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Caractérisation des polymères

par analyse thermique

par Gilbert TEYSSÈDRE


Ingénieur INSAT (Institut national des sciences appliquées de Toulouse)
Chercheur au CNRS (Centre national de la recherche scientifique)
et Colette LACABANNE
Professeur à l’Université Paul-Sabatier (Toulouse)

1. Analyse thermique différentielle


et analyse enthalpique différentielle ................................................ AM 3 274 - 2
1.1 Généralités .................................................................................................. — 2
1.2 Caractérisation des polymères amorphes ................................................ — 3
1.3 Caractérisation des polymères semi-cristallins ........................................ — 4
1.4 Vieillissement physique ............................................................................. — 4
1.5 Adjuvants .................................................................................................... — 4
2. Analyse thermomécanique................................................................... — 5
2.1 Généralités .................................................................................................. — 5
2.2 Caractérisation des polymères .................................................................. — 5
3. Analyse dynamique mécanique (ADM) ............................................. — 5
3.1 Généralités .................................................................................................. — 5
3.2 Caractérisation des polymères amorphes ................................................ — 6
3.3 Caractérisation des polymères semi-cristallins ........................................ — 6
4. Analyse dynamique électrique (ADE) ................................................ — 7
4.1 Généralités .................................................................................................. — 7
4.2 Caractérisation des polymères amorphes ................................................ — 7
4.3 Caractérisation des polymères semi-cristallins ........................................ — 7
5. Analyse des courants thermostimulés (CTS) ................................... — 7
5.1 Généralités .................................................................................................. — 7
5.2 Caractérisation des polymères amorphes ................................................ — 8
5.3 Caractérisation des polymères semi-cristallins ........................................ — 8
Pour en savoir plus ......................................................................................... Doc. AM 3 274

L ’analyse thermique englobe toute une série de techniques de caractérisation


des matériaux fondées sur l’étude de la variation d’une propriété physique
en fonction de la température.
Il s’agit donc essentiellement d’approches macroscopiques du comportement
des matériaux, qui font intervenir des considérations de thermodynamique des
états d’équilibre et des processus irréversibles, et de cinétique, associées aux
changements d’états (phénomènes de transition) et aux phénomènes de relaxa-
tion qui peuvent les accompagner.
Dans le cas spécifique des matériaux macromoléculaires, ou polymères, l’ana-
lyse de la réponse thermique permet de mettre en évidence et de donner une
interprétation microscopique de phénomènes tels que la transition vitreuse, la
fusion/cristallisation, le vieillissement physique et chimique, la ségrégation de
phases... selon les cas.

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CARACTÉRISATION DES POLYMÈRES PAR ANALYSE THERMIQUE ________________________________________________________________________________

Dans cet article, les principales techniques d’analyse thermique basées sur
l’étude d’un paramètre thermodynamique extensif, tel que l’enthalpie ou le
volume, ou d’une susceptibilité dynamique telle que le module mécanique en
élongation ou en cisaillement ou la permittivité diélectrique sont abordées.
De nombreux laboratoires en France sont équipés d’une ou plusieurs de ces
techniques et sont donc susceptibles de prêter leur concours dans les domaines
concernés.

Abréviations

ADE : analyse dynamique électrique ATD : analyse thermique différentielle


ADM : analyse dynamique mécanique ATM : analyse thermomécanique
AED : analyse enthalpique différentielle CTS : courant thermostimulé

1. Analyse thermique 1.1.2 Appareillage

différentielle et analyse Les dispositifs de mesure d’ATD et d’AED sont réalisés sur la base
enthalpique différentielle de deux enceintes identiques, régulées en température, contenant
l’échantillon à analyser et le témoin. En AED, les dispositifs dits à
compensation de puissance sont constitués de deux fours identi-
ques ; la mesure effectuée est celle du gradient de puissance fournie
aux deux fours pour maintenir leurs températures égales. Cepen-
1.1 Généralités dant, dans la plupart des cas, le dispositif de chauffage des encein-
tes est unique. On mesure alors le gradient de température entre les
deux enceintes. Cette mesure est le résultat recherché pour l’ATD.
Pour l’AED, elle est convertie en gradient de puissance électrique en
1.1.1 Principe utilisant les équations de la chaleur. Cette procédure est bien évi-
demment transparente pour l’utilisateur.
Le principe des techniques calorimétriques différentielles [1] Une des contraintes liées à l’utilisation de l’ensemble de ces tech-
repose sur la mesure des variations de l’énergie thermique fournie niques est la nécessité d’un étalonnage rigoureux de l’appareillage,
à l’échantillon à analyser, par rapport à celle apportée à un corps dont découle la précision sur les mesures à la fois de température et
inerte appelé témoin, pour imposer un programme de température d’énergie. Cette opération est réalisée à partir de corps étalons dont
contrôlé. la température et l’enthalpie de transition sont connues (la fusion de
l’indium, par exemple).
En analyse thermique différentielle (ATD), la grandeur mesu-
rée est le gradient de température entre l’échantillon et le témoin. Au plan technique, une bonne résistance aux attaques chimiques
Dans ce cas, les flux de chaleur transmis à l’échantillon et au témoin des matériaux susceptibles d’être en contact avec les produits de
sont identiques. Cette technique est plutôt réservée aux études à décomposition du polymère à analyser garantit la longétivité de
hautes températures sur les matériaux (jusqu’à 1 600 °C). l’appareillage. La conception du matériel doit, en outre, être orien-
De fait, la technique la plus courante pour la caractérisation des tée vers des géométries et des choix de matériaux permettant de
polymères est l’analyse enthalpique différentielle (AED) : elle minimiser l’inertie thermique et d’optimiser la précision de mesure.
permet une analyse quantitative des transitions en terme énergéti- Ce sont ces éléments clefs qui déterminent la résolution de l’appa-
que. On mesure alors, en principe, le gradient de puissance électri- reil. Le choix du matériel le plus approprié aux applications auxquel-
que nécessaire pour maintenir l’échantillon et le témoin à une les on est confronté doit prendre en compte plusieurs autres
température identique, soit dans les conditions isothermes, soit en considérations :
imposant une montée en température. Parmi les applications classi- — le domaine de température accessible : celui-ci varie générale-
ques de cette technique, on peut citer : ment de – 160 °C (avec apport d’azote liquide) à 700 °C, et couvre
— la détermination de la température de transition vitreuse ; donc la gamme utilisable avec les polymères et les composites ;
— les mesures de taux de cristallinité ; — la masse d’échantillon nécessaire : pour des produits synthéti-
— la détermination de la température de fusion ; sés en faible quantité, mais aussi pour améliorer la précision en
— l’étude de la ségrégation de phases ; température, on préfèrera un modèle exigeant de faibles masses (de
l’ordre de quelques milligrammes). En revanche, pour des composi-
— l’analyse de la pureté de produits (pharmacologie) ;
tes et des matériaux hétérogènes, de façon plus générale, on doit
— les mesures de taux de polymérisation des résines ; veiller à utiliser des volumes d’échantillons suffisants pour être
— le suivi de la dégradation des polymères. représentatifs de la composition du produit ;
Les faibles masses d’échantillon nécessaires (quelques milligram- — la résolution (en mW) ramenée à l’unité de masse utile
mes), la rapidité des mesures (les vitesses de variation en tempéra- d’échantillon ;
ture sont de l’ordre de 10 °C/min), la large diffusion des dispositifs — la précision en température ;
commerciaux, ainsi que leur application très répandue dans les
— la gamme de vitesses de variation en température.
laboratoires, font de ces techniques un outil de première impor-
tance pour l’étude des propriétés thermiques des polymères et com- Une liste non exhaustive des principaux fournisseurs de matériel
posites. est donnée en Doc. AM 3 274.

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1.2 Caractérisation
des polymères amorphes 1

∆cp(J.g--1.K--1)
La transition vitreuse est le principal changement d’état interve-
nant dans les polymères amorphes. Il correspond au passage d’un Endothermique
état liquide surfondu à un état vitreux lors du refroidissement dans
la région de la température de transition vitreuse (Tg). Bien que ce 0,5
phénomène ne corresponde pas à une transition de phase au sens
thermodynamique du terme [2], il se manifeste par une variation
importante des propriétés dimensionnelles, mécaniques, thermi-
ques...

0
1.2.1 Transition vitreuse 40 50 60 70 80 90
T (°C)
De nombreux paramètres structuraux influent sur la température
de transition vitreuse des polymères, parmi lesquels la tacticité, la
masse molaire ou la présence de groupes latéraux volumineux. En
AED, la température de transition vitreuse (Tg) se manifeste par une Figure 2 – Thermogramme de poly(éthylène téréphtalate) vieilli
variation brusque de la capacité thermique dont un exemple appa- (trait plein) et non vieilli (tireté)
raît sur les figures 1 et 2. Cette variation de la capacité thermique,
∆ c p , est obtenue directement à partir de la variation du flux de cha-
leur, ∆ W , enregistrée au passage de Tg : Nota : une analyse claire et accessible du phénomène de transition vitreuse est donnée
dans le livre de Donth [2].
∆W
∆ c p = ----------
βm
1.2.2 Structure chimique
avec m masse de l’échantillon,
β vitesse de balayage en température. Les techniques calorimétriques peuvent apporter des informa-
tions sur la structure chimique des polymères, dans la mesure où la
Tg est définie soit au point de semi-vitrification (point milieu du température de transition vitreuse y est généralement sensible.
saut de cp), soit à la température à laquelle une variation de W (T ) se Ainsi, la température de transition vitreuse des polymères varie en
produit (onset) lors de la montée en température [3]. fonction de la stéréorégularité des chaînes. Pour le poly(métha-
Pour des mesures rigoureuses, il est nécessaire de préciser non crylate de méthyle) (PMMA), par exemple, Tg peut varier de 50 à
seulement la méthode utilisée pour déterminer Tg mais également 130 °C lorsque le PMMA passe de la forme isotactique à la forme
la vitesse de balayage en température et, plus généralement, l’his- atactique [5]. De même, la température de transition vitreuse des
toire thermomécanique de l’échantillon. Par exemple, Tg est sensi- copolymères ou des mélanges de polymères varie suivant le type de
ble à l’orientation mécanique subie par l’échantillon, mais égale- copolymérisation (à blocs, alternée, statistique) et la compatibilité
ment à la vitesse de refroidissement lors du passage à Tg, préalable- des mélanges. Pour des mélanges compatibles ou des copolymères
ment à la mesure. Si cette vitesse augmente, la structure est figée statistiques, on relève une seule température de transition vitreuse,
avec une densité moindre et un volume libre supérieur, de sorte que qui varie en fonction des températures de transition vitreuse ( T g1 et
la température de transition vitreuse mesurée au cours de la remon- T g2 ) des homopolymères, selon des lois du type loi de Fox [6] :
tée en température augmente [4].
1 w w
------ = -------1 + -------2
Tg T g1 T g2

3 où w1 et w2 (=1 – w1) sont les fractions en masse des constituants.


Tf = 257 °C
∆cp(J.g--1.K--1) Cette loi est vérifiée dans certains cas [7], mais des modèles plus
développés sont apparus [7] [8] prenant en compte les interactions
Endothermique spécifiques entre constituants. Dans le cas de mélanges incompati-
2
bles, on observe généralement deux transitions vitreuses reliées à
Tg = 77 °C chacun des constituants [6] : l’étude calorimétrique peut donc
apporter des informations sur le degré de compatibilité des polymè-
res et permettre de construire un diagramme de phases.
1

Exothermique 1.2.3 Masse molaire


Tcr = 138 °C
0 Les premières études portant sur la variation de Tg avec la masse
0 50 100 150 200 250 300 molaire des polymères ont été menées par Fox et Flory qui ont pro-
T (°C) posé une équation de la forme [6] :
Tg température de transition vitreuse
Tf température de fusion K
T g = T g α Ð ---------
Tcr température de cristallisation Mw

avec Tg α limite asymptotique à Tg,


K constante dépendant du polymère,
Figure 1 – Spectre obtenu par analyse enthalpique différentielle
du poly(éthylène téréphtalate) Mw masse molaire en poids du polymère.

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Des réajustements de cette loi ont été proposés par la suite [9]. La compatibilité de mélanges de polymères peut également être
Les techniques calorimétriques et les mesures spécifiques de mas- suivie par l’évolution de la (des) températures(s) de fusion, si l’un au
ses molaires ainsi que la chromatographie par perméation de gel moins des constituants est cristallisable [6].
(CPG) [10] sont particulièrement bien adpatées à ce type d’étude. La mise en évidence de phénomènes de transition de phases cris-
tallines est également très fréquemment effectuée par AED. Un
exemple est la dépendance de la transition de Curie des copolymè-
res ferroélectriques poly(fluorure de vinylidène/trifluoroéthylène)
1.3 Caractérisation (PVDF/TFE) en fonction de leur composition chimique [13].
des polymères semi-cristallins

1.4 Vieillissement physique


1.3.1 Fusion et cristallisation

1.4.1 Phase amorphe


L’AED est particulièrement utile pour la détermination du taux de
cristallinité des polymères. L’enthalpie de fusion, ∆ H f , est détermi-
née à partir de la surface du pic endothermique [cf. figure 1 pour le Par opposition au vieillissement chimique [thermooxydation,
polyéthylène téréphtalate (PET)]. Le calcul du taux de cristallinité, photooxydation (UV)] qui induit une évolution irréversible du maté-
selon la formule : riau inhérente au pontage entre chaînes ou à la rupture de liaisons,
le vieillissement physique (ou relaxation structurale) est un phéno-
x = ∆ H f ⁄ ∆ H f0 mène réversible qui concerne la phase amorphe des polymères [14].
Il se manifeste par une densification et une augmentation de la rigi-
nécessite la connaissance de l’enthalpie de fusion, ∆ H f0 , pour un dité (fragilisation) du polymère lorsqu’il est maintenu à des tempé-
ratures de l’ordre de Tg – 50 °C à Tg . De nombreuses études sur la
cristal du même polymère. Celle-ci peut être extrapolée à partir des cinétique de ce phénomène ont été effectuées par AED [14]. Un
diagrammes (∆Hf, x) pour des polymères dont le taux de cristallinité exemple est donné sur la figure 2 pour le PET. La surface du pic
est connu [11]. Des valeurs standards de ∆ H f0 sont disponibles pour endothermique donne l’excès d’enthalpie éliminé pendant le
vieillissement isotherme et permet donc de définir le degré d’avan-
de nombreux polymères [3]. La principale incertitude dans la déter-
cement du processus.
mination de x provient de l’estimation de la ligne de base du ther-
mogramme. Il est donc nécessaire d’effectuer un bon étalonnage de Ce facteur est important essentiellement pour les polymères
l’appareil. amorphes dont la température d’utilisation est inférieure à la tempé-
Dans certains cas, la cinétique de cristallisation des polymères est rature de transition vitreuse : le PET, le PMMA, le polystyrène (PS)
relativement lente. Ainsi, s’ils sont refroidis depuis l’état fondu à des ou le polycarbonate (PC), qui ont des températures de transition
vitesses élevées, des polymères tels que le PET ou le poly(étheré- vitreuse comprises entre 75 et 130 °C, sont concernés.
thercétone) (PEEK), par exemple, n’atteignent pas un taux de cristal- Il est important de ne pas confondre ce phénomène avec un pic de
linité optimal. Lors de l’enregistrement du thermogramme, un fusion. Le critère simple pour les différencier consiste à amener le
phénomène de recristallisation (ou cristallisation froide) apparaît polymère au-delà de Tg pour effacer son histoire (vieillissement) et
au-delà de Tg (cf. figure 1). Entre Tg et Tcr, le polymère est dans un à enregistrer ensuite un second thermogramme (courbe en tireté
état liquide de viscosité élevée et est faiblement cristallin. A Tcr son sur la figure 2), sur lequel un pic de vieillissement ne réapparaît pas.
taux de cristallinité augmente fortement. Une estimation du taux de
cristallinité initial peut être faite à partir des enthalpies de fusion
(∆Hf > 0) et de cristallisation (∆Hcr < 0) mesurées : 1.4.2 Phase cristalline
x = ( ∆ H f Ð ∆ H cr ) ⁄ ∆ H f0
Le vieillissement physique défini ci-dessus est un facteur secon-
daire pour les polymères semi-cristallins, d’une part, parce qu’il est
La température de fusion d’un polymère (Tf) peut également don-
généralement moins évident [15] et, d’autre part, parce que les pro-
ner des informations sur sa morphologie et, en particulier, sur
priétés mécaniques dépendent dans une large mesure du compor-
l’épaisseur < des lamelles cristallines. L’équation de Gibbs-Thom-
tement de la phase cristalline.
son donne la variation de Tf en fonction de < [11] :
Un type de vieillissement faisant intervenir un autre processus
2∆ H
T f = T f0  1 Ð --------------s-
physique est la possibilité des polymères semi-cristallins à recristal-
<∆ H f 0
liser et, plus généralement, l’instabilité thermique de la phase cris-
talline [16]. Ce facteur est particulièrement important dans les
avec T f0 température de fusion d’un cristal de taille polyéthylènes (PE) dont la phase cristalline est instable avant la
infinie, fusion. L’évolution morphologique peut, là aussi, être suivie par
l’analyse des thermogrammes de fusion [17].
∆Hs enthalpie liée à la surface de base des cristallites.
Il est également possible d’analyser les pics de fusion et d’en
déduire une distribution en taille des cristallites [11].
1.5 Adjuvants
1.3.2 Structure et ségrégation de phases
L’objectif principal de l’introduction d’adjuvants et, en particulier,
de plastifiants est de modifier les propriétés mécaniques des poly-
La ségrégation de phases dans les polymères et, en particulier, la mères. Ainsi, la température de transition vitreuse du PVC peut être
coexistence de différentes phases cristallines peuvent être mises en amenée de 70 à – 20 °C en faisant varier la formulation [18]. Un éta-
évidence par AED. Cette ségrégation se manifeste par l’apparition lonnage permettant d’ajuster le dosage des composés peut donc
de plusieurs pics de fusion dont les températures maximales dépen- être effectué sur la base d’une analyse par des techniques calorimé-
dent de la structure cristalline [12]. triques.

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2. Analyse thermomécanique Une autre application importante de l’ATM est la caractérisation


de polymères orientés. Un phénomène de retrait important se pro-
duit au-delà de la température de transition vitreuse dans des fibres
de PMMA par exemple [23].
2.1 Généralités Il est également possible de déterminer le module d’Young en
traction (ou module statique en élongation) en fonction de la tempé-
rature, en connaissant la composante de la déformation liée à la
dilatation. Ce type de mesure, de même que l’étude du fluage iso-
2.1.1 Principe therme, relèvent également des essais mécaniques sur les maté-
riaux [24, 25].
L’analyse thermomécanique (ATM) regroupe les méthodes
de caractérisation permettant de mesurer les variations dimension-
nelles d’un échantillon sous contrainte statique. Les variations de
longueur ou de volume sont enregistrées en fonction de la tempéra-
ture, et la contrainte correspondante est soit élongationnelle, soit
3. Analyse dynamique
hydrostatique. mécanique (ADM)
Pour des mesures de volume, l’échantillon est placé dans un
liquide dont le coefficient de dilatation est connu. L’ajustement de la
pression et la détection des déplacements sont assurés par l’inter-
médiaire d’un piston. Pour de faibles contraintes, l’instrument per- 3.1 Généralités
met de mesurer le coefficient de dilatation linéaire ou volumique
(dilatométrie) [19].
3.1.1 Principe
On peut également, pour une configuration de porte-échantillon
appropriée, mesurer les déformations en flexion trois points, et la
dureté (pénétration). En ADM, la contrainte dynamique remplace ou se superpose à la
contrainte statique. Les analyses dans lesquelles une sollicitation
Les applications de cette technique couvrent en premier lieu la dynamique est appliquée à l’échantillon permettent de caractériser
mesure du coefficient de dilatation thermique et de sa variation en les phénomènes de relaxation associés à des transitions du type
fonction de la température, ainsi que l’ensemble des phénomènes transition vitreuse (relaxation primaire), ou sans manifestation ther-
qui induisent des variations de module : transition vitreuse, transi- mique (relaxations secondaires). Selon la gamme de températures
tions de phase. On peut l’utiliser également pour l’étude du fluage considérée, dont dépend la viscosité du polymère, et les dimensions
isotherme. de l’échantillon, différents modes de sollicitations sont utilisés :
flexion trois points, contrainte longitudinale, torsion, cisaillement
entre plateaux parallèles (T > Tg), simple ou double encastrement...
2.1.2 Appareillage [26]. L’enregistrement des composantes élastique et anélastique de
la déformation, respectivement en phase et en quadrature par rap-
port à la contrainte, en fonction de la température (fréquence fixe)
La plupart des dispositifs commerciaux utilisent un système de
ou de la fréquence (température fixe), donne accès aux modules de
mesure de déplacements LVDT (Linear Variable Differential Trans-
conservation, en cisaillement (G’), et en élongation (E ’), aux modu-
former) où les variations d’induction d’une bobine sont détectées
les de pertes correspondants (G ’’, E ’’), ainsi qu’à δ l’angle de pertes
[20]. Les mesures d’allongement peuvent également être effectuées
mécaniques [tan δ : G’/G’’ (ou E’’/E’)].
par des dispositifs optiques [21]. L’étalonnage et les éléments de
connexion sont réalisés avec un élément de faible coefficient de
dilatation tels que le quartz (α = 6.10–7 K–1) ou l’Invar (α = 10–7 K–1)
[19]. 3.1.2 Appareillage
Parmi les critères d’évaluation d’un dispositif, on retiendra :
Les dispositifs commerciaux d’ADM permettent généralement de
— la gamme de températures accessible et, de manière analogue remplir la fonction d’analyseur thermomécanique (ATM). Le prin-
à l’AED, les caractéristiques du contrôle en température ; cipe de mesure des déformations est le même que pour l’ATM, à
— la résolution (en µm) de l’appareil ; savoir système optique ou système LVDT, mais les composantes
— la possibilité de travailler en extension et en compression ; élastique et anélastique doivent être séparées. Pour l’application de
— l’allongement maximal mesurable ; la contrainte, deux dispositifs indépendants sont utilisés, l’un pour
— la valeur des contraintes applicables ; la phase d’approche et pour l’application de la contrainte statique
— les dimensions utiles d’échantillon. (moteur pas à pas, bobine), l’autre pour l’application de la contrainte
dynamique (bobine). Ces éléments sont asservis par un capteur de
force.
Dans le choix de l’appareillage, on doit prendre en compte la poly-
2.2 Caractérisation des polymères valence du matériel en considérant à la fois la diversité des modes
de sollicitation proposés (vibrateur longitudinal ou rotatif, forme
des porte-échantillons) et leur adéquation au type d’échantillon à
L’analyse relative à la calorimétrie différentielle est transposable à étudier, et en particulier leur viscosité. Les principaux facteurs à
la dilatométrie. Notons que, à la différence de l’AED, l’ATM donne prendre en considération sont :
accès aux variations de longueur et non à leur dérivée qui corres-
pond au coefficient de dilatation dont l’équivalent est la capacité — le contrôle thermique ;
thermique à pression constante cp en analyse thermique. — la gamme de fréquences de sollicitation accessible (générale-
ment de l’ordre de 10–2 à 102 Hz) ;
Le coefficient de dilatation thermique augmente de façon impor- — la possibilité de travailler à fréquence fixe et température
tante à la température de transition vitreuse (d’un facteur de l’ordre variable ou à température fixe et fréquence variable ;
de 5 à 10 dans les polymères amorphes). — l’aptitude à remplir les fonctions d’ATM ;
De même, le vieillissement physique peut être caractérisé par ces — la précision sur les mesures de contrainte et de déformation ;
techniques [22]. — les charges minimale et maximale applicables ;

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avec ∆H enthalpie d’activation,


G' (GPa) G'' (0,1 GPa) tan δ
τ 0a facteur préexponentiel,
4 2
k constante de Boltzmann.
Les phénomènes de relaxation dans les polymères ne peuvent
3 généralement pas être décrits par un processus simple à temps de
relaxation unique. Ainsi, la forme des pics de perte est analysée en
utilisant le concept de processus distribués, ou de modes couplés,
2 G' 1 dont l’usage est détaillé dans les références [19] [29].
G''
Nota : de nombreux exemples d’études des phénomènes relaxationnels dans les poly-
tan δ mères sont donnés dans la référence [19].
1 (x 5)
■ Applications : l’ADM est utilisée :
tan δ — pour suivre l’évolution de la structure des matériaux à l’aide
0 0 de leurs propriétés mécaniques, sous des cycles de vieillissement
--100 --50 0 50 100 150 divers ;
T (°C) — pour caractériser des mélanges de polymères, des polymères
chargés, des composites, lorsqu’une propriété spécifique est consi-
Figure 3 – Analyse dynamique électrique du poly(méthacrylate dérée ;
de méthyle) (f = 1 Hz) — pour déterminer l’anisotropie des propriétés mécaniques dans
des polymères orientés [30].

— la gamme de modules mesurable ;


— la géométrie des échantillons ;
— le support logiciel pour l’analyse des données. 3.3 Caractérisation
des polymères semi-cristallins

3.2 Caractérisation
des polymères amorphes Dans les polymères semi-cristallins, on retrouve généralement les
modes de relaxation primaire et secondaire décrits précédemment,
bien qu’ils soient atténués, en particulier le mode primaire [19].
Les modes de relaxation mécanique se manifestent par un pic A plus haute température, un mode supplémentaire associé à la
pour l’angle de perte, pour une température Tmax si l’on travaille à phase cristalline est généralement observé (par exemple pour le PE
fréquence fixe (pulsation ω 0) et température variable. La figure 3 [31] ou le PVDF [32]). L’indexation des modes est alors la suivante :
représente un exemple de spectres d’ADM obtenu sur du PMMA en — α = relaxation cristalline ;
flexion trois points. — β = relaxation primaire (associée à Tg) ;
La cinétique de relaxation définit la loi d’évolution de Tmax en — γ = relaxation secondaire (cf. figure 4). Il peut être utile de sui-
fonction de la fréquence de sollicitation : vre l’évolution des propriétés mécaniques en fonction du taux de
cristallinité ou en fonction du vieillissement de la phase cristalline
T max = f ( ω 0 ) (recristallisation par exemple) [33].

On définit également le temps de relaxation τ ( T max ) = 1 ⁄ ω 0 dont


la variation en fonction de Tmax est caractéristique du processus de
relaxation considéré.
Dans les polymères amorphes, au moins deux modes de relaxa- T (°C)
tion sont généralement mis en évidence : --100 --50 0 50 100 200
— le mode primaire α, qui correspond à la manifestation visco- τ (s)
élastique de la transition vitreuse, pour lequel le temps de relaxation
102 γ β α
obéit à une équation du type Vogel-Fulcher [2] :

A
τ = τ 0v exp ---------------
T Ð T0 1

avec τ0v facteur préexponentiel,


A constante parfois reliée au volume libre du 10--2
polymère [24],
T0 température située vers 40-50 °C au-dessous de
Tg . 10--4
7 6 5 4 3 2
Des modèles récents relient A et T0 à la fragilité d’un verre, c’est-
103 T --1(K--1)
à-dire à sa sensibilité au phénomène de transition vitreuse [27] ;
α relaxation cristalline
— le mode secondaire β, qui correspond à des mouvements plus β relaxation primaire (associée à Tg)
localisés de la phase amorphe [28] et dont le temps de relaxation γ relaxation secondaire
obéit à une équation du type Arrhenius :

∆H Figure 4 – Cinétique des relaxations mécaniques


τ = τ 0 a exp -------
kT
-
du poly(fluorure de vinylidène)

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________________________________________________________________________________ CARACTÉRISATION DES POLYMÈRES PAR ANALYSE THERMIQUE

4. Analyse dynamique — mesures par pont d’impédance (les plus classiques) pour des
fréquences intermédiaires (10 à 106 Hz) ;
électrique (ADE) — réflectométrie pour des fréquences très élevées [37].
Les critères de choix du matériel prendront en compte :
— les caractéristiques de la régulation thermique ;
4.1 Généralités — la gamme de fréquences accessible ;
— la géométrie des échantillons ;
4.1.1 Principe — la possibilité de mesurer une conductivité surfacique ;
— l’amplitude des tensions applicable ;
L’ADE est la technique la plus utilisée pour caractériser les pro-
— la sensibilité sur ε’ et ε’’ ;
priétés diélectriques des polymères. Elle correspond à l’équivalent
— le support logiciel proposé.
électrique de l’ADM. Un champ électrique alternatif est appliqué à
l’échantillon et les variations de courant mesurées permettent de
déterminer l’impédance complexe, d’en déduire les variations de 4.2 Caractérisation
polarisation, et donc les composantes réelle (ε’) et imaginaire (ε’’) de
la permittivité diélectrique complexe, ainsi que le facteur de dissi- des polymères amorphes
pation diélectrique (ou tangente de l’angle de pertes) tan δ = ε ’’/ε ’.
La description des modes de relaxations mécaniques faite précé-
L’impédance complexe d’un matériau diélectrique d’épaisseur e demment est également valable pour les relaxations diélectriques.
et de surface S peut se mettre sous la forme : L’avantage de l’ADE est de pouvoir couvrir une gamme de fréquen-
e ces plus large, ce qui permet de caractériser la cinétique de relaxa-
Z * = --- [ σ 0 + j ( 2πf ) ε * ] Ð1
S tion avec une meilleure précision. Notons qu’à des températures
supérieures à celles correspondant au mode de relaxation primaire,
avec σ0 conductivité à fréquence nulle, l’analyse est parfois perturbée par des phénomènes de conduction.
f fréquence de sollicitation, Cette technique permet de déterminer les pertes d’énergie diélec-
ε* permittivité diélectrique complexe de l’échan- trique pour un matériau destiné à être utilisé comme isolant ou élé-
tillon : ε * = ε ′ Ð j ε ′′ . ment passif à une fréquence et à une température données. L’ADE
étant sensible à la présence d’espèces polaires ou ioniques, elle
Ces paramètres sont obtenus à partir de la mesure des courants peut révéler la présence de résidus de synthèse. Les problèmes de
en phase et en quadrature par rapport à une tension appliquée Ve : vieillissement physique, de ségrégation de phases et de compatibi-
S σ0 lité des polymères peuvent également être abordés.
i ph = V e ( 2π f ) --- ε ′′ + --------
-
e 2π f
S
i quad = V e ( 2π f ) --- ε ′ 4.3 Caractérisation
e des polymères semi-cristallins
Il est nécessaire de connaître la conductivité statique σ0 pour
déterminer ε’’. Une méthode approximative consiste à considérer L’ADE a été largement utilisée pour caractériser les propriétés dié-
qu’au-delà de la relaxation primaire (α), le facteur ε’’ est négligeable, lectriques de polymères électroactifs comme les polymères ferro-
ce qui donne un accès direct à σ0. On peut également noter que, électriques [38] ou les polymères à cristaux liquides [39]. Dans cer-
dans nombre de résultats expérimentaux, la composante en phase tains cas, le polymorphisme (présence de plusieurs phases cristalli-
est représentée sans que les contributions relatives au facteur de nes) peut être détecté si ces phases cristallines ont des
dissipation diélectrique et à la conductivité soient séparées. polarisabilités différentes.
La conductivité des échantillons est le principal obstacle aux L’ADE vient également en complément à l’ADM pour l’analyse de
mesures diélectriques. Si elle ne pose pas de problème pour la plu- la relaxation cristalline α, par exemple [20]. Dans le cas de polymè-
part des polymères qui sont, en général, de bons isolants, l’étude de res polaires, elle permet également de mieux définir la relaxation
composites à renfort conducteur est plus délicate. Le polymère doit primaire (β ). En effet, l’ADM enregistre la déformation macroscopi-
également être polaire pour qu’une polarisation puisse être induite. que de l’échantillon, alors que l’ADE est sensible aux réorientations
Ainsi, les mesures diélectriques dans le PE par exemple nécessitent dipolaires et détecte ainsi des mouvements localisés des séquences
l’introduction dans la chaîne macromoléculaire de groupes polaires de chaînes.
tels que –C=O ou –C–Cl [34].

4.1.2 Appareillage
L’ADE présente au plan technique un certain nombre d’avantages
5. Analyse des courants
par rapport à l’ADM, bien qu’elle ne donne évidemment pas accès
aux mêmes paramètres physiques :
thermostimulés (CTS)
— l’utilisation de transducteurs électromagnétiques, pour sollici-
ter le matériau et pour mesurer sa réponse, est supprimée : le dispo- 5.1 Généralités
sitif de mesure est donc plus compact, ce qui, en principe, facilite la
régulation thermique ;
— la gamme de fréquences accessible est beaucoup plus large 5.1.1 Principe
que pour l’ADM : de 10–5 à 109 Hz pour certains dispositifs [35], ce
qui permet une analyse plus complète des relations fréquence-tem- La technique des courants thermostimulés (CTS) est une méthode
pérature des pics de perte. de caractérisation quasi-statique. Son principe est schématisé sur la
figure 5. Un champ électrique statique est appliqué à une tempéra-
De telles plages de fréquence sont couvertes par des techniques ture Tp, ce qui permet d’orienter les dipôles dont le temps de relaxa-
de mesure complémentaires : tion est court à cette température. Cette orientation dipolaire est
— conversion d’un signal enregistré dans le domaine des temps ensuite figée en abaissant la température jusqu’à T0 << Tp où le
(courant transitoire) en une réponse fréquentielle par transformée champ est supprimé. Une remontée linéaire en température, au
de Fourier pour les basses fréquences [36] ; cours de laquelle le courant de dépolarisation est enregistré, permet

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CARACTÉRISATION DES POLYMÈRES PAR ANALYSE THERMIQUE ________________________________________________________________________________

— de la sensibilité de l’électromètre ;
Champ électrique appliqué — des possibilités d’effectuer des mesures de conductivité ;
— du support logiciel permettant le traitement et l’analyse des
données ;
Temps — de l’expertise proposée pour l’interprétation des résultats.
Température de mesure
Tp Les méthodes de mesure détaillées sont décrites dans la réfé-
rence [44].

5.2 Caractérisation
T0
des polymères amorphes
Le pic de relaxation α associé à Tg est généralement bien défini
par CTS. On obtient une température, au maximum du pic, qui cor-
Temps respond pratiquement à Tg (définie par AED, par exemple), car la
Courant de dépolarisation
fréquence équivalente est faible. Par polarisations fractionnées, on
observe, pour le mode α, un phénomène de compensation avec un
paramètre Tc pouvant varier de Tg + 5 °C à Tg + 30 °C [45]. La relaxa-
tion secondaire β a également été analysée [46]. La figure 6 repré-
Température de mesure sente des exemples de spectres CTS complexes, obtenus sur des
polymères amorphes (PET, PMMA) ou semi-cristallins (PVDF). Cette
Figure 5 – Principe des courants thermostimulés technique a été appliquée à l’étude de la ségrégation dans les
mélanges de polymères [47], du vieillissement physique [48] ou de
l’influence de l’orientation mécanique sur des films de PET [49], par
le retour à l’équilibre graduel des dipôles. Les pics de courants enre- exemple.
gistrés correspondent à des phénomènes de relaxation définis pré-
cédemment. La faible fréquence équivalente ( < 10–3 Hz) confère à
cette technique une grande sensibilité dans la définition des modes 5.3 Caractérisation
de relaxation. des polymères semi-cristallins
L’analyse des spectres complexes, dans le but de déterminer la
cinétique de relaxation, ne peut être faite de manière simple, car les Les relaxations primaire et secondaire des polymères semi-cris-
modes de relaxation ne sont généralement pas décrits par un pro- tallins peuvent être mises en évidence par CTS avec, dans la plupart
cessus unique [40]. Aussi, la technique des polarisations fraction- des cas, une meilleure définition que par les techniques dynami-
nées est-elle utilisée [41, 42]. Elle consiste à appliquer le champ sur ques. La relaxation cristalline α, son rôle dans le vieillissement des
une fenêtre étroite en température, ce qui permet de déconvoluer propriétés pyroélectriques, ainsi que la transition de Curie de copo-
les modes en éléments simples. L’analyse des pics élémentaires lymères ferroélectriques ont été étudiés par CTS [50]. Dans certains
obtenus conduit à une distribution discrète en temps de relaxation polymères semi-cristallins, tels que le PEEK, le PPS, le PET, une tran-
obéissant le plus généralement à une équation d’Arrhenius, et dans sition vitreuse dédoublée (correspondant aux phases amorphes
certains cas, à une équation de Vogel [43]. Des lois de variation telle libre et contrainte par les cristallites) a été observée [49, 51]. Seule la
que la loi de compensation : relaxation associée à la transition vitreuse de la phase amorphe
libre est caractérisée par un phénomène de compensation, ce qui
∆H permet d’identifier les phases amorphes.
τ oi = τ c exp Ð ---------i
kT c
avec τc et Tc temps et température de compensation,
τoi et ∆Hi facteur préexponentiel et enthalpie d’activation, Id (A) α PET
issus de l’analyse, pour le pic i.
permettent de distinguer des processus ayant une origine unique et, α PMMA
dans certains cas, d’en donner une interprétation plus précise que
l’observation des spectres complexes ne le permet. 10--11

α PVDF
5.1.2 Appareillage
β PVDF
L’élément important dans l’appareillage est un électromètre sen- 5 x 10--12
sible permettant des mesures de courant dans la gamme de 10–15 à β PMMA
(Id x 10)
10–8 A.
Des dispositifs sont désormais disponibles dans le commerce (cf. β PET
Doc. AM 3 474). La précision de la régulation en température est un 0
élément très important dans la qualité des mesures. Le signal (cou-
--150 --100 --50 0 50 100 T (°C)
rant) enregistré est, en effet, proportionnel à la vitesse de variation
en température. Des fluctuations de cette dernière peuvent entraî- Id courant de dépolarisation Tp température de polarisation
ner des artefacts sur les spectres.
PET Tp = 80 °C PET poly(éthylène téréphtalate)
On peut enfin utiliser une méthode consistant à mesurer, sous
champ constant, le courant au cours d’une remontée linéaire en PVDF Tp = 70 °C PVDF poly(fluorure de vinylidène)
température : dans ce cas, le signal mesuré comprend une compo- PMMA Tp = 120 °C PMMA poly(méthacrylate de méthyle)
sante de conduction superposée à la composante de polarisation.
La qualité d’un dispositif sera jugée en tenant compte : Figure 6 – Relaxations cristalline, primaire et secondaire,
— des caractéristiques de la régulation thermique ; observées en CTS

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P
O
U
R
Caractérisation des polymères
par analyse thermique E
N

S
par Gilbert TEYSSÈDRE A
Ingénieur INSAT (Institut national des sciences appliquées de Toulouse)
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R (liste non exhaustive)

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Netzsch Gerätebau GmbH (Allemagne). Rheometrics Inc. (États-Unis) : ATD, AED, ATM, ADM, ADE.
P Netzsch Frères : ATD, AED, ADM, ATM.
Novocontrol GmbH (Allemagne) : ADE (et supports logiciels pour analyse dyna-
Seiko Instruments Inc. (Japon) : ATD, AED, ATM, ADM, ADE.
SETARAM (Sté d’études d’automatisation, de régulation et d’appareils de

L mique électrique très développés qui permettent la conversion et l’analyse


des données, et la représentation de celles-ci dans les domaines temps, fré-
quence et température.)
mesure) (France) : ATD, AED.
Shimadzu Corp. (Japon) : ATD, AED, ATM ; en France : Roucaire.
TA Instruments (États-Unis) : ATD, AED, ATM, ADM, ADE.
U Perkin-Elmer Corp. (États-Unis) : ATD, AED, ATM, ADM. Thermold Partners (États-Unis) : CTS.

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