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MODULE DE STRATÉGIE FINANCIÈRE ET GOUVERNANCE BANCAIRE

Master ‘’FINANCE & BANQUE. Semestre 3


Responsable du module : Mouloud GUERCHOUH (FSECSG/UMMTO)
Programme du module ‘’stratégies financières et gouvernance bancaire’’

Partie 1/ stratégie et réflexion stratégique

1. Définition de la stratégie
2. La réflexion stratégique
3. Plan et planification stratégique
3.1. Diagnostic stratégique
3.2. Plan stratégique
4. Stratégie financière
4.1. Définition et objet
4.2.Etapes de la stratégie financière
A. Diagnostic financier
B. Business plan

Partie 2/ la gouvernance bancaire (GB)

1. Généralités sur la gouvernance


2. Crises financières et gouvernance bancaire
A. Définition de la GB
B. Contexte
C. Caractéristiques de la GB
3. Mécanismes de la gouvernance bancaire
A. Mécanismes internes
B. Mécanismes externes
4. La gouvernance bancaire en Algérie

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Thèmes de TD, Master ‘’stratégie financière et gouvernance
bancaire’’/

Thème Nom & prénom


Stratégie et réflexion stratégique
Planification stratégique
Stratégie financière
Gouvernance d’entreprise
Gouvernance bancaire
Mécanismes de gouvernance bancaire
Les crises financières
Les effets des crises et des scandales
financiers
La gouvernance bancaire en Algérie
Chargé de TD: Mr GUERCHOUH

2
I. Stratégie et réflexion stratégique
C’est dans les années 50 que la planification stratégique a été introduite comme un moyen
d’aider les managers à mieux concevoir et maîtriser le l’évolution et les mutations de leur
entreprise.
A travers le temps, et en raison des transformations de l’environnement et du durcissement du
jeu concurrentiel de l’entreprise, ce concept a évolué, car les préoccupations de l’entreprise se sont
transformées. D’une gestion de la croissance et l’augmentation de la productivité, à la recherche de
la compétitivité et d’accroissement des capacités d’adaptation de l’organisation aux différentes
mutations.
Puis, nous passons de la planification stratégique au management stratégique avec l’adoption de la
veille stratégique.
1. Stratégie (définition)
« La stratégie consiste en la détermination des buts et des objectifs à long terme d’une entreprise,
l’adaptation des moyens d’actions et d’allocation des ressources nécessaires pour atteindre ces
objectifs » A. CHANDLER.
« La stratégie consiste à piloter les modifications de relation du système d’entreprise avec son
environnement et la frontière de ce système avec ce qui n’est pas à lui » I. ANSOFF.
« Élaborer la stratégie d’entreprise, c’est choisir les domaines d’activités dans lesquels
l’entreprise entend être présente et allouer les ressources de façon à ce qu'elle s'y maintienne et
s'y développe.» STRATEGOR.

A. Les diverses composantes de la stratégie : de l’intention à la réalisation


Mintzberg & Waters (1985) montrent que la stratégie envisagée peut correspondre à la
stratégie réalisée (composante intentionnelle ou délibérée). Cependant, le long de la vie de
l’entreprise, la stratégie peut comporter des composantes non réalisée mais surtout des composantes
émergentes qui apparaissent sans intentionnalité.
Les diverses composantes de la stratégie : de l’intention à la réalisation

Composante intentionnelle
Stratégie Stratégie
Envisagée Réalisée
Composante non Composante
réalisée émergente

Source : Mintzberg et Waters (1985, p. 258).

B. Les raisons de l’évolution de la perception de la stratégie


Évolution de l’identité de la firme : il s’agit du passage de l’entreprise traditionnelle (propriété
+ gestion) à l’entreprise managériale où le manager est moins identifié à l’entreprise (existence
d’actionnaires, DG, contrôle…). Ceci à cause de la croissance globale des branches, du
développement des marchés financiers pour compléter l’autofinancement, complexification de
l’environnement.
Évolution de l’organisation de la firme : l’entreprise traditionnelle est organisée
hiérarchiquement selon un diagramme fonctionnel. Puis sa structure s’est développée,
complexifiée pour s’adapter à la grande taille (organisation staff and line, divisionnelle,
matricielle), on aboutit par conséquent à une gouvernance collégiale.

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La complexité des objectifs de la firme la poussé vers l’entreprise système, mais aussi
l’évolution des risques liés à l’apparition de la bureaucratie ou au contraire exagération dans la
prise de risque ou éloignement de l’objectif de maximisation du profit/obsession de la
maximisation à court terme.
La firme a aussi évolué de la Société Anonyme traditionnelle à d’autres modes de
gouvernance.

2. Réflexion stratégique
La réflexion stratégique est un document consistant à la mise en page d'un processus d'élaboration
d'une stratégie d'une entreprise ou d'une organisation.
Elle est destinée au management de l'organisme afin d'une prise de décision sur une orientation,
une vision ou un cap.
La réflexion stratégique tient compte d'éléments internes et externes à l'entité :
1. analyse des produits et services ;
2. étude des besoins de l'offre et de la demande ;
3. décryptage des mécanismes organisationnels intrinsèques à la structure ;
4. positionnement par rapport à l'écosystème concurrentiel ;
5. évaluation des risques et des ressources disponibles ;
6. prospective et perspective des segments de marché.
Basée sur la subdivision analytique, dans un cadre contextuel et circonstancié dans le temps et
l'espace, la stratégie dispose d'une fonction utilité primordiale pour l'encadrement – direction
générale, chef d'entreprise, conseil d'administration, actionnaires, etc.
À partir de ce scan de l'organisme et du diagnostic réalisé, il sera alors possible d'orienter
le business plan, le business model ou plan d'affaires dans une optique de hausse globale des
performances dans la durée.
Bien évidemment, comme le nom le suggère, ce document reste qu'une estimation essayant de
mimer le réel de l'organisation étudiée.
L'analyse tente d'approximer, en toute probabilité, des tendances pour en sortir un cap clair
et net pour le développement ou la survie de l'entité.
Généralement, la réflexion stratégique se réalise dans un objectif triennal ou quinquennal – ce délai
d'exécution a tendance à se réduire parallèlement à l'accélération des mutations socio‐économiques
et aux transformations technologiques.
On utilise aussi les expressions d'analyse stratégique, de démarche stratégique, de plan stratégique
ou de conseil en stratégie pour évoquer la réflexion stratégique.
4. Plan et planification stratégique (business plan ‘’prévisionnel’’)
4.1. Diagnostic stratégique
Le diagnostic stratégique consiste à comprendre la situation actuelle (du moment) de
l’organisation par une analyse de l’organisation elle-même et de son environnement
(microenvironnement et macro environnement).
Le diagnostic stratégique vise à positionner l’entreprise et ses concurrents sur le marché
afin de maintenir les choix stratégiques ou les modifier, en tenant compte de deux niveaux.
L’attractivité du secteur (opportunités, menaces), les potentialités intrinsèques ou caractéristiques
de l’entreprise (forces, faiblesses).
Ainsi, on distingue le diagnostic interne (forces et faiblesses) et externe (opportunités et
menaces).
a- Diagnostic externe (D.E): le DE a pour objectif de recenser toutes les influences de
l’environnement et de dresser une cartographie qui permet d’identifier et de comprendre celles
qui ont un réel impact sur l’organisation et sur lesquelles elle peut agir. Le DE concerne
l’analyse concurrentielle et l’analyse de l’environnement.
• L’analyse concurrentielle : la formulation de la stratégie passe par une analyse fine des
concurrents.

4
L’analyse concurrentielle est centrée sur les rapports entre l’entreprise et ses différents
marchés, ses concurrents, ses clients… . Elle consiste à appréhender les activités stratégiques de
l’entreprise de manière à faciliter la formulation des options stratégiques possibles.
• L’analyse de l’environnement : l’environnement de l’entreprise est composé de deux variantes :
Le macro environnement : il s’agit des facteurs globaux qui ont une influence sur toutes les
organisations (facteurs sociopolitiques et juridiques, technologiques, démographiques,
géographiques, culturels…). L’entreprise n’a pas beaucoup de moyen pour agir sur ce type
d’environnement.
Le microenvironnement (secteur économique) : c’est l’environnement immédiat de
l’entreprise constitué de plusieurs intervenants ayant des relations directes avec les entreprises. Ces
dernières peuvent, contrairement dans le cas de macro environnement, influencer par leurs actions
sur cet environnement. Il s’agit de l’analyse des comportements des clients, des fournisseurs, des
concurrents directs, indirects et potentiels (analyse du secteur chez PORTER).
b- Diagnostic interne (D.I): il a pour objectif d’analyser les forces et les faiblesses de l’entreprise
et celles de ses DAS (mesurer las capacités présentes et futures). Aussi, il permet à l’entreprise
de comparer ses forces et ses faiblesses par rapport aux concurrents, afin de déterminer sa
position sur le marché.
• Analyse de la position concurrentielle de l’entreprise : il s’agit de positionner l’entreprise par
rapport à ses concurrents en termes de FCS propres au DAS analysé, évaluer la performance de
l’entreprise de chacun de ses concurrents sur les différents FCS.
Ainsi, cette analyse porte sur l’évaluation1 :
- La rentabilité et la puissance financière : capacités d’autofinancement, les ressources propres
externes…)
- L’image et l’implantation commerciales :
- Les ressources technologiques : en termes de maîtrise et de compétences technologiques
(technologie de base, clé, de pointe et émergente).
- La position sur le marché : il s’agit de la part de marché (absolue ou relative) et son évolution.
- La position en matière de coûts : coûts de production, commercialisation, approvisionnement…
• Le Benchmarking : il consiste à analyser les performances de l’entreprise sur ses FCS et les
comparer avec ceux des meilleurs concurrents dans son secteur.
• L’analyse fonctionnelle : elle consiste à analyser les principales fonctions de l’entreprise pour
déterminer les forces et les faiblesses, et les comparer avec les concurrents.
- Évaluer les ressources humaines : du point de vue quantitatif et qualitatif.
- Évaluer les moyens matériels et technologiques, et R&D.
- Évaluer les moyens financiers.
- Évaluation de l’organisation, culture, management, communication …
- Analyse de la fonction commerciale et approvisionnement.

4.2. Plan stratégique


Un plan stratégique consiste en un document établissant une série d'actions ou de stratégies pour
atteindre un ou plusieurs objectifs au sein d'une entreprise ou d'une organisation dans un délai
raisonnable.

On parle aussi de planification stratégique dont les buts gravitent autour de l'acquisition de
ressources ou de la hausse des performances.

1
Il s’agit de facteurs clés de succès.

5
Elle passe par la définition des objectifs de l’organisation, l’élaboration d’une stratégie globale
pour les atteindre et la création d’une hiérarchie complète de plans pour intégrer et coordonner
des activités (ce qu’il faut faire et la façon de procéder).
Elle permet d’avoir une orientation- réduire l’impact des changements- limiter les pertes et les
actions superflues (redondances)- établir des normes facilitant le contrôle.

Lors de la rédaction du plan, le management ou les analystes tiennent compte de plusieurs facteurs
déterminants :
1. les ressources disponibles ;
2. les actions à coordonner ;
3. l'écosystème évolutif incluant un ensemble de risques ;
4. les objectifs précis à atteindre.
Les managers, cadres, dirigeants et chefs d'entreprises se retrouvent alors en possession d'un
document vital devant être concis, précis, pragmatique et efficace.
Le plan stratégique dessine une orientation réaliste, un cap clair et une vision lucide de la
marche de l'entreprise au futur afin que tous les collaborateurs et l'environnement associé
puissent s'associer à la réussite de la structure.
On comprend aisément que la planification est une forme validée de projet global engageant les
ressources de l'organisation.
Dans ce concept, on décèle, en arrière‐plan, une dose d'essai d'anticipation, de prospective ou de
tentative de prévision afin de faire face aux évolutions du monde des affaires.
La construction d'un plan stratégique se base sur une réflexion stratégique en amont, faisant ainsi
converser l'ensemble des acteurs internes et externes à l'organisme.
Les agents économiques agissant pour bâtir et rédiger le plan se concentrent autour des conseils en
stratégie regroupant des profils variés qu'on peut trouver au sein de l'organisation ou à l'extérieur
en fonction des besoins et des ressources.
En élargissant le champ d'action, on évoque souvent l'expression de feuille de route à destination
de la prise de décision en support des décideurs de PME, PMI, grandes entreprises ou
institutionnels.

-Processus de management stratégique-

1 2 3

Analyser Identifier les


Identifier les l’environnement opportunités 6 7
missions, les et les menaces Réviser la Formuler
objectifs et les mission les
4 5
stratégies du et les stratégies
(moment) de 8Analyser les objectifs 8
Identifier les
l’organisation analyser
ressources de forces et les Mettre en
l’organisation faiblesses œuvre les
stratégies
9

(1+2+3+4+5+6+7)=planification stratégique Évaluer les


Planification stratégique +8+9=management stratégique résultats

6
5. Stratégie financière
5.1. Définition et objet de la stratégie financière
La stratégie financière correspond à un ensemble de processus permettant d'arriver à un
objectif financier pour une entité donnée dans un horizon de moyen ou long terme.
Les leviers utilisés sont essentiellement les ressources allouées, les moyens et les actions.
La stratégie financière est déterminée par le management, la direction financière, un cabinet
d'audit, une société de conseil, un expert‐comptable, etc.
La construction d'une stratégie financière nécessite, au préalable, un diagnostic sur les finances de
la structure en considérant son écosystème intérieur et extérieur.
L'objet d'étude sera d'identifier les points financiers de vulnérabilité et de résilience afin de
solidifier ou de réparer dans un cadre contextuel et circonstancié.
Le centre de l'analyse gravitera autour du bilan comptable, des données financières de la chose et
de l'environnement économique d'évolution – l'analyste pourra aussi considérer la stratégie globale
pour être en raccord.
L'objectif final consiste à améliorer et à optimiser les performances de l'organisation en
tenant compte des paramètres de la situation et des contraintes évolutives.
Par définition, la stratégie financière est fixée à terme, c'est-à-dire qu'elle consiste en une
évaluation, en une perspective ou en un futur financier probable ou souhaité – cela reste du domaine
de l'intentionnalité ou du désir d'avenir en se basant sur des éléments comptables du présent/du réel.
La projection financière reste une forme de prospective qu'on doit prendre avec le recul nécessaire
au regard des difficultés évidentes à réaliser des prévisions dans un monde économique en pleine
mutation.
Exemples de paramètres classiques à tenir compte dans l'élaboration d'une stratégie
financière par le management financier :
1. les risques globaux ;
2. l'évolution des moyens de financement et les coûts associés (taux d'intérêt) ;
3. l'évolution des zones géographiques et leurs devises ;
1.4. les rétributions des actionnaires ou sociétaires ;
2.5. l'évolution de la masse salariale ;
3.6. l'évolution du cadre fiscal et social ;
4.7. l'évolution des marges commerciales ;

La stratégie financière peut être adaptée à des besoins spécifiques :


• Création ou reprise d’entreprise
• Investissements matériels ou immatériels significatifs
• Financement de l’immatériel (R&D) ou du BFR
• Investissement immobilier
• Difficultés financières
5.2. Étapes de la stratégie financière :
A. Diagnostic financier : cela se passe par :
• Analyse des bilans et comptes de résultat
• Comparaison sectorielle sur longue période
• Mise en évidence des points forts et de faiblesses
Objectifs : Dégager les axes de progrès pour renforcer la performance financière de
l’entreprise et sa trésorerie. Sécuriser l’entreprise et améliorer le rendement des fonds propres.
B. Business plan :
Le business plan est un document majeur de prévision de l’entreprise. En interne, il doit
permettre au comité de direction de valider la pertinence et le bon dimensionnement du projet. En
externe, il est destiné à convaincre les partenaires, banquiers ou fonds commun de placement de la
cohérence et de la rentabilité de votre projet.

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Une attention particulière sera portée au cours de cette formation sur l’optimisation de la
performance financière en cohérence avec la stratégie de l’entreprise.
Il s’agit de l’étude de plusieurs scénarios de développement et validation de leur faisabilité
financière, au travers de projections financières comprenant :
• Compte de résultat prévisionnel
• Plan de financement
• Bilan prévisionnel
• Plan de trésorerie
Objectifs : aider les responsables à poser les bonnes questions, éclairer leurs choix sur le plan
financier et les appuyer dans la mise en forme du dossier financier à destination des banques ou
investisseurs.
I. Gouvernance bancaire
1. Généralités sur la gouvernance
A. Origine et définition de la gouvernance
L’objet de cette section est de clarifier le parcours historique et étymologique du concept de la
gouvernance tout en soulignant l’acception courante.
Les origines étymologiques de la gouvernance sont diverses et il est important avant
d’approfondir notre analyse de connaître les différentes définitions de la gouvernance. Ces
définitions de la gouvernance - car il faut bien utiliser le terme pluriel en vue des diverses influences
qui sont à l’origine d’une multitude de perceptions et de son caractère polysémique- sont diverses
et évoluent en fonction des mutations que les entreprises et leur fonctionnement ont subies, mais
surtout en fonction de l’activité académique intense qu’elle a suscité depuis des décennies.
Etymologiquement, le mot gouvernance vient du grecque ‘’kubernân’’ qui signifie ‘’diriger’’
qui a donné kubernêtikê, « l’art du pilotage » d’un char ou d’un navire. Le terme a évolué vers le
latin pour devenir ‘’gübërnäre’’ et désignait de manière plus précise ‘’gouverner les hommes’’
(Maugeri, 2014, p. 13), ou ‘’gubernamen’’ qui prend un sens précis concernant la seule gestion de
l’Etat (Gomez, 1996, p. 234). On rencontre le vocable gouvernance dans la langue française au
XIIIème siècle, utilisé comme équivalent de ‘’gouvernement’’, puis au XIVème siècle avec le sens
d’« art de gérer », et à partir de 1478 pour désigner certains territoires du nord de la France dotés
d’un statut administratif particulier (Paye, 2005, p.13). Son équivalent anglais « governance » est
attesté pour la première fois en 1380, avec le même sens. Mais ce n’est que dans les années 1980
que les mots ‘’gouvernance’’ et ‘’governance’’ ont refait véritablement leur apparition et ont été
remis à l’honneur dans les années 1990 par des économistes et politologues anglo-saxons, ainsi que
par certaines institutions internationales (ONU, Banque Mondiale et FMI, notamment), de nouveau
pour désigner ‘’l'art ou la manière de gouverner’’. L’utilisation du mot gouvernance dans la
littérature économique remonte au débat entamé par Berle et Means (1932) pour expliquer le
dysfonctionnement de la firme managériale ou démocratique et la crise de 1929 - par la défaillance
du système de contrôle des dirigeants ayant une fonction d’utilité distincte de celle des actionnaires
- ce qui a favorisé l’apparition de comportements opportunistes. Puis, il sera utilisé en 1937 dans
l’article devenu très célèbre de Coase « the nature of the firm ». Avec le temps, le concept de
gouvernance a évolué considérablement et a pris plusieurs définitions. Le comité britannique, dans
son rapport annuel Cadbury (1992), a souligné que « la gouvernance est le système par lequel les
sociétés sont dirigées et contrôlées ». Shleifer et Vishny (1997)2 ont défini la gouvernance comme
l’« ensemble des mécanismes qui garantissent aux différents bailleurs de fonds un retour sur
l’investissement, en évitant une appropriation de valeur excessive par le dirigeant et les
actionnaires dominants ». Cette définition sous-entend que le rôle d’un système de gouvernance et
de limiter, par le biais d’un ensemble de mécanismes, le pouvoir des dirigeants et des actionnaires
de contrôle et que la valeur de la firme est appréciée à l’aune des intérêts des différents
investisseurs. Néanmoins, même s’ils insistent sur la notion de contrôle, ils restent vagues sur les

2
In, Wirtz (2008), p. 8.

8
moyens dont sont dotés les investisseurs pour surveiller la gestion de leurs fonds. Quant à La Porta
et al. (2000), ils soutiennent que « la gouvernance d’entreprise est l’ensemble des dispositions, des
institutions et des règles de droit conçues pour empêcher l’éviction des investisseurs minoritaires
par les dirigeants majoritaires ». Cette définition signifie que l’objectif de la gouvernance est de
protéger les actionnaires de l’opportunisme des dirigeants, mais également elle met l’accent sur
l’existence de frictions qui peuvent subsister entre les actionnaires minoritaires et ceux majoritaires,
dues essentiellement aux comportements opportunistes de ces derniers. Selon un ‘’rapport final du
groupe d’experts sur la gouvernance d’entreprise en Suisse ‘’, « la gouvernance peut être définie
d'un double point de vue : au sens large, comme l’ensemble ‘’des questions d’organisation et de
structures qui sont en rapport direct ou indirect avec la protection des actionnaires’’ et au sens
strict, comme l’ensemble des questions d’organisation et de contrôle des principaux organes
dirigeants des entreprises, c'est-à-dire essentiellement des questions d’équilibre et de
transparence » (Ludentu, 2008, p.11). Ces deux définitions mettent en évidence la question de
l’équilibre de pouvoir entre les différentes composantes de l’entreprise et l’importance de la
transparence pour le maintien de cet équilibre. Williamson (1985)3 définie la ‘’corporate
governance’’ ou la gouvernance d’entreprise, qu’il élargie à l’ensemble des organisations (même
étatiques), comme étant les structures gouvernant les transactions qui se produisent entre
l’entreprise (ou l’organisation) et ses dirigeants. Cette définition montre que l’objet de la
gouvernance n’est pas l’apanage des entreprises managériales, mais il peut être étendu à des
organisations ou institutions étatiques, tels que les gouvernements. Charreaux (1997, 2004), en
définissant la gouvernance comme « l’ensemble des mécanismes organisationnels ou
institutionnels ayant pour effet de délimiter les pouvoirs et d’influencer les décisions des dirigeants,
managériaux ou politiques, autrement dit qui ‘’gouvernent’’ leur conduite et définissent leur
espace discrétionnaire », semble approuver la perception de Williamson (1984), dans le sens où la
définition qu’il propose parle aussi bien de la gouvernance publique que de la gouvernance privée.
Toutefois, certains auteurs confondent parfois entre le management et la gouvernance. Selon
Pérez (2003, p. 24), l’objet de la gouvernance n’est pas d’étudier la façon dont les dirigeants
gouvernent, ce qui conduirait à confondre gouvernance d’entreprise et management, mais plutôt la
façon dont ils sont gouvernés. C’est ainsi qu’il qualifie la gouvernance d’entreprise de
«management du management ». Le terme ‘’gouvernance’’ ne doit pas être confondu avec celui
‘’gouvernement’’, même s’ils ont la même origine. Selon le Journal Officiel de la République
Française, repris par (Maugiri, 2015, p. 14) « le gouvernement, c’est le hiérarchisme,
l’autoritarisme, le centralisme ; la gouvernance, c’est la délibération, la démocratie, le
consensus ». Par ailleurs, le caractère plurivoque de la gouvernance a longtemps empêché son
institutionnalisation. En France par exemple, l’institutionnalisation de ce terme n’intervient que le
22 Avril 2009, date à laquelle le Journal Officiel de la République Française publia la définition du
mot gouvernance : « manière de concevoir et d’exercer l’autorité à la tête d’une entreprise, d’une
organisation, d’un État […]. La gouvernance s’apprécie non seulement en tenant compte du degré
d’organisation et d’efficience, mais aussi et surtout d’après des critères tels que la transparence,
la participation, et le partage des responsabilités » (Maugiri, Op. Cit.). En Algérie, le Code
Algérien de Gouvernance d’Entreprise (2009) définit la gouvernance comme celle qui « …est à la
fois, une philosophie managériale et un ensemble de dispositions pratiques visant à assumer la
responsabilité et la compétitivité de l’entreprise par le biais de : la définition des droits et des
devoirs des parties prenantes ; le partage des prérogatives et responsabilités qui en résultent »
(GOAL, 2009, p. 16).
Nous retenons cette définition de la gouvernance qui résume toutes celles évoquées
précédemment « …un système permettant la défense de l’intérêt social, la conduite, la gestion, le
contrôle et la pérennité de l’entreprise, précisant les pouvoirs, les responsabilités et les relations
des actionnaires et des dirigeants, et s’assurant que l’objectif de création de valeur pour l’ensemble

3
In, Charreaux (1997), p. 442.

9
des parties prenantes est bien pris en charge » (Cabane, 2013, p. 24). Cette définition rend compte
implicitement des dissensions potentielles entre les différentes parties prenantes en termes
d’intérêts, de répartition de pouvoir et de responsabilité, et le rôle de système de gouvernance à
travers ses différents mécanismes dans la création et le partage équitable de la valeur.
B. Mécanismes de la GE
Il existe une multitude de mécanismes de gouvernance, néanmoins il est impossible de
disposer d’une liste exhaustive, car le système de gouvernance est contingent à la forme des
entreprises et à leurs caractéristiques (Wirtz, 2011).
En se basant sur le critère de réduction des coûts d’agence, la théorie normative d’agence
identifie deux types de mécanismes de contrôle (monitoring) des dirigeants : mécanismes internes
et mécanismes externes. En élargissant l’analyse à d’autres stakeholders, notamment les salariés,
et en nous basant sur le principe d’efficacité des mécanismes et formes organisationnelles dans la
réduction des coûts de transaction et des coûts d’agence de Williamson (1985) (Cf. chapitre 1,
section 2, p. 42 et suivantes), nous pouvons aboutir à deux types de mécanismes de gouvernance:
les mécanismes intentionnels de nature institutionnelle et les mécanismes spontanés de nature
contractuelle. Deux typologies des mécanismes de gouvernance composant les systèmes de
gouvernance des entreprises, associées aux courants théoriques de l’agence et des coûts de
transaction, peuvent ainsi être conjuguées.
Le croisement entre ces deux critères de classification permet de concevoir une typologie
élargie des mécanismes de gouvernance d’entreprise (Charreaux, 1997, pp. 149-150):
premièrement, les mécanismes externes (la discipline par le marché) qui sont la résultante d’un
fonctionnement spontané des marchés, tels que le marché des biens et services, le marché financier
(particulièrement, comme lieu de réalisation des prises de contrôle), les relations de financement
avec les banques, le marché de travail, notamment celui des managers et l’environnement légal,
politique et réglementaire ; deuxièmement, les mécanismes internes qui sont le fruit d’une
conception intentionnelle de la firme, tels que le contrôle exercé par les actionnaires, la surveillance
mutuelle entre dirigeants, les contrôles formels ou informels mis en place par les employés et le
conseil d’administration.
Nous synthétisons les types de mécanismes de gouvernance dans le tableau suivant :
Typologie des mécanismes de gouvernance
Mécanismes internes Mécanismes externes
Mécanismes • Contrôle direct des actionnaires • Environnement légal et
intentionnels (assemblée des actionnaires) réglementaire
• Conseil d’administration.
• Structure formelle.
Mécanismes spontanés • Structure informelle. • Marchés des biens et des services,
• Surveillance mutuelle. financier, du travail, politique, du
• Culture d’entreprise. capital social.
• Réputation interne. • Intermédiation financière.
• Environnement ‘sociétal’,
médiatique.
Source : Charreaux, (2000). p.08.

a. Mécanismes internes

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Nous distinguons deux catégories de mécanismes internes de gouvernance d’entreprise 4:
les mécanismes internes intentionnels et les mécanismes internes spontanés.
- Le conseil d’administration (CA): le CA est un mécanisme majeur dans la gouvernance
d’entreprise, car il peut influencer l’action des dirigeants en matière de création de valeur,
comme il est susceptible de leur faciliter le repérage des meilleurs projets, ainsi que l’élaboration
de la stratégie d’investissement (Wirtz, 2008, p. 29). Principalement, il est constitué des
dirigeants, des actionnaires majoritaires, de représentants des actionnaires minoritaires,
d’administrateurs non dirigeants (externes), etc. D’une manière concise et sur le plan pratique,
il est chargé de représenter les actionnaires, rémunérer et évaluer et, dans certains cas, révoquer
les dirigeants. De plus, on lui attribue plusieurs autres missions :
• Le CA est chargé donc du contrôle et de la discipline des dirigeants ; veiller à ce qu’ils ne
développent leur latitude discrétionnaire et lutter contre leur enracinement. Il est aussi chargé d’une
mission d’évaluation des dirigeants à travers une estimation des capacités et des efforts des
dirigeants (une performance médiocre est synonyme soit d’une incompétence, soit des efforts
insuffisants). On distingue deux types de contrôle : l’un est prospectif, constitué de l’ensemble de
procédures correctives permettant d’anticiper certains comportements des dirigeants ; et l’autre est
rétrospectif et représente l’ensemble des procédures et outils permettant une évaluation
comparative entre les résultats et les standards prédéfinis.
Le CA dispose de deux leviers d’action privilégiés : le mode de rémunération des
dirigeants, dont on distingue trois catégories (Charreaux, 1997, p. 43): premièrement, la
rémunération indépendante de la performance réalisée (salaires, retraites et assurance vie). Celle-
ci est fixe et, si elle est négociée régulièrement, permet de résoudre les conflits. Cependant, le
système incitatif devient défaillant et les dirigeants auraient tendance à accroitre leurs prélèvements
non pécuniaires. Deuxièmement, la rémunération tributaire de la performance qui est évaluée à
partir des cours boursiers (attribution d’actions aux dirigeants et stock options). Ce mode de
rémunération est incitatif, car les dirigeants bénéficient de l’augmentation de valeur de l’action, ce
qui peut les conduire à prendre plus de risques dans les investissements. Troisièmement, la
rémunération dépendante des mesures comptables et de la performance (bonus…) qui permet de
résoudre les conflits liés aux divergences d’ambitions et d’horizons. Ajoutant à cela, la surveillance
mutuelle entre les dirigeants siégeant au conseil.
• Elaboration des orientations stratégiques de la firme : le CA intervient dans le processus
décisionnel relatif à l’élaboration des stratégies d’investissement de l’entreprise.
• Il constitue un pont entre la firme et son environnement par la mise en place de moyens
permettant une meilleure visibilité de l’environnement et des sources de financement, comme il
contribue à l’amélioration de l’image de marque de la firme.

Sur un plan théorique, et selon les approches disciplinaires, par le contrôle qu’il exerce sur
les dirigeants, le CA permet de réduire les coûts d’agence et de transactions entre les différents
stakeholders, et maximise la valeur. De ce fait, il constitue un mécanisme organisationnel
permettant de garantir la sécurité des transactions entre l’ensemble des partenaires au sein de la
firme (Williamson, 1985). Charreaux (2000, pp.10-12) décrit le CA comme celui qui « intervient
comme un organe hiérarchique qui, outre son rôle d’arbitre dans le partage de la rente, doit
encourager le travail en équipe. […] il intervient pour protéger l’ensemble des relations créatrices
de valeur, préserver et accroître le caractère productif du nœud de contrats, [et] contribue au
processus d’innovation». Son efficience se réalise si le coût qu’il induit est inférieur à la réduction
de perte de valeur (sous-investissement ou surinvestissement, dépenses somptuaires) qu’il permet.

4 Charreaux (1997, p. 424), en reprenant la classification faite par Jensen (1993) et Mintzberg (1983), distingue deux
types d’acteurs détenteurs d’influence : les acteurs appartenant à la coalition externe (propriétaires, associés, fournisseurs,
clients, concurrents, regroupements de salariés, les différents publics et les administrateurs) et ceux constituant la
coalition interne (le PDG, les opérateurs, les cadres, la technostructure, les supports logistiques et l’idiologie).

11
L’approche actionnariale met l’accent sur certains attributs du CA qui lui permettent de minimiser
la perte de la rente organisationnelle, tels que l’indépendance du CA; son rôle disciplinaire qui
dépend du type du CA5; sa taille (nombre d’administrateurs siégeant au CA)6; sa forme (unitaire ou
non); sa composition (proportion des administrateurs externes siégeant au CA et leur influence,
contre la proportion des membres internes à la firme) 7; la séparation des tâches entre le président
et le directeur général, et l’indexation de la rémunération des dirigeant à la performance boursière.
Cependant, cette efficacité du CA liée à son pouvoir disciplinaire est relative, car les dirigeants
disposent de stratégies pouvant neutraliser la fonction de contrôle du CA, telles que l’information
sélective des administrateurs, la nomination d’administrateurs qui leur sont favorables (cadres
internes, conseillers divers…) et autres stratégies d’enracinement. Par conséquent, le CA doit être
associé à d’autres mécanismes (internes ou externes). Sur ce point, Charreaux (2000, p. 6) souligne
que le CA « n’est qu’un instrument particulier du système de gouvernance; il intervient, soit de
façon complémentaire, soit pour substituer à d’autres mécanismes internes ou externes ». De plus,
ce rôle disciplinaire n’est apparent que dans les grandes sociétés cotées en Bourse (sociétés dites
managériales), là où le capital est diffus (absence d’actionnaires de contrôle), car dans le cas inverse
c’est l’actionnaire dominant qui assure le monitoring. D’autant plus, si on se réfère à la composante
du CA, des salariés ou des créanciers par exemples sont parfois membres. De ce fait, cette fonction
disciplinaire peut dépasser les seules relations actionnaires/dirigeants pour toucher d’autres parties
prenantes. Cette vision partenariale des relations au sein du CA, bien qu’elle lui attribue également
un rôle disciplinaire, elle le perçoit néanmoins comme un instrument facilitant la création de valeur.
En effet, comme cela est stipulé dans la théorie de l’intendance (Cf. chapitre 1, section 3, p. 60),
les dirigeants peuvent se comporter comme de bons intendants, humanistes et menés de bonnes
intentions. Dès lors, le CA apparait comme un organe hiérarchique qui, en plus de son rôle arbitral
dans la répartition de la rente organisationnelle, on lui confère la mission de coordonnateur du
travail en équipe (salariés, fournisseurs, dirigeants d’autres sociétés…). Cela soulève le doute sur
l’efficacité et même sur la justification du rôle disciplinaire du CA. Il s’agit de la mise en évidence
de l’importance accordée au caractère collectif de la création de valeur (valeur partenariale).
Dans la théorie cognitive de la gouvernance, le rôle du conseil d’administration dépasse la
seule défense des intérêts des actionnaires, il constitue un mécanisme chargé d’assurer la meilleure
coopération possible entre le dirigeant et les actionnaires (Charreaux, 2000). Il intervient comme
un organe hiérarchique qui, outre son rôle d’arbitre dans le partage de la rente, doit encourager le
travail en équipe. À cette fin, il doit être composé principalement d’administrateurs ayant les
capacités de contribuer à la création de compétences dynamiques et assister les dirigeants dans la
conception d’une vision facilitant l’apprentissage organisationnel, a contrario des approches
financières qui insistent sur l’importance de l’indépendance des administrateurs pouvant exercer
un contrôle sur les dirigeants. Conséquemment, la qualité du CA ne se mesure pas par le degré de
son indépendance et de l’existence d’administrateurs externes, mais par la diversité des membres
qui le composent et de leurs compétences.
b. Assemblée des actionnaires : les actionnaires avec leur droit de vote constituent un mécanisme
déterminant de la gouvernance. Ils détiennent la majorité des actions de la firme qui sont
transigées sur le marché financier. Ils participent aux assemblées générales (même si on
s’accorde généralement à reconnaître le faible taux de participation aux assemblées générales)

5 En combinant entre le critère du pouvoir du CA sur les dirigeants et celui de l’activité du conseil (implication du CA

dans l’élaboration de la stratégie), Charreaux (1997, p. 161) obtient quatre types de CA : contrôleur; formel; dominant
et participatif.
6 Il y a une corrélation positive entre la taille du CA et son efficacité. Toutefois, [Jensen (1993), in Andriamasi et Rakoto

(2008, p. 64)] montre qu’il existe une taille optimale au-delà de laquelle le CA n’est plus efficace ou du moins son
efficacité n’augmente pas avec l’accroissement de la taille.
7[Fama (1980) et Jensen (1983), in Caby et Hirigoyen (2005), p.91] ont préconisé de faire entrer au Conseil des

administrateurs externes, i.e. n’exerçant par de fonctions managériales dans l’entreprise, afin de renforcer l’indépendance
et la qualité du contrôle.

12
et aux CA à travers leur représentants. Ils ont la possibilité de vendre leurs actions, comme ils
peuvent manifester leur approbation ou désapprobation quant à la politique menée par l’équipe
dirigeante. La présence d’un actionnaire dominant constitue un moyen efficace de contrôle sur
l’équipe directionnelle et évite les écarts de conduite.
c. La culture d’entreprise : elle est définie comme un ensemble de valeurs, de façons de penser et
de croyances communes quant à la manière dont les choses doivent être réalisées (Milgrom et
Roberts, 1997, p. 179). La culture organisationnelle repose sur les artéfacts (symboles,
comportements, rites, histoire de l’organisation), les valeurs et les croyances qui s’expriment
dans l’organisation. Elle est considérée comme l’ensemble de références partagées dans
l’organisation, construites tout au long de son histoire en réponse aux problèmes rencontrés dans
l’entreprise ; la culture est ce qui unifie l’entreprise dans ses pratiques et qui la distingue des
autres. C’est un ensemble de relations implicites entre les parties prenantes de l’organisation
qu’il est difficile à modifier et qui encadrent le comportement des dirigeants.

d. Les salariés : grâce à leurs représentants au comité de l’entreprise, les salariés ont le droit à
l’information sur la situation financière de l’entreprise, comme ils participent au processus
décisionnel en demandant via leurs représentants dans le CA des expertises de gestion et en alertant
en cas d’irrégularités constatées et avérées, les services de justice compétents.

B. Mécanismes externes.
Ce sont des mécanismes qui ne sont pas mis en place par l’entreprise.
a. Les agences de réglementation, système légal et environnement politique
Le système légal agit en faveur des investisseurs et des actionnaires/propriétaires à travers la
formalisation et la divulgation de l’information liée à la firme, les restrictions sur les transactions
et les sanctions. Néanmoins, son efficacité est relative, car le pouvoir discrétionnaire des dirigeants
est considérable (Label et Koyo, 2012, 74).
L’environnement politique est représenté par les pouvoirs publics (internationaux, nationaux,
locaux…) et les partis politiques. Sa contribution aux entreprises revêt des formes diverses
(contrôle réglementaire et législatif, formation du capital humain, sécurité, subventions et aides
multiples, etc.) (Charreaux, 1997, p.49). Il peut contraindre par exemple les entreprises à utiliser
plus de main d’œuvre ou même s’immiscer dans la composition de cette main d’œuvre (exiger
d’inclure des catégories d’âge ou de sexe déterminées). Les salariés et les actionnaires peuvent
utiliser la voie politique pour faire pression sur les dirigeants et, inversement, ces derniers peuvent
s’enraciner d’avantage en utilisant cette même voie (promesse de création d’emploi, lobbying…).
b. Les créanciers :
Ils empêchent les dirigeants de s’accaparer des liquidités excédentaires dégagées par les
différentes activités de la firme et le réinvestissement très risqué et peu rentable de ces liquidités.
De plus, ils veillent à la réduction du risque que les capitaux prêtés soient utilisés à d’autres fins
que le financement des projets qui les intéressent. Ils peuvent recourir à divers moyens, tels que les
clauses contractuelles, les clauses de garantie, les paiements échelonnés, etc.
c. Les investisseurs institutionnels (fonds de pensions, fonds de placement ‘’mutual funds’’, fonds
d’arbitrage ‘’hedge funds’’, fonds spéculatifs, organismes chargés de la retraite des salariés,
compagnies d’assurance, etc.) : les investisseurs financiers ont pour projet la pérennité et la
valorisation du portefeuille et de l’argent d’autrui qui leur sont confiés et qu’ils font prospérer par
l’acquisition des diverses valeurs mobilières des différentes entreprises. Ils détiennent des titres de
propriété sur les entreprises qui leurs permettent de générer de la richesse en utilisant leurs droit de
fructus et d’abusus et en comparant les gains de leurs investissements avec ceux qu’ils
obtiendraient de tout autre investissement en calculant ce que les économistes appellent un ‘’coût

13
d’opportunité’’. Ils participent rarement à la gestion de l’entreprise, sauf s’ils sont contraints8, et
portent peu d’intérêt à l’entreprise dont ils détiennent des titres. Leur participation dans le capital
de l’entreprise n’est qu’un investissement parmi d’autres ; d’ailleurs c’est l’un des points qui les
différencient des actionnaires. Toutefois, ils constituent un levier efficace de contrôle de l’équipe
dirigeante autant que les actionnaires, mêmes si leurs rôles et leurs objectifs sont différents, et ce
grâce à la possibilité qu’ils ont de vendre les actions de l’entreprise et de l’impact sur le marché.
Aussi, ils peuvent intervenir par exemple en redéfinissant le fonctionnement du conseil
d’administration pour qu’il soit plus efficace dans son rôle de représentant des actionnaires et dans
le contrôle des dirigeants (Milgrom et Roberts, 1997, p. 678).
d. Marché des prises de contrôle (Offres Publiques d’Achat et Offre Publique d’Echange): il
constitue une menace permanente pour les dirigeants incompétents et un mécanisme efficace
d’incitation à la performance pour les dirigeants (Bancel, 1997, p. 24). Cependant, la prise de
contrôle est un mécanisme très coûteux et elle n’est censée intervenir qu’en dernier recours. Ce
mécanisme, s’il est prouvé qu’il enrichie les actionnaires, néanmoins ne constitue pas un moyen de
création de richesse. Pareillement, il est peu efficace pour discipliner les dirigeants, car lors des
prises de contrôle, on procède d’avantage à une redéfinition du système de rémunération qu’au
remplacement des dirigeants qui ne constitue que la solution ultime. Toutefois, même si l’on
procède au remplacement des dirigeants non performants, les nouveaux dirigeants pourraient
vraisemblablement poursuivre des objectifs autres que ceux des actionnaires.
e. Marché de travail (des managers) : le marché de travail constitue à la fois un mécanisme
disciplinaire et incitatif. Un marché concurrentiel des dirigeants devrait permettre d’orienter les
dirigeants les plus efficaces vers les entreprises les plus performantes. Ainsi, les dirigeants les plus
compétents, i.e. les plus aptes à créer de la valeur pour les actionnaires, ont intérêt à être recrutés
par les firmes les plus performantes (Charreaux, 2000, p.13). A contrario, les dirigeants réalisant
de mauvaises performances sont pénalisés, soit en perdant leur position dans l’entreprise, soit en
entachant leur réputation. Ce mécanisme permet par ailleurs de fournir une base de référence par
la détermination de la rémunération des dirigeants (Dhahri-Sellami, 2012, p.52).
f. Le marché des biens et services ou la discipline par la concurrence: il oriente les dirigeants à
poursuivre des objectifs allant dans le sens des actionnaires/propriétaires, parce que s’il est
compétitif il est susceptible de contraindre la firme à rationaliser les coûts de production. Si les
dirigeants opèrent des prélèvements trop importants, il en résulterait une hausse des prix et, de
façon concomitante, une perte de compétitivité qui conduirait à des ajustements en sens inverse
(Caby et Hirigoyen, 2005, p. 103). Néanmoins, pour qu’il soit efficace ce mécanisme doit être
parfaitement compétitif. En effet, le marché concurrentiel dans lequel le risque de faillite est
omniprésent, les dirigeants sont contraints de fournir un effort afin de ne pas mettre en péril leur
entreprise, y compris dans les entreprises publiques. Labaronne (2002) souligne que durant la
période de transition des pays de l’Est, les dirigeants des entreprises publiques ont engagé un
ensemble de réformes par crainte de la menace que pourraient présenter les entreprises privatisées,
mais également de l’éventualité de voir privatiser leur propre entreprise. Par contre, les dirigeants
des entreprises non exposées à la compétition des autres firmes et donc à la faillite, tendent à abuser
de la protection que leur offre le contexte d’un marché non concurrentiel.

g. Marché et intermédiaires financiers : le marché financier joue un rôle à travers les actionnaires
qui, s’ils sont insatisfaits, pourraient toujours vendre leurs titres, entrainant ainsi la dépréciation de
la valeur de la société. Cela se répercuterait négativement sur les dirigeants (baisse de la
rémunération, notamment si elle est indexée à la performance et au cours…). Le marché financier
permet aussi de prendre le contrôle d’une autre firme avec tout ce que cela peut générer comme

8 C’est pour cette raison que le législateur a contraint les investisseurs à participer au gouvernement d’entreprise, par
exemple aux assemblées, ou tout au moins à transmettre leurs droits de vote et à rendre publiques leurs intentions vis-à-
vis des résolutions présentées à l’assemblée générale (Gomez et Korine, 2009, p. 154).

14
menaces pour les dirigeants. La valeur de l’action qui s’établit dans les marchés boursiers reflète la
performance des dirigeants et de la firme. Lorsque le prix de l’action baisse, cela constitue une
opportunité pour les acquéreurs hostiles qui vont s’en passer, après la prise de contrôle, d’une
direction peu performante. De là, les intermédiaires financiers ne sont pas que de simples créanciers
de l’entreprise, ils ont un droit de regard sur certains aspects managériaux de l’entreprise, du
moment où ils engagent également leurs intérêts. Conséquemment, les dirigeants sont tenus par la
réalisation d’un certain niveau de performance s’ils veulent convaincre ces banques de financer les
investissements de la firme. Cela peut constituer dans ce cas un mécanisme efficace de contrôle des
dirigeants. Toutefois, les banques ne choisissent pas généralement de financer un projet
d’investissement, mais l’ensemble des opérations de la firme, et leur rentabilité ne dépend pas
uniquement du financement d’un projet, mais d’une relation à long terme. De plus, les dirigeants
choisissent notamment les banques qui leur permettent d’étendre leur pouvoir discrétionnaire et qui
accordent plus de considération au facteur personnel, ce qui peut réduire copieusement l’efficacité
de ce mécanisme.

h. L’éthique et les valeurs de la société : l’environnement social et culturel, à travers les valeurs
et les règles d’éthique qu’il véhicule, influence le comportement des dirigeants. S’ils s’abstiennent
à les prendre en considération, ils s’exposeraient à des pertes de parts de marché, de bons
fournisseurs, etc.

i. Les clients et les fournisseurs : ce mécanisme relève du caractère concurrentiel du marché des
biens et services. Si les dirigeants propriétaires procèdent à des ponctions trop importantes, cela se
répercuterait sur le prix et, par conséquent, une perte de clients et de compétitivité. Néanmoins,
même si les clients, par les associations de consommateurs, pourraient faire pression sur les
dirigeants, le pouvoir discrétionnaire et d’enracinement de ces derniers demeurent importants, et
l’efficacité de ce mécanisme disciplinaire est limitée.

2. La gouvernance dans le secteur bancaire


L’implication croissante des établissements financiers et bancaires dans la sphère réelle et
l’importance des externalités liées aux services bancaires sont à l’origine de l’apparition de la
gouvernance bancaire.
2.1 Définitions et caractéristiques de la gouvernance bancaire
En premier lieu il faut noter que jusqu’à 2011, il n’y avait pas de définition spéciale de la
gouvernance des banques. Les banques sont un élément essentiel et d’une grande importance pour
l’économie ce qui a conduit certains chercheurs à prêter attention à leur gouvernance. Les banques
se distinguent par des caractéristiques particulières qui ont incité ces chercheurs à leur consacrer
des études spéciales. Ces caractéristiques peuvent se résumer comme suit :

• La banque est une entreprise. Les caractéristiques de la firme bancaire consistent en son activité,
en l’existence de coûts de transactions, en l’importance de la diversification des risques, au
degré d’importance de l’innovation au niveau du secteur bancaire ainsi qu’à la réglementation
au niveau de la structure de ce secteur :
• Son activité, que cela soit en banque de dépôt ou de banque d’investissement, implique
l’utilisation de son capital pour sécuriser les transactions qu’elle fait en multiple de celle-ci. La
banque a un devoir fiduciaire vis-à-vis de ses clients et un devoir de sécurité vis-à-vis de ses
actionnaires, ses clients et du marché.
• Les banques sont généralement plus exposées aux asymétries d’informations entre les membres
internes « les dirigeants » et externes « les actionnaires et les déposants » en
comparaison avec des sociétés non financières, parce que les gestionnaires sont plus en mesure
de cacher des informations. Ceci rend difficile pour les actionnaires et les créanciers de
surveiller les dirigeants des banques

15
• Les banques sont caractérisées par l’opacité considérable de leurs actifs à cause de la
diversification d’activités.
• L’importance de l’innovation bancaire, qui permet de créer des produits à marge ou de tenter de
réduire les risques. L’arbitrage est alors de trouver un équilibre entre l’innovation avec des
produits plus rentables et plus risqués et des produits plus classiques et moins risqués.
• La gouvernance bancaire est plus globale que celle des entreprises des autres secteurs : si dans
un sens étroit, la gouvernance se réduit à la défense des intérêts des actionnaires, pour les
banques, il est nécessaire d’adopter une approche plus ouverte des réalités économiques et
financières. En effet, les intérêts des déposants sont tout aussi importants que ceux des
actionnaires et le problème de l’asymétrie de l’information se pose aussi bien pour les premiers
que pour les seconds
• Les différences entre la gouvernance des banques et celle des firmes tiennent au fait que la
faiblesse de la structure de gouvernance bancaire conduit à la déstabilisation du système
financier et de l’économie. C’est pour cette raison qu’elles fortement réglementées et soumises
ainsi à de nombreux systèmes de règles prudentielles, qui sont un élément important et crucial
dans la sécurisation de gouvernance. Dans le secteur industriel, la structure financière des
entreprises est régie par des règles simples et universelles, mais pour les banques la
réglementation de leur activité est régie par plusieurs principes :
- Limiter les risques de l’activité de transformation qu’elles exercent.
-Assurer la liquidité et la solvabilité du système bancaire.
- Protéger l’épargne.

2.2. Les dimensions de la gouvernance bancaire


La gouvernance bancaire a ainsi une double dimension :

A. Une dimension externe


La réglementation prudentielle, qui est l’ensemble des règles visant à mesurer et maîtriser les
risques générés par l’activité bancaire, permet :
* d’harmoniser les conditions d’exercice de la concurrence bancaire, afin de préserver la stabilité
et la solidité du système.
* de renforcer la sécurité bancaire en instaurant des normes de fonds propres et d’utilisation de
ceux-ci.
*d’adapter le fonctionnement des banques aux évolutions des marchés. Face à la montée des risques
bancaires, les normes de supervision bancaire se sont accrues et les dernières sont mises en place
par le comité de Bâle.
B. Une dimension interne
Comme pour toute société, le caractère prédominant de la gouvernance d’une banque est
le mode d’administration choisi et son efficacité. Comme le conseil d’administration est investi des
pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances au nom de la société, dans la limite de
l’objet social et sous réserve de ceux expressément dévolus à l’Assemblée Générale, il convient
que celui-ci soit à même de :
* clairement définir sa mission, qui devra être motivée par l’intérêt social de l’entreprise et l’intérêt
de ses actionnaires et de toutes les parties prenantes. Le conseil d’administration est souvent
suggéré comme mécanisme d’incitation et de discipline des dirigeants, ce qui devrait l’amener à
agir de manière à maximiser la valeur de la firme.
* être composé de membres compétents et capables de challenger la direction générale, car ce sont
eux qui sont comptables de la protection finale des actionnaires et des autres parties prenantes et
d’exercer sa mission de contrôle et sa mission fiduciaire vis-à-vis de ces derniers.

16
2.3. Mécanisme de la gouvernance bancaire
Le secteur bancaire est fortement tributaire des contraintes aussi bien internes qu’externes
dans l’orientation de son activité, en raison de l’importance des risques inhérents. De ce fait, les
banques instaurent des mécanismes internes et souvent d’ordre externe ayant comme objectif de
surveiller et contrôler l’activité du dirigeant pour mieux orienter et inciter son comportement.
Les mécanismes de gouvernance de l’entreprise sont des outils employés par les actionnaires pour
aligner leurs intérêts avec ceux des dirigeants, mais aussi pour surveiller les agents. Les
mécanismes de gouvernance aident pour s’assurer que les agents agissent bien dans l’intérêt des
actionnaires. Donc, l’entreprise est gouvernée en général par une combinaison de mécanismes
internes et externes de gouvernance. L’importance et l’influence de ces mécanismes dépendent du
contexte institutionnel de l’entreprise.
Ces mécanismes sont relatifs à des dispositifs imposés par des réglementations d’ordre
interne (contrôle interne, audit externe, chartes et statuts, etc.) et externe (Bâle II, normes IAS/IFRS
– comme règles de transparence d’information financière -, loi bancaire, marchés financiers, etc.
ainsi que la concurrence bancaire). En effet, la gouvernance bancaire contribue à l’instauration d’un
climat:
- stable (réglementation prudentielle) ;
- confiant des deux côtés de son bilan : prêteurs (épargnants) et emprunteurs (demandeurs de
crédits).
Toutefois, une bonne gouvernance bancaire est favorisée par une bonne communication
financière interne et externe.
A. Les mécanismes internes
• Le conseil d’administration : le CA est un mécanisme majeur dans la gouvernance d’entreprise,
car il peut influencer l’action des dirigeants en matière de création de valeur, comme il est
susceptible de leur faciliter le repérage des meilleurs projets, ainsi que l’élaboration de la
stratégie d’investissement (Wirtz, 2008, p. 29). Principalement, il est constitué des dirigeants,
des actionnaires majoritaires, de représentants des actionnaires minoritaires, d’administrateurs
non dirigeants (externes), etc. D’une manière concise et sur le plan pratique, il est chargé de
représenter les actionnaires, rémunérer et évaluer et, dans certains cas, révoquer les dirigeants.
De plus, on lui attribue plusieurs autres missions : il est chargé du contrôle et de la discipline
des dirigeants. Ce contrôle peut être prospectif, constitué de l’ensemble de procédures
correctives permettant d’anticiper certains comportements des dirigeants ; et l’autre est
rétrospectif et représente l’ensemble des procédures et outils permettant une évaluation
comparative entre les résultats et les standards prédéfinis.
Le CA dispose de deux leviers d’action privilégiés : le mode de rémunération des dirigeants
et la surveillance mutuelle entre les dirigeants siégeant au conseil.

Sur un plan théorique, et selon les approches disciplinaires, par le contrôle qu’il exerce sur
les dirigeants, le CA permet de réduire les coûts d’agence et de transactions entre les différents
stakeholders, et maximise la valeur. Toutefois, son efficacité dépend de plusieurs paramètres, à
savoir : l’indépendance des administrateurs, la taille du conseil d’administration et la dualité des
fonctions.
- La taille du CA : Pour Jensen (1993), un conseil de taille moyenne (de sept ou huit membres)
serait plus performant car il permettrait de prendre des décisions plus rapides et de réduire les
coûts d’agence grâce à une meilleure coordination. Toutefois, dans le cas des entreprises de
grande taille et complexes, le CA peut alors être constitué d’un nombre plus élevé
d’administrateur, car les besoins d’expertise étant plus important et afin de permettre une
représentativité des différentes parties prenantes. Néanmoins, il est préférable de ne pas dépasser
10 administrateurs.
- L’indépendance des administrateurs : l’indépendance des administrateurs permet d’assurer un
meilleur contrôle, mais l’efficacité de ce critère n’est pas confirmée pour toutes les études

17
empiriques. Mais globalement, l'indépendance du conseil peut améliorer la gouvernance
financière de l’institution. D'une part, à partir d'une vision stratégique, les administrateurs
indépendants fournissent une expertise et des expériences par le processus de prise de décision.
Les institutions financières, bénéficient des suggestions utiles fournies par les administrateurs
indépendants ce qui réduit encore la probabilité de comportement de prise de risques excessifs.
D'autre part, les administrations indépendantes renforcent le pouvoir du conseil d’administration
et ses comités, réduisant ainsi les conflits et les expropriations potentielles par la direction.
- La structure duale du CA (Président du CA/dirigeants) : les avis sont partagés sur la relation
entre l’efficacité du CA et la dualité président du Conseil d’administration (CA) / Dirigeant.
Certains sont critiques quant à l’effet bénéfique de la séparation des fonctions de direction et de
contrôle sur le fonctionnement du conseil d’administration, car ils ne perçoivent aucun impact
positif sur la performance de l’organisation, après avoir séparé la fonction de surveillance et
celle de la direction. À l’inverse, pour d’autres, compte tenu du rôle du conseil exécutif au
niveau du contrôle, il ya un consensus général que les deux postes doivent être séparés.
- L’assiduité du CA : le taux d’assiduité du conseil d’administration traduit la présence des
administrateurs au sein des réunions du conseil. Nous attendons que le taux d’assiduité agisse
positivement sur la qualité de gouvernance des banques. En se basant sur certaines études sur la
relation entre les attributs du conseil d’administration sur la rémunération du dirigeant, on
considère que le taux d’assiduité agit négativement sur la rémunération du PDG.
- L’âge du PDG : un dirigeant âgé peut avoir une grande expérience, prendre de bonnes décisions
pour l’organisation, mais par contre peut manquer d’énergie et d’incitation pour surveiller et
conseiller les administrateurs. Les avis sur le rôle de l’âge des administrateurs sont très
divergents dans la littérature.
- Le nombre de réunions du CA : le nombre des réunions du conseil d’administration au cours
de l’année donne une idée sur les caractéristiques et le fonctionnement des conseils
d’administration dans chaque pays. Les réunions fréquentes des conseils d’administration
peuvent améliorer la supervision de la gestion du dirigeant, donc un rôle consultatif plus
pertinent, ce qui peut diminuer les coûts d’agence dans les entreprises en général, et dans les
institutions financières, en particulier.
- Le rôle des différents comités (comité de gestion, comité de rémunération et comité d’audit) :
pour une meilleure efficacité du fonctionnement du CA, cela nécessite souvent la création d’une
sorte d’organes subsidiaires ou des comités spécialisés qui exercent leur action sous sa
responsabilité. Il s’agit souvent d’un comité d’audit, comité de rémunération et un comité de
gestion de risque.
Ainsi, le comité d’audit ou des comptes assure une surveillance active des questions
relatives à l’élaboration et au contrôle des informations comptables et financières (contrôle de
gestion, contrôle interne, fiabilité des informations financières communiquées,…). Le comité
d’audit joue également un rôle de conseil auprès de la Direction Générale d’une entreprise.
La gouvernance des risques dans les grandes banques peut être nettement améliorée par
l’existence d’un comité des risques indépendant.
Le comité de rémunération dispose de l’expertise requise en matière de politique de
rémunération. Le responsable du département Ressources Humaines et l'administrateur
délégué assistent aux réunions et le secrétaire général peut également y être convié

B. Les mécanismes externes


La gouvernance bancaire s’exerce au travers d’un certain nombre de mécanismes. Il
s’agit essentiellement de l’organisation de la concurrence bancaire et des règles
prudentielles adoptées par et pour ce secteur. Un des principaux dispositifs d’élaboration

18
et d’évolution de ces règles prudentielles est constitué par les normes de Bâle 1, Bâle 2 et
Bâle 3 à partir de 2013.

a. La concurrence bancaire
Un système financier fiable et efficient est essentiel au développement et à la croissance à moyen
et long terme de l’économie.
En effet, pour le secteur bancaire, la question qui se pose est de savoir; si le pouvoir de marché
permet à la banque d’avoir une meilleure efficience. La grande particularité de ce marché est la
présence périlleuse de l’asymétrie d’information qui amène à l’aléa moral et à la sélection
adverse. Ces derniers effets rendent la banque sensible à la conjoncture économique.
En outre, pour réduire ce risque idiosyncrasique, c’est-a-dire les effets de l’asymétrie
d’information, la banque doit fournir plus d’efforts, qui sont coûteux, pour l’analyse et la
surveillance des projets à financer. Or, elle peut subir des coûts supplémentaires si et seulement si
elle détient un pouvoir de marché et n’est pas contrainte par la concurrence.
En conséquence, à cause du problème de passager-clandestin qui existe sur le marché bancaire
concurrentiel, les banques n’oseront pas appliquer la sélection par crainte de perdre leurs clients.
Comme résultat, dans la période d’expansion économique, quand il y a une grande proportion de
nouvelles firmes (peut-être d’une mauvaise qualité), la non-sélection peut entrainer la dégradation
de la qualité moyenne du portefeuille de crédits.
b. Les normes de surveillance prudentielle
En général, Bâle I, Bâle II et Bâle III suivent le même objectif.
L’accord Bâle I sur les fonds propres conclu en 1988, à Bâle (Suisse), par les gouverneurs des
banques centrales des pays du G10. Ensuite, révision de cet accord en 2004 (dispositif Bâle II) et
enfin le renforcement de ce dernier intervenu en décembre 2010 (Bâle III).
Bâle I et Bâle II traitent exclusivement de la solvabilité et non plus généralement des indicateurs
financiers telle que la liquidité. Ces indicateurs permettent de mesurer la bonne santé financière
d’une banque ou plus généralement d’une entreprise. A partir de la récente crise, Bâle III accorde
désormais une attention égale à la solvabilité et à la liquidité des banques. Les différentes normes
sont appelés à évoluer pour s’adapter au mouvement permanent d’innovation qui anime les activités
bancaire et financière.
Généralement, on peut dire que les crises ont un mérite ; elles créent l’urgence
nécessaire à la réforme :
- Crise de 1929 : Glass Steagall Act aux Etats Unis
- Faillites en 1974 de la banque allemande Herstatt, puis de la Franklin National
Bank aux États Unis : comité de Bâle sous l’égide de la BRI.
- Crise asiatique de 1998.
Ainsi, les dernières crises financières de 2007 et 2009 ont fortement secoué les marchés
financiers et plus globalement l’économie mondiale, ce qui en a résulté l’inadéquation du
cadre Bâlois aux situations extrêmes. A cet effet, des efforts accrus ont été déployés par les
pays déjà lancés dans l’application de la norme universelle McDonough, pour l’adéquation
de cette règle avec la conjoncture économique actuelle.
1. L’accord de Bâle I : le ratio Cooke
L’environnement bancaire a connu de nombreuses mutations, liées notamment au rôle
joué par les marchés financiers. En effet le choc pétrolier de 1974 a augmenté la volatilité des
marchés et a perturbé les flux de capitaux dans le secteur bancaire.
C’est dans cette optique que le comité de Bâle sur le contrôle des opérations bancaires
a été institué en Février 1975 par les autorités de surveillance prudentielles.
Ainsi, que les gouverneurs des banques centrales des pays du groupe des Dix, rassemble
les autorités de contrôle des banques.
Au départ, le comité de Bâle a contribué principalement à favoriser la coopération entre
les autorités :

19
- L’échange d’informations sur les pratiques nationales de contrôle ;
- L’amélioration de l’efficacité des techniques mises en œuvre pour la surveillance de l’activité
bancaire internationale ;
- La fixation de normes prudentielles minimales.

2. L’accord de Bâle II
Les normes de Bâle 2 constituent un dispositif international prudentiel visant à mieux
appréhender les risques/engagements bancaires et à les mettre en rapport avec les fonds propres de
chaque banque.
Ces normes agissent en faveur d’une convergence internationale des modes de régulation
des activités bancaires et de standardisation des approches du risque.
Ce processus a pour principales finalités d’une part, la modernisation des systèmes
bancaires et l’insertion dans l’économie mondialisée et d’autre part, la sécurité des transactions
bancaires.
La dernière crise financière, qui a fortement impacté les marchés financiers et plus
globalement l’économie mondiale, a mis en évidence les limites du dispositif réglementaire actuel
défini par les accords Bâle II.
En effet, même si le dispositif Bâle II a permis une avancée majeure dans l’amélioration
des méthodes de mesure des risques dans les établissements bancaires (mesure affinée du risque de
crédit, introduction du risque opérationnel…), la crise a révélé l’insuffisance de ce dispositif à
couvrir correctement l’ensemble des risques (notamment le risque de liquidité, le risque de pro-
cyclicité, l’encadrement insuffisant du risque de marché).
Sous l’impulsion du G20, le Comité de Bâle a élaboré un ensemble de nouvelles mesures
dites Bâle III visant à renforcer les ratios de solvabilité de Bâle II et à améliorer de façon plus
globale le dispositif de supervision du système financier à l’échelle internationale afin de se
prémunir contre de nouvelles crises systémiques.
3. Le cadre des nouvelles mesures réglementaires Bâle III
L’orientation des nouvelles mesures réglementaires Bâle III s’articule autour de deux approches
:
Une approche micro-prudentielle: pour améliorer, au niveau de chaque établissement financier,
la capacité à résister en période de stress à travers le renforcement des normes d’exigence de fonds
propres, de liquidité et de standard de gestion des risques, tels que le renforcement de la qualité et
de la quantité des fonds propres (partie numérateur
du ratio de solvabilité), renforcement progressif des règles de calcul des fonds propres,
Une approche macro-prudentielle: pour limiter la pro-cyclicité et renforcer la surveillance du
risque systémique.

2.4. Les crises et scandales financiers

Les crises se multiplient depuis la crise de 1973. On cite, à ce niveau, la crise de la dette à
partir de 1982, le choc boursier de 1987, la crise du SME en 1992- 1993, la crise du peso mexicain
en 1994-1995, la crise asiatique en 1997, la crise russe de 1998, la crise brésilienne en 1999 et la
crise argentine en 2000.
La crise financière actuelle, qui est l’une des plus violentes que l’on ait connues, a débuté
en juillet 2007 aux des États-Unis. Depuis 2002, la banque centrale américaine, qui encourageait
le crédit facile pour relancer l'économie, a permis à des millions de foyers modestes de devenir
propriétaires, moyennant des prêts dits "subprimes" en 2007. La hausse des taux américains et
l'effondrement du marché immobilier américain depuis le début ont rendu insolvables un nombre
croissant d’emprunteurs. Cette défaillance a provoqué la faillite de certains établissements prêteurs,
dont les garanties prises sur les actifs se sont avérées trop faibles pour éviter la dépréciation des
actifs. Ainsi, la crise s’est propagée de l’emprunteur au prêteur.

20
Fin 2007, certaines grandes institutions financières ont constaté l’illiquidité des titres
structurés adossés à des prêts hypothécaires et les premiers cas de défauts ont commencé à
apparaître.
La globalisation financière et l’effet de contagion ont entraîné la diffusion de cette crise
dans d’autres pays à travers le monde. L’effet de la crise était différent selon les pays. Les
économies qui étaient en relation étroite avec l’économie américaine ont eu des répercussions
immédiates sur leurs économies, les conditions de l’octroi du crédit ont été durcies et les primes de
risque relevées à partir de 2008.
L’effet était différent pour les pays émergents. En effet, au cours de ces dernières années,
certains pays émergents ont épargné des devises découlant, soit des recettes pétrolières, soit
d’exportations propres. Cet excédent d’épargne leur a permis de créer des fonds souverains
apporteurs de capitaux et de liquidité à l’économie mondiale. Certains pays émergents sont en
relation indirecte avec l’économie américaine. L’impact de cette crise était ainsi moins violent et
plus échelonné sur ces pays.
Cette crise a souligné :
• La faiblesse de régulateurs trop lents à réguler la liquidité internationale et trop timorés
dans le contrôle des opérateurs (faillite de Lehman et d’AIG par exemple).
• La faiblesse de la gouvernance de certaines banques. La crise a entraîné la déroute de
certains établissements financiers devant faire face à deux crises :
• Une crise de liquidité pour les banques d’investissements entraînant la chute de Bear
Stearns, et surtout de Lehman Brothers.
• Une crise de solvabilité de certaines banques et établissements de crédits immobiliers, dont
les débiteurs ont fait défaut et dont les actifs en garantie ont vu leur valeur fondre.

Depuis des décennies, la crise financière actuelle est la plus importante et grave qui ait
frappé les marchés financiers. Les crises des institutions bancaires ne sont pas seulement le
résultat de la dimension externe de la gouvernance (réglementation prudentielle) mais aussi de
la dimension interne (conseil d’administration, structure de propriété, endettement).
En effet, l’environnement institutionnel, et plus précisément la gouvernance
bancaire, joue un rôle remarquable dans la naissance des crises bancaires. Ces événements
amènent à s’interroger sur les limites de la gouvernance d’entreprise ainsi que sur la
capacité des actionnaires à exercer une surveillance efficace de la gestion des dirigeants.

2.5. Les effets des crises et scandales financiers sur la gouvernance bancaire
Une étude des premiers effets ainsi que des effets à plus long terme de la crise sur la
gouvernance bancaire sera réalisée.
A. les premiers effets de la crise sur la gouvernance
Les premiers effets visibles de la crise ont été assez brutaux :
La moitié des dirigeants des grands établissements financiers européens ont été débarqués,
à l’occasion de cette crise, qui n’a fait que confirmer l’une des tendances récentes du management
: “ Être un dirigeant couronné de succès est un état de plus en plus précaire ”.
Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à repenser aux éloges que les marchés financiers
réservaient au chairman de Royal Bank of Scotland en 2006-2007 avant de le jeter aux gémonies
en 2008. Les survivants de la crise doivent rester prudents et modestes, car rien n’assure que les
vainqueurs d’aujourd’hui ne seront pas les victimes de demain.
• Par contre, la structure duale de direction générale (que cela soit sous forme du président distinct
du directeur général ou conseil de surveillance et directoire) n’a pas été remise en cause et sur
notre échantillon de 18 établissements. Pour tous, sauf la Société Générale qui vient de

21
l’abandonner, c’est la structure la plus adaptée pour assurer un meilleur
équilibre entre représentation de l’actionnariat et de l’intérêt de la société et direction générale.
• conseils ont été extrêmement sollicités au cours des 18 derniers mois par un accroissement
sensible du nombre de réunions, de leur durée et de l’implication demandée à chaque
administrateur. Ceci s’est accompagné par une mise à contribution encore plus forte des comités
d’audit et des comités de rémunération et dans certains cas par la mise en place de comités ad
hoc en sus de ceux qui existaient déjà. Cette activité accrue des conseils, qui sont sollicités sur
une variété de plus en plus grande de sujets, soulève quelques interrogations :
- Les conseils d’administration ont-ils apporté une réelle valeur ajoutée à leur direction générale
dans la gestion de la crise ?
- Comment éviter le mélange des genres entre les rôles respectifs du conseil et de la direction
générale ?
- Comment le conseil s’assure-t-il qu’il garde bien la hauteur de vue qui doit être la sienne ?
- La compétence des administrateurs étant de plus en plus challengée par des questions de plus
en plus techniques et leur disponibilité étant de plus en plus sollicitée, se pose alors un clair
problème de recrutement et de taille du vivier. Ceci s’est traduit aux USA par une réduction par
deux du nombre moyen de mandats détenus par un administrateur et par l’ouverture des conseils
à de nouveaux profils, ayant principalement un fort bagage en identification et gestion des
risques.
• Certaines places financières ont réagi très vite pour publier des recommandations en espérant
que celles-ci s’imposeront à tous. Le rapport Walker publié au printemps 2009 recommande,
pour les banques, l’obligation d’avoir un comité des risques, d’accroître la proportion de « non
executive directors / administrateurs non exécutifs » ayant une expérience financière et
d’améliorer leur connaissance de la société et leur relation avec les actionnaires institutionnels
et, enfin, de mettre sous contrôle les bonus.
• Néanmoins, il faut constater que les conseils d’administration ont beaucoup de mal à gérer la
question de la politique de rémunération des dirigeants et des opérateurs de marchés pour les
raisons suivantes :
- La nécessité de protéger des activités très rentables et de ne pas se faire piller ses équipes.
- Les distorsions de concurrence qui font que les places Anglo-Saxonnes sont beaucoup plus
agressives en termes de rémunération que les autres, et moins scrupuleuses dans l’application
des règles de limitation des bonus.
• Leur implication et la prise de conscience de leur responsabilité en matière de risques amènent
certains conseils à créer de nouveaux comités dédiés ou à revoir le rôle et les moyens de ceux
déjà en place (Audit), avec deux préoccupations sous-jacentes :
- Ce n’est pas au conseil ou à ses comités de gérer la fonction contrôle des risques. Mais, par
contre, c’est de leur responsabilité de déterminer quel appétit le Conseil a-t-il en matière de
risque et quelle est sa tolérance au risque et de s’assurer que l’organisation du contrôle de ceux-
ci est efficace et adaptée.
- La multiplication des organisations matricielles complexes rend plus complexe le suivi des
risques et dilue les responsabilités en la matière. Chaque axe de la matrice se renvoyant la balle,
il convient que le conseil garde une vision claire de qui doit faire quoi.
• Les conseils d’administration s’impliquent beaucoup plus dans la forme et dans la gestion de la
communication à destination des actionnaires. Tous les conseils d’établissements financiers ont
dû, brutalement, faire face à une détérioration de l’image de marque de la profession en général
et pour certains de la leur propre. Il est permis de se demander, à la lumière de certains exemples
de communication de crise ratée, si le conseil n’aurait pas dû s’investir plus en la matière,
éventuellement en créant un Comité exceptionnel, afin d’éviter une telle dégradation de leur
réputation. Cela devient un enjeu majeur pour les conseils d’autant plus que les banques sont
facilement jetées par les politiques à la vindicte populaire. L’ensemble des banques et

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institutions financières ont été confrontées depuis 2008 à une remise en cause violente de leur
image citoyenne et ce, d’autant plus qu’une fois sauvées du désastre en 2008-2009, leurs
résultats se sont violemment redressés. Les conseils d’administration ne peuvent pas faire
l’impasse sur la dégradation très forte de l’image de marque de la profession
auprès du public.
• L’intervention de l’État dans la vie des établissements financiers, qui ont recours à son aide, a
des effets visibles sur la façon dont le conseil aborde le sujet des rémunérations. Le rôle des
comités de rémunération s’est trouvé placé, de façon très brutale, sous les projecteurs, car il
n’est plus suffisant d’avoir pris une décision économiquement justifiée ou légalement conforme
pour que celle-ci n’ait pas des effets médiatiques dommageables pour la société. Il est, par
ailleurs, devenu impératif de repenser les systèmes de rémunération afin de ne plus générer, à
court terme, des bonus fondés in fine sur des engagements et des risques à long terme pour
l’employeur. Les conseils ne peuvent plus accepter d’utiliser des consultants extérieurs qui
travaillent à la fois pour eux et pour la direction générale, ce qui peut être
source de conflit d’intérêt.
• En cas d’intervention de l’État, le conseil doit veiller à la convergence des intérêts de ce nouvel
actionnaire avec celui des autres actionnaires, et aussi savoir comment gérer les relations avec
ce nouveau partenaire, qui peut être absent du conseil. Pour conclure sur cette première partie,
les effets immédiats de la crise imposent aux conseils d’administration des banques de se poser
une série de questions clés :
• Quel est le rôle du conseil et jusqu’où doit aller son implication par rapport à la direction
générale, en particulier en matière de stratégie et de contrôle du suivi des risques, afin d’éviter
qu’il n’interfère avec les responsabilités de cette dernière ?
• Comment s’assurer de la disponibilité, mais aussi de la compétence de ses membres pour faire
face à une implication plus grande et une technicité de plus en plus complexe ?
• Quel rôle et quels moyens pour les comités ?
• Comment faire en sorte que ceux-ci aillent à l’essentiel et évitent de se perdre dans les détails?

B. Les effets à long terme


Soit parce que les conseils sont encore dans le combat du feu de la crise, soit parce que, à
l’inverse, ils pensent que le pire est derrière nous, certains sujets de fonds ne sont pas devenus
d’actualité, car ils induisent des changements plus profonds et requièrent le temps de la réflexion
• Les administrateurs de banque vont être soumis à une pression accrue de la part des actionnaires
et de la Société en général pour les voir mieux jouer leur rôle de défenseur de l’intérêt social et
de l’intérêt du porteur de parts. Trop souvent, les conseils d’administration de banque, en
particulier dans le monde anglo-saxon, ont fait preuve d’une indépendance très relative vis-à-
vis de l’intérêt des managers, en ne s’imposant pas assez. Et ainsi en privilégiant l’intérêt court
terme, ils ont mis en danger l’intérêt long terme de la banque.
• Le conseil doit être un organe actif et conscient de sa mission vis-à-vis des actionnaires.
Le conseil doit avoir les moyens d’exercer sa mission en totale indépendance de la
pression des marchés et de l’influence du management. Cela doit être un véritable organe de
direction, comme la loi le prévoit, et pour qu’il ait une véritable existence entre les actionnaires
et le management, il est quand même plus efficace qu’il soit animé et présidé par un homme,
qui ne soit pas juge et partie, mais dont le seul rôle est de s’assurer de son bon fonctionnement
au service des actionnaires.
Les faiblesses de la forme moniste restent que :
- Le PDG, qui est d’abord le président de la direction générale, est juge et partie quand il anime
le débat stratégique au sein du conseil. Naturellement, il doit défendre la stratégie qu’il propose
en tant que directeur général et aura plus de difficultés, à soit la challenger, soit proposer au
conseil des options alternatives.

23
- Son rôle de directeur général l’amènera à sur-intervenir au sein du conseil (en lieu et place de
ses bras droits, qui ne seront généralement pas administrateurs).
• La formule de la dissociation des fonctions de président et de directeur général semble avoir
montré une meilleure efficacité permettant au conseil d’être plus libre par rapport à la direction
générale, même s’il y a plusieurs contre-exemples comme RBS ou UBS.
Le rôle du président sortira certainement renforcé de cette crise, car il devra être le garant, du
bon fonctionnement, de l’indépendance et de la contribution du conseil et, à ce titre, devra mieux
rendre compte aux actionnaires de la spécificité de son action. Il devra aussi s’assurer que le
conseil reste dans son rôle en évitant la tentation d’interférence dans la gestion.
Au cas où il y aura maintien de l’unicité de direction, l’exemple de Lafarge ou de la Société
Générale, qui ont instauré le concept du lead director en la personne d’un vice-président, devrait
faire des émules. Reste, néanmoins, à savoir quel est le rôle exact de ce dernier et les attentes
du conseil à son égard, ce qui n’est pas encore très clair. Le profil du président est une des
garanties du dispositif de gouvernance. Une compétence financière certaine, mais pas forcément
purement bancaire est indispensable pour asseoir son autorité auprès du directeur général et sa
reconnaissance dans le monde des affaires doit être telle qu’elle lui permette de s’imposer
légitimement auprès des administrateurs.
• Il ne pourra pas être fait l’économie d’une réflexion sur le rôle du conseil d’administration en
matière de stratégie. Le conseil est-il seulement là pour approuver la stratégie présentée par la
direction générale ou doit-il demander à ce qu’on lui propose un choix de stratégies avec une
analyse comparée des enjeux, des risques et des résultats attendus. Nous pensons que le conseil
doit conduire une vraie discussion sur plusieurs options stratégiques et challenger la direction
générale sur ces options avant de les approuver ; or, c’est ce qui a fait défaut avant la crise,
souvent par méconnaissance d’une majorité des administrateurs des spécificités d’activité
bancaire et financière.
• Le conseil doit rester un organe collectif, qui tire sa légitimité de cette caractéristique. Son
président doit bien s’assurer qu’il ne se transforme pas en un groupe d’individualités, jouant
chacun sa partition. Si l’un ou plusieurs des administrateurs ne jouent pas son ou leur rôle, c’est
au président d’intervenir. Mais il faut se garder de toute évolution vers l’évaluation formelle de
la contribution individuelle des administrateurs, car celle-ci risque de briser le
sens du collectif.
• D’où une nouvelle question qui découle de la précédente : si le conseil d’administration doit
voir son rôle se renforcer en matière de décision stratégique, il doit être sûr des compétences
qu’il a en son sein. La décennie, qui vient de s’écouler, a vu les gourous de la gouvernance
prôner le dogme de l’indépendance de l’administrateur, au risque de faire rentrer dans des
conseils des profils totalement exotiques, et finalement inadaptés par manque de compétence.

La crise ramène à la raison, car les trois qualités fondamentales de l’administrateur doivent
être :
- La compétence,
- L’indépendance d’esprit et de caractère, qui ne se confond pas forcément avec l’indépendance
au sens juridique,
- L’expérience de la gestion des situations complexes. Les conseils devront vraisemblablement
repenser leur composition afin de permettre aux managers d’avoir à leurs côtés des conseils
d’administration plus contributifs et plus à même de challenger leurs propositions, et ceci dans
un environnement où il est aujourd’hui plus difficile de recruter des administrateurs pour les
banques pour des raisons d’adéquation de compétence, de disponibilité et d’appréhension du
risque.

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Il ressort de nos études que les administrateurs les plus contributifs et les plus efficaces
pendant la crise qu’ont dû affronter les conseils des banques, ont été, sans contexte, les
présidents de grands groupes industriels ou commerciaux, et que le recours exclusif à des
spécialistes de la Finance est réducteur et pose un problème de potentiel conflit d’intérêt.
Il est intéressant de constater cependant que les nominations qui sont intervenues dans les
conseils d’administration de banques en 2009 et 2010 ne traduisent pas une inflexion en ce sens.
- Cela passera peut-être aussi par une réduction de la taille pour arriver à une moyenne de 10 à
12 membres avec un renforcement de la proportion de dirigeants expérimentés. Mais
aujourd’hui, la tentative de féminisation des conseils induit un phénomène inverse.
- L’avis du comité des nominations, dans le choix et la sélection des dirigeants en
provenance de l’interne ou de l’externe, se renforcera d’autant plus qu’il y aura dissociation
entre les fonctions de président et de directeur général et que le président de ce comité aura une
réelle stature et légitimité. Il est intéressant de se demander s’il ne revient pas au conseil
d’administration de challenger la direction générale sur sa capacité à maîtriser une organisation
matricielle devenue de plus en plus complexe.
- La crise a aussi montré que les conseils d’administration, composés en majorité
d’administrateurs retraités (la moyenne d’âge des Boards de Lehman Brothers, de Citigroup et
de Bear Stearns était voisine de 68 ans contre 60 ans en moyenne pour les banques européennes)
étaient moins réactifs et moins à même de mettre à l’épreuve la direction générale.
- Le conseil d’administration et son président ont peut-être besoin d’accroître leur moyen
propre d’action. Deux pistes de réflexion sont ouvertes : pourquoi ne pas rattacher l’audit central
et le secrétariat du conseil au président?

2.6. Conjuguer finance, stratégie et gouvernance


La vie des entreprises ou des banques, depuis toujours, est remplie d’évènements de nature
diverse : des succès, des difficultés, des crashs et des redressements. Elle met l’accent sur la
combinaison ou la conjugaison de divers éléments : la finance, la stratégie ou la gouvernance, qui
expliquent les relations des firmes entre elles et avec les sociétés humaines.
A. Des liaisons fructueuses
En schématisant, on peut observer les grandes liaisons suivantes
Le projet d’entreprise et la stratégie qui lui est associée sont à relier au régime de gouvernance :
• Les dirigeants d’une entreprise familiale s’inscrivant dans une lignée inter-générations auront à
cœur d’en conserver le contrôle ; en conséquence, dans leur projet d’entreprise (stratégie), les
objectifs de pérennité l’emporteront souvent, ici sur la rentabilité;
• Une start-up, au contraire, sera orientée vers une forte croissance portée par l’innovation majeure
qui l’a vue naître ; elle n’hésitera pas à prendre des risques importants pour cela (la mortalité de
ces start-up est élevée) ; la rentabilité ne sera pas la finalité principale, du moins immédiate, car en
cas de succès elle peut se révéler considérable;
• Une grande société cotée, dont le capital est diffus, notamment entre de multiples fonds
d’investissement, sera amenée à être plus attentive à sa rentabilité et à justifier ses choix
stratégiques auprès de ses actionnaires.

B. Stratégie et Finance forment un couple indissociable


Toute stratégie industrielle et commerciale, pour être mise en œuvre, a besoin de ressources
et donc de finance pour acquérir ces ressources en externe ou pour les produire en interne. Les
contraintes financières peuvent limiter la constitution de ces potentiels de ressources et par là brider
la stratégie.
C. La liaison finance-stratégie est parfois antagoniste
Le couple stratégie-finance, s’il est indissociable, peut cependant se révéler antagoniste.
Un exemple peut en être donné par l’objectif de « diversification du portefeuille d’activités » qui
est une des questions classiques en stratégie depuis Ansoff. Le chef d’entreprise, en tant que

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stratège prudent, sera tenté par la diversification afin de diminuer ses risques, plutôt que de rester
sur une seule activité. Le professionnel de la finance aura une position inverse, considérant que
cette entreprise devrait se concentrer sur « son cœur de métier » en abandonnant les activités non
indispensables.
D. Le régime de gouvernance influence les décisions financières
La nature du système de gouvernance, à travers son implication dans l’architecture
organisationnelle, influence considérablement les choix financiers des investissements (croissance
externe ‘’apports partiels d’actifs’’, existence d’un actionnaire de contrôle par exemple).

2.7. Bonne gouvernance et performance économique


Selon la Banque Mondiale: « la bonne gouvernance et la manière avec laquelle le pouvoir
est exercé dans la gestion publique des ressources économiques et sociales en vue
du développement ».
A. Critères de la bonne gouvernance dans les institutions financières et bancaires
De manière générale, il est possible d’établir qu’une bonne gouvernance dans les institutions
financière comprend les éléments suivants :
• La transparence : divulgation publique d’information appropriée et suffisante pour
l’évaluation des risques susceptibles de menacer ceux qui ont des intérêts dans la banque
(déposants et actionnaires), ainsi que l’accomplissement de normes comptables d’évaluation et
de registre adéquates.
• Le partage et la divulgation de l’information
- Réparation des compétences entre les différentes structures, départements
ou divisions de la de la société dans le cadre du processus de décision des entreprises,
nommément à travers des organigrammes ou des cadres fonctionnels ;
- Clarification des fonctions des du Conseil d’Administration et des Directeurs dans les
Institutions financière et dans les autres entreprises –conflit d’intérêt ;
- Politique des revenus – transparence ;
- Divulgation, au moins une fois par an, d’une description du comportement des actions dans le
marché des capitaux ;
- Une administration plurielle devant inclure des membres indépendants des actionnaires et en
cas d’existence d’une Commission Exécutive, sa composition doit refléter l’équilibre entre les
administrateurs liés aux actionnaires dominants et les administrateurs indépendants ;
- Création par l’administration de commissions internes de contrôle en leur attribuant des
compétences dans les domaines où existent des situations de conflit d’intérêt potentielles
comme la nomination des directeurs et gestionnaires, l’analyse de la politique des,
rémunérations, l’évaluation de la structure et du gouvernement des sociétés ;
- La mise en place de structures, législations, modes de régulation.

2.8. La gouvernance bancaire en Algérie


A. Les facteurs qui ont rendu primordial la gouvernance bancaire en Algérie : On peut citer les
éléments suivants :
- Mondialisation de l’économie et compétitivité des nations ;
- Globalisation des échanges économiques et financiers ;
- La nécessité de lutter contre la corruption et la bureaucratie ;
- L’évolution du système bancaire Algérien ;
- La nécessité de renforcer les règles de prudences applicables aux établissements de crédits ;
- La déréglementation et la catastrophe financière qu’a connues l’Algérie, notamment celles de :
EL KHALIFA BANK, BCIA, AIB et l’UNION BANK ; ce qui a induit à une crise de confiance.
- Absence de transparence (par exemple: dans la communication financière…) ;
- La mauvaise production - diffusion de l’information financière au sein des institutions bancaires
et financières algériennes ;

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- La nécessité de moderniser le système bancaire algérien.

B. Les préalables de développement et de modernisation du système bancaire


algérien
En premier lieu, il serait nécessaire de survoler rapidement l'évolution
de l'organisation de l'économie Algérienne dont l'application a connu trois étapes différentes :
• Étape d'une économie planifiée dit socialiste qui s'est étendu sur la période 1967-1979 ;
• Étape de restructuration des entreprises publiques économiques (EPE) de 1980 à 1989 qui
se caractérisait par un chevauchement entre une économie dirigée et une économie tendant
à se libéraliser ;
• Étape d'instauration d'une économie de marché dès 1990. Les réformes économiques entreprises
en Algérie depuis la fin des années 80 ont donné lieu à de profondes mutations et
transformations sur le plan économique d’une part, et une nouvelle configuration du secteur
bancaire et financier d’une part, tout en traçant des perspectives d’évolution nouvelles dans ces
deux domaines en particulier. Cependant, le système de paiement et la monétique sont restés
en marge de ces transformations. Le système de paiement d’une économie donnée est un bon
indicateur de son fonctionnement, en particulier dans le contexte d’une économie de marché.
Les progrès en matière d’intermédiation bancaire ont entraîné l’évolution et la diversité des
instruments de paiement. L’Algérie se propose de moderniser son système de paiement interne
aussi bien en termes d’instruments de paiement qu’en termes de procédures de recouvrement
des paiements scripturaux ou électroniques et de revoir son système des paiements
transfrontières.
C. La bonne gouvernance bancaire et le développement économique en
Algérie : quelles perspectives ?
Nous proposons, dans cette perspective, les conditions sous formes d’éléments pour
atteindre la bonne gouvernance bancaire et le développement économique en Algérie :
• Renforcement du cadre de la supervision bancaire ;
• La conduite d’un programme d’évaluation du système financier ;
• La modernisation de la surveillance prudentielle à travers le renforcement de ses moyens
techniques et humains ;
• La refonte du régime de la gestion des difficultés bancaires dans le sens d’une meilleure
coordination entre les différentes autorités intervenantes ;
• Renforcement de la qualité des prestations administratives ;
• Évaluer la stabilité du secteur financier ;
• Renforcement du cadre réglementaire de l’activité bancaire ;
• Contrôle permanent des établissements de crédit ;
• Évaluation de l’état d’avancement de la gouvernance bancaire ;
• Partenariat Public et Privé ;
• Vision stratégique de développement économique : les décideurs ont besoin d’avoir une
perspective élargie et à long terme de la bonne gouvernance bancaire et du développement
économique.

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