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La résiliation du bail commercial en droit de l’Ohada
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Droit Des Affaires
La résiliation du bail commercial en droit de l’Ohada

HAROLD LECKAT
1 MAI 2015

Le bail commercial en droit gabonais est régi par les dispositions des articles 101 et
suivants de l’Acte Uniforme Portant Droit Commercial Général qui sont d’ordre
public.

Le commerçant qui n’est pas toujours propriétaire des locaux dans lesquels il exploite
son fonds de commerce se fait souvent consentir un bail commercial pour une durée
déterminée ou indéterminée.

Sur la procédure

La procédure est le mécanisme juridique par lequel une convention légalement formée
doit être résiliée. En droit OHADA, la procédure de résiliation s’articule en deux
étapes, l’une extrajudiciaire et l’autre judiciaire.

La procédure extrajudiciaire est indispensable, qu’il s’agisse d’un bail à durée


déterminée ou indéterminée. Si le bailleur considère que son locataire n’a pas exécuté
les obligations mises à sa charge par le contrat, il pourra demander au juge la
résiliation du bail et l’expulsion du preneur.

Qu’en est-il des étapes de la procédure extrajudiciaire ?

La mise en demeure

L’article 133 alinéa 2 de l’Acte Uniforme Portant Droit Commercial Général du 15


décembre 2010 qui dispose qu’elle: « (…) est faite par acte d’huissier ou notifiée par
tout moyen permettant d’établir sa réception effective par le destinataire ». En
application de ce texte, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’Abidjan dans sa
décision n°9859 énonce clairement que « la procédure de résiliation commence par
une mis en demeure (…) ». Cela signifie qu’avant toute saisine du juge une mise en
demeure est obligatoire.

Signification de la mise en demeure

La signification ou la notification de la mise en demeure au preneur implique des


mentions obligatoires à peine de nullité. L’article 133 alinéa 3 dispose : « (…) la mise
en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées (…) ».
Il faut donc des motifs qui soient jugés légitimes et liés soit à la chose louée, soit à la
personne du preneur. Elle peut être faite par le bailleur lui-même ou par un officier
ministériel en l’instar de l’Huissier de Justice.

Respect du délai prescrit par l’acte uniforme

Le bailleur qui met en demeure doit, comme le prescrit l’article 133 alinéa 3 de
l’Acte Uniforme Portant Droit Commercial Général, « informer au destinataire qu’à
défaut de s’exécuter dans un délai d’un mois à compter de sa réception, la juridiction
compétente statuant à bref délai est saisi aux fins de résiliation du bail et expulsion
(…) ». Cette disposition indique que le bailleur doit également délivrer un congé au
locataire avant toute résiliation.

Qu’en est-il de la procédure judiciaire.

En ce qui concerne la procédure judiciaire, elle n’intervient qu’en cas d’échec de la


procédure extrajudiciaire. Pour mieux l’appréhender, la question du choix du juge
compétent, de l’introduction de l’instance à la décision vont retenir notre attention.

Le choix du juge compétent.

La jurisprudence admet souvent qu’un contrat mixte peut contenir une stipulation
contraire et, par là, attribuer la compétence à la chambre commerciale, même à
l’égard des non commerçants et cette clause s’impose qu’il soit demandeur ou
défendeur (Cass. Civ. 23 octobre 1958, Gazette du Palais 1959, P.281).

La compétence d’attribution du juge des référés en matière de bail professionnel ne


tire pas toutes les conséquences de la précision contenue dans la rédaction de l’article
133 du nouvel Acte uniforme. Ce texte désigne la « juridiction compétente » statuant
à bref délai comme l’instance juridictionnelle compétente pour connaître de la
résiliation du bail professionnel. En d’autres termes, le législateur communautaire, par
cette formule, s’est encore désintéressé de la question de la compétence
juridictionnelle qu’il a entendu renvoyer aux législations des Etats Parties. En
pratique, le juge du fond est saisi.

De l’introduction de l’instance à la décision

Pour ce qui est de l’introduction de l’instance, celui qui sollicite la résiliation du bail
commercial doit saisir le juge compétent par requête introductive d’instance (Article
408 du code de procédure civile) ou verbalement. Parce que le droit commercial
admet le principe de la liberté de la preuve. La saisine du juge telle que
précédemment dit va conduire sur les échanges entre les parties : c’est le déroulement
de l’instance.

Pour ce qui est du déroulement de l’instance, « les parties doivent se faire connaître,
mutuellement en temps utile, les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs
prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droits
qu’elles invoquent afin que chacune soit à même d’organiser sa défense » (Article 23
Code de procédure civile). Après la mise en l’état, le juge compétent rendra une
décision susceptible de recours.

Le juge civil ou commercial qui se déclare compétent doit valablement recevoir les
pièces des parties et renvoyer à une audience de fixation.

Au cours de l’audience de fixation, le juge appréciera si l’affaire peut être mise en


délibéré en vérifiant si le principe du contradictoire a été respecté.

Si le juge compétent admet l’irrégularité de la résiliation, bien de conséquences


juridiques en découleront.

Sur les conséquences tirées de l’inobservation de la procédure de résiliation du bail


commercial

Il faut entendre par conséquences juridiques les effets de droit prévus en cas
d’inobservation de la procédure de résiliation du bail commercial.

La résiliation irrégulière entraine le paiement d’une indemnité d’éviction, des


dommages et intérêts et le cas échéant de la nullité du jugement d’expulsion prononcé
contre le preneur en méconnaissance des prescriptions du droit uniforme.

Sur l’indemnité d’éviction

Elle est réclamée lorsque le bailleur refuse le renouvellement du bail. Dans le cas que
nous avons eu à traiter, le locataire dont la qualité de commerçant ne souffre d’aucune
contestation est fondé à solliciter du bailleur le versement d’une indemnité d’éviction
sur le fondement de l’article 126 de l’Acte Uniforme portant sur le Droit
Commercial général qui énonce que le bailleur qui s’oppose au renouvellement du
bail règle « au locataire une indemnité d’éviction ».

Sur dommages intérêts.

Sur la combinaison des articles 1134 et 1147 du code civil gabonais ancien, la partie
victime de la résiliation abusive d’un contrat est fondée à réclamer le paiement des
dommages et intérêts dont le montant est souverainement apprécié par le juge
compétent par rapport à la demande de la victime.

Sur la nullité d’un jugement prononcé contre le preneur en l’absence d’une mise en
demeure.

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’Abidjan (CCJA) dans sa décision


n°006 du 24 avril 2003 affirme que « la signification d’une décision d’expulsion est
régulière lorsqu’elle respecte les règles de procédure civile du droit national ». Est
donc irrégulière une résiliation d’un bail commercial qui méconnaît les dispositions
de l’article 1146 du code civil gabonais ancien.

En droit OHADA l’article 133 impose une mise en demeure préalable, ce qui emmène
les tribunaux à s’accorder sur l’irrecevabilité et même la nullité de la demande
d’expulsion qui ne respecte pas les prescriptions légales. La Cour d’Appel du Littoral
dans un arrêt n°132/CC du 3 novembre 2008 énonce que « l’absence de mise en
demeure rend nul le jugement d’expulsion », dans la même logique la Cour d’Appel
de Yaoundé dans un arrêt n° 222/Civ du 14 mars 2003 affirme que « l’efficacité de la
clause de résiliation d’un bail commercial est subordonnée à la stricte observation des
formalités préalables imposées par le législateur du droit uniforme ».

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