faciliter l'accès au vaccin pour les pays pauvres


La nouvelle directrice générale de l'OMC a promis de donner un nouveau souffle à l'OMC qui, selon
elle, s'est éloignée de son objectif d'aider à améliorer les conditions de vie des populations. À
commencer par la distribution des vaccins contre le Covid-19 : « Je pense que l'OMC peut contribuer
davantage à la résolution de la pandémie de Covid-19 en aidant à améliorer l'accès des pays pauvres
aux vaccins », a-t-elle déclaré. « Il est vraiment dans l'intérêt de chaque pays de voir tout le monde se
faire vacciner », a-t-elle ajouté.
Certains pays, à l'instar de l'Inde et de l'Afrique du Sud, demandent une exemption des droits de
propriété intellectuelle sur les vaccins anti-Covid pour les rendre plus accessibles et permettre un
déploiement plus rapide. Mais la Dr Ngozi Okonjo-Iweala veut éviter une querelle entre les membres
de l'OMC, et aborde le problème sous un autre angle.
« Au lieu de passer du temps à discuter, nous devrions regarder ce que fait le secteur privé » avec des
accords de licence, pour permettre la production de vaccins dans plusieurs pays, a-t-elle souligné,
citant le cas du laboratoire britannique AstraZeneca en Inde. « Le secteur privé a déjà cherché une
solution parce qu'il veut faire partie de la solution pour aider les pays pauvres et les gens défavorisés
», a-t-elle déclaré, ajoutant qu'il faudrait aussi contrer la tendance aux restrictions sur les exportations
des équipements médicaux et faire attention à ne pas perturber les chaînes d'approvisionnement en
voulant miser essentiellement sur la production à l'échelle locale.

- Améliorer le niveau de vie dans les pays pauvres


Pour Ngozi Okonjo-Iweala, l'OMC doit s'atteler à son but premier, celui « d'améliorer les niveaux de
vie » dans les pays pauvres, de « créer des emplois décents pour les gens ». Et « le commerce a
certainement un rôle à jouer dans la reprise » économique après la crise du Covid-19. Avant la
pandémie déjà, l'organisation s'était éloignée de son objectif, a-t-elle regretté, citant l'exemple de
négociations-fleuves sur les subventions à la pêche, qui durent depuis vingt ans. « Cela ne peut plus
durer. Nous devons conclure. On ne peut pas se permettre d'échouer sur ce dossier », a indiqué la
nouvelle responsable. La pandémie de Covid-19 a empêché l'OMC, déjà en crise, d'honorer la
date limite de fin 2020 dictée par l'ONU pour conclure un accord sur l'interdiction des
subventions à la pêche qui contribuent à la surpêche. En cause selon Ngozi Okonjo-Iweala, les
négociateurs, qui sont le « talon d'Achille » de l'OMC : « Genève regorge d'experts en
négociation, mais les problèmes n'ont pas été résolus, ils se sont aggravés « , car » pour eux, il
s'agit de gagner ou de ne pas perdre et donc ils se bloquent mutuellement ».
« L'OMC a besoin de renouveau pour changer les choses », juge-t-elle, balayant les critiques la visant
pour son manque d'expérience en matière commerciale. « Vous avez besoin de solides compétences
politiques, vous avez besoin de la capacité de manœuvrer », se défend-elle, ajoutant que ses 25 ans
d'expérience à la Banque mondiale pouvaient lui servir à créer un pont entre les pays développés et
ceux en développement. Elle le sait, son travail sera difficile et ingrat. Et elle se dit d'autant plus
motivée à en montrer les résultats pour qu'à l'avenir, personne ne puisse remettre en question le fait de
placer une femme à ce poste.
Entre pêche et Covid, l'OMC adopte à l'arrachée un paquet de mesures "sans
précédent"

Genève - Les 164 États membres de l'OMC ont réussi à s'accorder sur un paquet de mesures allant de
la suppression de subventions à la pêche, à la levée temporaire des brevets sur les vaccins anti-Covid,
en passant par l'insécurité alimentaire, un résultat "sans précédent" arraché après cinq jours d'intenses
négociations.

L’Express - le 17/06/2022

C'est "un ensemble de résultats sans précédent. Il y a longtemps que l'OMC n'avait pas obtenu un
nombre aussi important de résultats multilatéraux. Les résultats démontrent que l'OMC est capable de
répondre aux urgences de notre époque", a déclaré la directrice de l'OMC Ngozi Okonjo-Iweala,
devant les chefs de délégation.
La conférence avait pour ambition non seulement de s'attaquer à l'insécurité alimentaire créée par la
Russie, mais aussi supprimer des subventions qui facilitent la pêche illégale et vident les océans, lever
temporairement les brevets qui protègent les vaccins anti-Covid ou encore réformer l'OMC elle-
même.
Mais lorsque la réunion a débuté dimanche, l'espoir de conclure sur tous ces sujets était mince, tant les
divergences entre délégations restaient importantes. Mme Ngozi elle-même a rappelé qu'elle plaçait la
barre du succès à l'adoption d'un ou deux textes.
La ministérielle a duré pratiquement 36 heures de plus que prévu. C'est finalement aux alentours de
03H00 GMT que le marteau qui marque l'adoption formelle des textes a été abattu.
Valdis Dombrovskis, commissaire européen chargé du commerce, a salué "un résultant important et
de portée mondiale", mais "les profondes divergences ici confirment que l'organisation a besoin d'être
réformée en profondeur".
Katherine Tai, son homologue américaine, a préféré souligner "la rapidité" de l'OMC dans le dossier
des vaccins.

- Insécurité alimentaire -
Le texte sur l'insécurité alimentaire était très attendu, bien qu'il ne s'agisse que d'une déclaration
ministérielle.
La guerre menée par les Russes prive le monde de céréales et d'engrais, fait flamber les prix et
menace de faim des millions de gens dans le monde.
Le document adopté souligne l'importance "de ne pas imposer de prohibitions ou de restrictions à
l'exportation" qui soient contraires aux règles de l'OMC. Il demande que toutes mesures d'urgence
introduites pour répondre à des préoccupations en matière de sécurité alimentaire, comme un gel des
exportations, "soient temporaires, ciblées et transparentes", et soient notifiées à l'OMC.
Un second texte protège les achats de nourriture du Programme alimentaire mondial de restrictions
qui pourraient être imposées par certains pays.

- Pêche miraculeuse -
Jusqu'à la dernière minute, l'accord sur la pêche est resté incertain, et même si le texte est édulcoré par
rapport aux ambitions initiales, Mme Ngozi n'a pas moins revendiqué un succès.
C'était l'un des sujets phare de cette ministérielle. Les négociations sur le sujet ont été lancées il y a
plus de 20 ans et s'inscrivent dans les objectifs du développement durable de l'ONU. Il s'agit en
particulier d'interdire certaines formes de subventions qui peuvent encourager les prélèvements
illégaux.
Pour aider les pays en développement, l'OMC veut mettre en place un fonds permettant d'apporter une
assistance technique et aider leurs pêcheurs à se tourner vers une pêche plus durable.
Le texte a été critiqué par plusieurs ONG qui estiment qu'il se trompe de cible.

- Propriété intellectuelle -
Après deux ans et demi de lutte contre la pandémie de Covid-19 les États membres ont réussi à
s'accorder sur la facilitation du commerce des biens médicaux nécessaires à la lutte contre les
pandémies. Un sujet d'importance pour éviter que le commerce des ingrédients et matériels ne soit
restreint au moment où on en a le plus besoin.
La levée temporaire des brevets protégeant les vaccins anti-Covid destinés aux pays en
développement a également été adopté. Ce sujet a fait l'objet d'âpres batailles entre le lobby
pharmaceutique, des pays en développement et de nombreuses ONG. L'idée est de faciliter la
production de sérums.
"Ce fut un long combat mais c'est fait", a lâché Mme Ngozi en conférence de presse.
Médecin sans frontières estime que "ce texte échoue à garantir aux gens un véritable accès aux
matériels médicaux dont ils ont besoin, il ne lève pas les brevets de façon adéquate et il ne concerne
pas tous les pays".
Les États membres ont aussi reconduit le moratoire sur les transactions électroniques, malgré les
réticences de l'Inde et de l'Afrique du sud, qui regrettent de voir une potentielle manne douanière de
ces échanges leur échapper.
Les cinq jours de négociations intenses ont été marqués par l'intransigeance indienne sur plusieurs
dossiers, y compris sur les subventions qui contribuent à la surpêche.
Le ministre indien du Commerce, Piyush Goyal, présenté comme l'empêcheur de tourner en rond par
de nombreuses délégations, a soutenu que son pays "ne fait pas obstacle à quoi que ce soit" mais est
un "bâtisseur de consensus".

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