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Royaume du Maroc ‫المملكة المغربية‬

Ministère de l’Education Nationale, de la


Formation Professionnelle, de ‫وزارة التربية الوطنية والتكوين المهني والتعليم‬
l’Enseignement Supérieur et de la ‫العالي والبحث العلمي‬
Recherche Scientifique
‫جامعة سيدي محمد بن عبد هللا‬
Université Sidi Mohamed Ben Abdellah ‫كلية العلوم القانونية واالقتصادية‬
Faculté des Sciences Juridiques
‫فاس‬- ‫واالجتماعية‬
Economiques et Sociales-Fès.

Département des Sciences Economiques et Gestion

Master spécialisé : Economie, Finance Participative et Marchés Financiers


Option : Banque et Finance Participative

Projet de fin d’études pour l’obtention du diplôme de Master spécialisé en


Banque et Finance Participative

Sous le Thème :

Les conditions préalables du passage du


régime de change fixe au régime de change
flexible : Le cas du Maroc

Préparé et soutenu par : Sous la direction du Professeur:


Mr. ANNAKI Hicham Pr. BENBOUBKER Mounir

Membres du Jury :
Pr. HAOUDI Amina : PES à la faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales de Fès
Pr. M’HAMDI Mohamed : PES à la faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales de Fès
Pr. EL HIRI Abderrazak : PES à la faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales de Fès
Pr. BENYACOUB Bouchra : PH à la faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales de Fès
Pr. BEN EL HAJ Fouad : PH à la faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales de Fès
Pr. BENBOUBKER Mounir : PA à la faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales de Fès
Pr. EL HASSANI Hafid : PA à la faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales de Fès

Année universitaire 2017/2018


ANNAKI Hicham Page 2
Résumé

L’objectif essentiel visé dans ce travail est de vérifier le degré de stabilisation des
prérequis nécessaires pour la mise en place du système de change flexible au Maroc.

D’après l’étude que nous avons menée, la situation économique et financière donne
un signal approprié au Maroc pour assouplir son régime de change. Les prérequis nécessaires
pour transiter vers un régime de change plus flexible semblent favorables.

Dans ce sillage le FMI (2010) affirme également que « les autorités monétaires
marocaines disposent des moyens et des capacités nécessaires pour le passage à un régime
formel de ciblage de l’inflation et de taux de change plus flexible ».

Ajoute aussi « le Maroc pourrait maintenant progressivement assouplir son taux de

change, en partant d’une position de force. L’intention des autorités de passer à un nouveau

régime de change et de politique monétaire est notée avec satisfaction, car un taux de change

plus flexible aiderait l’économie à absorber les chocs extérieurs et à préserver sa

compétitivité. Comme la position extérieure et la position des réserves se sont améliorées, et

que les principales conditions générales et opérationnelles sont en place, la situation actuelle

est propice pour un tel passage.»

Mots clés

Les conditions préalables, régime de change, régime de change fixe, régime de change
flexible.

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Dédicace

À mes chers parents,

À mes sœurs, et toute ma famille,

A tous mes amis et à tous mes camarades de la FSJES FES et d’ailleurs,

À tous les artisans de mon parcours académique,

Je vous dédie ce travail

ANNAKI Hicham Page 4


Remerciements

La présente étude n’aurait pas été possible sans le bienveillant soutien de certaines

personnes. Et je ne suis pas non plus capable de dire dans les mots qui conviennent, le rôle

qu’elles ont pu jouer à mes côtés pour en arriver là. Cependant, je voudrais les prier

d’accueillir ici tous mes sentiments de gratitude qui viennent du fond de mon cœur, en

acceptant mes remerciements.

Je tiens à remercier mon encadrant Mr BENBOUBKER Mounir, qui m’a gratifié en

acceptant d’encadrer mon projet de fin d’étude, pour son partage de savoir et sa disponibilité.

Mes remerciements s’adressent également aux personnes qui m’ont apporté leur aide

et qui ont contribué à l’élaboration de ce mémoire ainsi qu’à la réussite de cette formidable

année universitaire.

Je n’oublie pas mes parents pour leur contribution, leur soutien et leur patience.

Enfin, j’adresse mes plus sincères remerciements à tous mes proches et amis, qui

m’ont toujours soutenue et encouragée au cours de la réalisation de ce mémoire. Merci à tous

et à toutes.

ANNAKI Hicham Page 5


Liste des abréviations

Abréviation Signification
ARA Assessing reserves adequacy (Evaluer l’adéquation des réserves)

BAM Banque AL-Maghrib

BC Banque Centrale

BM Banque Mondiale

CCG Caisse Centrale de Garantie

DCT dette extérieure à court terme

ENR Engagements vers les Non-résidents

FMI Fond Monétaire International

MENA Middle East and North Africa

M Importation

NBP Banque Nationale de la Pologne

PIB Produit Intérieur Brut

SME Système Monétaire Européen

TC Taux de Change

X Exportation

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Liste des figures

Figure 1: Evolution du PIB en chili ......................................................................................... 28

Figure 2: Evolution du taux de chômage en chili ..................................................................... 28

Figure 3: Evolution du taux d’inflation en chili ....................................................................... 29

Figure 4: Evolution des exportations en Chili .......................................................................... 29

Figure 5: Evolution des importations en Chili ......................................................................... 30

Figure 6: Evolution de la balance courante (% du PIB) en chili .............................................. 30

Figure 7: Evolution du régime de change en Pologne à partir de 1990 ................................... 33

Figure 8: Evolution du PIB en Pologne ................................................................................... 34

Figure 9: Evolution du taux de chômage en Pologne............................................................... 34

Figure 10: Evolution du taux d’inflation en Pologne ...................................................... …….35

Figure 11: Evolution des exportations en Pologne................................................................... 35

Figure 12: Evolution des importations en Pologne .................................................................. 36

Figure 13: Evolution du solde de la balance courante (% PIB) ............................................... 36

Figure 14: Evolution du PIB en Brésil ..................................................................................... 40

Figure 15: Evolution de l’inflation en Brésil ........................................................................... 40

Figure 16: Evolution des exportations en Brésil ...................................................................... 41

Figure 17: Evolution des importations en Brésil ...................................................................... 41

Figure 18: Evolution du solde de la balance courante en Brésil (% d u PIB) .......................... 42

Figure 19: Evolution du PIB en Uruguay................................................................................. 45

Figure 20: Evolution du taux d’inflation en Uruguay .............................................................. 45

Figure 21: Evolution des exportations en Uruguay .................................................................. 46

Figure 22: Evolution des importations en Uruguay ................................................................ 46

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Figure 23: Evolution du solde de la balance courante (% du PIB) .......................................... 47

Figure 24: Les réserves (%PIB) par rapport au repère d’évaluation de leur niveau adéquat ... 56

Figure 25: Part du déficit de la balance commerciale du PIB .................................................. 66

Figure 26: Evolution des exportations par produits ................................................................. 67

Figure 27: Evaluation des niveaux de réserves adéquats par la méthode ARA ajustée ........... 70

Figure 28: Evolution des réserves de changes au Maroc en milliards de dollar et en mois

d’importations .......................................................................................................................... 71

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Liste des tableaux

Tableau 1 : Synthèse des Avantages et Désavantage de régime de change fixe ...................... 20

Tableau 2 : Synthèse des avantages et Désavantage de régime de change flexible ................. 23

Tableau 3 : Régime de change actuel vs Régime cible .......................................................... 74

Tableau 4: Processus de flexibilisation du taux de change au Maroc, Egypte et la Turquie .. 82

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Sommaire

Introduction Générale ............................................................................................................... 11

Chapitre I : Aperçu théorique sur les régimes de change ......................................................... 14

Section 1 : Présentation, Avantages et inconvénients des différents régimes de change ..... 16

Section 2 : Quelques expériences du passage au régime de change flexible ...................... 25

Chapitre II : Les conditions préalables d’une transition vers un régime de change flexible .. 50

Section 1 : les prérequis macroéconomiques et financiers ................................................... 52

Section 2 : Les Préconditions institutionnelles et opérationnelles : ..................................... 57

Chapitre III : Etude comparative : Maroc, Egypte et Turquie ................................................. 63

Section 1 : Degré de satisfaction des prérequis pour le cas marocain ................................. 65

Section 2 : expérience marocaine face à celles de l’Egypte et la Turquie : ......................... 75

Conclusion générale ................................................................................................................. 86

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Introduction Générale

Depuis l’effondrement du système de Bretton Woods au début des années 70 et

l’adoption du deuxième amendement aux statuts du FMI, Les pays membres sont libres

d’adopter le régime de change de leur choix entre un régime fixe ou flottant ou une solution

intermédiaire. Le régime de change optimal pour un pays donné a toujours été un sujet de

débat entre les experts en économie internationale, qu’ils appartiennent aux milieux

universitaires ou politiques. Toutefois l'objectif ultime du choix d'un régime de change, est de

parvenir à la croissance la plus rapide et la plus stable possible. Le régime de change affecte

en effet la stabilité et la compétitivité de l'économie. Donc, l’arbitrage entre un régime fixe ou

flottant résulte à la fois des objectifs économiques du pays et des contraintes qu'il doit

supporter1.

L’évolution de la théorie du choix du régime de change à commencé depuis les années

cinquante. À partir de The Case for Flexible Exchange Rates de Friedman (1953)2. Friedman

distinguait deux cas : celui ou les taux de change sont flexible, et celui ou les taux de change

sont maintenus par l’état temporairement rigides, mais susceptible d’être modifies sur

décision de ce dernier, Friedman considérait le system de change rigide comme le pire des

cas. Selon lui, le system de taux de change fixe est générateur de crises spéculatives et

d’instabilité.

Des 1960, Robert Mundel était le premier à souligner le caractère important de la

mobilité de capital dans la détermination de régime de change optimal. C'était à Mundell de

1
MERGHIT, Abdelhamid (2017). Évolution de la théorie du choix du régime de change.
2
MILTON Friedman (1953), the case for flexible exchange rates, in Milton Friedman, ed., Essays in positive
economics, Chicago: university of Chicago press.

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constater les capacités d'isolation des changes flexibles en présence de la mobilité des

capitaux. C'était aussi lui qui a évoqué pour la première fois les caractéristiques individuelles

des pays et à poser les fondements de la théorie des zones monétaires optimales, développé

par la suit par d’autres économistes (Kenen, Mackinon…).

Dans ce sillage, il est essentiel de noter que le passage à un régime flottant requiert une

bonne préparation de l’économie ainsi que des intervenants. En effet, une transition brusque

ne permet pas aux acteurs sur le marché de s’adapter aux risques du flottement et de

développer les instruments nécessaires pour faire face çà ceux-ci. Cette transition peut s’étaler

sur plusieurs années afin d’assurer un bon fonctionnement des marchés internes et une

préparation de la politique monétaire.

Au Maroc le régime de change fixe n’a pas pu escompter tous les objectifs principaux

des autorités monétaires, qui ne sont autres que d’améliorer la compétitivité du pays d’assurer

la stabilité de la monnaie nationale tout en réduisant le risque de change. Le Maroc est resté

sur le choix d’un ancrage à un panier constitué essentiellement de deux devises : euro et

dollar. Un tel régime a permis au pays de lutter contre l’inflation et d’éviter l’inflation

importée. Or, dans le cadre d’une croissance de l’économie mondiale, ce régime de change

serait-il toujours capable d’absorber les chocs externes ?

Le régime de change tel qu’il est appliqué au Maroc, aujourd’hui, est un régime de

parité fixe avec rattachement du dirham à un panier de devises, dominé principalement par

l’euro et le dollar avec des pondérations respectives de 60% et 40%. Toutefois, il ne s’agit pas

d’une fixité parfaite puisque la parité du dirham fluctue à l’intérieur d’une bande de 5 % de

part et d’autre du taux central.

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La problématique de ce mémoire s’articule autour de la question centrale suivante : Est ce

que le Maroc dispose des prérequis nécessaires pour la mise en place d’un système de

change flexible ?

Pour répondre à cette problématique, nous avons opté pour un travail de recherche,

décomposé en trois grands chapitres répartis de la façon suivante :

Le premier chapitre donne un aperçu théorique sur les régimes de change qui est

réparti en deux sections. La première section est consacrée à la présentation des différents

régimes de change, ainsi que les avantages et inconvénient de chaque type. Dans la deuxième

section, nous présentons quelques expériences de passage de certains pays vers le régime de

change flexible.

Le deuxième chapitre, est consacré à la représentation des prérequis nécessaires pour

réussir la transition d’un régime de change fixe vers un régime de change flexible, ce dernier

est subdivisé en deux sections, dont la première est consacrée à l’analyse des pré-conditions

macroéconomiques et financières, alors que la deuxième traite les pré-conditions

institutionnelles et opérationnelles.

Le troisième chapitre présente une étude de cas qui sera répartis en deux sections, dont

la première répond à notre problématique à travers la vérification de degré de satisfaction

des prérequis pour l’économie nationale sur la base de différentes rapports de BAM, FMI,

BM et aussi sur la base du rapport de la Direction des Etudes et des Prévisions Financières, La

deuxième section représente la comparaison de notre expérience face à celles de l’Egypte et

la Turquie

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Chapitre I : Aperçu théorique sur les régimes

de change

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Depuis les travaux de M. Friedman en 1953, le débat sur les avantages et les

inconvénients des changes fixes ou flottants est très intense3. Il s’est intensifié après

l’abandon du système de Bretton Woods au début des années 70 et la libéralisation

généralisée des mouvements de capitaux dans les années 80 et 90.

Avant de commencer l'analyse de la typologie, et les avantages et les inconvénients de

régimes de change, il s'avère nécessaire de donner une définition du régime de change : "le

régime de change est défini comme étant l'ensemble des règles qui déterminent

l'intervention des autorités monétaires sur le marché des changes et donc détermine le

comportement du taux de change"4.

Dans ce chapitre on va présenter les différents types de régimes de changes ainsi que

les avantages et des inconvénients de chaque type dans un premier lieu, et dans un second

temps, on va décrire quelques expériences de passage de certain pays vers le régime de

change flexible.

3
, MILTON. Friedman. (1953), Op.Cit. page 11
4
ABDALLAH, A. (2005). Taux de Change Réel d ‘Equilibre pour un PED: Application aux pays du M aghreb,
Erudite Paris XII Val de Marne.

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Section 1 : Présentation, Avantages et inconvénients des différents

régimes de change

Cette section présente les différents régimes de change, ainsi que leurs avantages et leurs
inconvénients.

1. Le régime de change fixe

1.1. Présentation du régime de change fixe:

Ce régime se base sur la définition d’une parité de référence entre la monnaie d’un

pays donné et une devise ou un panier de devise qui peut être l’or ou l’argent sur laquelle la

banque centrale s’engage à échanger sa propre monnaie5.

Dans ce type la banque centrale doit intervenir sur le marcher de change en achetant ou en

vendant de la monnaie, afin de rétablir le cours du change fixé.

Ce type des régimes de change comprennent les unions monétaires, les systèmes de

dollarisation, les caisses d’émission et les systèmes de changes fixes ajustables.

L'union monétaire c'est la forme la plus stricte. Les taux de change des participants

sont fixés de manière irrévocable, les monnaies locales pouvant être remplacées par une

monnaie commune6.

La caisse d'émission ou « currency boards » ou conseils monétaires: la création

monétaire dépend strictement des réserves de change dans la monnaie de rattachement, et la

politique monétaire n'a aucune autonomie. Ces régimes autorisent une double circulation

monétaire (ex.: peso et dollar en Argentine)7.

5
BLAYNE Haggart (1999) les régimes de taux de change : les choix possibles, page 4
6
LAHRECHE-REVIL Amina (1999) : Les régimes de change, Editions La Découverte, collection Repères, Paris.
7
JEAN-PIERRE Allegret, (2007) «Quels régimes de change pour les marchés émergents ? Les solutions de coins en
questions»

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Les systèmes de dollarisation « c’est un système dans lequel, un pays adopte la

monnaie d’un autre pays comme ca propre monnaie. La politique monétaire nationale dans ce

cas, est abandonnée aux autorités monétaires du pays avec laquelle la monnaie a été

rattachée »8

Dans le régime de change ajustable, l’autorité monétaire définissent une parité fixe,

qui peut toutefois être modifiée de manière exceptionnelle pour restaurer l'équilibre du solde

courant. Des bandes de fluctuation peuvent être définies, étroites (régime de Bretton Woods,

SME avant 1993) ou plus larges (SME après 1993).

1.2. Les Avantages et les inconvénients de régime de change fixe

Les avantages de régimes de change fixe sont principalement :

 Les coûts de transaction des investissements et des opérations commerciales

internationales sont plus faibles.

 Il est également plus facile pour les investisseurs, les entreprises et les décideurs de

faire des prévisions et des projets.

 Le taux de change fixe représente un ancrage nominal crédible pour la politique

monétaire.

 Les économies souhaitant faire face aux crises financières devraient opter pour un

système de change fixe afin de réduire la volatilité de la monnaie.

 Il permet aussi de créer une base de planification stable assurant le développement de

l’investissement et du commerce international.

Toutefois, pour qu’un régime de taux de change fixe fonctionne, il faut que le pays qui

l’adopte soit fermement déterminé à défendre le cours fixé, même en cas de chocs externes et

de pressions exercées pour qu’il laisse flotter la monnaie.

8
LAHRECHE-REVIL Amina, Op. Cit. Page 16.

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Il doit aussi disposer de réserves suffisantes pour pouvoir défendre la monnaie contre les

attaques spéculatives.

Le maintien de réserves n’est pas sans coût. Il est onéreux de défendre sa monnaie

c’est l’équivalent d’exporter sa devise et il y a toujours risque de dévaluation si les

spéculateurs obligent les autorités monétaires à vendre une bonne part des réserves ou s’il

devient trop coûteux de maintenir le taux de change fixé.

En deuxième lieu, détenir des réserves signifie qu’il faut consacrer des recettes

d’exportation à des investissements dont le rendement est relativement faible, ce qui réduit la

consommation et l’investissement nationaux. D’autre part, le gouvernement doit verser, sur

les obligations nationales qu’il vend dans le but d’acquérir les devises, un taux d’intérêt

supérieur à celui qu’il obtient sur ses réserves. Les pays peuvent toutefois adopter différentes

stratégies d’investissement pour abaisser le coût des réserves9.

Il s’ensuit qu’un taux de change fixe est contraignant pour la politique monétaire d’un

gouvernement. L’inflation et, partant, les taux d’intérêt, doivent être maintenus à des niveaux

compatibles avec le taux de change choisi, ce qui assure la crédibilité du gouvernement et du

taux de change.

Il est également plus difficile de financer un déficit. En règle générale, la monétisation

des déficits et de la dette ne cadre pas avec un taux de change fixe, sauf bien entendu si la

monnaie étrangère à laquelle on a rattaché la monnaie interne fait l’objet du même genre de

politique. Même les déficits financés par une dette de marché sont problématiques. Comme

les déficits provoquent de l’incertitude au sein du marché en ce qui concerne la politique

monétaire, les investisseurs exigeraient une prime de risque.

9
BLAYNE Haggart, Op. Cit. Page 16.

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Par conséquent, même en l’absence d’un changement d’orientation de la politique

monétaire, les taux d’intérêt qui vont de pair avec un taux de change fixe doivent augmenter.

Les effondrement récents des systèmes de changes fixes et quasi-fixes en Asie, Russie,

Brésil, ont reconfirmé le rôle important du déficit du compte capital et des dettes par rapport à

la soutenabilité du régime de changes fixes dans les pays en développement.

En régime de taux de change fixe, les chocs externes sont absorbés par des variations

des prix et des salaires. Toutefois, il arrive souvent que les prix et les salaires soient

relativement rigides et ne s’ajustent pas facilement à la baisse, notamment en raison de

l’influence des syndicats et des contrats de travail. Il peut alors se produire des pressions

(déséquilibres) pouvant mener à des assauts spéculatifs sur la monnaie.

L’idée centrale est que le régime de change fixe peut constituer un moyen

d’ajustement aux chocs externes et a pour effet de réduire la probabilité de survenue d’une

crise de change.

En fin de compte, si le taux de change de même que les politiques monétaires et

budgétaires internes ne conviennent pas, les flux de capitaux forceront tôt ou tard une

réévaluation de la monnaie.

Un régime de change fixe exige10 :

 Des politiques macroéconomiques prudentes.

 Un déficit fiscal modéré.

 Une PM orienté vers le maintien de la parité du taux de changes.

10
BLAYNE Haggart, Op.cit. page 16

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Tableau 1 : Synthèse des Avantages et Désavantage de régime de change fixe

Avantages Désavantages

 Réduit les coûts de transaction et le  Pas d’atténuation des chocs réels via

risque de change. le taux de change.

 Fournit un ancrage (crédible?) pour  Perte de l’autonomie monétaire en

la politique monétaire → les l’absence de contrôle des capitaux

anticipations d’inflation restent  Fonction de prêteur en dernier

contenues. ressort limitée.

 Simple à mettre en œuvre.  Risque d’attaque spéculative et

 Il confère une confiance en la d’effondrement de la monnaie en

devise du pays. cas de mobilité des capitaux.

 Dépendance vis-à-vis de la politique

monétaire.

Source : établi par auteur

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2. Le régime de change flexible

2.1. Présentation du régime de change flexible

Dans un régime de change flexible, le cours de la monnaie est déterminé librement sur

le marché des changes, par l’offre et la demande de devises11. Ce système est connu sous le

nom de « flottement pur »12. Les Banques Centrales n’interviennent pas et laissent le marché

s’équilibrer librement selon la loi de l’offre et de la demande indiquent que les modifications

du niveau relatif des prix aboutissent à une modification parallèle des taux de change. La

politique monétaire retrouve alors son autonomie, mais la Banque Centrale abandonne le

contrôle sur l’évolution du cours de change nominal13.

En régime de taux de change flottant, on trouve deux types : un flottement contrôlé (ou

impur) et un flottement libre (ou pur).

Le premier type de flottement est celui qui est déterminé par la force de marché,

toutefois la banque centrale intervenir occasionnellement sur le marché pour modérer les

fluctuations excessives.

Cependant le second type est tel que le niveau de taux de change est déterminé par

l’offre et le demande du marché.

2.2. Les Avantages et les inconvénients de régime de change flexible

L’un des principaux avantages de régime de change flexible c’est qu’il permet la

protection de l’économie contre les chocs réels, En effet, le taux de change s’ajuste en réponse

à n’importe quel choc externe, ce qui réduit l’impact négatif de ce dernier.

11
Le taux de change est déterminé de manière continuelle sur les marchés (Johnson, 1969).
12
FRANKEL, JA (1999). Aucun régime de monnaie unique n'est correct pour tous les pays ou à tout moment (n
° w7338). Bureau Nationale de la Recherche Economique.
13
KINDA Mohamed Tidjane(2012), régimes de change et croissance économique dans la communauté économique
des Etat de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO),

ANNAKI Hicham Page 21


Le régime flottant offre plus de marge de manœuvre aux autorités monétaires, elles

adoptent ainsi la politique monétaire la plus appropriée à l’économie sans se soucier de la

politique de change externe ni du niveau des réserves internationales14.

Dans un système de change flexible, le taux de change flottant se déprécie pour

compenser le déficit de la balance des paiements. Ce qui permet plus de compétitivité en

termes d’exportations.

Toutefois, un pays qui adopte le régime de change flexible fait souvent face à une

volatilité de court terme de sa monnaie, ce qui cause des incertitudes pour les entreprises.

Ainsi, l’investissement et les termes de commerce internationaux sont directement affectés.

Les attaques spéculatives dans un régime flexible font que le niveau du taux de change

déterminé par les forces du marché ne reflète pas la réalité des échanges commerciaux du

pays avec le reste du monde, ce qui influencera la décision des firmes et des consommateurs.

La décision du passage à un régime de change flottant est l’une des plus difficiles pour

les autorités monétaires. En effet l’adoption d’un tel système aura des coûts économiques et

sociaux importants, ce phénomène est connu par « la peur du flottement »15.

En effet, la peur du flottement de la monnaie nait en raison de ce que ce phénomène

peut engendrer en termes de niveaux d’inflation, d’appréciation de la monnaie domestique et

de déficit de la balance commerciale

14
BERTRAND Lapouge, STEPHANE Perot, JOËL Maynard, Note de synthèse(2007) : Les avantages et les
inconvénients d’une politique de changes flexibles,
15
Les partisans de la "Peur du Flottement" Calvo et Reinhart (2000), Levy Yeyati et Sturzenegger (1999)

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Tableau 2 : Synthèse des avantages et Désavantage de régime de change flexible

Avantages Désavantages

 Indépendance monétaire et efficacité  Incertitude sur le taux de change

accrue  Un stimulus budgétaire conduit à

 Les forces du marché jouent un rôle l’appréciation et à une perte de

dans la détermination du taux de compétitivité

change.  Nécessité de trouver un arrimage

 Ajustement plus facile aux chocs nominal alternatif

réels.
=> Ciblage l’inflation (?)
 Moindre risque de crise de change

et/ou de crise bancaire?  Risque de volatilité excessive, voire

danger de bulles spéculatives16

Source : Etabli par auteur

16
Bulles spéculatives : Une bulle spéculative est généralement causée par des anticipations exagérément
optimistes sur la croissance, l'évolution des prix ou sur d'autres événements qui pourraient provoquer une
augmentation des valeurs des actifs.

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Entre ces deux grandes catégories de régimes de change. Il existe plusieurs autres

types de régimes de change dans la classification de jure.

3. Le régime de change intermédiaire

Entre les deux régimes extrêmes, on trouve les régimes intermédiaires, qui se

distinguent selon les fluctuations que la Banque Centrale autorise au tour de la parité de

référence et selon la fréquence de réalignements de cette parité. Appartiennent à cette

catégorie de régime, la parité glissante et le flottement administré ou géré17.

Dans le premier cas, le taux de change est fixé périodiquement, soit à taux fixe, soit en

réponse aux changements de certaines variables indicatrices. Comme le différentiel d’inflation

passée par rapport aux principaux partenaires commerciaux. Ce système est souvent connu

sous le nom de « glissement passif ou adaptatif ».

On trouve également le système de change permettant un ancrage sur les anticipations

de prix connu sous le nom « glissement actif ou pré-annoncé ». Cette approche consiste à

annoncer le taux de dévaluation à l’avance pour plusieurs mois.

Dans le régime de flottement administré, les taux de change sont flottants, mais des

interventions ponctuelles ou coordonnées des Banques Centrales informent les marchés sur la

parité considérée comme souhaitable. Il s’agit d’un « flottement impur »18.

Cette approche permet aux autorités monétaires d’influencer les mouvements du taux

de change à travers une intervention active, sans spécifier ou pré-annoncer une trajectoire

pour le taux de change, la Banque Centrale ne s’engageant pas sur un taux de change ciblé.

17
KINDA Mohamed Tidjane, régimes de change et croissance économique dans la communauté économique des Etat de
l’Afrique de l’ouest (CEDEAO).
18
LAHRECHE-REVIL Amina. Op. Cit page.16

ANNAKI Hicham Page 24


Section 2 : Quelques expériences du passage au régime de change flexible

Dans cette section on va présenter quelques expériences du passage de certains pays

au régime de change flexible.

1. Exemples d’un passage graduel

1.1. Chili (1984 –1999)


Transition au flottement graduelle (15 ans). Le système flexible fût implémenté après une

bonne préparation du terrain et une concordance entre la décision du changement du régime et

les éléments qui la supportent (implémentation d’un cadre de ciblage d’inflation graduel et

implicite, disposition d’instruments de conduite de la politique monétaire sous un régime plus

flexible et préparation des intervenants sur le marché).

 Evolution de la politique de change :

Après l’effondrement du régime de change fixe chilien au début des années 1980, à cause

du fort endettement du pays, les autorités ont décidé d’implémenter un régime « crawling

peg19» en 1982 visant essentiellement à promouvoir une dépréciation du taux de change pour

booster les exportations, à générer des ressources pour refinancer le déficit externe et réduire

l’inflation. Entre 1990 – 1997, les agrégats macroéconomiques se sont nettement améliorés20 :

 Une augmentation du taux de croissance annuel accompagné d’une expansion de la

capacité de production ;

 Un développement des exportations ;

 Une baisse d’inflation ;

 Une baisse du taux de chômage

19
Crawling Peg : est un régime de taux de change qui permet une dépréciation ou une
appréciation progressive. Il est généralement considéré comme faisant partie d'un régime de taux de change fixe .
20
AGENOR, P (2001) “Monetary Policy under flexible Exchange Rate : An Introduction to Inflation Targeting”
Central Bank of Chile working paper N°124 November

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 Un mouvement massif d’entrées de capitaux (en raison des taux d’intérêts élevés

comparativement aux taux d’intérêts internationaux).

 Evolution des marchés et des réglementations21:

Marché de change:

 Marché au spot et marché des produits dérivés développés entre 1992 jusqu’au

flottement.

 Levée graduelle des régulations, autorisation des opérations de swap, facilitation de

l’accès au marché et possibilité d’une plus grande flexibilité.

Politique monétaire:

 Les ajustements de la bande étaient accompagnés par des efforts de réduction de

l’inflation à travers une adoption graduelle d’un cadre de ciblage d’inflation.

 Abandon graduel de l’ancrage du taux de change pour un ancrage de l’inflation.

Stratégie d’intervention sur le marché de changes:

 Après l’adoption du flottement, la BC a annoncé qu’elle interviendrait sur le marché

lors d’une hausse soudaine de la volatilité du taux de changes en vue de faire face à

l’instabilité externe et interne afin de réduire la vitesse de la dépréciation de la

monnaie. Le marché sera informé dans ces cas. Ce type d’interventions représenterait

un signal d’une évolution du TC non justifiée par les fondamentaux.

21
Central Bank of Chile, 2001

ANNAKI Hicham Page 26


Libéralisation du compte capital22:

 Libéralisation graduelle des sorties de capitaux.

 Imposition de contrôles de court terme sur les entrées de capitaux afin de mener une

politique monétaire indépendante. Tous les contrôles ont été levés en 2001.

Secteur bancaire:

 Disposait d’une base de capitaux considérable ;

 Niveau de dollarisation faible ;

 Accompagnement des autorités monétaires en termes de régulations strictes et d’un

cadre de supervision limitant son exposition au risque ;

Etat de l’économie avant le flottement:

 Niveau faible de passage du choc du taux de changes au niveau d’inflation ;

 Dollarisation limitée du système bancaire ;

 Attitude prudente du secteur privé face au risque de changes ;

 Efforts de construction d’un marché financier et d’un marché de changes ;

 Disponibilité d’instruments de couvertures contre l’inflation et les risques de change ;

 Marché financier, interbancaire et marché de change, bien développés ;

22
JOHNSTON, R.B., DARBAR, S.M., Echeverria, C. (1999). Sequen (Johnston, 1999)cing Capital Account
Liberalization: Lessons from Chile, Indonesia, Korea, and Thailand. International Monetary Fund.

ANNAKI Hicham Page 27


Figure 1: Evolution du PIB en chili

Source : Banque Mondiale, 2015

Figure 2: Evolution du taux de chômage en chili

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 28


Figure 3: Evolution du taux d’inflation en chili

Source : Banque Mondiale, 2015

Figure 4: Evolution des exportations en Chili

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 29


Figure 5: Evolution des importations en Chili

Source : Banque Mondiale, 2015

Figure 6: Evolution de la balance courante (% du PIB) en chili

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 30


1.2. Pologne (1990-2000):

Le pays est passé par une flexibilisation graduelle. Les étapes de transition

étaient en réponse aux changements économiques domestiques et à l’International, ainsi

qu’aux multiples objectifs que se donne le gouvernement: maintien de la compétitivité,

réduction de l’inflation, intégration des marchés domestiques.

Durant les années 1980, le pays expérimentait des déséquilibres externes et internes.

Avec un taux d’endettement élevé, une faible croissance, et un large déficit du compte

courant. Le pays adopte ainsi un plan d’ajustement qui consistait en une réallocation des

ressources entre secteur public et privé, une libéralisation des prix conduisant à une

hyperinflation23,

Le régime fixe qui consistait à rattacher le zloty au dollar a contribué à la réduction de

l’inflation et à assurer la crédibilité aux politiques anti-inflationnistes. Avec un niveau

d’inflation toujours plus fort que celui des pays partenaire, le zloty a connu une très forte

appréciation induisant une baisse de la compétitivité du pays et le surplus du compte courant

s’est transformé en déficit. Ainsi, la monnaie fût dévaluée et le système de « crawling peg24 »

adapté pour stabiliser le taux de change effectif réel25.

Ce régime a permis d’assurer les objectifs de désinflation et compétitivité. Le taux de

dévaluation était fixé à un niveau plus bas que le niveau du différentiel d’inflation ciblé pour

23
KAROLINA Nessel(2007), Choix de régime de change dans un pays en transition intégrant une union
économique et monétaire : le cas de la Pologne, thèse de Doctorat, Univ.Paris1.pp.30-32
24
Crawling peg (ou change glissant) consiste en régime de change ou les autorités monétaires permettent que le
taux de change glisse vers le bas ou vers le haut dans un certain pourcentage journalier ou hebdomadaire, ce
système est généralement adopté par en pays ou il existe un décalage systématique entre son taux d’inflation et
le taux d’inflation de ses principales partenaires commerciaux.
25
AIFQUI Saloua (2017) : étude de l’impact de l’adoption d’un régime de change flexible au Maroc sur
l’inflation. Projet de Fin d’Etudes, Institut national de statistique et d'économie appliquée.

ANNAKI Hicham Page 31


supporter la désinflation graduelle et adoucir l’appréciation du taux de change réel. Le zloty

s’est apprécié à cause de pressions émanant du surplus du compte courant en raison de26:

 l’augmentation des échanges de la Pologne avec ses pays partenaires ;

 la croissance des entrées des IDE depuis le début de la transition ;

 les investissements en portefeuille des non-résidents. Ces dernières principalement

attirées par l’amélioration des fondamentaux macroéconomiques du pays et par la

forte prévisibilité du taux de change.

Ce système était donc non seulement incapable de gérer l’appréciation de la monnaie

mais en plus en rajouter en attirant les entrées de capitaux à court terme. Il fut remplacé par un

crawling band qui a généré moins de flexibilité que prévu. Les achats de devises de la BC ont

engendré une hausse massive des réserves de changes, de plus le différentiel de taux d’intérêt

élevé alourdissait les coûts des opérations de stérilisation.

Le zloty continuait à s’apprécier et le déficit du compte courant se creusait, la BNP a

décidé d’augmenter la flexibilité. Le pays a annoncé le régime de changes flottant en 2000.

La transition graduelle vers le régime flottant pour le cas de la Pologne a

permis27 :

 Le développement des marchés financiers s’est effectué depuis le début de la

transition économique, afin d’améliorer l’efficience des opérations monétaires.

 La transition à la flexibilité fût facilitée par la coordination entre le développement des

institutions et des marchés financiers, la stabilité et le renforcement du système

financier et de la politique monétaire ainsi qu’une libéralisation du compte capital

prudente.

26
KIERZENKOWSKI, R. (2004) le canal étroit du crédit et la transmission de la politique monétaire : Analyse
théorique et application au cas de la Pologne.
27
NBP, 1991,

ANNAKI Hicham Page 32


 Le passage au flottement fût accompagné d’une stratégie de communication où les

régimes de changes étaient communiqués à l’avance et les décisions opérationnelles

transmises un jour avant ou n’étaient pas annoncés carrément, afin d’éviter les

activités spéculatives.

 Les décisions prises n’étaient jamais révoquées, autrement elles influenceront la

crédibilité de la banque centrale imposant de larges coûts à l’économie.

Figure 7: Evolution du régime de change en Pologne à partir de 1990

Source : Banque Nationale de Pologne, 1990

ANNAKI Hicham Page 33


Figure 8: Evolution du PIB en Pologne

Source : Banque Mondiale, 2014

Figure 9: Evolution du taux de chômage en Pologne

Source : Banque Mondiale, 2016

ANNAKI Hicham Page 34


Figure 10: Evolution du taux d’inflation en Pologne

Source : Banque Mondiale, 2016

Figure 11: Evolution des exportations en Pologne

Source : Banque Mondiale, 2014

ANNAKI Hicham Page 35


Figure 12: Evolution des importations en Pologne

Source : Banque Mondiale, 2014

Figure 13: Evolution du solde de la balance courante (% PIB)

Source : Banque Mondiale, 2014

ANNAKI Hicham Page 36


2. Exemples d’un passage brusque

2.1. Cas de Brésil

Le passage du pays vers le régime flexible était motivé par la résorption des

déséquilibres dus à l’inconsistance de la politique de change, la politique fiscale et la

politique monétaire.

 Plan de stabilisation des années 1990 :

Dès les premiers mois du plan, l'inflation a chuté brutalement : d'un rythme annuel de

4922% dans les 12 mois précédant la réforme monétaire (instituant le real au 1er juillet 1994)

elle passe à 28 % en 1995, et ce sans blocage autoritaire des variables nominales.

Les objectifs du programmes sont divers et multiples dont les principaux sont28:

 La réduction ou l'élimination du déficit public, et par suite le recours au seigneuriage

comme ultime moyen de financement de l'État. La baisse du poids relatif d'une dette

publique en grande part interne constituait l'une des conditions de ce rééquilibrage des

comptes publics, et puisque le déficit global avait pour origine la charge financière de

cet endettement, la réussite du plan impliquait une baisse des taux d'intérêt

domestiques.

 Le brisement du mécanisme de réalimentation inflationniste provoqué par l'indexation

généralisée de l'économie.

 L'importation de la désinflation, en fixant de manière plus ou moins rigide le taux de

change nominal.

 L'amélioration de l'affectation des ressources et donc les gains de productivité.

 L'amélioration de fonctionnement des marchés et l'accroissement de la concurrence

interne.

28
GHABI, H. (2005). ‘La gestion des taux de change dans les pays émergents’

ANNAKI Hicham Page 37


 Stimulation de l'épargne interne, mais également l'épargne externe, et à ce titre

attirance en tout premier lieu les investissements directs, vecteurs de l'innovation et

forme de participation à la globalisation.

 La promotion de l'ouverture commerciale pour amplifier la concurrence et la

réduction du ratio des intérêts de la dette externe sur les recettes d'exportations.

Les faibles résultats de la politique fiscale conduisant à des taux d'intérêts domestiques

très élevés ont tous mené à l'accroissement de la dette publique nette consolidée (42% du PIB

en 1998) et à la détérioration de la situation macroéconomique29.

Plusieurs chocs externes ont frappé l'économie du pays, à la crise Mexicaine en 1995 et la

crise Asiatique en 1997, s'ajoute la crise en Russie en 1998.

Dans ces circonstances, le flottement a très rapidement pris place en 1999 et ce, après la

crise du système de change dont les caractéristiques30:

 Les réserves de changes après avoir atteint leur maximum en 1998, se sont réduis à

moitié à cause des attaques spéculatives et du manque de confiance.

 Courte période de forte dépréciation conduisant à un renforcement de la dette.

Tout de même ceci n'a pas engendré de crises du système bancaire comme dans d'autres

pays, la mise en place rapide d'une politique monétaire et fiscale ont permis de limiter

instabilité du marché.

29
BELAISCH, A (2003): «Exchange rate pass-through in Brazil», document de travail n° 03/141 (Washington:
FMI).
30
SALAMA, P. (2009). Argentine, Brésil, Mexique, face à la crise internationale.

ANNAKI Hicham Page 38


 Les préalables à la décision du flottement :

La légère préparation de l'économie brésilienne a permis d'amortir les chocs sur l'économie:

 Des efforts d'amélioration du secteur monétaire et financier ont empêché une crise

plus profonde.

 Le plan d'ajustement a assuré de faibles niveaux d'inflation.

 Le marché de change était bien développé quoique caractérisé par un dualisme

(montants échangés sur le spot largement supérieurs à ceux échangés sur le marché à

terme).

 Une plus grande incertitude émanant du flottement a permis le développement du

marché des produits dérivés.

 L'adoption du ciblage d'inflation juste après le flottement a permis de limiter la

période d'incertitude et prévenir contre le retour de l'hyperinflation après la période de

dépréciation.

Cependant, le processus du passage au taux de change flexible n'a pas eu lieu sans

difficultés. Ces dernières peuvent être résumées comme suit:

 Freiner la panique du marché.

 Restaurer la confiance des investisseurs étrangers.

 Eviter le retour des hauts niveaux d'inflation.

 Limiter le niveau d'incertitude et encourager les entrées des capitaux pour retrouver le

financement externe et l'investissement étranger.

ANNAKI Hicham Page 39


Figure 14: Evolution du PIB en Brésil

Source : Banque Mondiale, 2015

Figure 15: Evolution de l’inflation en Brésil

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 40


Figure 16: Evolution des exportations en Brésil

Source : Banque Mondiale, 2015

Figure 17: Evolution des importations en Brésil

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 41


Figure 18: Evolution du solde de la balance courante en Brésil (% d u PIB)

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 42


2.2. Cas de l’Uruguay

Passage d’un « crawling band » à un régime flottant, dans un contexte de crise

financière suivie d’une sévère dépréciation du peso et l’insolvabilité des entreprises, des

banques, et du gouvernement. La bande fût abandonnée sans les pré-requis nécessaires.

L’expérience du pays montre à quel point le passage au flottement dans un contexte

d’absence d’éléments nécessaires et un manque de perception des risques de change

peuvent rendre difficile le processus de la transition.

Le plan de stabilisation de 1990 - 2002 a permis de31 :

 Réduire l’hyperinflation ; même après l’abandon du plan de stabilisation lors de la

crise de 2002, l’inflation n’a pas dépassé les 10%.

 Accompagné d’un plan d’ajustement fiscal et la renégociation de la dette externe

publique.

 Forte croissance de l’économie entre 1990-1998 (stimulée par les entrées de capitaux

et des conditions externes favorables).

 Appréciation du taux de change réel a engendré une détérioration de la balance

courante financée par les entrées de capitaux.

Le passage à un régime flottant en 2002, manquait de conditions préalables et a pris place

dans un contexte de sorties massives de capitaux et une chute spectaculaire de réserves.

 forte dépréciation de la monnaie

 Détérioration des conditions macroéconomiques et financières

 Montée de l’inflation

 Accroissement de la dette/PIB

31
SALUDJIAN, A (2004). Trajectoires de croissance et volatilité macroéconomique dans la Mercosur : quelques
éléments d’analyse empirique.

ANNAKI Hicham Page 43


Afin de stabiliser le marché, les banques insolvables ont fermé (1/3 du système bancaire),

certaines agences multilatérales ont soutenu le financement bancaire, et une stratégie de

résolution bancaire visant à freiner la crise ainsi qu’un reprofilage de la dette publique ont été

adoptés.

Le passage à un régime flottant n’est pas sans cout, parmi les difficultés rencontrées32 :

 Nécessité de mettre en place une politique monétaire alternative.

 Besoin de créer un cadre institutionnel afin de favoriser l’établissement d’un marché

financier efficient et aider le secteur privé à bien gérer les risques de change sous un

régime flexible.

 le regain du contrôle et de la stabilité sur la politique monétaire et financière ont

nécessité de grands efforts.

32
Op. Cit. Page 43

ANNAKI Hicham Page 44


Figure 19: Evolution du PIB en Uruguay

Source : la banque mondiale, 2015

Figure 20: Evolution du taux d’inflation en Uruguay

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 45


Figure 21: Evolution des exportations en Uruguay

Source : Banque Mondiale, 2015

Figure 22: Evolution des importations en Uruguay

Source : Banque Mondiale, 2015

ANNAKI Hicham Page 46


Figure 23: Evolution du solde de la balance courante (% du PIB)

Source : Banque Mondiale, 2015

3. Expériences ratées (Equateur, Ouzbékistan)

Un ensemble de conditions macroéconomiques et d’aspects opérationnels ont contribué à

l’échec du passage à une plus grande flexibilité pour le cas de l’Equateur et le cas

d’Ouzbékistan a savoir :

 Le marché financier sous développé et non liquide

 Le degré limité de l’indépendance de la politique monétaire

 Des conditions économiques défavorables et une politique macroéconomique faible

3.1. Cas d’Equateur :

Après de nombreuses pressions sur le marché des changes, le pays a adopté un régime de

change flexible en 1999, ce qui a engendré:

ANNAKI Hicham Page 47


 Une baisse du PIB de 7,5%,

 L’accélération de l’inflation et du déficit fiscale,

 La croissance de la dette publique et un taux de chômage de 17%,

 Une chute des réserves de changes.

 Une crise bancaire en raison du manque de régulation et de supervision du secteur.

Cette crise a affaiblit les politiques monétaires et politique de change.

Le pays se retrouve avec une politique monétaire non crédible, une hyperinflation

imminente, et aucun accès au marché financier international après la défaillance

d’emprunteurs souverains. Les autorités ont adopté une dollarisation totale en 2000.

3.2. Cas d’Ouzbékistan :

La progression vers une économie de marché fût freinée par:

 un excès de contrôle de la part du gouvernement,

 une restriction sur les échanges domestiques et externes,

Le secteur financier est resté faible avec d’importantes vulnérabilités relatives aux risques

de changes. Les banques du pays étaient très dépendantes du financement externe et la

réduction des flux de ces financements ont entravé le financement de l’économie nationale.

ANNAKI Hicham Page 48


Nous conclurons donc que les régimes de change sont divisés en trois grandes catégories :

les régimes de change fixes, les régimes de change intermédiaires et les régimes de change

flexibles, chaque type à des avantages et des inconvénients par rapport à l’autre.

A travers ce chapitre une distinction a été faite entre les pays qui ont poussé à flotter leur

taux de change à cause de crise ou à cause de déséquilibre économique comme le cas de

l’Uruguay et brésil, et entre les pays qui choisi une transition graduelle après une bonne

préparation du terrain comme le Chili.

ANNAKI Hicham Page 49


Chapitre II : Les conditions préalables d’une

transition vers un régime de change flexible

ANNAKI Hicham Page 50


Il est généralement connu que le régime de change actuel de rattachement du taux de

change a bien servi au Maroc, mais les autorités conservent leur objectif à moyen terme, qui

est de passer à un régime monétaire et de change plus flexible, ainsi, un consensus semble

émerger entre l’ensemble des acteurs économiques sur l’opportunité du passage vers la

flexibilité.

Nous nous intéressant dans ce chapitre à faire une évaluation des prérequis structurels

et institutionnels pour la flexibilisation de change au Maroc afin de permettre la réussite de la

transition et assurer les conditions optimales pour le bon fonctionnement d’un régime d’une

plus grande flexibilité pour l’économie marocaine.

Le deuxième chapitre de ce travail sers scindé en deux section, la première traite les

prérequis macroéconomiques et financières, alors que la deuxième décrit les principaux

prérequis institutionnelles et opérationnelles.

ANNAKI Hicham Page 51


Section 1 : Les prérequis macroéconomiques et financiers
1. Une politique budgétaire saine

Selon Mishkin (2004), le renforcement de la discipline budgétaire est considéré

comme étant un préalable essentiel pour la flexibilisation du système de change. En effet,

dans les économies caractérisées par des politiques budgétaires défaillantes et une

monétisation du déficit budgétaire. Les promesses des pouvoirs publics qui ont permis

d’assurer un faible niveau d’inflation ne sont pas crédibles33.

Ces économies ont été marquées par un biais inflationniste qui provoque une inflation

d’un niveau relativement plus élevée que celle qui est socialement optimale. De ce fait, le

choix d un régime fixe permet de fournir un ancrage nominal à la stratégie monétaire et inflige

une discipline aux politiques économiques. Par ces effets, le système de fixité permet

d’améliorer la crédibilité des autorités du pays d'ancrage34.

Sargent et Wallace (1981) estiment que la conduite d’une politique budgétaire laxiste

peut mener à l’émergence d’une arithmétique monétariste déplaisante. Cette dernière décrit

l’influence des pouvoirs publics sur les autorités monétaires pour le financement monétaire

d’une dette publique assez importante.

Cette monétisation de la dette conduira à l’intensification des tensions inflationnistes

et la dégradation de la crédibilité de la banque centrale. Dans le cas où les autorités

monétaires ne cèdent pas aux pressions des pouvoirs publics, la situation peut mener à

l’accentuation de la probabilité du risque de défaut de l’Etat.

En outre, les travaux d’Amato et Gerlach (2002) montrent qu’une situation dégradée

des soldes budgétaires peut entrainer une augmentation significative des prix administrés pour

33
ESMAK Hassan, « les perspectives d’un régime de change au Maroc : vers plus grande flexibilité », IOSR Journal of
Economics and Finance (IOSR-JEF), e-ISSN: 2321-5933, p-ISSN: 2321-5925.Volume 7, Issue 2. Ver. III (Mar. - Apr. 2016),
www.iosrjournals.org,.
34
AIFQUI Saloua. Op.cit, page 31

ANNAKI Hicham Page 52


limiter les déficits publics. L’évolution des prix administrés représente généralement une

proportion assez importante de l’IPC qui influence le niveau d’inflation et peut avoir

également des conséquences non négligeables sur la compétitivité de l’économie et sur le

niveau du taux de change.

2. Un secteur financier développé

Si une situation macroéconomique saine et stable est une condition nécessaire pour

permettre un passage ordonné vers une plus grande flexibilisation du régime de change, aucun

ne peut nier le rôle décisif que peut jouer le degré de développement du secteur financier et sa

capacité à faire face et à gérer les flux de capitaux et à réagir face aux problèmes du

financement externe35.

Le passage vers un système de change plus flexible demeure entravé par la présence

d’un secteur financier peu développé, fragile qui reste essentiellement concentré et dominé

par l’activité bancaire. Ainsi, la concentration de l’activité financière dans le secteur bancaire

représente un grand risque pour l’économie dans son ensemble pour plusieurs raisons. La

première est relative au fait que les banques s’intéressent généralement à un seul objectif

évident qui est la recherche de profit. Cet intérêt peut les conduire à faire hausser de façon

irresponsable leur offre de crédit sans prendre en compte le risque de la présence du danger

des risques de crédits. De même, les institutions bancaires sont reliées par leur activité sur le

marché interbancaire. Cela fait que toute incapacité de l’une d’entre elles à faire face à ses

engagements peut provoquer la chute du système financier par des effets de contagion ou par

un effet « boule de neige36».

35
MOHAMED D. S. (2007) « Régime de change : le chemin vers la flexibilité », MPRA papier n° 4085.
36
Effet « boule de neige » : est un cercle vertueux ou un cercle vicieux qui accumule aux événements considérés
déjà présents de faits en quantité de plus en plus grande, à la manière d’une série géométrique ou même dune
fonction exponentielle.

ANNAKI Hicham Page 53


Dans cette perspective, l’analyse du secteur financier marocain fait ressortir le fait

qu’il est généralement marqué par une forte vulnérabilité qui se nourrie d’une volatilité

excessive des financements extérieurs et d’une insoutenabilité des positions externes et des

déficits budgétaires. De fait, et tout en partant de l’évidence que la solidité du système

financier est une condition indispensable au bon fonctionnement d’un régime de change

flexible, il faut dire que le marché financier marocain est considéré comme étant peu profond.

Des taux d’intérêts qui sont généralement en défaut de leurs rôles dans la gestion de la

liquidité et une relative absence de la gestion des risques représentent une réelle

problématique et une entrave qui laisse le processus de passage vers plus de flexibilité en

attente.

3. Gestion des réserves de change : un filet de sécurité face aux fluctuations erratique

Dans toutes les économies, la gestion des réserves de changes constitue une

composante essentielle de la gestion macroéconomique. De ce fait, la convertibilité totale

d'une monnaie exige l'existence d'un niveau de réserves de changes et de lignes de crédits

extérieures importantes même pour une courte période37.

Dans le but de se protéger face à des chocs externes tels que des fuites de capitaux

massives. Une politique d'ancrage plus ou moins fixe à une monnaie internationale nécessite

de disposer de réserves de change suffisantes pour pouvoir soutenir de manière crédible la

parité de la monnaie nationale. L’amenuisement des réserves de change est l’un des

principaux signes avant-coureurs des crises financières. Encore faut-il que ces réserves de

change ne soient pas entièrement absorbées par le service de la dette38.

D’après la littérature empirique, les pays choisissant d’abandonner la rigidité de leur

régime de change en faveur d’un arrangement flexible ont été généralement confrontés à des
37
BEN AYECHE Manel. (2013) L'impact de la convertibilité totale du taux de change sur la situation macro-
économique : Cas de la Tunisie, Mémoire De fin d études pour l’obtention du Diplôme de master de Recherche
En Finance et Banque,
38
Note de Conjoncture, Direction des Etudes et des Prévisions Financières.

ANNAKI Hicham Page 54


problèmes de mésalignement de leur taux de change associés à des déséquilibres externes

importants et un épuisement complet des réserves officielles. Ceci traduit une incapacité à

défendre la parité de la monnaie nationale et peut fragiliser le système financier et exacerber

des instabilités macroéconomiques39.

Ainsi, l’intérêt porté à la gestion des réserves de change est motivé par le rôle majeur

de « volant de prudence » permettant à la banque centrale de lisser les fluctuations erratiques

des taux de change, garantissant ainsi, une sorte de filet de sécurité contre tous les éventuelles

attaques spéculatives.

L’accumulation des réserves officielles peut être la première cible de la banque

centrale lorsque le pays envisage un passage serein vers un arrangement plus flexible. D’après

Agénor (2004), les phases initiales de transition sont souvent accompagnées de fluctuations

excessives de change d’où la nécessité de détention des stocks de réserve assez importants

pour faire face aux coûts de ces incidences macroéconomiques.

Dans cette perspective, l’estimation d’un niveau approprié ou optimal d’accumulation

des réserves officielles a fait l’objet de plusieurs études qui insistent toutes sur la nécessité de

prise en considération de certaines motivations préalables de détention des réserves afin de

pouvoir élaborer une véritable norme quantitative, notamment en s’appuyant sur les

enseignements des crises de change et les directives des instances internationales.

Pour l’économie marocaine, ceci n’étant pas en faveur d’une transition imminente

puisque le niveau des réserves ont connu une évolution assez mitigée et ne permettent de

couvrir que 4 mois d’importations en 2014 contre 12 mois en 2001 et ce suite aux

répercussions de la crise récente. La figure 24 ci-après nous permet une évaluation de ces

réserves par rapport à leur niveau adéquat. Si le volume des réserves est au-dessus de

l'indicateur métrique, le niveau des réserves est jugé adéquat sur la base du repère établi pour

les marchés émergents.


39
Op. Cit Page. 37

ANNAKI Hicham Page 55


Figure 24: Les réserves (%PIB) par rapport au repère d’évaluation de leur niveau adéquat

Source : FMI, 2013

Nous constatons que les réserves restent globalement à un niveau assez faible par

rapport à leur niveau adéquat. Ils représentent environ 78% du repère établi par le FMI pour

les réserves des marchés émergents. Ainsi, le succès d’une transition au Maroc doit

impérativement être soutenue par une politique d’expansion des réserves de change

notamment via la réalisation et le renforcement d’accords bilatéraux de change et ce en

incluant les questions monétaires et de change dans son processus d’intégration régionale.

ANNAKI Hicham Page 56


Section 2 : Les préconditions institutionnelles et opérationnelles :
1. Un marché de change suffisamment développé : déterminant majeur de la

valeur de la monnaie national

Selon plusieurs experts, la transition vers un régime plus flexible ne peut être faite

sans la prise en compte des caractéristiques du marché de change. Ce marché doit être

suffisamment liquide et efficient pour mieux expliquer l’évolution et la formation du taux de

change.

En effet, le marché de change marocain a été créé en 1996 dans le cadre d’un

processus global de libéralisation et de modernisation de l’économie. Il a marqué la fin du

monopole de BAM dans la gestion centralisée des cours des devises. Désormais, le niveau du

taux de change est déterminé par l’ensemble des intervenants dans l’activité de change et ce

en fonction de l’évolution de l’offre et de la demande, tout en restant à l’intérieur des bandes

fixées préalablement. Aussi, plusieurs techniques de couverture contre le risque de change ont

été introduites telles que celles qui se pratiquent sur les places financières internationales.

Toutefois, malgré ces avancées, le marché de change marocain reste très jeune et son

fonctionnement est loin de remplir pleinement sa mission d’assistance aux entreprises pour

améliorer leur performance sur les marchés extérieurs. La réglementation imposée et

l’interventionnisme exagéré des autorités monétaires expliquent le caractère illiquide, le

manque de profondeur et de transparence de ce marché.

Selon Duttagupta (2004), le système de fixité représente un déterminant majeur de ce

défaut de liquidité car il renforce le rôle des autorités monétaires sur le marché de change en

tant que principal intermédiaire de change. Ceci réduirait le rôle des différents intervenants de

change ce qui baisserait l’activité dans les marchés au comptant et à terme.

ANNAKI Hicham Page 57


L’économiste estime que ces faiblesses devraient, suite à la mise en place d’un régime

flexible, représenter un réel handicap pour la formation et la détermination des taux de

change.

Dans ce sillage, le passage vers plus de flexibilité doit amener l’autorité monétaire à

révisé la stratégie des interventions sur le marché monétaire des devises. La gestion formelle

de change permet aux autorités de mettre en place des règles de gestion bien définies,

facilitant l’atteinte d’un niveau de taux de change cible, alors que dans le cas d’une gestion

discrétionnaire, les pouvoirs publics n’annoncent pas d’objectifs de change ni de règles

d’intervention à utiliser. De manière générale, la flexibilité de change privilégie les

interventions discrétionnaires afin de corriger les mésalignements de change, réduire la

volatilité des cours et calmer l’agitation sur le marché40.

Certes, le Maroc a franchi de grandes étapes dans la libéralisation de change.

Néanmoins, selon certains économistes, BAM devrait continuer son chemin de libéralisation

en introduisant progressivement le flottement de change tout en se contentant d’un rôle de

superviseur au lieu de régulateur du marché. Ce nouveau rôle de supervision nécessite un plus

grand allégement de la réglementation de change41.

2. La mise en place d’une stratégie monétaire et choix d’un ancrage nominal

Il est généralement connu qu’en régime de change flexible, la politique monétaire

constitue un puissant instrument d'ajustement de l'économie. L'explication réside dans

l'indépendance de la masse monétaire de la situation de la balance des paiements. Ainsi, le

40
DUTTAGUPTA, R. et FERNANDEZ, G. (2004). Du fixe au flottant: aspects opérationnels du passage à la
flexibilité du taux de change.
41
ESMAK Hassan. (2016) Régimes de change et performance économique : cas du Maroc,

ANNAKI Hicham Page 58


contrôle de la monnaie dans le cadre de la politique monétaire est une condition fondamentale

pour l’adoption d’un régime de change plus flexible42.

L'incertitude sur le niveau et la volatilité du change et des politiques économiques

sous-jacentes par rapport au nouveau régime souple déstabilise intrinsèquement les attentes

des agents économiques. Ceci peut provoquer beaucoup d’incertitudes aux agrégats

macroéconomiques et peuvent contribuer à des doutes quant à la politique monétaire et le

nouveau taux de change « d'équilibre ».

L’abandon du système d’ancrage de change crée ainsi la nécessité de remplacer le taux

de change avec un autre point d'ancrage nominal et de redéfinir le cadre de la politique

monétaire. Ces deux tâches nécessitent à la fois le renforcement des capacités et la crédibilité

des autorités monétaires, et la planification à l'avance de la transition pour réussir une sortie

ordonnée43.

L’expérience nous montre que le passage vers un système de flexibilité impose à la

banque centrale de renoncer au ciblage de change comme l’un des engagements de la stratégie

monétaire choisie. Cette renonciation peut se faire de façon progressive avec la mise en place

de marges qui pourront être élargies en fonction du degré d’atténuation des tensions entre les

objectifs visés par les pouvoirs publics et aussi par rapport à l’objectif de la stabilité des prix.

Désormais, l’adoption d’un nouvel ancrage nominal44 devient d’une très grande utilité pour

contrecarrer aux effets déstabilisateurs de l’incertitude concernant le niveau et la volatilité du

taux de change sur les anticipations du marché45.

42
MOHAMED. D.S (2011). Le choix des régimes de change dans les pays de la région MENA: une analyse
probit. Économie internationale et politique économique, 8 (3), 275-305.
43
MOHAMED. D.S. (2007) Le choix du régime de change pour les économies émergentes, MPRA Paper No. 4075, posted
17. July.
44
Ancrage nominal : consiste à fixer une variable nominale comme objectif de la politique monétaire, trois
variables sont généralement utilisées comme cible : taux de change, un agrégat monétaire (dans la majorité des
cas M2) et inflation.
45
Op.cit. page 54

ANNAKI Hicham Page 59


Au Maroc, le FMI avance que « le cadre monétaire marocain devra évoluer de manière

à permettre le passage à un taux de change plus flexible. L’adoption d’un ancrage nominal

pour la politique monétaire, par exemple sous la forme d’un régime de ciblage de l’inflation, à

la place du taux de change, assurerait l’indépendance monétaire et aiderait à maintenir un

dosage de mesures plus adéquat, conjugué à un compte de capital plus ouvert46 »

3. Modèles de prévision développés :

La flexibilisation de change augmente la vulnérabilité aux risques externes et les effets

de bilans de l’ensemble des agents économiques. Ainsi, les échecs de la flexibilisation de

change dans plusieurs pays se sont généralement produits en raison de plusieurs difficultés

liées notamment aux déséquilibres macroéconomiques.

A cet effet, une transition ordonnée exige une gestion attentive des risques de change

et un examen minutieux de l’ensemble des informations disponibles pour la gestion du risque

de change. Quantifier la nature et le degré du risque du flottement dans le secteur financier et

non financier est considéré parmi les clés de la réussite d’une transition ordonnée dans la

mesure où elle peut avoir une incidence sur le rythme de sortie, le type de flexibilité ainsi que

sur les politiques officielles d'intervention.

L’une des conditions évidentes avancées par les récentes expériences des pays fait

référence à l’efficacité et le développement des modèles macroéconomiques de prévision et

de modélisation des dynamiques de la volatilité des taux de change mises en place.

Dans ce sens, les pouvoirs publics doivent, au préalable, maîtriser les processus

régissant le fonctionnement du marché de change qui interagissent dans la formation des taux

de change. La capacité d’analyse et d’interprétation de l’information recueillis devrait être

utilisée de façon efficace à travers une grande variété de techniques analytiques, de modèles

46
Consultations de 2013 au titre de l article IV du statut de l’FMI, Rapport du FMI No. 14/65, Mars 2014.

ANNAKI Hicham Page 60


économiques et de simulations de scénarios pour le processus de prise de décision concernant

la stratégie à mettre en place pour faire face aux déséquilibres47.

4. Le développement du climat des affaires

Le passage à la convertibilité totale d'une monnaie se traduit par une meilleure

transmission des effets positifs de la convertibilité en termes d'allocation des ressources à

l'économie. A ce stade, il faut libéraliser le cadre macroéconomique d'incitation à

l'investissement étranger et national.

La convertibilité totale d'une monnaie nationale doit être accomplie par l'élimination

des contrôles sur le commerce extérieur. Ainsi, il faut éliminer les barrières tarifaires, les

contrôles des prix et des taux d'intérêts et les restrictions sur le marché de travail et sur le

fonctionnement du système de marché.

De plus, la convertibilité totale exige l'existence des capacités du climat des affaires

pour stimuler l'investissement productif privé.

47
ESMAK Hassan, Op.Cit. Page 58

ANNAKI Hicham Page 61


Il est généralement admis qu’un ensemble de conditions institutionnelles,

macroéconomiques et financières doivent être satisfaites pour réussir la transition et assurer le

bon fonctionnement d’un régime de change flexible. Parmi ces conditions, on trouve

généralement:

Un marché de change suffisamment développé comme étant un déterminant majeur de

la valeur de la monnaie nationale c.à.d. doit être suffisamment liquide et efficient pour mieux

expliquer l’évolution et la formation du taux de change.

Une politique de gestion des réserves officielles adéquate en tant que le meilleur filet

de sécurité contre les attaques spéculatives et un gage de la capacité des autorités à lisser les

fluctuations erratiques des taux de change.

Une bonne stratégie de politique monétaire et un choix d’un ancre nominal permettrait

de réduire l’inflation et garantir une stabilité des prix reflétant une meilleure compréhension

de la crédibilité des autorités monétaires.

ANNAKI Hicham Page 62


Chapitre III : Etude comparative :

Maroc, Egypte et Turquie

ANNAKI Hicham Page 63


Contrairement à la Turquie ou à l’Egypte, le Maroc allait s’offrir le luxe de changer le

régime de change d’une manière volontaire, après avoir réuni les pré-requis nécessaires pour

la mise en place le système de change flexible.

Vu le degré d’ouverture de son économie, le Maroc, à l’instar de certain pays

émergents, s’apprête à aménager graduellement (voir annexe) son régime actuel de change

fixe vers un régime plus souple.

D’abord, il faut admettre qu’une transition douce d’un régime de change fixe vers un

régime de change plus flexible ne peut être effectuée si un certain nombre de pré-requis ne

sont pas réunis. Une sortie ordonnée exige, également, un effort de sensibilisation et de

concertation, de bien se préparer et d’agir au bon moment une fois les conditions sont

favorables.

L’objectif de ce chapitre est de présenter le degré de satisfaction des prérequis pour le

cas marocain, à l’instar de certain pays comme Egypt. Et la Turquie.

ANNAKI Hicham Page 64


Section 1 : Degré de satisfaction des prérequis pour le cas marocaine

Au cours de ces dernières années et grâce à de régulières réformes structurelles et à

une gestion macroéconomique rigoureuse, le Maroc a pu atténuer les tensions de déséquilibre

qui pesaient sur l’économie marocaine pendant quelques années, en dépit des turbulences

économiques et financières et des mutations rapides de l’environnement international.

1. Déficit de la balance commerciale :

Le déficit de la balance commerciale est élevé. En effet les besoins en importations ne

sont qu’à moitié résorbés par les exportations. La situation de la balance commerciale a

connu une détérioration entre 2008 et 2012 puis a repris son cours d’amélioration entre 2012

et 2016. Cette amélioration est, en effet, due en grande partie à la réforme de la caisse de

compensation.

Ainsi, les prix sur le carburant ne sont plus subventionnés. Le gaz pour la cuisine, le blé

et me sucre qui représentaient 6,5% du PIB en 2012 ne sont plus que de 1,2% du PIB en

2016. Parallèlement à cela, la part allouée au budget d’investissement s’est améliorée suite

aux efforts déployés pour contenir la progression des dépenses courantes.

De fait, les dépenses en capital sont passées de 5,4 % du PIB en 2013 à 6,5 % en 2016.

Les perspectives budgétaires demeurent bien orientées. Le déficit budgétaire devrait

continuer à baisser pour atteindre 3,5 % du PIB en 2017 et 3,1 % du PIB en 201848.

48
Rapport de la Direction des Etudes et des Prévisions Financières, 2017

ANNAKI Hicham Page 65


Figure 25: Part du déficit de la balance commerciale du PIB

Source : BNP Paribas, 2016

Toutefois, certains secteurs à forte valeur ajoutée (automobile, électronique,

aéronautique…) ont émergé et sont supportés par des investissements étrangers.

Le secteur automobile a connu une amélioration remarquable en matière de ventes à

l’étranger. En effet, depuis le démarrage de l’usine Renault de Tanger en 2012, celles-ci ont

augmenté de plus de 20 % par an, dépassant depuis 2014 les exportations traditionnelles de

phosphates et de textiles.

Les perspectives à moyen et long terme dans le secteur sont d’autant plus

prometteuses avec l’arrivée du constructeur français, Peugeot-Citroën, et la décision de

Renault de créer une nouvelle plateforme d’approvisionnement49.

49
AIFQUI Saloua, Op.cit. Page 31

ANNAKI Hicham Page 66


Le développement du secteur aéronautique fût accompagné par la création de parcs

technologiques et de zones de libre-échange par l’Etat, ce qui a attiré les entreprises

étrangères à s’installer au Maroc50.

Figure 26: Evolution des exportations par produits

Source : Office des changes, 2016

2. La solidité du secteur bancaire

Quant à la solidité du secteur bancaire, le Maroc suit une approche graduelle et ordonnée

en matière de réformes financières qui ont permis la déréglementation du secteur bancaire et

le renforcement de la réglementation prudentielle et la supervision bancaire.

Selon certains indicateurs, le système bancaire du Maroc est devenu plus résilient au

regard des ratios de solvabilité et de liquidité des banques marocaines qui demeurent

conformes aux dispositions prudentielles, tel qu’édicté par le dispositif de Bâle III, entré en

vigueur au Maroc en 2014. Ainsi :

50
Op.cit.Page 65

ANNAKI Hicham Page 67


 le ratio de solvabilité moyen des banques s’est situé à 13,7% en 2015, au-dessus du

seuil minimum de 12% édicté par la réglementation prudentielle en vigueur ;

 le ratio de liquidité à court terme, transposé des normes de Bâle III, s’est établi à

168% à fin décembre 2015 contre 130% en 2014, soit un niveau supérieur au

minimum requis (60% fixé pour l’année 2015 et le seuil minimum cible à fin 2018 de

100%). Ce ratio, dont l’entrée en vigueur est intervenue en juillet 2015, impose aux

banques de disposer de suffisamment d’actifs liquides de haute qualité pour

surmonter une crise grave de liquidité qui durerait 30 jours.

Toutefois, les banques marocaines sont appelées à améliorer la qualité de leur bilan au

regard de la part des créances en souffrance dans le total des crédits distribués qui s’est située

à 7,3% en 2015 contre 6,9% en 2014 et 6% en 2013 et ce, en dépit de la décélération du taux

de croissance des créances en souffrance de 20,2% en 2014 à 9,3% en 2015.

3. L’évolution des réserves de change

S’agissant des réserves de change, la performance de l’économie nationale s’est traduite

par l’amélioration des réserves de change atteignant 252 milliards de dirhams à fin 2016, au

lieu de 224,6 milliards de dirhams en 2015, soit l’équivalent de 6,4 mois d’importations de

biens et services contre près de 4 mois en 2012. Ces réserves se sont améliorées sous l’effet

d’une atténuation sensible du déficit commercial lié, en particulier, à la baisse des prix du

pétrole, à l’émergence de nouveaux secteurs exportateurs et à l’amélioration de l’attractivité

du Maroc aux Investissements Directs Etrangers.

Les réserves de change constituent, au Maroc, l’instrument de base de la politique

monétaire sous le régime de change actuel, ainsi leur niveau reflète le degré de vulnérabilité

du pays aux chocs financiers.

ANNAKI Hicham Page 68


L’évaluation des réserves de change se faisait traditionnellement selon trois mesures :

 Le taux de couverture des importations (3 mois)

 Le taux de couverture de la dette extérieur à court terme (100%)

 Risque de fuite de capitaux : un minimum de 20% de M2

Une nouvelle approche est développée par le FMI pour déterminer le niveau optimal des

réserves : méthode ARA Métrique avancée. Cette approche consiste à :

 Identifier les différentes sources de risque dans la balance des paiements qui impactent

le niveau des réserves de change, à savoir, les exportations, la dette extérieur, les

autres engagements envers les non-résidents et la fuite des capitaux,

 Détermination du niveau des réserves de change sur la base du risque relatif à chacune

de ces sources,

 Fixation d’un taux de couverture cible par rapport au niveau optimal,

La Banque centrale affirme avoir un niveau optimal de réserves de change, qui permet le

passage à la flexibilité du Dirham. Un niveau jugé optimal grâce à la méthode ARA, ou la

méthode ARA ajustée (en cas de contrôle de capitaux), dont voici les formules:

Méthode ARA= 10%*(exportations) + 30%*(dette extérieure à court terme) + 10%*(masse

monétaire M2) + 20%*(engagements vers les non-résidents)

Méthode ARA ajustée= 10%*(exportations) + 30%*(dette extérieure à court terme) +

5%*(masse monétaire M2) + 20%*(engagements vers les non-résidents)

En gros, la formule de l’ARA Metric doit déboucher sur un niveau des avoirs

extérieurs plus important que les exigences en réserves minimales, soit un ratio égal ou

supérieur à 100%. Et en voici les résultats, tels que présentés par la Banque centrale.

ANNAKI Hicham Page 69


En cas de régime fixe, le niveau optimal de réserves est déterminé par l’équation suivante :

En cas du régime flottant :

L’analyse de la situation des réserves au Maroc montre bien que le pays dispose d’un

niveau des avoirs extérieurs est plus important que les exigences en réserves minimales. En

effet, depuis 2013, le niveau de ces réserves ne cesse de s’améliorer.

Figure 27: Evaluation des niveaux de réserves adéquats par la méthode ARA ajustée

Source: Bank-Al-Maghrib, 2016

En 2015, le Maroc n'était pas éligible au passage à un régime de change flexible, avec

un ratio de 94% pour la méthode ARA. En ajusté, il était à 123%.

Par ailleurs, les estimations pour 2016 donnent un ratio de 102% seulement. Non

seulement ce ratio es faible, mais il est également calculé sur des prévisions qui se sont

avérées être très optimistes.

Sur les deux méthodes, après des pics à 102% (en 2010, ARA) et 139% (en 2010,

ARA ajusté), les ratios étaient repartis vers une forte baisse.

ANNAKI Hicham Page 70


Les fondamentaux étaient en 2010 bons, mais pas structurellement puisqu'ils sont

redescendus. On se souvient des années 2011 à 2013 marquées par un creusement du déficit,

de l'endettement et une baisse des réserves de change.

Les ratios ARA et ARA ajustés dans les tableaux ci-dessus, ne tiennent pas compte

des changements de conjoncture et des baisses de performances sur les plans budgétaires, du

compte courant et de l'endettement.

Il est donc légitime de se demander si les calculs ne sont pas à refaire, avec les

nouveaux chiffres arrêtés. Tout comme il est légitime de se demander si les fondamentaux de

l'économie marocaine sont solides, ou bien s'ils n'affichent qu'une solidité passagère due à des

cours de pétrole en berne et aux dons du CCG.

Figure 28: Evolution des réserves de changes au Maroc en milliards de dollar et en mois
d’importations

Source : Bank-Al-Maghrib, Office des changes, BNP Paribas, 2016

ANNAKI Hicham Page 71


4. La maîtrise des risques de change :

Concernant la maîtrise des risques de change, il importe de souligner que l’impact de la

variation du taux de change reste maîtrisable grâce aux efforts déployés pour atténuer

l’exposition aux fluctuations des cours de change des devises et pour minimiser leur incidence

sur le stock et le service de la dette.

En effet, la gestion active de la dette extérieure, grâce aux opérations du refinancement de

la dette onéreuse et des opérations de remboursement par anticipation, a permis d’écarter le

risque d’enchérissement du remboursement des dettes contractées en devises faibles.

Cette gestion a permis aussi de réduire le taux d’intérêt moyen de 5,1% en 2010 à 4,4%

en 2014, tandis que l’échéance moyenne passait de 5,7 ans à 6,5 ans.

Notons également que la structure du portefeuille de la dette du Trésor est dominée par la

dette libellée en dirhams dont la part s’est établie à 77,2% en 2015 en hausse de 1,6% par

rapport à 2014. Tandis que la part de la dette libellée en devise a enregistré une réduction

remarquable passant de 44,3% en 2000 à 22,5% en 2015.

Concernant la composition par devises la dette extérieure, sa part libellée en euro a baissé

pour s’établir à 75,9% en 2015 contre 78,8% en 2014, en faveur de celle du dollar qui a

augmenté à 17,7% à fin 2015 contre 14,5 en 2014. Ce renforcement du dollar est l’effet de

l’actualisation des pondérations du panier de cotation du dirham, intervenu le 13 juillet 2015,

qui a porté la pondération du dollar à 40% au lieu de 20%, et ce pour mieux refléter la

structure des échanges extérieurs du Maroc51.

De même, et eu égard en la capacité de notre pays d’honorer ses remboursements de la

dette publique, l’agence Standard & Poor’s a maintenu sa perspective pour le Maroc à

51
Op.cit. Page 65

ANNAKI Hicham Page 72


« stable » en 2015, tout en confirmant par ailleurs sa note de crédit souverain 52 à court et à

long termes en monnaie nationale et étrangère de «BBB-/A-3»53.

Ces performances ainsi enregistrées, présentent quelques opportunités au Maroc pour

enclencher une transition graduelle vers un régime de change flexible.

Notons que le Maroc préconise la transition vers un régime de change plus flexible dans la

perspective d’évoluer vers un régime de ciblage d’inflation. Ce dernier permettra un ancrage

nominal clair dans la conduite de la politique monétaire, en ciblant directement l’inflation, à

l’encontre des agrégats de monnaie et de crédit qui peuvent perdre de leur fiabilité et de leur

utilité en tant qu’objectifs intermédiaires. Le ciblage d’inflation nécessite une grande

transparence et une communication régulière avec le public, ce qui renforce la crédibilité de

la politique monétaire. Or, l’adoption d’un régime de ciblage d’inflation nécessite à son tour

des préconditions :

 un engagement institutionnel qui fait de la stabilité des prix le premier objectif

de la politique monétaire, ce qui suppose une indépendance de la banque

centrale ;

 une annonce publique d’un objectif d’inflation à moyen terme ;

 un taux de change flexible ;

 une capacité technique solide et des modèles de prévisions de l’inflation.

52
Une dette souveraine : est une dette émise ou garantie par un émetteur souverain, c'est à dire un État ou une banque
centrale, mais en aucun cas une entreprise ou un individu. Ces institutions sont alors redevables sous la forme d'obligations
soit contractées auprès de banques, soit auprès du marché financier public.
53
Il s'agit de la note que l'agence de notation financière Standard & Poor's a attribuée au Maroc. Un résultat qui reste
inchangé par rapport à la dernière évaluation du royaume.

ANNAKI Hicham Page 73


 Eventuels apports de la flexibilité :

 Permettre l’ouverture du Maroc sur l’économie internationale ;

 Stimuler la compétitivité de l’économie marocaine ;

 Faire face aux chocs réels et aux déséquilibres exogènes ;

 Accompagner le développement du secteur financier ;

 Prévenir les crises de change et atténuer la pression sur les réserves de change

Tableau 3 : Régime de change actuel vs Régime cible :

Régime actuel Régime cible

 Bank-Al-Maghrib satisfait l’ensemble  adjudications de devises : à la


des besoins en devises des opérateurs, hollandaise (au prix demandé), avec
sans limite et sans ajustement sur les un montant prédéterminé, en EUR ou
prix. en USD.
 interventions aux
extrémités de la bande.
 interventions discrétionnaires a
l’intérieur de la bande.
Source : Etabli par auteur

ANNAKI Hicham Page 74


Section 2 : expérience marocaine face à celles de l’Egypte et la Turquie :

1. Cas d’Egypte :

 Contexte de libération de livre égyptienne

Le 3 novembre 2016, la Banque centrale égyptienne annonçait le passage à un régime

de change flottant entrainant dans la journée une baisse de 48% de la valeur de la livre

égyptienne contre le dollar. Cette décision s’inscrivait alors dans le cadre de réformes

économiques structurelles, conditions à l’obtention d’un prêt de 12Mds$ du FMI sur une

période de 3 ans. Un prêt nécessaire pour reconstituer les réserves en dollars qui ne

représentaient alors que 4 mois d’importations.

 effet de libération sur économie égyptienne

Un an après, les effets sur l’économie égyptienne sont globalement positifs. Une

majeure partie des réformes annoncées ont été entreprises, à l’instar de la réduction des

subventions étatiques dans les carburants et l’électricité ou encore de l’instauration de la TVA

à 13%.

Le retour du tourisme et des investissements étrangers ont aussi participé à restaurer

les réserves de change qui à fin septembre atteignaient 36,1Mds$, soit 8 mois d’importation,

un niveau équivalent à celui de décembre 2010.

Dans le même temps, le passage au régime de change flottant a entrainé une inflation

galopante qui a même atteint plus de 30% en septembre et octobre 2017. Cette situation a

poussé la Banque centrale égyptienne à revoir plusieurs fois à la hausse son taux directeur qui

est passé de 11,75% en octobre 2016 à 18,75% un an après. La hausse des taux couplée à cette

forte inflation n’a paradoxalement pas entrainé de crise sociale quand certains produits ont vu

ANNAKI Hicham Page 75


leur prix doubler en un an alors que dans le même temps les salaires n’ont augmenté que de

30%54.

Pour les entreprises égyptiennes, le passage au régime de change flottant a été

salutaire: le retour de la liquidité et la fin du contrôle des changes ont permis de reconstituer

les stocks et de relancer les programmes d’investissement.

Sur le court terme, les grandes gagnantes ont été les entreprises exportatrices avec une

base de coût en livre égyptienne. C’est le cas d’ALEXANDRIA CONTAINERS & CARGO

HANDLING qui gère les terminaux à conteneurs des ports d’Alexandrie et d’El-Dekheila.

Cette société qui réalise 100% de son chiffre d’affaires en dollars avec 100% de ses coûts en

livre égyptienne, a vu son résultat plus que doubler sur la première moitié de l’exercice 2017-

2018.

Sur le moyen terme, ce sont les entreprises imperméables à l’élasticité prix qui ont été

en mesure de se démarquer. En janvier 2017, EGYPTIAN INTERNATIONAL

PHARMACEUTICALS INDUSTRIES, société pharmaceutique partiellement détenue par

l’état, a augmenté de 50% le prix de 97 médicaments (80% du chiffre d’affaires) sans impact

négatif sur les volumes55.

A plus long terme, ce seront les entreprises qui bénéficieront de la croissance

démographique et de l’émergence de la classe moyenne qui profiteront des effets de ces

mesures structurelles. Rappelons que l’Egypte compte 95 millions d’habitants dont les deux

tiers ont moins de trente ans.

Dans cette optique, nous privilégions les sociétés de consommation de base à l’instar

de DOMTY, producteur de jus et de fromages. Nous investissons également dans le secteur

54
Selon la Banque centrale égyptienne 2017.
55
AITOUTOUHEN Latifa. (2017) Flexibilisation De Régime De Change

ANNAKI Hicham Page 76


de la consommation discrétionnaire avec des sociétés telles que GHABBOUR AUTO, leader

de la distribution automobile avec les marques Hyundai, Mazda et Geely.

Par ailleurs, et cela reste dans l’ADN de notre gestion, nous continuons de privilégier

les sociétés qui opèrent également hors de leur marché domestique. C’est le cas

d’ELSEWEDY ELECTRIC (câbles et matériel électrique) ou d’ORIENTAL WEAVERS

(moquettes et tapis) qui réalisent toutes deux une part significative de leur chiffre d’affaires à

l’international.

A fin novembre, l’Egypte représente 10% de l’actif investi d’AFRICA PICKING

FUND. Un niveau qui devrait graduellement tendre vers les 15% en 2018 avec une attention

particulière à la situation économique (stabilisation de l’inflation, baisse des taux), politique

(l’élection présidentielle aura lieu au premier semestre 2018) et sociale.

Dans ce contexte, nous continuons de faire notre métier de sélection de valeurs en

restant à l’écoute des entreprises (nous avons rencontré 30 sociétés égyptiennes depuis le

début de l’année) qui comme nous partagent une vision long terme et font de la création de

valeur une priorité.

 Une amélioration sensible de la liquidité en devises

Depuis novembre 2016, la décision de laisser flotter la livre et ’accord de prêt conclu

avec le FMI ont significativement modifié les perspectives économiques à court terme. La

livre s’est dépréciée de plus de 40% et une partie de la liquidité en devise est revenue dans le

système bancaire, notamment grâce à la hausse sensible des taux d’intérêt (+300 Pb pour le

taux principal de la Banque centrale d’Egypte, ou BCE). Environ USD 4 mds sont revenus

dans le système bancaire officiel et plus de USD 1,3 md sont entrés dans le pays sous forme

ANNAKI Hicham Page 77


d’investissements de portefeuille. Les flux de capitaux officiels, quant à eux, devraient

s’élever à plus de 10 milliards de $ en 2016/201756.

 Vers une réduction du déficit courant

Les trois rentes traditionnelles sont actuellement sous pression. Les comptes externes

énergétiques continuent de se dégrader étant donné le recours croissant aux importations de

gaz à un prix relativement élevé. Le déficit des comptes énergétiques devrait atteindre le

niveau record de USD 4,6 mds en 2017/2018.

La mise en production du champ gazier Zohr devrait permettre d’atteindre

l’autosuffisance en gaz d’ici 2019.

Le secteur du tourisme est sinistré. Depuis 2013, la fréquentation et les recettes se sont

réduites de plus de moitié. La situation pourrait s’améliorer à court terme avec la levée des

restrictions de voyage pour certains pays. La hausse de la fréquentation en provenance de

Chine ainsi que la dépréciation de la livre devraient stimuler cette tendance. Cependant, la

situation sécuritaire continue d’être difficile et la progression de l’activité du secteur devrait

être très lente.

Les recettes du canal de Suez stagnent malgré le récent doublement de la capacité.

Cela est principalement dû au fort ralentissement du commerce mondial en 2016 (+1,9%

après 2,7% en 2015 selon le FMI.

 Pression sur les finances publiques

L’accord de prêt signé avec le FMI permet au gouvernement de poursuivre sa

politique de réforme budgétaire initiée en 2014. Les deux principales mesures sont la réforme

et la hausse du taux de TVA, et la baisse des subventions à l’énergie (électricité et pétrole).

56
https://afrique.latribune.fr/economie/budget-fiscalite/2018-02-05/l-egypte-remet-a-flot-ses-reserves-
de-change-a-l-approche-d-une-nouvelle-levee-obligataire-767287.html consulté le 16/09/2018

ANNAKI Hicham Page 78


Selon le FMI, l’ensemble des mesures budgétaires devrait apporter 2,9% de PIB de

revenu net supplémentaire.

Etant donné l’ampleur des déficits (11,8% du PIB en moyenne depuis cinq ans) et la

rigidité de certaines dépenses, la baisse du déficit budgétaire sera lente. Les intérêts de la dette

publique et les salaires représentent respectivement 49% et 43% du revenu budgétaire total.

Le maintien de taux d’intérêt élevés et la nécessité de faire face à la demande sociale en

période de forte inflation rendront difficile la maîtrise de ces deux postes de dépense.

Malgré la mise en place des réformes, le solde budgétaire primaire devrait rester

légèrement négatif à moyen terme (inférieur à 1% du PIB à partir de 2017/18).

Dans ce contexte, la dette publique devrait se réduire mais se maintenir à un niveau

élevé. D’un niveau estimé à 94% du PIB en 2015/2016, la dette publique devrait atteindre

87% du PIB en 2017/2018. Dans le même temps, la part de la dette externe doublera pour

atteindre environ 20% de la dette publique totale.

Le flottement de la livre, l’amélioration de la liquidité en devises, l’accélération du

rythme des réformes budgétaires et la mise en production du champ gazier Zohr auront

indiscutablement des conséquences macroéconomiques positives.

Cependant, les comptes publics et externes resteront déficitaires à moyen terme et les

autorités devront faire face à une pression sociale grandissante dans un contexte fortement

inflationniste. Seul le retour d’une croissance soutenue (notamment par des investissements

créateurs d’emplois en dehors du secteur énergétique) pourrait permettre à l’économie

égyptienne de sortir de cinq années de forte dégradation57.

57
Ministre de Finance égyptien

ANNAKI Hicham Page 79


2. Cas de la Turquie :

L’expérience turque est également riche en enseignements pour les pays de la région

MENA. En effet, ce pays a fait face à une inflation élevée chronique sur presque trois

décennies depuis 1970.

Les constats ont été concluants dans la mesure où la Turquie annonce être un régime

de change flexible, mais en réalité sa banque centrale continue à garder un œil sur le

flottement de la Livre turque, contredisant de fait son choix.

L’objectif primordial de la décision de flottement de la Livre turque est de réduire le

taux élevé d’inflation endémique, la Turquie a adopté en 2002 un régime de ciblage implicite

d’inflation58.

Cette politique a permis de renforcer l’indépendance de la banque centrale et réduire

l’inflation. La banque centrale est parvenue à faire baisser l’inflation de 68 % en 2001 à 7.7 %

en 2005.Ainsi, cette période transitoire (2002-2005) s’est couronnée de succès et a favorisé le

renforcement des prérequis institutionnel et technique pour un passage au régime de ciblage

explicite en 200659.

Néanmoins, la politique de taux d’intérêt proches de zéro et l’assouplissement

quantitatif60 menés par les banques centrales des économies développées suite à la crise

financière, ont eu des répercussions importantes sur l’économie turque61.

58
LEIGH, D., ROSSI, M., 2002. Passage du taux de change en Turquie. Document de travail n ° 02/204
(Washington: FMI).
59
ARA Volkan, CEM.S et L.Korap (2007): «Impact exchange rate changes on domestic inflation: the Turkish
experience», p.2 - 11, Août.(Disponible sur http://www.tek.org.tn)
60
Assouplissement Quantitatif « ou Quantitatif Easing » : Désigne un politique monétaire dit non conventionnel
consistant pour une banque centrale à racheter massivement des titres de dettes aux acteurs financiers,
notamment des bons de trésor ou des obligations d’entreprises, et dans certaines circonstances des titres adossés
à des actifs comme des titres hypothécaires.

ANNAKI Hicham Page 80


Le processus de normalisation de la politique monétaire des banques centrales

influentes a déclenché un vaste mouvement de réallocation d’actifs sur les marchés financiers

internationaux et a accentué la volatilité sur le marché de change en Turquie.

Ainsi, la banque centrale de république turque a relevé plusieurs défis depuis 2007 :

des afflux massifs de capitaux et expansion rapide du crédit à l’appréciation du taux de

change réel et accroissement des vulnérabilités face aux inversions brutales des flux de

capitaux.

La CBRT a ainsi revu son cadre de politique monétaire, (objectifs et instruments), en

faveur d’une plus grande surveillance du coût de sa monnaie pour une meilleure stabilité

financière en encadrant le taux de change de sa livre.

61
KARA et OGUNC (2005): «Exchange rate pass-through in Turkey : It is slow,but is it really
low ?» ,département de recherche (CBRT), document de travail n° 05/10,Avril.

ANNAKI Hicham Page 81


Tableau 4: Processus de flexibilisation du taux de change au Maroc, Egypte et la Turquie

Maroc Egypte Turquie

Réforme Souhaitée, préparée, Forcée et désordonnée Forcée et désordonnée

Graduelle et ordonnée (novembre 2016) (2001)

- Adéquates (entre -Inadéquates (50% -Inadéquates


100 et 150 %de de l'ARA Metric (68%de l'ARA
Réserves de change l'ARA metric) Metric)
- Baisse de 25
-Croissance des milliards de dollars -Baisse de 7,5
réserves de change milliards de dollars
en moins d’une
semaine

Inflation Faible (inférieure à Elevé (autour de 23%) Elevé (dépassant les


2%) 30% en 2001
actuellement à
8,5%)

Réglementation de Compte de capital Compte de capital Compte de capital


change ouvert pour les non- ouvert pour les ouvert pour les
résidents et résidents et les non- résidents et les non
partiellement ouvert résidents. résidents.
pour les résidents.

Investissement dans
les marchés de
Faible Moyen Elevé
capitaux (spéculatif)

Marché parallèle non Oui (presque le double) non

Source : Bank Al-Maghrib, 2016

ANNAKI Hicham Page 82


 Synthèse de l’étude comparative :

Le premier constat qui en ressort d’après le tableau est que la Turquie et, plus

récemment, l’Egypte étaient contraintes d’abandonner leur régime de change fixe lorsqu’ils

sont passés au flexible. Pour le cas du Maroc, la situation est totalement différente car ce

changement de régime de change est volontaire.

L’absence de contraintes à ce niveau permet au royaume d’entamer le processus de

migration vers le nouveau régime de change d’une manière progressive et préparée, ce qui

permet de se prémunir contre l’impact sur la monnaie d’une migration brusque. C’est ce

qu’ont dû subir les deux pays précités, ainsi que plusieurs autres économies qui ont changé de

régime sous la contrainte des crises.

Ensuite, il faut bien noter que le royaume présente actuellement certains indicateurs

macro-économiques qui devraient jouer en sa faveur. Le premier est celui de l’inflation.

Depuis plusieurs années, le Maroc la maintient en dessous du taux de 2%. Or, lorsque la

flexibilité a été introduite chez les deux pays “benchmarkés”, elle était très élevée : plus de

23% en Egypte et plus de 30% en Turquie.

Le Maroc est mieux préparé à digérer les pressions inflationnistes qu’il risque de subir

en changeant de régime de change.

L’autre indicateur qui fait la différence dans le cas du Maroc est lié aux réserves en

devises disponibles au moment du changement de régime. Actuellement, le Maroc affiche un

«ARA Metric» (indicateur évaluant le stock de devises d’un pays en fonction de ses besoins à

court terme) compris entre 100% et 150% alors qu’il n’était que de 50% en Egypte et de 68%

en Turquie lorsqu’elles ont changé leur régime de change.

ANNAKI Hicham Page 83


Cette situation est de nature à assurer au marché national une offre en devises non

négligeable qui permettra au Dirham de maintenir sa valeur, ou du moins, lui évitera de chuter

brutalement. Ceci est d’autant plus probable lorsque l’on sait que le Maroc dispose d’une

réglementation des changes qui ne permet pas une ouverture totale des comptes en capital,

notamment ceux détenus par les résidents.

En effet, si cette réglementation est maintenue en l’état, elle réduit les risques d’une

fuite des devises à l’étranger qui aurait pour impact une baisse de la valeur d’un Dirham qui

serait plus abondant sur le marché.

D’autres arguments, comme une situation politique plus stable, un marché parallèle des

devises où les taux de changes restent en ligne avec ceux du marché officiel, ainsi que la

faible ampleur des investissements étrangers à but purement spéculatif, sont également

présentés pour faire la différence entre le contexte marocain. Ceci, au moment où la transition

vers le régime de change flexible est enclenchée et celui des autres pays qui ont subi des

crises lors de leurs transitions.

Il reste maintenant juste à poursuivre le processus d’une manière permettant au royaume

de tirer profit de ses atouts et, surtout, d’éviter les erreurs que d’autres pays ont commises.

ANNAKI Hicham Page 84


Globalement, la situation économique et financière donne un signal approprié au

Maroc pour assouplir son régime de change. Les prérequis nécessaires pour transiter vers un

régime de change plus flexible semblent favorables. Toutefois, au regard des expériences

étrangères, il s’agit d’un processus qui s’étale sur plusieurs années et qui nécessite en parallèle

des mesures d'accompagnement en termes de d’information, de sensibilisation et de

concertation avec les différents opérateurs.

La transition au flottement devrait se faire de façon graduelle et suivant des étapes et

selon le degré de développement des institutions et des marchés. Le passage d’une étape à

l’autre ne sera décidé qu’après évaluation de l’étape précédente. Sachant qu’au cours de la

première étape, le régime actuel de fixité sera à peu près maintenu avec un certain

élargissement de la bande de fluctuation du dirham.

Toutefois, chaque révision de la structure du panier de devises auquel est rattaché le

dirham devrait tenir compte de la structure des échanges extérieurs.

ANNAKI Hicham Page 85


Conclusion générale

En guise de conclusion Les expériences menées par plusieurs pays en ce domaine,

démontrent que la transition peut prendre plusieurs années. «Nous allons essayer de le faire en

moins de temps, mais nous ne nous précipiterons pas, la transition sera graduelle et

contrôlée62»

Il faut dire que le Maroc entame cette réforme de manière choisie et non forcée comme

ce fut le cas pour plusieurs pays durant cette dernière décennie (Turquie et plus récemment,

Égypte).

L’objectif, à terme, étant de passer d’un régime de change fixe, vers un régime flottant

où les taux seront déterminés par la seule règle de l’offre et de la demande sur le marché des

changes. Concrètement, le régime des taux de change flottants ou flexibles ne comporte pas

de parité officielle entre les différentes monnaies. Pour fixer la valeur d’une monnaie, les

autorités ne se basent pas sur une valeur étalon, ni sur un panier de monnaies (comme c’est le

cas pour le Maroc actuellement) mais sur un taux de change qui varie librement sur le marché

des changes en fonction de l'offre et de la demande.

Dans le système actuel de change fixe, BAM satisfait l’ensemble des besoins en

devises des opérateurs, sans limite et sans ajustement sur le prix. Cela permet donc aux

opérateurs de payer leurs fournisseurs en devises (euro ou dollar) selon un régime de change

plus ou moins fixe. La parité du dirham fluctuant tout de même à l’intérieur d’une bande de

fluctuation de 5%, Soit +2,5% à la hausse et -2,5% à la baisse.

62
Mounir Razki, directeur responsable des opérations monétaires et de change au sein de Bank Al-Maghrib
(BAM).

ANNAKI Hicham Page 86


Un tel régime permet donc d’assurer une certaine stabilité du taux de change qui

demeure contrôlé et surveillé par la Banque centrale, mais n’offre aucune garantie dans le cas

d’un choc externe. Dans le cas d’une crise financière, d’un ralentissement des mouvements

commerciaux et financiers, d’une hausse des prix des matières premières ou d’une catastrophe

naturelle, un impact important sur le flux de capitaux et par ricochet sur le marché des

changes pourrait avoir lieu.

Dans le cadre d’un régime de change fixe, toute importante fluctuation devra être

compensée sans délai par la Banque centrale en puisant dans ses réserves de change, ce qui

fragilisera l’économie du pays et surtout réduira drastiquement ses avoirs en devises

étrangères.

Pour ce qui concerne les prérequis nécessaires de transition au régime de change

flexible affirme FMI (2010) affirme à ce titre que « les autorités monétaires marocaines

disposent des moyens et des capacités nécessaires pour le passage à un régime formel de

ciblage de l’inflation et de taux de change plus flexible ».Et que la situation économique et

financière donne un signal approprié au Maroc pour assouplir son régime de change. Les

prérequis nécessaires pour transiter vers un régime de change plus flexible semblent

favorables.

Dans une perspective d’avenir, certains économistes estiment que le moment est peut-

être plus propice à une évolution de la politique de change. En particulier, les conditions

préalables à l’adoption d’un régime de change plus flexible sont en grande partie réunies.

Pour d’autres, malgré la popularité grandissante envers la flexibilisation des régimes de

change, son adoption pose un certain nombre de questions, et reste l’objet d’un âpre débat

dans la littérature académique.

Au cœur de ce débat réside la question du cadre institutionnel de l’économie

marocaine. En effet, pour être efficace, il est généralement admis qu’un ensemble de

ANNAKI Hicham Page 87


conditions institutionnelles doivent être satisfaites. Parmi ces conditions, on retrouve

généralement trois ingrédients :

Un marché de change suffisamment développé : comme étant un déterminant majeur

de la valeur de la monnaie nationale;

Une politique de gestion des réserves officielles adéquate : en tant que le meilleur filet

de sécurité contre les attaques spéculatives et un gage de la capacité des autorités à lisser les

fluctuations erratiques des taux de change;

Une bonne stratégie de politique monétaire et un choix d’un ancre nominal :

permettrait de réduire l’inflation et garantir une stabilité des prix reflétant une meilleure

compréhension de la crédibilité des autorités monétaires.

Toutefois, au regard des expériences étrangères, il s’agit d’un processus qui s’étale sur

plusieurs années et qui nécessite en parallèle des mesures d'accompagnement en termes

d’information, de sensibilisation et de concertation avec les différents opérateurs.

ANNAKI Hicham Page 88


Bibliographie

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ANNAKI Hicham Page 91


Annexe

Etapes à suivre pour une transition ordonnée :

Source: Bank-Al-Maghrib

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Table des matières

Résumé ....................................................................................................................................... 3

Mots clés .................................................................................................................................... 3

Dédicace ..................................................................................................................................... 4

Remerciements ........................................................................................................................... 5

Liste des abréviations ................................................................................................................. 6

Liste des figures ......................................................................................................................... 7

Sommaire ................................................................................................................................. 10

Introduction Générale ............................................................................................................... 11

Chapitre I : Aperçu théorique sur les régimes de change ......................................................... 14

Section 1 : Présentation, Avantages et inconvénients des différents régimes de change ..... 16


1. Le régime de change fixe.......................................................................................... 16
1.1. Présentation du régime de change fixe: .............................................................. 16
1.2. Les Avantages et les inconvénients de régime de change fixe.......................... 17
2. Le régime de change flexible..................................................................................... 21
2.1. Présentation du régime de change flexible ............................................................. 21
2.2. Les Avantages et les inconvénients de régime de change flexible........................ 21
3. Le régime de change intermédiaire ........................................................................... 24

Section 2 : Quelques expériences du passage au régime de change flexible ...................... 25


1. Exemples d’un passage graduel ................................................................................. 25
1.1. Chili (1984 –1999) ............................................................................................. 25
1.2. Pologne (1990-2000): ......................................................................................... 31
2. Exemples d’un passage brusque ................................................................................ 37
2.1. Cas de Brésil....................................................................................................... 37
2.2. Cas de l’Uruguay ................................................................................................ 43
3. Expériences ratées (Equateur, Ouzbékistan) ............................................................ 47
3.1. Cas d’Equateur : ................................................................................................. 47
3.2. Cas d’Ouzbékistan : ........................................................................................... 48

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Chapitre II : Les conditions préalables d’une transition vers un régime de change flexible .. 50

Section 1 : les prérequis macroéconomiques et financiers ................................................... 52


1. Une politique budgétaire saine .................................................................................. 52
2. Un secteur financier développé ................................................................................. 53
3. Gestion des réserves de change : un filet de sécurité face aux fluctuations erratique54

Section 2 : Les Pré-conditions institutionnelles et opérationnelles : .................................... 57


1. Un marché de change suffisamment développé : déterminant majeur de la valeur de
la monnaie national ........................................................................................................... 57
2. La mise en place d’une stratégie monétaire et choix d’un ancrage nominal ............. 58
3. Modèles de prévision développés : ............................................................................ 60
4. Le développement du climat des affaires .................................................................. 61
Chapitre III : Etude comparative : Maroc,Egypte et Turquie…………………………..……...63

Section 1 : Degré de satisfaction des prérequis pour le cas marocain ..................................... 65


1. Déficit de la balance commerciale : .......................................................................... 65
2. La solidité du secteur bancaire .................................................................................. 67
3. L’évolution des réserves de change ........................................................................... 68
4. La maîtrise des risques de change : ........................................................................... 72

Section 2 : expérience marocaine face à celles de l’Egypte et la Turquie : ......................... 75


1. Cas d’Egypte : ........................................................................................................... 75
2. Cas de la Turquie : ..................................................................................................... 80

Conclusion générale ................................................................................................................. 86

Bibliographie ............................................................................................................................ 89

Annexe ..................................................................................................................................... 92

Table des matières .................................................................................................................... 93

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