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RÉSUMÉ
La connaissance des variations physiologiques des
paramètres de la numération formule sanguine ainsi
que des particularités cytologiques chez l’enfant en
période néonatale, constitue un prérequis pour ne
pas surestimer ou sous-estimer la présence d’ano-
malies quantitatives et qualitatives qui ne sont que
le reflet de l’hématopoïèse particulière du nou-
veau-né et des différents stades de son dévelop-
pement. Savoir identifier rapidement les situations
pathologiques peut s’avérer très utile pour aider les
médecins à poser le bon diagnostic dans des situa-
tions cliniques parfois critiques pour le nouveau-né.
En effet, d’une part les données de l’hémogramme
sont profondément modifiées au cours des pre-
mières semaines et mois de vie, d’autre part, cer-
taines pathologies héréditaires ou acquises se
révèlent dès la période néonatale et la connaissance
© BURGER/PHANIE
des répercussions hématologique et cytologique qui
les accompagnent, apporte une aide précieuse dans
la prise en charge de cette population particulière-
ment vulnérable.
MOTS CLÉS
◗ anomalies cytologiques ABSTRACT
◗ nouveau-né
Peculiarities of blood cell parameters variations and morpho-
logical alterations in neonates
◗ numération formule
The challenge of hematologic problems in the newborn is still present. In the present
sanguine
article, the main cytological characteristics of the blood cells in healthy neonates as
◗ pathologies héréditaires
well as the physiological blood parameters variations at birth and during the first
◗ prématuré
month of life of the newborn and the preterm neonates will be reminded. Indeed,
KEY WORDS the values of many hematologic variables change markedly in the first days, weeks
◗ blood cell counts and months of life and a good knowledge of normal reference values according
◗ new born to gestational age is required to enable the proper interpretation of blood count
◗ normal ranges parameters. In the second part of this article, we will focus on the main morpholo-
◗ peripheral blood gical alterations of the red cell, platelet and leukocyte encountered in hereditary or
morphological analysis acquired disorders with a neonatal revelation which can lead to ever more effective
interventions of neonatalogists in this vulnerable population.
© 2018 – Elsevier Masson SAS
Tous droits réservés.
Tableau 1. Intervalles de référence de la numération globulaire et plaquettaire de la naissance à 2 mois (2,5-97,5 percentiles).
Hématies Hématocrite Hémoglobine VGM TCMH CCMH IDR Réticulocytes Plaquettes VMP Erythroblastes
Catégories
d’âge
1012/l % g/dl fl pg g/dl % 109/l 109/l fl 109/l
2 jours 3,8-6,1 40,6-64,1 13,8-22,1 95-116 32-39 15-18 180-325 150-400 8,7-11,6 0-0,2
Numération globulaire normale (en moyenne 15,5 g/dL à J8). La diminution est ensuite
du nouveau-né et du prématuré progressive, le taux restant toutefois supérieur à 10 g/dL
à la fin du premier mois de vie et atteint le nadir (9,5-
Le nombre de globules rouges (GR), tout comme l’hé- 13,5 g/dL) vers l’âge de 2 mois. Chez les enfants préma-
matocrite (Ht) et le taux d’hémoglobine (Hb), varient turés, la diminution du taux d’hémoglobine post-natale
beaucoup pendant la période néonatale. L’ajustement est plus rapide, plus importante et dure plus longtemps
du volume sanguin total est responsable d’une aug- (de 8 à 12 semaines versus 4 à 8 semaines chez l’enfant
mentation parfois importante du taux d’hémoglobine, né à terme). Le volume globulaire moyen (VGM) d’un
du chiffre d’hématies et de l’hématocrite dans les pre- nouveau-né à terme est compris entre 95 fl et 115 fl
miers jours de vie [2]. Le chiffre de GR, l’Ht et le taux (technologie Sysmex). Chez le prématuré, le VGM peut
d’hémoglobine augmentent proportionnellement avec atteindre 120 à 130-135 fl en fonction de l’âge gestation-
l’âge gestationnel et diminuent d’autant plus rapide- nel et surtout du poids de naissance [7]. Le VGM reste
ment après la naissance que l’enfant est né prématuré élevé (95-110 fl) pendant les 2 premières semaines de
(décroissance rapide chez les grands prématurés < 28 SA vie pour diminuer ensuite très progressivement à partir
(semaines d’aménorrhées), modérée chez les 28-32 SA et de la troisième semaine. Le VGM est corrélé à la taille
lente après 32 SA) [3]. Le nouveau-né est polyglobulique des hématies chez le nouveau-né, comprise entre 8,5 et
à la naissance et le chiffre moyen de globules rouges 9,5 μm, qui rejoint celle de l’adulte (7,5 μm) vers l’âge de
attendu est de 5 T/L (4 T/L chez le prématuré < 28SA) et 6 mois. La teneur corpusculaire en hémoglobine (TCMH)
de 4,3 T/L pour le sang de cordon. est élevée à la naissance (en moyenne 35,7pg/cellule) et
L’hématocrite moyen à la naissance est de 52 % (47 % peut atteindre 40-42 pg/cellule chez le prématuré [8]. La
dans le sang de cordon) et se stabilise entre 30 % et 35 % concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine
à la fin du premier mois de vie. Environ 2 à 5 % des nou- (CCMH) est normale à la naissance, comprise entre 30
veau-nés présentent un hématocrite supérieur à 65 % et 36 %, mais l’hématocrite déterminé par technologie
entre J0 et J3. Le taux d’hémoglobine augmente progres- Sysmex (cumul des hauteurs d’impulsion) peut être infé-
sivement au cours de la gestation (en moyenne 13,5 g/dl rieur de 2 à 10 % par rapport au microhématocrite cen-
chez les moins de 28SA et 15 g/dl chez les plus de 37SA) trifugé (qui reste la méthode de référence). De ce fait, il
[4] pour atteindre entre 14 et 21,5 g/dl à terme. Le taux n’est pas rare en période néonatale, que la CCMH soit
d’hémoglobine semble corrélé à l’âge gestationnel et à supérieure à 36 %. La réalisation d’un hématocrite cen-
l’origine ethnique des nouveau-nés [5]. Il n’est pas établi trifugé permet de corriger la valeur de la CCMH dans la
clairement si le poids de naissance (notamment chez les plupart des cas. En cas de CCMH supérieur à 36 % dans
grands prématurés < 1 000 g et ceux > 2 000 g) influence les premiers jours de vie, la vérification du taux d’héma-
significativement le taux d’hémoglobine [6] [5]. Ce taux tocrite obtenu par l’automate (microhématocrite centri-
est plus faible de 2 à 3 g/dL dans les prélèvements de fugé) est particulièrement importante si cette dernière
sang de cordon (12,5-17,5 g/dL chez les nouveau-nés à s’accompagne d’un VGM limite bas (≤ 95fl). En effet, du
terme, 9,5-16,5 g/dL chez les prématurés) [3]. Il peut aug- fait du mode de calcul de la CCMH (Hb/Ht) et du VGM
menter de 0,5 à 2 g/dL dans les trois premiers jours qui (Ht/GR), la sous-estimation de l’hématocrite peut être
suivent la naissance. Il diminue ensuite et reste proche du responsable d’une diminution « artificielle » du VGM de
taux de naissance jusqu’à la fin de la première semaine l’ordre de 3 à 10 points.
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1-2 : Cellules souches myéloïdes indifférenciées. 3-4 : Lymphocytes de nouveau-né, chromatine lâche, nucléolée et irrégularités.
5 à 7 : PNN et myélocytes rétractés entre les GR. 8-9 : polynucléaires éosinophiles avec granulations fines et éparses.
10 à 12 : micromégacaryocytes et noyaux nus de mégacaryocytes* 13 : Plaquettes géantes. 14 : Macroplaquettes.
15 à 17 : Pyknocytes*, cellules cibles, sphérocytes sur un frottis de prématuré.
Cytologie normale du nouveau-né cela est possible. En cas d’automate ne décomptant pas
les érythroblastes, le nombre d’érythroblastes compté
En période néonatale, la formule sanguine réalisée par les
au microscope pour 100 leucocytes doit tenir compte
différents appareils d’hématologie fait l’objet d’un nombre
des cellules lysées. Les quelques érythroblastes (majori-
élevé d’alarmes « Blastes » de dénomination variable selon
tairement acidophiles) retrouvés à la naissance sont mor-
les automates, nécessitant une revue au microscope avec
décompte ou simple observation morphologique en cas phologiquement normaux. Lors de grande régénération,
de discrimination correcte des différentes populations notamment chez les grands prématurés, quelques dys-
cellulaires par l’automate. Ces alarmes sont en partie plasies sont visibles (doubles noyaux, caryorrhexis, passage
le fait d’une plus grande hétérogénéité de taille et de d’érythroblastes plus immatures). Les polynucléaires éosino-
texture de chromatine des lymphocytes (polymorphisme philes et basophiles n’ont pas de particularité cytologique
physiologique) ainsi que de l’importance de la lymphocy- à l’exception, chez les prématurés, de granulations plus
tose (figure I : 3-4) [14]. La lecture du frottis sanguin fines et éparses dans les PNE (figure 1: 8-9) pouvant
en période néonatale peut être difficile en raison d’un gêner la discrimination des nuages PNN/PNE par les
nombre élevé de cellules altérées lors de la réalisation automates. La morphologie des hématies n’est pas cor-
du frottis sanguin (figure I: 5-6-7) [1,15]. Les polynu- rectement explorée par les automates et nécessite une
cléaires neutrophiles du nouveau-né présentent une mor- observation au microscope. Le frottis d’un nouveau-né,
phologie identique à celle de l’enfant plus âgé. Il n’est outre la macrocytose et la polychromatophilie, associe un
pas rare d’observer de nombreuses cellules rétractées faible nombre d’échinocytes, d’acanthocytes (0.5 à 2 %)
entre les hématies, altérées voire lysées ce qui peut faus- d’hématies cibles (liées à l’immaturité hépatique), de corps
ser le décompte de la formule sanguine et des érythro- de Jolly (liées à l’hyposplénisme fonctionnel, de 0 à 1 mois),
blastes au microscope. Il faut alors refaire le frottis en de rares sphérocytes (de 0 à 15 jours) (0 à 1 %) et de
diminuant le volume de sang et en exerçant une pres- rares pyknocytes (pouvant perdurer jusqu’à l’âge de
sion moindre ou rendre la formule de l’automate quand 6 mois en cas de prématurité) (figure I: 15-16-17).
Figure 2. Pathologies
Figure 4.métaboliques et lysosomales
Facteurs confondants de révélation
de mobilité  et ␥. néonatale.
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1-2 : lymphocytes avec petites vacuoles en grappe. 3 : Coloration PAS montrant en évidence l’accumulation de glycogène dans une
maladie de Pompe. 4 à 6 : Lymphocytes à vacuoles larges et multiples et polynucléaire éosinophile à granulations grosses, éparses et
de couleur grisâtre dans la maladie de Landing. 7-8 : Lymphocytes de Gasser (inclusion de teinte violet ,noir centré au sein d’une vacuole).
9 à 11 : Anomalies d’Alder (granulations grosses, denses). 12 : Surcharge de mucopolysaccharide dans un monocyte,
13 : PNN vacuolisé dans une maladie de Dorfman-Chanarin, 14-15 : PNN vacuolisé et coloration à l’ORO positive (Anomalie de Jordan)
dans le déficit en b-oxydation des acides gras, 16-17 : macroblastose, 18 : PNN hypersegmenté dans les troubles B12/Folates.
19 à 24 : anomalies des lymphocytes (une volumineuse inclusion rouge vif), PNE (grosses granulations cristalloïde), monocyte et PNN dans la
maladie de Chediak-Higashi (granulations éparses, volumineuses et d’affinité tinctoriale variable au MGG).
La mise en évidence de polynucléaires neutrophiles avec anomalies, quand elles sont présentent, associent diver-
des vacuoles larges à l’emporte-pièce (en dehors de tout sement dacryocytes, elliptocytes, fragments (faussant le
contexte infectieux, de prise de toxique ou de facteurs de crois- VGM), macrocytes (à rechercher attentivement), PNN au
sance), doit faire évoquer une maladie de Dorfman- noyau pluri segmenté ou rubané et des érythroblastes
Chanarin (figure 2: 13) ou un déficit en -oxydation circulants dysmorphiques (figures 2: 16-17-18) [15]. La
des acides gras qui associe par ailleurs une coloration NFS associe une anémie, le plus souvent arégénérative,
à l’ORO positive des PNN et la présence d’acanthocytes une thrombopénie parfois sévère, voire une neutropénie.
(figure 2: 14-15). D’autres maladies métaboliques ont des révélations pré-
La maladie de Chediak-Higashi présente la même coces et peuvent s’accompagner de cytopénies (notamment
présentation cytologique en période néonatale que anémie macrocytaire ou thrombopénie), nécessitant la réali-
chez l’enfant plus âgé. Elle associe la présence de poly- sation d’un myélogramme et d’un bilan métabolique [16].
nucléaires neutrophiles et éosinophiles anormaux, de
même qu’une fraction des lymphocytes (T cytotoxiques Hémopathies en période néonatale
et NK) [15]. De rares monocytes peuvent également Un syndrome myéloprolifératif transitoire (SMT), ancien-
être touchés (figure 2: 19-20-21-22-23-24). nement appelé réaction leucémoïde transitoire, peut être
Au cours des troubles intrinsèques de la vitamine observé dès la naissance (ou dans les 10 premiers jours
B12 et des folates (ou en cas de transmission verticale de vie) chez les nouveau-nés trisomiques 21. La NFS est
d’une maladie de Biermer ou d’une carence sévère chez très variable et peut retrouver une hyperleucocytose
les mamans végétaliennes strictes non supplémentées), les majeure associée à une anémie et/ou une thrombopénie
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A C
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parfois profondes ou à l’inverse une polyglobulie et une ver un certain polymorphisme cytologique des blastes
thrombocytose. L’observation du frottis sanguin met en avec un contingent de morphologie mégacaryoblas-
évidence la présence de blastes myéloïdes indifférenciés tique (figure 3A: 1-2-3-4). La présence de plaquettes
(parfois en faible pourcentage), au cytoplasme basophile dysmorphiques (gigantisme, dégranulation) (figure 3A:
et pouvant présenter des granulations, peroxydases 5-6-7-8) et d’érythroblastes dysmorphiques circulants
négative, centrées sur le golgi. Il est fréquent d’obser- aident, lorsqu’ils sont présents, à évoquer ce diagnostic
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© Service d’Hématologie biologique, Hôpital Robert Debré, Paris.
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1 : ␣-thalassémie mineure à la naissance. 2 : HbH à la naissance. 3 : hydrops foetalis. 4 : schizocytes* dans le cadre d’un déficit en
ADAMTS13 chez un nouveau-né. 5 : pyknocytose infantile (pykcnocyte*). 6 : elliptocytose à la naissance 7 : pyropoïkilocytose.
8 : érythroblaste acidophile bi-nucléé (dysérythropoïèse retrouvée lors d’intense régénération), anisocytose et sphérocytes dans
une incompatibilité ABO. 9 : Sphérocytose héréditaire avec avec sphéro-acanthocytes*.10 : sphérocytose éréditaire avec formes
« champignon » * 11 : stomatocytose hyperhydratée. 12 : érythroblastes acidophiles dysmorphiques dans le cas d’une dysérythropoïèse de
type II (CDA II). 13 : Hemighost* dans un déficit en G6PD à la naissance. 14 : hématies denses spiculés* dans un déficit en GPI.
15 : hématies « effacées »* dans une triglycéridémie essentielle.
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1 : Plaquettes grises dans le cadre d’un ARCC syndrome. 2 : Macroplaquette et inclusion basophile dans le cadre d’un syndrome MYH9. 3 :
Macroplaquettes partiellement dé granulées et stomatocytes dans une sitostérolémie. 4 : Granule géant dans le syndrome Paris Trousseau.
et schizocytes (> 1%) (figure5: 4) Le décompte des schi- matocytes (figure 5: 11). La numération érythrocytaire
zocytes peut être délicat en cas de présence concomitante peut être évocatrice en cas d’association d’une CCMH
de pyknocytes. diminuée et d’un VGM augmenté.
La pyknocytose infantile, qui nécessite souvent une Les dysérythropoïèses congénitales peuvent être
transfusion sanguine, correspond à une anémie sévère diagnostiquées en période néonatale devant présence
transitoire de mécanisme mal connu dont le diagnostic d’un ictère. Le type II associe une aniso-poikilocytose et
est cytologique par la mise en évidence d’un taux élevé la présence de quelques érythroblastes binucléés dans le
de pyknocytes (figure 5: 5). sang (figure 5: 12). Le diagnostic de certitude se fera par
Les elliptocytoses sont détectées par la présence d’un l’analyse cytologique du myélogramme (>10% d’érythro-
nombre élevé d’elliptocytes (figure 5: 6) sur le frottis san- blastes bi-tri nucléés) et l’analyse moléculaire (mutation du
guin. Les formes graves à la naissance (pyropoikilocytose) gène SEC23B).
(figure 5: 7) peuvent se présenter avec un nombre impor- Certaines érythroenzymopathies peuvent également
tant d’hématies fragmentées de forme très variées et de être diagnostiquées en période néonatale, telles que le
sphérocytes de reformation. Les elliptocytes peuvent alors déficit en G6PD (rares hémighost sur lame) (figure 5: 13)
être rares et sont à rechercher attentivement. Cette frag- ou les déficits en PGI (Phosphoglucose-Isomérase) ou en
mentation responsable d’une hémolyse importante s’ac- TPI (Triose-Phosphate-Isomérase) (figure 5: 14). Les formes
compagne également d’une régénération intense (parfois infantiles sont particulièrement graves (détresse respiratoire,
> 15% de la population de GR) faussant l’interprétation cardiomyopathie, hypotonie marquée, amyotrophie et spasti-
du VGM. En cas de fragmentation importante des globules cité…). La présentation hématologique associe une ané-
rouges à la naissance, le diagnostic différentiel reste les mie (parfois compensée par la forte régénération), normo
anomalies du métabolisme des vitamines B12 et Folates. ou macrocytaire, une très forte réticulocytose (parfois
L’étude des parents peut alors s’avérer utile. > 500 G/L) et la présence d’hématies denses spiculées
Dans la sphérocytose héréditaire, l’aspect cytologique sur le frottis sanguin.
peut être limitrophe avec celui observé dans l’incompatibi- Dans les triglycéridémies essentielles, des hématies
lité ABO (nombreux sphérocytes et polychromatophilie impor- au contour flou peuvent être présentes (figure 5: 15).
tante) (figure 5: 8). Dans l’incompatibilité ABO, le VGM La mort subite du nourrisson peut être suspectée
est souvent plus élevé car la perte de membrane touche devant la présence d’anomalies cytologiques de l’ensemble
également les réticulocytes dans la sphérocytose hérédi- des cellules sanguines avec leucocytes altérés, globules
taire. Certaines sphérocytoses héréditaires sont révélées rouges échinocytaires et plaquettes dé granulées [17].
La NFS révèle un VGM élevé et une CCMH basse du fait
par la présence de sphéro-acanthocytes, les sphérocytes
de l’hyperhydratation des hématies en post mortem.
étant rares (figures 5: 9-10). La numération globulaire
retrouve une anémie d’intensité variable, régénérative,
fréquemment associée à une CCMH > 36 %. Pendant la
Anomalies évocatrices
période néonatale, l’analyse par cytométrie de Flux (test
des plaquettes
à l’EMA) est particulièrement utile pour poser le diagnos- La plupart des thrombopénies constitutionnelles sont
tic de sphérocytose héréditaire en présence d’un test de associées à une thrombopénie modérée (>50 G/L) et ne
Coombs négatif. sont que très rarement de découverte néonatale (sauf en
Au cours de la stomatocytose héréditaire (très rare) cas de dépistage pour cause d’antécédents familiaux) [17].
forme hyperhydratée, le frottis révèle de nombreux sto- Il faut néanmoins, devant toute thrombopénie inexpli-
quée, apprécier la morphologie des plaquettes et notam- premières semaines de vie. Elles sont en effet le reflet
ment la taille (très diminuée oriente vers un Wiskott-Aldrich, de l’adaptation de l’hématopoïèse du nouveau-né à la vie
augmentée oriente vers une macrothrombopénie). Certaines extra-utérine, à la croissance et à la maturation de son
macrothrombopénies sont associées à d’autres anoma- système immunitaire. Savoir reconnaître, dès les premiers
lies cytologiques permettant d’évoquer le diagnostic
jours de vie, une présentation cytologique anormale
(inclusions basophiles dans le syndrome MYH9 (figure 6: 2)
stomatocytes dans la sitostérolémie (figure 6: 3)). L’aspect pour l’âge associée à des anomalies quantitatives de
des granulations peut également orienter le diagnostic l’hémogramme permet d’aider les néonatalogistes
(absence de granulations dans le syndrome des plaquettes dans la prise en charge de cette population pédiatrique
grises ou granule géant dans la thrombopénie Paris Trousseau particulièrement sensible. QQ
(figure 6: 4)). La principale thrombopénie constitution-
nelle de révélation néonatale est l’amégacaryocytose qui Liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens
associe un chiffre de plaquettes < 10G/L et une absence d’intérêts.
de mégacaryocytes dans la moelle mais sans anomalie
morphologique des plaquettes.
En cas d’ARC syndrome [18], la révélation est fré- Points à retenir
quemment néonatale et associe cliniquement une arthro- ◗tL’hémogramme du nouveau-né subit de profondes
grypose, un ictère cholestatique et un syndrome rénal modifications quantitatives au cours des premières
de Fanconi, responsables d’une atteinte multi-organes semaines de vie. • Ces dernières doivent être connues
rapidement évolutive. Le diagnostic peut être évoqué par des biologistes et des pédiatres afin de permettre une
la présence sur le frottis sanguin de plaquettes grises interprétation adaptée de la NFS.
de taille modérément augmentée sans thrombopénie ◗tLa population érythrocytaire des nouveaux nés est
(figure 6: 1). Le diagnostic de certitude sera posé par la caractérisée par une anisocytose et une poikilocytose
recherche de la mutation du gène VPS33B. physiologique (échinocytes, cellules cibles, corps de jolly...)
et c’est donc le nombre et l’association des anomalies
entre elles qui feront la différence entre une présentation
Conclusion cytologique normale ou pathologique.
◗tLa connaissance des répercussions hématologiques et
L’interprétation correcte des résultats de l’hémogramme cytologiques de certaines pathologies constitutionnelles
en période néonatale exige une bonne connaissance pouvant se révéler dès la période néonatale (maladies de
des particularités de l’hématopoïèse du prématuré et surcharge, SHU congénital, Infections néonatales…), apporte
du nouveau-né ainsi qu’une bonne connaissance des une aide précieuse pour le diagnostic et la prise en
charge de ces enfants particulièrement fragiles.
intervalles de référence et de leurs variations dans les