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Chapitre 2

Gestion budgétaire des ventes

Introduction

Le budget des ventes constitue la première étape dans le processus d'élaboration des budgets
de l'entreprise. En effet, c'est le budget des ventes qui commande le budget de production et,
par là, celui des approvisionnements, des investissements et des frais généraux. Ainsi, la
gestion budgétaire des ventes est la phase "pivot" du réseau des budgets de l’entreprise. Le
budget des ventes consiste à évaluer en quantité et en valeur les ventes futures permettant
ainsi de déterminer les ressources de l’entreprise.

Afin de cerner le marché actuel et le marché potentiel de l’entreprise, les responsables ont
généralement recours à des techniques de prévision aussi bien quantitatives que qualitatives.
L’étape de prévision des ventes est suivie de celle de l’élaboration du budget des ventes et du
contrôle des réalisations par la suite. Ces trois étapes qui structurent la démarche budgétaire
seront successivement traitées dans le présent chapitre.

Section I. Prévisions des ventes

La prévision des ventes comporte une prévision des volumes d'une part, et des prix de vente
d'autre part. Elle tient compte :
⬧ des contraintes externes imposées par le marché (clients, concurrents) et par la
conjoncture économique ;
⬧ des contraintes internes (politique commerciale choisie, réseau de vente et capacité
de production).

La prévision est donc pour l'entreprise « un compromis entre ce qu'elle veut et ce qu'elle
peut1 ». La prévision des ventes peut être définie comme « l'établissement, par avance, des
ventes en quantité et en valeur, compte tenu des contraintes que subit l'entreprise et de ses
actions sur ces contraintes2 ».
La phase de prévision constitue l'essentiel de l'élaboration du budget des ventes. Son intérêt se
situe sur deux plans :
- A long et moyen terme, la prévision des ventes permet d’élaborer un programme
d'investissement et un plan corrélatif de financement.

1
Fayol M. "Administration générale et industrielle", cité in Meyer J. "Gestion budgétaire", Editions Bordas
Management 1984. P. 42.
2
Meyer J. "Gestion budgétaire", Editions Bordas Management 1984. P. 42.

1
- A court terme, elle permet d’élaborer un programme de production et un programme
d'approvisionnements et d’en déduire les budgets de frais (distribution, approvisionnements,
services généraux), ainsi que le budget de trésorerie.

L'horizon budgétaire, rappelons-le, est égal à l'année. Pour cette raison, nous nous limiterons
aux techniques de prévision à court terme.

I.1. Méthodes de prévision des quantités vendues


La phase de prévision met en œuvre différentes techniques. Les méthodes de prévision sont
nombreuses. Elles sont classées en méthodes qualitatives et quantitatives (statistiques,
recherche opérationnelle, élasticité).

I.1.1. Méthodes qualitatives


Elles consistent à demander aux cadres supérieurs de l'entreprise (jury d'opinion), aux
vendeurs (questionnaires) et aux clients (étude de marché) leurs avis sur les ventes à venir.
- Les jurys d'opinion permettent, par confrontation d'opinions, d'obtenir des grands
responsables de l'entreprise leurs avis sur l'évolution du chiffre d'affaires. Réunis en "jury",
ces hauts responsables peuvent se baser sur les données passées, de manière à "objectiver1
leur point de vue".
Bien que cette méthode soit rapide et synthétique, elle donne des résultats très globaux. En
effet, elle indique plus une tendance qu'elle ne donne des valeurs précises et ventilées.

- Par questionnaire, les vendeurs (représentants, concessionnaires, agents exclusifs) donnent


une estimation des ventes à venir. Cette méthode présente l'avantage de s'adresser directement
aux personnes concernées par les ventes, ce qui permet d'obtenir des résultats détaillés (par
produits, périodes et régions). Cependant, les avis des vendeurs restent partiels dans la mesure
où ils ignorent bien des éléments tant internes qu'externes à l'entreprise.

- Les études de marché partent du présent, c'est-à-dire des clients possibles, potentiels, pour
conjecturer2 l'avenir. A partir des intentions des acheteurs, on essaie de prévoir les ventes d'un
produit existant déjà ou d'un produit nouveau dont on prépare le lancement.

Cette méthode présente un avantage sur les méthodes fondées sur l'étude du passé en ce
qu'elle permet de faire une prévision sur les produits nouveaux pour lesquels on ne dispose
pas encore de données passées. Cependant, la certitude de la méthode dépend de la
représentativité de l'échantillon. Par ailleurs, la méthode est si coûteuse qu'elle n'est pas à la
portée des petites et moyennes entreprises.

1
Rendre objectif, donner une forme concrète à leur point de vue.
2
Entrevoir, anticiper, prédire, prévoir.

2
I.1.2. Méthodes quantitatives

Les méthodes quantitatives s'appuient sur le traitement mathématique de séries


chronologiques, dans le but de :

- éliminer les mouvements parasitaires (variations saisonnières, accidents de


conjoncture…) ;
- découvrir des tendances pures ; et
- par extrapolation, prévoir les ventes à venir.
Le futur se présente, ainsi, comme une extrapolation du passé.
Il existe plusieurs méthodes statistiques de prévision. Entre autres, nous distinguons
l'ajustement, les moyennes mobiles, le lissage exponentiel. Nous nous limiterons, ici, à
quelques-unes de ces méthodes.

a. Les ajustements

L'ajustement est une technique qui s’appuie sur l’étude chiffrée des données caractérisant les
ventes passées du produit. La vente est obtenue par extrapolation des tendances passées
mises en évidence et dont on suppose la régularité.
L'ajustement exprime le développement d'un phénomène (y) en fonction du temps (t),
Soit : y = f(t).

Exercice d’application n°1 : L’ajustement linéaire

Depuis 8 mois, une entreprise propose à sa clientèle un produit P et s’implante


progressivement sur le marché. Au mois d'août de l’année N, une étude des huit mois
précédents permet de dresser l’état des ventes du produit ainsi :

Mois Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août


Quantités vendues 3000 3900 5000 5800 7400 7800 8400 9000

1. Procéder à un ajustement linéaire par la méthode des moindres carrées.


2. Utiliser les résultats obtenus pour prévoir les ventes des trois prochains mois de l'année N.

Corrigé

1- Ajustement linéaire par la méthode des moindres carrées

Nous remarquons une tendance linéaire dans la progression des ventes. Par conséquent, nous
pouvons procéder à l’ajustement par la méthode des moindres carrées.

Périodes xi Ventes yi Xi = xi - x Yi = yi - y Xi.Yi Xi2


1 3 000 -3,5 -3287,5 11 506,25 12,25
2 3 900 -2,5 -2387,5 5 968,75 6,25
3 5 000 -1,5 -1287,5 1 931,25 2,25

3
4 5 800 -0,5 -487,5 243,75 0,25
5 7 400 0,5 1112,5 556,25 0,25
6 7 800 1,5 1512,5 2 268,75 2,25
7 8 400 2,5 2112,5 5 281,25 6,25
8 9 000 3,5 2712,5 9 493,75 12,25
36 50 300 37 250 42

x = 36 = 4,5 y = 50300 = 6 287,5


8 8
Le coefficient directeur de la droite d’ajustement est donné par la formule suivante :
n

 XiYi 37 250 = 886,90 ; ou bien a =  (x


i =1
i - x) ( y i - y)
a= a=
 Xi 2
42
n

 (x i - x) 2
i =1

b = y - ax = 6 287,5 – 4,5.(886,90) = 2 296,45

La droite obtenue a pour équation : y = 886,90.x + 2 296,45

2- Prévisions des trois prochains mois

En admettant que la tendance linéaire persiste, cette équation peut servir pour les prévisions
des mois à venir.

Ainsi :

- Prévisions du mois de septembre :


xi= 9 et ventes y9 = 886,90.(9) + 2 296,45 = 10 278,55
- Prévisions du mois d'octobre :
xi= 10 et ventes y10 = 886,90.(10) + 2 296,45 = 11 156,45
- Prévisions du mois de novembre :
xi= 11 et ventes y11 = 886,90.(11) + 2 296,45 = 12 052,35

Remarque : Autres types d’ajustement

Les fonctions d’ajustement peuvent être variées. L’ajustement peut être :


⬧ ajustement par une droite de la forme : y = ax + b
⬧ ajustement par une fonction exponentielle de la forme : y = b.ax
⬧ ajustement par une fonction puissance de la forme : y = b.xa

b. Prise en compte des variations particulières : détermination de la tendance à partir


des moyennes mobiles

4
L’étude des tendances générales ne suffit pas pour faire des prévisions à court terme. Par
conséquent, certaines méthodes de prévision, combinées ou non avec la recherche d’une
tendance générale, sont utilisées. Elles permettent de tenir compte de variations particulières.

Les moyennes mobiles sont une méthode empirique d'ajustement qui permet de montrer la
tendance lorsqu'un ajustement linéaire ne convient pas. Cette méthode prend en considération
les variations saisonnières.

Le principe de la méthode des moyennes mobiles consiste à tirer, de l’observation du passé,


une loi générale permettant de prévoir l’avenir.
Afin d'éliminer l'effet des variations saisonnières, on peut remplacer chaque valeur de la série
par une moyenne calculée sur des valeurs représentant un ensemble correspondant à une durée
d'une année centrée sur la date de chaque valeur1.

Ainsi pour des données trimestrielles, on calculera :


1 1
y i − 2 + y i −1 + y i + y i +1 + y i + 2
y'i = 2 2
4
En coefficientant yi-2 et yi+2 par ½, chaque trimestre de l'année est représenté dans le calcul
avec la même pondération et la valeur calculée est centrée sur la période i.

Exercice d’application n°2

Les ventes trimestrielles d'une entreprise ont connu l'évolution suivante sur les trois dernières
années (données en kdhs) :

Trimestre 1 Trimestre 2 Trimestre 3 Trimestre 4


Année N-2 860 794 1 338 1 148
Année N-1 1 096 1 021 1 705 1 505
Année N 1 436 1 363 2 319 2 047

Calculer les moyennes mobiles centrées.

Corrigé
Les moyennes mobiles centrées sur une série trimestrielle se calculent par la formule.

On obtient les résultats suivants :

1
L’ordre de la moyenne mobile est généralement égal à la période. Ainsi, pour les séries mensuelles, m = 12, et
pour les séries trimestrielles m = 4.

5
Trimestre Données observées yi Moyennes mobiles yi'

1 860
2 794
3 1 338 1064
4 1 148 1122
5 1 096 1197
6 1 021 1287
7 1 705 1374
8 1 505 1459
9 1 436 1579
10 1 363 1724
11 2 319
12 2 047

Dans l’exemple ci-dessus, la prévision est faite pour un trimestre. Ainsi, au trimestre 2 de
l'année N, on prévoit pour le trimestre 3 des ventes de 1064.

Remarque : Autres méthodes de prévision

- Méthode des coefficients saisonniers ;


- Le lissage exponentiel.

I.2. Prévision des frais de distribution


La prévision des frais de distribution découle logiquement de la prévision des ventes, même
s'il peut y avoir une interaction entre les deux : la détermination d'un certain montant de
budget de publicité pourra par exemple se répercuter sur le niveau des ventes.
La double classification des charges s'applique aux charges de distribution.

1.2.1. Charges variables de distribution


Les charges variables sont essentiellement proportionnelles au chiffre d'affaires. On y trouve :
⬧ Commissions sur ventes versées aux représentants en fonction des ventes réalisées, à
l’exclusion des commissions fixes ;
⬧ Frais d'emballages ;
⬧ Frais de transport sur ventes

1.2.2. Charges fixes de distribution


L’analyse du résultat en marges nécessite la séparation des charges directes et charges
indirectes.

a. Charges fixes directes

6
Ce sont des charges spécifiques à un produit donné :

- Frais de publicités spécifiques à un produit ;


- Frais de lancement d'un nouveau produit ;
- Frais de promotion sur les lieux de ventes (expositions) ;
- Frais d'étude de marché.

b. Charges fixes indirectes

Ces charges peuvent être regroupées en :


- Charges relatives au personnel : salaires et charges sociales de la direction
commerciale, du personnel du magasin de produits finis, des services commerciaux. Sont
exclues les charges variables de rémunération des représentants.
- Charges relatives aux locaux : amortissements, loyers, entretien, assurance,
électricité,… pour les locaux occupés par les services qui dépendent de la fonction de vente.
- Autres charges : ces charges peuvent concerner tous les produits ; citons à titre
d’exemple les études de marché, la publicité sur le nom de l’entreprise plutôt que sur un
produit, …
En somme, sur la base des prévisions des ventes, on établit le programme des ventes (c'est-à-
dire les quantités à vendre pour les périodes à venir). A partir du programme des ventes, on
établit le budget des ventes (c'est-à-dire les quantités prévues multipliées par les prix de
vente). Ainsi, le budget des ventes est une ventilation en valeur des objectifs à réaliser.

Section II. Budgétisation des ventes

Le budget des ventes est l’expression chiffrée des ventes de l’entreprise par type de produit,
en quantité et prix. Ce budget est plus ou moins décomposé. En effet, les prévisions sont
obtenues par rapport à plusieurs critères suivant les différents centres d'intérêt retenus par
l'entreprise :
⬧ Le budget par période de temps.
⬧ Le budget par vendeur ou par région.
⬧ Le budget par produit ou par catégorie de produits.

II.1. Budget par période


Le budget par période est la répartition dans le temps des ventes. Ce type de décomposition
est nécessaire pour un contrôle efficace des réalisations. Se pose en conséquence le problème
de choix de la période à adopter. Les périodes retenues ne doivent pas être trop longues pour
ne pas trop éloigner les contrôles. On retient souvent le mois ou le trimestre.

7
Période 1

Régions Totaux par


Produit
Région 1 Région 2 Région 3 Région 4 produit
Produit A
Produit B
Produit C
…………
Totaux par région

II.2. Budget par région

Le budget par région est la décomposition des ventes par zone géographique. L’objectif est de
comparer les réalisations de chacune des régions et des vendeurs qui en sont chargés.

Région 1

Périodes
Produit Totaux par produit
Période 1 Période 2 Période 3 Période 4
Produit A
Produit B
Produit C
…………
Totaux par période

II.3. Budget par produit

Le budget par produit est la ventilation des ventes par produit ou par catégorie de produits, de
façon à déceler les variations propres à chaque produit. Cette ventilation permet à l'entreprise
de suivre l'évolution des ventes des différents produits vendus.

Produit A

Périodes
Région Totaux par région
Période 1 Période 2 Période 3 Période 4
Région 1
Région 2
Région 3
…………
Totaux par période

II.4. Budget d'ensemble


Les trois documents présentés ci-dessus, peuvent être regroupés en un seul budget.

8
Budget d'ensemble

Régions
Totaux
Région 1 Région 2 Région 3
Périodes Périodes Périodes Périodes
Produits
P1 P2 P3 P1 P2 P3 P1 P2 P3 P1 P2 P3
Produit A
Produit B
Produit C

 Totaux régions

En tenant compte des frais commerciaux associés aux prévisions des ventes, le budget des
ventes se présente comme suit :
Budget des ventes

Périodes
Totaux
Période 1 Période 2 Période 3 Période N
Chiffre d’affaires
Produit A………….
Produit B………….
Produit C…………
CA total brut
- Ristourne magasin
- Ristourne revendeurs
CA total net

Frais de personnel :
- Charges sociales
- Déplacement
Coût du personnel commercial
Coût de publicité
Frais divers de gestion
Coût total de commercialisation

Section III. Contrôle des ventes

Les budgets établis en fin de période N (mois, trimestre, année) serviront de référence pour la
période (N+1). Les réalisations seront confrontées aux prévisions : les écarts sont calculés,

9
sont ensuite analysés pour pouvoir mettre en œuvre des actions correctives qui permettent de
piloter l’entreprise dans les limites définies par les budgets.

Le contrôle budgétaire de l’activité commerciale doit faire apparaître le respect des objectifs
assignés aux commerciaux à savoir :

✓ des objectifs de quantités,


✓ des objectifs de prix, et
✓ des objectifs de structure entre les différentes ventes.

Les écarts sur ventes et sur marge de chiffre d’affaires constituent des éléments qui permettent
le contrôle de l’activité commerciale.

III.1. Analyse de l'écart sur vente en écart sur volume et écart sur prix
L'écart constaté entre les prévisions et les réalisations des ventes a deux origines : les
quantités vendues et le prix de vente. L'écart global est ainsi décomposé en un écart
imputable aux quantités et un écart imputable aux prix unitaires.
Ce type de décomposition est possible chaque fois qu'un élément résulte du produit de
deux facteurs. Retenons les notations suivantes :
Pr : le prix de vente unitaire réel ;
Qr : les quantités réelles ;
Pp : le prix de vente unitaire prévu (ou préétabli) ;
Qp : les quantités prévues (ou préétablies) ;
L'écart global = Chiffre d'affaires réel – Chiffre d'affaires préétabli

L'écart global = CA réel – CA préétabli = (Qr x Pr) – (Qp x Pp)

La décomposition de l’écart global suit la même démarche que celle déjà vue au niveau des
écarts sur coûts.

Ecart sur quantités : E/Q = ΔQ.Pp = (Qr – Qp).Pp

Ecart sur prix : E/P = ΔP.Qr = (Pr – Pp) x Qr

Le calcul de ces écarts repose sur les trois conventions prévues par le plan comptable1.

Exercice d’application n°3

Les ventes de l'année N comparées à celles qui ont été prévues, pour les trois produits
commercialisés par une entreprise, sont données par le tableau ci-dessous.

1
Ces conventions sont : calcul de l'écart dans le sens : réel - préétabli ; valorisation de l'écart sur quantités
au prix prévu et calcul de l'écart sur prix pour les quantités réelles.

10
Prévisions Réalisations
Produits Ecart
Quantités P.U. Montant Quantités P.U. Montant
Produit A 10 000 40 400 000 11 000 42 462 000 +62 000
Produit B 8 000 60 480 000 7 500 62 465 000 -15 000
Produit C 5 000 90 450 000 3 000 90 270 000 -180 000
Total 1 330 000 1 197 000 -133 000

Pour le produit A

EG = 462 000 – 400 000 = + 62 000 Ecart favorable.


E/Q = (11 000 – 10 000) x 40 = + 40 000 Ecart favorable
E/P = (42 – 40) x 11 000 = + 22 000 Ecart favorable

Pour le produit B

EG = 465 000 – 480 000 = - 15 000 Ecart défavorable.


E/Q = (7 500 – 8 000) x 60 = - 30 000 Ecart défavorable
E/P = (62 – 60) x 7 500 = + 15 000 Ecart favorable

Limite de cette analyse

Il est néanmoins probable que les deux écarts (E/Q et E/P) ne sont pas indépendants. En effet,
c'est l'augmentation du prix qui aurait provoqué la baisse des quantités vendues (cas du
produit B).

Cette observation limite donc la pertinence de l'analyse de l’écart sur chiffre d’affaires et
justifie le recours à l’écart sur marge.

III.2. Analyse des écarts sur marge


Un contrôle budgétaire des ventes portant seulement sur le chiffre d'affaires est souvent
inadapté (inapproprié). La volonté d’augmenter le chiffre d’affaires peut inciter les
commerciaux à accorder aux clients des remises élevées. Par conséquent, le développement
des ventes se fera au détriment de la rentabilité.

Le suivi de la fonction commerciale doit prendre en considération l’effet de la variation des


ventes sur les marges réalisées. D’où l’intérêt de calculer l’écart sur marge.

Retenons :

Pr : le prix de vente unitaire réel ;


Pp : le prix de vente unitaire prévu (ou préétabli) ;
cp : le coût de production unitaire préétabli.

L'écart global sur marge se calcule de la manière suivante :

11
Ecart sur Marge = Marge totale réelle – Marge totale budgétée
Marge totale réelle = Marge unitaire réelle x Quantité réelle vendue = (Pr – cp).Qr
Marge totale budgétée = Marge unitaire prévue x Quantité prévue = (Pp – cp).Qp

Par conséquent, EG sur marge = [(Pr – cp).Qr] – [(Pp – cp).Qp]

Sous cette forme, l'écart sur marge est la différence entre une marge réelle et une marge
budgétée. Les coûts de production pris en référence dans les deux membres de la différence
sont des coûts unitaires budgétés (ou standards). En effet, la maîtrise des coûts de production
n’est pas du ressort des services commerciaux, et, dans un souci de localisation des
responsabilités, il est important que le transfert des produits de la production aux services
commerciaux s’effectue sur la base des coûts inscrits au budget.

L'écart sur marge peut être décomposé en deux sous écarts : un écart sur prix et un écart
sur quantité.
A. Ecart sur prix

E/P= (Marge unitaire réelle – Marge unitaire budgétée) x Quantité réelle

E/P = (Mr - Mp).Qr


= Mr.Qr – Mp.Qp
= [(Pr - Cp).Qr] – [(Pp – Cp).Qr]

B. Ecart sur quantité

E/Q= (Quantité réelle – Quantité budgétée) x Marge budgétée

E/Q = (Qr – Qp).Mp

Application n°4

Reprenons l'exemple précédent et supposons que les coûts préétablis de production soient les
suivants :

Produit Coût unitaire préétabli


Produit A 16
Produit B 24
Produit C 40

On peut alors calculer les marges par rapport à ces coûts préétablis tant au niveau des
prévisions que des réalisations.

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Prévisions Réalisations
Produits Marge Marge Ecart
Quantités Montant Quantités Montant
unitaire unitaire
Prod. A 10 000 24 240 000 11 000 26 286 000 + 46 000
Prod. B 8 000 36 288 000 7 500 38 285 000 - 3 000
Prod. C 5 000 50 250 000 3 000 50 150 000 - 100 000
(1) (2)
Total 23 000 33,8261 778 000 21 500 33,5349 721 000 - 57 000
(1) (2)
33,8261 = 778 000/23 000 33,5349 = 721 000/21 500

La comparaison des marges peut se faire de deux manières différentes : au niveau


global et au niveau de chaque produit.
1. Comparaison des marges réelles et prévues au niveau global

Ecart sur quantités : (21 500 – 23 000) x 33,8261 = - 50 739


Ecart sur marge unitaire : (33,5349 - 33,8261) x 21 500 = - 6 261
----------------
Ecart sur marge globale = - 57 000

L'écart sur marge unitaire négatif pourrait laisser entendre que l'entreprise n'a pas
suffisamment surveillé les prix de vente réellement appliqués (rabais ou remises excessives).
Pourtant, sur chacun des produits, les marges unitaires réelles sont supérieures ou égales à
celles prévues.

Si la marge moyenne est inférieure aux prévisions, c'est parce que la répartition des ventes
s'est modifiée entre les prévisions et les réalisations :
- Les prévisions ont été dépassées sur le produit à faible marge (produit A) ;
- En revanche, on est resté très en-deçà des prévisions sur le produit à forte marge
(produit C).

2. Comparaison des marges réelles et prévues au niveau de chaque produit


Produit A
Ecart sur marge = Mr - Mb = 286 000 – 240 000 = + 46 000 écart favorable

Ecart provenant des quantités : E/Q = (Qr – Qp).Mp

(11 000 – 10 000) x 24 = + 24 000 favorable

Ecart provenant des prix : E/P = (Mr – MP).Qr

(26 – 24) x 11 000 = + 22 000 favorable

Soit E/M = + 24 000 + 22 000 = + 46 000

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Produit B

Ecart sur marge = Mr - Mb = 285 000 – 288 000 = - 3 000 écart défavorable

Ecart provenant des quantités : E/Q = (Qr – Qp).Mp

(7 500 – 8 000) x 36 = - 18 000 défavorable

Ecart provenant des prix : E/P = (Mr – MP).Qr

(38 – 36) x 7 500 = + 15 000 favorable

Soit E/M = - 18 000 + 15 000 = - 3 000

Produit C

Ecart sur marge = Mr - Mb = 150 000 – 250 000 = - 100 000 défavorable

Ecart provenant des quantités : E/Q = (Qr – Qp).Mp


(3 000 – 5 000) x 50 = - 100 000 défavorable

Ecart provenant des prix : E/P = (Mr – MP).Qr

(50 – 50) x 3 000 = 0 écart neutre

Soit E/M = - 100 000 + 0 = - 100 000

Remarque :
L’interprétation de l’écart sur marge unitaire renvoie à l’interprétation de l’écart sur
prix au niveau de l’écart sur chiffre d’affaires. En effet, dans la mesure où la marge
unitaire se calcule par rapport au coût préétabli, la variation de la marge unitaire ne
peut s’expliquer que par la variation du prix de vente unitaire.
Illustration :

E/M = (Mr - Mp).Qr = [(Pr - Cp) - (Pp – Cp)].Qr


= (Pr - Cp - Pp + Cp).Qr
= (Pr - Cp - Pp + Cp).Qr
= (Pr - Pp).Qr
= E/P
En somme, dans une optique de contrôle de gestion, l'analyse de l'écart sur marge
apparaît plus pertinente que l’analyse de l’écart sur chiffre d’affaires dans la mesure où
elle pourra amener à orienter davantage l'action de la force de vente sur les produits à
plus forte valeur ajoutée.

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