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DEVENIR JURISTE
Pour être plus simple et concret, on entend par droit : la faculté qu’on a
d’user d’une chose ; droit : c’est aussi l’ensemble des interdictions ; droit : ce
sont les rapports qui naissent entre des personnes dans une société/
personnes-personnes, groupe-personne, groupe-groupe, Etat-Etat ; droit :
c’est la possibilité d’obtenir des personnes l’exécution de certaines
prestations ; droit : c’est aussi la faculté des sciences juridiques…
En latin, on entend par INSTUTUERE créer quelque chose avec l’intention que
cette chose dure pendant longtemps. Le terme d’institution, relativement
récent dans le langage juridique, désigne des ensembles, regroupant le plus
souvent des personnes et des biens, qu’unissent des liens de nature diverses,
affectifs (la famille), rapports sociaux (corporations, métiers), intellectuels
(écoles, universités), charitables (hospices et hôpitaux) ou d’organisations
politico-sociales (tribunaux, municipalités, assemblées politiques). Donc
comme exemple d’INSTITUTIONS nous avons: le chef de village, le maire,
l’université, le pays ou l’Etat, ou les démembrements de l’Etat. Ceux sont des
personnes morales, immatérielles ; des personnes qu’on ne voit pas. Elles
durent plus longtemps que les personnes physiques, capables d’avoir des
biens, des droits. Ces Institutions deviennent des acteurs de droit.
A-t-on réfléchi à ce que serait l’homme s’il n’avait pas l’histoire ? On l’a défini
un « animal politique ; » il est, surtout, un « animal historique. »
Chercher le bien, fuir le mal, honorer ses parents, aimer son prochain, se
dévouer pour sa patrie, faire aux autres ce que l’on voudrait qui vous fût fait à
vous-même, ces préceptes sont nécessaires à l’existence de la société et à sa
durée. Elle périrait s’ils n’étaient pas appliqués par la grande majorité de ses
membres. Mais qui est-ce qui le dit et qui est-ce qui le prouve, si ce n’est
l’Histoire ? C’est elle qui fonde le pacte social sur le sacrifice. L’histoire est
une morale ; elle est la maîtresse des princes et des peuples, elle travaille
sans cesse à la distinction du bien et du mal ; elle passe au crible les actes des
hommes et sépare l’ivraie du bon grain. Elle juge. Elle est le tribunal où siège
la conscience des générations.
Dans l’histoire interne du droit, on trouve les règles elles-mêmes du droit, par
exemple les règles du droit de la famille, de la propriété, des successions, des
obligations. On les trouve dans leur enchaînement chronologique.
L’histoire externe au contraire, dit Leibnitz, ne touche pas au fond du droit, elle
se borne à ce qui l’entoure. Rivier, pour rendre cette idée sensible, comparait le
droit romain par exemple à un immense édifice, élevé grâce au labeur des
siècles. L’histoire interne ne pénètre pas à l’intérieur de cet édifice : elle se
contente de rechercher 1) comment l’édifice a été construit, avec quels
matériaux, à l’aide de quels architectes, c’est l’étude des sources du droit et de
la vie des jurisconsultes. 2) comment cet édifice a été appliqué ? 3) étant donné
que cet édifice est en ruines, c’est l’étude de tout ce qui nous reste de l’ancien
droit, l’ancien monument.
L’idée qu’il faudrait avoir toujours présente à l’esprit, dans toutes vos études
juridiques, c’est que le droit a un but pratique. Il n’est pas fait pour être
enseigné à l’université, pour les académies, le droit est fait pour la vie. C’est un
moyen pratique, imaginé en vue d’un but pratique. Si l’homme vivait seul, il
pouvait tout ce qu’il veut. Peut-être que la morale allait l’aider. Ainsi pas de
droit. La vie en société oblige alors afin de prévenir les conflits qui tendent à
faire naître les guerres entre les hommes. Pour que tous les hommes puissent
vivre ensemble, comme des civilisés, il faut agir d’une certaine manière, façon,
qu’ils observent telles règles de conduite. Ce sont ces mille manières d’agir,
nécessaires à l’accomplissement, aux fins de la vie, ce sont les buts du droit.
De quoi dépend le droit ? Déterminer les forces qui agissent sur lui et le
transforment ?
Comme tout ne se ramène pas au droit seul dans le monde, les savoirs
historiques permettent de développer l’intelligence et le sens critique. Grâce à
l’histoire, il y a toujours le double contexte de temps et de lieu qu’il faut
envisager en droit. C’est cette méthodologie dite historique qui nous servira
de fil d’Ariane dans la bonne progression de cet enseignement.
L’objet du cours d’histoire du droit et des institutions se resserre donc sur une
étude des institutions politiques et juridiques des sociétés antiques ou
anciennes. Il sera question de savoir comment ces sociétés ont élaboré leurs
systèmes politiques et juridiques ainsi que comment ces institutions ont
parcouru l’espace et le temps pour nous parvenir. Comment avons-nous hérité
de ces institutions juridiques et politiques…
La deuxième vertu de l’histoire du droit, elle révèle l’héritage dont notre droit
est porteur. Comme un organisme vivant, chaque droit a des marqueurs
génétiques qui le rendent à nul autre pareil. Tous les droits modernes, même
ceux dont les tendances paraissent révolutionnaires, sont nés de la
transformation des systèmes juridiques qui les ont précédés. Notre droit et nos
institutions portent l’empreint des siècles du droit et des institutions français.
Et, c’est une culture qui se transmet. Prendre la mesure de cette culture, dans
toute son épaisseur historique, prépare le juriste à affronter l’innovation avec
les armes solides. Aujourd’hui, plus que jamais, le juriste doit être prêt à
accompagner le changement.
L’histoire n’intéresse le juriste que dans la mesure où elle a laissé des traces
dans les règles juridiques contemporaines, contribuant par-là, aux systèmes
d’organisation juridique modernes.
C’est pourquoi l’on considère que toute analyse qui ne prend pas en compte
l’évolution historique n’est pas scientifique. L’histoire incarne en elle-même le
changement. Elle renvoie à une série d’évolutions complexes, qui ne peuvent
être analysées qu’au sein de quelques grandes périodes appelées à leur servir de
cadre.
1) Objet du cours
2) Plan du cours
I/ La période prédynastique
C’est la politique mise en place par un prince venu du sud Narmer ou Ménès,
considéré comme le premier roi humain de la 1ère dynastie qui a réussi à unifier
la Haute et la Basse-Égypte. Ce territoire étant à l’origine divisée en deux
entités politiques, le nord ou la haute Egypte comprenait 22 principautés et avait
une couronne blanche, le sud ou basse Egypte composée de 20 principautés et
avait une couronne rouge. Donc Narmer Ménés fut le premier pharaon
originaire du sud à avoir porté les deux couronnes blanche et rouge, symboles de
la monarchie unifiée, il fut appelé souverains des deux terres.
L’ancien empire est marqué par une unification politique et religieuse qui se
matérialise par un pouvoir central très fort et une divinité du pharaon
incontestable, ce qui lui donne un pouvoir absolu sur toute l’étendue du
territoire.
En effet, Narmer en tant que souverain de l’ancien empire a fondé une capitale
politique, Memphis, et une capitale religieuse, Héliopolis avec un clergé et une
divinité nationale sous les auspices du dieu Osiris, père d’Horus ancêtre de tous
les pharaons.
Avec la montée en puissance de l'administration centrale émerge une nouvelle
classe composée de scribes instruits et de fonctionnaires à qui le pharaon
accorde des propriétés en guise de paiement pour leurs services. A côté du
pouvoir central existait une administration locale avec à sa tête un nomarque
pour diriger les nomes.
Pendant cette période, les rois qui se sont succédés entreprirent d’importantes
conquêtes dans la région (Nubie, Libye, Sinai). De grands édifices furent
également construits. Les pyramides construites par Djéser, Khéops et leurs
descendants sont les symboles les plus mémorables de la civilisation égyptienne
et du pouvoir que détiennent les pharaons.
II/ Le moyen empire (2040 à 1780 avant J.C environ ; 11e à la 14e dynastie)
Après leur repli, les rois de Thèbes se retrouvent pris au piège entre les Hyksôs
au nord et leurs alliés nubiens, les Koushites, au sud. Cette domination étrangère
suscite une réaction thébaine et un sentiment d'identité chez les Egyptiens. Les
pharaons Séqénenrê Taâ II et Kamosé contestent le pouvoir des Hyksôs et
réussissent finalement à vaincre les Nubiens. Le successeur de Kamosé,
Ahmôsis Ier, écrasent les hyksos (à la bataille de Tanis vers 1560) et libère
définitivement l'Égypte. Le pays est réunifié.
III/ Le nouvel empire (1560 à 1070 avant J.C avant J.C environ ; 15e à la 20e
dynastie)
Il faut préciser avant tout qu’il existait en Egypte un appareil judiciaire mais
nous avons décidé de traiter uniquement de l’organisation politique et
administrative pour des raisons d’opportunité. En effet, l’organisation judiciaire
de l’Egypte est à l’image de son organisation politique et administrative. On
retrouve un juge suprême, qui en théorie est le seul investi du pouvoir de juger,
s’appuyant sur d’autres juges qui rendent la justice en son nom.
a) Légitimité du pharaon
b) Missions du pharaon
« L’Etat c'est moi », phrase attribuée à Louis XIV (13 avril 1655) ; en Egypte
également, le Pharaon est le pays à lui tout seul. II voit tout, entend tout, dirige
tout. En tant qu’incarnation de la divinité, il avait des pouvoirs très étendus dans
tous les domaines. Bien plus qu'un roi, le pharaon est à la fois l'administrateur
principal, le chef des armées, le premier magistrat et le prêtre suprême de
l'Égypte. La bonne gouvernance du royaume reposait exclusivement sur sa
personne. Le pharaon avait deux missions principales :
c) Destinée du pharaon
Les égyptiens ont cru à l’existence d’une autre vie après la mort. C’est pourquoi
ils établissent la distinction entre le ka et le ba.
Le pharaon qui avait reçu ordre des dieux de gouverner l’Egypte conformément
au principe de Maât. Il devait rendre compte de sa gouvernance. Ainsi, le
tribunal osirien, juge exclusif du pharaon et de sa gestion s’avère être l’instance
de la reddition des comptes. Il fonde les seules limites à l’absolutisme du
pouvoir pharaonique. Le tribunal osirien est composé de 42 juges. Ces derniers
ont pour missions d’interroger le pharaon sur sa gestion. Si le pharaon a bien
gouverné l’Egypte, son âme (le ba) est alors acceptée par les dieux et il
connaîtra une autre vie. Il rejoindra ses pairs et veillera à son tour sur le
royaume. Par contre, si le pharaon est coupable d’une mal gouvernance, il était
puni par l’exclusion de l’au-delà, ce qui empêchera son ba de se transformer en
divinité.
a) Le clergé
Ainsi dans les temples, nous ne voyons que le roi réaliser les rites, intercéder
auprès des dieux. Mais au quotidien les prêtres remplacent le roi dans les
temples. Ce dernier n’est physiquement présent que pour les grandes cérémonies
(les jubiles, fêtes sed).
Pour exercer son contrôle sur les terres et les ressources, le pharaon s'appuie sur
une administration composée de fonctionnaires et de scribes qui gère ses affaires
au quotidien. Cette administration est dirigée par son homme de confiance, le
vizir, qui agit comme représentant du roi et coordonne l'arpentage des terres, le
trésor, les projets de construction, le système juridique et les archives.
Notre attention ici sera focalisée sur deux points : d’une part les
institutions politiques et d’autre part, le droit romain.
Il nous faut ainsi exposer les différentes magistratures ainsi que les
prérogatives respectives dont elles disposaient.
Lorsque vers l’an 500 les rois étrusques furent chassés de Rome, les nobles ou
patriciens qui avaient été les instruments de leur chute se virent d’un jour à
l’autre maître du gouvernement. Mais aucun d’entre eux ne songea, ou ne réussit
à s’élever à la royauté. Peut-être est-ce à la suite d’une sorte de compromis entre
eux et le peuple qu’il fut décidé que deux d’entre eux, choisis par élection,
prendrait tour à tour le pouvoir. Ces deux magistrats, ce deux souverains qui
reçurent le nom de Conseillers, « Consuls » n’étaient élus que pour un an et
avaient des pouvoirs communs.
Il était procédé à leur élection au cours d’une assemblée des citoyens en état de
porter les armes, dans laquelle les patriciens avaient une forte majorité. Et
comme ils étaient seuls éligibles leur pouvoir était singulièrement autoritaire et
oppressif. La plèbe, celle des campagnes surtout et des tribus latines,
s’accommodaient mal d’un tel gouvernement. D’autre part, les patriciens ne
pouvaient songer à se maintenir au pouvoir sans le concours des paysans appelés
à devenir leurs soldats à l’occasion des guerres fréquentes qu’ils avaient à faire
ou à subir. Ils furent ainsi amenés à céder au peuple une part dans le
gouvernement en lui permettant d’élire en assemblée ses propres représentants
qu’on appela les tribuns. Ces « tribuns du peuple» avaient le droit de veto sur
tout acte du gouvernement, émanant-il des consuls. Tout citoyen pouvait en
appeler au tribun quand il se croyait injustement lésé par une décision consulaire
et en obtenir l’annulation, sauvé sa vie même s’il s’agissait d’une sentence de
mort. Ce pouvoir d’empêcher par leur veto la promulgation d’une loi qu’ils
jugeaient abusive ou injuste conféra aux tribuns une influence d’autant plus
grande que leur nombre fut augmenté à 10 à mesure que s’élargissait les
attributions des consuls.
Il manquait aux plébéiens un des droits publics les plus importants : la capacité
d’aspirer aux dignités de la République. Ils demandèrent l’accès au consulat. Ce
ne fut point sans résistance qu’ils l’obtinrent ; mais déjà eux et leurs tribuns
étaient redoutables : on craignait leurs séditions, on céda. Ici, qu’on remarque
une politique adroite des sénateurs : puis qu’il faut partager la puissance
consulaire, ils cherchent à l’affaiblir. Au lieu de deux magistrats, ils veulent
qu’on en choisisse trois ; au lieu de leur laisser le nom de consuls, ils les
nomment tribuns militaires. Il semble que le consulat n’est point sorti des rangs
patriciens : plutôt que de l’abandonner, on l’a éteint, ou, pour mieux dire, on l’a
assoupi.
Au début toutefois il semble bien que tout le poids des affaires publiques reposa
sur ces derniers. Ils commandaient l’armée en temps de guerre, ils
administraient seuls les fonds du trésor public et ils jugeaient en dernier ressort
en toute affaire litigieuse. Ce cumul rendait fort compliqué l’exercice de leur
charge. Quand ils s’absentaient de Rome pour se mettre à la tête de l’armée au
cours de guerres fréquentes et souvent longues, l’exercice de leur fonction
judiciaire était suspendu de facto ; et bien d’autres choses encore, à ne
mentionner que l’administration du trésor, requérait beaucoup plus de temps
qu’il ne pouvait leur en accorder : venir à bout de tout est au-dessus des forces
humaines.
Les Ediles se chargeaient sous l’inspection des tribus, de veiller à l’entretien des
routes et des ponts, à la conservation des temples et des amphithéâtres, de la
tranquillité et de la sûreté publique de la surveillance des marchés, notamment
de la fixation des prix et la qualité des denrées. L’édile avait pour ces affaires
relatives à ces objets, un tribunal et une juridiction. Il assurait
l’approvisionnaient la ville de Rome en blé. Mais ce qui devint le privilège le
plus recherché et la partie essentielle de leur magistrature, ce fut l’organisation
et la direction des jeux publics (les cirques, les pugilats, les luttes, les courses
de chevaux…). Les édiles que nous venons de décrire s’appelaient les édiles
plébéiens. A la même époque, deux magistrats patriciens furent créés, portant le
même nom, ayant des fonctions analogues, quoique supérieurs ; on les nomma
édiles majeurs, édiles curules.
Enfin, en temps de grave crise externe ou de danger public, l’exercice du
pouvoir suprême était remis entre les mains d’un citoyen connu pour ses hautes
vertus et qui recevaient le titre de Dictateur (le titre officiel du dictateur était
magister populi). Ce pouvoir suprême avait en principe, un caractère
temporaire, une durée limitée à six mois et à des circonstances données.
Une question se pose par rapport à cette magistrature romaine que nous
venons d’exposer ; de quels pouvoirs disposaient les magistrats ? Comment
la constitution romaine encadra-t-elle l’exercice de ces prérogatives ?
A- L’IMPERIUM
C- Les Auspices.
Lorsqu’elles eurent secoué l’hégémonie du Sénat les deux comices par centurie
et par tribu devinrent les véritables corps législatifs de l’Etat romain. En dernière
analyse des droits de vote égaux à ceux des patriciens furent attribués aux
plébéiens dans l’assemblée centuriate. La plèbe s’empressa alors de faire passer
une loi accordant aux assemblées les pleins pouvoirs législatifs et s’assura ainsi
une participation plus équitable aux divers privilèges conférés par l’Etat, en
particulier à la répartition des terres. L’accession de la plèbe aux charges
publiques couronnant l’édifice démocratique, et l’on vit élire des plébéiens non
seulement à la censure et à la questure, mais à la magistrature et au consulat ; on
en vit même siéger parmi les sénateurs. Cette accession de la plèbe au pouvoir
ne pouvait aller sans d’importants changements sociaux. Le citoyen romain
nourrissait un profond respect pour le gouvernement et ses agents : le consul ne
paraissait en public que précédé de XII licteurs portant la hach et les faisceaux,
insignes de sa charge, la hache symbolisant son droit de vie et de mort, les
verges réunies en faisceaux (d’où l’italien fascio) ses pouvoirs judiciaires.
D’autres groupes de licteurs accompagnaient les fonctionnaires de rang
inférieur. Au consul et aux hauts fonctionnaires dans l’exercice de leur fonction
était réservée la toge blanche bordée de pourpre. Il gardait le droit de la porter à
certains jours fastes après l’expiration de leur charge et ce droit fut tenu à grand
honneur dans certaines familles plébéiennes dont un ou plusieurs membres
s’étaient distingués au service de l’Etat. Lors des élections, le vote des électeurs
se portait de préférence sur les descendants des familles qui s’étaient illustrées
de cette manière. Une nouvelle noblesse se forma ainsi à côté des vielles
familles patriciennes.
Le Sénat Romain
Le Sénat dont le terme dérive de senex, signifiant vieillard, est un conseil formé
des chefs des grandes familles, les patres, et des anciens hauts magistrats.
Ils étaient désignés d’abord par les consuls ensuite par les censeurs. Dans le fait
sénat était composé de la plupart des anciens magistrats curules (consuls,
préteurs, édiles) et plus tard des édiles de la plèbe, des tribuns et des questeurs.
Le sénat était convoqué et présidé par un magistrat, consul, préteur ou tribun.
Parmi les attributions du sénat, il faut distinguer les monopoles des sénateurs
patriciens et les autres attributions générales. En effet, seuls les sénateurs
patriciens pouvaient exercer l’interregnum (en cas de vacance de magistrat
suprême) et disposaient de l’auctoritas patrum (un droit de ratification et de veto
sur certains actes politiques, en faisant valoir la volonté des dieux). Signalons
que le terme auctoritas a la même racine (aug-) que le verbe augere (accroître,
renforcer) ou que les substantifs augur, augurium (augure, interprétation des
signes, présage). Quant aux autres attributions importantes du sénat, on doit
mentionner son rôle en tant que gardien du culte de la cité , son pouvoir
d’autoriser les dépenses (pour la guerre et pour les travaux publics) son droit
d’administrer l’ager publicus (assignation de la terre conquise) et fixer les
tributum, le droit de décider des opérations militaires, la représentation de la cité
vis- à- vis des étrangers, son pouvoir de contrôler les magistrats (qui lui rendent
compte durant leur fonction et qui les jugent après), enfin son pouvoir de donner
des conseils qui deviendra au fil du temps un véritable pouvoir législatif sous
forme de senatus-consulte. C’est le Sénat, avec le peuple, mais avant lui
(senatus populusque Romanus) qui incarne la cité romaine la maiestas senatus
n’est pas moindre que celle du peuple.
SECTION II : LES SOURCES DU DROIT A ROME.
C’est aux romains que l’on doit la jolie métaphore de «sources » pour désigner
les modes de création des règles de droit. La source de la règle juridique est
toujours individualisée dans une activité humaine. Au II e siècle de notre ère, le
juriste Gaius en dresse l’inventaire : « les sources du droit, pour le peuple
romain, sont les lois, les plébiscites, les sénatus-consultes, les constitutions des
empereurs, les édits de ceux qui ont le droit d’émettre des édits, les réponses des
prudents ». Toutes ces sources ne sont pas apparues en même temps et
l’énumération de Gaius n’obéit pas à l’ordre chronologique dans lequel nous les
aborderons : lois (et plébiscites) (A), jurisprudence (B), édit du président (C),
sénatus consultes (D), constitutions impériales (E), A cet inventaire, nous
rajouterons la coutume dont Gaius ne parle pas (F).
A. La loi
La lex publica est votée par les citoyens assemblés en «comices», sur
proposition d’un magistrat dont elle portera ensuite le nom : c’est la lex rogata.
Mais lorsqu’un gouverneur de province prend une décision unilatérale qui a
valeur de loi, cette loi est appelée la lex data.
B. La « jurisprudence »
Dans son sens romain, la iuris prudentia ou jurisprudence ne désigne pas les
décisions des tribunaux, mais la science du droit. C’est par l’interprétation
qu’elle contribue à la création du droit. Nous reviendrons plus longuement sur la
place essentielle tenue par l’activité des juristes qui écrivent des commentaires
et délivrent des consultations. Ces consultations portent le nom de responsa.
Leur autorité dépend de la notoriété de leur auteur, et lorsque le responsum
provient d’un jurisconsulte réputé, il est régulièrement suivi. D’autant plus que
la gratuité de la consultation est le gage de son impartialité.
C. L’édit du péteur
A partir du IIe siècle avant J-C., l’édit du préteur est la source principale du droit
privé. Le préteur est à Rome le magistrat judiciaire, élu pour un an. A son entrée
en fonction, il publie un édit qui constitue en quelque sorte son programme
d’activité pour l’année à venir. Cet édit énumère les cas dans lesquels le
magistrat délivrera des moyens de procédure, c’est-à-dire des actions. Comme
en droit moderne, le droit romain distingue le droit de l’action. Mais en droit
moderne, le droit, défini par la loi, précède l’action qui n’est là que pour le faire
respecter. Il en va différemment du droit prétorien : le préteur peut délivrer des
actions dans un domaine où la loi ne s’est par prononcée. En ce cas, l’action
précède le droit parce que le préteur a décidé de prendre en compte une
situation. Le préteur ne promulgue pas des règles de fond, mais il délivre des
moyens de procédure : en fait, cela revient à créer du droit et cela permet de le
faire évoluer en sanctionnant des situations nouvelles. Il en va de même de nos
jours lorsque le juge administratif apprécie la recevabilité d’un recours (donc le
bien-fondé d’une procédure) dans un domaine où le requérant invoque son
intérêt à agir alors même qu’il n’existe aucun droit subjectif aisément
identifiable. Le juge administratif élabore la règle en même temps qu’il
l’applique au litige et, éventuellement, en sanctionne la violation. Ce n’est pas
un hasard si on dit du droit administratif moderne qu’il est un droit prétorien. A
Rome, le préteur annonce à l’avance quelles situations il protègera. Son édit est
un catalogue de toutes les actions qu’il propose. L’édit d’entrée en charge est
qualifié d’ « edictum perpetuum » (édit perpétuel) car il reste valable pendant
toute l’année (par opposition aux edicta repentina, édits motivés par des
circonstances imprévues). D’une année sur l’autre, même si un préteur reprend
l’essentiel de son prédécesseur, l’édit est révisé, amélioré, enrichi. C’est donc
une source du droit extrêmement souple, en prise directe et rapide avec les
nécessités pratiques.
Depuis le IIe siècle avant J.-C., l’édit du préteur est la source du droit la plus
féconde, constamment enrichie et renouvelée en fonction des besoins. Mais ce
dynamisme engendre une concurrence redoutable pour le Prince. En principe,
rien n’empêche l’édit de continuer à faire boule de neige après l’avènement de
l’Empire. Le Prince ne peut exercer d’emprise directe sur le préteur car celui-ci
n’est pas son subordonné. C’est compter sans l’habileté d’Auguste. Il s’ingénie à
tenir le préteur à l’écart du courant réformateur. Son hostilité larvée est telle que
les préteurs n’osent plus prendre d’initiative. Peu à peu, l’édit cesse de
s’enrichir, il se dévitalise. Au début du IIe siècle, l’édit est stabilisé, son texte
n’évolue plus. Lorsque l’Empereur Hadrien (117-138) arrive au pouvoir, il juge
le moment venu de le fixer une fois pour toutes. L’entreprise de codification est
confiée au grand juriste Salvius Julianus (Julien). L’édit mérite encore
davantage sa qualification de perpétuel. Il n’évoluera plus et cessera donc de
faire partie des forces créatrices du droit.
D. Les sénatus-consultes
Portent le nom de sénatus-consultes les textes votés par le sénat où siègent ceux
qui ont géré une magistrature. Le sénat est une institution essentielle sous la
République. C’est une sorte de Grand Conseil, convoqué par un magistrat qui lui
présente la question à débattre. Techniquement, le Sénat ne rend que des avis,
sous une forme courtoise, et les magistrats ne sont pas tenus de les suivre. En
pratique, il leur est difficile de ne pas s’incliner. C’est le cas notamment lorsque
la haute assemblée donne son avis sur un projet de loi. Mais c’est aussi le cas
lorsque le sénat pose des principes dans des matières qui relèvent de sa
compétence et qu’il invite ensuite les magistrats à les sanctionner par exemple
en matière financière.
36 A Rome, le mot « constitution » désigne nom pas, comme de nos jours, la loi
fondamentale de l’Etat, mais un texte normatif qui émane de l’empereur. Ce
type de source est donc naturellement propre à l’empire. Au Bas-Empire, ces
constitutions impériales sont appelées leges, lois. Il en existe quatre types.
Les édits (edicta) sont des textes ou des instructions obligatoires qui ont une
portée générale. Ils s’appliquent à toute une catégorie d’individus ou à tout un
territoire, voire à tout l’empire. Ils sont voisins de ce qu’on désigne aujourd’hui
comme des lois, sauf à préciser que ces lois sont l’œuvre monarque. A toutes
choses égales, on peut rapprocher ces édits des ordonnances présidentielles
prévues dans certains régimes républicains.
Les décrets (decreta) sont des jugements rendus par l’empereur en première
instance ou en appel dans des litiges civils ou pénaux. L’autorité de l’empereur-
juge leur confère une valeur dépassant l’espèce en cause et leur permet de servir
ensuite de précédents. Il est intéressant de remarquer que le droit d’aller en appel
d’un jugement est une invention du pouvoir impérial. C’était une façon de
s’approprier le pouvoir judiciaire jusque-là entre les mains du préteur mais du
peuple romain lui-même.
Les rescrits (re-scriptum : écrit en retour) sont des réponses écrites adressées
par l’empereur à une requête émanant d’un particulier, d’un fonctionnaire ou
d’un juge sur un point de droit souvent à l’occasion d’un procès. Le rescrit
assure donc, comme le responsum des prudents, une fonction de consultation
juridique. Mais à la différence du responsum, la réponse de l’empereur est
contraignante pour le juge. Dès lors, les particuliers avaient tout à gagner en
sollicitant un rescrit de la chancellerie impériale plutôt qu’en s’adressant à un
jurisconsulte.
Enfin, une autre forme de constitution impériale annoncée par Gaius est
l’epistula. Il s’agit de la réponse donnée par l’empereur à un magistrat qui
l’interroge sur un point de droit.
F. La coutume
Le Patriciat finit par céder à la pression exercée par les chefs de la plèbe, les
tribuns. Un collège de 10 magistrats extraordinaires, les décemvirs, fut choisi
pour un an parmi les personnages les plus prestigieux de la cité et chargés de
codifier le droit. La tâche fut rondement menée et elle s’acheva sur la loi des XII
tables, en 450 avant J.C. La loi ne nous ai pas parvenue dans son intégralité ;
nous n’en connaissons que des fragments qui ont permis de la reconstituer. Ces
dispositions légitiment notamment les principaux actes juridiques, les droits
« absolus » (liberté, propriété, puissance paternelle), les crimes de droit commun
punis de mort ainsi que les procédures injustices. Sans abstraction, ni
systématisation, avec une concision remarquable, l’essentiel est dit. En fixant le
statut privé du citoyen romain, la loi consacre l’égalité juridique et met un terme
à l’arbitraire dans l’exercice de la justice ; le magistrat est désormais lié par la
loi. Une loi dont le contenu est connu de tous puisque les XII tables sur
lesquelles la loi fut gravée sont affichées au forum. Les romains la considérait
comme la base de leur droit et son prestige restera encore intact à la fin de la
république : Cicéron raconte qu’encore à son époque, au 1er siècle avant notre
ère, les enfants l’apprenait par cœur à l’école.
A la fin du IIIè siècle, les textes juridiques forment une véritable jungle où les
juges, souvent ignorants ont bien du mal à se retrouver. Les besoins de la
pratique, ainsi que les nécessités de l’enseignement, conduisent les empereurs à
y mettre un peu d’ordre. Les moyens employés n’ont pas toujours été très
heureux. C’est le cas, notamment de la fameuse « loi des citations » rendue en
426 par Valentinien III, empereur d’occident. Elle instaure pour la jurisprudence
classique un système de sélection mécanique en donnant force de loi aux écrits
de cinq juristes : Gaius, Paul, Ulpien, Papinien et Modestin. Eux seuls peuvent
être invoqués en justice. L’opinion des autres prudents n’est prise en compte que
si elle est citée par un des cinq grands. Si les cinq auteurs sont d’accord, le juge
suivra leur avis. S’ils ne sont pas d’accord, la loi des citations fournit des règles
pour trancher mécaniquement les divergences : le juge doit retenir l’avis de la
majorité ; en cas de partage égal, le juge doit suivre l’opinion de Papinien (le
prince des juristes dira-t-on) ; si enfin Papinien ne s’est pas prononcé, le juge
retrouve la liberté d’adopter l’opinion qui lui semble la plus équitable.
A. Le Code Théodosien
1. Le Code de Justinien
2. Le Digeste
3. Les Institutes
Pour compléter son œuvre, Justinien fait rédiger un nouveau manuel d’Institutes
destiné à l’enseignement, mais qui aura en même temps force de loi. Ecrit par 3
professeurs de droit, il est publié le 21 novembre 533. Sa base a été empruntée
aux Institutes de Gaius, remaniées en raison, notamment du changement de
procédure. Les compilations s’accompagnent d’une réforme des études
juridiques. Justinien impose une cinquième année d’enseignement et revoit les
programmes. Le droit est désormais fixé et les professeurs sont sommés de s’en
tenir aux textes officiels. Pas question d’apprendre aux élèves une « fausse
doctrine », ordonne l’empereur qui interdit l’enseignement en dehors des écoles
officielles. Dans ces écoles, le bon ordre doit régner et l’empereur y défend
formellement les bizutages : « il faut, dit-il, que les étudiants en droit se fassent
d’abord des esprits sérieux, avant de se faire des langues érudites » !
4. Les Novelles