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La métaphore1

La métaphore est une comparaison implicite puisqu’elle réunit deux éléments sans toutefois
utiliser de mot de comparaison. Elle a une valeur d'illustration afin de bien faire comprendre le
sens désiré par l'auteur. Elle ajoute souvent une connotation ou une intensité à un propos.

Pour bien interpréter une métaphore, le lecteur doit comprendre que le comparé et le comparant
qu'elle renferme ne sont pas unis par un mot de liaison (comme, pareil à, ressemble à, etc.). Le
lecteur doit donc cibler ces deux éléments par déduction et chercher à comprendre pourquoi
l'auteur a décidé de confronter ces deux éléments afin de créer une image.

1. La vie est un voyage plein d'aventures.


2. Ma jeunesse ne fut qu'un ténébreux orage. (Charles Baudelaire)
3. Un gros serpent de fumée noire. (Guy de Maupassant)
4. Cet homme d'affaires est un requin.

• Dans l'exemple 1, la métaphore effectue une comparaison entre la vie et un voyage plein
d'aventures pour souligner l'aspect imprévisible de la vie.
• Dans l'exemple 2, la métaphore compare la jeunesse à un orage en raison de sa nature
imprévisible, violente, sombre, etc.
• Dans l'exemple 3, la métaphore fait un lien entre un serpent et une fumée noire pour illustrer son
aspect négatif, sombre. Cela annonce un mauvais présage. Elle peut également illustrer la forme
de la fumée.
Dans l'exemple 4, la métaphore fait un rapprochement entre l'homme d'affaires et un requin pour
démontrer que l'homme est peu scrupuleux.

Une métaphore est donc une analogie. On établit un rapport entre deux choses que l’on estime
similaires. Le terme concret d’homme féroce est placé dans un contexte abstrait : on doit imaginer
que c’est un tigre. Le réel est en quelque sorte transformé en idée, en concept. C’est là toute la
difficulté d’une métaphore. Elle se fonde souvent sur une impression ou interprétation très
personnelle de celui qui la produit. En quelque sorte, c’est dans ce transfert que réside le sens de
ce que veut exprimer l’interlocuteur ; d’ailleurs, le terme « métaphore » vient du latin d’origine
grecque metaphora, “le transport, transposition, transfert de sens”.

Différents types de métaphores

Métaphore in praesentia - quand le terme comparé et le comparant sont tous les deux explicitement
présents dans la phrase.
Il existe différentes façons de la construire :
1. le terme comparé (icebergs) peut être apposé au comparant (les cathédrales sans religion…)
« Icebergs, Icebergs, cathédrales sans religion de l’hiver éternel » (Henri Michaux, Icebergs)

2. le terme comparé (l’automne) peut être qualifié par un groupe de mots qui indique sa qualité ou
son état (tisane froide)
« Tout l’automne à la fin n’est plus qu’une tisane froide » (Francis Ponge, La fin de l’automne)
1
Ces propos sont une synthèse de https://www.laculturegenerale.com/metaphore-definition-exemple-filee
3. le terme comparé (blés) peut être complété par le comparant, qui est donc un complément
(l’océan) :
« Et la profonde houle et l’océan des blés »
(Charles Péguy, Présentation de la Beauce à Notre-Dame de Chartres)

Métaphore in absentia - le comparé est absent.


C’est notre exemple de « l’or du soir » pour désigner le soleil couchant. L’effort d’interprétation
demandé au lecteur est plus grand encore !

« Chaque instant te dévore un morceau de délice. » (Baudelaire, L’horloge)


Le verbe « dévore » évoque ici une bête sauve. L’instant est une bête sauvage !

On peut parler de deux pôles de la métaphoricité :


- les métaphores lexicalisées (catachrèses)
- les métaphores filées

La catachrèse est une métaphore si courante qu’on ne la perçoit plus comme telle.

Exemples :
les ailes d’un bâtiment, les pieds d’une table, les dents d’une scie, la plume d’un stylo, la feuille
de papier, prendre une bain de soleil, habiter une cage à lapins…

La métaphore filée est une métaphore qui s’étend à plusieurs éléments. Pour parler de métaphore
filée, il faut rester dans le même champ lexical !

Pour reprendre l’exemple de l’homme féroce :


« cet homme est un tigre, ses crocs étaient prêts à se planter partout, ses griffes rognaient les
carcasses… »

Le rapprochement entre l'homme et un tigre pour démontrer que l'homme est ravageur se fait 3
fois, à savoir en disant que l’homme est un tigre, en parlant de ses crocs utilisés pour tout
s’approprier et les griffes pour dévorer les vivants.

En termes plus savants, la métaphore filée est définie comme:


« Série de métaphores reliées entre elles par la syntaxe —elles font partie de la même phrase ou
d’une même structure narrative ou descriptive— et par le sens : chacune exprime un aspect
particulier d’un tout, chose ou concept, que représente la première métaphore de la série »
(Michel Riffaterre, « La métaphore filée dans la poésie surréaliste », Langue française, n° 3, 1969,
pp. 46-60)
Exemples
Dans le père Goriot, Balzac compare Paris à un océan :

« Mais Paris est un véritable océan. Jetez-y la sonde, vous n’en connaîtrez jamais la profondeur.
Parcourez-le, décrivez-le ! quelque soin que vous mettiez à le parcourir, à le décrire ; quelque
nombreux et intéressés que soient les explorateurs de cette mer, il s’y rencontrera toujours un lieu
vierge, un antre inconnu, des fleurs, des perles, des monstres, quelque chose d’inouï, oublié par les
plongeurs littéraires. »

On remarque, dans l’exemple ci-dessous, que l'empereur est d'abord clairement comparé à un arbre
(il était comme un arbre en proie à la cognée). Ensuite, c'est la métaphore filée qui renforce la
comparaison, celle-ci se développe à l'aide d'une suite d'images qui insistent constamment sur
cette ressemblance entre l'empereur et un arbre (ce géant, grandeur, bûcheron sinistre, chêne
vivant, par la hache, ses branches).

L'empereur était là, debout, qui regardait.


Il était comme un arbre en proie à la cognée.
Sur ce géant, grandeur jusqu'alors épargnée,
Le malheur, bûcheron sinistre, était monté ;
Et lui, chêne vivant, par la hache insulté,
Tressaillant sous le spectre aux lugubres revanches,
Il regardait tomber autour de lui ses branches.
(Victor Hugo)

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