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I.

La ville moderne et Le Corbusier

Le Corbusier (1887-1965) inspecte une maquette d’un immeuble à redents

A partir du milieu du 19ème, plusieurs essais


et tentative ont été lancé par des
ingénieurs et hygiénisme pour but de
contrôler la ville, son développement et
son évolution (Haussmann).

Par la suite, nous sommes toujours dans


une période d’industrialisation où l’on
retrouve le problème de la
promiscuité (situation qui oblige des
personnes à vivre côte à côte et à se mêler
malgré elles) entre les logements ouvriers
et les implantations industrielles. Une
promiscuité aussi mobile (voiture,
charrette, piéton, etc.).

Pour Le Corbusier, l’opération de Haussmann et la ville Haussmannienne (rénovation de paris lors du


19ème) devient un problème et non plus une solution. Le Corbusier appelle le boulevard
Haussmannien, une rue corridor où il observe le phénomène de congestion et promiscuité mobile.
Le but, pour le Corbusier et la période du mouvement moderne après la WWI, va être de finir avec
les rues corridors et développer des villes ouvertes.

Couverture de la publication Projet et Utopie de Manfredo Tafuri (post-moderniste), 1973

Manfredo Tafuri, penseur italien et néo-


marxiste, est le fondateur de l’université de
l’université de l’architecture de venise en 1968.

Dans cet ouvrage, il développe la thèse que la


crise de l’architecture des années 60’ et 70’ est
dû à l’inefficacité du mouvement moderne de
s’attaquer aux réels problèmes sociétaux. De ce
constat, il explique que ce sont des problèmes qui ne peuvent être
résolu uniquement avec des moyens architecturaux. Dans cet ouvrage, il
fait une distinction entre deux volets de l’avant-garde vis-à-vis de la
question de la ville (Großstadt). Le premier est la pensée utopique et
radicale de Le Corbusier puis le deuxième est la pensée pragmatique,
orientée vers la réalisation de Ernst May (Das neue Frankfurt).

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A. Le Corbusier : Première période

A.I – 1922, Une ville contemporaine, une ville pour 3 millions d’habitants

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Au sein d’une exposition d’art en 1922 au Salon d’Automne à Paris, il propose une ville
contemporaine. Une proposition d’une ville utopique pour 3 millions d’habitants. On peut voir
deux axes routiers principales qui mène à un aéroport au centre de Paris. Un aéroport qui est
entouré de 24 grattes ciels. Ces derniers, de grandes hauteur mais d’une faible empreinte aux sol,
combinent des commerces, bureaux et appartements. On retrouve deux autres typologies plus à
l’exterieur avec d’une part des immeubles à redents puis d’autres part des immeubles cellulaires.
Contrairement aux immeubles cellulaires, les immeubles à redents se détache de l’utilisation de la
route comme axe de circulation.

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Sur ces photos, on peut voir des immeubles cellulaires – des immeubles-villas – qui englobent les
qualités d’habitations que l’on peut trouver dans une villa avec les avantages que l’on peut trouver
dans des logements collectifs. Ils sont composés de cellules individuelles, des terrasses extérieurs, et
autres. La double hauteur que l’on peut voir sur l’axonométrie montre l’intention du Corbusier dans
ce projet à réduire un maximum l’emprise au sol pour chercher la hauteur des structures. Au final,
10% d’occupation au sol et 90 % de libre pour le vert, l’air libre, etc. Le Corbusier s’est intéressé à la
typologie de New York où il affirme que les gratte-ciels de Manhattan ne seraient pas assez haut,
dans le but de libérer l’espace résiduelle de la ville. Un plan plutôt académique qui n’est globalement
pas bien reçu principalement pour son côté fermé, càd à ne pas laisser la place à l’évolution de la
ville. La deuxième grande critique est le manque d’isotopie dans le plan, un plan considéré comme
trop hiérarchisé.

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A.II – 1925, Le plan Voisin pour Paris

C’est au Pavillon de l’Esprit Nouveau à l’Exposition des Arts Décoratifs de Paris en 1925 que Le
Corbusier présente à la fois le Plan Voisin ainsi que l’Esprit Nouveau. Voisin, constructeur automobile
de l’époque, financera le pavillon et bénéficiera du titre du plan du Corbusier. Similairement aux
projets précédents, on retrouve les immeubles-villas. Dans ce pavillon, il montre des meubles, tables,
peintures puis la présentation du Plan Voisin.

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Il réutilise le double axe central avec cette fois-ci 18 grattes ciels. Un plan monumental dans
lesquelles il va intégrer des immeubles à redents qui vont remplacer le tissu considéré comme trop
dense. Il coupe la vielle ville et la remplace avec de nouvelle construction. La seule chose que Le
Corbusier garde sont les grands axes et grands monuments historiques.

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B. Le Corbusier : Deuxième période

AA

BB

CC

DD

EE

FF

GG

HH

AA Villes satellites, par exemple : siège du gouvernement ou centre des études sociales
BB La cité d’affaires
CC La gare et Faérogure
DD Les hôtels et les ambassades
EE L'habitation
FF Les manufactures
GG Les entrepôts généraux
HH L'industrie lourde

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Le Corbusier présente La Ville Radieuse au Palais des Beaux-Arts
de Bruxelles lors du 3ième CIAM en 1930. Ce congrès
international de l’architecture moderne parle du lotissement
rationnel. Ce schéma est beaucoup plus radical que les
précédents car il divise la ville en différentes zones. On peut
voir sur la page précédente que la ville, sous forme linéaire,
peut se développer à l’infini. Une idée de ville linéaire que Le
Corbusier à volé à des urbanistes russes, notamment Leonidov
qui avait imaginé de remplacer la ville industrielle (Großstadt)
par une ville beaucoup plus égalitaire.

En plus d’être beaucoup plus égalitaire, elle serait beaucoup mieux organisée qui pouvait s’étendre à
l’infini. Le but essentiel de ces villes était d’être isotrope (pas de réel centre et périphérie où tout le
monde est à peu près à égale distances des divers services). On peut voir dans les habitations (EE)
qu’il n’y a plus d’immeubles cellulaires, remplacés par des plans à redents. Le but de ce plan est à
nouveau de libérer Paris de cette sur-densification tout en respectant le même nombre d’habitants
par hectares dans des espaces qui occupe moins de prise au sol. Un plan isotrope qui incorpore les
critiques des plans précédents

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. II – 1933, Plan pour la Rive Gauche d’Anvers - avec Paul Otlet Huib Hoste et Fo Loauet.

Le Corbusier va utiliser le plan de la Ville Radieuse et le projeter sur le plan pour la Rive Gauche
d’Anvers. On retrouve une division de divers espaces sans prendre en compte l’industrie qui se
développe le long de la rive. Il propose une cité des affaires, du logement et divers services. Il prévoit
un axe en direction de la cathédrale pour permettre aux bateaux de voir la ville d’Anvers depuis
l’eau.

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Un deuxième axe de tunnel est installé mais
comme ce dernier ne respecte pas
l’orthogonalité, il va créer des gratte-ciels non pas
en croix mais en Y qui reprenne ce désaxement
en compte. On retrouve également multiples
immeubles à rendent. Afin de libérer la prise au
sol et de favoriser la circulation, il va installer le
système de pilotis notamment sur les immeubles
à rendant. Finalement, le plan est également
isotrope. Au niveau du tissu urbain, il n’y a aucun
rapport entre la ville moyenâgeuse et le nouveau
plan du Corbusier. Néanmoins, il y a tout de
même une certaine adaptation au contexte à
travers les axes et d’autres éléments paysagers.

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C. Le Corbusier : Troisième période

C.I – 1931 à 1934, Plan Obus pour Algiers

En 1930, Alger était une ville constituée d’une superposition de trois systèmes urbains avec une ville
ottomane, une urbanisation française (similaire à Haussmann) puis une urbanisation spontanée
post-haussmannienne qui reflète une expansion urbaine. Corbusier prend ainsi pour tache de
répondre à la problématique de cette expansion urbaine. Il va laisser la ville ottomane intacte et va
faire trois interventions. Tout d’abord, il prévoit une cité des affaires aux cap d’Alger qui est reliée,
grâce à une grande parcelle, à une zone dans les hauteurs avec une séries de barres constitué
d’habitations et autres. Il prévoit finalement la jonction entre ces derniers et la ville ottonienne.

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Une des sources du Corbusier
pour ce projet était un projet
de ville linéaire en Californie
nommé « Roadtown » réalisé
par Chambless. Une
proposition pour la production
de vins où, dans un même
bâtiment, combinait la
circulation, la production et les
habitations des travailleurs.

La deuxième inspiration du Corbusier


dans ce projet est l’Usine Fiat
à Turin réalisé par Giacomo
Matté-Trucco en 1921. On
peut trouver sur la toiture de
cette usine, un circuit où était
essayée les voitures Fiat.

Manfredo Tafuri – page I

Penseur néo-marxiste italien, historien de l’architecture, qui dans


son ouvrage « Projet et Utopie » avait distinguer deux volets à
l’avant-garde, celle qui était plus utopique, radicale et l’autre
plus dirigé vers la réalisation, plus pragmatique. Pour Manfredo
Tafuri, le Plan Obus du Corbusier (utopique et radicale) était le
premier à avoir formuler une hypothèse qu’il considérait comme
quelque chose de presque valable.

« Le plan Obus est l'hypothèse la plus élevée de la culture


bourgeoise dans le champs de l'architecture et de l'urbanisme. »

Manfredo Tafuri de l’importance au projet du Corbusier pour différentes raisons

1. Niveaux d’échelle : D’après Tafuri, jusqu’à ce moment-là, la ville était considérée comme
quelque chose qui fonctionnait avec des niveaux d’échelles – la maison, l’ilot, le quartier, le
district et la ville. Pour Tafuri, le plan Obus rompt avec cette tradition en proposant un
bâtiment qui est à la fois maison et quartier, district, etc.

2. Plan Obus vs Ville traditionnelle dans sa structure : D’après Tafuri, jusqu’à ce moment-là, la
ville était considérée comme une extension d’un bourg où il fallait d’abord acquérir des
terrains puis urbaniser ces terrains. Une manière d’appréhender la ville comme une
urbanisation des terrains vierges. Une approche traditionnelle dont le plan Obus rompt
complètement. Ici, on créer une nouvelle structure et ville que l’on superpose à la ville
existante.

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3. Champs topolique pure : Lorsque l’on parle du cubisme, du futurisme, de l’élémentarisme, il
y a, dans ces courants de la peinture, l’invention d’une nouvelle spatialité, contraire à la
perspective centrale, où l’on retrouve l’interpénétration des éléments via l’introduction de
plusieurs perspectives. Cela mène peu à peu à une spatialité beaucoup moins hiérarchique et
ayant beaucoup plus de rapport entre les différents points du champ pictural. Lorsque l’on
parle du champs topolique pure, c’est l’idée d’une topologie où les rapports hiérarchiques
tendent à disparaitre et où une isotropie est recherchée.

4. Styllistique – jeux de lignes : Si au début des années 20’, Le Corbusier peint de manière
élémentariste, vers la fin des années 20’ et début des années 30’, on voit apparaitre des jeux
de lignes et courbes dans les peintures de Corbusier dont Charles Jencks décrit comme
l’apparition d’une rupture stylistique. L’explication serait que Le Corbusier cherchait une
nouvelle propriété de l’objet qui ne doit pas uniquement être fonctionnel mais qui doit
également plaire – la séduction, le jeu entre rationalité, etc.

Le Corbusier, Nature morte au Violon, 1920. Le Corbusier, Deux femmes nues, 1928.

Illustration de la publication Charles JENCKS, Le Corbusier and the Continul Revolution in Architecture, New York,
200.

5. Echelle de l’intervention – MEG : Le Plan Obus est une préfiguration des mégastructures
avec l’idée d’une mégastructure où l’on va par la suite insérer des éléments qui puissent
varier. Ces mégastructures ont surtout été développer dans les années 60’ et 70’, entre
autres au Japon. Le Plan Obus est en quelque sorte un précurseur de ces plans utopiques des
années 60’. Finalement pour Tafuri, le plan Obus est un hippothèse radicale qui est un point
final pour Le Corbusier. Ne pouvant aller plus loin dans une recherche isotopique, il devrait,
dès lors, devenir plus pragmatique.

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D. Le Corbusier : 4ème période

D.I – 1934, Plan de Nemours

On voit apparaitre pour la première fois, dans les plans de Le Corbusier, les unités d’habitations. S’il
n’est pas possible de construire une ville de toute pièce, Le Corbusier se rend compte qu’il est mieux
de couper la ville nouvelle et moderne en plusieurs morceaux, en plusieurs unités d’habitations,
productions et loisirs. Une infrastructure qui permet de réaliser bâtiment par bâtiment et zone par
zone. En conséquent nous sommes moins liées à une vision totale de la chose et on peut procéder de
manière pragmatique.

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D.II – 1945, Projet de reconstruction de La Rochelle

Conclusions : Le Corbusier et l’urbanisme moderne

1. Le boulevard Haussmannien est totalement abandonné, la rue devient que fonctionnelle.

2. Décomposition du tissu urbain

3. Métaphore de la ville mécanique > enchainement de connections mécaniques. C’est le passage


de la métaphore du tissu urbain comme organique à la considération de la ville comme
mécanique – horlogerie.

4. La ville zonée – décomposition en zone d’habitation, zones des loisires, zones industrielles, etc.

5. Rapport à la ville existante

- Tabula rasa : on rase la ville et on reconstruit

- Développement suburbain : développement sur des terrains qui sont restés vierge (plan
Nemours ou La Rochelle)

- Super-imposition d’un nouveau système (plan Obus)

6. Décontextualisation comme idéal à poursuivre. Le Corbusier va tenter de décontextualiser et


d’enlever les paramètres contextuels pour arriver à mettre en place une ville dont les qualités
sont maitrisables et maitrisées. Des qualités similaires à chaque endroit, pour toutes et pour
tous. Cette isotropie devient une obsession de l’avant-garde, à la recherche d’une ville plus
égalitaire qui amène à une décontextualisation comme idéal à poursuivre.

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Le Corbusier ne va jamais réaliser des villes, ni des bouts de villes mais une série d’unité
d’habitations. A Marseille de 1947 à 1952, à Nantes-Rez é en 1955, à Berlin-Westend en 1957, à Briey
en 1963 puis à Firminy en 1965.

Le Corbusier mettait en place toute une autre série de métaphore, dont la cité jardin verticale.

Il y a aussi la métaphore des portes bouteilles où les appartements sont dans cette superstructure.

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Des appartements à double hauteurs, toujours avec ce jeu de compression et dilatation.

A droite, le Cloitre des Chartreux à Ema dont Le Corbusier s’en réfère pour le rapport entre
collectivité et cellules individuelles. A gauche puis en dessous, une structure à Moscow dont le
Corbusier s’en inspire pour mettre en place ces habitations en L. Il y a également la programmation
de ce lieu qui inspire Le Corbusier.

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Une autre métaphore, celle du paquebot. Si une société est capable de construire un paquebot où
toute une communauté puisse y vivre plusieurs semaines et plusieurs mois alors l’architecture peut
aussi suivre cette logique de construction.

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