Chapitre 2 

: Du mercantilisme aux physiocrates

I/ L’ère du mercantilisme : l’accumulation de métaux précieux
1. Contexte historique
Fin du 15e siècle : l’économie va redémarrer. Cette expansion éco° est accompagnée d’une expansion
géographique et politique avec notamment la découverte des Amériques  exploration des côtes
africaines et ouverture d’une route maritime entre l’Inde et l’Europe

Tout cela va transformer radicalement l’économie mondiale avec, en plus, l’arrivée massive d’or et
d’argent (métaux précieux) en Europe qui est issue de l’exploitation des mines d’Amérique latine

Une partie de ces métaux précieux sera transformé en bijoux et objets de luxe mais l’essentiel sera
converti en monnaie  premiers phénomènes d’inflation, très forte flambée des prix

Entre 1450 et 1550 la masse monétaire en circulation en Europe a été multipliée par 8

Période où les monarchies vont octroyer (=accorder) des monopoles à certaines compagnies (la +
connue : compagnie des Indes qui dépendait de l’Angleterre)

 Tout cela a donné naissance à de grosses corporations marchandes

D’un pdv politique, les monarchies veulent renforcer leur économie nationale, cela va se faire de 2
manières :

- D’abord elles vont investir dans des manufactures (=industries) et contrôler les métiers qui
y sont associés
- Puis les monarchies vont chercher à solidifier leurs finances publiques par des innovations
fiscales. Les monarques de cette époque cherchent à renforcer leur autorité au dépend des
institutions démocratiques. La gestion de l’économie va donc finalement relever des affaires
du roi (Cardinal de Richelieu : ministre sous Louis XIII + Jean-Baptiste Colbert : contrôleur
général des finances sous Louis XIV : les 2 ont favorisé une intervention étatique dans
l’économie aussi bien par le biais de politiques protectionnistes que par l’investissement
dans des manufactures)

La politique protectionniste et l’investissement dans des manufactures sont les 2 éléments centraux
de la pensée mercantiliste

D’un pdv spirituel, on a l’avènement (=arrivée) de la vie privée, ce qui va changer bcp de chose d’un
pdv économique

Dans l’Antiquité, le citoyen vivait pour la cité ; au MA, le sujet vivait pour Dieu ; et pendant la période
de la Renaissance, c’était leur vie pour lui.
Sur cette période, la religion chrétienne est à l’origine d’un certain nombre de guerres et notamment
la guerre de 30 ans qui va déchirer l’Europe et qui va faire qu’il y a une évolution des mentalités.

2. La doctrine mercantiliste
Personne mercantile : personne qui recherche le profit, l’argent

Le terme mercantile est issu du courant du mercantilisme qui prend naissance au 15 e et 16e siècle

A la base, ce n’est pas un terme péjoratif car la racine du mot est associée au terme « marchand » en
latin.
(Revoir vidéo mercantilisme)

- L’économie ne peux connaître la croissance que si la quantité de monnaie en circulation

s’accroît
- L’accroissement de monnaie est une condition nécessaire à l’accroissement des richesses
- Les risques de l’accroissement de la monnaie en circulation sont l’inflation et la dépréciation
de la monnaie
- D’après les mercantilistes, les moyens d’accroître le stock de monnaie sont : les colonies, les
guerres et les indemnités de défaite, le commerce international, des excédents commerciaux

Un des moyens d’obtenir un excédent commercial est de réduire les importations par des droits de
douanes ou en pratiquant des politiques de contingentement qui sont des politiques de
protectionnisme

L'un des moyens d’accroître le stock de monnaie passe par le développement des manufactures dont
la production est orientée vers l’exportation. Ces établissements sont soit privés soit publics mais en
tout état de cause sont encadrés par l’Etat qui en suit la production et en surveille la qualité pour
être sûr que les biens trouveront preneurs.

Le mercantilisme renvoie finalement à un jeu à somme nulle (car gagnants + perdants)

3. Les différents types de mercantilisme à l’aune du mercantilisme moderne

 Le mercantilisme espagnole (le + ancien, le + basique)

Ce mercantilisme porte un nom particulier : le bullionisme (bullion en anglais = lingot)

 Accumuler le maximum d’or ; pour se faire, pillage de l’or dans les colonies (surtout incas et
mayas)

 Le mercantilisme anglais (le + économique)

Il prend le nom de commercialisme

 Idée d’accumulation d’or mais se concentre sur les excédents commerciaux

Pour cela, il faut adopter une politique protectionniste

 Le mercantilisme français

Qu’on appelle le colbertisme

 On retrouve l’idée qu’il faut des excédents commerciaux et donc pour cela, il faut soutenir
l’activité industrielle

Colbert va mep un certain nombre de manufactures royales (ex : manufacture des gobelins)

Associé à cette idée de manufacture il y a aussi l’idée d’interventionnisme qui va créer les conditions
de développement d’une production à grande échelle

4. Les principaux représentants du mercantilisme

Les Français :

- Jean Bodin : développe la théorie quantitative de monnaie, qui survient en mm temps que le
mercantilisme et qui met en évidence les limites de l’accumulation des métaux précieux
 - Barthélémy de Laffemas : développe les équilibres commerciaux à l’international et tout ce
qui est balance économique  il faut promouvoir exportations et limiter importations

- Antoine de Montchrestien : c’est à lui qu’on doit le terme d’éco° politique avec son ouvrage
« Traité d’éco° politique ». Cet ouvrage est divisé en 4 parties, il traite donc 4 sujets : les
manufactures, le commerce, la navigation commerciale et le « soin du prince » (=richesse du
royaume). L’idée principale de son ouvrage est d’enrichir l’Etat par le développement
industriel. Il va théoriser tout ce qui est relatif aux politiques protectionnistes. Il prônait aussi
le libre échange pour les denrées produites en quantités plus que suffisantes.

Les Anglais :

- Thomas Mun : homme d’affaires qui va devenir le directeur de la compagnie des Indes
orientales  il va pouvoir pénétrer au cœur du fonctionnement du mercantilisme à
l’anglaise ; ce qui va lui permettre de le théoriser
Il va faire des recommandations au près du pouvoir :
 Recommande à la pop° la frugalité (=simplicité) et un comportement austère
(=sévère) pour réduire les importations
 Augmenter les droits de douane pour garantir à l’Etat des ressources et réduire les
importations
 Créer un secteur exportateur qui serait au besoin géré par l’Etat
 Subventionner les exportations pour maintenir la compétitivité de l’économie

- Josiah Child : défend la mep de monopole publics et privés de manière à favoriser la

compétitivité nationale
Théorise l’idée de jeu à somme nulle du mercantilisme car il dit qu’il y a des gagnants, mais
que ces gagnants provoquent des perdants
Il pointe du doigt la principale limite du mercantilisme : toutes les économies ne peuvent pas
s’enrichir avec ce système ; à la fin, ce système conduit à une concurrence exacerbée, à des
guerres commerciales et à des pressions permanentes à la baisse sur les salaires (améliorer la
compétitivité en baissant coûts de prod°  baisse des salaires)

- William Petty : montre les limites du mercantilisme

Il dit qu’il ne faut pas toujours chercher à limiter les importations notamment dans les
domaines où l’économie n’est pas compétitive

Les limites du mercantilisme

Limite de nature logique : Tous les pays ne peuvent pas avoir une balance excédentaire, la recherche
d’une telle cible provoquerait des affrontements commerciaux

Limite de nature institutionnelle : L’acteur central du mercantilisme est l’Etat, à la fois pour sa mise
en œuvre, qu’au niveau des structures productives. Finalement le système devient paradoxal,
puisque l’origine du terme mercantilisme vient du terme « marchand », il n’est plus ici question de
marchands ou de commerçants mais bien d’Etat et de fonctionnaires.

Limite de nature monétaire  : L’afflux des métaux précieux se traduit par de l’inflation avec un effet
ambivalent  d’une part elle va favoriser les vendeurs puisque les prix augmentent, ce qu’il leur
permet d’engranger + de profit mais seulement à CT (puisque l’inflation surenchérit le coût des MP et
donc les coûts de prod°) ; d’autre part, l’inflation rend les biens moins compétitifs ce qui a comme
conséquence une baisse de l’excédent commercial. Mais afin de maintenir cet excédent commercial
et donc la compétitivité, il faut réduire les salaires afin d’abaisser les coûts de prod°, ce qui porte
préjudice aux pop°

II/ la physiocratie
1. Contexte historique
Les physiocrates (courant principalement français) sont des penseurs en opposition au mercantilisme

Ce mouvement des physiocrates va prendre naissance dès les premiers signes de déclin de l’Espagne,
un déclin causé par l’épuisement des mines de métaux précieux en Amérique latine.
En parallèle, la France monte en puissance, principalement d’un pdv commercial grâce au
colbertisme qui se poursuit même après la mort de Colbert. Toutefois cette montée en puissance est
extrêmement fragile et se heurte à l’accomplissement de la pop°.  la pop° française souffre de
disette (pas assez de blé)  au final le niveau de vie ne s’est pas amélioré
C’est une période où la guerre est quasi permanente entre les états européens qui ont recours à
l’endettement pour financer ces guerres.

 Contexte mitigé

Physiocratie repose sur un fait particulier : même si les manufactures royales se sont développées,
l’économie repose avant tout sur l’agriculture. Cependant, l’agriculture française est beaucoup moins
productive que celle de l’Angleterre, notamment à cause de ses moyens archaïques (=dépassés).

Tout ce contexte va mener à des philosophes français à s’interroger sur la problématique de la terre
et du travail.
Revoir vidéo

2. Les précurseurs
a. Pierre Le Pesant de Boisguilbert
Pour Boisguilbert, les métaux précieux ne représentent pas la véritable richesse mais seulement un
instrument des échanges. Ce qui est important pour lui, c’est avant tout la prod°

Il va dénoncer le fait que l’Etat ne peut pas résoudre tous les problèmes éco° et qu’au contraire, il a
tendance à étouffer la prod° en multipliant les règlements et en imposant des impôts sur le travail.

Boisguilbert a une représentation particulière de la société, il distingue 2 groupes :

- Les producteurs qu’il va hiérarchiser par ordre d’utilité : les prods les + utiles sont les
paysans, les - utiles les comédiens
- Les parasites qui concernent le roi, la cour du roi, les hauts fonctionnaires et les membres du
clergé

Il recommande 2 mesures pour accroître les richesses et le bien-être :

- Créer un impôt sur le revenu payé par tous, que cela soit par le 1 er ou le 2e groupe
Il va aller plus loin en disant que les parasites doivent contribuer de façon plus importante
- Favoriser la concurrence, en opposition au système des manufactures qui repose sur un
monopole

Boisguilbert est le premier économiste à parler d’atomicité du marché, pour lui cela est
économiquement souhaitable.
 b. Sébastien Le Prestre de Vauban
Architecte militaire mais après sa carrière militaire, il va s’intéresser aux questions éco° (finance
publique)

Son ouvrage « La Dîme royale » est très connu à l’époque (dîme= impôt prélevé sur les récoltes) 
Vauban va remettre en cause cette dîme

A travers cet ouvrage, il va énoncer un principe plutôt moderne que l’on connait aujourd’hui sous le
nom de « loi de Laffer » (« trop d’impôt, tue l’impôt »). Il explique qu’il existe un niveau optimal
d’imposition puisqu’un impôt trop faible handicape l’Etat mais un impôt trop fort handicape
l’économie  idée révolutionnaire à l’époque (idée qui deviendra commune à partir du 20 e siècle
avec Laffer)

On retrouve aussi l’idée que tout le monde doit contribuer à l’impôt même les plus riches + idée d’un
impôt proportionnel au revenu

Il va aller plus loin en préconisant un impôt moral (=impôt sur l’achat de perruques)

c. Richard de Cantillon
Son ouvrage principal « Essai sur la nature du commerce en général » aborde un certain nombre de
thèmes éco°.

Importance accordée à la terre et au travail de cette terre chez les physiocrates

Autre élément relatif à la notion d’entrepreneur : c’est à Cantillon que l’on doit la vision moderne de
l’entrepreneur, il nous dit que l’entrepreneur est animé par l’esprit du risque, l’entrepreneur invente
un monde où se créé la croissance parce qu’il ose. L’entrepreneur est un agent qui investit malgré
qu’il n’ait pas la pleine certitude de trouver des débouchés  vision dynamique de l’entrepreneur, il
ne s’enferme pas dans une routine ni dans l’immobilisme social

Cantillon aborde aussi la notion de prix : il dit que le prix des objets devrait tendre vers leur valeur
intrinsèque qui est donnée à proportion de la terre et du travail qui entrent dans leur prod°. Il dit que
tous les prix peuvent se mesurer en surface cultivée

Cantillon va chercher à préciser le niveau d’augmentation des prix et cela va donner naissance en
économie à « l’effet Cantillon » L’accroissement de monnaie en circulation augmente les prix de
façon non homothétique : il observe que l’augmentation des prix ne se fait pas de manière uniforme
mais en vagues :

(1)Augmentation des prix dans le secteur de l’armement  (2)Augmentation des prix des
fournisseurs de bois  (3)Paysans touchés car ils ont besoin de planches et de clous : augmentation
des prix des produits agricoles (4)Augmentation des prix dans secteur armement  spirale

Avec cette idée que la structure de prix est continuellement déformée au profit de ceux qui sont le
plus proche de la source monétaire (banques) et au détriment de ceux qui en sont éloignés

La richesse des premiers augmente quand celle des derniers régresse apparition de l’effet Cantillon

3. François Quesnay et les principes fondateurs de la physiocratie

Pierre Samuel du Pont de Nemours : invente le terme « physiocratie » (en 1758 avec publication de
son tableau éco°) qui, étymologiquement, veut dire « gouvernement de la nature »  pas anodin
quand on voit le thème d’étude des physiocrates

A la base, la physiocratie est considérée comme une secte, ce n’est pas pris au sérieux ; mais peu à
peu elle va jouer un rôle fondateur dans l’élaboration de la science éco°

La physiocratie va s’achever à partir de Smith avec la publication de la Richesse des Nations (1776)

Quesnay était barbier (=chirurgien) du Roi Louis XV  Cela va l’inspirer pour ses développements
éco°  idée de circulation sanguine l’inspire pour théoriser la circulation des biens dans l’économie

Sa méthode pour étudier l’économie en 4 phases :

1. Analyse de la réalité éco° qui conduit à l’énoncé d’une théorie
2. Vérification expérimentale de la théorie
3. Enoncé d’un ensemble de recommandations propres à résoudre le pb exposé dans la théorie
pour faire en sorte qu’elle soit tjrs vérifiée en tout tps et en tout lieu
4. Exposé scientifique auprès du grand public à travers des livres articles, revues ; afin de
provoquer la volonté d’agir des décideurs et l’adhésion des pop°

4 idées principales de la physiocratie :

- Celle relative à un ordre naturel dont la nature est la référence, Quesnay parle de l’idée que c’est
parce qu’il y a un ordre naturel qu’il y a des lois éco° qui seront ainsi énoncées et démontrées par les
physiocrates. Une des composantes centrales de cet ordre naturel est la propriété, « L’homme a dans
son caractère le besoin de posséder »

- Notion de produit net, c’est le travail de l’agriculture qui conduit à l’apparition de ce produit net (=
différence entre la valeur de la récolte et celui des coûts des semences initiales (graines) ainsi que
l’entretien pendant 1 an du paysan et de ses employés)

Dans l’analyse des physiocrates, la société se divise en 3 classes :

- Classe productive : renvoie aux paysans, c’est cette classe qui permet l’émergence du
produit net
- Classe stérile : renvoie aux commerçants, artisans, industriels, qui, soit transforment la
richesse (artisans) soit la transfère (commerçants)
- Classe des propriétaires : fait référence à la noblesse et à l’église et ce sont eux qui mettent
à disposition des paysans les outils de production

- Ce schéma sociétal va donner naissance à un « circuit économique » ce que Quesnay appelle « le
tableau éco° » qui implique donc les 3 classes sociales et qui vaut pour 1 année

Logique du tableau éco° : Différents flux entre les différentes classes sociales, représentés par des
flèches, le tableau vise à décrire comment le produit net se répartie dans l’économie

- Défense du libre-échange : c’est pourquoi on considère les physiocrates comme les premiers
libéraux ; il faut laisser passer au niveau du pays mais aussi à l’échelle mondiale. L’idée derrière est
que les paysans voudront augmenter leur prod° et être encore + productif s’ils disposent d’une
demande maximale.  Cette demande maximale ne peut être atteinte que par le libre échange

On est donc fondamentalement dans une vision de l’offre puisque le libre échange ne permet pas
tant une baisse des prix pour le consommateur mais au contraire une augmentation des débouchés
pour les producteurs et donc pour l’offre
Associé au libre-échange, ils soutiennent un certain nombre de mesures : notamment l’abolition des
droits de douane

Également, pour favoriser au maximum la production, ils veulent établir une fiscalité fondée sur la
propriété, de manière à inciter les propriétaires fonciers à ne pas laisser en jachère (=sans semences)
leurs terres. L’objectif : mettre un impôt sur les propriétaires fonciers qui devrait être fixé à 30% des
loyers perçus par les propriétaires fonciers auprès des paysans

Conclusion :

Avant que ne naisse la physiocratie, les penseurs ne s’étaient pas préoccupés d’analyser les
lois qui régissent le fonctionnement de l’économie, ils se contentaient juste d’observer quelques
phénomènes économiques ainsi que d’émettre leur jugement sur certains comportements
économiques.

On voit donc la science éco° naitre avec la physiocratie qui cherche à expliquer le fonctionnement
global de l’économie. La science éco° va ensuite prendre de l’ampleur quelque décennie plus tard
avec Smith qui était lui-même fortement influencé par les travaux scientifiques d’Isaac Newton

L’objectif était alors de trouver des lois universelles qui expliquent la circulation des richesses et
l’évolution éco°.