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la Pléiade
France, mère des arts, des armes et des lois,
(Orthographe modernisée) Tu m’as nourri longtemps du lait de ta mamelle :
Textes complémentaires Ores1, comme un agneau qui sa nourrice appelle,
Ronsard Je remplis de ton nom les antres2 et les bois.
Comme un chevreuil, quand le printemps détruit 5 Si tu m’as pour enfant avoué3 quelquefois,
Du froid hiver la poignante1 gelée Que ne me réponds-tu maintenant, ô cruelle ?
Pour mieux brouter la feuille emmiellée2 France, France, réponds à ma triste querelle4.
Hors de son bois avec l’aube s’enfuit ; Mais nul, sinon Echo5, ne répond à ma voix.
5 Et seul, et sûr, loin de chiens et de bruit, Entre les loups cruels j’erre parmi la plaine ;
Or3 sur un mont, or3 dans une vallée 10 Je sens venir l’hiver, de qui la froide haleine
Or3 près d’une onde à l’écart recelée4 D’une tremblante horreur6 fait hérisser ma peau.
Libre, folâtre où son pied le conduit ;
Las ! Tes autres agneaux n’ont faute7 de pâture,
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De rets ne d’arc sa liberté n’a crainte, Ils ne craignent le loup, le vent, ni la froidure :
10 Sinon alors que sa vie est atteinte Si8 ne suis-je pourtant le pire du troupeau.
D’un trait7 meurtrier empourpré de son sang ;
Les Regrets, IX (1558)
Ainsi j’allais sans espoir8 de dommage, _________________________
Le jour qu’un œil, sur l’avril de mon âge, 1. ores : maintenant
Tira d’un coup mille traits en mon flanc. 2. antre(m) : caverne
3. avoué : reconnu
4. querelle : plainte
Les Amours, LX (1552-1553) 5. Echo : nymphe condamnée par Héra à ne jamais parler la première.
_________________________ Eprise de Narcisse, qui reste insensible, elle meurt de chagrin
6. sens étymologique, horror, effroi qui fait dresser les cheveux
1. poignante : piquante
7. n’ont faute de : ne manquent pas
2. emmiellée : douce comme du miel
8. si : cependant
3. or…or : tantôt…tantôt
4. recelée : cachée
5. rets : filet, piège Cependant que Magny1 suit son grand Avanson1,
6. ne : ni
7. trait : flèche Panjas1 son cardinal, et moi le mien1 encore,
8. espoir : attente Et que l’espoir flatteur2, qui nos beaux ans dévore,
Appâte nos désirs d’un friand hameçon,